1 Islam et le christianisme en Afrique sub-saharienne aujourd’hui Chapitre I : L’islam en tant que religion dans son parcours historique et sa pénétration en Afrique subsaharien I.1- Naissance et parcours historique de l’islam I.2-Les débuts de l’Islam en Afrique noire. I.3 Les voies de pénétration. I.4 La stratégie de la conquête de l’Afrique subsaharienne. I.5 L’esclavage, premier facteur d’islamisation de l’Afrique noire. I.6 La tradition. I.7 La politique. Chapitre II : tensions qui font la vie des croyants africains dans leur effort de conversion, d’adhésion au message coranique, II. 1 le mariage précaire entre le monothéisme du désert et l’animisme noir. II.2 Un mariage à travers le commerce d’esclave : II.3 L’héritage maraboutique : II. 4 Mariage Foi et cultures : des caractéristiques communs II.5 Confréries Chapitre III Le christianisme en Afrique II.1 Quatre phases de pénétrations II.2 Caractères et méthodes de la christianisation Les missionnaires Les “récipiendaires” Les circonstances générales et la résistance des autres traditions religieuses. a) Les traites négrières en Afrique: b) L’inculturation c) La langue comme moyen d’évangélisation Chapitre IV Rapport musulman et chrétien dans l’Afrique subsaharien La pluralisation de l’Afrique par le religieux Chapitre V Une coexistence possible: tension et perspectives V.1 Que veut dire dialogue? V.2 Une coexistence possible à partir de la notion de le famille africaine V.3 Une coexistence possible à partir des fondements biblique et coraniques V.4 Une coexistence possible à partir de la notion de la cotoyenneté Conclusion général
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Islam et le christianisme en Afrique sub-saharienne aujourd’hui
Chapitre I : L’islam en tant que religion dans son parcours historique et sa
pénétration en Afrique subsaharien
I.1- Naissance et parcours historique de l’islam
I.2-Les débuts de l’Islam en Afrique noire.
I.3 Les voies de pénétration.
I.4 La stratégie de la conquête de l’Afrique subsaharienne.
I.5 L’esclavage, premier facteur d’islamisation de l’Afrique noire.
I.6 La tradition.
I.7 La politique.
Chapitre II : tensions qui font la vie des croyants africains dans leur
effort de conversion, d’adhésion au message coranique,
II. 1 le mariage précaire entre le monothéisme du désert et l’animisme noir.
II.2 Un mariage à travers le commerce d’esclave :
II.3 L’héritage maraboutique :
II. 4 Mariage Foi et cultures : des caractéristiques communs
II.5 Confréries
Chapitre III Le christianisme en Afrique
II.1 Quatre phases de pénétrations
II.2 Caractères et méthodes de la christianisation
Les missionnaires
Les “récipiendaires”
Les circonstances générales et la résistance des autres traditions religieuses.
a) Les traites négrières en Afrique: b) L’inculturation c) La langue comme moyen d’évangélisation
Chapitre IV Rapport musulman et chrétien dans l’Afrique
subsaharien
La pluralisation de l’Afrique par le religieux
Chapitre V Une coexistence possible: tension et perspectives V.1 Que veut dire dialogue?
V.2 Une coexistence possible à partir de la notion de le famille africaine
V.3 Une coexistence possible à partir des fondements biblique et coraniques
V.4 Une coexistence possible à partir de la notion de la cotoyenneté
Conclusion général
2
Introduction générale.
Le 15 Novembre 1884, les grandes puissances mondiales se retrouvent à Berlin pour
organiser le partage de l’Afrique. Cet événement fixa définitivement le début de la colonisation de
l’Afrique jusqu'à son indépendance théorique qui pour la plupart de ces pays a commencé vers les
années 1960. Si d’une part l’indépendance un est fait ressent Afrique, d’autre part, les religions en
particuliers l’islam et le christianisme avaient déjà précédés l’indépendance et ont fortement marqué
la religiosité africaine. Selon une étude du ʺcentre d'études américain Pew Research Centerʺ,
L'Afrique subsaharienne est une des parties du monde les "plus religieuses", où le nombre de
musulmans comme de chrétiens s'est multiplié par plus de 20 au cours du siècle dernier1,
Pendant que l’Europe se donne le temps d’organiser sa présence en Afrique, le monde
Islamique venu de l’orient parle en termes de conquête, Djihad et islamisation de l’Afrique qui
«(…) occupe une place particulière dans l’histoire de L’Islam. Elle vient aussitôt après l’Asie pour
le nombre2 des musulmans qui y vivent »3.
L’Islam est la deuxième religion du monde, considérant le nombre de fidèles, même si 62% d’entre
eux vivent en Asie. Actuellement les Musulmans sont présents sur les cinq continents. Il est donc
important de connaître l’Islam, dans sa nature et dans son développement historique, et voir
comment il se situe face au Christianisme et aux autres religions4. La réalité islamique en Afrique
précède bien la colonisation et a marqué son histoire tant du point de vue politique, traditionnel que
religieux.
Notre présentation ici ne devrait surtout pas avoir la prétention de parler de l’islam ou de la foi
musulmane comme une idée abstraite, un objet extérieur. En même temps on ne peut pas prétendre
parler de cet autre si ce n’est que lui-même qui peut en dire ce qu’il est, ce qu’il dit et ce qu’il fait.
Cependant dans l’optique de la connaissance réciproque un musulman peut très bien entreprendre la
recherche dans le sens inverse. Ce serait d’ailleurs à souhaiter, pour un dialogue plus pénétrant pour
mieux définir nos terrains d’échanges. En plus le dialogue entre musulman et chrétien a toujours
marqué la vie du prophète de l’islam depuis la Mecque jusqu'à Médine dès la naissance de l’islam.
Désormais, dans la conscience collective de nos leaders religieux jusqu’aux croyants ordinaires
l’impératif de vivre ensemble s’impose. Le Concile Vatican II à travers des encycliques et des
déclarations à invité les chrétiens au dialogue de vérité avec les autres religions. L’université Al
Hazar qui représente une des institutions majeures de l’islam ayant une autorité morale importante a
publié récemment publié des déclarations sur la nécessité de la cohabitation entre les musulmans et
les chrétiens. A titre d’exemple c’est en parlant de l’autre que les musulmans et les chrétiens du
Liban sont arrivés à un commun accord d’avoir la fête du 25 Mars, fête de l’annonciation comme
une fête nationale.
- Dans un premier temps, on s’attardera à présenter l’islam en tant que religion dans son
parcours historique et sa pénétration en Afrique subsaharienne. Cette analyse s’avère
fondamentale pour la suite de l’exposé car nous ne pourront jamais saisir la pensée
religieuse musulmane en dehors de son histoire fondatrice.
- Dans un deuxième moment on se focalisera sur l’analyse des tensions qui font la vie des
croyants africains dans leur effort de conversion, d’adhésion au message coranique,
dans leur effort pour garder cet héritage religieux et le faire prospérer. On approfondira
davantage les relations entre les tenants de la pureté islamique et les fervents jaloux des
traditions africaines, entre les militants de la modernité et les dévots de l’archaïsme5.
- Un troisième moment sera consacré à une lecture brève de la pénétration du christianisme et
de la pluralisation de l’Afrique par le religieux. Ce chapitre nous permettra de saisir la
problématique du dialogue interreligieux et de la cohabitation pacifique dont le second
conférencier en développera davantage.
- Un dernier moment sera dédié aux tensions et aux menaces fondamentalistes qui guettent
l’islam en Afrique subsaharienne et présenter les perspectives d’avenir dans la ligne de la
cohabitation pacifique entre les religions et la culture negro africaine.
5 René Luc Moreau, Africains musulmans, Présence africaine, 1982, p. 7
4
Chapitre I : L’islam en tant que religion dans son parcours historique et sa
pénétration en Afrique subsaharien
Introduction
La réalité islamique en Afrique précède bien la colonisation et a marqué son histoire tant sur le
point politique, traditionnel que religieux. L’analyse de René Luc Moreau a montré qu’à l’époque
coloniale, on a eu souvent tendance à présenter la vie musulmane africaine comme figée. On a parlé
« d’islam noir », comme si cet islam n’était pas authentique, comme s’il s’agit d’un fait
sociologique pittoresque. On en reconnaissait la force sociale, mais on percevait celle-ci comme
malléable. Cependant après 20 ans et plus d’indépendance politique, le regard porté sur ces
communautés s’est modifié. C’est pourquoi René refuse de prendre position face à l’expression
« islam africain » qui heurte à juste titre nombre de musulmans. Car les variations de cet islam sont
très amples entre l’Est et l’Ouest du continent noir, accompagné par des multiples nuances
traditionnelles et modernes6. Notre parcours ici partira de la naissance de l’islam, son parcours
historique pour arriver à sa pénétration en Afrique subsaharienne.
I.1- Naissance et parcours historique de l’islam
Avant d’abord l’islam en Afrique subsaharienne il serait bien de présenter l’histoire de l’islam
subdivisée en trois grandes périodes :
-Le premier parcours historique de l’islam part de la naissance du prophète jusqu’à sa mort.
-Le deuxième parcours, fut le temps des quatre premiers califes appelés les califes bien guidés
-Le troisième parcours est la succession des dynasties et des empires au sein de l’islam jusqu'à
l’abolition totale des califats après la chute de l’empire ottoman.
De la naissance à la mort du prophète
571 : année de l’éléphant, naissance de Mouhammad (SAW) à La Mecque, de Amina et de
Abdallah ibnou Abd al Moutalib
595 : Mouhammad épouse Khadija, qu’Allah l’agrée
6 Ibid., p. 6
5
610 : première Révélation Coranique, 26 Ramadhan, dans la grotte de Hira, près de La Mecque. La
révélation continuera pendant 22 ans. (23 selon certaines sources)
612 : début de la prédication de Mouhammad à la Mecque, où les tribus arabes venaient adorer 360
idoles dans la Ka’ba et des divinités païennes : Alat, Houbal, Azat, Manat…
615 : Abyssinie (actuelle Éthiopie) : Le Négus reçoit favorablement les émissaires du Prophète
dirigés par Djaffar Ibnou Abi Talib
619 : Al Isra oul Mi’raj, Ascension et Voyage Nocturne du Prophète de La Mecque à la Mosquée
éloignée de Jérusalem. Décès de Khadija, son épouse
622 : Al Hijra, émigration du Prophète vers la ville de Yathrib, qui deviendra ’ Madina tourraçoul ’
ou Médine (la ville de l’Envoyé). Le Calife Oumar ibnoul Khattab, qu’Allah l’agrée, instituera cette
année comme point de départ du calendrier musulman.
624 : victoire de Badr sur les Mecquois dirigés par Abou Soufiane ; Allah ordonne le changement
de Qibla (la prière est dirigée vers La Mecque et non plus vers Jérusalem) et fixation du jeûne du
mois de Ramadhan.
625 : bataille de Ohod, an 3 de l’Hégire ou le Prophète fut blessé et son oncle Hamza, tué. Les
musulmans fléchissent et furent désemparés pour avoir désobéi au Prophète.
627 : bataille du Fossé (Al Khandaq ) avec les Mecquois. Stratagème de Salman Al farissi qui sauve
Médine. Défaite des Banou Qoreidha, alliés des Mecquois.
628 : convention entre les musulmans et les Mecquois à Houdeibya : trêve de dix ans avec garantie
de sécurité réciproque et promesse de laisser les musulmans faire le Hadj (Pèlerinage Canonique)
l’année suivante, après évacuation de La Mecque pendant trois jours. Grand succès diplomatique du
Prophète.
628 : le Prophète(SAW) reçoit une délégation d’évêques chrétiens nestoriens ( qui considèrent deux
personnes en Jésus – Christ : Divine et Humaine ) Les Nestoriens sont alors en Arabie, en Perse et
en Irak. Malgré des divergences théologiques, le Prophète leur permet de célébrer la messe des
’ Rameaux ’ dans une partie de sa mosquée à Médine.
629 : deux mille musulmans font le Hadj à la Mecque (an 7 de l’Hégire), en compensation du
Pèlerinage manqué de 628 selon les accords de Houdeibya.
6
630 : reddition de La Mecque aux musulmans sans combat. Après violation du traité de Houdeibya
par les Qoraichites, Mouhammad entre triomphalement et pacifiquement à La Mecque et pardonne
à tous ses adversaires y compris Abou Soufiane.
631 : pèlerinage et Sermon de l’Adieu. A son retour à Médine, le Prophète dit à Khoumm : ’ Pour
quiconque je suis un ami, Ali est mon ami : Ô Dieu soit ami de celui dont il est l’ami et l’ennemi de
celui dont il est l’ennemi. ’
632 : mort du Prophète, le 8 juin, trois mois après cet unique Pèlerinage, sans laisser d’héritier mâle,
ni de successeur désigné. Abou Bakr, qu’Allah l’agrée, est élu Calife (Khalifa), selon la
concertation. Durant son Khalifat, l’islam se stabilise en Arabie et amorce la conquête de la Syrie et
de la Perse. Abou Bakr décédera en 624.
Le temps des quatre premiers califats : l’événement après la mort du prophète
C’est par un lundi de juin 632 que prend corps la discorde. L’été brule l’air a Médine, dans la
chambre de son épouse préférée, Aicha, Mahomet agonise. Peu avant midi, rapporte Tabbari, le
plus fameux chroniqueur : « il ouvrit la bouche, la referma, et son âme s’envola7». Le prophète
(qpssl) avait 63 ans il était bien fatigué et avait beaucoup donné ! Il avait traversé tellement
d'épreuves: il avait été orphelin, il avait perdu son père, sa mère, son grand-père, son oncle qui le
protégeait, 7 de ses enfants étaient morts (4 filles et 3 garçons), Les persécutions et les guerres ont
surement eu un impact négatif sur sa vie physique. Le corps du prophète n’était pas encore lavé que
déjà la dissension. Entre sa mort et son ensevelissement, trois jours vont s’écouler, un laps de temps
énorme, inhabituel en terre orientale où compte tenu du climat on enterre le lendemain du décès.
Martine Gonzlan estime que le grand problème qui allait diviser l’islam s’annonce dans ce moment
de deuil. Pas un verset tombé du ciel d’Allah pour instruire les orphelins croyants sur leur futur et
sur les leaders du nouveau groupe à peine formé à Médine. Seulement des allusions, de vagues
confidences murmurées par le prophète dans la semaine qui ont précédé sa fin semble être dit8.
Cependant nous ne trouvons aucune trace historique, bien que, certains hadiths de shiia en font
mention. Cette absence apparente d’un leader après la mort du prophète fut une des raisons
fondamentales qui a donné lieu à des interprétations diverses conduisant au grand schisme dans
l’islam naissante. Abou Bakar est le principal candidat des notables de la cité natale. Il ne veut pas
entendre parler de la nomination d’Ali, d’un successeur par le sang. Les voix tonnent et les menaces
sifflent. Affrontement, tractations, achats d’alliances se succèdent rapidement dans les alentours
formant des groupes et des appartenances. Abou Bakar prononce son discours d’intronisation en 7 Martine Gozlan, sunnites, chiites, pourquoi ils s’entretuent, Éditions du Seuil, 27, rue jacob paris, 2008, p. 19
8 Ibid., p. 21
7
endossant l’habit du successeur. I fallait aller vite pour éviter le risque que l’islam devienne une
foire aux marchandages et une fragmentation des tribus.
On trouve ainsi du coté d’Abou Bakar, le pouvoir et ses stratégies de conquête (il est homme riche
et serait marié à une fille de la Médine, ce qui lui vaut une position meilleur que Ali). Du coté d’Ali,
l’émotion pure, l’intime, la douleur nue. Deux concepts de l’islam sont en train de surgir9. Du coté
d’Ali, la proximité avec la mort, le deuil absolu, le partage de l’affliction, le dégoût des luttes pour
le pouvoir temporel. Voila fixée à jamais la sensibilité de ceux qui prendront son parti, les shia, les
« partisans », ce qui s’entendra toujours, par extension, comme les partisans d’Ali, les chiites. Du
coté d’Abou Bakr, le pragmatisme froid, l’autorité sans partage, la volonté implacable de structurer
une majorité. Voila fixé le choix de ceux qui, à sa suite, organiseront la domination de l’islam, les
sunnites.
634 : Omar Ibnoul Khattab, deuxième Calife de l’islam (mort en 644). Désigné par Abou Bakr, il
est l’artisan de l’expansion musulmane.
636 : conquête de la Syrie. Bataille de Yarmouq : victoire de Khalid Ibnou Walid sur les Byzantins.
Mou’awia est gouverneur de la Syrie.
637 : Khalid Ibnou Walid, vainqueur des Perses à Qad issia.
638 : prise de Jérusalem (Al Qods, La Sainte) par Omar, qu’il n’occupe que partiellement. Il refuse
de prier dans l’Église de la Nativité pour ne pas en faire une tradition.
642 : conquête de l’Égypte (Misr) par Amr Ibnoul Aç. Prise d’Alexandrie par les musulmans et
conquête de la Perse.
644 : khalifat de Othman ibnou Affan, qu’Allah l’agrée. Compilation définitive, sous forme de
livre, du Coran.
656 : khalifat d’Ali ibnou Abi Talib. Il quitte Médine pour Bassora (Basra) en Irak. L’élection
régulière de ces quatre Califes les désigne sous le terme : ’ Khoulafa rachidoune ’, les Califes bien
guidés.
657 : bataille de Siffine entre Ali et Mou’awia. Ali sous la pression d’une partie de ses compagnons
accepte l’arbitrage de Abou Moussa et de Amr ibnoul Aç. Une autre partie rejette cet arbitrage : les
Kharijites (khawaridjes) qui assassinent Ali.
9 Ibid., p. 27
8
La succession des dynasties et des empires au sein de l’islam (voir le tableau)
I.2-Les débuts de l’Islam en Afrique noire.
Dans la vaste péninsule Ouest de l’Arabie Centrale naquit la religion islamique au début du VII
siècle. Dix ans après la mort du fondateur en 632 la nouvelle religion identifiée désormais à la
culture arabe commença son expansion dans les régions environnantes et plus tard dans les contrées
lointaines.
Les sources documentaires que nous avons consulté signalent qu’avant même l’arrivée de l’Islam,
les arabes voyageaient sur les cotes Est de l’Afrique, de l’autre coté de la mer Rouge et sur les rives
de la corne de l’Afrique, sans doute plus au sud également : il s’agissait de comptoirs pour le
commerce et la traite des esclaves. Les arabes (ou bien plus les musulmans arabes) ont commencé à
extraire des millions de noirs esclaves africains depuis des siècles avant que les nations chrétiennes
occidentales en fassent un commerce de droit. Les marchands d'esclaves arabes enlevaient des
esclaves d'Afrique pendant environ 13 siècles, par rapport à trois siècles de la traite négrière
atlantique.
« La mer rouge qui sépare la péninsule arabique du continent africain, n’a jamais constitué
une vraie frontière. Bien avant la naissance de Mohamed, l’Ethiopie et les royaumes d’Arabie
du sud essayaient avec un succès changeant, d’imposer leur domination les uns sur les autres.
La tradition la plus ancienne nous rapporte qu’aux moments les plus critiques pour
Mohamed et sa jeune communauté de la Mecque, un bon nombre de disciples furent recueillis
par le Negus d’Ethiopie et traités avec bienveillance »10
.
Cette précision permet de démasquer la présence arabe en Afrique noire pour des intérêts
commerciaux ou de transhumance (à la recherche du pâturage) et de rapport de convivialité avec la
population autochtone. Ce constat s’avère encore d’actualité avec le phénomène de migration des
éleveurs d’une part et de sédentarisation des agriculteurs d’autre part.
L’islam qui naitra plus tard comme religion intrinsèquement lié au monde arabe viendra donner une
couleur religieuse à ce rapport ʺd’intérêt préexistantˮ entre le monde arabe et l’Afrique noire. Il
s’agissait surtout de navigateurs et de commerçants qui avaient vraisemblablement commencé leurs
entreprises avant l’avènement de l’islam. Ils créaient des comptoirs, sans chercher à s’assimiler aux
populations locales et sans faire de prosélytisme religieux11. Cette connexion de la religion à la
culture arabe sera désormais la clé d’interprétation des relations tant sur le plan commercial que
culturel avec l’Afrique noire. Au fait, la plupart des historiens s’accordent à affirmer l’existence des
10 Josef stamer, L’islam en Afrique au sud du sahara, VERBO DIVINO, 1995, p.13 11
René Luc Moreau, po. cit, 1982, p. 49
9
quartiers occupés par ces arabes très tôt dans les villes du Ghana d’alors. C’est ainsi qu’on notait
leur présence en Afrique noire.
«L’islamisation de certains centres à l’intérieur du continent fut bien plus tardive et
directement liée au commerce de l’ivoire et des esclaves. A partir du XVIII siècle, ce
commerce florissant donna à Zanzibar une position de leadership sur toute la région. On sait
qu’en 1852, il y avait une colonie de musulmans à la cour du Kabaka, le roi des Baganda»12
.
Beaucoup d’indices historiques nous laissent comprendre que l’Afrique subsaharienne était vue par
l’Islam comme un terrain propice pour son expansion après l’Asie, car l’Égypte fut conquise moins
de dix ans après la mort de Mohamed. Cette conquête donna une grande espérance à la nouvelle
religion dans sa volonté de conquête vers le sud.
I.3 Les voies de pénétration.
Il y a une grande différence de pénétration de l’islam dans l’Afrique du Nord par rapport à
l’Afrique saharienne. Après la conquête des cités prestigieuses du Proche-Orient, Damas en 636,
Jérusalem en 638 et Alexandrie en 642, la voie semble ouverte vers l’Afrique sub-saharienne. Le
Nord de l’Afrique fut pris tout de suite à cause de la facilité du désert et du voisinage avec le monde
arabe. On se demande pourquoi cette pénétration vers le cœur de l’Afrique se fait rapidement
malgré quelques résistances des tribus Nubiennes. Qu’est ce qui à favorisé cette pénétration et le
chemin emprunté par les musulmans?
La majorité des historiens s’accordent sur trois voies par lesquelles l’islam a pénétré en
Afrique noire. Ces trois voies ouvrirent définitivement la route pour l’islam vers le centre de
l’Afrique. Comme toute pénétration ou conquête celle-ci a aussi rencontré l’hostilité dans ses
premières heures vers l’Afrique Noire. Ces voies il faut le dire on servit d’abord dans un premiers
temps pour des intérêts commerciaux, avec la naissance de la nouvelle religion, les arabes convertis
à l’islam vont associer à leur commerce, l’islamisation.
« L’islam a pénétré l’Afrique des savanes par trois voies opposées: dès l’an 640. Il
tenta de progresser par la vallée du Nil, mais se heurta tout de suite aux États chrétiens
devant lesquels il piétina pendant près de neuf cent ans. A l’Ouest, la prédication des
nomades sahariens fut relayée par les Noirs eux-mêmes qui se passèrent le flambeau en
progressant vers l’est. Au centre, l’islam arabe réussit dès le Xème siècle en direction
du Tchad »13
.
12 P. Josef Stamer, p.15 13
J.C. Froelich, Les musulmans d’Afrique Noire. P. 17
10
La première possibilité de pénétration fut celle de la cote orientale de l’Afrique qui déjà
géographiquement donnait une grande facilité de passage entre le monde de l’Arabie Saoudite et
l’Afrique grâce à la Mer rouge. En effet cette Mer rouge qui sépare la péninsule arabique du
continent africain n’a jamais constitué une vraie frontière, car bien avant la naissance de
Mohammed, l’Éthiopie et le royaume d’Arabie du sud essayaient, avec un succès changeant,
d’imposer leur domination les uns aux autres14.On se souvient qu’au moment de la persécution de la
jeune communauté musulmane naissante de la Mecque, il eut une tentative d’assassinat des
disciples de Mohamed pas les Mecquois. Devant cette hostilité le prophète obligea ses disciples à
s’enfuirent en Éthiopie à travers cette voie de la cote de l’Afrique orientale déjà connu par les
arabes. Quand les arabes ou les musulmans parlent de la cote orientale de l’Afrique, la grande
référence est faite à l’activité commerciale qui liait ces deux cotes. Son islamisation proprement dite
n’était pas la priorité pour les premiers musulmans venus. Cependant l’islam était une occasion
propice pour augmenter les intérêts commerciaux. L’hypothèse qu’il y ait eu de conflits majeurs
entre les autochtones et les arabo-musulmans présents sur la côte est à écarter.
« …ils ne cherchaient pas à étendre leur influence sur les populations bantoues de
l’intérieur en essayant de convertir leur rois ou leur chefs. Le seul fruit de cette longue
cohabitation entre musulmans arabes et animistes bantous fut la langue swahili, langue
à structure bantoue avec un vocabulaire emprunté en grande partie à l’arabe »15
.
Malgré la lenteur d’islamisation de cette cote, il faut bien noter que l’islam dans cette partie de
l’Afrique fut portée vers les pays du centre par les africains de la cote, convertis à l’islam. Cette
propagation prit alors une autre couleur de l’islam qu’on pourra qualifier véritablement de l’islam
africain. Une sorte de syncrétisme entre la nouvelle religion et les religions africaines se
rencontrent et se mêlent formant un islam particulier dans un contexte africain. On ne peut pas
parler de résistance comme dans le cas des tribus Nubiennes, mais plutôt une conversion radicale à
l’islam. Ceux qui avaient accueilli l’islam sur ces cotes n’avaient aucune envie de quitter leur
pratique traditionnelle. L’islam venait renforcer le pouvoir des chefs traditionnelles et garantissait
une obéissance aveugle à la hiérarchie de la communauté traditionnelle.
La deuxième voie de pénétration de l’islam au sud du Sahara est intrinsèquement liée à la
conquête de l’Égypte par les musulmans en 641. Profitant de la discorde entre L’église Byzantine et
l’église copte orthodoxe d’Égypte. L’islam pénétra en Égypte avec une grande facilité. En effet une
bonne partie de l’Afrique du Nord avait été sous le joug très dur de Byzance, ce qui poussait les
14
P. Josef Stamer, L’Islam en Afrique au sud du Sahara. p.13 15
Ibid. p.15
11
chrétiens à accueillir les arabes en libérateurs. L’islamisation de l’Afrique du nord ne rencontra pas
de résistance dans un premier temps. Cependant dans sa progression vers le sud nubien et le soudan,
l’islam rencontra une farouche résistance des tribus habitant le long du Nil. La décadence de ces
royaumes ouvrit grandement la porte à l’islam vers le centre de l’Afrique en passant par le soudan
ensuite le Tchad.
« La chute des royaumes chrétiens de Nubie coïncida avec une nouvelle vague
d’invasions de tribus arabes couvrant l’Afrique, d’est en ouest. Une infiltration de plus
en plus massive d’éléments arabes, non seulement accéléra l’islamisation, mais fut à
l’origine de l’arabisation complète de ces régions »16
.
C’est le long du Nil, au sud de la première cataracte et jusqu’au delà du confluent du Nil blanc
et du Nil bleu que s’étendaient les trois royaumes chrétiens de Nubie ont fortement résisté à l’islam
il s’agit de: Nobatia, Makurria et Alwa. Cette résistance se conclut par un traité qui donna la voix de
la pénétration en profondeur vers le sud. Il s’agit du traité de Bakt en 65117. Ce traité fut signé
lorsque le général arabe Abdallah ben Sayd impose aux chrétiens de Nubie (les habitants de la
vallée supérieure du Nil) la livraison de 360 esclaves par an. La convention, très formelle, se traduit
par ce traité (bakht) entre l'émir et le roi de Nubie Khalidurat. Par ce même traité on reconnaissait
aussi la liberté de la pratique de la religion chrétienne moyennant la livraison des esclaves. En effet
ce fameux traité ne faisait que confirmer une pratique déjà présente chez les Touaregs, qui est la
branche méridionale de la grande famille berbère. Ce peuple assurait déjà la sécurité des routes
caravanières et servait de guide aux commerçants d’Afrique du Nord attirés par les richesses
fabuleuses en or des régions au-delà du grand désert. Si d’un coté les intérêts commerciaux avaient
prit de la valeur par cette voies, de l’autre coté les conversions à l’islam au sud du Sahara ne
suivaient aucun critère commun mais plutôt des idéologies des leaders musulmans.
« En effet, si les Berbères furent progressivement, et non sans difficultés, soumis à la
domination musulmane, ils adoptèrent d’abord la foi musulmane sous une forme
schismatique »18
.
De tout point de vue la pénétration de l’islam par le Nil est celle qui a ouvert les portes aux
différents mouvements islamiques radicaux vers l’Afrique sub-saharienne. Ces mouvements
radicaux sous le nom de la Mahdi vont essayer de rendre pur l’islam en le débarrassant du
syncrétisme crée par les confréries de tendances soufistes.
16
Ibid., 12-13 17
Ibid., 13 18
Ibid., p. 16
12
La troisième voie de la pénétration de l’islam en Afrique noire n’est pas très différente de
la deuxième que nous venons d’analyser. L’islam qui a envahi le nord de l’Afrique a trouvé deux
chemins vers le sud. La première par le Nil bleu. La deuxième est celle qui a longé les cotes de
l’Océan Atlantique. En effet la voie par l’Ouest était déjà ouverte par les commerçants et surtout
par les missionnaires Portugais qui l’empruntaient pour l’évangélisation et le commerce en Afrique.
Les arabes et les musulmans les ont suivit avec le temps sans grand enthousiasme pour diffuser
l’islam.
« A l’Ouest, l’islam a pénétré le monde noir par le Sénégal et l’Aïr, il a assuré
quelques frêles liaison caravanières avec le monde arabe. Progressant d’Ouest en est,
il est parvenu au Tchad au XIX siècle ou il a rencontré l’islam arabe, qui de son coté,
avait péniblement progressé le long de la vallée du Nil et à travers les savanes du
soudan »19
.
Cette troisième voie fut probablement celle de l’islam soufi qui avait donné une marque et une
couleur spécifique à l’Islam africain. Moins violent dans sa progression l’islam soufi avait une
facilité de pénétrer les cultures africaines et d’avancer vers le cœur de L’Afrique. A titre d’exemple
le cas de l’islam au Sénégal souligne avec clarté cette connotation souffiste.
« L’islam sénégalais est d’abord un islam ethnique. Chaque ethnique le vit selon sa
tradition, même si l’élément wolof prédomine. Le passage à l’islam des ressortissants
d’ethnie minoritaires, suite à l’urbanisation, comporte toujours une certaine
wolofisation »20
.
Cette caractéristique soufi va être vite imprégner la culture africaine pendant longtemps avant la
venue d’un islam fondamentaliste qui cherchera par la violence à faire un nettoyage du soufisme en
Afrique sub-saharienne.
I.4 La stratégie de la conquête de l’Afrique subsaharienne.
Pourquoi cette nouvelle religion a-t-elle trouvé facilement sa place dans une Afrique qui
avait déjà une culture ancestrale et une croyance religieuse diversifiée ? Quelle fut la stratégie de
l’islam en Afrique noire ? Nous savons bien que dans l’Afrique saharienne et dans d’autres
contrées, l’islam s’imposa par la conquête, la guerre. C’était l’islamisation par force sous peine de
mort ou d’expulsion. C‘est ainsi que beaucoup des tribus du nord eurent à se soumettre à l’islam
19
J.C. Froelich, Les musulmans d’Afrique Noire. 21 20
P. Josef Stamer, L’Islam en Afrique au sud du Sahara. P. 84
13
pour sauver leur territoire leur ethnie et éviter d’être contraint à l’expulsion, tel fut le cas des juifs
vivants à Médine qui refusèrent dans un premier temps d’embrasser l’Islam. Lors d’une bataille
Mohamed ordonna de les faire décapiter. Selon Jacques Jomier «il existe des atlas historiques
dans lesquels des cartes indiquent les principales poussées de l’expansion musulmane, les unes
militaires, les autres pacifiques, menées par le prosélytisme de commerçants, de professeurs
ou des prédicateurs appartenant souvent à des confréries»21
.
L’islamisation de l’Afrique noire fut tout de même différente par rapport aux autres pays du nord
d’Afrique ou l’islam à proclamer une guerre sainte aux mécréants et une réponse aux années de
croisades entre chrétiens et musulmans.
«La guerre sainte ne fut certainement pas le facteur le plus déterminant. Elle n’a joué
un rôle que localement. (…). L’islamisation en Afrique subsaharienne n’a pas été, en premier
lieu, une histoire d’affrontements violents laissant dans la mémoire des peuples des traces
douloureuses et des antagonismes, latents, toujours prêts à resurgir, comme c’est le cas dans
d’autres régions du monde touchés par l’islam».22
Un regard profond de la culture africaine subsaharienne laisse entrevoir des aspects
communs, des mentalités communes et populaires qui ont permis à l’islam de trouver bon accueille.
Cette nouvelle religion ne trouvera pas en Afrique noire une terre vierge, car l’Afrique noire avait
déjà ses croyances ancestrales et une culture complètement différente de la péninsule arabe La
question que beaucoup des historiens africains se posent aujourd’hui est de savoir qu’est ce qui a
fait adopter l’islam à plus de cent millions d’Africains de préférence à toute une autre religion ?
Évidement les situations et les motivations seront diverses, mais il y a quelques constances qui se
dégagent comme valable pour l’ensemble du continent.
I.5 L’esclavage, premier facteur d’islamisation de l’Afrique noire.
Comme nous l’avons signalé plus haut, l’esclavage existait déjà en Afrique noire avant
l’arrivée de l’islam. D'autre part, la traite transatlantique de l'époque moderne n'aurait pas été
possible sans la participation de négriers africains. Lorsqu'ils débarquaient sur les côtes occidentales
de l'Afrique, les marchands européens achetaient ou troquaient les esclaves noirs capturés à
l'intérieur des terres. Sur le littoral de l'Afrique de l'est, les marchands arabes, indiens, malais et
même chinois venaient s'approvisionner auprès des intermédiaires noirs. L'Égypte islamique a
largement fait usage des esclaves soldats et la majorité venaient d’Afrique noire, des peuples vivant
au long du fleuve Nubie. Dès lors la recherche des esclaves est devenue une des principales raisons
21 Jacques Jomier, pour connaitre l’Islam, édition CERF, paris 1994 22 Jacques Jomier, p. 22
peut trouver ces deux confessions de foi, alors que d’autres membres de cette famille restent
attachés aux pratiques traditionnels. On peut aussi remarquer l’assistance au grandes fêtes
religieuses qui sont des occasions de sympathie réciproque entre les chrétiens et les musulmans sont
le regard bienveillants des autorités politiques. Beaucoup des gestes de convivialité entre ces deux
communautés sont assez remarquable dans les premières heures de cohabitation. Les moments de
deuils, des naissances, les mariages mixtes, en générale étaient toujours des occasions de relation et
de dialogue entre les musulmans et les chrétiens de l’Afrique noire. Il faut dire que la notion de la
famille africaine est une catégorie sur laquelle toutes les autres considérations se reposent. L’église
africaine à travers différentes occasions de rencontres au niveau national qu’international a toujours
placé au centre du débat la question de la connivence entre musulmans et chrétiens. Déjà le message
final de la 16e Assemblée plénière du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de
Madagascar (SCEAM)48 a très tôt compris et souligne avec force la notion de la famille africaine
qui va au delà des divisions religieuses. Cette philosophie de la famille est vitale pour la pensée
africaine. C’est pourquoi le synode a qualifié l’église comme « Église famille de Dieu qui est… ».
Chapitre V: Une coexistence possible
Un retour historique nous fait dire que dès le début, la cohabitation entre chrétiens et musulmans a
donc connu un modèle pacifique certes, mais un modèle ambigu qui sera cause de tant
d’incompréhension, de suspicion et de conflits tout au long de l’histoire et jusqu’à nos jours. D’un
coté le musulman est convaincu qu’il respecte complètement la foi chrétienne en assurant au
chrétien une place dans la cité musulmane et qu’il lui fait la faveur en le protégeant. Le chrétien lui,
se sent dégradé en citoyen de second ordre, exclu des instances de décision, limité dans ses
mouvements et ses droits49. Il s’agit ici de l’application du concept de Dhimma (payement d’une
taxe pour vivre en territoire musulman) en islam. Cette forme de cohabitation ne pouvait pas tenir
longtemps du fait qu’elle est basée sur la peur réciproque et sur un principe économique dans lequel
le rapport humain ne peut être contenu. Aujourd’hui la cohabitation en Afrique subsaharienne n’a
rien à voir avec le concept de dhimma. La coexistence et la rencontre entre le christianisme (ou la
culture africaine) et la religion musulmame se produisent particulièrement aux grands moments de
la vie sociale, naissance, mariage, décès, et lors des grandes fêtes musulmanes. Le rituel musulman
est extrêmement sobre, naissance et mariages ne donnent pas lieu à ce que les chrétiens appellent 48 Du 8 au 15 juillet 2013, a eu lieu à Kinshasa, République démocratique du Congo, la 16e Assemblée plénière du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM) sur le thème « L’Église-Famille de Dieu en Afrique au service de la réconciliation, de la justice et de la paix ». Au cours de l’Assemblée, le comité exécutif composé d’un président, de deux vice-présidents et d’un secrétaire général a été renouvelé. Au terme de leurs travaux, Mgr Gabriel Mbilingi, archevêque de Lubango, Angola et président nouvellement élu du SCEAM a rendu public le message final suivant 49
Josef Stanner, op. cit.., 10
27
« sacrements », au contraire, les traditions africaines célèbrent presque toujours avec exubérance
ces grandes phases de la vie. Lors de fêtes, musulmanes comme les fêtes chrétiennes les gens
reprennent des signes qui leur parlent depuis toujours. Il faut surtout dire que les relations islamo-
chrétien se croisent au carrefour culturel et dans la vie sociale en Afrique subsaharienne
V.1 Que veut dire dialogue?
Le dialogue, voici le mot qu’on entend dire quand on veut rétablir une relation rompu par un
événement ou un fait advenu entre les personnes. Le dialogue est aussi le mot qu’on entend quand
les religions se rencontrent soit sur le plan international ou simplement dans un rapport de
convivialité dans un coin du monde. Le dialogue est définit comme « contact et discussion entre
deux parties à la recherche d’un accord, d’un compromis »50 Il est aussi le mot utilisé couramment
dans nos langages quand on bute à une difficulté de relation et qu’on veut bien arriver à finir avec
ce qui nous oppose. Des les premiers contacts historiques entre musulmans et chrétiens on évoquait
déjà la question du dialogue islamo-chrétien. Déjà à Médine le prophète avait signé un pacte avec
les chrétiens médinois. Plus loin encore au moment ou la cinquième croisade assiégeaient les
musulmans devant la ville de Damiette, en Égypte, Saint François, « poussé par l’Esprit d’en
Haut », décida de quitter le camp des croisés avec son compagnon, pour aller trouver le Sultan. Ils
allaient sans arme et sans escorte. Ils voyaient dans les musulmans, des créatures de Dieu à qui, il
faut annoncer la Bonne Nouvelle de l’Evangile. Contrairement à toute attente, le Sultan les reçut
avec courtoisie51. Si invraisemblable que cela paraisse, la visite de Frère François au Sultan Al-
Malik alKâmil est un fait historique qui a bien eu lieu en 1219. Du coté de l’Église catholique, il
suffit de porter un regard sur les documents officiels de l’Église pour se rendre compte que la
question du dialogue est au cœur de la réflexion ecclésiale après le concile Vatican II52. Malgré les
divergences et mal compréhensions sur certains points historiques, théologiques, dogmatiques et
sociales, les grandes institutions religieuses tel que le Vatican et Al-Hazar ont toujours cherché à
dialoguer, à créer des occasions de rencontres pour la promotion de la paix et de la cohabitation
pacifique. Les événements actuels du fondamentalisme, du terrorisme et de l’intolérance religieuse
observés ci et là rendent la question du dialogue pertinente jusqu’au niveau académique.
50
Le Nouveau petit Robert de la langue française, Nouvelle Edition MILLENISME, 2008 51
http://www.freres-capucins.fr/Saint-Francois-et-le-Sultan-Dieu.html. 1° Siège de Damiette (1218 – 1219) – La quatrième croisade, il faut bien l’avouer, se solda par un triste échec. En 1215, l’infatigable Innocent III en décida donc une nouvelle au concile de Latran, qu’il n’eut cependant pas le temps de voir. Cette dernière ne commença en effet qu’en 1217. Arrivés à l’embouchure du Nil, les croisés mirent le siège devant Damiette. La place forte, bien défendue, secourue par le sultan du Caire, résista 17 mois. Avant que la ville ne fut prise, le sultan d’Egypte, Mélik el Kâmil, offrit Jérusalem en échange du retrait des croisés. 52
Le document du Conseil Pontifical pour le dialogue interreligieux, intitulé ʺLe dialogue interreligieux dans l’enseignement officiel de l’Église catholiqueʺ rassemble tous les textes officiels en matière de dialogue interreligieux.