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rené teboul Introduction à la littérature prolétarienne
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Jul 08, 2020

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rené teboul

Introduction à

la littérature

prolétarienne

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Introduction

Les raisons de s’intéresser encore aujourd’hui à

la littérature prolétarienne sont aussi nombreuses

que variées. Il y a d’abord et avant tout le plaisir

qu’on peut retirer de sa fréquentation car elle est

rarement ennuyeuse. On va voir que son champ est

assez vaste, et que malgré le temps qui passe, les

chefs d’œuvre qu’elle a donnés sont restés bien plus

lisibles et accessibles que bien des ouvrages de la

littérature bourgeoise qui étaient pourtant présentés

en leur temps comme indispensables1.

Ensuite il y a le fait que la littérature

prolétarienne est le prototype d’une culture

alternative à la culture bourgeoise et mercantile : elle

s’est fabriquée contre les normes particulières qui

avaient cours dans ce milieu. Cela entraine un

changement de public et de fonction pour la chose

écrite.

Enfin elle est l’émergence d’une sensibilité

nouvelle, d’une prise de parole par ceux qui

jusqu’ici ne l’avaient pas. Jusqu’alors on parlait pour

eux. Son développement est le complément naturel

de la montée ne puissance de la classe ouvrière

comme une classe portant des valeurs universelles et

seule capable d’abolir les classes sociales dans la

révolution. C’est une littérature qui est engagée bien

sûr mais pas forcément dans le sens où on l’entend

aujourd’hui, elle ne prend pas directement position

1 Qui lit Claudel ou Mauriac aujourd’hui ? Qui lit encore André

Maurois ou Hervé Bazin ?

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pour telle ou telle action, ou pour tel ou tel parti, elle

veut s’en tenir au plus près de la vie quotidienne de

ceux qui n’ont que rarement l’occasion d’en porter

témoignage.

En 1932, le prix Goncourt couronne Guy

Mazeline pour Les loups1, un ouvrage bien oublié

aujourd’hui. Mais ce n’est pas là l’évènement

littéraire de l’année, ou plutôt c’est un événement

littéraire indirectement. En effet, c’est cette année-là

que Louis-Ferdinand Céline, le médecin Destouches,

entre en littérature et présente avec son éditeur,

Robert Denoël, le fait qu’il n’ait pas été couronné

pour Voyage au bout de la nuit, comme un scandale.

Lui et son éditeur laissent entendre que cela vient du

fait que sa manière d’écrire heurte le bourgeois car,

lui, il vient du peuple, le vrai, et parle pour les

petites gens et les opprimés. Beaucoup croiront à

cette légende, au point que les anarchistes longtemps

penseront que Céline est un des leurs et le

défendront envers et contre tout alors qu’il s’est

réfugié au Danemark pour éviter d’être fusillé pour

son implication dans la collaboration2.

En 1932, la littérature prolétarienne est à son plus

haut, et ouvertement Céline, d’origine petite-

bourgeoise3, s’est inspiré de celle-ci pour écrire son

1 Livre publié chez Gallimard, éditeur spécialisé dans la

collecte des prix littéraires. 2 Les anarchistes prendront sa défense à travers Le libertaire

organe de la Fédération Anarchiste sera à la pointe du combat

pour l’absoudre du crime de collaboration. 3 Ses parents étaient des petits-commerçants plutôt aisés.

Céline héritera de plusieurs immeubles de rapport de sa mère.

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premier roman. Il a été influencé notamment par

Eugène Dabit, l’auteur de Petit Louis et d’Hôtel du

Nord, avec qui il entretenait une correspondance.

Utilisant des formules empruntées au langage parlé

du petit peuple parisien, il se sert également de

l’argot qui est encore en usage avant-guerre. Eugène

Dabit est un écrivain prolétarien, tout comme Henry

Poulaille qui également en 1932 est représenté au

prix Goncourt pour son formidable roman Le pain

quotidien. C’est évidemment quand on lit Poulaille

et Céline successivement, qu’on se rend compte de

tout ce qu’il y a de frelaté dans le style de l’auteur

du Voyage au bout de la nuit, non seulement parce

qu’il détourne un langage qui n’est pas le sien, ni

celui de sa classe d’origine, mais parce qu’il passe

son temps en gémissements ce qui est assez absent

de la littérature prolétarienne qui est très souvent

aussi une littérature de combat et donc qui comporte

une vision positive de l’homme. Céline assurera par

la suite qu’avec ce livre, il n’avait fait somme toute

qu’un coup de marketing1, et qu’en réalité son vrai

1 « J’ai fait la maison Denoël – rien de meilleur qu’un livre qui

est devenu obligatoire – C’est le cas du Voyage [au bout de la

nuit] – question épicerie cela vaut La Dame aux

camélias ou Les Lettres de mon moulin – on n’y échappe pas

un jour ou l’autre. Je vous raconte tous ces secrets de cuisine

et les ressorts hélas les plus inflexibles peut être des haines qui

me poursuivent, aux masques divers – mais dans le fond :

jalousies d’épiciers, inavouables. Le Voyage vaut une ferme –

cela ne se pardonne pas – et une ferme qui marche toute

seule ! Une ferme magique ! Voyez ça d’ici et même en

roubles. » Lettre à Thorvald Mikkelsen, 7 décembre 1946, in

Lettres, La Pléiade, Gallimard, p. 837, 2009.

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premier livre qui possédait un style propre, était

Mort à crédit1.

La différence entre Poulaille et Céline provient

d’abord de leurs origines sociales. Poulaille est le

fils d’un charpentier aux convictions sociales bien

affirmées. Orphelin très jeune, à treize ans il perdra

successivement son père et sa mère, il est un parfait

autodidacte, pour lui la littérature est un facteur

d’émancipation et doit préparer et accompagner la

révolution socialiste. La littérature n’est pas un jeu,

aimera-t-il à répéter. La plupart de ses livres

décrivent la difficile condition prolétarienne en

même temps que la richesse de cœur de sa classe

d’origine, ainsi que les raisons d’espérer. Si ses

ouvrages sont durs, ils ne sont pas pessimistes pour

autant. Céline est à l’inverse le rejeton aigri d’un

couple de petits boutiquiers racistes2 et

réactionnaires, il a fait des études plus ou moins

sérieuses poussé par ses parents qui voudraient bien

qu’il entre dans le négoce et qui pour cela

l’enverront séjourner à grands frais en Angleterre et

en Allemagne pour y parfaire ses connaissances

linguistiques. Il sera ultérieurement l’étoile de la

collaboration avec l’Allemagne et se voudra le fer de

lance de la lutte contre les Juifs à travers des

1 Sur Céline et son affairisme on lira avec profit André́ Rossel-

Kirschen, Céline et le grand mensonge, Mille et une nuits,

novembre 2004. 2 Certains excuseront l’antisémitisme virulent de Céline par les

pesanteurs familiales, mais c’est un peu court. Quand il a

développé ses thèses antisémites criminelles il était déjà un

grand garçon, il avait déjà la quarantaine dépassée et avait

parcouru le monde.

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pamphlets écœurants comme Bagatelles pour un

massacre ou Les beaux draps qui seront avant la

guerre de forts succès commerciaux1. A l’inverse de

Poulaille ses ouvrages sont particulièrement

pessimistes et haineux.

Les oppositions qui apparaissent dans la course

au prix Goncourt en 1932 aident à mieux

comprendre les enjeux de la littérature prolétarienne.

En effet, Henry Poulaille la définit, à la suite de

Marcel Martinet, comme une littérature qui est faite

par des prolétaires, autodidactes, qui traite des

problèmes, des aspirations et des sentiments des

prolétaires et qui s’adresse d’abord aux prolétaires.

C’est une littérature qui se fait dans des objectifs très

différente de la littérature bourgeoise : elle ne vise

pas à générer un marché et une position sociale, à en

faire un métier, mais plutôt à témoigner et à

participer d’une certaine forme d’auto-éducation qui

doit conduire d’une manière ou d’une autre

nécessairement à la révolution sociale et à

l’avènement d’une société sans classe. L’écriture est

d’abord un travail d’émancipation2.

Malgré les oppositions théoriques et politiques en

son sein, le courant de la littérature prolétarienne

sera très fort et très structuré en France, même si

1 Bagatelles pour un massacre est du vivant de Céline son plus

gros succès de librairie. Mort à crédit avait été un échec

commercial et ceci explique aussi pourquoi l’avare Céline

choisit d’écrire des pamphlets antisémites. 2 De la même manière Poulaille critiquera les Universités

populaires parce que ce sont des gens lettrés et instruits qui

vont porter la bonne parole au peuple et qui finalement n’ont

rien à apprendre de lui.

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c’est brièvement, mais aussi très important dans le

monde entier dans la première moitié du XXème

siècle. Que ce soit en Russie avec Gorki et Essenine,

ou aux Etats-Unis avec Erskine Caldwell, Dos

Passos et Jack London.

La liste que dresse Poulaille dès 1930 dans Le

nouvel âge littéraire est déjà très longue et forme un

ensemble cohérent. On peut encore citer dans ce tour

du monde aussi le roumain Panaït Istrati, les

Norvégiens Knut Hamsun et Johan Bojer. Au Japon

on a redécouvert récemment l’œuvre de Kobayashi

Takiji, Le bateau-usine écrit en 1929 qui, en 2008,

s’est vendu à un million d’exemplaires. Ces grands

noms qu’on vient de donner, et le fait qu’on les lise

encore aujourd’hui pour la plupart sans ennui

provient sans doute de cette authenticité revendiquée

qui en fait sa force et son charme. Poulaille parlera

d’une littérature « virile » par opposition à une

littérature de salons1.

Son déploiement et sa force s’explique par la

transformation et l’ascension de la classe ouvrière.

C’est le moment où en effet la classe ouvrière

accède à une éducation suffisante et à la conscience

de son poids économique, pour lui permettre de

s’exprimer. Le déclin de la littérature prolétarienne

sera marqué par la suite de l’expansion de la classe

moyenne qui ne vit plus du travail manuel, mais qui

1 En 1919 Marcel Proust avait obtenu le prix Goncourt pour A

l’ombre des jeunes filles en fleurs, l’exemple typique de la

littérature qui se regarde penser, contre le livre de Roland

Dorgelès, Les croix de bois, récit direct de l’expérience de la

Grande guerre.

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au contraire intellectualise de fait les tâches

nécessaires à la perpétuation d’un système social

inégalitaire et prédateur et dont les fonctions

nécessitent une éducation plus large.

Malgré sa richesse et sa grande diversité, la

littérature prolétarienne reste largement méconnue et

méprisée, probablement parce que le milieu de

l’édition et de la culture est non seulement tenu bien

en main par la bourgeoisie, mais aussi parce que ce

milieu vise d’abord le profit1. On oublie très souvent

que ses plus belles réussites sont des œuvres très

célèbres, plusieurs de ses représentants recevront des

prix importants, dont le Nobel ou le prix Goncourt :

on en a lus quelques-unes, mais sans ordre le plus

souvent, sans trop se rendre compte qu’ils

appartiennent à un ensemble qui fait sens.

La littérature prolétarienne s’inscrit pourtant dans

la volonté manifeste de rompre avec la culture

bourgeoise et les valeurs qu’elle véhicule, mais elle

a été ignorée ou dénigrée par les mouvements

révolutionnaires d’avant-garde. Que ce soient les

surréalistes ou les situationnistes, ils ont fait comme

si cette littérature prolétarienne n’était qu’un produit

décalé et copié de la littérature bourgeoise, une

simple soumission dans les manières de l’art. En

effet pour les mouvements d’avant-garde, l’art est

mort, il n’est donc plus possible d’en renouveler les

1 Il y a eu périodiquement des éditeurs qui ont su donner leur

chance à ces nouveaux acteurs de la vie littéraire, que ce soit

Charpentier et après lui Rieder et dans une moindre mesure

Grasset.

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codes autrement que d’une manière factice. André

Breton écrira dans Le second manifeste surréaliste :

« Je ne crois pas à la possibilité actuelle

d’existence d’une littérature ou d’un art exprimant

les aspirations de la classe ouvrière. Si je me refuse

à y croire, c’est qu’en période pré-révolutionnaire,

l’écrivain ou l’artiste de formation nécessairement

bourgeoise, est par définition inapte à les

traduire »1.

C’est la position traditionnelle de la bourgeoisie.

Breton ajoute :

« Par contre aussi faux que toute entreprise

d’explication sociale autre que celle de Marx est

pour moi tout essai de défense et d’illustration d’une

littérature et d’un art dits « prolétariens » à une

époque où nul ne saurait se réclamer de la culture

prolétarienne, pour l’excellente raison que cette

culture n’a pu encore être réalisée, même en régime

prolétarien »2.

Il est assez facile de voir que Breton ne connait

pas très bien la littérature prolétarienne, il n’en

1 Second manifeste surréaliste, Editions Kra, 1930. Texte

reproduit dans André Breton, Œuvres complètes, tome 2, p.

804, Gallimard, La Pléiade, 1988. Dans ce passage que nous

évoquons, Breton citera Trotsky qui fut le champion de la

théorie de l’avant-garde révolutionnaire sur le plan politique,

avec le peu de succès qu’on sait. 2 Ibid., p.805

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connait de celle-ci que les aspects qui sont présentés

par le Parti communiste français, et ne cite pas

Poulaille ni son groupe qui en réalité se trouve sur

une toute autre logique. Breton ne veut pas

comprendre justement ce processus d’autoformation

de la littérature prolétarienne qui fait partie

intégrante de la démarche d’émancipation de la

classe ouvrière. Il est facile de voir dans ce débat le

côté bourgeois de Breton et du mouvement

surréaliste qui n’arrivent pas à admettre que

l’autodidaxie est un processus révolutionnaire et

autonome. Pour le théoricien du mouvement

surréaliste, il ne fait aucun doute que pour dépasser

les connaissances bourgeoises du monde de la

culture, il faut d’abord y avoir baigné longuement.

C’était aussi la position des leaders bolchéviques,

Lénine et Trotsky qui venaient de la bourgeoisie

lettrée.

Ce débat est décisif, parce que la position de

Breton renvoie à l’idée que la révolution

prolétarienne est initiée et conduite par les avant-

gardes, que ce soit sur le plan politique, en matière

d’économie ou sur le plan de la culture. Elle suppose

que les masses ne sont pas capables de générer par

elles-mêmes leur propre culture et leur propre forme

d’action politique. Cette vision des choses est

finalement assez différente de celle de Marx auquel

elle se réfère, qui pensait au contraire que les

nouvelles valeurs culturelles de la société socialiste

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émaneraient directement de la classe ouvrière

existante1.

On pourrait ajouter que les œuvres surréalistes

n’ont jamais pénétré vraiment les masses

laborieuses, dès lors leur existence pose la question

de la coupure qu’il peut y avoir entre les masses

laborieuses et les artistes et écrivains qui pensent et

développent l’idée de révolution totale, tentant

d’allier l’action politique et l’action poétique. Breton

ne pouvait guère aller plus loin à cette époque et le

prolétaire dont il parlait, il n’en connaissait

strictement rien, à part une vague fréquentation lors

de son bref passage au parti communiste. Sans

vouloir être cruel on remarquera que Breton sera

plus facilement récupéré par la bourgeoisie que

Poulaille par exemple2.

Sans doute les surréalistes qui admiraient à

travers Breton des personnages décalés comme

Jacques Vaché, la bande à Bonnot ou encore le

sulfureux marquis de Sade, avaient bien du mal à

trouver de l’intérêt à de simples travailleurs dont

l’ambition ne semblait pas aller au-delà de nourrir sa

famille et de vivre dans la dignité en exerçant un

métier qui satisfasse leur sens de la créativité.

Au fond cette théorie de l’avant-garde qu’elle se

prétende politique ou littéraire entérine l’idée d’une

1 Karl Marx & Friedrich Engels, L’idéologie allemande (1845-

1846), in Karl Marx Œuvres tome III, La Pléiade, Gallimard,

1982. 2 Malgré toutes les réserves que j’émets ici sur les

déterminations d’André Breton, il a été pour moi un guide

essentiel.

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division du travail, d’une opposition entre ceux qui

ont reçu une formation et qui savent très exactement

où en est l’histoire, et ceux qui ne peuvent que

suivre le mouvement et dont il faut recadrer les

révoltes instinctives. On peut se demander en effet

pourquoi il serait meilleur et plus enrichissant de

jouir de l’écriture raffinée de Lautréamont1 qui ne

peut être comprise que par des gens très lettrés qui

ont assimilé les compliquées arcanes du

détournement2, plutôt que d’une littérature qui

manifeste simplement et directement les sentiments

et les désirs d’une classe. Car c’est bien cette classe

au nom de qui on parle qui est sensée faire la

révolution socialiste autrement que comme une

masse manipulable par une avant-garde omnisciente

qui la dirige comme le berger mène ses moutons.

S’il est question que ce soient les masses prolétaires

qui fassent effectivement la révolution, il faut bien

admettre qu’elles en ont la conscience, sinon il s’agit

d’une simple évolution de la classe bourgeoise qui

change non pas les modes de fonctionnement de la

société mais qui les transforment pour son profit en

changeant les dirigeants. Avec un peu plus de

finesse d’esprit, Breton aurait pu admettre que la

culture bourgeoise était critiquable aussi bien dans

ses formes que dans ses thématiques et que certaines

approches de la littérature, comme le roman par

1 Ce qui ne m’empêche pas de porter beaucoup d’intérêt à

l’œuvre d’Isidore Ducasse, mais c’est une autre histoire. 2 Guy-Ernest Debord et Gil J. Wolman, « Mode d'emploi du

détournement », Les lèvres nues, n° 8, mai 1956

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exemple, existaient bien avant que n’existe la

bourgeoisie. Mais il était trop embringué dans cette

vision moderniste de la culture qui suppose que

celle-ci ne change pas dans ses thèmes, mais dans

les formes qu’elle emprunte.

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Mais en vérité c’est aussi contre la vision de la

littérature prolétarienne telle que la met en avant le

Parti communiste qu’André Breton s’élève. Il faut

dire que les rigidités intellectuelles du Parti

communiste qui lui aussi encourage le

développement d’une littérature prolétarienne1, ont

fait beaucoup pour affadir le sens de celle-ci en lui

demandant expressément de se mettre au service de

la révolution et plus particulièrement au service de la

défense du pays sensé la représenter. De moteur de

l’émancipation de la classe ouvrière, elle devient

alors un outil de propagande pour un parti.

Lorsqu’on l’examine de plus près, par sa façon de

procéder, par les thèmes qu’elle développe ou par le

langage très particulier qu’elle utilise, la littérature

prolétarienne n’a aucun rapport avec l’art bourgeois

et se présente comme un art de rupture qui conteste

la société dans ses fondements culturels et participe

de la création de nouvelles valeurs qui sont censées

être le support de la société future.

Notez que les idées de Breton sont très

communes et largement partagées par les « élites »

lettrées, on les retrouve quelques années plus tard

1 Evidemment la manière dont le Parti communiste

développera la littérature prolétarienne la mènera directement

au soutien du réalisme soviétique et niera finalement l’idée que

cette littérature procède de l’autodidaxie. Sur l’analyse du

réalisme socialiste à la française, on pourra lire Paul

Aron, Frédérique Matonti et Gisèle Sapiro (dir.), Le Réalisme

socialiste en France, Sociétés & Représentations, n°15, 2003/1,

416 p.

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chez Roland Barthes par exemple dans

Mythologies :

« Politiquement, quel que soit l'effort

universaliste de son vocabulaire, la bourgeoisie finit

par se heurter à un noyau résistant, qui est, par

définition, le parti révolutionnaire. Mais le parti ne

peut constituer qu'une richesse politique : en société

bourgeoise, il n'y a ni culture ni morale

prolétarienne, il n'y a pas d'art prolétarien :

idéologiquement, tout ce qui n'est pas bourgeois est

obligé d'emprunter à la bourgeoisie. L'idéologie

bourgeoise peut donc emplir tout et sans danger y

perdre son nom : personne, ici, ne le lui renverra ;

elle peut sans résistance subsumer le théâtre, l'art,

l'homme bourgeois sous leurs analogues éternels ;

en un mot, elle peut s'ex-nommer sans frein, quand il

n'y a plus qu'une seule et même nature humaine : la

défection du nom bourgeois est ici totale »1.

Passons sur le fait qu’il suppose une séparation

entre le politique et « l’idéologique », et donc qu’il

instaure une hiérarchie qui va du politique vers le

culturel. Mais sans doute le plus grave est que

Barthes n’imagine pas que des entrailles de la

1 Mythologies, Le seuil, 1957. C’est un ouvrage célèbre et

fondateur dans la critique littéraire d’inspiration structuraliste.

Le peu perspicace Roland Barthes se retrouva un temps dans la

mouvance maoïste à flatter les maîtres de la Révolution

culturelle chinoise, ce qui finalement lui allait assez bien, étant

entendu que pour lui la révolution ne pouvait être initiée que

par l’avant-garde et non par le prolétariat lui-même.

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société bourgeoise il ne peut sortir rien d’autre

qu’une culture bourgeoise. Il est facile de voir que

cette approche est erronée parce que s’il ne peut

sortir aucune culture alternative à la culture

bourgeoise de cette société, alors il ne peut pas non

plus sortir de projet politique alternatif, car la

politique est évidemment aussi un élément de la

culture. Les séparer et les opposer semble vouloir en

revenir à l’idée que la société bourgeoise se

transformera non pas à partir d’elle-même, de son

économie et de sa culture, mais à partir de

l’extérieur. C’est bien ce que Marx reprochait aux

socialistes utopistes. Ce positionnement est assez

peu dialectique. Tout se passe comme si ces

penseurs se trouvaient eux-mêmes en dehors de la

société qu’ils prétendent transformer alors que les

prolétaires, les premiers intéressés pourtant par une

révolution prolétarienne y seraient restés englués.

Mais comment pourraient-ils agir efficacement en ce

sens s’ils ne comprennent pas cette société.

Evidemment les surréalistes n’ont pas manifesté

uniquement cette tendance à la séparation, par

exemple ils célébraient les loisirs populaires, le

cinéma notamment où ils préféraient les aventures

de Fantômas et de Judex aux pensums avant-

gardistes et prétentieux. Mais c’était le cinéma, pour

ce qui est de la littérature, il la dénigrait tout en la

prenant un peu trop au sérieux, ce qui les a fait

passer à côté de beaucoup de choses1.

1 André Breton fut un grand découvreur de talents aussi bien en

peinture qu’en littérature, mais s’il a su ouvrir des portes,

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Dans le même genre de cuistrerie, Michel Ragon

cite dans son Histoire de la littérature prolétarienne,

aussi le péremptoire Gilles Martinet qui déclare sans

ambages : « En France comme ailleurs, la littérature

dite « prolétarienne » n’a jamais produit que des

écrivains de seconde zone »1. Il est facile de voir que

si personne ne se souvient plus de qui était Gilles

Martinet, il y a de nombreux écrivains dits

« prolétariens » qui continuent à être lus et

commentés. Cette attitude est typique de la

bourgeoisie satisfaite et bornée qui pense qu’elle

connait et maitrise les codes du classement du bon

goût, et qui ne supporte pas l’idée selon laquelle ses

critères pourraient être dépassés dans le

développement historique2.

Et la présentation que nous en ferons au fil de ces

pages montrera le bien-fondé de notre assertion qui

avance que non seulement la littérature prolétarienne

a créé de belles et nobles œuvres dont le succès est

durable, mais qu’en outre elle a, par son souci de

vérité, influencé le reste de la littérature moderne.

J’ai déjà cité le cas de L.-F. Céline qui,

indéniablement peut être considéré pour le meilleur

et pour le pire comme le chef de fil d’une nouvelle

forme littéraire, mais il faut se souvenir que lui-

même a été fortement influencé par la littérature

prolétarienne.

manifestement il en a refermé aussi beaucoup. 1 Le Nouvel Observateur, 7 mai 1973.

2 Gilles Martinet fut entre autre un pilier du PSU, le parti de

Michel Rocard dont il a suivi tous les errements, c’est tout dire.

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On comprend que ce débat sur la nature et le

contenu de la littérature prolétarienne est en fait bien

plus large que cela puisqu’il pose la question

directement des rapports qu’il peut y avoir entre

l’évolution de la société en général et celle de ses

modes de représentation que sont les arts et la

littérature.

Le fait qu’une littérature prolétarienne comprise

comme une conséquence de l’autodidaxie, ait vu le

jour et soit devenue prolifique, signifie au moins

deux choses :

1. d’abord que la société de plus ou moins bon

gré reconnait l’importance de la parole ouvrière, et

donc que celle-ci a une valeur en elle-même qu’il est

bon de connaitre et de transmettre ;

2. ensuite qu’elle porte en elle une forme

d’universalité qui permet que le public, même

bourgeois, puisse la lire.

Il faut bien comprendre que la démocratisation

des savoirs marche dans les deux sens, d’une part

c’est le prolétariat qui y accède et qui crée ses

propres représentations, mais d’autre part, c’est la

bourgeoisie qui va s’y intéresser. On sait par

exemple qu’André Gide qui avait une grosse fortune

personnelle, joua un rôle déterminant pour faire

connaître la littérature populaire, par exemple celle

de Simenon, et la littérature prolétarienne, il

encouragea Charles-Louis Philippe, Jean Malaquais

et bien d’autres. Mais il ne fut pas le seul, on peut

aussi citer Octave Mirbeau qui lui aussi venait de la

bourgeoisie mais dont les tendances anarchisantes le

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firent s’intéresser à la littérature prolétarienne. Par

exemple il aida Marguerite Audoux à publier son

premier ouvrage, Marie Claire en 1910. Cet intérêt

de la bourgeoisie pour la littérature prolétarienne est

en quelque sorte le symétrique de l’intérêt que les

prolétaires pouvaient porter à des auteurs venant de

la bourgeoisie comme Emile Zola ou Victor Hugo.

Ce double mouvement montre que s’il existe bien

une lutte des classes, il existe aussi une porosité

entre celles-ci.

On peut aller encore un peu plus loin dans ce

sens. Au XIXème siècle les auteurs d’origine

bourgeoise qui ont fait l’apologie de l’ouvrier, que

ce soit Lamartine avec ses poèmes ou ses romans en

vers1, ou George Sand à travers ses romans, il y a

manifestement une attirance pour la personne de

l’ouvrier. Cette attirance va bien au-delà du souci de

s’encanailler. Elle est en réalité le reflet de l’ennui

de la classe dominante qui d’en un certain sens

procède ainsi à la critique de son propre mode de

vie. George Sand met en scène par exemple, dans Le

compagnon du tour de France, une histoire d’amour

entre une femme d’origine aristocratique et un

homme au contraire dénué de tout, aussi bien

d’éducation que de richesses matérielles. Dans cet

ouvrage remarquable à plus d’un titre, il y a bien

plus que de la compassion, on y trouvera justement

une attirance sexuelle lucide d’une femme pour un

homme qui possède des qualités physique de virilité

1 Alphonse de Lamartine, Jocelyn, Furne et Charles Gosselin,

1836.

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contrairement à ceux qu’elle avait l’habitude de

fréquenter dans sa classe d’origine1. On voit bien là

pointer cette idée selon laquelle une classe a fait son

temps, dégénérée, elle doit être remplacée. Et si elle

doit être remplacée, la culture qu’elle représente qui

va avec, est devenue obsolète.

Dans la deuxième moitié du dix-neuvième siècle,

l’idée d’une régénération de la vieille civilisation

européenne par le barbare va être très présente2.

D’une manière détournée c’est bien le thème de

l’ouvrage de George Sand : le jeune et viril ouvrier

va féconder la descendante de l’aristocratie fin cde

race. Mais ce thème se retrouvera sous la plume de

révolutionnaires comme l’anarchiste Ernest

Cœurderoy d’une manière plus radicale3. N’est-ce

pas d’ailleurs le fonds même de la campagne des

surréalistes pour la promotion de l’Art Nègre ? Et

n’est-ce pas encore aujourd’hui cette passion que

mettent certains en Occident pour soutenir l’Islam

1 L’ouvrage est paru en 1840 chez Michel Lévy. Il est a noté

que George Sand après avoir pris conscience de la misère du

Peuple, se convertit au socialisme, façon Pierre Leroux, comme

on entre en religion. Descendante du Maréchal de Saxe, elle

était d’une vieille lignée noble par son père, mais issu du petit

peuple de Paris par sa mère. 2 On trouve déjà cette idée chez Hegel, La Raison dans

l'histoire. Introduction à la philosophie de l'histoire (Die

Vernunft in der Geschichte, 1822-1830), trad. UGE, 1965. 3 Ernest Cœurderoy, Hurrah !!! ou la révolution par les

cosaques, Londres, 1854. On peut penser qu’il anticipait d’un

certain point de vue la Révolution russe de 1917, mais en

réalité il ne faisait que reprendre la vieille idée germanique de

la régénération d’une vieille civilisation par le barbare.

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envers et contre tout1 et faire de la lutte contre

l’islamophobie l’alpha et l’oméga du combat

politique moderne ?

Mais pour ce qui concerne la littérature

prolétarienne, et ce qu’il me semble décisif, c’est

qu’elle va, après avoir voulu mettre ses pas dans

ceux de la littérature bourgeoise, trouver sa propre

autonomie, et justement se construire à partir

d’autres valeurs. On remarquera que s’intéressant

très peu aux questions de formes, elle ne sera pas

vraiment comprise par la bourgeoisie et son

appareillage intellectuel. Cependant, et surtout après

1968, lorsque la littérature populaire fera irruption

sur le devant de la scène, les auteurs de ce courant

littéraire vont être redécouverts et réédités avec

constance. Et peu à peu des travaux universitaires

sur ce thème vont se développer.

1 Par exemple l’écœurant ouvrage d’Edwy Plenel, Pour les

musulmans, La découverte, 2015.

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la vie d'un demi-sel, deuxième époque, Gallimard,

1969.

Albert Simonin, Hotu soit qui mal y pense,

chronique de la vie d'un demi-sel, troisième et

dernière époque, Gallimard, 1971.

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42

Albert Simonin, Confessions d’un enfant de la

Chapelle, Gallimard, 1977.

J.C.L. Sismonde de Sismondi, Nouveaux principes

d’économie politique, ou de la richesse dans ses

rapports avec la population, Delaunay, 1819.

Boris Souvarine, Staline, aperçu historique du

bolchévisme, Plon, 1935.

Boris Souvarine, Souvenirs sur Isaac Babel, Panaït

Istrati, Pierre Pascal ; suivi de, Lettre à Alexandre

Soljénitsyne, Champ libre, 1985

Marc Stéphane, La Cité des fous, Ed. Le Cabinet du

Pamphlétaire (Parc de Neuilly), 1905

Marc Stéphane, Ceux du trimard, Le cabinet du

pamphlétaire, 1928.

Marc Stéphane, Verdun : Ma dernière Relève au Bois des

Caures (18-22 février 1916, Souvenirs d'un Chasseur de

Driant), Ed. Le Cabinet du Pamphlétaire (Paris-Neuilly),

1929.

Roger Vailland, Le Surréalisme contre la révolution,

Éditions Sociales, 1948

Roger Vailland, Bon pied bon œil, Corrêa, 1948.

Roger Vailland, Beau masque, Gallimard, 1954.

Roger Vailland, 325 000 francs, Corrêa, 1955.

Roger Vailland, Ecrits intimes, Gallimard 1968.

Alain et Odette Virmaux, La rupture avec

Surréalisme et Grand jeu, Revue Europe, n°712-

713, 1988

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43

Jules Vallès, Les réfractaires, Charpentier, 1866.

Jules Vallès, L’enfant, Charpentier, 1879

Jules Vallès, Le bachelier, Charpentier, 1881

Jules Vallès, L’insurgé, Charpentier, 1885

Jules Vallès Dictionnaire D'argot - Et Des

Principales Locutions Populaires, 1894, Berg

International éditeurs, 2007.

Jacques Yonnet, Enchantements sur Paris, Denoël,

1954.

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44

Annexes

Liste des signataires du manifeste du « groupe des

écrivains prolétariens » (1932) : Georges Altman, Francis

André, Pierre Autry, Albert Ayguesparse, T.-L. Bancal,

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Marc Bernard, Victor Crastre, H.V. Crouzy, Eugène

Dabit, Georges David, Oscar David, Maurice Fombeure,

Lucien Gachon, Léon Gerbe, Edouard Haine, Augustin

Habaru, Pierre Hubermont, Fernand Jouan, Michel Lévit,

Marcel Lapierre, Jean Loubes, Constant Malva, Ludovic

Massé, Pierre Manhi, Henri Philippon, Henry Poulaille,

Charles Plisnier, Edouard Peisson, Jean Perwez, Jules

Reboul, Tristan Rémy, Victor Serge, Albert Soulillou,

Joseph Voisin, Edmond Vandercammen, Charles Wolff.

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Albert Camus et la littérature prolétarienne

Maurice Lime avait demandé à Camus de lui écrire un article pour

« Après l’boulot » : Albert Camus lui envoya la lettre ci-après qu’un

contretemps empêcha alors de publier.

Paris, le 8 août 1953.

Si vous pensez que ma phrase mérite quelques

développements1je vais les tenter ici. Mais il faut

d’abord que je répète ce que je vous ai déjà dit : je

ne suis pas sûr d’avoir raison et de plus, je me sens

en infériorité devant votre entreprise. Quand des

hommes qui passent leur journée dans un atelier ou

une usine prennent sur leurs loisirs pour tenter de

s’expriment dans une revue, ce n’est pas à celui qui

jouit d’une large liberté, pour écrire et travailler, à

venir faire la petite bouche et donner des avis. Même

s’il peut avoir par hasard raison, il ne paye pas de sa

personne sur ce point et cela suffit à rendre suspects

ses propos. Pour consentir à un rôle si ridicule, et si

aisément odieux, il faudrait être entre vieux

camarades et dans l’abandon total. Sans vous

offenser, ce n’est pas le cas. Mais, en même temps,

il me semble qu’il y aurait un peu de vilaine lâcheté,

un manque de camaraderie aussi à ne pas dire tout

simplement ce que je pense, étant bien entendu que

je suis prêt à tout moment à reconnaître que j’ai tort.

1 Camus a toujours compté parmi les abonnés de soutien de la

« R.P. ».

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Il faut dire d’abord que je ne crois pas qu’il y ait une

littérature ouvrière spécifique. Il peut y avoir de la

littérature écrite par des ouvriers, mais elle ne se

distingue pas, si elle est bonne, de la grande

littérature. Je crois en revanche que les travailleurs

peuvent rendre à la littérature d’aujourd’hui quelque

chose qu’elle semble, dans sa plus grande partie,

avoir perdu. Je m’explique. On peut tenir Gorki par

exemple pour un des plus beaux représentants de la

littérature ouvrière. Mais pour moi il n’y a pas de

différence d’espèce entre ses livres et ceux du grand

seigneur terrien Tolstoï. Au contraire je les aime

tous deux en partie pour les mêmes raisons : ils

disent dans un langage à la fois simple et beau ce

qu’il y a de plus grand, joie ou douleur, dans le cœur

d’un homme. Il y a au contraire une énorme

différence entre Tolstoï et un grand écrivain comme

Gide, par exemple, qui lui est d’origine bourgeoise.

Des deux, c’est le grand seigneur qui, à sa manière,

écrit pour et avec le peuple.

Tolstoï et Gorki, à eux deux, définissent assez bien

ce que j’entends par littérature, que vous pouvez

appeler ouvrière à l’occasion et que j’appellerai,

faute d’un mot moins ridicule, vraie. Dans cet art

peuvent se rejoindre le cœur le plus simple et le goût

le plus élaboré. A vrai dire, si l’un manque,

l’équilibre se rompt. En fait, la littérature de notre

temps qui est en réalité une littérature pour classes

marchandes (du moins dans la majeure partie de ses

œuvres) a détruit l’équilibre. Et elle ne l’a pas rompu

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seulement au profit du raffinement et de la

préciosité, ce qui l’a détachée d’un seul coup du

public ouvrier. Elle l’a rompu aussi, comme il est

naturel quand on veut plaire à des marchands, dans

le sens de la vulgarité et de la dérision, ce qui exclut

qu’un Tolstoï puisse s’y intéresser (Tolstoï disait que

le journalisme est un bordel intellectuel et la

littérature d’aujourd’hui est le plus souvent du

journalisme coupé en tranches).

Eh bien, de la même manière qu’il faut qu’une revue

ouvrière réagisse contre la préciosité et les

chinoiseries d’une certaine littérature afin de la

ramener dans la cité de ceux qui, de toutes les

manières, travaillent, il me semble indispensable

qu’elle réagisse aussi, et violemment, contre la

vulgarisation bourgeoise. Pour répéter mon exemple.

Tolstoï ne me paraît grand que dans la mesure où il

sait émouvoir le lecteur le moins préparé. Mais,

inversement, la littérature ouvrière n’a de sens et de

grandeur que si, partant de la vérité du travail, de la

peine, de la joie, elle rejoint dans le langage le plus

droit cette même vérité que Tolstoï a poursuivie

avec tous les moyens de l’art et de la réflexion. Si,

au contraire, cette littérature se borne à répéter ce

que nous lisons dans les journaux, elle sera

intéressante, bien sûr, mais à cause des circonstances

où elle est née, non à cause d’elle-même.

Ce qui me gêne parfois dans votre revue (pas

toujours, cela est sûr) c’est une certaine

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complaisance qui finit par rejoindre ce que je n’aime

pas dans la littérature d’aujourd’hui. Quand un

producteur bourgeois bâcle un navet

cinématographique qui lui rapportera des millions,

grâce aux rondeurs d’une vedette fabriquée en six

mois, pourquoi lui donner raison en écrivant que ces

rondeurs font passer le film. J’ai comme tout le

monde mes idées et mes goûts sur les rondeurs. Mais

les rondeurs sont une chose, la culture de classe une

autre, et l’entreprise dégradante du cinéma bourgeois

doit être jugée autrement. De même (ce sont des

détails, mais je les choisis pour me faire comprendre

et pour cela seulement) il est vrai que la belote au

bistrot du coin vaut bien le cocktail mondain. Mais

précisément le cocktail mondain ne vaut rien.

Pourquoi donc comparer ? La belote a du bon (pour

éclairer le sujet, j’ajoute que c’est le seul jeu de

cartes dont je sois mordu) mais elle n’a pas besoin

d’une revue pour être célèbre. Elle se défend toute

seule.

Bien entendu je sais qu’il faut que la revue soit

vivante et je ne plaide pas pour le genre rasoir. Il y a

assez de revues aujourd’hui qui, se proposant surtout

de plaire, n’arrivent même pas à déplaire : elles

ennuient seulement. Je ne suis pas non plus tout à

fait dénué d’humour et, pour moi, une revue

ouvrière, ça doit rire, aussi. Il y a un ton à trouver,

voilà tout, et je sais que ce n’est pas facile surtout en

deux numéros. Je sais aussi qu’il s’en faut que toute

votre revue tienne dans les deux exemples que je

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vous ai donnés (le texte du mineur belge est bien

beau). Mais justement, si ce que je vous dis a une

utilité c’est pour vous permettre de distinguer les

différences de ton qui apparaissent à un lecteur de

bonne foi, et de choisir, ou non.

Je veux seulement me répéter encore, au risque

d’être à mon tour ennuyeux. Je ne plaide pas pour

une revue somnifère, ni pour que vos collaborateurs

écrivent avec le petit doigt levé. Les exemples que

j’invoquerai ne sont pas Gide, ou Claudel, ou

Jouhandeau. Mais je parle d’une littérature dont les

nouvelles de Tolstoï marquent le sommet et qui est

le lien commun où artistes et travailleurs peuvent se

rejoindre. Vallès, Dabit, Poulaille, Guilloux (avez-

vous lu Compagnons, ce chef-d’œuvre ?), Istrati,

Gorki, Roger Martin du Gard, et tant d’autres,

n’écrivent pas avec le doigt levé, et ils parlent pour

tous, d’une vérité que la littérature bourgeoise,

presque entièrement a perdue, et que le monde des

travailleurs garde presque intacte à mon sens.

Que vous dire d’autre ? Il faudrait, et peut-être le

ferai-je un jour, insister sur cette vérité qu’il y a

entre le travailleur et l’artiste une solidarité

essentielle et que, pourtant, ils sont aujourd’hui

désespérément séparés. Les tyrannies, comme les

démocraties d’argent, savent que, pour régner, il faut

séparer le travail et la culture. Pour le travail

l’oppression économique y suffit à peu près ;

conjuguée à la fabrication d’ersatz de culture (dont

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le cinéma, en général). Pour la seconde, la

corruption et la dérision font leur œuvre. La société

marchande couvre d’or et de privilèges des amuseurs

décorés du nom d’artistes et les pousse à toutes les

concessions. Dès qu’ils acceptent ces concessions,

les voilà liés à leurs privilèges, indifférents ou

hostiles à la justice, et séparés des travailleurs. C’est

donc contre cette entreprise de séparation que vous

et nous, artistes de métier, devrions lutter. D’abord

par le refus des concessions - et puis, nous, en nous

efforçant de plus en plus d’écrire pour tous, si loin

que nous soyons de ce sommet de l’art, et vous qui

souffrez du plus dur de la bataille en pensant à tout

ce qui manque à la littérature d’aujourd’hui et à ce

que vous pouvez lui apporter d’irremplaçable. Ce

n’est pas facile, je le sais, mais le jour où, par ce

double mouvement, nous approcherons de la limite,

il n’y aura plus des artistes d’un côté et, des ouvriers

de l’autre, mais une seule classe de créateurs dans

tous les sens du mot.

Voilà à peu près, trop longuement parce que je vous

écris au courant de la plume, et bien confusément, ce

que je pense. Si je me trompe, pardonnez-moi. Je

vous répète que je ne me sens, devant votre

entreprise, aucune certitude.

Cordialement à vous.

Albert CAMUS.

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Merci pour les Belles journées que je vais lire avec

intérêt. Le sujet est magnifique.