Top Banner
NOTE DE LA RéDACTION 3 Un article qui pourrait être payant par Sim Segal MOT DU PRéSIDENT 4 Invitation à joindre l’INARM par Don Mango GéNéRAL 6 Vers une plus grande capacité de résistance des sociétés d’assurances par Jean-Pierre Berliet 10 La voile et la gestion du risque d’assurance ne font qu’un par David Schraub IDENTIFICATION DES RISQUES 15 Simulation d’un projet de risque émergent par Beverly Barney, Shiraz Jetha, Frank Ashe, Evelyn Meierholzner et Dave Ingram QUANTIFICATION DES RISQUES 19 Analyse des concentrations de crédit par Diane Reynolds 22 Une étude du rendement des modèles de simulation d’ouragans à court terme par Karen Clark 26 étude de cas : Analyse du capital économique de la société Guardian (Les premières années) par Barbara Snyder et Ben Mitchell 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang RéACTION À L’éGARD DES RISQUES 35 Répercussions de la gestion active de fonds sur la tarification des garanties liées aux rentes à capital variable et sur le risque d’entreprise par Simpa Baiye 40 Les négociations sur le climat ont franchi une étape importante en matière d’assurance par Koko Warner 45 Quel est votre programme en matière de politique de tolérance au risque? par Michael Stramaglia CULTURE DU RISQUE ET DIVULGATION DES RISQUES 49 En matière de communication des risques, la qualité de la présentation importe par David Cummings 52 Une mauvaise culture peut-elle tuer une entreprise? par Stephen W. Hiemstra REVUE 16 JUIN 2009 Institut canadien des actuaires Casualty Actuarial Society Society of Actuaries SECTION GESTION DU RISQUE Gestion du risque
57

Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Sep 11, 2018

Download

Documents

phamtu
Welcome message from author
This document is posted to help you gain knowledge. Please leave a comment to let me know what you think about it! Share it to your friends and learn new things together.
Transcript
Page 1: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Note de la rédactioN

3 Un article qui pourrait être payant

par Sim Segal

Mot dU présideNt

4 invitation à joindre l’iNarM

par Don Mango

GéNéral

6 Vers une plus grande capacité de résistance des

sociétés d’assurances

par Jean-Pierre Berliet

10 la voile et la gestion du risque d’assurance ne font qu’un

par David Schraub

ideNtificatioN des risqUes

15 simulation d’un projet de risque émergent

par Beverly Barney, Shiraz Jetha, Frank Ashe,

Evelyn Meierholzner et Dave Ingram

qUaNtificatioN des risqUes

19 analyse des concentrations de crédit

par Diane Reynolds

22 Une étude du rendement des modèles de simulation

d’ouragans à court terme

par Karen Clark

26 étude de cas : analyse du capital économique de

la société Guardian (les premières années)

par Barbara Snyder et Ben Mitchell

31 Modélisation structurelle du risque de crédit :

le modèle de Merton et autres modèles

par Yu Wang

réactioN À l’éGard des risqUes

35 répercussions de la gestion active de fonds sur

la tarification des garanties liées aux rentes à capital

variable et sur le risque d’entreprise

par Simpa Baiye

40 les négociations sur le climat ont franchi une étape

importante en matière d’assurance

par Koko Warner

45 quel est votre programme en matière de politique

de tolérance au risque?

par Michael Stramaglia

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

49 en matière de communication des risques,

la qualité de la présentation importe

par David Cummings

52 Une mauvaise culture peut-elle tuer une entreprise?

par Stephen W. Hiemstra

reVUe 16 ■ JUiN 2009

Institut canadien des actuairesCasualty Actuarial SocietySociety of ActuariessectioN GestioN dU risqUe

Gestion du

risque

Page 2: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du

risque Institut canadien des actuairesCasualty Actuarial SocietySociety of ActuariessectioN GestioN dU risqUe

Publié par la Society of Actuaries

Ce communiqué est gratuit pour les membres de la section.

sectioN 2008-2009 diriGeaNts

rédacteur

Sim Segal

courriel : [email protected]

rédacteurs adjoints

Steven Craighead

courriel : [email protected]

Valentina Isakina

courriel : [email protected]

Membres du conseil

Donald Mango, FCAS, MAAA

Matthew Clark, FSA, MAAA

David Gilliland, FSA, FICA, MAAA

Todd Henderson, FSA, CERA, MAAA

Steven Craighead, ASA, MAAA

A. David Cummings, FCAS, MAAA

B. John Manistre, FSA, CERA, FICA, MAAA

Henry M. McMillan, FSA, CERA, MAAA

Larry H. Rubin, FSA, FCA, MAAA

Barbara Snyder, FSA, FCA, MAAA

Michael P. Stramaglia, FSA, FICA

Judy Ying Shuen Wong, FSA, MAAA

personnes à contacter à la society

Kathryn Wiener, adjointe, rédaction

courriel : [email protected]

Robert Wolf, directeur, services aux sections

courriel : [email protected]

SueMartz, spécialiste de soutien aux sections

courriel : smartz@soa,org

Votre concours et votre participation sont nécessaires et bienvenus. Tous les articles seront

accompagnés d’une signature afin que vous en retiriez toute la reconnaissance que vous

méritez pour vos efforts. Pour soumettre un article, veuillez communiquer avec Sim Segal,

rédacteur, à [email protected].

Prochain numéro de Gestion du risque :

date de pUBlicatioN date de toMBée

décembre 2009 1er juillet 2009

septembre 2009 1er octobre 2009

forMat des articles

Dans le but de favoriser l'efficacité quant à la manipulation des articles, veuillez utiliser

le format suivant :

• document en format Word

• longueur de l'article : 500 à 2 000 mots

• photo de l'auteur (la qualité doit être 300 ppp)

• nom, titre, société, ville, état et courriel

• une citation mise en œuvre (phrase ou portion de phrase) pour chaque tranche de 500 mots

• Times New Roman, police 10 points

• fichier PowerPoint ou Excel original pour les éléments complexes

Si vous devez soumettre vos articles par un autre moyen, veuillez vous adresser à Kathryn

Wiener, à la Society of Actuaries en composant le 847.706.3501.

Veuillez faire parvenir une copie électronique de votre article à :

sim segal, fsa, cera, Maaa

US Leader of ERM Services

Watson Wyatt Insurance & Financial Services, Inc.

875 Third Avenue

New York, NY 10022-6225

t : 917.699.3373

c : [email protected]

Les opinions exprimées sont celles de l’auteur

et ne peuvent être attribuées à la Society of

Actuaries, à ses comités, à la Section de la

gestion des risques ou à l’employeur de l’auteur.

Nous nous empresserons de corriger toute

erreur qui sera portée à notre attention.

© 2009 Society of Actuaries. Tous droits réservés.

reVUe 16 ■ JUiN 2009

articles deMaNdés poUr la reVUe GestioN dU risqUe

2 | JUiN 2009 | Gestion du risque

Page 3: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 3

ENCORE UNE FOIS, MISSION ACCOMPLIE. Pour le troisième numéro de suite, nous avons respecté notre engage-ment à assurer l’équilibre de nos articles—au moins un article dans chacune de nos catégories de sujets. Et ce n’est pas facile. Pour nous aider à recevoir des articles dans les catégories les plus difficiles, nous avons récemment instauré un prix de 500 $ pour le meilleur article de chaque numéro. Au nom de la sec-tion conjointe de la gestion des risques (SCGR), je suis heureux d’annoncer que notre premier gagnant est Max Rudolph, pour son article intitulé Enquête sur les risques émergents dans notre numéro de mars 2009. Je me joins à vous pour féliciter Max pour son excellent article.

Si vous souhaitez nous aider en nous fournissant un article dans l’une des catégories susmentionnées (et avoir la chance de remporter le prix de 500 $), veuillez consulter la liste ci-après des trois catégories admissibles et une liste partielle des idées de sujets.

Identification des risques• Risques émergents• Catégorisation et définition des risques• Évaluation qualitative interne des risques Réaction à l’égard des risques• Propension au risque et seuils de risque• Prise de décision en GRE, y compris la planification

stratégique et la tarification• Gestion conforme aux exigences des organismes

de notation et aux contraintes réglementaires Culture du risque et divulgation des risques• Gouvernance du risque• Intégration de la GRE dans la rémunération incitative• Divulgation des risques

En outre, vous avez peut-être remarqué une autre améliora-tion dans les trois derniers numéros. Nous avons demandé des articles rédigés plus serrés, la plupart de moins de 2 000 mots, et nos contributeurs ont donné suite à cette demande. Bien que cette exigence facilite la lecture en gestion des risques, la chose est plus difficile qu’elle ne le paraît; alors, félicitations aux auteurs pour leurs efforts supplémentaires.

Nous espérons que vous aimerez le présent numéro. Nous avons récemment reçu des commentaires positifs. Nous croyons donc que nous sommes sur la bonne voie. Toutefois, nous tentons toujours de nous améliorer; alors, si vous connaissez des trucs pour nous aider à mieux satisfaire à vos besoins, veuillez nous les transmettre. Vous pouvez me joindre à l’adresse [email protected]. ■

Note de la rédactioN

Un article qui pourrait être payantpar Sim Segal

sim segal, fsa, cera, Maaa

est le responsable américan des services de

GRE auprés de Watson Wyatt Insurance, Inc.

à New York (NY). On peut le joindre à

[email protected].

Gestion du risque | JUiN 2009 | 3

Page 4: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

4 | JUiN 2009 | Gestion du risque

Mot dU présideNt

UNE INITIATIVE DE DAVE INGRAM… Pour ceux d’entre vous qui l’ignorent, l’International Network of Actuarial Risk Managers (INARM) est de fait le bras international de la Joint Risk Management Section (JRMS-Section mixte sur la gestion du risque). Dit de façon plus appropriée, l’INARM a été lancé par Dave Ingram à titre de groupe d’intérêt inter-national qui est ouvert à tous les membres des associations actuarielles de par le monde. Il tient lieu de réseau permettant aux membres d’échanger leurs connaissances dans le domaine de la gestion du risque et en ce qui a trait à l’évolution de ce domaine à l’échelle internationale.

L’INARM est une organisation virtuelle du XXIe siècle et consiste en un gestionnaire de liste de diffusion et un blogue (www.inarm.org). Les personnes intéressées à faire partie de la liste de diffusion sont invitées à consulter le lien Listservs qui figure sur le site Web de la JRMS. (Il convient de noter que la JRMS finance les frais de gestion du blogue de l’INARM.) Le gestionnaire de liste produit des articles qui renseignent sur les activités de l’INARM et il permet aux participants de communiquer entre eux par courriel sur des sujets portant sur la gestion du risque.

Les membres de l’INARM d’un peu partout dans le monde ont été très actifs pendant la crise financière. Nombre d’entre eux ont rédigé un article dans le cadre de la série sur la crise finan-cière, tandis que d’autres ont assisté aux deux webinaires inter-nationaux sur la GRE, dont certains, à titre de conférencier.

Jusqu’à tout récemment, le gestionnaire de liste était le volet le plus actif de l’INARM. Voici quelques-uns des sujets ayant récemment fait l’objet d’une discussion par courriel :

• l’évaluation des valeurs mobilières en tant qu’activité de l’actuaire;

• les simulations de crise;• les systèmes de solvabilité à l’échelle mondiale;

• les actuaires en qualité de gestionnaires principaux du risque;

• les systèmes de contrôle technique et la GRE;• la rétention des risques (un classique d’Ingram).

Le blogue est le fruit d’un nouveau projet et tient lieu de tribune électronique permanente pour les longues commu-nications portant sur de nombreux sujets importants liés à la GRE, tels que la modélisation du capital économique, les risques nouveaux, la GRE et l’actuaire, l’instabilité financière et les marges de risque. Tous sont invités à visiter le blogue de l’INARM et à participer aux discussions en ligne. Si elle réussit, cette tribune permettra de créer une grande banque de contenu intellectuel dans laquelle la profession pourra puiser au fur et à mesure qu’elle accroîtra sa notoriété dans le domaine de la GRE.

reGard sUr l’aVeNir

Jusqu’à présent, l’INARM s’est surtout voulu un réseau de membres plutôt qu’un regroupement d’associations, c’est-à-dire un réseau composé de spécialistes individuels plutôt qu’un réseau formé de représentants d’associations, car l’AAI assume déjà ce dernier rôle.

Si l’INARM parvient à prendre son envol – les premiers signes sont encourageants –, il faudra y donner une structure officielle. Le cas échéant, il va de soi que l’opinion des personnes et des groupes représentés par les participants sera sollicitée.

Contribuez donc à assurer la notoriété de la profession en ma tière de GRE aux quatre coins du globe en joignant l’INARM dès aujourd’hui! ■

donald f. Mango, fcas, Maaa,

est actuaire principal au sein du cabinet Guy

Carpenter & Co., LLC, au New Jersey. On peut

le joindre à [email protected].

invitation à joindre l’iNARMpar Donald F. Mango

Page 5: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Session 37 - Panel DiscussionERM BESt PRacticES - a caSE StuDy of

caSE StuDiES

one of the research projects under the prevue of the joint

risk management section is focused on researching best

practices in ERM which, if implemented properly, could

have prevented some of the high-profiled corporate fail-

ures of the past decade. in this session, experts will discuss

WorldcoM, EnRon and others, with ample opportunities

for a Socratic dialogue between you and the panelists.

Session 128 - Panel DiscussionPRuDEnt EntERPRiSE RiSk ManagEMEnt: it

StaRtS anD EnDS With coRPoRatE cultuRE

this session will cover how the actuarial profession can help

balance incentive compensation that rewards returns with

the need to reflect risk undertaken to achieve those returns.

Soa09AnnuAl meeting & exhibitOctober 25–28, 2009

boston marriott Copley Place and Westin hotel Copley Place boston, mA

Visit www.SOAAnnualMeeting.org to learn more about the Soa 09 annual Meeting & Exhibit, where you can expect fresh ideas, innovative seminars and top-notch speakers, plus plenty of networking opportunities.

BE SuRE to Sign uP foR thESE infoRMatiVE SESSionS:

Page 6: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

6 | JUiN 2009 | Gestion du risque

LES CRISES FINANCIèRES sont généralement reconnues comme étant un aspect incontournable du capitalisme. À l’avenir, les sociétés d’assurances et autres institutions financières auront fort à faire pour élaborer des plans permettant de prévenir ou de contenir les effets perturbateurs des crises éventuelles et de se redresser.

Vu que de nombreuses institutions ont été au bord de la faillite en 2008, il importe de se demander pourquoi certaines d’entre elles ont conservé leur autonomie alors que d’autres n’ont pas pu le faire. Certaines données indiquent que les sociétés qui ont conservé leur autonomie avaient mérité la confiance des investis-seurs en raison de leur rendement supérieur à long terme et du fait qu’elles n’avaient pas enregistré de pertes catastrophiques au cours de la crise. On leur a fait confiance et on leur a donné une autre chance; plus particulièrement, on leur a procuré des capitaux supplémentaires afin d’assurer leur fonctionnement (p. ex., Métropolitaine-vie, Goldman Sachs et Manuvie). Les institu-tions n’ayant pu se redresser ont dû soit fusionner (Bear Stearns, Countrywide, Washington Mutual), soit faire l’objet d’une nationalisation partielle (AIG, Bank of America, Citigroup) ou d’une réorganisation judiciaire (Lehman Brothers).

Il est facile de rejeter la responsabilité des répercussions de la crise sur les chefs de la gestion des risques (CGR) et sur la ges-tion du risque d’entreprise (GRE), mais cela est injuste et peu honnête. Chez certaines entreprises, le CGR avait bel et bien le pouvoir d’empêcher l’exécution de stratégies qui, bien qu’elles fussent risquées, ont quand même été menées à bien afin de répondre aux attentes de bénéfices des investisseurs et aux objectifs de rendement de la direction. Indépendamment de cette tension inhérente entre le risque et les bénéfices, il semble que certaines lacunes des processus de GRE, de gestion axée sur la valeur (GAV) et de gestion par objectifs (GO) aient concouru à rendre les entreprises plus vulnérables à la crise. La GAV a aidé les entreprises à comparer diverses stratégies sur le plan de la création de valeur et à choisir une ligne de conduite qui augmentait leur valeur, tandis que la GO a permis de transposer les objectifs commerciaux en objectifs de rendement et de fixer des primes au rendement.

Les lacunes des processus de GRE, de GAV et de GO peuvent faire avorter les stratégies visant à prévenir ou à contenir les effets d’une crise ou à y faire face. Ces lacunes doivent être corrigées afin que la direction puisse se conformer aux signaux que donnent ces processus. Chacun de ces trois processus de gestion se situe au cœur d’une étape particulière de la gestion de crises :

• la GRE en matière d’atténuation;• la GAV en matière de reprise;• la GO en matière de prévention.

Le fait d’améliorer ces processus, plus particulièrement au moyen de l’élaboration et de l’utilisation d’indicateurs et de mesures de risque, permettrait d’augmenter la capacité de résistance des sociétés d’assurances.

attéNUatioN des crises : la Gre JoUe UN rôle

esseNtiel eN Matière de rétaBlisseMeNt dU

NiVeaU dU capital

Les mesures d’atténuation des crises consistent essentielle-ment à définir une nouvelle relation entre l’exposition aux risques et le capital disponible et à augmenter la suffisance du capital. Réaligner l’exposition aux risques et le capital (et la capacité implicite aux risques) permet d’augmenter les notations de solvabilité des sociétés d’assurances, de même que la confiance des investisseurs et des clients. Sans cette confiance, le chiffre d’affaires et la valeur de franchise des entreprises s’effriteraient rapidement.

Face à cette crise, de nombreuses institutions ont amélioré la suffisance du capital a) en réduisant leurs dépenses, b) en réduisant les paiements de participations, c) en mettant fin aux programmes de rachat d’actions, et d) en cédant des actifs et des filiales d’opérations non stratégiques, toutes des mesures permettant de préserver ou d’accroître le capital. Il existe bien quelques acheteurs sur le marché en période de crise, mais les désinvestissements et les ventes d’actifs se négo-cient à des prix inférieurs à la normale et ils constituent donc des sources de capital fort coûteuses.

Les stratégies de réalignement prévoient également la réduction des activités dont le rendement du capital est médiocre. En règle générale, on procède comme suit : a) cession de blocs de contrats et de droits de renouvellement, b) élimination de certains types de garantie, c) vente de filiales, d) modification des limites de souscription, des conditions et des exclusions, e) stratégies de réassurance, etc. Les modèles

Jean-pierre Berliet est le fondateur de Berliet

Associates, LLC, cabinet d’experts-conseils de

la région de New York, spécialisé en stratégie

et en gestion des risques. Vous pouvez le

joindre à [email protected].

Vers une plus grande capacité de résistance des sociétés d’assurancespar Jean-Pierre Berliet

GéNéral

Page 7: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 7

GéNéral

d’analyse de risque de la GRE servent à évaluer la relation existant entre les besoins en capital et la création de valeur des diverses branches d’activité. Sans cette évaluation, il serait dif-ficile de relier l’exposition aux risques au capital disponible.

Les estimations des exigences de capital qui se fondent sur des mesures de risque définies sur une période de référence d’un an (une caractéristique des règles prudentielles) ne sont pas fiables en période de crise parce qu’elles présupposent qu’il est possible de mobiliser des capitaux frais « de reprise ». Or, les agences de notation, les organismes de réglementation et les investisseurs savent qu’un grand nombre de sociétés solvables ne peuvent lever des capitaux frais pendant une crise. Le capital n’est adéquat que s’il permet à l’entreprise de fonctionner sur une base de « continuité » en l’absence de capital de reprise, mais au moyen du capital autogénéré.

La GRE doit procurer aux sociétés d’excellents indicateurs leur permettant d’évaluer leurs besoins en capital (au bilan ou hors bilan, y compris le capital d’urgence) et d’élaborer des stratégies efficaces de réduction des risques. Le processus de GRE des sociétés doit leur permettre :

• de mesurer l’utilisation du capital selon le type d’activité et le type de risque;

• de déterminer la création relative de valeur de chacun des secteurs d’activité, en tenant dûment compte des niveaux de risque;

• de cerner les effets des diverses stratégies de réduction et leur potentiel de création de valeur.

C’est en permettant aux sociétés d’obtenir des renseigne-ments précieux concernant l’utilisation et la suffisance du capital et la création de valeur que la GRE les aidera à formuler des stratégies efficaces d’atténuation des crises.

eN période d’après-crise, la GaV JoUe UN

rôle crUcial poUr ce qUi est de reNforcer la

crédiBilité et faciliter la leVée de capitaUx

Une fois la confiance rétablie, les institutions doivent de nouveau mettre l’accent sur la croissance. Elles ne pourront y parvenir sans d’abord rétablir leur capacité de prise en charge des risques, ce qu’elles feront soit en ne distribuant pas leurs bénéfices, soit en mobilisant des capitaux supplémentaires, soit en utilisant ces deux moyens à la fois.

En période de crise financière, l’accès au capital constitue un avantage stratégique crucial. Les institutions jouissant d’une

bonne réputation sur le plan de la création de valeur peuvent lever du nouveau capital « de reprise » sans entraîner une dilu-tion trop importante de l’actionnariat (p.ex., Goldman Sachs). Pour les autres institutions, il est difficile, voire impossible d’avoir accès aux marchés boursiers, ce qui les rend vulnérables aux avances des concurrents et aux offres publiques d’achat non sollicitées. Les cadres et les processus de GAV ont essen-tiellement pour but de faire en sorte que les sociétés puissent toujours répondre aux attentes des investisseurs en matière de création de valeur et surmonter les crises.

Les cadres de GAV permettent aux gestionnaires de com-parer les diverses options afin qu’ils puissent affecter le capital à des usages favorisant la réalisation d’avantages concur-rentiels durables et la création de valeur. Dans le secteur des assurances, il s’agit d’une tâche difficile, car les concur-rents ont la possibilité de reproduire, dans un laps de temps relativement court, les innovations relatives aux caractéris-tiques des produits, à la prestation des services ou à l’efficacité opérationnelle et de réaffecter le capital d’un trait de plume. Pareille dynamique concurrentielle incite les institutions à rivaliser en développant des capacités organisationnelles a) qui sont plus difficiles à reproduire par les concurrents et b) qui leur procurent un avantage sur le plan des prix ou des coûts qui repose sur la qualité du service, une bonne compréhension de l’activité de souscription, le rendement des placements et la gestion du risque et du capital.

Étant donné que, dans les activités d’assurance, le niveau de risque détermine l’utilisation du capital, il faut donc intégrer les cadres de GRE et de GAV afin de pouvoir élaborer des stratégies et des plans qui répondent aux attentes en matière de valeur. Cette intégration repose sur a) une excellente

« Pour pouvoir gagner la confiance des investisseurs et continuer

d’avoir accès à du capital à un coût abordable, il faut que les

sociétés offrent à leurs actionnaires des rendements supérieurs. »

suite à la page 8

Page 8: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

8 | JUiN 2009 | Gestion du risque

compréhension des risques encourus et de l’utilisation du capital et sur b) des mesures de risque cohérentes définies à un niveau de détail permettant d’avoir un avantage au chapitre des ratios de sinistres (possiblement selon le même niveau de détail que celui servant au calcul des ratios de sinistres). En pratique, cette compréhension et ces mesures entraînent le rejet des activités et des stratégies qui ne créent pas de valeur et ils fournissent une base pour :

• mesurer l’utilisation du capital selon les secteurs d’activités et les marchés, de même que de façon globale;

• établir un meilleur et plus méthodique processus de tarification;

• optimiser les caractéristiques des produits;• maintenir une discipline de prix par le biais du cycle

de tarification; • établir équitablement le prix des options et des garanties

incorporées aux produits;• contrôler l’accumulation des risques en fonction des

clients et des circuits de distribution;• gérer la composition du portefeuille de contrats;• faciliter les activités de commercialisation et de

distribution;• optimiser les stratégies de gestion du risque et du capital.

Pour pouvoir gagner la confiance des investisseurs et continuer d’avoir accès à du capital à un coût abordable, il faut que les sociétés offrent à leurs actionnaires des rendements supérieurs. L’accès au capital en période de crise est peut-être le meilleur indicateur en bout de ligne de l’efficacité du cadre de GAV d’une institution. Selon certaines données empiriques, les sociétés d’assurances qui négocient des biens à des prix beaucoup plus élevés que leur valeur comptable possèdent cette compréhension des risques et appliquent toujours une approche rigoureuse en matière de souscription de contrats.

La présente crise a augmenté de façon marquée le coût du capital pour les assureurs, quoique à des degrés divers. Le capital demeure abordable pour les institutions affichant d’excellents antécédents en matière de création de valeur et qui disposent de capitaux suffisants en raison d’une saine gestion des risques. Par contre, il est devenu hors de prix pour celles dont les antécédents en matière de création de valeur sont moins importants et qui ont perdu de la crédibilité à titre de gardiens des intérêts des actionnaires. Ces dernières risquent de devoir fusionner ou faire l’objet d’une liquidation, ce qui pourrait être perçu comme une punition pour ne pas avoir intégré plus efficacement les processus de GRE et de GAV.

préVeNtioN des crises fUtUres : repeNser la Go

afiN de rédUire le risqUe Moral

La haute direction tire généralement une grande fierté de son approche rigoureuse et méthodique en matière de gestion du rendement, laquelle consiste à établir des objectifs variables, à récompenser les gestionnaires qui obtiennent de bons résultats et à punir ceux qui n'atteignent pas leurs objectifs. On soutient qu’il est nécessaire d’adopter une approche fondée sur « l’avidité et la peur » afin de motiver les gestionnaires et d’aligner leurs intérêts sur ceux des actionnaires. Or, il n’est pas largement reconnu que cette approche puisse accroître le risque moral et inciter les gestionnaires à prendre des décisions qui diminuent la capacité d’adaptation des institutions.

Dans cette culture, les gestionnaires sont encouragés à dépasser les attentes de la direction en employant tous les moyens disponibles, ce qui peut consister à :

• réduire ou remettre à plus tard les dépenses relatives aux produits ou à la qualité des services, au leadership en matière de produits, à la productivité des processus ou à la capacité d’adaptation du service à la clientèle;

• tarifer les risques à un prix inférieur à celui du marché afin d’accroître le chiffre d’affaires et les bénéfices;

• prendre des risques de placement plus élevés que d’ordinaire afin d’augmenter le rendement courant des placements;

• investir moins qu’il ne le faudrait dans le développement des marchés et ainsi augmenter les bénéfices à court terme, mais au détriment de la part de marché.

Des mesures comme celles-là peuvent accroître les béné-fices à court terme, mais elles peuvent également nuire à la capacité concurrentielle d’une société et affaiblir son potentiel de création de valeur, ce qui, par la suite, peut compromettre sa capacité à lever du capital et, par voie de conséquence, réduire sa capacité de résistance. L’intégration de mesures de rendement ajustées en fonction des risques dans le dispositif de contrôle des sociétés peut les aider à réduire l’incidence des mesures prises à mauvais escient afin d’abuser du système de rémunération au rendement. Toutefois, il est difficile de détecter le risque moral, car les effets des mesures prises peuvent demeurer latents pendant une longue période.

Le risque moral de ce type a tendance à influer sur les décisions pour lesquelles la haute direction se concentre sur les résultats financiers publiés plutôt que sur les facteurs sur lesquels repose la réussite des opérations. L’importance exagérée et parfois

GéNéral

Vers une plus grande capacité de résistance… | suite de la page 7

Page 9: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 9

exclusive accordée aux résultats financiers donne aux gestion-naires de l’exploitation toute latitude pour « atteindre les chiffres ». Dans de nombreux cas (p. ex., AIG, Bear Stearns, Citigroup, Lehman Brothers), pareille approche en matière de supervision a entraîné des risques moraux qui ont eu de graves conséquences. Lorsqu’elles sont combinées au levier financier et au levier de risque, les décisions entachées d’un risque moral peuvent entraîner d’énormes pertes pour les actionnaires.

Les sociétés d’assurances doivent repenser leurs cadres de GO afin de réduire le risque moral. Elles doivent mettre en place une culture dans laquelle les discussions au sujet des objectifs, des stratégies et des résultats, bien qu’elles ne reposent jamais sur une connaissance et une clairvoyance parfaites, sont guidées par les grandes valeurs que sont la confiance et la loyauté. Les nouveaux cadres de GO doivent tenir compte, de façon explicite, de l’information sur les risques produite par le processus de GRE et de la vérification de l’adéquation des mesures prises par rapport aux plans et aux stratégies approuvés.

Pour pouvoir accomplir une telle transformation de leur culture, les assureurs devront sans doute intégrer leurs processus de GRE et de GO, grâce à l’instauration :

• de mesures du rendement financier qui sont ajustées en fonction des risques;

• d’indices de référence sur le rendement qui sont ajustés en fonction des risques et liés aux attentes des investisseurs des marchés financiers;

• de primes au rendement liées à des mesures à long terme de la valeur de l’entreprise, notamment des indicateurs du rendement opérationnel, ainsi qu’aux bénéfices courants.

Comme aucune entreprise n’a une connaissance parfaite de l’avenir, le conseil d’administration doit accorder à la haute direction toute la latitude et la souplesse voulues en matière de gestion du rendement. Le fait de pouvoir rajuster les objectifs pourrait être d’une importance capitale si la situation de l’entreprise venait à changer de façon inattendue. Dans un monde d’incertitudes, l’application stricte de mesures vient renforcer les éléments d’avidité et de peur inhérents à la culture de l’entreprise, mine la confiance des employés, alimente le cynisme, favorise l’abus du système et augmente le risque moral en favorisant les comportements qui, tôt ou tard, finiront par conduire la société d’assurances à sa perte.

coNclUsioN : la Gre, la GaV et la Go forMeNt

les piliers de la capacité de résistaNce des

sociétés d’assUraNces

Dans la foulée de la présente crise, les sociétés d’assurances devront intégrer dans la GAV et la GO l’information produite par la GRE au sujet des risques stratégiques et de la suffisance du capital, afin que ces processus concourent à former les piliers de la capacité de résistance des institutions. Le fait d’améliorer et d’adapter ces processus constitue un moyen « prudent » d’assurer la viabilité des institutions sur une base de continuité, bref, d’accroître leur résistance. C’est d’ailleurs ce que vont exiger les investisseurs. ■

Nota : Se reporter à l’article de Jean-Pierre Berliet intitulé « Les

leçons tirées de la crise financière pour les administrateurs et les

PDG des sociétés d'assurance », publié conjointement par la Society

of Actuaries, la Casualty Actuarial Society et l’Institut canadien des

actuaires en décembre 2008, et qui figure à l’adresse http://www.

soa.org/library/essays/rm-essay-2008-berliet.pdf.

GéNéral

Page 10: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

GéNéral

10 | JUiN 2009 | Gestion du risque

À qUoi se résUMe la Voile?

La Vendée Globe est une aventure formidable avec des skippers chevronnés, des risques appréciables et un fil d’arrivée de nombreuses semaines plus tard. Cette course autour du monde se fait sans escale et sans assistance. Le skipper est seul sur son navire pendant des mois et est exposé à tous les élé-ments. Michel Desjoyeaux a remporté la course de 2008/2009, dans un temps de 84 jours, trois heures, neuf minutes et huit secondes, à une vitesse moyenne de 12,3 nœuds sur le parcours théorique et de 14 nœuds sur les 28 303 milles réellement couverts sur l’eau. Les autres skippers ont terminé la course 42 jours plus tard et 18 concurrents ont abandonné.

Beaucoup suivent l’événement en se concentrant sur la course en soi et sur la manière d’accélérer la vitesse du bateau. Les débutants1 sont impressionnés par la façon dont on peut pousser le bateau et rajuster la position des voiles pour optimiser la vitesse tout en évitant un accident mécanique. Ils savent aussi comment synchroniser un virage pour éviter les rochers et les autres menaces directes. Ceux qui sont plus avancés connais-sent les marées,2 les courants, la température saisonnière et les autres éléments qui influent sur la flottabilité. Rares sont ceux qui s'y connaissent en aérodynamique, en hydrodynamique et autres théories de résistance des matériaux qui interviennent dans la conception de la forme d’un bateau. Sans connaître les intentions des ingénieurs, les skippers avisés doivent posséder 1) une connaissance pratique de la mécanique des fluides pour être en mesure de savoir où se situe le point de rupture, 2) une connaissance approfondie des courants marins et des saisons des vents dans le monde entier et 3) des habiletés de navigation parfaites.

les trois horizoNs

la stratégie est le premier choix à faire

Pour le navigateur, il s’agit de déterminer l’attirail qui convient à la course : que ce soit un monocoque ou un catamaran, petit

et léger ou fort et lourd, ces choix influeront considérablement sur les décisions futures. Vous ne traverserez pas le cap Horn en canot. Ces décisions doivent être prises très tôt dans le processus, jusqu’à cinq ans avant la course.

Pour le président et chef de la direction (PDG) d’une société d’assurances, il s’agit de déterminer le type de modèle opéra-tionnel qui convient au type d’industrie en ayant recours à un horizon d’au moins cinq ans. Par exemple, il doit connaître les secteurs d’assurance offerts par la société et la manière dont elle fait de l’argent. Les polices d’assurance-santé génèrent des bénéfices en imputant une prime plus élevée au titulaire de la police tout en maîtrisant les frais des soins de santé qui sont versés aux fournisseurs de soins de santé. Les risques associés aux polices d’assurance-santé sont surtout d’ordre straté-gique (l’administration Obama redéfinissant actuel-lement les règles du jeu). Pour les polices d'assurance-épargne, les écarts de taux permettent de générer un bon rendement sur les actifs investis et de n’en transférer qu’une partie aux clients (la société gagnant ainsi l’écart entre le taux réalisé et le taux crédité). Le risque ici est principalement un risque de marché. Le modèle opérationnel des assurances IARD et de l’assurance-vie repose sur l’aversion pour le risque,3 tandis que les risques sont véritablement attribuables à la tarification et à la souscription. Une fois de plus, les décisions doivent être prises au tout début.

la planification est le deuxième choix à faire

Pour le navigateur, il s’agit de déterminer le parcours qu’il devrait suivre en fonction d’un horizon temporel mesuré en semaines. Ces choix d’itinéraire sont fonction du type de navire déjà choisi. Tous les parcours n’ont pas des tracés égaux : dans certains, les vents sont plus favorables durant certaines saisons alors que d’autres ont des courants plus forts. Dépendant de la structure de son embarcation et de ses propres compétences, il pourrait préférer un vent au-dessus du courant, une randonnée plus douce qu’un parcours à risque et à vitesse élevés. Dans la course de 2008–2009, Guillemot a emprunté une meilleure route que Davies près de la côte brésilienne, mais il a connu plus d’aventures (des pêcheurs furieux l’ont pourchassé parce que son embarcation était prise dans leurs lignes à pêche).

Pour le PDG d’une société d’assurances, il s’agit de prendre des décisions en matière d’affectation du capital aux unités

david schraub, aq, asa, cera, Maaa,

est actuaire associé, capital économique

et nouvelles applications, à l’Allstate Life

insurance Company à Northbrook (ill.). On

peut le joindre à [email protected].

La voile et la gestion du risque d’assurance ne font qu’un par David Schraub

1 Malheureusement, j’ai encore bien du chemin à faire pour me rendre à cette étape (mais je suis prêt à apprendre).

2 Sauf dans la région des Grands Lacs.

3 Les clients sont disposés à verser un certain montant en excédent de leurs pertes prévues variables pour être en mesure d’éliminer l’incertitude.

Page 11: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

GéNéral

Gestion du risque | JUiN 2009 | 11

opérationnelles et de réassurance et d’autres décisions de planification dans un horizon temporel d’un an. Il affectera le capital à une unité opérationnelle dont le rendement des capitaux propres est élevé ou dont le profil de risque est faible et conclura des contrats de réassurance pour réduire les risques ou gérer le capital. Cette affectation est possible grâce au niveau de capital de la société (niveau stratégique) qui influe sur les décisions tactiques par la suite. C'est également à cette étape qu'il faut décider d’entrer dans un réseau de distribution ou d’en sortir. Cette décision est soit en accord avec le modèle opérationnel déjà choisi soit il le refaçonne. La même décision influera sur l’univers des possibilités tactiques.

la mise en œuvre est le troisième choix à faire

Pour le navigateur, il s’agit effectivement de naviguer dans un horizon temporel mesuré en minutes. Il doit tirer sur le bon bout de corde pour placer la voile de façon optimale. Tourner la manivelle de Winch d’un quart de tour peut permettre de gagner deux nœuds à l’heure. La marge de manœuvre est fonction de la structure du navire et du parcours choisi; les décisions prises en amont devront être revues si les compétences opérationnelles se trouvent en deça des estimations.

Pour le PDG d’une société d’assurances, il s’agit de procéder à la mise en œuvre dans un horizon temporel d’au plus un mois. La valeur doit être partagée entre l’effectif des ventes, les clients et la société4 afin de vendre suffisamment de polices rentables tout comme la souscription des placements privés doit être faite de manière appropriée pour limiter les éventuels cas de défaut.

l’iNteractioN eNtre les horizoNs

Une décision en amont façonne les éventuels choix en aval. Un choix en aval doit se conformer à la décision prise en amont ou provoquer un changement de cette décision.

Pour le navigateur, cela pourrait vouloir dire

• arrêter, réparer le navire et reprendre la course — les défis de la mise en œuvre peuvent l’obliger à repenser l’équipement choisi (Desjoyeaux l’a justement fait le premier jour); et

• rebrousser chemin et changer d’itinéraire si le raccourci ne vaut la peine d’affronter la tempête – les défis de la mise en œuvre obligent la personne à repenser l’itinéraire (par exemple, Thompson a été obligé de rebrousser chemin pour se mettre à l’abri le temps que la tempête

frappant le cap Horn diminue d’intensité). Pour le PDG d’une société d’assurances, cela pourrait

vouloir dire ce qui suit :• les dépenses afférentes aux ventes sont fonction du choix

du réseau de distribution — les choix antérieurs limitent les décisions tactiques; et

• le profil économique du réseau de distribution pourrait inciter à délaisser un secteur d’assurance — ici, les enjeux tactiques remettent en question les décisions de planification.

les aNcieNs et les NoUVeaUx eNseMBles

de MesUres

les anciennes mesures de la gestion des risques

Pour le navigateur, il s’agit de sentir la coque du navire pour vérifier les endroits rugueux, de grimper sur le mât pour vérifier s’il y a tempête ou terre en vue, de jeter un coup d’œil au com-pas, au sextant et à la position du soleil pour choisir l’itinéraire. Peu importe la technologie et les nouveaux outils à leur disposi-tion, les navigateurs auront recours à une partie ou à la totalité de ces approches traditionnelles pour se sentir à l’aise avec leurs décisions — que ce soit la structure du bateau, l’itinéraire ou la mise en place de ceux-ci. Autrement dit, ces anciennes tech-niques dressent la plupart du temps une image fiable.

Pour le PDG d’une société d’assurances, il s’agit d’examiner les facteurs du CBR, les facteurs de Solvabilité I, les ratios de liquidité, les variables grecques et les autres approches reposant sur des formules. Ces mesures sont très utiles et tout le monde les connaît. Ainsi, la communication est meilleure, les gens en connaissent l’utilité et les enjeux et ils peuvent rajuster la mesure pour neutraliser toute lacune perçue. Dans le cadre de la crise qui nous ébranle aujourd’hui, les sociétés manquent

4 Il s’agit notamment des incitatifs à la vente, des structures des dépenses, de la conception des produits et de la valeur apparente pour les clients.

« Aux fins de la gestion des risques, ce débat est en grande partie

non pertinent. Toutes les mesures devraient produire des profils de

risque comparables. »

suite à la page 12

Page 12: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

GéNéral

12 | JUiN 2009 | Gestion du risque

Avec le nouvel ensemble de mesures, les mesures à utiliser font l’objet d’un sain débat. Pour des considérations de planifica-tion, voici les candidats en lice :

• ECU s’appuyant sur une projection réelle, option défendue par la NAIC

• projection sans risque dans des conditions de départ modifiées

• stochastique sur stochastique • approche canadienne • hypothèses incluant une marge prudentielle c. hypothèses

prudentes dans la limite de l'intervalle de confiance c. estimations sans marge

Les différences sont importantes sur les plans que voici :

• robustesse — prévenir de jouer sur la mesure/approbation préalable des modèles/scénarios standard/vérifiabilité

• considérations d’ordre pratique — temps consacré aux calculs et durée de conservation des résultats/comparabilité des résultats/sens

• optique de l’actionnaire par rapport à celle du titulaire de la police — les actionnaires s’intéressent à la mesure VaR en raison de leur option de vente tandis que les organismes de réglementation tendent vers les mesures de l’ECU, car ils doivent rembourser les titulaires de manière prématurée

• niveau du percentile — uniforme d’une société à l’autre c. lié aux cotes avec ou sans l’appui du groupe

• mesure des événements aux extrémités c. mesure des événements modérément défavorables

• charges de travail différentes

Aux fins de la gestion des risques, ce débat est en grande partie non pertinent. Toutes les mesures devraient produire des pro-fils de risque comparables. La comparaison entre les risques devrait être identique qu’on utilise la mesure ECU(80) ou VaR(95) et le fait d’avoir accès à une poignée de valeurs ECU et VaR à divers points de la distribution devraient couvrir la plupart des situations. En ce qui a trait à la constitution de réserves, à la gestion du capital et à d’autres applications, le choix des mesures a plus de poids.

chaqUe NoUVelle MesUre a soN lot d’aVaNtaGes et d’iNcoNVéNieNts

Mesure-assurance-vie inconvénient Mesure de la navigation inconvénient

VaR Bourrer l’extrémité Mesure de la profondeur Éviter un tronc d’arbre flottant

ECU pour les principaux risques, hypothèse relative à la PED pour les autres

PED insuffisante car le risque non modélisé est corrélé avec l’événement aux extrémités du risque modélisé

Lunettes et binoculaire Éviter le sous-marin

ECU pour tous les risques Temps-machine et autres considérations d’ordre pratique

Sonar, radar, binoculaire, appareil de mesure de la profondeur,…

Dispendieux

Toutes les mesures permettront d'éviter les principaux risques

Toutes les mesures indiqueront la proximité de la terre et permettront d’éviter de s’échouer sur le rivage

Le risque de concentration découlant de l’achat d’obligations émises par un groupe d’assurance, qui se trouve à être aussi une contrepartie importante de la réassurance, n’est pris en compte par aucune de ces mesures. Les risques ne seront pas par magie identifiés par les organismes de réglementation ou les agences de notation sans que les sociétés ne mettent la main à la pâte!

La voile et la gestion du risque… | suite de la page 11

Page 13: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

GéNéral

Gestion du risque | JUiN 2009 | 13

de capital, peu importe la mesure utilisée. Tout comme pour les anciennes techniques de navigation, ces anciennes mesures décrivent toujours correctement le risque auquel on fait face dans la plupart des cas.

les NoUVelles MesUres de la GestioN des risqUes

Pour le navigateur, la nouvelle trousse à outils comprend des lunettes de nuit et à rayons infrarouges, un radar, un sonar, un GPS, un écho-sondeur et les prévisions météo. Au départ, les navigateurs démontraient un scepticisme sain à l’égard des nouveaux outils, mais après un certain temps, leur méfiance s’est estompée, car ils avaient accès à des mesures plus justes et ils découvraient l’utilité et les lacunes des nouvelles mesures. Les prévisions météo sont utilisées partout dans le monde; nous savons tous que les prévisions du jour sont fiables sur terre et près de la côte, mais qu’elles sont généralement peu précises dans les eaux internationales. Nous savons aussi que les prévisions sur deux mois ne valent pas plus que le papier sur lesquelles elles sont imprimées.

Pour le PDG d’une société d’assurances, la nouvelle trousse à outils comprend l’examen des flux monétaires, les phases 1, 2, 3 du C3, Solvabilité II, VaR quotidienne et VaR de dix jours et la FAS 157, tous de nature stochastique. Certaines de ces mesures ont fait l’objet d’essais sur le terrain depuis plus longtemps que d’autres et commencent à être acceptées. Les gens savent en quoi consistent les scénarios New York 7 (NY7) et ce que signifie un résultat négatif sur quelques-uns de ces scénarios. Ils savent aussi comment abuser ou éviter d’abuser des projections et comment vérifier le calcul (p. ex. ordonnance NY à l’égard de certaines hypothèses. Examen des hypothèses et recalcul d’une seule cohorte). On commence tout juste à articuler d’autres nouvelles mesures.

L’important, ce n’est pas de déterminer la mesure à utiliser, mais de connaître les lacunes de la mesure choisie et d’être en mesure de compenser mentalement.

chaqUe horizoN a BesoiN de ses MesUres

Pour un navigateur, cela veut dire :

• stratégie — vérification de la coque et simulation hydrodynamique informatisée

• planification — expérience antérieure, GPS et prévisions météo

• mise en œuvre — vision à l’œil nu et mesure de la profondeur.

Pour le PDG d’une société d’assurances, cela veut dire la (les) même(s) mesure(s), mais calibrée(s) fort différemment.• stratégique — inconnu pour moi • planification — la mesure standard en Europe est

Solvabilité II. Il s’agit d’une mesure des flux monétaires en fonction de la VaR sur un an à l’égard de divers risques, les résultats étant corrélés a posteriori. L’hypothèse sous-jacente, c’est que la direction peut s’occuper des problèmes sur le plan stratégique si la société survit pendant un an. Aux États-Unis, les mesures standard sont la NY7 et les calculs du C3, qui sont tous deux des projections obligatoires. Ces sept scénarios déterministes prescrits pour les fluctuations des taux d’intérêt sont instaurés depuis le milieu des années 1980. Les lecteurs de l’Actuarial Opinion Memorandum doivent savoir comment juger le degré de conservatisme appliqué dans les hypothèses et rajuster en fonction du réalisme perçu des scénarios. Cet essai sur le terrain donne lieu à une vérification plus approfondie. Les phases 2 et 3 du C3 sont des calculs de l’ECU qui présentent des problèmes semblables à Solvabilité II :

• modéliser laisse entendre qu’il y a un risque de modèle;• modéliser laisse entendre qu’il y a un risque de calibrage

des données historiques;• les actionnaires/obligataires ne s’intéressent pas à

l’importance des pertes au-delà de leurs engagements et préfèrent des mesures de la VaR; les organismes de réglementation ramassent la facture et veulent l’ECU;– les hypothèses ou les scénarios économiques prescrits

sacrifient la mesure du risque de la société au nom de la comparabilité;

– solvabilité II — l’utilisation de mesures de risque cloisonnées laisse entendre qu’il y a un risque de corrélation. Encore une fois, une mesure cohérente appliquée à tous les types de risque signifie qu’il y a comparabilité;

– solvabilité II — Les hypothèses de base qui sous-tendent la modification des stratégies dans des conditions extrêmes font actuellement l’objet d’un examen. Par exemple, il est impossible depuis 12 mois de mobiliser du capital ou de vendre un gros bloc de polices dans des conditions raisonnables;

« L’important, ce n’est pas de déterminer la mesure à utiliser, mais

de connaître les lacunes de la mesure choisie et d’être en mesure de

compenser mentalement. »

5 Par exemple, il est difficile de séparer les taux de rachat de base aux taux de rachat dynamiques sensibles aux taux d’intérêt sur les rentes différées dans

des conditions normales. L’utilité d’utiliser la même formule à l’extrémité de la distribution pour établir la réserve est discutable. La distribution mixte des

participations et des taux d’intérêt dans l’extrémité de la distribution est aussi sujet à controverse.

suite à la page 14

Page 14: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

GéNéral

14 | JUiN 2009 | Gestion du risque

– C3 — l’ECU mesure l’ampleur des pertes catastrophiques quand les données réelles sont rares et que la modélisation du comportement est encore moins exacte.5

• mise en œuvre — la mesure standard pour un bureau de placements est la mesure des flux monétaires selon la VaR quotidienne ou sur 10 jours pour les risques de crédit, de marché et opérationnel. La VaR modélise la fréquence des pertes au-delà d’un seuil. L’hypothèse sous-tendant cette mesure est que les positions peuvent en tout temps être liquidées ou couvertes sans risque résiduel. Cette mesure gagne actuellement du terrain et divers auditoires commencent à en comprendre les limites :– encore une fois, modéliser laisse entendre qu’il y a un

risque de modèle;– la modélisation laisse entendre qu’il y a un risque de

calibrage des données historiques;– la VaR ne donne aucune information au sujet de

l’ampleur des pertes au-delà du seuil quand les pertes se produisent;

– la gestion cloisonnée des risques laisse entendre qu’il y a un risque de corrélation et une mesure uniforme permet de comparer;

– les hypothèses sous-tendant les positions instantanées de capacité de liquider/capacité de couvrir sont également à l’étude, ce qui pourrait réfuter l’objet de la gestion des risques.

VaR annuelle c. VaR quotidienne. Il s’agit du même outil de la VaR calibré à des niveaux différents. D’autres considéra-tions d’ordre pratique, par exemple, durée de vie des résultats ou portée, influent également à ce chapitre. De la même façon que le sonar et le radar reposent tous deux sur la projection des

ondes sonores ou radioélectriques diffusées et sur l’écho repris et analysé pour déduire la forme de l’environnement, les différences de calibration permettant à l'un d'explorer sous l'eau pendant que l'autre reste à la surface, les diverses mesures de la VaR permettant de scruter différentes profondeurs d'horizons.

N’oUBliez aUcUN horizoN et coMMeNcez

À MesUrer

La gestion du risque ne doit pas se limiter à un seul horizon. Une société qui ne gère que le risque de mise en œuvre est comme un navigateur très compétent qui évite les icebergs qui l'entourent, mais qui n’a aucune idée de la raison pour laquelle son bateau se retrouve entouré d’icebergs.

Ce qui n’est pas mesuré n’est pas géré. Pour chaque horizon temporel, il y a des problématiques de mesure. La direction doit être au courant de tous les biais potentiels découlant des modèles, des mesures et du calibrage (http://www.wilmott.com/blogs/paul/index.cfm/2009/1/8/Financial-Modelers-manifesto). Il faut toutefois éviter à tout prix de reporter le travail effectif en se perdant dans des débats existentiels. Les sociétés devraient choisir un cadre de mesure du risque et l’appliquer pour chaque horizon, c-à-d. modèles opérationnels (cinq ans et plus), affectation du capital (un an) et décisions tactiques (au plus un mois). Enfin, les sociétés devraient perfectionner leur cadre en se fondant sur les observations faites par des intervenants de l’extérieur et sur les résultats du cycle de contrôle actuariel interne.

Il s’agit d’un processus d’apprentissage. Il ne s’agit pas d’être en mesure de produire des chiffres, mais de bien comprendre ce que les chiffres représentent et ce qu’ils laissent échapper. ■

Do you have questions about the SOA’s CPD Requirement? Want to make sure you are meeting the Basic Requirement or one of the Alternative Compliance provisions?

Visit www.soa.org/cpd to read about how to meet the Requirement’s provisions, attest compliance and review the Frequently Asked Questions (FAQs).

Some highlights…

The SOA CPD Requirement became effective on Jan. 1, 2009.•Member input has helped to create a Frequently Asked Questions (FAQs). •Now is the time to start earning and tracking your credits.•Most SOA members will easily meet the Requirement with Alternative Compliance provisions.•Members must report compliance with the SOA CPD Requirement as of • Dec. 31, 2010.

SOA Continuing Professional Development (CPD):

Have Questions? We Have Answers!

La voile et la gestion du risque… | suite de la page 13

Page 15: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 15

Simulation d’un projet de risque émergentpar Beverly Barney, Shiraz Jetha, Frank Ashe, Evelyn Meierholzner et Dave Ingram

LES ENTREPRISES DOIVENT RéFLéChIR ET SE PRéPARER EN PRéVISION D’éVéNEMENTS ET DE CONTExTES DéFAVORAbLES auxquels elles n’ont jamais été exposées — les « inconnues inconnues » de Donald Rumsfeld. Les exercices approfondis qui permettent d’examiner les risques émergents et leurs conséquences sur les entreprises fournissent un point de vue détaillé des activités d’une organisation et de ses vulnérabilités, tout en lui permettant de mieux se préparer à sur-vivre et à prospérer lorsque surviennent ces événements. C’est là la vraie valeur de ces exercices portant sur les risques émergents. Aussi imprécise fut cette valeur, les événements survenus sur les marchés financiers au cours des 18 derniers mois ont certaine-ment fait la lumière sur la valeur de ces travaux.

Toutefois, peu d’entreprises et peu de gens ont examiné cette question de façon systématique. La plupart des pratiques de gestion s’articulent autour d’éléments d’information qui, à certains niveaux d’analyse, peuvent mener à des choix entre les solutions précises fondées sur des critères opérationnels sensés. Par définition, les risques émergents ne comportent habituel-lement aucune donnée d’appui. Mais alors, comment les gens d’affaires s’y prennent-ils pour étudier ces risques émergents?

C’est exactement la question qu’un groupe autonome et ad hoc de gestionnaires de risque a décidé d’examiner dans le cadre d’un projet virtuel organisé par l’entremise de l’International Network of Actuarial Risk Managers (INARM). Les participants, qui proviennent des États-Unis, de l’Australie et de l’Allemagne, se sont rencontrés dans le contexte du blogue de l’INARM; plus de 10 000 mots d’échange y sont encore affichés.

Le groupe a exécuté ce projet en quatre mois. Il a convenu d’appliquer un processus en six étapes :

1. Prévoir un scénario précis de risque émergent.2. Déterminer les répercussions éventuelles de ce scénario sur

une société d’assurance.3. Débattre de la façon d’établir un scénario de crise qui

puisse déterminer la gravité éventuelle des répercussions.4. Décrire les façons devant permettre à un assureur

d’élaborer des plans afin de réduire les répercussions du risque.

5. Élaborer un plan pour effectuer une simulation à froid (le cas échéant).

6. Établir les principaux indicateurs qui peuvent démontrer que le risque est plus ou moins probable et définir les déclencheurs de mesures, de même que les déclencheurs qui permettent de soustraire le risque à la surveillance.

À la fin de la période de quatre mois, le groupe disposait de plusieurs points de vue au sujet du projet :

• Les ressources dédiées sont essentielles — les personnes qui tentent de déceler les risques émergents doivent consacrer une partie importante de leur temps à cet exercice; un projet n’est pas efficace s’il s’ajoute tout simplement à la charge de travail habituelle.

• Le processus est plus difficile que prévu, plus particulièrement lorsque le risque émergent ne se limite pas à une extrapolation des tendances actuelles dans le domaine des assurances.

• Davantage de questions ont été soulevées que de réponses n’ont été fournies.

• La plupart des membres du groupe n’ont jamais été à l’aise avec le scénario retenu.

• L’expérience acquise dans le cadre de ce projet facilitera les projets futurs au chapitre des risques émergents et elle les rendra plus productifs.

• Le blogue ne constituait pas le meilleur support pour ce projet; des discussions plus animées auraient été utiles.

• Il aurait fallu un leadership mieux structuré que celui fourni par un groupe de bénévoles; si davantage de ressources sont affectées au sein d’une entreprise, un processus officiel peut être appliqué.

Le reste du présent article est consacré à un bref sommaire des résultats du processus en six étapes.

étape 1. préVoir UN scéNario précis

de risqUe éMerGeNt

Le scénario retenu a été précisément choisi parce qu’il est dif-férent d’autres risques émergents abordés à d’autres tribunes. Il provient de Terror and Consent de Philip Bobbitt, où l’évolution vers un « État-marché » (à partir d’un « État nation ») constituait le thème central du livre. Dans un « État-marché », davantage de responsabilités de l’État incombent au marché, à tel point que le secteur privé dispose d’options pour offrir ces services. L’intervention réduite de l’État est remplacée par une partici-

ideNtificatioN des risqUes

Beverly Barney, fsa, cera, Maaa

est vice-présidente et actuaire au sein de

Prudential Insurance Company of America

à Newark (NJ). On peut la joindre à

[email protected].

suite à la page 16

Page 16: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

16 | JUiN 2009 | Gestion du risque

ideNtificatioN des risqUes

pation accrue des organismes non gouvernementaux (ONG). Les États-marché sont légitimés par la mise en valeur des débouchés offerts à leurs peuples; les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne sont perçus comme des exemples d’États qui semblent évoluer vers le concept d’État-marché. Pour plus de précisions, consultez le blogue à l’adresse http://riskviews.wordpress.com/emerging-risk-project/, et le livre de M. Bobbitt. Un membre du groupe a qualifié de sommaire succinct le scénario « de risque émergent découlant du retrait de l’État des fonctions fondamentales historiques ».

Le comble de l’ironie dans ce projet, c’est qu’au cours des quatre mois pendant lesquels nous nous y sommes consacrés, le scénario semblait de moins en moins probable, car le monde se dirigeait vers une plus grande intervention de l’État, plutôt que vers une réduction de celle-ci. Les membres du groupe ont consacré près de la moitié de la durée du projet à examiner et tenter de comprendre le scénario. Ce n’est pas inhabituel, car il est important pour les participants de bien comprendre le scénario. Dans la pratique, les experts indépendants peuvent être consultés pour des questions touchant le scénario, plus particulièrement son contexte.

Le scénario de l’« État-marché » a finalement été réputé influer sur la mondialisation, les régimes de retraite et les soins de santé, et sur les contraintes de la réglementation sur le compor-tement des entreprises. Pour ramener le scénario à des propor-tions plus utiles, le groupe a convenu de le limiter à la situation où un pays se rapproche rapidement de l’État-marché, plutôt que de tenter de déterminer les conséquences d’un déplacement en ce sens par le monde entier.

étape 2. préVoir les répercUssioNs éVeNtUelles

sUr les assUreUrs

Par interaction, le groupe a établi la liste de répercussions éventuelles qui suit :

• Davantage de débouchés commerciaux pour les sociétés d’assurance.

• Des défis techniques plus relevés en raison de protections d’assurance de type sécurité sociale et une structure de portefeuille plus diversifiée au plan ethnique.

• Pas nécessairement moins de réglementation, mais des règlements davantage fondés sur des principes et sur une solide solvabilité en raison de l’importance accrue du secteur privé pour le régime de bien-être social. Des règlements de sécurité sociale vraisemblablement plus nombreux seront appliqués aux éléments plus sensibles du secteur privé (p. ex. comme c’est le cas aujourd’hui en France pour certains avenants de second niveau).

• Des organismes de réglementation plus actifs et davantage de surveillance non officielle de la part des ONG, p. ex. les organismes de consommateurs.

• Des attentes élevées de la part des assureurs, de la fonction politique, du public (mobilisé par l’entremise des ONG) et du pouvoir législatif, à savoir que les sociétés agissent d’une manière socialement responsable tout en étant pressées par les marchés financiers de produire des rendements suffisants. Cette situation pourrait souligner la nécessité de changements au sujet de la forme juridique des sociétés.

• Une plus grande responsabilité de la part du secteur privé et la nécessité de coûts efficients tout en fonctionnant dans un milieu partagé par le régime de sécurité sociale de l’État (p. ex. réduction des dépenses au titre de l’assurance-maladie).

• Gestion améliorée du risque de catastrophe.• Mise au défi de faire en sorte que les marchés financiers

puissent soutenir des investissements de plus en plus importants pour les régimes de retraite et autres protections.

• Défi de s’attaquer au risque de longévité découlant du vieillissement de la population.

• Concurrence transfrontalière accrue et activité plus soutenue au chapitre des fusions et acquisitions.

• Accroissement des compétences techniques nécessaires pour réussir dans le milieu des affaires.

• Nombre accru de sinistres au titre des polices d’assurance vendues avant le mouvement vers l’État-marché.

Les assureurs devront déterminer les secteurs d’activité (« risques ») qu’ils exploiteront, selon leurs propres points forts, y compris les niveaux d’expertise, les exigences de

shiraz Jetha, fsa, fica, Maaa, cera,

est actuaire à l’Office of the insurance

Commissioner, à Olympia (Wash.). On peut le

joindre à [email protected].

frank ashe, ph.d.,

est consultant en risques et en placements, et

est professeur agrégé à l'université Macquarie.

On peut le joindre à [email protected].

Simulation d’un projet de risque émergent | suite de la page 15

Page 17: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 17

ideNtificatioN des risqUes

capital économique, l’accès au capital pour appuyer les plans d’entreprise, les exigences d’infrastructure pour soutenir les secteurs, les répercussions au plan de la distribution, etc.

Un dernier résumé de cette étape préconise l’établissement d’une matrice de risque selon les facteurs internes (produit, fonc-tions opérationnelles, investissements, ressources humaines, ressources financières, stratégie, etc.) et externes (concurrence, réglementation, facteurs macroéconomiques, risques systéma-tiques de marché, etc.). Cette solution nous permettrait de créer des scénarios de risque divers et de les évaluer d’après les facteurs pertinents.

étape 3. déBattre de la façoN d’étaBlir UN

scéNario de crise qUi pUisse déterMiNer la

GraVité éVeNtUelle des répercUssioNs

La société pourrait d’abord effectuer un test pour déterminer la sensibilité du nombre et des montants des règlements à la variation de chaque hypothèse. Puis, des scénarios déterministes pourraient être appliqués pour accroître/réduire les hypothèses pour lesquelles le nombre et les montants des sinistres sont sensibles, afin de déterminer les valeurs de ces hypothèses pour lesquelles la tarification ne couvre plus les réclamations majorées des dépenses, de même que les réclamations proprement dites.

La société pourrait également procéder à un scénario de crise pour déterminer le nombre de polices requis pour atteindre les écarts-types +/- X à un niveau de confiance de Y %.

La société pourrait également préciser d’autres scénarios sus-ceptibles de nuire à l’atteinte des objectifs de ces polices.

Une fois ces analyses et ces tests effectués, la société détermi-nerait les principaux indicateurs qui pourraient laisser entrevoir que les résultats négatifs sont plus probables, puis les systèmes de surveillance appliqués à ces indicateurs.

Des résultats négatifs ne représentent pas le seul facteur supplé-mentaire de ces réclamations; on note également la perte éventuelle de part du marché, à mesure que les concurrents réagissent de façon plus appropriée à l’évolution de la situation.

étape 4. décrire les façoNs doNt UN assUreUr

poUrrait s’y preNdre poUr étaBlir des plaNs

VisaNt À rédUire l’iMpact NéGatif dU risqUe.

Pour passer de plans possibles à des choix de mise en œuvre réels, la direction doit décider de l’intervention pertinente en matière de risque et utiliser une analyse des interventions

éventuelles au chapitre des risques, selon les facteurs internes et externes susmentionnés ou rajustés au besoin.

L’intervention peut être interne ou externe. Les interventions internes comprennent des mesures comme le rajustement de la stratégie de produit; le rajustement de la stratégie de souscrip-tion (p. ex. en matière d’assurance-invalidité); la détermination des possibilités améliorées d’investissement; le renforcement de la connaissance des produits, de la souscription, des inves-tissements, etc., en augmentant le nombre d’employés; les ressources financières supplémentaires pour les polices de plus grande valeur et comportant des risques accrus; et l’examen plus soutenu par les pairs. À titre d’exemple d’intervention externe, mentionnons le recours à des experts-conseils pour améliorer la connaissance de certains domaines, notamment la tarification des nouvelles protections, la réassurance pour les risques à évaluer, rares ou nouveaux, « inconnus » et « difficiles à quantifier »; des solutions de rechange en matière de transfert des risques, notamment les obligations pour catastrophes; le regroupement à la grandeur du marché d’autres risques non assurables; les coentreprises visant à mettre en commun des ressources; des efforts conjoints de commercialisation; et des efforts de régle-mentation pour éliminer les risques de marché systémiques.

étape 5. élaBorer UN plaN poUr effectUer UNe

siMUlatioN (le cas échéaNt)

Le groupe a décidé que ce scénario ne se prêtait pas à une simu-lation, en partie parce que l’impact de ce type de changement de politique publique serait ressenti de plus en plus sur une longue période. Une simulation est davantage axée sur un incident qui frappe soudainement dans une période très courte.

evelyn Meierholzner aktuar(daV), frM,

MBa, est propriétaire de Risk! Act - Actuarial

Services, Risk Management, Business Strategy,

à Munich, en Allemagne. On peut la joindre à

[email protected].

david ingram, fsa, cera, Maaa est premier

vice-président à Willis Re inc. à New York (NY).

On peut le joindre à [email protected].

« Pour passer de plans possibles à des choix de mise en œuvre réels, la direction

doit décider de l’intervention pertinente en matière de risque et utiliser une

analyse des interventions éventuelles au chapitre des risques, selon les facteurs

internes et externes susmentionnés ou rajustés au besoin. »

suite à la page 18

Page 18: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

18 | JUiN 2009 | Gestion du risque

ideNtificatioN des risqUes

étape 6. élaBorer les iNdicateUrs priNcipaUx qUi

poUrraieNt réVéler qUe le risqUe est plUs oU

MoiNs sUsceptiBle et défiNir les décleNcheUrs

d’iNterVeNtioNs, de MêMe qUe les décleNcheUrs

de soUstractioN dU risqUe À la sUrVeillaNce

Les modifications apportées aux indicateurs qui suivent ont été jugées importantes :

1. La part de marché des sociétés appliquant des formes différentes de gouvernance et de gestion.

2. Le niveau de discussion aux événements de l’industrie, les articles de journaux, et la tension exercée par les ONG.

3. Les taux de chômage et de sous-emploi.4. Un indice des coûts médicaux pour diverses protections.5. Le nombre et le montant de réclamations soumis par

rapport aux prévisions.6. L’indice des prix concurrentiels relatifs et les écarts de prix.7. Le nombre et le montant de réclamations comparativement

aux statistiques de l’État.

coNclUsioN

Somme toute, voulons-nous vraiment étudier des risques qui semblent si peu plausibles? Fort probablement, si les scénarios sont vraiment peu plausibles au cours d’une certaine période, nous ne devrions pas nous en préoccuper. La direction répond aux risques qui sont plausibles mais peu probables. Dans ce cas, l’idée d’un changement d’interaction entre les systèmes politique, social et économique peut être jugée plus ou moins plausible au fil de la crise actuelle.

Ce changement se traduira en partie par la perte d’influence de l’école du libre marché de Chicago, dont les idées ont été poussées trop loin par divers maximiseurs de rente, des idéologues naïfs mais influents qui ont mal saisi la théorie, et des agents (au sens économique) qui ont poussé la « théorie » à leur propre avantage, p. ex. la haute direction de la plupart des banques d’investissement, de banques ordinaires et d’autres sociétés.

Nous n’avons pas besoin d’une nouvelle réglementation pour qu’une telle situation se produise — les organismes de régle-mentation qui utilisent leurs pouvoirs actuels, mais avec plus de détermination, et moins de règlements, suffiront. Le présent scénario n’est peut-être pas vraiment aussi peu plausible qu’on le croit; il ne s’est tout simplement pas encore manifesté.

Enfin, le groupe a décidé que même dans le cas où les événe-ments survenus pendant la période du projet nous ont portés à croire que le monde se dirigeait dans le sens opposé, un exercice d’analyse de l’impact d’une réglementation et d’une participation moindres de l’État à l’économie constituait une pratique utile pour analyser la ramification d’une réglementation et d’une intervention accrue de l’État, en partie parce que l’exercice dirigeait la réflexion d’une manière qui n’est pas souvent requise dans les activités courantes. ■

À la fin du projet, nous étions tous d’accord pour renouveler

l’expérience en mettant cette fois en application les leçons apprises.

Nous commençons par nous concentrer sur ce qui nous semble le

plus difficile, c’est-à-dire comprendre le scénario futur. Plusieurs

membres de la Forecasting and Futurism Section se sont joints à

nous, ainsi que l’auteur des sondages périodiques sur les risques

émergents. Nous avons sélectionné le risque émergent sur lequel

nous entendons nous pencher, et nous avons commencé à faire

des recherches pour recueillir le plus d’information possible afin

de choisir la meilleure méthode pour l’étude d’une situation future

éventuelle. Si cette initiative vous intéresse et que vous aimeriez y

participer, communiquez avec Bev Barney.

Simulation d’un projet de risque émergent | suite de la page 17

Page 19: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 19

Analyse des concentrations de créditpar Diane Reynolds

Le présent article insiste sur une idée importante exprimée dans

un document présenté au Symposium sur la GRE : l’analyse de

l’attribution des risques.

LE RISqUE DE CONCENTRATION EN GéNéRAL, ET LES CONCENTRATIONS DE CRéDIT EN PARTICULIER, peuvent engendrer un important risque systémique. C’est pourquoi l’accent est actuellement mis sur l’évaluation, la sur-veillance et la gestion des risques de concentration du crédit. Du point de vue de l’entreprise, les modèles qui ne tiennent pas compte des concentrations actuelles de portefeuille brouillent les signaux utilisés pour prendre des décisions d’affaires.

Par exemple, prenons le cas de deux investissements possibles : tous les deux ont exactement le même profil de bénéfice : type de produit, probabilité de défaut, échéance et perte en cas de défaut. Toutefois, un investissement est effectué dans le secteur où la banque a concentré la plus grande partie de son activité, tandis que l’autre a été fait dans un nouveau domaine pour la banque. Le deuxième investissement accroît nettement la diversification et crée un portefeuille global plus optimal.

L’utilité des modèles de portefeuille réside dans leur capacité d’intégrer plusieurs volets du risque de crédit dans une seule mesure. Habituellement, ces modèles reconnaissent et privilé-gient divers types de risque et les interactions entre les princi-paux types de risque. Par exemple, les expositions du marché des dérivés peuvent être combinées avec les répercussions macroéconomiques sur les probabilités de défaut et les valeurs de recouvrement pendant les divers cycles de vie de chaque opération. Il en découle un seul paramètre repère utile pour contrôler les risques, gérer les limites et favoriser la cohérence avec l’appétit global de l’entreprise pour le risque.

Par contre, un paramètre unique n’est pas suffisant pour la gestion et l’atténuation des risques. La manipulation du profil de risque, pour satisfaire les besoins et les préférences d’une organisation, constitue une tâche multidimensionnelle, d’où l’importance de bien comprendre la source et l’interaction entre les risques du portefeuille à un niveau plus granulaire, ce qui peut être fait dans le cadre d’un processus d’attribution du capital.

Les pertes estimées au niveau du portefeuille peuvent être attribuées à divers types de risque (ou sources de risque) en recalculant les mesures de risque à l’aide de diverses com-binaisons d’hypothèses pour isoler les risques particuliers. Habituellement, les risques les plus influents sont le risque de

défaut, le risque de migration, le risque de nom et le risque sectoriel. Il est possible d’isoler chacun de ces risques en modi-fiant les hypothèses du modèle.

Pour illustrer l’information recueillie à partir d’une telle analyse, et les détails de sa mise en œuvre, nous utilisons grandement une étude de cas fondée sur un portefeuille international de 500 titres cotés en bourse. L’exposition globale du portefeuille se chiffre à environ 44,5 milliards $US, et les expositions indi-viduelles se situent entre un peu plus de 1 million de dollars à près de 3,5 milliards de dollars. L’exposition moyenne se chiffre à environ 88 millions de dollars, mais la médiane se situe à seulement 10 millions de dollars.

L’exposition est répartie entre six grandes catégories de cotes (cotes Fitch) et dix grands secteurs (Dow Jones) dans dix pays. En raison de leur structure, les concentrations sont nettement apparentes dans les secteurs de la finance et de l’énergie, dans des entreprises cotée A ainsi qu’au Royaume-Uni, aux États-Unis et au Canada.

Dans le principal cas à l’étude, tous les facteurs de risque de crédit sont modélisés à l’aide d’une approche d’évaluation à la valeur du marché qui comprend les risques de défaut et de migration. Plus particulièrement, on utilise un modèle multi-factoriel dans lequel des paramètres de risque systématique de crédit sont utilisés pour représenter toutes les corrélations de défaut. Ces paramètres sont associés à des noms d’après le pays et le secteur d’activité. Les risques idiosyncratiques sont modé-lisés à l’aide de simulations de Monte Carlo. La perte globale (99,9 %) est évaluée à 2,58 milliards $US.

L’évaluation de l’impact de ces facteurs sur le capital total ne constitue pas une tâche des plus simples. La tendance immé-diate consisterait à modifier les paramètres de chaque facteur, l’un après l’autre. En fait, cette démarche est insuffisante en raison de l’interaction entre les composantes. Nous étudions donc huit cas, dont le cas de base que nous venons d’énoncer. Les autres cas comprennent l’activation et la désactivation des

qUaNtificatioN des risqUes

diane reynolds

est directrice principale des solutions de

capital économique auprés de Algorithmics Inc.

à Toronto (Ontario). On peut la joindre à

[email protected].

suite à la page 20

Page 20: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

20 | JUiN 2009 | Gestion du risque

hypothèses principales dans les diverses combinaisons. Les cas sont divisés en trois catégories : les modèles fondamentaux, les effets de premier ordre et les effets secondaires, résumés dans le Tableau 1.

Pour attribuer une partie de ce risque au risque de migration, nous « désactivons » le risque de migration et nous effectuons un nouveau calcul en vertu de l’hypothèse d’un modèle à deux fonctions : défaut et aucun défaut. La perte qui en découle (99,9 %) s’élève à 1,94 milliard $US. Par conséquent, nous pouvons attribuer le solde, c’est-à-dire 637 millions $US au risque de migration.

Rappelons-nous que le cas de base est un modèle multifac-toriel. En passant à un modèle unifactoriel, nous constatons une perte (99,9 %) de 3,53 milliards $US. Par conséquent, le contexte multifactoriel (exprimé en partie par la diversifica-tion sectorielle au sein du portefeuille) offre un avantage de diversification équivalant à 951 millions $US.

Si l’augmentation de la perte (99,9 %) semble intuitive au départ, elle s’explique facilement par l’analyse des hypothèses de corrélation. Dans l’ensemble, les corrélations plus élevées sous-entendent des pertes supérieures. Puisque les facteurs multiples sont corrélés, mais non parfaitement, l’application d’un seul paramètre de crédit à toutes les contreparties accroît sensiblement les corrélations moyennes d’actif par paire, qui passent de 18,7 % dans l’option multifactorielle à plus de 31 % en vertu de l’approche unifactorielle. Les corrélations d’actif plus élevées se traduisent également par des corrélations de défaut supérieures (2,1 % par rapport à 0,9 %).

Pour isoler le risque de nom, nous remplaçons les modèles de Monte Carlo pour le risque idiosyncratique par l’hypothèse de diversification complète. Ainsi, la perte (99,9 %) chute à 2,13 milliards $US. De toute évidence, le portefeuille n’est pas suffisamment important pour éliminer complètement le risque idiosyncratique. L’attribution de la différence de 456 millions $US au risque de concentration de nom à l’intérieur du portefeuille fournit un point de vue important : quelle que soit la stratégie de diversification adoptée, nous sommes peu susceptibles de réduire les exigences de capital mesurées d’après la perte (99,9 %) au-delà du niveau de 2,13 milliards $US.

Pour chacune des trois sources de risque, nous avons mesuré l’impact isolé sur la mesure du risque au niveau du portefeuille, la perte (99,9 %). Ces attributions de premier ordre permettent de classer les risques par ordre d’importance : diversification sectorielle, risque de migration et diversification de nom. Une seule hypothèse étant modifiée dans chaque cas, ils sont désignés comme des effets de premier ordre. Le Tableau 2 présente un résumé des résultats des attributions de premier ordre.

Les effets de premier ordre peuvent-ils servir à expliquer les fluctuations au soutien en capital du portefeuille? Supposons une expérience où les trois changements susmentionnés sont apportés de façon simultanée. Il en découle un modèle de défaut supposant la diversification complète fondée sur un seul facteur. (Il importe de noter que ce modèle correspond très bien aux hypothèses qui sous-tendent les formules du calcul en vertu de Bâle II.)

tableau 1 : risques mesurés dans chaque cas

risque de migration

concentrations de nom

concentrations sectorielles

Modèles de base

Cas de base Oui Oui Oui

Modèle simple Non Non Non

effets de premier ordre

Défaut – aucun défaut (DAD)

Non Oui Oui

Diversification complète (DC)

Oui Non Oui

Facteur simple (FS)

Oui Oui Non

effets secondaires

DAD/DC Non Non Oui

DAD/FS Non Oui Non

DC/FS Oui Non Non

tableau 2 : effets de premier ordre

Modèle perte (99,9 %) interprétation attribution (Modèle de base)

cas de base 2 581 738 825

défaut/aucun défaut (dad)

1 944 680 630 Risque de migration

637 058 195

diversification complète

2 125 727 123 Concentration de nom

456 011 702

facteur simple 3 533 178 245 Diversification sectorielle

951 439 420

Total – Effets de premier ordre

141 630 477

Analyse des concentrations de crédit | suite de la page 19

qUaNtificatioN des risqUes

Page 21: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 21

En vertu de ce modèle purement fondamental, la perte (99,9 %) constatée lorsque les trois hypothèses sont modifiées simul-tanément s’élève à 1,95 milliard $US. Le changement total se chiffre à 626 millions $US. Par conséquent, l’effet de premier ordre total de 141 millions $US intervient pour moins de 23 % du changement total.

L’écart s’explique par le fait que le modèle n’est ni simple ni linéaire. Il comprend des interdépendances, des corrélations et des interactions entre ces sources de risque de crédit. De toute évidence, puisque les effets d’ordre supérieur interviennent pour 485 millions $US, soit près de 88 % du changement total, les interactions sont primordiales. Ces calculs sont résumés au Tableau 3.

Une évaluation plus poussée des effets secondaires fournit des précisions supplémentaires et rend compte de presque toutes les différences observées entre le cas de base et le modèle le plus fondamental. À partir des résultats figurant au Tableau 4, nous constatons que les effets secondaires interviennent pour la presque totalité de l’écart initial. Ces effets découlent en majorité de l’interaction entre les modèles multifactoriels et le risque de migration, situation qui pourrait provenir d’un risque de migration qui comporte une composante régionale ou secto-rielle et qui indique le besoin d’analyses plus poussées avant de procéder à la couverture de l’un ou l’autre type de risque.

Par contre, l’effet combiné le plus important tire son origine de la suppression du risque de concentration de nom et du risque de migration. Ce deuxième résultat est prévu, car le modèle unifactoriel repose sur un niveau de corrélation global plus élevé. Lorsque nous supprimons le risque idiosyncratique du portefeuille et que nous bloquons la migration entre les États créanciers, les exigences de capital diminuent de façon importante. Toutefois, cette diminution dépasse à peine la somme des baisses découlant de l’application individuelle des hypothèses. Cette situation sous-entend qu’il existe un lien très ténu entre les concentrations de nom et le risque de migration, ce qui indique que des stratégies indépendantes de couverture sont probablement aussi efficaces qu’un effort coordonné.

Dans les portefeuilles réels que nous avons évalués, la répartition entre les effets de premier ordre et les effets secondaires variait de façon importante. Comme il est indiqué dans l’étude de cas, nous avons constaté qu’il est non seulement important d’évaluer l’impact du risque de migration, du risque de nom et du risque sectoriel, mais également d’examiner l’interaction entre ces types de risque

pour donner une vue complète des concentrations.

Le risque de concentration demeurera vraisemblablement un problème qui exigera passablement de temps et d’effort. Cependant, les organismes de réglementation et d’autres inter-venants exigent des réponses plus précises et exactes qui ne peuvent être obtenues qu’en appliquant de vastes modèles pour appuyer des analyses multidimensionnelles plus détaillées. ■

qUaNtificatioN des risqUes

tableau 3 : effets d’ordre supérieur

Modèle perte (99,9 %)

cas de base 2 581 738 825

facteur unique, aucune concentration de nom, dad

1 954 955 399

différence 626 783 426

total – effets de premier ordre 141 630 477

total expliqué par les effets d’ordre supérieur

485 152 949

tableau 4 : effets secondaires

Modèle perte (99,9 %)

écarts total–effets de premier ordre

effets secondaires

cas de base 2 581 738 825

dad/dc 1 340 623 229 1 241 115 596 1 093 069 897 148 045 699

dad/fs 2 404 043 868 177 694 957 -314 381 225 492 076 182

dc/fs 3 241 306 962 -659 568 137 -495 427 718 -164 140 419

total – effets secondaires 475 921 462

« Il importe non seulement d’évaluer l’impact de [chaque risque],

mais également d’examiner les interactions entre [eux] pour donner

une vue complète des concentrations. »

Page 22: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

22 | JUiN 2009 | Gestion du risque

iNtrodUctioN

Les modèles de simulation de catastrophes sont des outils utiles pour estimer ce qui pourrait se produire. Or, dans quelle mesure permettent-ils de prévoir ce qui se produira? Plus spéci-fiquement, peut-on avoir recours aux modèles de simulation de catastrophes pour prévoir l’expérience réelle des catastrophes sur une brève période d’un, de deux ou de cinq ans?

Des modèles de simulation d’ouragans « à court terme » ou « dans un avenir rapproché » du genre ont été instaurés dans l’industrie des assurances en 2006 et avaient pour objet d’estimer les sinistres assurés attribuables à des ouragans pour la période de cinq ans se terminant en 2010. L’application de ces modèles à court terme par les sociétés d’assurances et de réassurance représentait un virage radical par rapport à la manière dont les pertes annuelles moyennes (PAM) et les pertes maximales probables (PMP) sont habituellement cal-culées dans le cadre des modèles de simulation de catastrophes. Le recours aux modèles à court terme a aussi eu pour effet de perturber les marchés dans les régions côtières en raison des hausses significatives des sinistres attribuables aux ouragans prévues dans les modèles à court terme.

La saison des ouragans de 2008 étant maintenant terminée, nous en sommes à la troisième année de la période de prévi-sions de cinq ans. Bien qu’il soit impossible, pour l’instant, de tirer des conclusions définitives, nous en sommes plus qu’à mi-chemin et nous pouvons étudier le rendement à ce jour des modèles de simulation d’ouragans à court terme.

la Boîte Noire

Grâce aux récentes percées au chapitre de la puissance infor-matique et à la capacité d’analyser rapidement d’imposants volumes de données, les modèles informatiques sont devenus omniprésents dans nombre d’industries, en particulier dans celle des services financiers. Même si ces modèles sont des outils décisionnels utiles, ils peuvent mener à prendre de mau-vaises décisions d’affaires s’ils ne sont pas bien utilisés. Les utilisateurs des modèles oublient souvent que tous les modèles reposent sur des hypothèses simplificatrices et par conséquent,

que tous les modèles ont tort. Les modèles tentent de reproduire la réalité, mais ils ne l’incarnent pas.

Il est facile d’oublier ce fait quand les modèles produisent des rapports détaillés dans lesquels figurent des chiffres précis à deux décimales près. Bien des modèles utilisés dans l’industrie des services financiers sont des programmes informatiques complexes mis au point par des scientifiques, des ingénieurs et des statisticiens détenteurs d’un doctorat. Puisque la plupart des personnes qui ne sont pas des techniciens, le plus souvent les décisionnaires, ne comprennent pas ce que contient la « boîte noire », elles ne contestent pas ce qui en ressort. Or, la précision n’est pas synonyme d’exactitude.

Plusieurs modèles sont inexacts tout simplement parce qu’ils sont limités par une insuffisance de données et de connais-sances scientifiques. C’est certainement le cas des modèles de simulation de catastrophes auxquels a amplement recours l’industrie des assurances. Peu importe le nombre de titulaires de doctorat qui participent à la mise au point d’un modèle de simulation de catastrophes, les incertitudes fondamentales quant à la fréquence et l’intensité des événements de grande magnitude ne peuvent être éliminées.

Cela ne signifie pas que les modèles ne sont pas utiles—les modèles

de simulation de catastrophes fournissent un cadre cohérent pour

prendre des décisions quant à la gestion des risques. Ils sont des

outils utiles pour estimer ce qui pourrait se produire. Ils peuvent aussi

générer des estimations crédibles des probabilités de survenance de

sinistres dont l’ampleur varie.

les Modèles À coUrt terMe

En 2004 et 2005, la saison des ouragans a été particulièrement active et les sinistres assurés attribuables aux ouragans ont ainsi totalisé plus de 80 milliards de dollars. En 2006, les trois plus importantes entreprises de modélisation des catastrophes, à savoir AIR Worldwide (AIR), EQECAT et Risk Management Solutions (RMS), ont instauré de nouveaux modèles de simu-lation des ouragans. Ces nouveaux modèles reposent sur l’évaluation à court terme de la fréquence des ouragans. Plutôt que de fonder les hypothèses au sujet de la fréquence des oura-gans sur l’expérience à long terme, les nouveaux modèles « à court terme » prévoient la fréquence des ouragans sur un horizon temporel beaucoup moins long, en règle générale, cinq ans.

Le modèle à court terme d’AIR visait à saisir la possibilité qu’il y ait beaucoup d’ouragans et que les sinistres attribuables aux ouragans soient élevés pendant la période de 2006 à 2010.

Karen clark est présidente et chef de la

direction de Karen Clark & Company à Boston

(Mass.). Vous pouvez la joindre à

[email protected].

Une étude du rendement des modèles de simulation d’ouragans à court termepar Karen Clark

qUaNtificatioN des risqUes

Page 23: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 23

D’après le livre blanc de l’entreprise intitulé « Understanding Climatological Influences on Hurricane Activity: The AIR Near-term Catalog », l’approche adoptée par AIR pour estimer les taux des ouragans sur une période de cinq ans se fondait sur une analyse statistique reliant les anomalies au chapitre de la température à la surface des mers (TSM) au risque régional provenant des ouragans. Elle avait été mise au point de concert avec Accurate Environmental Forecasting et Climatek. Elle a été examinée par des pairs, soit Kerry Emanuel du MIT et Jim Elsner de la Florida State University.

À l’aide des prévisions sur cinq ans des conditions de la TSM, le modèle de simulation d’ouragans à court terme de 2006 d’AIR prévoyait une hausse appréciable des sinistres attribuables aux ouragans. Même si les hausses variaient d’une région à l’autre, la hausse annualisée globale des sinistres attribuables aux ouragans dans le modèle à court terme d’AIR était de 40 %. En 2007, AIR a modifié sa méthode afin d’éliminer l’élément de prévisions de la TSM et en a changé le nom qui est passé de « Near-Term Catalog » à « Warm SST Conditioned Catalog », tenant compte du fait que la vision révisée du risque est fonction d’une saison type d’« océan chaud » plutôt que des projections quinquennales de la TSM. Par conséquent, la hausse du risque par rapport au modèle à long terme pour 2007 et 2008 a chuté à 16 % dans l’ensemble du pays. Les résultats de cette plus récente recherche ont été publiés dans l’ouvrage examiné par des pairs et intitulé Journal of Applied Meteorology and Climatology.

Après avoir adopté son modèle à court terme, l’entreprise EQECAT l’a mis à jour en vue des saisons des ouragans de 2007 et 2008. EQECAT a aussi prévu une hausse de l’activité et des sinistres attribuables aux ouragans par rapport à ses moyennes à long terme. Ses hausses annuelles ont été relative-ment stables et oscillent entre 35 % et 37 % quant aux pertes annuelles moyennes dans l’ensemble du pays.

L’entreprise RMS défend ardemment les modèles de simulation d’ouragans à court terme et, en 2006, elle est devenue la première entreprise de modélisation à présenter son modèle à court terme à la Florida Commission on Hurricane Loss Projection Methodology. La commission a examiné les modèles de simulation de catastrophes sur une base annuelle afin de déterminer s’ils sont acceptables pour les déclarations person-nelles de taux résidentiels dans l’état de la Floride. Dans un exposé qu’elle a fait dans le cadre d’un atelier de la Florida Commission on Hurricane Loss Projection Methodology en juillet 2006, l’entreprise RMS a précisé avoir déterminé que l’horizon temporel pertinent pour les modèles de simulation

de catastrophes est cinq ans. Elle a en outre expliqué sa métho-dologie qui repose sur une gamme d’analyses statistiques et la collecte de renseignements auprès des spécialistes chefs de file en la matière. La collecte de renseignements visait à dégager un consensus à propos de l’activité des ouragans pour la période de 2006 à 2010. En bout de ligne, RMS a retiré de l’examen de la commission son modèle à court terme et la commission n’a à ce jour permis à aucune autre entreprise de modélisation de soumettre un modèle à court terme.

En fonction des résultats du processus de collecte de rensei-gnements, l’entreprise RMS a annoncé que la hausse de la fréquence des ouragans frappant terre présumée dans son modèle aurait pour effet d’augmenter les sinistres d’assurance annualisés de 40 %, en moyenne, pour la côte du golfe du Mexique, la Floride et le sud-est, et de 25 à 30 % dans les régions centratlantique et du nord-est comparativement à ceux mentionnés dans son modèle à long terme. En outre, dans son modèle sur cinq ans, elle a présumé que les grands ouragans frappant terre seraient plus nombreux, d’où une augmentation des sinistres annualisés modélisés qui se rapprochent davantage de 50 % dans le golfe du Mexique, la Floride et le sud-est et de 40 % dans l’ensemble du pays.

RMS a recommandé d’utiliser ce modèle pour toutes les appli-cations standard du modèle par les assureurs, les réassureurs, les agences de notation et les organismes de réglementation. En octobre 2006, RMS a organisé un deuxième exercice élargi de collecte de renseignements auprès des spécialistes et a annoncé que les prévisions quinquennales ne changeraient pas pour les prochaines saisons des ouragans. En décembre 2007, RMS a de nouveau confirmé les taux d’activité élevés et des sinistres globaux accrus de 40 % à compter de 2008.

le reNdeMeNt des Modèles

Les trois entreprises de modélisation des catastrophes ont prévu

qUaNtificatioN des risqUes

« Même si ces modèles sont des outils décisionnels utiles, ils peuvent mener à

prendre de mauvaises décisions d’affaires s’ils ne sont pas bien utilisés. »

suite à la page 24

Page 24: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

24 | JUiN 2009 | Gestion du risque

une activité et des sinistres supérieurs à la moyenne pendant la période de 2006 à 2010. Afin d’évaluer le rendement des modèles à ce jour, nous avons appliqué l’augmentation globale des sinistres à l’échelle du pays prévue par chaque modèle au nombre d’ouragans, au nombre d’ouragans qui frappent les É.-U. et aux sinistres annuels moyens à long terme attribuables aux ouragans de chaque année. Il convient de souligner que les entreprises de modélisation n’ayant pas publié le nombre prévu

d’ouragans et d’ouragans qui frappent, les prévisions à court terme figurant dans les tableaux 1 et 2 sont des nombres cal-culés. Même si les modélisateurs pourraient soutenir que leur fréquence de frappe prévue n’est pas aussi élevée qu’indiqué dans le tableau ci-après, ayant prédit qu’une part des sinis-tres accrus serait attribuable à l’augmentation d’intensité des ouragans, les nombres indiqués ci-dessous devraient être des approximations raisonnables.

tableau 1 : Nombre d’ouragans dans l’atlantique

Prédictions à court terme

Moyenne à

long terme

réel air eqecat rMs

2006 5,9 5 8,4 8,0 8,4

2007 5,9 6 6,8 8,0 8,4

2008 5,9 8 6,8 8,1 8,4

total 17,7 19 22,0 24,1 25,2

tableau 2 : Nombre d’ouragans qui frappent les é.-U.

Prédictions à court terme

Moyenne à

long terme

réel air eqecat rMs

2006 1,7 0 2,4 2,3 2,4

2007 1,7 1 2,0 2,3 2,4

2008 1,7 3 2,0 2,3 2,4

total 5,1 4 6,4 6,9 7,2

tableau 3 : sinistres assurés imputables aux ouragans aux é.-U. (milliards de dollars)

Prédictions à court terme

Moyenne à

long terme

réel air eqecat rMs

2006 10 0 14,0 13,6 14

2007 10 0 11,6 13,5 14

2008 10 13,3 11,6 13,7 14

total 30 13,3 37,2 40,8 42

0

5

10

15

20

25

30

Réel AIR EQECAT RMS

Moyenne à long terme

0

1

2

3

4

5

6

7

8

Réel AIR EQECAT RMS

Moyenne à long terme

0

10

20

30

40

50

Réel AIR EQECAT RMS

Moyenne à long terme

Nombre d’ouragans dans l’atlantique, 2006-2008

Nombre d’ouragans qui frappent les é.-U., 2006-2008

sinistres assurés imputables aux ouragans aux é.-U., 2006-2008

qUaNtificatioN des risqUes

Une étude du rendement … | suite de la page 23

Page 25: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 25

Le nombre réel d’ouragans par année et le nombre moyen à long terme d’ouragans et d’ouragans qui frappent sont tirés des données de la NOAA. Les tableaux indiquent le comportement des prédictions chaque année et pour la période cumulative de trois ans, soit de 2006 à 2008.

La moyenne à long terme des sinistres annuels imputables aux ouragans figurant dans le tableau 3 représente des estimations des sinistres assurés à l’échelle du pays pour les biens côtiers provenant des modèles de simulation des ouragans à long terme. L’analyse des renseignements publiquement disponibles a permis de déterminer que la moyenne des sinistres annuels imputables aux ouragans modélisée par AIR et RMS représente environ 10 milliards de dollars. Les prédictions à court terme ont été calculées en appliquant l’augmentation globale des sinistres à l’échelle du pays de chaque modèle à la somme de 10 milliards de dollars. Les sinistres assurés américains réels proviennent des données des Property Claim Services (PCS).

Nous en sommes à la troisième année de la période de prédictions de cinq ans et les trois modèles à court terme ont tous surestimé, et de beaucoup, le nombre d’ouragans qui se formeraient dans l’Atlantique, le nombre d’ouragans qui frapperaient la côte et les sinistres assurés imputables aux ouragans. Même si le nombre d’ouragans est légèrement supérieur à la moyenne pour la période cumulative, soit de 2006 à 2008, les ouragans qui frappent la côte sont inférieurs, d’environ 22 %, à la moyenne et les pertes assurables sont inférieures, de plus de 50 %, à la moyenne.

les répercUssioNs poUr les UtilisateUrs

des Modèles

Bien qu’il soit trop tôt pour tirer des conclusions définitives au sujet de l’exactitude des modèles de simulation des ouragans à court terme, en ce qui concerne la période cumulative, soit de 2006 à 2008, les pertes assurables sont considérablement inférieures à la moyenne, ce qui laisse entendre que l’activité des ouragans d’une année sur l’autre est beaucoup trop incer-taine pour faire des prédictions à court terme. L’activité des ouragans est fonction de nombreux facteurs climatologiques dont plusieurs sont connus des scientifiques et certains, incon-nus. Il y a des mécanismes d’intervention compliqués dans l’atmosphère qu’il est impossible de quantifier avec précision même à l’aide des modèles de simulation du climat les plus perfectionnés et puissants.

Les assureurs, les réassureurs et les organismes de réglementa-tion doivent évaluer l’efficacité de leur modèle de simulation

des ouragans à court terme en fonction de cette incertitude. Même les modèles standard à long terme de simulation des ouragans comportent un fort degré d’incertitude. Les hypothèses à court terme concernant la fréquence et la gravité ne font qu’intensifier cette incertitude et la volatilité des esti-mations des pertes.

Bien entendu, si nous savions qu’il y avait une tendance à long terme dans la fréquence et(ou) la gravité de la survenance des ouragans et que les tendances pourraient être quantifiées de façon crédible, il faudrait que les sociétés d’assurances tiennent compte de cette information dans le calcul des primes et dans les autres décisions qu’elles prennent en matière de risque. Or, l’activité des ouragans peut varier de façon prononcée d’une année à l’autre, comme en font foi les nombreuses saisons antérieures. Deux ou trois saisons actives de suite, même celles aussi extrêmes qu’en 2004 et 2005, n’indiquent pas néces-sairement une tendance soutenue, en particulier en matière d’ouragans qui frappent terre et des pertes assurables.

coNclUsioNs

Les modèles de simulation des ouragans à court terme sont appliqués depuis trois ans maintenant et les prédictions qu’ils ont générées n’ont pas tout à fait correspondu à la réalité. Bien que les trois grandes entreprises de modélisation des catastrophes aient prévu une activité des ouragans et des pertes consi-dérablement élevées pour la période de 2006 à 2010, la situation a été pendant deux des trois dernières années inférieure à la moyenne. Les modèles de simulation des catastrophes sont en mesure de simuler des milliers de scénarios de ce qui pourrait se produire pour une société d’assurances—mais ils n’ont pas encore démontré qu’ils sont en mesure d’estimer ce qui se produira pendant une année donnée ou une brève période. Même si les modèles de simulation de catastrophes, s’ils sont bien appliqués, peuvent estimer de manière crédible l’éventuelle expérience de pertes d’une société, ils ne peuvent prédire l’endroit, le moment ou l’ampleur des événements réels. Bien qu’il soit impossible pour l’instant de tirer une conclusion définitive sur les modèles de simulation des ouragans à court terme, les signes à ce jour indiquent qu’une période de cinq ans pourrait être trop courte pour estimer les sinistres attribuables aux ouragans. ■

qUaNtificatioN des risqUes

« Il y a des mécanismes d’intervention compliqués dans l’atmosphère qu’il

est impossible de quantifier avec précision même à l’aide des modèles de

simulation du climat les plus perfectionnés et puissants. »

Page 26: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

26 | JUiN 2009 | Gestion du risque

En 2006, la direction de la société The Guardian Life Insurance

Company of America (Guardian) a décidé de procéder à une

analyse du capital économique (CE) dont les résultats devaient être

communiqués au printemps de 2007. Une deuxième génération

de l’analyse du CE (CE 2.0) s’est déroulée de l’automne 2007 au

printemps 2008. Le présent article porte sur la génération CE 2.0.

LA GUARDIAN EST UNE COMPAGNIE MUTUELLE D’ASSURANCE-VIE qui compte plusieurs filiales et qui œuvre dans de nombreux secteurs d’activité, notamment de l’assurance-vie individuelle, de l’assurance invalidité indivi-duelle, des produits et régimes de retraite (secteur des particu-liers et des institutions) et de l’assurance collective avec ou sans examen médical.

En 2008, le total des primes pour tous les secteurs d’assurances, mais non pour une seule société, représentait environ 7,2 milliards de dollars. Le total des provisions techniques se situait à 32,7 milliards de dollars, celui des passifs, à plus ou moins 35,4 milliards de dollars et celui de l’actif, à 39,1 milliards de dollars.

l’approche GéNérale : À coUrt terMe oU

À loNG terMe?

La direction de la Guardian devait d’abord définir l’approche à utiliser aux fins de l’analyse du CE. Deux approches de base ont été envisagées.

1. À court terme L’approche à court terme porte habituellement sur un horizon temporel d’un an. Une base économique est appliquée pour les actifs et les passifs afin de pouvoir tenir compte de l’effet à long terme des événements d’un an. Le CE correspond au montant du capital nécessaire pour que la probabilité d’insolvabilité soit inférieure au niveau cible, par exemple, 0,5 %.

De nombreuses sociétés d’assurances européennes et les filiales américaines de celles-ci ont eu recours à cette approche.

2. À long terme L’approche à long terme repose sur un horizon temporel de plusieurs années. Une période de trente ans pourrait être un horizon type. La base comptable prévue par la loi est habituel-lement utilisée. Des projections sont faites à l’aide d’un grand nombre de scénarios stochastiques pour les principaux facteurs de risque. L’espérance conditionnelle unilatérale au niveau x %, l’ECUx, est calculée sous forme de moyenne des (100-x)% pires résultats. Cette démarche permet de déterminer le CE requis.

Le résultat de chaque projection sur 30 ans n’est pas quantifié en valeur actualisée des bénéfices de l’ensemble de la période de 30 ans (VA30). On calcule plutôt la valeur actualisée la plus élevée des sinistres (VAPES) comme étant la pire des 30 valeurs calculées en tenant compte de la valeur actualisée des bénéfices de la première année seulement, ensuite, des deux premières années, puis des trois premières années … et ainsi de suite jusqu’à la valeur actualisée VA30 pour l’ensemble des années de projection. S’il n’y a aucun sinistre (la VAPES est supérieure à zéro), la VAPES est fixée à zéro.

Aux fins du calcul de l’ECUx, la valeur attribuée à « x » pour-rait varier entre 60 % et 99 %.

Quelques sociétés européennes et certaines sociétés améri-caines ont appliqué cette approche. L’une des plus importantes agences de notation (Fitch) a mis au point son propre modèle qui s’appuie sur cette approche à long terme.

le choix de GUardiaN

Guardian a choisi d’avoir recours à l’approche à long terme, et ce pour les raisons que voici.

• L’approche à long terme faisant appel à l’ECUx est conforme à plusieurs autres calculs effectués et(ou) envisagés par les assureurs américains, par exemple, C3-Phase II et VACARVM pour les rentes variables et les provisions techniques et le capital fondés sur des principes pour l’assurance-vie individuelle.

• Étant donné que Guardian est une mutuelle, elle se concentre principalement sur les valeurs réglementaires. Guardian met aussi l’accent sur les besoins en capital à long terme plus que sur les fluctuations à court terme.

• Avec l’approche à court terme, il faut calculer les passifs sur une base économique pour tenir compte des répercussions des événements d’un an. Guardian n’avait pas encore établi une base pour calculer les passifs sur une base économique.

• Guardian estimait que la haute direction de l’entreprise et

Barbara snyder, fsa, Maaa, Jd, est vice-

présidente principale et actuaire en chef à la

Guardian Life Insurance Company of America

à New York (NY). On peut la joindre à

[email protected].

Étude de cas : Analyse du capital économique de la société Guardian (Les premières années) par Barbara Snyder et Ben Mitchell

qUaNtificatioN des risqUes

Page 27: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 27

les secteurs d’assurance comprendraient et accepteraient mieux l’approche à long terme à l’égard du CE s’appuyant sur les valeurs réglementaires et que, dans l’avenir, l’analyse pourrait être intégrée au mode de gestion des polices.

le processus de Guardian

Après une étude initiale du projet, nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il faudrait faire appel à des ressources externes pour aider tant à concevoir l’initiative qu’à calculer. Des consultants de la firme Milliman ont été sélectionnés pour apporter l’aide requise dans l’exécution de l’analyse du CE.

L’analyse a été divisée en quatre composantes principales comme suit :

1. Risque d’entreprise 2. Risque opérationnel 3. Risque stratégique 4. Analyse du capital

le risqUe d’eNtreprise

Guardian exploite quatre principaux secteurs d’activité (SA) :

1. Vie—principalement vie entière avec participation, temporaire et vie universelle;

2. Rente d’invalidité individuelle; 3. Assurance collective—avec ou sans examen médical, incluant

soins dentaires, vie et invalidité à court et à long terme; 4. Produits et régimes de retraite—rentes fixes, rentes

variables et contrats de rente collective.

Le graphique suivant indique les principaux facteurs de risque modélisés pour chaque secteur d’activité. Un « S » signifie que des scénarios stochastiques ont été appliqués. Un « D » indique que les variations des taux de déchéance dépendaient des changements survenus dans d’autres facteurs de risque.

risques modélisés par secteur d’activité

Vie RII Collectif Retraite

Mortalité S S

Morbidité S S

Déchéance S D D

intérêt S S S S

Crédit S S S S

Marché S

Les algorithmes MG-ALFATM et MG-HedgeTM ont été utilisés pour faire les projections sur 30 ans, sauf pour l’assurance collective à l’égard de laquelle un modèle stochastique exclusif a été élaboré.

Les risques ont été présumés indépendants, avec les exceptions que voici. Des taux de déchéance dépendants ont été appliqués pour certains SA. Des scénarios de taux d’intérêt et de risque de marché ont été générés témoignant ensemble de la corréla-tion entre les deux facteurs de risque.

Les taux d’intérêt acquis du portefeuille après impôt ont été utilisés pour déterminer les taux d’actualisation.

Des hypothèses de base fondées sur la meilleure estimation ont été formulées à l’égard de chaque facteur de risque de chaque SA. Les bénéfices après impôt ont été projetés sur une période de 30 ans à l’aide des hypothèses de base. La valeur actualisée de ces bénéfices a été calculée (VA30).

Des ensembles de 1 000 scénarios stochastiques ont été générés en fonction des hypothèses de base relatives aux facteurs de ris-que marqués d’un « S » dans le graphique ci-haut. Les bénéfices après impôt et la VA30 ont été calculés à l’aide des scénarios stochastiques pour chaque facteur de risque et SA, variant un facteur de risque à la fois. Une valeur « delta » a été calculée pour chaque scénario à titre d’écart entre le scénario de la VA30 et la VA30 de base.

Il fallait combiner la distribution des résultats pour chacun des facteurs de risque en une distribution composée des résultats reflétant tous les risques. Un grand nombre (250 000 ont été choisies) de valeurs observées tirées de la distribution composée ont été produites en choisissant 250 000 intégrateurs aléatoires uniformément indépendants entre 1 et 1 000 pour chaque facteur de risque stochastique. Pour chacune des 250 000 valeurs observées, la somme de la valeur delta attribuée au numéro de scénario choisi pour chaque facteur de risque a été calculée. Cette valeur delta globale représentait une estimation

qUaNtificatioN des risqUes

Ben Mitchell, fsa, Maaa, est deuxième

vice-président et actuaire à la Guardian Life

insurance Company of America à New York

(NY). On peut le joindre à

[email protected].

« …la distribution des résultats pour chacun des facteurs de risque en

une distribution composée des résultats reflétant tous les risques. »

suite à la page 28

Page 28: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

28 | JUiN 2009 | Gestion du risque

de la valeur delta provenant de la VA30 de base pour une projection reflétant les scénarios choisis au hasard, en fonction de l’hypothèse selon laquelle les risques sont indépendants.

Par exemple : Supposons qu’on ait attribué le numéro de valeur observée 10 000 aux chiffres aléatoires que voici pour les facteurs de risque stochastiques :

Mortalité 142Morbidité 038Déchéance 871Intérêt/Marché 413Crédit 910

La valeur delta globale pour la valeur observée 10 000 serait alors calculée comme suit :

Valeur delta Vie pour la projection en utilisant le scénario de mortalité 142 +

Valeur delta Vie pour la projection en utilisant le scénario de déchéance 871 +

Valeur delta Vie pour la projection en utilisant le scénario de taux d’intérêt 413 +

Valeur delta Vie pour la projection en utilisant le scénario de crédit 910 +

Valeur delta RII pour la projection en utilisant le scénario de morbidité 038 +

Valeur delta RII pour la projection en utilisant le scénario de taux d’intérêt 413 +

Valeur delta RII pour la projection en utilisant le scénario de crédit 910 +

Etc.

Le tri des valeurs delta globales a permis de déterminer les valeurs observées composées dans l’aile défavorable de la distribution composée. Guardian a choisi l’ECU99 comme base pour calculer le CE; il fallait donc les 2 500 pires valeurs observées. Puisque les valeurs delta globales présument que les risques sont indépendants, et ce n’est pas totalement vrai, les pires 5 000 valeurs observées composées ont été sélectionnées pour poursuivre l’analyse. Cette mesure a permis de garantir dans une mesure raisonnable que tous les 2 500 pires résultats étaient inclus dans l’échantillon.

Pour chacune des 5 000 pires valeurs observées, une projec-tion a été faite pour chaque SA à l’aide d’une combinaison de scénarios indiquée par les chiffres des scénarios sélectionnés au

hasard pour cette valeur observée. Les bénéfices annuels pour l’ensemble des SA ont été additionnés pour produire un flux global de bénéfices sur 30 ans pour la valeur observée et la VA30 a été calculée. Les VA30 de l’ensemble des 5 000 valeurs observées ont été triées et les 2 500 pires ont défini le pire 1 % de l’aile de la distribution composée qu’il fallait utiliser dans le calcul de l’ECU99. Les VAPES ont été calculées pour chacune des 2 500 pires valeurs observées et la moyenne de ces 2 500 VAPES représentait la valeur de l’ECU99 du CE pour Guardian et ses filiales.

Et quel est le résultat? Le CE d’« entreprise » à l’égard du risque d’entreprise était inférieur à 0,1 % de l’excédent à l’ouverture.

Plusieurs raisons expliquent le fait que le CE d’entreprise pour le risque d’entreprise soit très bas.

• Les participations versées sur les polices d’assurance-vie entière avec participation peuvent être rajustées en fonction des fluctuations de l’expérience. Dans les projections calculées du CE, on a rajusté les participations pour tenir compte des fluctuations des taux d’intérêt acquis du portefeuille. Les participations auraient pu être rajustées pour tenir compte de l’expérience défavorable de la mortalité et du crédit, mais Guardian a choisi de ne pas faire ces rajustements dans le modèle, faisant preuve d’un conservatisme spécial. La provision technique découlant de la flexibilité des participations permet à une mutuelle bien gérée d’absorber les fluctuations prononcées de l’expérience sans les conséquences défavorables extrêmes qu’on risque de retrouver dans d’autres sociétés.

• La tarification du secteur collectif est revue une fois l’an en fonction des nouveaux résultats. Les projections du CE présument qu’une nouvelle tarification se fait une fois l’an et que les changements qui sont apportés influent sur la persistance des polices.

• La combinaison des flux de bénéfices des quatre SA pour générer le flux de bénéfices global apporte un avantage appréciable sur le plan de la diversification. Tout ne va pas mal en même temps et ainsi, une mauvaise expérience dans un facteur de risque peut souvent être neutralisée par une bonne expérience dans d’autres secteurs d’activités.

risqUes opératioNNel et stratéGiqUe

Outre le risque d’entreprise, le risque opérationnel et le risque stratégique ont aussi fait l’objet d’une analyse.

qUaNtificatioN des risqUes

Étude de cas : Analyse du capital économique… | suite de la page 27

Page 29: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 29

Les dirigeants de chaque secteur d’activité, de concert avec le gestionnaire principal du risque opérationnel, ont défini les prin-cipaux scénarios de risque opérationnel pour leur secteur. Pour chaque scénario, deux estimations de la fréquence et de la gravité ont été faites, soit une représentant un faible coût et une haute probabilité et l’autre, un coût élevé et une faible probabilité.

Un modèle de copule a été utilisé pour élaborer la distribution globale pour la combinaison de tous les scénarios de risque, permettant de faire preuve de jugement pour ce qui est de la corrélation des scénarios. Le CE aux fins du risque opéra-tionnel a été calculé et était inférieur à 3 % de l’excédent.

L’analyse du risque stratégique s’appuyait sur une séance de remue-méninges animée par les consultants de Milliman. L’équipe de la haute direction de la société a préparé une vaste gamme d’éventuels événements stratégiques. Les consultants de Milliman ont ensuite eu recours à leur modèle de risque stratégique pour préparer une grille indiquant les interrelations des événements stratégiques et définir les regroupements de risques les plus significatifs. Le CE pour le risque stratégique a été calculé et était inférieur à 5 % de l’excédent.

Une fois les pertes pour risque opérationnel et pour risque stratégique combinées aux bénéfices annuels de chacune des valeurs observées de l’aile du risque d’entreprise, le CE global qui en résulte pour les risques d’entreprise, opérationnel et stratégique combinés était inférieur à 3 % de l’excédent.

l’aNalyse dU capital

Guardian a analysé en profondeur la distribution du rendement futur de l’excédent existant. L’excédent est, dans une large mesure, investi dans des actions ordinaires protégées par un programme de couverture dynamique complexe. L’analyse avait pour objet de démontrer qu’une grande part de l’excédent à l’ouverture, soit 3,7 milliards de dollars, serait disponible pour appuyer les risques globaux, même dans l’aile de la distribution.

UNe aUtre aNalyse À l’aide des proJectioNs dU ce

Guardian a élargi l’analyse de base du CE de bien des façons.

• Par SA—Outre l’analyse du CE de l’entreprise à l’égard du risque d’entreprise, Guardian a procédé à une analyse du CE pour chaque SA comme s’il s’agissait d’une entité autonome. Seuls les facteurs de risque attribués au SA cible ont été utilisés pour définir la distribution composée à l’égard de ce SA. Les bénéfices provenant des autres SA n’étaient pas disponibles pour neutraliser

les pertes du SA cible. La somme des résultats du calcul du CE pour les quatre SA était inférieure à 2 % de l’excédent, comparativement au CE à l’égard du risque d’entreprise qui était inférieur à 0,1 % de l’excédent.

• Nouvelles affaires—L’analyse du CE se fait habituellement en fonction du bloc fermé des affaires en vigueur à la date de l’analyse. De plus, Guardian, dans le cadre de l’analyse, a intégré cinq années de nouvelles affaires de même que les affaires en vigueur. Ainsi que prévu, les pertes au chapitre de la souscription de nouvelles affaires ont généré des VAPES plus importantes. La somme des résultats du calcul du CE, y compris les nouvelles affaires, pour les quatre SA était inférieure à 7 % de l’excédent.

• Réduction de la VA30—Le CE au niveau de l’ECU99 mesure le capital requis pour couvrir les pertes moyennes dans l’aile défavorable de 1 % de la distribution. Cette démarche a produit des renseignements très intéressants et la direction était ravie que le CE ne représentait pas une somme importante (moins de 0,1 % de l’excédent). Cependant, il est difficile d’utiliser les montants qui se rapprochent étroitement de zéro pour évaluer les répercussions des événements réels ou des éventuelles mesures prises par la direction. On pourrait aussi envisager la possibilité que la VA30 de base totale pour les SA soit une composante de la valeur de l’entreprise. La réduction de la VA30 dans l’aile de 1 % indiquerait donc à quoi correspondrait la valeur perdue dans ces situations extrêmes défavorables. La moyenne des VA30, y compris les nouvelles affaires, au-delà de l’aile de 1 % de la distribution correspondait à environ 75 % de la VA30 de base. Les polices génèrent toujours une valeur significative, même dans l’aile de 1 % de la distribution, mais cette réduction de 25 % fournit une base importante permettant d’évaluer l’incidence des mesures réelles ou proposées.

• Simulations de crise—En 2008, la haute direction et le conseil d’administration ont soulevé des questions quant aux conséquences sur Guardian des divers éventuels scénarios futurs. Deux des questions portaient sur les répercussions d’une longue récession assortie d’un scénario de marché baissier du genre japonais. On s’est servi de l’analyse du CE pour répondre à ces questions, en déterminant les valeurs observées découlant de la distribution composée qui combinaient des ensembles de scénarios pour les facteurs de risque individuels et qui étaient conformes aux environnements ciblés. Les résultats de ces valeurs observées ont été combinés et analysés pour apporter des réponses utiles aux questions soulevées.

qUaNtificatioN des risqUes

« Outre l’analyse du CE de l’entreprise, Guardian a procédé

à une analyse du CE pour chaque SA comme s’il s’agissait d’une

entité autonome. »

suite à la page 30

Page 30: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

30 | JUiN 2009 | Gestion du risque

les plaNs poUr l’aVeNir

Pour envisager l’expansion de l’analyse du CE dans l’avenir, il convient de prendre en compte plusieurs améliorations au chapitre de la modélisation ainsi que les objectifs tactiques.

Premièrement, nous prévoyons de faire une analyse élargie de la totalité de la distribution des résultats plutôt que de se concentrer surtout sur l’aile de la distribution se situant à 1 %. Deuxièmement, nous voulons améliorer le modèle schotastique à l’égard de l’assurance collective pour mieux tenir compte du calendrier et de l’efficacité des mesures de modification des taux. Troisièmement, nous voulons accroître la sensibilité des variables dépendantes de chaque secteur d’activité.

Sous l’angle tactique, nous aurons éventuellement des capaci-tés internes de modélisation et nous acquérons actuellement notre capacité de calcul distribué. Qui plus est, nous voulons augmenter les fins auxquelles la modélisation du CE sera appli-quée, notamment la mesure du rendement des affaires.

La société Guardian n’a fait qu’effleurer la question en mettant au point sa modélisation et son analyse du CE. La prochaine étape importante consiste à décider des mesures à prendre pour intégrer les résultats de l’analyse au processus décisionnel de l’organisation. ■

qUaNtificatioN des risqUes

Étude de cas : Analyse du capital économique… | suite de la page 29

Let Your Voice Be Heard!The SOA 2009 elecTiOn POllS Are juST ArOund The cOrner! POllS OPen On AuguST 3 And clOSe On AuguST 24 AT 5:00 P.m. cenTrAl dAylighT Time. Online vOTing fOr The elecTiOn iS OPen 24 hOurS A dAy.

Visit the SOA Web site at http://www.soa.org/elections to learn more about the candidates. You’ll find:

• Video recorded campaign speeches by president-elect candidates. • President-elect roundtable discussion moderated by Past President Ed Robbins.• Photographs and biographies of Board candidates. • Biographies of Section Council candidates.• Entire ballots including the Board and Section Council candidates.

Let your voice be heard … please vote.

Questions regarding the election can be sent to [email protected].

Page 31: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 31

Ces deux dernières années, les marchés financiers de par le

monde ont connu une crise sans précédent. Bien que les causes

de cette crise soient complexes, tous s’entendent pour dire que

le risque de crédit y a joué un rôle important. Nous ne tenterons

pas ici d’examiner l’incidence économique du resserrement du

crédit, mais nous présenterons plutôt un aperçu de la méthode de

modélisation structurelle du risque de crédit couramment utilisée

par les actuaires.

iNtrodUctioN

Bien que le risque de crédit n’ait jamais constitué un domaine d’intérêt majeur pour la profession actuarielle, les actuaires ont tout de même participé de façon importante à l’élaboration de techniques modernes de modélisation du risque de crédit. De fait, plusieurs modèles bien connus en la matière sont des applications directes des modèles de fréquence-gravité ou des modèles de risque que l’on retrouve souvent dans la littérature actuarielle et sur l’assurance. Ces dernières années, les préoc-cupations croissantes concernant le risque de crédit ont favorisé l’utilisation à large échelle de diverses méthodes avancées de mesure de l’exposition à ce type de risque. Il est essentiel que les actuaires se familiarisent avec ces méthodes très répandues et connaissent les points forts et les points faibles de ces méthodes s’ils veulent demeurer à la fine pointe des connaissances dans ce domaine dynamique et en rapide évolution.

À l’heure actuelle, les modèles structurels et les modèles à forme réduite représentent les deux principales catégories de méthodes de modélisation du risque de crédit. Les méthodes structurelles ont pour but de définir une relation explicite entre le risque de contrepartie et la structure du capital, tandis que les méthodes à forme réduite traitent les défauts de paiement comme étant des événements exogènes découlant d’un processus stochastique, tel que le processus de Poisson avec sauts. Vus sous cet angle, la plupart des modèles actuariels employés pour mesurer le risque de crédit font partie de la catégorie des méthodes à forme réduite.

Les modèles structurels, conçus par Black, Scholes et Merton, utilisent de façon ingénieuse la théorie moderne d’évaluation d’options pour évaluer les dettes des sociétés. Le modèle de Merton a été le premier modèle structurel et a servi de pierre angulaire à tous les autres. Afin d’expliquer les grands concepts qui sous-tendent les méthodes structurelles, nous allons examiner en détail le modèle de Merton et présenter brièvement quelques extensions de ce modèle. Nous ferons par la suite un résumé des principaux avantages et inconvénients des deux catégories de modèles, ce qui sera suivi d’une brève analyse de la crise financière actuelle.

le Modèle de MertoN

Ce qui est vraiment bien dans le modèle de Merton, c’est qu’il considère – une première – les actions des sociétés comme étant des options d’achat sur l’actif de l’entreprise, permet-tant ainsi l’application des méthodes d’évaluation d’options de Black-Scholes. Nous commençons l’examen de ce modèle pionnier en décrivant le scénario qui suit.

Supposons qu’au temps t, une certaine société ait un actif At

financé par des actions Et et une dette coupon zéro D

t, de valeur

nominale K, qui vient à échéance au temps (T > t), et que la structure de capital de la société se définisse par l’équation de bilan suivante :

En pratique, la date d’échéance T des dettes est choisie de façon que toutes les dettes soient assimilées à une obligation coupon zéro. Lorsque A

T > K, la société est en mesure de verser

aux porteurs des titres la pleine somme de K, et les actions ont toujours une valeur de A

T - K. Par contre, si A

T < K, la société

ne peut honorer ses obligations de paiement à l’égard de la dette au temps T, auquel cas les porteurs des titres ont un droit de premier rang sur l’actif résiduel A

T et les actionnaires se retrou-

vent devant rien. La valeur des actions au temps T peut donc s’exprimer comme suit :

(2)

Cette équation définit exactement le gain rattaché à une option d’achat européenne sur l’actif sous-jacent A

t, dont le

prix d’exercice est K, et la date d’échéance, T. On peut donc appliquer les formules bien connues d’évaluation d’options de Black-Scholes, à condition de poser les hypothèses de modéli-sation correspondantes. On suppose que la valeur de l’actif suit un mouvement brownien géométrique et que la dynamique de neutralité du risque s’exprime par l’équation différentielle stochastique suivante :

yu Wang est analyste en actuariat auprès

du service Mesure intégrée du risque de la

Financière Manuvie, à Toronto (Canada).

Vous pouvez le joindre à

[email protected].

Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèlespar Yu Wang

qUaNtificatioN des risqUes

suite à la page 32

Page 32: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

32 | JUiN 2009 | Gestion du risque

où Wt est un mouvement brownien standard sous la mesure de

neutralité du risque, r désigne le taux d’intérêt sans risque com-posé en continu, et σ

A représente la volatilité du rendement de

l’actif. On notera que At croît au taux sans risque sous la mesure

de neutralité du risque et qu’il a donc une dérive r dans (3), ce qui présuppose, implicitement, la négociabilité permanente de l’actif de la société. Maintenant, si nous appliquons la formule de Black-Scholes à l’option d’achat européenne, nous obtenons :

où Φ(.) désigne la fonction de répartition N(0,1), et les quanti-tés d+ et d– se définissent comme suit :

Selon ce cadre, un défaut de paiement au temps T a lieu lorsque l’option d’achat des actionnaires vient à échéance hors du cours, selon une probabilité de neutralité du risque définie par

laquelle est parfois convertie en une probabilité réelle en y extrayant le prix de marché correspondant du risque.

Bien que les porteurs des titres encourent un risque de con-trepartie, ils peuvent couvrir entièrement leur position en achetant une option de vente européenne sur le même actif sous-jacent A

t, dont le prix d’exercice est K. Si A

T < K, cette

option de vente a une valeur égale à K – AT, et sa valeur est

nulle si AT

> K. La combinaison de ces deux positions (dette et option de vente) permettrait aux porteurs d’enregistrer un gain certain de K au temps T, ce qui constituerait donc une position sans risque :

où Pt désigne le prix de l’option de vente au temps t, que l’on

détermine en appliquant la formule de Black-Scholes à l’option de vente européenne :

La dette de la société est une obligation à risque et, à ce titre, elle doit être évaluée en tenant compte d’un différentiel de taux (prime de risque). Soit s le différentiel de taux composé en con-tinu. Le prix de l’obligation D

t peut s’exprimer comme suit :

Si nous regroupons les équations (8), (9) et (10), nous pouvons exprimer s au moyen de la formule explicite suivante :

ce qui nous permet de calculer le différentiel de taux lorsque la valeur de l’actif et la volatilité des rendements (A

t et σ

A) sont

connues, sachant t, T, K, et r. L’un des moyens couramment utilisés pour isoler A

t et σ

A consiste à supposer que le cours des

actions Et suit lui aussi un mouvement brownien géométrique,

et à appliquer le lemme d’Ito afin de montrer que les volatilités instantanées satisfont à l’équation :

En insérant le delta de l’option de vente de Black-Scholes dans (12), nous obtenons :

où le cours des actions Et et la volatilité σ

E de leur rendement

sont observés sur les marchés boursiers. Enfin, les équations (4) et (13) peuvent être résolues simultanément afin d’obtenir les valeurs de A

t et σ

A, lesquelles sont utilisées dans (11) pour

déterminer le différentiel de taux s.

strUctUre par échéaNces des différeNtiels de

taUx seloN le Modèle de MertoN

Le différentiel de taux compense l’exposition au risque de crédit, et celui-ci est lié aux variables structurelles (actif, pas-sif, etc.) dans le modèle de Merton. Les ratios de structure financière, tels que le ratio d’endettement, sont de bons indi-cateurs de risque selon ce modèle, et, dans l’équation (11), le différentiel de taux est effectivement exprimé comme une fonction croissante du niveau d’endettement. Afin de mieux faire comprendre les implications de ce modèle, nous allons examiner la structure par terme des différentiels de taux qui sont déterminés par (11) et tracés en fonction de diverses éché-ances de la dette :

Modélisation structurelle du risque de crédit… | suite de la page 31

qUaNtificatioN des risqUes

Page 33: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 33

structure par échéances des différentiels de taux selon

le modèle de Merton

Comme l’indique le graphique, la structure par échéances des différentiels de taux qui découle du modèle de Merton semble réaliste. En voici les principaux points :

• Une société faiblement endettée a une structure par échéances des différentiels de taux qui est plate et dont les premiers différentiels sont près de zéro, puisque la société possède suffisamment d’actif pour répondre à ses engagements à court terme. Les différentiels augmentent légèrement en fonction de l’échéance de la dette (prise en compte des incertitudes futures), pour ensuite commencer à descendre à long terme.

• Dans le cas d’une société moyennement endettée, la structure par échéances des différentiels de taux comporte une bosse. À très court terme, les différentiels sont peu élevés, car la société dispose de juste ce qu’il faut d’actif pour pouvoir honorer ses dettes. Par la suite, les différentiels augmentent rapidement du fait que les variations de la valeur de l’actif pourraient très bien entraîner une insuffisance de l’actif, et ils descendent ensuite progressivement en fonction de l’échéance.

• Dans le cas d’une société fortement endettée, la structure par échéances des différentiels de taux présente une pente descendante. Elle commence à un niveau très élevé, pour ensuite diminuer en fonction de l’échéance, car le passage du temps permet à l’actif de la société de croître et de couvrir les engagements.

• Selon certaines études empiriques, le modèle de Merton tend à sous-estimer les différentiels de taux, plus particulièrement les différentiels à court terme se

rapportant aux dettes de grande qualité (rappelez-vous les très faibles différentiels à court terme dans le cas de la société faiblement endettée). Plusieurs modèles élargis élaborés récemment ont remédié à cet inconvénient, et ils sont l’objet de la prochaine section.

exteNsioNs et aMélioratioNs dU Modèle

de MertoN

Depuis que Black, Scholes et Merton ont publié les tout premiers travaux portant sur la modélisation structurelle du risque de crédit, de nombreux chercheurs ont proposé des extensions pour le modèle de Merton, qui ont fait l’objet de critiques du fait qu’elles se fondaient sur plusieurs hypothèses simplificatrices. Les modèles structurels élargis représentent une nette amélioration du modèle original de Merton, car ils sont plus réalistes et mieux en mesure de produire des résultats conformes aux données de marché (p. ex. les écarts relatifs aux contrats d’échange sur défaillance). Voici quelques-unes de ces améliorations :

• Dans le modèle de Merton, les sociétés ne peuvent être en défaut qu’à la date d’échéance de la dette. On peut modifier ce modèle et prévoir des défaillances antérieures en fixant un seuil selon lequel il y a défaillance lorsque la valeur de l’actif tombe sous ce niveau critique. Les méthodes servant à déterminer le prix des options barrière peuvent s’appliquer dans ce contexte. Ce seuil découle parfois de la stratégie d’optimisation des actionnaires qui vise à maximiser la valeur nette réelle de la société. Black et Cox ont été les premiers à publier des extensions du modèle de Merton qui vont dans ce sens, et cette famille de modèles est souvent désignée sous le nom de First Passage Time models.

• L’hypothèse d’un taux d’intérêt constant n’est pas fondée, et il est possible d’intégrer un modèle stochastique de taux d’intérêt dans le modèle de Merton ou ses versions élargies. Dans ce cas, la corrélation existant entre l’actif et le processus de taux d’intérêt pourrait, au besoin, être prise en compte.

• Il n’est pas toujours possible d’assimiler toutes les dettes à une seule obligation à coupon zéro. Il a été démontré qu’on pouvait modéliser plusieurs dettes ayant diverses caractéristiques au moyen d’un modèle structurel. Le modèle d’ évaluation des options composées de Geske, mis au point par Robert Geske, a été le premier modèle structurel du genre.

• Plusieurs autres modèles structurels avancés faisant intervenir la volatilité stochastique et les processus

diffé

rent

iel d

e ta

ux

Échéance de la dette

.. . . . . ..........................................................................

. Société fortement endettée

Société moyennement endettée

Société faiblement endettée

« Afin d’utiliser les modèles de façon optimale et de ne pas

répéter des erreurs coûteuses, il importe de mettre en place

un solide cadre de gestion du risque d’entreprise selon lequel

les résultats des modèles ne peuvent à eux seuls jouer un rôle

prépondérant dans le processus décisionnel. »

qUaNtificatioN des risqUes

suite à la page 34

Page 34: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

34 | JUiN 2009 | Gestion du risque

de diffusion avec sauts ont été proposés, et même des modèles avec changement de régime. Ces applications permettent d’expliquer avec une plus grande exactitude les observations sur les marchés, mais elles sont souvent d’une grande complexité analytique.

aVaNtaGes et iNcoNVéNieNts des Modèles

sUr le risqUe de crédit

Les modèles structurels, dont le plus influent a été celui de Merton, ont l’énorme avantage de mettre en relation le risque de crédit et les variables structurelles de base. Ils donnent une interprétation économique intuitive ainsi qu’une explication endogène des défauts de paiement, et ils se prêtent bien à l’application des méthodes d’évaluation d’options. C’est pour-quoi ils facilitent non seulement l’évaluation des titres, mais également le choix de la structure financière.

Le principal inconvénient des modèles structurels réside dans leur difficulté d’application. Par exemple, l’hypothèse sur la négociabilité permanente des actifs des sociétés n’est pas réaliste, et il s’avère parfois plus difficile que prévu de calibrer les processus stochastiques liés à l’actif, à l’aide des données publiques disponibles. De plus, bien que les versions améliorées des modèles structurels aient corrigé plusieurs lacunes des premiers modèles, elles sont généralement d’une grande complexité analytique et requièrent d’importantes ressources informatiques.

Les modèles à forme réduite ne tiennent pas compte de la cause interne des défauts de paiement; ils se fondent plutôt sur des paramètres exogènes en ce qui concerne ces défauts et le recouvrement des créances. Cette caractéristique constitue à la fois un point fort et un point faible – bien que ces modèles aient le défaut de ne pas prendre en compte toutes les variables économiques à l’origine des défauts de paiement, ils permettent une plus grande marge de manœuvre dans le choix de la forme fonctionnelle. Cette souplesse contribue à la maniabilité analy-tique de ces modèles et facilite leur application et leur calibrage par comparaison aux modèles structurels. Toutefois, la nécessité pour les modèles à forme réduite d’avoir recours aux données historiques permet certes de réaliser un bon ajustement dans le cas des données échantillonnées, mais la capacité prédictive hors échantillon de ces modèles est restreinte.

En règle générale, les modèles structurels sont particulièrement utiles dans des domaines tels que l’analyse du risque de con-trepartie, l’analyse de portefeuille ou de valeurs mobilières et le contrôle de la structure du capital, alors que leur difficulté de calibrage limite leur utilisation dans les salles de marché. Les

modèles à forme réduite, en revanche, sont largement utilisés sur les parquets où l’on négocie des titres de crédit, car les opérateurs ont besoin d’outils de calcul rapides leur permettant de réagir rapidement aux fluctuations du marché.

oBserVatioN sUr la crise fiNaNcière actUelle et

le rôle des Modèles de risqUe

La crise financière actuelle a débuté en 2007, aux États-Unis, et elle tire son origine des prêts hypothécaires à risque et des mar-chés connexes de produits de crédit. Elle s’est répercutée rapide-ment et avec force sur les marchés financiers de par le monde, ce qui a donné lieu à une récession mondiale. Aujourd’hui, on jette le blâme sur les failles de la réglementation et les lacunes des modèles de risque largement utilisés, plus particulièrement les modèles portant sur le risque de crédit, étant donné l’origine de la crise. Nous terminons l’article en décrivant brièvement le rôle des modèles de risque.

Reconnaissons l’évidence : il y a eu, ces dernières années, une croissance rapide de la modélisation des risques finan-ciers, grâce au progrès technologique et à l’augmentation de la main-d’œuvre spécialisée. Le rendement acceptable de plusieurs modèles de risque pendant les périodes de stabilité boursière ont souvent amené les gestionnaires du risque à ne pas prendre en compte les limites inhérentes à ces modèles, ce qui est particulièrement dangereux en contexte de crise, lorsque les lacunes importantes des modèles sont mises au jour et que l’on sait qu’elles sont à l’origine des énormes pertes. De plus, la popularité de certains modèles peut entraîner certains participants du marché à exécuter des stratégies semblables, ce qui épuise rapidement les liquidités et déstabilise les cours et constitue un facteur d’aggravation de la crise.

En fin de compte, les modèles de risque reposent sur des don-nées et des hypothèses simplificatrices; leur validité est donc directement fonction de la qualité de ces données et hypothèses, et même les mesures de risque produites par les modèles de bonne réputation doivent être utilisées avec prudence. Afin d’utiliser les modèles de façon optimale et de ne pas répéter des erreurs coûteuses, il importe de mettre en place un solide cadre de gestion du risque d’entreprise selon lequel les résultats des modèles ne peuvent à eux seuls jouer un rôle prépondérant dans le processus décisionnel. Comme le veut le dicton : « Tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles. » ■

Les opinions exprimées dans le présent article sont celles de l’auteur

et non celles de la Financière Manuvie.

Modélisation structurelle du risque de crédit… | suite de la page 33

qUaNtificatioN des risqUes

Page 35: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 35

coNtexte

Ces dernières années, la vente de rentes à capital variable (RCV) a progressé, en raison, en partie, du très grand nombre d’avenants et garanties qu’offrent maintenant les assureurs. Les avenants prévoyant le versement de prestations du vivant de l’assuré sont aujourd’hui perçus comme un moyen de protéger le revenu de retraite tout en assurant l’objectif d’accumulation d’un patrimoine en prévision des années de retraite. Entre autres types de comptes distincts rattachés aux RCV qui sont actuellement offerts sur le marché, citons les fonds de contrats de marchandises et les fonds indiciels négociables en bourse ainsi que les fonds à gestion passive.

L’augmentation des ventes de ce type de produit découle égale-ment du large éventail de fonds à gestion active qu’offrent aujourd’hui les sociétés de gestion d’actifs de bonne réputation. Ces fonds ont pour but d’offrir un rendement supérieur – par rapport à un indice général – moyennant des frais de gestion plus élevés. En règle générale, les rendements supérieurs sont obtenus au moyen de l’effet de levier ou de façon stratégique en surpondérant ou en sous-pondérant des composantes de l’indice. C’est pourquoi les sociétés qui offrent des fonds à gestion active font le suivi de l’écart entre la valeur du fonds et l’indice de référence, afin de produire de meilleurs rendements.

Les sociétés d’assurances qui vendent des rentes offrent généralement des garanties de rendement liées aux comptes distincts des RCV. En règle générale, le prix de ces garanties est déterminé en supposant implicitement que le rendement des fonds dans lesquels les comptes distincts sont investis – y compris les fonds à gestion active – peut être entièrement reproduit par un panier de fonds à gestion passive. Cette supposition ne tient pas compte des risques et avantages de la gestion active. Cette façon de faire peut donner lieu à une évaluation inexacte du prix des garanties et des frais liés à la cessation des opérations de couverture (hedge breakage), ce qui, dans les deux cas, pourrait avoir une incidence importante sur le niveau de capital de l’assureur en question.

Aujourd’hui, les assureurs tiennent compte de l’incidence des fonds à gestion active sur le rendement de leurs programmes de couverture, et ils en réduisent l’importance en concevant des produits adaptés. On s’attend à ce que les fonds à gestion passive jouent un rôle de plus en plus prépondérant dans les contrats de RCV. Néanmoins, en règle générale, les fonds à gestion active occupent toujours une place importante dans les contrats de RCV en vigueur. La gestion du risque lié à la gestion active revêt donc encore une grande importance.

Nous allons examiner une importante méthode que l’on emploie à l’heure actuelle pour gérer le risque de gestion active, pour ensuite mettre en lumière ses avantages et ses inconvénients et proposer une technique qui conserve les avantages de la méthode actuelle et qui tient compte des risques et avantages de la gestion active de fonds.

la Méthode actUelle

Les assureurs offrent un large éventail de fonds rattachés aux RCV. La sélection de ces fonds et leur approbation reposent sur une analyse rigoureuse des gestionnaires de fonds, sur un examen de la façon dont la décision individuelle correspond aux divers degrés de tolérance et de propension au risque ainsi que sur le contrôle du caractère raisonnable des frais de gestion des fonds.

Sur le plan de la gestion du risque, une étape importante du processus consiste, pour l’assureur, à décomposer les taux de rendement de chacun des fonds en taux découlant d’une combinaison d’indices de référence qui expliquent parfaite-ment les rendements systématiques et spécifiques antérieurs du fonds. Cette décomposition s’effectue généralement au moyen d’une régression linéaire qui exige que les indices de référence expliquent parfaitement le rendement systématique du fonds éventuel. En règle générale, les indices de référence sont un ensemble d’indices passifs représentatifs de la performance boursière en général. Citons, à titre d’exemple, le S&P 500, le Russell 2000, le NASDAQ 100, l’indice EAFE et l’indice Lehman Aggregate Bond.

La forme de cette fonction de régression linéaire s’exprime comme suit :

R = α + Σβiri + ei ,

où Σβi = 100 % et βi ≥ 0

simpa Baiye, cfa, fsa, Maaa, est

deuxième vice-président et gestionnaire de

produit auprès de Transamerica Reinsurance à

Charlotte (NC). On peut le joindre à

[email protected].

Répercussions de la gestion active de fonds sur la tarification des garanties liées aux rentes à capital variable et sur le risque d’entreprisepar Simpa Baiye

réactioN À l’éGard des risqUes

suite à la page 36

Page 36: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

36 | JUiN 2009 | Gestion du risque

réactioN À l’éGard des risqUes

et oùR représente les rendements du fonds à gestion active à

l’étudeα est l’écart ou le rendement supplémentaire obtenu grâce à

une gestion active du fonds βi représente le facteur ou le poids correspondant à l’indice i ri représente le rendement périodique de l’indice iei est le terme d’erreur

Les rendements supplémentaires (également désignés sous le nom d’« alphas ») sont généralement non nuls dans le cas des fonds à gestion active. Cela s’explique par le fait que ces fonds visent à obtenir un rendement supérieur à celui des indices de référence généraux et passifs, en misant sur une meilleure sélection des titres, des secteurs et des pays. C’est pourquoi les sociétés qui offrent des fonds à gestion active font le suivi de l’écart entre la valeur du fonds et l’indice de référence, dans l’espoir d’obtenir de meilleurs rendements.

En règle générale, l’alpha n’est pas pris en compte, pour diverses raisons, dans la tarification et l’évaluation des garanties et la gestion des risques connexes, notamment en raison de l’opinion largement répandue que la valeur d’alpha converge vers zéro à « long terme ». Compte tenu des pertes enregistrées l’an dernier au titre des programmes de couverture, qui découlaient des écarts existant entre le rendement attendu et le rendement réel des fonds, il est certainement plus prudent d’évaluer l’incidence de la gestion active des fonds sur le prix des garanties.

De plus, l’alpha pourrait néanmoins être important dans le cas de fonds qui ne sont pas liés étroitement à un indice général à long terme.

La mise en correspondance des fonds et des indices de référence passifs constitue une étape clé de la tarification et de la couverture des garanties de rendement des fonds d’un contrat de RCV. Si l’on ne prend pas en compte l’alpha, cela équivaut à déterminer le prix des garanties en supposant que les fonds sous-jacents sont tous gérés de façon passive, ce qui don-nera probablement lieu à une évaluation inexacte du prix. Les positions de couverture prises à l’égard des rendements boursiers ou pour des raisons de convexité ou de volatilité pourraient être touchées négativement par cette évaluation erronée. Le fait de ne pas tenir dûment compte de l’alpha dans le prix des garanties comporte des implications telles qu’il vaut la peine d’examiner les possibilités de solution. L’une d’entre elles, et les répercussions qu’elle a sur le processus de tarification et le capital économique, fait l’objet de la prochaine section.

prise eN coMpte de la GestioN actiVe daNs

la tarificatioN : la Méthode des alphas

coNJoNctUrels (« reGiMe alpha approach »)

Cette méthode consiste à déterminer l’alpha prévu corres-pondant à chacune de deux conjonctures, soit l’ensemble des rendements historiques positifs et l’ensemble des résultats historiques négatifs du fonds. Les rendements historiques des indices de référence et du fonds à l’étude sont divisés en deux catégories : les rendements correspondant aux périodes pendant lesquelles le rendement du fonds actif a été positif et ceux correspondant aux périodes pendant lesquelles le rendement du fonds a été négatif. On procède ensuite à une régression linéaire sur l’ensemble de l’échantillon, de même que pour chacune des deux catégories. Les estimations d’alpha découlant de la régression effectuée sur chacun des sous-échantillons sont désignées sous le nom d’alphas conjoncturels. Ces alphas viennent s’ajouter, s’il y a lieu, aux taux sans risque utilisés aux fins de la projection des scénarios de rendements neutres à l’égard du risque qui se rapportent aux diverses composantes de l’indice de référence. Les coefficients de pondération des indices de référence sont obtenus au moyen de régressions effectuées sur l’ensemble de l’échantillon des taux de rendement.

Outre les hypothèses propres à toute méthode de régression linéaire, la méthode des alphas conjoncturels repose sur les hypothèses suivantes :

1) Les alphas conjoncturels représentent un rendement supplémentaire à la fois dans le monde réel et dans un monde neutre à l’ égard du risque. Dans la mesure où alpha représente le rendement supplémentaire obtenu grâce à un choix de gestion effectué dans le monde réel, on peut affirmer que ce rendement supplémentaire resterait le même dans un monde neutre à l’égard du risque. Il s’agit d’une hypothèse cruciale aux fins de la détermination des prix neutres à l’égard du risque.

2) L’ écart de suivi lié à la gestion active n’a pas d’ incidence importante sur les hypothèses relatives à la volatilité des indices de référence qui servent à la détermination des prix neutres à l’ égard du risque. Cette hypothèse est raisonnable si la capacité prédictive de la régression est suffisamment élevée. Lorsque les régressions sont fortement prédictives, cela indique que la volatilité découle de facteurs systématiques qui sont bien représentés dans les composantes de l’indice de référence.

3) Les coefficients de pondération des indices de référence, c.-à-d. les bêtas obtenus à partir de l’ échantillon total des données,

Répercussions de la gestion active de fonds sur… | suite de la page 35

Page 37: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 37

réactioN À l’éGard des risqUes

ne sont pas fonction des deux conjonctures. Si les données indiquent clairement que ce n’est pas le cas, des corrections devront être apportées aux résultats de tarification. Ces corrections ne sont pas traitées dans le présent document.

La principale raison justifiant l’utilisation de la méthode des alphas conjoncturels est que l’obligation rattachée aux avenants prend effet à la suite de rendements boursiers négatifs et soutenus. Les biais dans les pratiques de gestion de fonds qui amplifient le rendement négatif des indices de référence devraient donc faire l’objet d’une analyse et d’une évaluation afin de déterminer leur importance relative.

exeMple d’applicatioN de la Méthode

des alphas coNJoNctUrels

Les rendements mensuels – correspondant à une période de sept ans se terminant en décembre 2008 – d’un fonds américain de croissance et revenu (série « R ») ont été tirés d’un site Web public. Ce fonds à gestion active se concentre sur les titres de sociétés à forte capitalisation, est axé sur la croissance et investit de temps à autre dans des obligations. Ces rendements ont été ensuite majorés afin de tenir compte des frais de fonctionnement du fonds. D’après le profil du fonds, les indices S&P 500 et NASDAQ 100 constituent de bons choix pour former l’indice de référence. Les rendements comparables de ces deux indices ont été tirés du même site Web. Le tableau 1 présente les résultats de la régression pour l’ensemble des données de l’échantillon ainsi que pour les deux conjonctures – l’ensemble des rende-ments positifs et l’ensemble des rendements négatifs du fonds.

L’analyse prête à quelques commentaires. En ce qui concerne l’ensemble de l’échantillon, l’alpha est positif dans l’ensemble. Cela donne à penser que la gestion active du fonds procure un net avantage à long terme – avant les dépenses. Toutefois, si l’on examine attentivement les alphas conjoncturels, on constate que la gestion active du fonds a donné lieu à des rendements supérieurs à ceux des composantes de l’indice de référence pour les périodes de rendements positifs et à des rendements inférieurs à ceux des composantes pour les périodes de rendements négatifs. Cette observation corrobore les données empiriques sur le comportement des gestionnaires de fonds en général. Les coefficients de pondération diffèrent de façon importante d’une conjoncture à l’autre, comme l’indique le coefficient plus élevé du NASDAQ 100 dans le cas de la conjoncture de rendements négatifs. Cette variation peut expliquer la plus grande vola-tilité du rendement du fonds pour les périodes de rendements négatifs. Néanmoins, la capacité prédictive globale de chacune des régressions demeure dans des limites acceptables.

Afin d’appliquer la méthode des alphas conjoncturels à la tarification, nous présentons ci-après un exemple faisant inter-venir une garantie de revenu viager (GRV) dont la garantie de revenu est de 5 pour cent la vie durant, et ce, dans le cas d’une personne âgée de 60 ans et d’une personne âgée de 80

tableau 1 : résultats de la régression – méthode des alphas conjoncturels

L’ensemble de l’échantillon

Conjoncture de rende-ments positifs

Conjoncture de rende-ments négatifs

Mois de données 77 47 30

A 0,15 % 0,8 % -0,7 %

ß S&P 73 % 75 % 56 %

ß NASDAQ 21 % 11 % 24 %

R2 89 % 82 % 75 %

tableau 2 : hypothèses de l’exemple sur la tarification

Caractéristiques du produit

Fonds sous-jacent Fonds américain de croissance et revenu (série « R »)

Prestation de décès Valeur du compte

Total des dépenses 2,15 %

Hypothèses de marché

Taux sans risque 3 % (chaque année)

Volatilité implicite S&P – 25 % NASDAQ – 35 %

Indices de référence et coefficients de pondération

S&P 500 – 78 % NASDAQ 100 – 22 %

Alphas conjoncturels Conjoncture des rendements positifs – 10 % (taux annualisé) Conjoncture des rendements négatifs – 8 % (taux annualisé)

Taux de corrélation de l’indice de référence

70 %

Modèle pour les rendements boursiers Mouvement brownien géométrique

Modèle d’évaluation du prix des options

Black-Scholes

Principales hypothèses actuarielles

Taux d’utilisation du revenu 100 % du revenu viager, immédiatement

Taux de déchéance 1, 2, 3, 4, 5, 6, 15, 10, 10,.., 10

Mortalité 100 % de la table Annuity 2000

« Les rendements supplémentaires (également désignés sous

le nom d’« alphas ») sont généralement non nuls dans le cas

des fonds à gestion active. »

suite à la page 38

Page 38: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

38 | JUiN 2009 | Gestion du risque

réactioN À l’éGard des risqUes

ans. Les hypothèses de tarification pour cet exemple figurent dans le tableau 2.

À la lumière des résultats du tableau 3, nous pouvons déduire que la prise en compte de la gestion active du fonds dans la détermination des prix pourrait entraîner une augmentation d’au moins 10 pour cent du coût de l’avenant dans le cas d’un fonds commun de croissance et revenu. Il convient également de noter que la gravité des risques liés à la gestion active du fonds est directement fonction de la durée de vie prévue de l’avenant, ce qui confirme le fait que, bien qu’alpha perde de son importance à long terme, il demeure toujours une considération importante en matière de tarification et de gestion du capital.

répercUssioNs de la Méthode des alphas

coNJoNctUrels sUr le capital écoNoMiqUe

Aux É.-U., les lignes directrices sur le capital réglementaire applicables aux RCV tiennent compte de l’incidence de la gestion active des fonds sur l’utilisation de capital-risque. En effet, elles exigent que la méthode de mise en correspondance des fonds sous-jacents et des indices réponde à certaines exi-gences d’étalonnage, et que l’on tienne compte par ailleurs de l’inefficacité des opérations de couverture en raison d’alpha. Toutefois, elles ne prescrivent pas une méthode particulière pour quantifier le risque de base découlant de la gestion active. L’utilisation de la méthode des alphas conjoncturels pourrait aider à quantifier les effets de la gestion active des fonds sur le capital réglementaire et le capital économique. Nous donnons ici un exemple de son application en nous servant de la GRV hypothétique décrite précédemment et vendue à la personne âgée de 60 ans. Pour les besoins de l’exemple, nous supposons que la méthode interne de mesure du capital économique est

la valeur à risque sur un an de l’actif net. Nous supposons également qu’une chute de 50 pour cent des cours boursiers et qu’une hausse de 15 points de pourcentage de la volatilité implicite correspondent toutes deux au 98e centile des résultats annuels éventuels. Les résultats sont résumés au tableau 4.

L’actif de couverture figurant dans le tableau 4 tient compte d’une valeur approximative du passif qui ne tient pas compte des effets de la gestion active, tandis que la valeur du passif indiquée découle de la méthode des alphas conjoncturels. Les résultats indiquent que le capital économique résultant de la gestion active pourrait être de l’ordre de 10 millions de dollars pour chaque milliard de dollars de contrats nouvellement émis. Calculé sur la base de la valeur nominale, la charge annuelle supplémentaire correspondant à 20 points de base – ou 2 mil-lions de dollars pour chaque milliard de dollars de nouveaux contrats, valeur obtenue précédemment dans le cas de la même GRV –, procure un rendement intéressant sur le capital régle-mentaire requis au titre du risque de base.

répercUssioNs de la Méthode des alphas

coNJoNctUrels sUr la GestioN dU risqUe

d’eNtreprise

Les exemples qui précédent, bien qu’instructifs, reposent sur l’hypothèse qu’il n’existe qu’un fonds. En réalité, les contrats de RCV proposent généralement un large éventail de fonds, chacun comportant son propre degré de risque de gestion active, offrant ainsi la possibilité de diversifier le risque et de réduire l’incidence de la gestion active sur l’utilisation de capital-risque à l’échelle des produits de RCV. Par exemple, le risque de gestion active lié au fonds de croissance et revenu pourrait sans doute être compensé dans une certaine mesure par le risque de gestion active lié à un fonds obligataire du même portefeuille. Toutes choses étant égales par ailleurs, plus les styles de gestion active sont diversifiés, plus faible sera l’incidence globale de la gestion active sur les risques et avan-tages que comportent les avenants des rentes. La réduction de l’incidence négative de la gestion active augmente la capacité concurrentielle des assureurs sur le marché des garanties.

Du point de vue de la vente et de la distribution, il pourrait être encore plus difficile de réussir à diversifier les fonds d’une façon qui soit efficiente sur le plan du capital. Les assureurs entretiennent des relations complexes avec les gestionnaires de fonds et les représentants des produits de rente. Les fonds susceptibles de favoriser cette diversification ne sont peut-être pas en mesure d’absorber les flux financiers de ces produits, et les autres produits ne jouissent peut-être de la notoriété leur

tableau 4 : répercussions de la gestion active sur le capital économique

Élément Valeur à risque sur un an (en % de la prime à l’émission)

Actif de couverture 22 %

Passif (avec alphas conjoncturels) 23 %

Actif net (1 %)

tableau 3 : résultats de tarification

Âge Cas de base (points de base)

Avec les alphas conjoncturels (points de base)

% d’écart

60 150 170 13 %

80 35 43 22 %

Répercussions de la gestion active de fonds sur… | suite de la page 37

Page 39: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 39

réactioN À l’éGard des risqUes

permettant de générer des ventes. Il est donc crucial de mettre en balance les avantages de la diversification des fonds et les réalités de la distribution et autres contraintes organisation-nelles concurrentes. La capacité de tenir compte des risques de gestion active dans la tarification et le capital de risque permettra d’atteindre cet équilibre tant recherché.

La prise en compte de l’incidence d’alpha sur les « variables grecques » du passif lié à la garantie pourrait également constituer une approche viable. L’utilisation de la méthode des alphas conjoncturels pourrait produire des variables grecques qui tiennent compte des biais de la gestion active, de la même manière que le comportement dynamique des titulaires de con-trat influe sur les variables grecques du passif. Cette approche pourrait avoir une incidence modeste sur les risques de modèle existants et devrait être examinée attentivement.

Dans la mesure où la gestion active amplifie les risques de mar-ché négatifs liés aux garanties des rentes, il est difficile de trouver une compensation suffisante du risque parmi les autres types de produits d’une société d’assurance-vie. La diversification de la gamme existante de fonds à l’échelle des produits de rente constitue toujours la meilleure solution de rechange à l’imposition d’un prix supplémentaire au titre de la gestion active.

soMMaire et coNclUsioNs

Les fonds à gestion active occupent aujourd’hui une place prépondérante dans la plupart des RCV. On s’attend à ce que ces fonds offrent un meilleur rendement à long terme que celui de leur indice de référence correspondant, pour le plus grand

bénéfice des clients et des sociétés d’assurances. Toutefois, ce sont les rendements boursiers, à court et à long termes, qui déterminent la durée de vie (période précédant le début des paiements) des garanties des avenants. Il importe donc de déterminer l’importance relative des facteurs qui amplifient les rendements boursiers. La gestion active (alpha) constitue un facteur important. Nous avons montré que la méthode des alphas conjoncturels permet de mieux comprendre l’incidence d’alpha, grâce à la séparation des rendements boursiers et à la régression effectuée sur ces derniers. En ce qui concerne le fonds à gestion active qui est à la base des exemples, alpha a une incidence importante sur le prix et les exigences en capital correspondantes d’un avenant GRV.

Les répercussions d’alpha sur le risque d’entreprise peuvent être gérées au moyen de la diversification des fonds et des opéra-tions de couverture. Tous les outils de gestion comportent des avantages et des inconvénients. Ces méthodes doivent faire l’objet d’un examen minutieux, en regard de divers objectifs organisationnels concurrents.

La méthode des alphas conjoncturels comporte le risque que la réalité diffère des résultats des modèles. Les alphas prévus peuvent différer de leur valeur réelle et exiger un niveau supplé-mentaire d’attribution du rendement. Quoi qu’il en soit, cette méthode constitue un pas en avant pour ce qui est d’intégrer les réalités de la gestion active de fonds dans la tarification et la couverture des garanties liées aux RCV et dans la gestion connexe du capital. ■

Equity-Based Insurance Guarantees Conference

October 12-13, 2009

Boston, MA

This seminar is designed to give

professionals with limited-to-moderate

experience an understanding of how to

better quantify, monitor and manage the

risks underlying the VA and EIA products.

Learn more www.soa.org.

« …gestion active du fonds procure un net avantage à long terme – avant les dépenses.

Toutefois, si l’on examine attentivement les alphas conjoncturels, on constate que la

gestion active du fonds a donné lieu à des rendements supérieurs à ceux des composantes

de l’indice de référence pour les périodes de rendements positifs et à des rendements

inférieurs à ceux des composantes pour les périodes de rendements négatifs. »

Page 40: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

40 | JUiN 2009 | Gestion du risque

IL y A DE bONNES ChANCES pour que les solutions d’assurance soient inscrites à l’ordre du jour de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique qui aura lieu cette année, à Copenhague. La question des assurances a été incluse dans le texte préliminaire de négociation de la Conférence, lors des négociations sur le changement clima-tique qui se sont déroulées cette semaine, à Bonn. Il s’agissait d’un moment crucial pour intégrer des mécanismes d’assurance dans la structure de l’accord qui résultera de la Conférence.

l’aUGMeNtatioN des phéNoMèNes

cliMatiqUes extrêMes toUche sUrtoUt

les pays eN déVeloppeMeNt

Les risques climatiques revêtent une grande importance pour le secteur de l’assurance. Le changement climatique vient modifier la probabilité de phénomènes climatiques extrêmes, souvent en augmentant leur fréquence ou leur intensité. Selon le Quatrième rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC, 2007), les changements clima-tiques anthropiques continueront d’avoir une incidence impor-tante sur les risques climatiques. L’augmentation de la fréquence des sinistres et des cycles d’intensité, probablement liée à une tendance du changement climatique, vient augmenter le risque de pertes. Le secteur des assurances devra, le cas échéant, quantifier cette nouvelle tendance et tenir compte des résultats dans le calcul des risques, le prix des produits et la sélection des risques (Charpentier, 2008).

Les pertes économiques découlant des phénomènes clima-tiques naturels sont en hausse, totalisant, en moyenne, chaque année, 100 milliards de dollars américains au cours de la dernière décennie (Munich Re, 2007). Ce sont dans les pays en développement que les pertes en dollars et la diminution de la capacité productive sont les plus élevées. Dans ces régions, à une période où les risques, notamment climatiques, sont en hausse, on ressent de plus en plus le besoin de disposer d’outils de gestion du risque tels que l’assurance. C’est parce qu’ils offrent une garantie financière contre les sécheresses, les inon-dations, les cyclones tropicaux et autres formes de perturbations climatiques et de phénomènes extrêmes que les mécanismes

d’assurance constituent un bon moyen de faire face au change-ment climatique (Hoeppe et Gurenko, 2006).

Le secteur de l’assurance et la société font donc face à un double défi. D’abord, la plupart des facteurs à l’origine de l’augmentation des sinistres ne sont pas liés au climat et sont plutôt d’origine sociétale. Il devient donc de plus en plus nécessaire de disposer de programmes intégrés et efficaces de gestion et de réduction des risques (Ward et coll., 2008; Maynard, 2008). Les efforts de réduction des risques, s’ils sont efficaces, permettraient de main-tenir l’assurabilité à une période où la proportion des risques liés au changement climatique augmente constamment (Bals et coll., 2006). Deuxièmement, les régions confrontées à des phénomènes climatiques de plus en plus fréquents et intenses ont besoin de solutions d’assurance et constituent donc un créneau important (Dlugolecki et coll., 2009; Mills, 2007).

les NéGociatioNs sUr le cliMat oNt fraNchi UNe

étape iMportaNte eN Matière d’assUraNce

Une étape importante a été franchie lors des discussions sur les changements climatiques qui ont eu lieu en avril, à Bonn (Allemagne). Le Secrétariat sur les changements climatiques de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a publié un « document de travail » sur lequel les négociateurs se fonderont pour élaborer le texte de négociation en prévision de la Conférence de Copenhague. Ce document énonce les points cruciaux concernant la prise en compte de l’assurance dans le futur accord de Copenhague :

• Premièrement, un cadre de gestion des risques qui inclut l’assurance. La réduction des risques et l’assurance sont des points sur lesquels les parties se sont entendues.

• Deuxièmement, le document souligne la nécessité de mettre en place un mécanisme financier spécial et de consacrer des fonds multilatéraux à l’adaptation, ce qui comprend le soutien financier éventuellement requis pour appuyer les éléments d’un nouveau mécanisme d’assurance. Les arrangements institutionnels visant à permettre le financement de l’adaptation prévoiront la création d’un cadre politique et d’un comité spécialisé.

La question des assurances ne figurera donc pas dans l’accord de Copenhague comme un simple mot clé, mais se verra accom-pagner de propositions concrètes de financement et de consi-dérations d’ordre opérationnel. Le vice-président de la Munich Climate Insurance Initiative (MCII) et directeur général de l’ONG Germanwatch, Christoph Bals, prévoit que « d’ici la fin de 2009, les négociations sur le climat déboucheront sur la

Koko Warner, ph.d.,

membre du comité exécutif de la Munich

Climate Insurance Initiative et chef de section

à l'Institut pour l'environment et la sécurité

humaine de l'Université des Nations Unies.

Les négociations sur le climat ont franchi une étape importante en matière d’assurancepar Koko Warner, Ph.D.

réactioN À l’éGard des risqUes

Page 41: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 41

création d’un cadre de gestion des risques favorisant l’adaptation au changement climatique, auquel seront intégrées des solutions d’assurance destinées aux pays en développement les plus vulnérables. »

propositioNs eN Matière d’assUraNce lors des

NéGociatioNs sUr le cliMat

Lors des discussions qui ont eu lieu à Poznan, en 2008, ainsi qu’en avril, à Bonn, les négociateurs ont souligné la nécessité d’intégrer la gestion des risques – dont l’assurance fait partie –, dans la structure de l’accord de Copenhague (CCNUCC 2008a, 2008b). Lors des négociations, un grand nombre de propositions mises en avant faisaient mention de l’assurance1. L’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) et la MCII ont mis sur la table deux propositions détaillées en matière d’assurance, qui analy-sent comment la gestion des risques, y compris les mécanismes d’assurance, pourrait s’inscrire dans un cadre de financement à long terme pour l’adaptation au changement climatique (c.-à-d. après 2012) (AOSIS, 2008; MCII, 2008). Ces proposi-tions insistent sur le fait que la prévention et la réduction des ris-ques constituent le point de départ de la gestion des catastrophes climatiques. Lorsque des programmes efficaces de réduction de risques sont en place, l’assurance constitue une mesure complé-mentaire qui facilite l’adaptation.

Comme l’a fait remarquer Mme Koko Warner, Ph.D., direc-trice d’un département à l’Université des Nations Unies [traduction] : « Toutes les parties conviennent que le meilleur point de départ pour aborder le problème du changement climatique réside dans la réduction des risques. Elles se tournent vers le secteur de l’assurance en raison de son savoir-faire, et elles cherchent des moyens de le faire participer plus active-ment, que ce soit en matière de modélisation ou de tarification des risques ou d’offre de services d’assurance. »

Dans sa proposition, l’AOSIS demande aux négociateurs de créer un mécanisme à multiples facettes s’articulant autour de trois volets afin de faire face aux dommages et aux pertes liés au changement climatique. Ces volets sont l’assurance, la compensation pour les pertes et les dommages découlant des effets défavorables cumulatifs et progressifs comme l’augmentation du niveau de la mer, et la gestion des risques. Bien que la proposition de l’AOSIS ne précise pas qui pourrait offrir ce soutien technique, il est probable que le secteur de

l’assurance soit appelé à participer à ces activités si celles-ci font partie de l’accord de Copenhague.

La MCII fournit plus de précisions sur les éléments d’assurance du cadre général de gestion des risques de la CCNUCC. Dans bien des cas, les risques faibles peuvent être gérés au moyen de mesures de réduction et de prévention. On estime le coût du volet prévention à 3 milliards de dollars par an. Les risques moyens ou élevés peuvent être gérés au moyen de mécanismes d’assurance qui viennent compléter et favoriser la réduction et la prévention des risques. La proposition de la MCII prévoit deux composantes pour ce qui est du volet assurance : une facilité d’aide à l’assurance climat et un fonds d’assurance climat.

La facilité d’aide à l’assurance climat favoriserait le partage des nouveaux risques et les systèmes de transfert de risques comme la microassurance, dans le cas des risques moyens. Cette facilité pourrait créer le cadre dont on a besoin en matière d’assurance – plus particulièrement la microassurance, mais également les filets de sécurité et autres outils – pour pouvoir aider les pays vulnérables à s’adapter au changement climatique. Elle fournirait un soutien en matière de collecte de données, d’infrastructures et d’activités permettant de réduire les coûts d’opération et de stabiliser le système. Elle pourrait aussi mettre en commun les risques moyens et réassurer les programmes d’assurance de petite taille. En règle générale, la partie risque de la prime ne devrait pas être subventionnée; toutefois, il devrait être permis de payer les primes « en nature » :

figure 1 : Grands désastres climatiques, 1950–2007

I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I I

1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005

Tempête Inondation Températures extrêmes (p. ex., vague de chaleur, incendie de forêt)

10

8

6

4

2

0

1 Dernièrement, des propositions ont été faites par des pays comme la Suisse, le Mexique, certains pays de l’Union européenne, le Bangladesh (en ce qui

concerne les pays les moins développés), la Chine, l’inde, les Philippines, la Malaisie et l’Arabie Saoudite, et par des organismes observateurs tels que la

MCii et le Climate Adaptation Network.

réactioN À l’éGard des risqUes

« Les négociations sur le climat déboucheront sur la création

d’un cadre de gestion des risques favorisant l’adaptation au changement

climatique, auquel seront intégrées des solutions d’assurance destinées aux

pays en développement les plus vulnérables. »

suite à la page 42

Page 42: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

42 | JUiN 2009 | Gestion du risque

le pays vulnérable qui bénéficie de la garantie d’assurance pourrait contribuer au paiement des primes en consacrant des heures à la réduction des risques à l’échelle locale. On estime le coût de la facilité d’aide à l’assurance climat à 2 milliards de dollars par an.

En ce qui concerne les risques très importants, tels que les phé-nomènes climatiques qui se produisent aux 100 ans et qui dépas-sent les capacités d’adaptation des pays vulnérables, la MCII propose la mise en place d’un fonds d’assurance climat (FAC) visant à couvrir une proportion prédéterminée des sinistres, qui ne coûterait rien aux pays en développement bénéficiaires. Le FAC serait réassuré contre les sinistres extrêmes sur le marché mondial de réassurance. On estime le coût du FAC, y compris la réassurance, à près de 5 milliards de dollars par an. Le taux de sinistres faisant l’objet d’une indemnisation serait négocié par la communauté internationale; en fin de compte, il devrait cor-respondre à une estimation de l’attribution des sinistres couverts au réchauffement climatique. Les fonds requis pour un FAC couvrant la première tranche de 30 pour cent des sinistres décou-lant des phénomènes climatiques les plus extrêmes (récurrence aux 100 ans) dans les pays en développement admissibles pour-raient être évalués comme suit : l’indemnisation de la première tranche de 30 pour cent du total des pertes économiques directes (secteur public et secteur privé) pourrait coûter de 2,7 milliards à 3,6 milliards en dollars américains, et les garanties maximales pourraient être de l’ordre de 10 milliards à 50 milliards de dollars, selon la disponibilité du revenu-primes du FAC. Le coût global annuel du mécanisme d’assurance proposé, y compris le coût en capital et les frais d’administration liés à la réassurance, devrait s’élever entre 3,2 milliards et 5,1 milliards en dollars américains, selon les données qui précédent.

Les négociateurs envisageant la création d’un FAC pourraient très bien se poser la question suivante : Pourquoi investir des fonds dans un FAC destiné à l’adaptation au changement

climatique, alors que ces mêmes fonds pourraient être investis dans des programmes d’adaptation nationaux prévoyant une composante assurance? La réponse est simple : le versement d’une partie des fonds d’adaptation climatique dans le FAC per-met de mettre en commun les risques de pertes extraordinaires, ce qui coûte beaucoup moins cher ou requiert beaucoup moins de réassurance que si chaque pays créait son propre fonds ou mettait en place des mécanismes individuels d’assurance.2

qUestioNs iMportaNtes À l’iNteNtioN dU secteUr

de l’assUraNce

Les négociateurs se sont montrés très intéressés à faire appel au secteur privé et à d’autres parties intéressées et communautés en matière d’assurance contre les risques. Plusieurs questions ont été soulevées au sujet des conditions qu’exige cette indus-trie pour participer au mécanisme qui naîtra de l’accord de Copenhague, en décembre.

Premièrement, quelle est la première condition pour que le sec-teur privé participe à la conception et à l’offre d’une assurance contre les risques climatiques? Dans une déclaration faite aux négociateurs, le 6 avril dernier, le professeur Peter Hoeppe, de chez Munich Re, a insisté sur le fait que [traduction] « le secteur de l’assurance doit avoir l’assurance que les primes relatives aux divers programmes d’assurance sont “adéquates en regard des risques”, c’est-à-dire qu’elles doivent pouvoir couvrir les pertes prévues. » Pour qu’un programme d’assurance soit durable, il est essentiel que les primes soient adéquates par rapport au niveau de risque. Dans un grand nombre de pays en développement à l’étude, la base de données est actuellement incomplète. En ce qui concerne les pays dont les données météorologiques et les données historiques sur les sinistres sont fragmentaires, il faudra absolument créer des systèmes qui permettront de combler les lacunes à moyen terme. Au cours de la période de transition, soit avant que toutes les données requises soient en place, la modélisa-tion de méthodes et la comparaison des données de ces pays avec celles d’autres pays semblables pourraient faciliter l’assurance des risques dans ces pays. De plus, pendant l’établissement de la base de données, la possibilité que les estimations de pertes soient inexactes pourrait être couverte par un groupement d’assureurs tel que celui suggéré par la MCII. Vu que les pertes découlant de catastrophes climatiques correspondent actuellement, dans les pays en développement, à 7 pour cent des pertes mondiales, ce type de couverture ne devrait pas constituer un obstacle insur-montable sur le plan des exigences en capital. Les programmes

2 Le FAC utilisera les prix de marché correspondant à sa couverture et transférera le risque aux assureurs privés, ce qui empêchera de perturber les

marchés de capitaux privés ou les marchés de réassurance du risque de catastrophe.

réactioN À l’éGard des risqUes

Les négociations sur le climat… | suite de la page 41

Page 43: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 43

d’assurance contre les risques climatiques, tels que celui que pro-pose la MCII, pourraient être mis sur pied dans un délai de trois à cinq ans, à supposer que l’on prenne rapidement des mesures pour établir une base de données satisfaisante.

Deuxièmement, compte tenu que le marché de l’assurance dans bon nombre de pays en développement est peu développé, quelles sont les conditions qui permettraient d’assurer la réussite des programmes d’assurance et d’améliorer la capacité d’adaptation des pays au changement climatique? À l’heure actuelle, la péné-tration de l’assurance, telle qu’elle est mesurée par le montant des primes en pourcentage du PIB, s’élève à près de 4 pour cent dans les pays industrialisés, alors qu’elle est de moins de 2 pour cent dans les pays émergents (se reporter à la figure 2).

En règle générale, les pertes causées par les catastrophes naturelles sont absorbées par les particuliers, les entreprises et les assureurs. Dans le cas des pays où le taux de pénétration de l’assurance est faible (dans les pays émergents, par exemple), les assureurs n’absorbent qu’une fraction des pertes.

Ainsi, et plus particulièrement dans un premier temps, la pro-position de la MCII se fonde sur un mécanisme bénéficiant d’un soutien international, qui aurait pour but de faciliter la création de partenariats public-privé dans lesquels les rôles seraient clairement définis, et qui porteraient, dans une certaine mesure, la marque des négociations sur le climat : La commu-nauté internationale assumera, sous une forme quelconque, le coût des nombreuses activités requises pour aider les pays vul-nérables qui sont le plus touchés par le changement climatique, ce qui comprend les primes et le coût connexe d’un programme d’assurance contre les risques climatiques. On peut éviter le risque que les phénomènes peu fréquents fassent l’objet d’un mauvais calcul en calculant les primes annuellement, ce qui permettrait aux assureurs de modifier tous les ans leur évalua-tion des risques en tenant compte des nouvelles recherches ou des nouveaux résultats techniques. La capacité d’assurance n’en serait pas diminuée de façon importante, car les sommes sup-plémentaires requises pour offrir une protection d’assurance contre les risques climatiques extrêmes (liés en partie au changement climatique) seraient fournies par les parties visées dans l’accord prévu en décembre prochain.

Les pays en développement pourraient bénéficier d’une aide internationale afin de promouvoir des programmes d’assurance durables, abordables et incitatifs destinés aux pauvres, ce qui empêcherait d’étouffer le secteur privé. Le secteur public des pays participants serait chargé de définir les conditions favorables et de

lancer les activités mesurables requises de réduction des risques qui faciliteraient l’adaptation au changement climatique. Le sec-teur privé serait alors mieux en mesure d’assurer le transfert des risques ainsi que des services de gestion des risques.

eN roUte Vers copeNhaGUe

Lors des discussions sur le climat qui se sont déroulées à Bonn, les délégations ont réclamé avec force la mise en place de mécanismes d’assurance et elles ont commencé à mettre au point un texte de négociation qui tient compte de leurs priorités en matière d’assurance. Comme l’a indiqué le professeur Peter Hoeppe, président de MCII et chef de la division Geo Risks Research chez Munich Re [traduction] : « La décision prise lors des discussions sur le climat qui se sont tenues à Bonn a permis de faire un pas très important vers l’intégration de solutions d’assurance pour les pays en développement dans l’accord sur le climat, qui, il est à espérer, sera conclu à la fin de cette année. La MCII appuiera ce processus à l’occasion des prochaines discussions, en publiant, en collaboration avec la SIPC, un document technique dans lequel on analysera les données portant sur la façon dont les mécanismes d’assurance peuvent contribuer à réduire le risque de catastrophe et appuyer les efforts d’adaptation – organisation d’un symposium portant sur l’adaptation, la gestion des risques et l’assurance –, et en élaborant une proposition plus détaillée en vue des prochaines négociations qui auront lieu à Bonn, en juin, dans laquelle on répondra aux questions que les délégations ont soulevées lors des négociations en cours aux Nations Unies. »

Koko Warner, Ph.D., est membre fondatrice et directrice générale de

la Munich Climate Insurance Initiative (MCII). Elle dirige également

la Climate Adaptation Section de l’Institut pour l’environnement et

la sécurité humaine de l’Université des Nations Unies (UNU-EHS).

Ses recherches portent notamment sur l’adaptation au changement

climatique, l’assurance contre les risques climatiques et les mécanismes

figure 2 : taux de pénétration de l’assurance en 2007

(primes non-vie en % du PiB)

pays industrialisés

pays émergents

0 % 2 % 4 % 6 % 8 % 10 %

Source : Swiss Re, sigma nº 2/2009

Vie Non-vie

réactioN À l’éGard des risqUes

« Le meilleur point de départ pour aborder le problème du changement

climatique réside dans la réduction des risques. [Les parties] se tournent vers

le secteur des assurances en raison de son savoir-faire, que ce soit en matière

de modélisation ou de tarification des risques ou de fourniture de services. »

suite à la page 44

Page 44: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

44 | JUiN 2009 | Gestion du risque

financiers visant à aider les pauvres. Elle est professeure associée au

département de science environnementale et d’économie de l’ETH

Zürich, et professeure adjointe au programme d’études supérieures

sur la gestion des services d’urgence de l’University of Richmond.

Vous pouvez la joindre à [email protected].

MUNich cliMate iNsUraNce iNitiatiVe (Mcii)

La Munich Climate Insurance Initiative (MCII) a été lancée, en 2005, lorsque l’on a pris conscience du fait que les solutions d’assurance pouvaient jouer un rôle dans l’adaptation des pays au changement climatique, comme le suggéraient la Convention-cadre et le Protocole de Kyoto. Cette initiative, qui regroupe des assureurs, des experts sur le changement climatique et l’adaptation, des ONG ainsi que des chercheurs en politiques publiques, a pour but de trouver des solutions aux risques que pose le changement climatique. La MCII constitue une tribune et un point de rencon-tre pour les experts du domaine des assurances spécialisés dans les

questions portant sur l’incidence du changement climatique.

La MCII est l’œuvre de représentants du European Climate Forum, de Germanwatch, de l’IIASA, de Munich Re, de la Munich Re Foundation, du Potsdam Institute for Climate Impact Research (PIK), de l’Institut pour l’environnement et la sécurité humaine de l’Université des Nations Unies (UNU-EHS), de la Banque mondiale ainsi que d’experts-conseils indépendants. Le groupe est prêt à accepter de nouveaux membres, par exemple, des représentants d’autres sociétés d’assurances ou de réassurance, des experts sur le changement climatique et l’adaptation, des ONG et des chercheurs en poli-tiques publiques, qui cherchent des solutions aux risques que pose le changement climatique.

On trouvera de plus amples informations sur la MCII à l’adresse www.climate-insurance.org. ■

références bibliographiques

1 ALLiANCE DES PETiTS ÉTATS iNSULAiRES (AOSiS). Proposition à

l’intention du Ad Hoc Working Group on Long-term Cooperative Action

under the Convention (AWG-LCA), intitulée Multi-Window Mechanism

to Address Loss and Damage from Climate Change Impacts, 2008, et

présentée à la CCNUCC le 6 déc. 2008. Sur internet : http://unfccc.int/

files/kyoto_protocol/application/pdf/aosisinsurance061208.pdf.

2 BALS, C., K. WARNER et S. BUTZENGEiGER. « insuring the Uninsurable:

Design Options for a Climate Change Funding Mechanism », Climate

Policy (numéro spécial), vol. 6, nº 6 (2006), Gurenko, G. (éd.), p. 637–647.

3 CCNUCC. 2008a. Report on the Workshop on Risk Management

and Risk Reduction Strategies, Including Risk Sharing and Transfer

Mechanisms such as Insurance – Summary by the Chair of the Workshop.

Document disponible sur le site Web de la CCNUCC (document FCCC/

AWGLCA/2008/CRP.7), 6 déc. 2008.

4 CCNUCC. 2008b. Mechanisms to Manage Financial Risks from Direct

Impacts of Climate Change in Developing Countries, FCCC/TP/2008/9,

21 nov. 2008.

5 CHARPENTiER, A. « insurability of Climate Risks », The Geneva Papers,

vol. 33 (2008), p. 91–109.

6 DLUGOLECKi et coll. Coping with Climate Change: Risks and

Opportunities for Insurers, Londres, Chartered Insurance Institute, 2009.

7 GROUPE D’EXPERTS iNTERGOUVERNEMENTAL SUR L’ÉVOLUTiON DU

CLiMAT (GiEC). Working Group II Contribution to the Intergovernmental

Panel on Climate Change Fourth Assessment Report – Climate Change

2007: Climate Change Impacts, Adaptation and Vulnerability – Summary

for Policymakers, Cambridge, Cambridge University Press, 2007.

8 HOEPPE, P. et E. GURENKO. « Scientific and Economic Rationales for

Innovative Climate Insurance Solutions », Climate Policy (numéro spécial

sur l’assurance et le changement climatique), 2006.

9 MAYNARD, T. « Climate Change: impacts on insurers and How They

Can Help with Adaptation and Mitigation », The Geneva Papers, vol. 33

(2008), p. 140–146.

10 MiLLS, E. From Risk to Opportunity: 2007. Insurer Responses to Climate

Change, rapport CERES, octobre 2007. Sur Internet : http://insurance.lbl.

gov/opportunities.

11 MUNiCH CLiMATE iNSURANCE iNiTiATiVE (MCii). Proposition à

l’intention du Ad Hoc Working Group on Long-term Cooperative Action

under the Convention (AWG-LCA), intitulée International Insurance

Mechanism: A proposal for the Copenhagen Agreed Outcome, et

présentée à la CCNUCC le 6 déc. 2008 (4e séance du AWG-LCA, du

1er au 13 déc. 2008, à Poznan). Sur internet : http://unfccc.int/resource/

docs/2008/smsn/ngo/033.pdf.

12 MUNiCH REiNSURANCE COMPANY. « Topics: Natural Disasters »,

Annual Review of Natural Disasters 2006, Munich, Munich Reinsurance

Group, 2007.

13 STERN et coll. Stern Review Report on the Economics of Climate

Change, Cambridge University Press, 2007.

14 WARD, R.E.T., C. HERJWEiJER, N. PATMORE et R. MUiR-WOOD.

« The Role of Insurers in Promoting Adaptation to the Impacts of Climate

Change », The Geneva Papers, vol. 33 (2008), p. 133–139.

réactioN À l’éGard des risqUes

Les négociations sur le climat… | suite de la page 41

Page 45: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 45

Quel est votre programme en matière de politique de tolérance au risque?par Michael Stramaglia

AFIN DE METTRE EN œUVRE UN PROCESSUS EFFICACE DE GESTION DU RISqUE DANS VOTRE ENTREPRISE, il est essentiel, au préalable, de formuler clairement une politique de tolérance au risque. Ce domaine de pratique est relativement nouveau (mais évolue rapidement), comme le prouve le grand nombre d’entreprises qui n’ont pas encore élaboré une politique officielle en la matière, de même que l’absence d’une norme de bonnes pratiques bien établie chez celles qui l’ont fait.

La figure 1 propose un cadre illustrant la structure de la politique de tolérance au risque.

figure 1 : proposition de cadre pour la politique

de tolérance au risque

Il est proposé que les cinq grands éléments de ce modèle forment une composante essentielle de la politique officielle de tolérance au risque. Le présent article a pour but de décrire ce cadre et il présente de bonnes suggestions ainsi que certains facteurs à pren-dre en compte concernant la forme et la teneur de ces éléments dans le contexte de la gestion globale du risque d’entreprise.

GraNds priNcipes de la politiqUe de toléraNce

aU risqUe

La politique de tolérance au risque doit définir un ensemble de principes de base qui tient compte des objectifs de l’entreprise en matière de gestion du risque et de sa propension au risque. Cette composante fournit donc le contexte de base dans lequel s’inscrivent les autres composantes de la politique. La tolérance au risque d’une entreprise définit le type et le degré de risque qu’elle est prête à assumer afin de concrétiser sa vision et d’accomplir sa mission et ses objectifs. Voici des exemples de principes pouvant être adoptés au titre de cette composante de la politique officielle :

• Alignement stratégique En règle générale, toute entreprise doit prendre des risques

et bien les gérer afin de remplir ses objectifs stratégiques.

La politique de tolérance au risque doit mettre en évidence cette relation et énoncer les risques que l’entreprise considère comme étant fondamentaux (étroitement liés à la proposition de valeur du client, à la stratégie commerciale et aux perspectives de rendement), secondaires (ne découlent pas de la stratégie fondamentale et exigent donc peu ou pas de tolérance au risque) ou indirects (sont une conséquence inévitable de l’acceptation des risques fondamentaux et, par conséquent, ne sont pas directement recherchés et sont idéalement atténués dans la mesure où le niveau de risque résiduel correspond au coût du contrôle).

• Intérêts des parties intéressées La politique de tolérance au risque doit viser un juste

équilibre entre les divers besoins, attentes, risques/avantages recherchés et horizons de placement d’un large éventail de parties intéressées internes et externes. Plus particulièrement, dans le cas des sociétés d’assurances cotées en bourse, la politique de tolérance au risque doit appuyer la quête de la création de valeur pour les actionnaires tout en veillant à ce que l’entreprise soit en mesure de payer les demandes d’indemnité et de respecter ses engagements à long terme envers les titulaires de contrat. Elle doit également favoriser le respect des objectifs en matière de notation de crédit et de solvabilité, de même que l’accès permanent aux marchés de capitaux.

• Alignement sur les valeurs et la culture de l’entreprise La politique de tolérance au risque doit tenir dûment

compte des valeurs fondamentales de l’institution. Pour la haute direction, elle représente une plate-forme idéale pour faire connaître les valeurs de l’entreprise et sa philosophie en matière de risque, et pour communiquer, aux échelons inférieurs, les attentes en ce qui concerne le risque d’atteinte à la réputation et l’image de marque de l’entreprise.

• Capacité en matière de gestion du risque La tolérance au risque d’une institution doit directement

correspondre à sa capacité de prise en charge des risques sur le plan financier (la capacité actuelle, de même que celle que l’institution est à même d’obtenir) ainsi qu’à ses capacités en matière de gestion du risque. L’institution doit

Renforcement mutuel

Principes

Principales applications

Critères et caractéristiques

Seuils de tolérance

Gestion et contrôle

Michael stramaglia, fsa, cera, fica,

est vice-président général et premier directeur,

gestion des risques, auprès de la Financière

Sun Life, à Toronto, au Canada. Vous pouvez le

joindre à [email protected].

réactioN À l’éGard des risqUes

suite à la page 46

Page 46: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

46 | JUiN 2009 | Gestion du risque

activement chercher à prendre des risques lorsqu’elle peut efficacement tirer parti de ses capacités et, inversement, elle doit éviter de se lancer dans des projets pour lesquels elle ne possède pas les compétences voulues en fait de gestion du risque ou n’a pas les moyens financiers.

• Perspective globale du portefeuille Aux fins de l’adoption d’un cadre de gestion du risque, il

est nécessaire d’évaluer les risques et les possibilités non seulement selon leur valeur intrinsèque, mais également en fonction de leur contribution marginale à la position de risque globale de l’institution. Plus particulièrement, la politique de tolérance au risque doit explicitement tenir compte de la gestion de la diversification et des effets de la concentration de risques à l’échelle de tout le portefeuille de l’institution.

• Rendement proportionné au risque Les institutions doivent tolérer un niveau de risque qui

correspond à leurs objectifs de rendement. La politique de tolérance au risque doit faciliter constamment et en fin de compte réaliser ce rapprochement entre ces deux éléments fondamentaux. Cela vaut particulièrement pour les sociétés d’assurances, pour lesquelles, par nature, la gestion du risque se situe au cœur de leur proposition de valeur. Il faut donc que le cadre de tolérance au risque tienne compte, dans une certaine mesure, du processus d’affectation des risques, selon lequel la capacité de risque et le capital sont affectés, sur la base de l’ensemble du portefeuille, aux diverses possibilités de placement qui, collectivement, optimisent le rendement global de l’institution, ajusté en fonction des risques.

Bien que plusieurs des exemples susmentionnés puissent s’appliquer à un large éventail d’institutions, leur portée et leur définition précises, de même que tout autre principe applicable, doivent bien correspondre à la philosophie de l’institution en matière de risque ainsi qu’aux circonstances de chacune des applications.

seUils de toléraNce aU risqUe

Les seuils de tolérance au risque sont des points de référence quantitatifs et financiers qui définissent le niveau de risque qu’une institution est prête à assumer relativement à chacune des grandes catégories de risque prédéterminées. Ils représen-tent donc un mécanisme important permettant de transposer les principes susmentionnés en indicateurs explicites de ges-tion. De toute évidence, il n’est pas possible de définir des seuils explicites de tolérance pour toutes les catégories de risque auxquelles l’institution fait face (par exemple, un grand nom-

bre de risques opérationnels ne s’expriment pas aisément sous la forme de seuils standards). Cela dit, la politique de tolérance au risque doit énoncer clairement les seuils de tolérance en ce qui concerne au moins les principaux risques financiers qu’encourt l’institution (p. ex. risques de crédit, de marché, d’assurance).

La direction devra se poser un certain nombre de questions lorsqu’elle élaborera cette composante de la politique de tolérance au risque, notamment :

• Quelle ou quelles mesures du risque doit-on utiliser pour définir les seuils de tolérance au risque?

Il faut un « étalon » commun pour pouvoir quantifier les seuils de tolérance au risque à l’échelle des grandes catégories de risque prédéterminées et pour mesurer les niveaux réels d’exposition en regard de ces limites prescrites. Les mesures du risque peuvent comporter plusieurs dimensions importantes, comme l’indique la figure suivante :

figure 2 : Mesures bidimensionnelles de la tolérance

au risque (exemples)

Il vaut la peine d’examiner chaque quadrant afin de déterminer s’il doit être inclus dans le cadre de tolérance au risque, et cha-cun d’entre eux comporte des avantages et des inconvénients. Par exemple, une institution pourrait décider de définir des seuils de tolérance au risque pour les bénéfices à risque (facilité de communication, conformité aux intérêts des principales parties intéressées, etc.) et pour une certaine forme de capital économique à risque (cette mesure tient étroitement compte de la valeur intrinsèque à long terme et est fondée sur le risque, etc.), de façon à couvrir ces dimensions importantes et à équili-

Bénéfices GAAP à risque

Mesure fondée sur les flux financiers*

Mesure comptable

Mesure économique

Variation de la valeur intrinsèque à risque conforme au marché

Capital réglementaire à risque

Mesure ponctuelle*

Capital économique à risque

* Exprimée en fonction d'un certain niveau de base (p.ex. prévu, attendu, projeté)

Quel est votre programme en matière… | suite de la page 45

réactioN À l’éGard des risqUes

Page 47: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 47

brer les perspectives à court et à long terme de l’institution. Il faut également s’interroger pour savoir si la politique de tolérance au risque doit tenir compte de seuils de tolérance qui sont fondés sur des simulations de crise déterministes et prescrites (et s’interroger sur la façon de définir les scénarios de crise correspondant à chaque catégorie de risques) ou sur des statistiques sommaires fondées sur une certaine distribution des résultats des risques (y compris le choix du centile ou du(des) niveau(x) de l’espérance conditionnelle unilatérale [ECU]).

• Les seuils de tolérance au risque devraient-ils être définis comme étant des « maximums » ou des « objectifs »?

Jusqu’à présent, les seuils de tolérance au risque ont toujours été définis comme étant des points de contrôle indiquant le niveau de risque maximal. Les nouveaux cadres fondés sur les bonnes pratiques ont une structure fondée sur des niveaux ou des intervalles cibles de tolérance au risque et bornée par des points de contrôle maximal et minimal. À l’évidence, cette méthode appuie une démarche plus stratégique en matière de gestion du risque d’entreprise, car elle tient compte de façon plus explicite des points de vue et préjugés de la direction sur les possibilités de prendre des positions courtes et longues relativement à l’objectif défini de tolérance au risque.

• Relativement à quel ou à quels niveaux organisationnels doit-on définir des seuils de tolérance au risque?

En plus de définir les seuils de tolérance au risque au niveau agrégé, la politique de tolérance au risque pourrait définir des seuils relativement aux diverses unités organisationnelles. Le processus « descendant » de répartition de la capacité de risque de l’institution aux unités organisationnelles distinctes, y compris le traitement des effets de la diversification, doit être dûment précisé dans la politique.

• Les seuils de tolérance au risque doivent-ils être fondés sur l’exposition au risque « brute » ou « nette »?

Les principes relatifs à la prise en compte des répercussions des mesures que pourrait prendre la direction de l’institution et des effets de la diversification/concentration et des autres stratégies de réduction des risques, doivent être clairement codifiés dans la politique de tolérance au risque. De plus, il faudrait élaborer des méthodes décrivant comment intégrer ces considérations dans la méthode prescrite d’établissement des seuils de tolérance. Plutôt que d’aborder ces considérations selon une approche d’inclusion ou d’exclusion, on parviendrait à mieux comprendre le processus de réduction des risques et à le rendre beaucoup plus transparent si les seuils étaient

exprimés à la fois sur une base brute et une base nette.

critères et caractéristiqUes eN Matière

de toléraNce aU risqUe

Bien que les seuils de tolérance au risque soient des outils précieux permettant de transposer les principes de tolérance au risque en pratiques de gestion, on a généralement besoin d’autres informations indicatives afin de pouvoir élaborer une politique de tolérance au risque qui soit complète et suffisam-ment rigoureuse. Ces informations peuvent prendre la forme de critères qualitatifs et/ou quantitatifs. Comme exemples de critères quantitatifs, mentionnons les principaux ratios financiers (tels que le ratio de couverture du service de la dette, les notations de solvabilité, les ratios de liquidité, les mesures de rendement ajustées en fonction des risques) ou diverses limites théoriques importantes qui ont été adaptées aux seuils explicites susmentionnés de tolérance au risque et qui en permettent donc l’application efficace (limites relatives à l’asymétrie des durations liée aux taux d’intérêt, pleins de con-servation de la sélection des risques, etc.).

La politique doit également, au besoin, définir les principaux critères qualitatifs, afin que l’on puisse mieux appliquer les principes de tolérance au risque. Dans le cas de certains grands principes (tels que celui susmentionné portant sur l’alignement sur les valeurs de l’entreprise), ces critères pourraient constituer la seule information indicatrice valable; toutefois, même les principes ayant été transposés en critères financiers et quanti-tatifs pourraient, dans bien des cas, être plus faciles à appliquer s’ils s’accompagnaient de critères qualitatifs à l’appui. Ces critères, par définition, seront généralement subjectifs dans une certaine mesure. C’est pourquoi la politique de tolérance au risque devrait, dans la mesure du possible, donner suffisamment de précisions pour que l’on puisse procéder à des évaluations raisonnablement vérifiables, reproductibles et plus objectives de l’appréciation de la tolérance au risque et de sa conformité aux principes. Souvent, on peut y parvenir en recensant les exemples de caractéristiques opérationnelles pouvant être indicatrices d’un degré de conformité faible ou élevé au principe correspon-dant de tolérance au risque, et en intégrant ce recensement dans une certaine forme de « modèle de pointage ».

La formulation claire des principes, des seuils de tolérance et des critères susmentionnés permet de s’assurer que l’on appli-que une méthode de gestion globale et pertinente en matière de tolérance au risque. En effet, une fois ces composantes bien alignées et intégrées, l’effet combiné de leur formulation

réactioN À l’éGard des risqUes

« Bien conçue, une politique de tolérance au risque peut être un outil de

grande valeur pour les entreprises et elle peut les aider à faire face aux

multiples difficultés et à mettre à profit les nombreuses possibilités qui

caractérisent le contexte économique difficile d’aujourd’hui. »

suite à la page 48

Page 48: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

48 | JUiN 2009 | Gestion du risque

explicite dans la politique de tolérance au risque devrait être de beaucoup supérieur à l’effet de leur somme.

priNcipales applicatioNs

La politique de tolérance au risque devrait préciser la façon dont le document et les indications qu’il renferme s’inscrivent dans le cadre général de gestion du risque de l’institution et dans les processus décisionnels de gestion qui s’y rattachent. Vu le rôle fondamental que joue la tolérance au risque à cet égard, la politique devrait insister sur les liens explicites existant avec le processus d’identification des principaux risques et les processus d’évaluation, d’élaboration de mesures d’intervention, de con-trôle et d’information. Dans le même ordre d’idées, compte tenu des liens importants devant exister entre la tolérance au risque et les processus de gestion et de planification stratégiques, la poli-tique devrait préciser, codifier et faciliter ces liens de dépendance fondamentaux. Entre autres processus importants de gestion qu’il conviendrait de prendre en compte dans la politique aux fins de l’alignement explicite, citons les processus de développement de produits et de tarification, le processus d’établissement du budget des investissements, et les processus de fusions et acquisitions.

Par ailleurs, la politique de tolérance au risque devrait être entièrement intégrée aux systèmes de rémunération et de gestion du rendement de l’institution. L’objectif évident est de faire en sorte que la direction soit adéquatement rémunérée lorsqu’elle réalise les objectifs de rendement ajustés en fonction des risques dans les secteurs qui répondent aux critères de tolérance au risque de l’institution, plutôt que d’être incitée, à tort, à prendre des risques dans des secteurs qui ne répondent pas auxdits critères.

En règle générale, il suffit, pour ce faire, que la politique de tolérance au risque précise les principales applications de ges-tion pour lesquelles il importe d’assurer ces liens et qu’elle énonce ensuite quelques principes généraux précisant la façon dont ceux-ci devraient opérer en pratique. Des directives d’application plus détaillées pourraient être reléguées par

exemple aux politiques connexes, aux lignes directrices opéra-tionnelles et aux manuels de procédures, selon ce qu’indique le cadre de gestion du risque de l’institution.

GestioN et coNtrôle

Cette composante de la politique de tolérance au risque doit pré-ciser les protocoles requis qui permettent de s’assurer que la poli-tique fait l’objet d’un contrôle général qui est proportionné à son importance en tant qu’outil de gestion du risque. Elle doit donc préciser les protocoles d’approbation applicables (dans l’idéal, au niveau du conseil d’administration) en ce qui concerne les seuils et les exigences opérationnelles définis dans la politique. La politique doit faire l’objet de contrôles explicites en matière de gestion des modifications et prévoir des exigences minimales concernant la fréquence des examens et des mises à jour.

Cette composante doit en outre préciser les responsabilités en ce qui concerne le contrôle permanent de la conformité organi-sationnelle aux exigences et les rapports en la matière, de même que la procédure de recours hiérarchique en cas de non-respect, au niveau opérationnel, des seuils, limites et exigences.

coNclUsioN

Bien conçue, une politique de tolérance au risque peut être un outil de grande valeur pour les entreprises et elle peut les aider à faire face aux multiples difficultés et à mettre à profit les nom-breuses possibilités qui caractérisent le contexte économique dif-ficile d’aujourd’hui. Il est à souhaiter que l’évolution constante de ce domaine de pratique aboutisse à un plus large consensus au sujet des principaux thèmes méritant d’être explicitement pris en compte aux fins de l’élaboration d’une politique de tolérance au risque qui répond aux normes d’application de « bonne pratique », et que cette évolution entraîne une plus grande convergence opérationnelle de ces thèmes. Cela étant, les spécialistes de l’industrie devraient maintenir un dialogue suivi en la matière et, dans le cadre de ce processus, s’interroger pour savoir si les éléments importants susmentionnés devraient être inclus dans la politique de tolérance au risque de leur institution.

Le processus d’élaboration d’une politique de tolérance au risque constitue la meilleure tribune pour discuter activement des convictions et des pratiques fondamentales en matière de gestion du risque, et pour lancer des débats. Afin de tirer le meilleur parti de cet exercice, le processus doit reposer sur une participation générale de l’ensemble des principales parties intéressées de l’entreprise et prendre en compte leur point de vue. Il doit également tenir compte du fait qu’il s’agit d’un domaine de pratique pour lequel le chemin parcouru

Quel est votre programme en matière… | suite de la page 47

réactioN À l’éGard des risqUes

Page 49: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 49

LA PLUPART DES LECTEURS SE SOUVIENNENT DE LA jOURNéE DU 28 jANVIER 1986, bien qu’ils en aient oublié la date exacte. Ce jour-là, la navette spatiale Challenger a explosé peu de temps après son décollage du Centre spatial Kennedy, tuant les sept astronautes à bord. À la suite de cette catastrophe, le programme américain de vols spatiaux habités a été interrompu, et c’est toute la mission de la NASA qui a été remise en cause.

On a rapidement identifié la cause de la catastrophe comme étant la rupture de deux des joints toriques en caoutchouc assurant l’étanchéité des propulseurs à poudre de la navette. Ces joints ont cédé en raison du temps froid qui sévissait pendant la période précédant le décollage et au moment du lancement. Cette température a affaibli la résistance des joints toriques, lesquels se sont fracturés sous l’effet des tensions engendrées par la mise à feu de la navette, laissant échapper latéralement des flammes et des gaz chauds qui ont enflammé le grand réservoir de carburant, qui a explosé et détruit la navette.

L’une des choses étonnantes au sujet de cette catastrophe est qu’elle aurait pu être évitée. Les ingénieurs qui ont fabriqué les propulseurs à poudre et assuré leur entretien savaient que les joints pouvaient céder à des températures inférieures à zéro, car ils disposaient de suffisamment de preuves phy-siques et statistiques à l’appui. Ils avaient même présenté ces preuves aux responsables de la NASA au cours d’un long entretien qui avait eu lieu le jour précédant le lancement. Seulement, la démonstration n’étant pas convaincante, le lancement a néanmoins eu lieu.

La catastrophe de la navette Challenger constitue une intéres-sante étude de cas en ce qui concerne plusieurs aspects de la gestion du risque. À bien des égards, les systèmes de gestion du risque ont fonctionné comme prévu. En effet, les ingénieurs étaient conscients des risques que posait le gel et ont réussi à en cerner les répercussions éventuelles, et les cadres supérieurs de l’agence ont été mis au fait des risques en temps voulu. Pourtant, cela n’a pas empêché le lancement de la navette. Dans les analyses rétrospectives de cet événement, on a verte-ment critiqué la culture de prise de décision de la NASA et on a eu tendance à jeter tout le blâme sur les responsables de l’agence, qui n’ont pas empêché le lancement. Toutefois, il faut souligner ici non seulement la mauvaise décision finale, mais également la mauvaise communication du risque de

rupture des joints toriques aux décideurs. Quelle que soit l’organisation dans laquelle ils évoluent, les responsables de la gestion du risque peuvent tirer des leçons de cet échec sur le plan de la communication.

UN exposé qUi a échoUé

Dans son livre intitulé Visual Explanations, Edward Tufte fait une analyse complète des 13 pages de renseignements que les ingénieurs ont remises aux responsables de la NASAi. Son analyse indique que les renseignements fournis et la manière dont ils ont été présentés ont fait naître de sérieux doutes dans l’esprit des responsables quant à la possibilité que le gel pro-voque la rupture des joints.

Même si la documentation de présentation indiquait claire-ment que de basses températures provoqueraient la rupture des joints, les données présentées à l’appui ne corroboraient pas ces affirmations. Les documents renfermaient plusieurs tableaux décrivant des événements qui avaient entraîné des dommages aux joints toriques au cours de lancements et d’essais antérieurs. Chose étonnante, très peu de ces tableaux indiquaient un lien entre la température et ces événements. La relation existant entre la température et les dommages aux joints toriques cons-tituait le point essentiel de l’argumentation, mais les ingénieurs n’en ont pas fait état dans leurs rapports. Quantité de données ont été fournies, mais peu d’entre elles appuyaient directement l’argumentation. Comme l’indique M. Tufte dans son analyse, les ingénieurs « appliquaient la bonne théorie et connaissaient la relation de causalité, mais ils n’ont pas présenté cette relationii. »

L’une des principales lacunes de l’exposé était que les ingénieurs n’ont concentré leur analyse que sur les deux lancements au cours desquels les dommages aux joints ont été les plus importants. La preuve, qui se fondait uniquement sur ces deux événements « générateurs de fuite », n’était pas convaincante. L’événement le plus important s’était produit lorsque la température au

david cummings, fcas, Maaa, cpcU,

est vice-président à la recherche auprès

de iSO innovative Analytics. Vous pouvez

le joindre à [email protected].

En matière de communication des risques, la qualité de la présentation importepar David Cummings

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

i TUFTE, Edward. Visual Explanations: Images and Quantities, Evidence and Narrative. Cheshire, Conn., Graphics Press, 1997, p. 39–53.

ii Tufte, p. 44.

suite à la page 50

Page 50: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

50 | JUiN 2009 | Gestion du risque

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

moment du lancement était de 53 degrés Fahrenheit, soit la température la plus froide, à ce jour, à laquelle un lancement ait eu lieu. Les ingénieurs ont tenté d’extrapoler à partir de ce seul point de données et ont affirmé que les joints toriques se briseraient à des températures inférieures au point de congélation. Cependant, il y avait eu un autre lancement au cours duquel un événement « générateur de fuites » s’était produit, alors que la température était de 75 degrés. N’étant fondés que sur ces deux seuls points de données, les éléments de preuve étaient contradictoires. Plutôt que de renforcer le point que les ingénieurs tentaient, à juste titre, de faire remarquer, les données présentées donnaient à penser que la défaillance des joints n’était peut-être pas liée du tout à la température.

Par malheur, en ne prenant en compte que les événements les plus extrêmes, les ingénieurs ont laissé de côté de l’information qui aurait pu grandement étayer leur argumentation. Lorsqu’il a recréé les tableaux de données, M. Tufte s’est aperçu que tous les lancements qui avaient eu lieu à une température inférieure à 65 degrés avaient entraîné certains dommages aux joints toriques et que ces dommages devenaient plus importants au fur et à mesure que la température baissait. Cette information aurait permis aux responsables de la NASA de prendre conscience de la relation de causalité directe existant entre l’état des joints et la température, et qu’il était probable qu’une rupture fatale des joints se produise à des températures inférieures au point de congélation. Si cette information avait été communiquée aux responsables de la NASA, ceux-ci auraient peut-être décidé d’interrompre la procédure de lancement de Challenger.

leçoNs À tirer poUr les spécialistes de

la GestioN dU risqUe

La communication inefficace de données et de preuves statis-tiques explique sans doute, en grande partie, pourquoi on n’a pu empêcher le lancement de Challenger. À titre de spécialistes de la gestion du risque – plus particulièrement de spécialistes de la gestion quantitative du risque –, nous pouvons tirer d’importantes leçons de cet accident qui nous permettront d’améliorer nos compétences en matière de communication des risques.

Cet exemple prouve hors de tout doute que la qualité de la présentation importe. Bien que les processus permettant d’identifier et d’évaluer les risques constituent des éléments essentiels d’un bon programme de gestion du risque, le processus de communication de ces risques est également important.

Cela vaut particulièrement pour la communication de rensei-gnements d’ordre quantitatif. Il est essentiel pour les spécia-listes de la gestion du risque de communiquer clairement les conclusions de leurs analyses et d’appuyer les décisions qu’ils recommandent. Les questions qui suivent, qui se fondent sur l’exemple de la navette Challenger, peuvent nous aider à com-muniquer les risques de façon plus efficace.

1. L’exposé des risques fournit-il suffisamment d’ information sur les causes et effets?

Toute évaluation des risques doit comporter une évaluation des conséquences qu’entraînerait la non-gestion ou la non-réduction de ces risques. Dans le même ordre d’idées, il faut présenter aux décideurs une analyse expliquant comment la méthode de traitement du risque permettra de réduire le risque si l’on veut qu’ils prennent la bonne décision. L’information doit être présentée de manière à permettre aux décideurs d’établir un lien de cause à effet.

Pourtant, dans certains exposés portant sur la gestion du risque, la relation de causalité peut être difficile à percevoir en raison des nombreux niveaux d’agrégation. Par exemple, aux fins de l’évaluation du risque de catastrophe, les analyses des pertes annuelles découlant de plusieurs risques ou événements permettent d’évaluer les répercussions du risque de catastrophe sur l’entreprise. Toutefois, si l’on fait la somme des chiffres pour l’ensemble des risques et événements, il devient difficile de déterminer lequel des risques est le plus important ou laquelle des concentrations de risques dans une région particulière représente le plus grand risque pour l’entreprise. Les spécialistes de la gestion du risque peuvent améliorer ces exposés en élaborant des moyens de décrire les relations de causalité qui sous-tendent l’exposition aux risques.

2. La documentation présentée permet-elle d’ établir des comparaisons aux fins de la prise de décision?

Les documents d’ordre quantitatif sont efficaces s’ils permettent à l’utilisateur de faire des comparaisons utiles leur permettant de prendre des décisions éclairées. Comme l’indique M. Tufte, « les chiffres deviennent des preuves lorsqu’ils sont liés entre euxiii. » Lorsqu’il s’agit d’élaborer un exposé, il est essentiel de déterminer le type d’information à présenter pour que l’on puisse établir ces comparaisons. Dans bien des cas, cela nous aidera à choisir

iii Tufte, p. 44.

En matière de communication des risques… | suite de la page 49

Page 51: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 51

une échelle de comparaison appropriée – telle que les axes d’un graphique – et facilitera la comparaison.

Dans les travaux sur la gestion du risque, nous présentons souvent les données sous une forme dans laquelle les probabilités servent de base de comparaison. Bien que les probabilités soient un élément naturel et souvent essentiel de ces travaux, nous devons réfléchir soigneusement à la question de savoir s’il existe d’autres bases de comparaison pouvant être plus utiles à la prise de décision. Par exemple, dans les décisions en matière de réassurance, les pleins de conservation constituent sans doute une meilleure base de comparaison que les seuils de probabilité.

Il importe d’examiner attentivement la question de savoir si les probabilités constituent la meilleure base de comparaison, et ce, pour au moins deux raisons. Tout d’abord, pour la plupart des personnes, il n’est ni naturel ni intuitif de faire des comparaisons sur la base de probabilités. Deuxièmement, les probabilités découlant de la plupart des analyses stochastiques ne sont en fait que de simples estimations. Plus particulièrement, dans le cas de l’évaluation du risque d’événements extrêmes, l’erreur liée à l’estimation des probabilités peut même être supérieure aux probabilités. Par conséquent, lorsque les probabilités constituent une bonne base de comparaison, il importe que nous communiquions clairement et de façon cohérente ce qu’elles signifient.

3. La présentation est-elle suffisamment documentée?

Les analyses quantitatives des risques produisent souvent des grandes quantités de données qui peuvent rebuter l’utilisateur. Il importe donc pour nous de déterminer attentivement l’information dont nous avons vraiment besoin pour appuyer le processus décisionnel. Parallèlement, nous devons prendre soin de ne pas laisser de côté l’information permettant de comprendre et d’appuyer les conclusions de l’analyse. Tout comme les ingénieurs ont fait en ne se concentrant que sur les dommages les plus importants causés aux joints, il se peut que nous accordions trop d’importance aux événements extrêmes, dont l’importance est largement incertaine. Des événements moins graves peuvent fournir des informations importantes facilitant la prise de décisions en matière de gestion du risque et réduire l’incertitude entourant les répercussions de ces décisions.

la coMMUNicatioN des risqUes : UNe

coMpéteNce esseNtielle

L’échec de communication survenu entre les responsables de la NASA et les ingénieurs est un exemple convaincant mon-trant le rôle crucial que joue la communication efficace de l’information quantitative en matière de gestion du risque. Les spécialistes de la gestion du risque doivent développer leurs compétences afin de communiquer les risques de façon efficace et de pouvoir appuyer leurs analyses d’informations quantita-tives utiles. Les spécialistes qui considèrent la communication des risques comme étant une compétence essentielle renfor-ceront ce maillon important du processus de gestion du risque, ce qui leur permettra d’établir et de conserver en place une fonction efficace de gestion du risque dans leur entreprise. ■

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

« Bien que les processus permettant d’identifier et d’évaluer les risques

constituent des éléments essentiels d’un bon programme de gestion du risque,

le processus de communication de ces risques est également important. »

Page 52: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

52 | JUiN 2009 | Gestion du risque

UNE MAUVAISE CULTURE PEUT-ELLE ENTRAîNER LA PERTE DE L’ENTREPRISE? Assurément. Lorsque la culture est déficiente, les entreprises s’exposent à des risques qu’elles avaient déjà analysés et atténués auparavant. Dans mon dernier article, j’ai illustré ce problème en décrivant comment l’évolution des marchés et les changements organisationnels nuisaient aux décisions en matière de gestion du risque. Dans le présent article, j’analyse la façon dont les influences culturelles peuvent nuire à l’apprentissage et compromettre la gestion du risque.

le coÛt des décisioNs iNflUe sUr la cUltUre

L’économiste Herbert Simon, lauréat d’un prix Nobel, a défini la rationalité comme étant l’action d’arrêter un choix parmi toutes les options possibles. De façon plus générale, les économistes émettent l’hypothèse que les entreprises cherchent à maximiser leur valeur actualisée nette en supposant une connaissance parfaite des flux financiers futurs. Vu que toutes les décisions sont rationnelles et prévisibles du fait de la con-naissance des prix des technologies et des prix de marché, cette théorie implique qu’une entreprise n’a pas de culture.

En pratique, nous observons que les décisions sont coûteuses, que les ressources sont limitées et que les décisions sont sou-vent fondées sur des règles empiriques et sur l’habitude. C’est pourquoi, en partie, Simon a revisité la théorie de l’entreprise afin de limiter le comportement rationnel – sa théorie de la rationalité limitée (Simon 1997, 88).

qu’est-ce que la culture? La culture existe du fait que les décisions très rationnelles ont un coût élevé. Les gestionnaires gèrent leur temps en fonction de règles empiriques fondées sur des décisions antérieures. Ces règles, de même que la formation et l’expérience des gestionnaires, déterminent la culture déci-sionnelle de l’entreprise. Fait à noter, plus les décisions

rationnelles sont coûteuses, plus les effets sur la culture sont importants.

L’existence d’une culture dans une entreprise nous donne une bonne raison de nous intéresser à son passé. La suite chronologique des décisions et de leurs répercussions prédis-pose l’entreprise à préférer certains modes de croissance à d’autres. Les antécédents personnels des dirigeants revêtent de l’importance, car ils nous permettent de mieux comprendre leur attitude face aux possibilités qui s’offrent à eux, de même que la rapidité avec laquelle ils prennent leurs décisions.

Types de culture. L’existence d’une culture permet d’expliquer pourquoi les entreprises développent des personnalités bien défi-nies. Le tableau 1 indique plusieurs types communs de culture, et ces types reposent sur les critères suivants : le mode préféré de prise de décision, la principale qualité recherchée, le principal mode de formation, la nature des procédures de contrôle et la combinaison implicite coût d’opération-coût de renonciation.

La culture définit la principale qualité recherchée en fonction du centre où les décisions doivent être prises. Dans une culture dite moderne, les pouvoirs décisionnels sont délégués aux chefs de division, car, pour prendre de bonnes décisions, il faut posséder l’information objective qu’ils produisent. Dans une culture dite postmoderne, les pouvoirs décisionnels sont parta-gés afin que les décisions soient équitables. Dans une culture traditionnelle, bon nombre des décisions sont centralisées afin de se conformer aux préférences des cadres supérieurs. Le mode de formation et les procédures de contrôle viennent renforcer ces préférences culturelles.

Une entreprise moribonde est une entreprise en crise. Ces entreprises favorisent d’abord l’un ou l’autre des types de cul-ture pour ensuite privilégier une culture traditionnelle. Cela s’explique par le fait que les crises consistent en une série de problèmes inhabituels que ne peuvent résoudre les personnes investies des pouvoirs délégués et qui requièrent l’intervention des cadres supérieurs. Les compressions sont un autre facteur venant renforcer la position des cadres supérieurs.

Une mauvaise culture peut-elle tuer une entreprise? par Stephen W. Hiemstra1

stephen W. hiemstra, ph.d., ingénieur

financier, vit à Centreville, en Virginie. Vous

pouvez le joindre à [email protected].

1 Stephen W. Hiemstra, Ph.D., économiste et ingénieur financier, vit à Centreville, en Virginie. En 2007 et 2008, il a siégé au comité du programme du

Symposium sur la GRE. Pour de plus amples renseignements sur le Symposium, visitez www.ERMSymposium.org. M. Hiemstra a participé à des travaux

de recherche de l’Enterprise Risk Management institute international (se reporter aux références bibliographiques). La première partie de cette série,

intitulée Une mauvaise culture peut-elle tuer une entreprise?, est parue dans le numéro de décembre 2008 de la revue Gestion du risque.

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

Page 53: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 53

La combinaison coût d’opération-coût de renonciation découle aussi des préférences culturelles. Le coût d’opération augmente en fonction du nombre de personnes participant aux décisions, tandis que le coût de renonciation augmente en fonction du nombre de possibilités auxquelles on a renoncé. La culture traditionnelle est celle qui produit le coût d’opération le moins élevé, car c’est elle qui prend en compte le plus petit nombre de possibilités – seules les préférences des cadres supérieurs sont envisagées. La culture postmoderne est celle dans laquelle on consulte le plus grand nombre de personnes, mais cela n’est pas toujours un bon indicateur, car seules les options activement défendues sont prises en compte. Dans une culture moderne, le coût d’opération se situe entre ces deux extrêmes, mais on note une préférence pour la prise en compte de toutes les options possibles.

Williamson (1981, 1564) soutient que ces deux coûts organi-sationnels sont étroitement liés aux prix de marché. Il faut en déduire que la culture évolue selon les conditions de concurrence des marchés que l’entreprise couvre. Le type de culture dominant peut évoluer en fonction à la fois des pressions sur les marchés et des changements de dirigeants, ce qui, au fil du temps, peut entraîner un chevauchement des caractéristiques culturelles. Par exemple, une entreprise qui passe d’un type de culture moderne à un type de culture postmoderne peut prendre davantage de décisions en groupe, accorder moins d’importance aux diplômes universitaires en matière d’affectation et d’avancement et avoir moins recours qu’auparavant aux examens par les pairs.

les lacUNes coMporteMeNtales NUiseNt

À l’appreNtissaGe

Les types de culture définissent les principales caractéristiques à un moment précis. Toutefois, l’évolution des circonstances force les entreprises à acquérir des connaissances et à s’adapter.

La culture d’apprentissage est donc une mesure clé du rende-ment en matière de gestion du risque.

De quelle façon une mauvaise culture se développe-t-elle? On observe des problèmes de comportement lorsque les struc-tures incitatives viennent perturber les processus normaux d’apprentissage, conduisent à des raisonnements erronés ou accroissent l’inertie de l’entreprise.

Apprentissage rationnel. La méthode scientifique est un processus rationnel bien connu de prise de décision, qui fait

tableau 1 : types de culture d’entreprise

Culture Décisions Principale qualité Principal mode de formation

Procédures de contrôle

Combinaison coût d’opération/coût de renonciation

Moderne Chefs de division Objectivité Régulier Officielles M/F

Postmoderne Consensus Équité Régulier et ECE Informelles E/M

Traditionnelle Cadres supérieurs Loyauté ECE Discrétionnaires F/E

Moribonde L’une ou l’autre des réponses susmentionnées en contexte de crise

Coût d’opération = coûts indirects de fonctionnement, Coût de renonciation = coût des possibilités auxquelles on a renoncé

ECE = En cours d’emploi, F = Faible, M = Moyen, E = Élevé

tableau 2 : étapes de la résolution de problèmes et connaissances utilisées

Pragmatic Independence

Besoin ressenti

Définition du problème

Observation

Analyse

Décision

Exécution

Prise en charge des responsabilités

Connaissance

normative

Connaissance

positiviste

Sources : 1 JOHNSON, Glenn L. Research Methodology for Economists, New York, MacMillan Publishing

Company, 1986, p.15. 2 DEWEY, John. How We Think, Mineola, N.Y., Dover Publications inc., 1997, p. 72.

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

suite à la page 54

Page 54: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

54 | JUiN 2009 | Gestion du risque

appel à la fois à l’apprentissage et à la prise de décision afin de résoudre des problèmes inhabituels. En voici les étapes : besoin ressenti, définition du problème, observation, analyse, décision, exécution et prise en charge des responsabilités (tableau 2). Comme ce processus est coûteux, l’entreprise limite le nombre de décisions qui reposent sur celui-ci.

Prise de décision comportementale. Les décisions fondées sur des règles apparient l’état actuel de l’environnement aux décisions antérieures. Ce processus d’appariement peut être officiel, comme dans le cas de l’adoption d’une loi, ou informel, comme lorsqu’il s’agit pour un gestionnaire de mettre à profit son expérience. Ce processus décisionnel remplit les conditions de l’apprentissage comportemental2.

Le processus d’apprentissage comportemental le plus connu du domaine de la psychologie, à savoir le modèle stimulus-réponse, fonctionne de manière semblable. Les actes (comme associer une règle à un résultat positif ) s’accompagnant d’un stimulus positif (+) donnent lieu à d’autres actes, alors que les actes (comme associer une règle à un résultat négatif ) s’accompagnant d’un stimulus négatif (-) ne sont pas répétés (Cross et Guyer 1980, 9). Nous apprenons en répétant des actions qui ont été suivies de stimuli positifs et en évitant d’accomplir des actions qui se sont accompagnées de stimuli négatifs.

Surprises d’apprentissage. Une surprise d’apprentissage se produit lorsqu’une longue séquence de stimuli positifs est suivie d’un stimulus négatif (++++++-) ou qu’une longue séquence de stimuli positifs est suivie d’un stimulus positif (------+). Cross et Guyer (1980, 4) désignent ce problème sous le nom de « piège social », une situation dans laquelle il existe plusieurs récompenses contradictoires. Ces situations perturbent le processus d’apprentissage comportemental et démontrent pourquoi les habitudes peuvent être un mauvais guide lorsqu’il s’agit de prendre des décisions importantes.

Le tabac, le jeu, la toxicomanie et l’adultère ont une structure d’incitation comportant une longue séquence de stimuli positifs suivie de stimuli négatifs (les plaisirs à court terme entraînent des problèmes à long terme). Les études supérieures, la recherche et les investissements comportent une séquence

opposée : une longue suite de stimuli négatifs (dépenses, perte de revenu et labeur), suivie de stimuli positifs (augmentation du revenu, du pouvoir et du prestige).

Inertie organisationnelle. L’inertie est la propriété physique décrite dans la première loi du mouvement de Sir Isaac Newton : « Tout corps persévère dans son état de repos ou de mouve-ment rectiligne uniforme […]3 ». L’inertie fait en sorte que les entreprises résistent au changement et ne tiennent pas compte des événements peu probables.

La culture d’une entreprise reflète l’environnement dans lequel elle évolue, car les décisions et les règles évoluent au fil du temps afin de relever les défis environnementaux. Les dirigeants de l’entreprise qui participent à cette évolution obtiennent en retour des primes, du pouvoir et du prestige. Lorsqu’il devient nécessaire de modifier les règles et les décisions antérieures, un conflit survient du fait que ce changement peut menacer la position sociale de ces dirigeants.

Prenons le cas d’une entreprise évoluant dans un secteur d’activité en expansion. On suppose qu’elle débute ses activités en tant qu’entreprise spécialisée dans un marché concurrentiel. Pendant qu’elle croît et qu’elle acquiert des concurrents, elle s’en tient aux prix du marché. Toutefois, au fur et à mesure que sa part de marché augmente, elle devient en fin de compte le marché et peut désormais fixer les prix. Si elle veut croître davantage, elle devra se diversifier et pénétrer de nouveaux marchés. À chaque étape de la croissance d’une entreprise, les règles assurant la réussite et les risques évoluent (Porter 1980, 191-295). Si la culture organisationnelle tarde à s’adapter et qu’une menace grandit rapidement, l’entreprise pourrait deve-nir insolvable avant que l’adaptation ne soit achevée.

Exemple d’un piège d’apprentissage. Les facteurs culturels déterminent le comportement, même dans le contexte de la modélisation financière, car les modèles représentent une synthèse des pratiques de l’entreprise et des processus de mar-ché pris en compte dans les données historiques. Bien que les modèles constituent un bel exemple de prise de décision ration-nelle, ce sont des objets culturels appartenant à une époque et à un lieu bien précis.

2 il s’agit ici d’un raisonnement métaphorique. Le syllogisme est comme suit : L’état actuel des choses correspond à X. La dernière fois que X s’est produit,

nous avons fait Y et les choses ont bien tourné. Lorsqu’on utilise un modèle, il est essentiel de s’assurer qu’il existe une correspondance étroite entre l’état

antérieur et X. Ce type de raisonnement est à la base de la plupart des modèles économiques.

3 Sur Internet : http://fr.wikipedia.org/wiki/Physique_newtonnienne.

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

Une mauvaise culture peut-elle tuer une entreprise? | suite de la page 53

Page 55: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du risque | JUiN 2009 | 55

Selon la théorie du choix rationnel, l’entreprise doit calculer la perte prévue (probabilité de l’événement multipliée par la perte attendue sachant que l’événement s’est produit) avant de décider des mesures à prendre. Si les gestionnaires qui ne font pas partie de l’équipe de modélisation supposent que les fréquences relatives historiques (non conditionnelles) des pertes sont très peu élevées, il semblera toujours exagéré de vouloir approfondir l’analyse tant que la forte majorité des parties n’accepteront pas les plus récentes prévisions indiquant des probabilités plus élevées. Une divergence naturelle peut donc survenir entre le point de vue conditionnel et non conditionnel à l’égard des probabilités de perte. Plus le coût d’obtention de l’information sera élevé et plus l’inertie organisationnelle forcera les employés à se rallier à l’ancien point de vue, plus cette divergence pour-rait être importante.

reNdeMeNt eN Matière de GestioN dU risqUe

Une saine gestion du risque d’entreprise (GRE) exige que l’on opère un certain nombre de choix rationnels tout en s’employant à relever les défis environnementaux. Voici les caractéristiques d’une saine GRE :

• l’entreprise est envisagée dans son intégralité (globalité); • la GRE prévoit un partage équitable des profits et

des pertes entre les diverses parties prenantes (éthique d’équité);

• les pairs sont encouragés à assurer un leadership positif (gestion intensive);

• la fonction de prise de risque est distincte de celle chargée de la gestion du risque (analyse objective);

• la gestion du risque constitue une valeur clé de l’entreprise, et elle vient bon deuxième après la maximisation des profits (caractéristique dite postmoderne).

Si la GRE est intégrée à tous les échelons décisionnels de l’entreprise, elle permettra de réduire la divergence entre les nouvelles et les anciennes perceptions à l’égard des risques. Quelle est la propension au risque de votre entreprise? On sup-pose, en l’occurrence, qu’une entreprise habituée à évaluer les risques par rapport à des objectifs internes s’adapte plus facile-ment à l’évolution du contexte de risque qu’une entreprise dont la réaction par défaut consiste à porter son attention ailleurs. ■

références bibliographiques

CROSS, John G. et Melvin J. GUYER. Social Traps, Ann Arbor, Mich.,

University of Michigan Press, 1980.

HIEMSTRA, Stephen W. An Enterprise Risk Management View of Financial

Supervision, 1980. Sur Internet : www.ermii.org/Research/Research_ndx.html.

PORTER, Michael E. Competitive Strategy : Techniques for Analyzing

Industries and Competitors. New York, Free Press, 1980.

SiMON, Herbert A. Administrative Behavior : A Study of Decision-Making

Processes in Administrative Organizations, 4e éd., New York, Free Press,

c1945,1997.

WiLLiAMSON, Oliver. « The Modern Corporation : Origin, Evolution,

Attributes », Journal of Economic Literature, déc., p. 1537-1568.

cUltUre dU risqUe et diVUlGatioN des risqUes

« Bien que les modèles constituent un bel exemple de prise

de décision ration-nelle, ce sont des objets culturels appartenant

à une époque et à un lieu bien précis. »

Page 56: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

56 | JUiN 2009 | Gestion du risque

CAS PROFESSIONAL EDUCATION CALENDAR

SEE REVERSE SIDE FOR DETAILS ON LIMITED ATTENDANCE SEMINARS

WWW.CASACT.ORG

CARE REINSURANCE BOOTCAMP ON PRICING TECHNIQUESAugust 10-11, 2009New York, NY

PREDICTIVE MODELING LIMITEDATTENDANCE SEMINARAugust 12-13, 2009Chicago, IL

TESTING LOSS RESERVEASSUMPTIONS LIMITEDATTENDANCE SEMINARAugust 24, 2009Chicago, IL

RESERVE VARIABILITY LIMITEDATTENDANCE SEMINARAugust 25-27, 2009Chicago, IL

CASUALTY LOSS RESERVESEMINAR (CLRS) September 14-15, 2009Chicago, IL

These upcoming CAS

Continuing Education

Opportunities will keep

you up to date on the latest

trends in actuarial science.

Dates to RememberLONDON CARE SEMINAR:PRICING AND ISSUES IN TODAYí SMARKETSeptember 15, 2009London, England

INTRODUCTION TO ENTERPRISERISK MANAGEMENTOctober 2-19, 2009Online Couse

IN FOCUS: THE UNDERWRITINGCYCLE SEMINAROctober 5-6, 2009Alexandria, VA

ENTERPRISE RISK MANAGEMENTAND MODELING (ERM2) LIMITEDATTENDANCE SEMINAROctober 19-20, 2009Chicago, IL

CAS ANNUAL MEETINGNovember 15-18, 2009Boston, MA

Page 57: Institut canadien des actuaires Note de la rédactioN risqueGestion du · 31 Modélisation structurelle du risque de crédit : le modèle de Merton et autres modèles par Yu Wang

Gestion du

risque

Institut canadien des actuairesCasualty Actuarial SocietySociety of ActuariessectioN GestioN dU risqUe

475 N. Martingale Road, Suite 600Schaumburg, Illinois 60173t : 847.706.3500 f : 847.706.3599 c : www.soa.org