2 n n n Automne 2011 # 4 GRATUIT CULTURE TRIMESTRIELLE
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CULTURE TRIMESTRIELLE
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Trentotto, Backstage, Corezone, Kartell,
la Mucca, Ombres blanches,
Poesy...
ParisPalais de Tokyo
la librairie du 104Espace B
La MaroquinerieL’Institut suédois
La Boule noireL’Alhambra
- Maison Rouge- Lazy Dog
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- Forum des images- OFr
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Lyonle MAC
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Art en l’île
Marseillele MHM
Maison de l’architecture Kulte
Biarritz In the middle
HossegorElvi’s
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Nantesle Lieux Unique
la Cigalela Cerise
Wild Horsele Hangard à bananes
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Cajarcla maison Daura
LausanneMUDAC
Musée de l’Elysée
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©AM.Piette.
l ’ a t e l i e r _ g r a p h i q u e A 4
©A4 l’atelier graphique.
Direction artistique/graphisme & photographie/+ coordination:Nolwenn Durand & Aude Fournié pour A4 l’Atelier graphique: [email protected] Ont collaboré à ce numéro: Nicolas Coriggio, Justine Ricaud, Elea Clarac, Sylvain Bouyer, Luc Assens, Sylvain Collongues, Laure-Anne Carré, Lisa Boostani, Rémi Calmont, Damien Tenenbaum, Julia Jean-Baptiste et Nina Sarradin. Couverture / Photographie / Illustrations: A4 / L’atelier GraphiquePhotograhie: page 1 /Anne-Marie Piette /
www.annemariepiette.com
/ on dit merci a /
4
en vitrineMARIE_JOHANNA_CORNUT
Mer ou Océan ?L’océan..!
La cabine, la cabane, le kiosque, les clowns, les banderoles : le syndrome de Peter Pan ? Non plutôt celui du divertissement. J’aime partir d’éléments identifiés, de lieux communs. Il ne s’agit pas d’inven-ter de nouvelles formes, mais d’utiliser ce qui m’entoure en travaillant avec des objets, des lieux, des espaces existants.
Nous avons offert notre vitrine à une jeune plasti-cienne française: Marie-Johanna Cornut.Le deal. Nous : une vitrine. Un thème : le ressac. Elle : du talent et une œuvre.Entre l’obtention du DNAP et du DNSEP, elle goutte aux currywurst, affectionne les façades roses et jaunes, et met les gutturales à l’hon-neur en passant une année en Allemagne. Aujourd’hui félicitée par les Beaux-Arts de Toulouse, elle expose en collectif, ou à titre indi-viduel, en France comme à l’étranger. Son travail s’ar-ticule autour de la rupture et de la continuité et ques-tionne le mythe contemporain. Elle s’appuie sur l’imagi-naire collectif qu’elle met en scène dans ses spectacles éphémères. Un vent de dé-sordre souffle alors, jusqu’à tromper nos attentes et faire naître du fonctionnel, un brin de poésie. Nous avons exposé « Encore une fois », pendant trois mois dans notre atelier.
©A4 L’atelier graphique.
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Comme nos voix bada bada, Nos cœurs y croient bada bada, Encore une fois bada bada, Tout recommence, La vie démarre, après les Beaux-Arts ?Une autre vie, oui... un autre temps..! D’ ailleurs, cette idée que tout recommence me plaît bien. C’est aussi peut-être parce qu’il est question du temps et de la nostal-gie. Ce sont des facteurs importants dans mon travail.
Dessine-moi ton fantasme artistique.-Humm... Un projet que je n’ai encore jamais réalisé (suite au pro-chain numéro)!
ARTISTE, (ta) définition :Penser le présent, le monde, la société de manière sensible, en suscitant des émotions, inviter à la réflexion, amener à voir autrement, questionner nos manières de penser, en redéfinir de nouvelles...
Tes racines hispaniques, tes études en Allemagne, ta vie en France: ton plat préféré ?El sancocho, un plat typique colombien Voici la recette
Ingredients:
- 1 poulet - 1 tubercule de manioc - 1 banane plantain verte - 4 grosses pommes de terre - 1 oignon - 3 gousses d’ail - Du cumin à souhait - Du paprika - Du sel et du poivre - 2 cuillères à soupe d’huile d’olive - De la coriandre - Autant d’épis de maïs que d’invi-tés- autant d’avocats que d’invités- du riz
Emincez l’oignon en fines lamelles et hachez 2 gousses
d’ail. Dans un grand fait-tout, faîtes dorer l’ail et l’oignon
dans l’huile d’olive.
Faîtes saisir le poulet à feu moyen et dorez-le de tous les
côtés. Bien salez et poivrez.
Recouvrez ensuite d’eau et laissez cuire au moins 1h30.
Épluchez le manioc. Cassez le en gros morceaux.
Epluchez les pommes de terre et coupez les en gros morceaux.
Epluchez la banane plantain et cassez là en gros morceaux
Une fois que l’heure et demi est passée, vous pouvez plonger dans le bouillon la yuca (le manioc), puis 20mn plus tard les pommes de terre et 15 mn plus tard la
banane plantain. Ajoutez la gousse d’ail restante coupée en 2, juste pour le goût. Ajoutez du cumin dans le bouil-lon. Ajoutez quelques cuillères
de paprika. Plongez 10 mn avant la fin les épis de maïs. Salez et poivrez
encore une fois. Ciselez la coriandre et réservez
là. Servez el sancocho dans une
assiette a soupe avec du riz, le maïs, l’avocat et de la co-
riandre fraîche.
Bon appétit !
Dernière frivolité ?Celle que ma grand-mère m’a
confectionnée le mois dernier.
Sieste improvisée ?Jamais de sieste mesdames,
toujours au travail !Dance in the air,2010,
en collaboration avec Rémi Groussin
Dance in the air,2010,
en collaboration avec Rémi Groussin
©Mathilde Veyrunes.
ART CONTEMPORAIN _/
13H30. A peine je finis d’avaler à la va-vite une salade composée, un yaourt et un café que déjà je m’affale sur le canapé, regardant la fin de la Nouvelle édition. Même si je préférais les bonnes joues rassurantes de Bruce, le bel Ali me tient en éveil jusqu’aux deux coups de pendule qui retentissent dans la salle à manger voisine. Non, je ne suis pas chez mamie, mais chez maman, avec qui j’ai une différence d’âge plus importante que la moyenne, d’où l’horloge. Je ne suis pas italien, je ne suis pas trentenaire et je ne suis pas un cadre supérieur qui se fait envoyer les bons petits plats de sa mère par colis (eh oui, ça existe!), je ne suis pas même un garçon (j’aurais dû commencer par là). Néanmoins, oui je déjeune
Flexio
n.
Extension.
Assoupissement.
chez ma mère, puis me laisse aller à la passivité. A midi c’est permis, les démons ne sont pas loin vous dirait Roger Caillois (profession : sociologue).
14H00. Je zappe sur France 5 pour mater le journal de la santé. Michel Cimes pourrait d’ailleurs à s’y méprendre, s’apparenter à Pan. NDLR/ Pour les incultes, Pan n’est pas le Peter Pan que vous connaissez déjà, mais un Dieu issu de l’union d’Hermès et Pénélope. Une sorte de DSK de la mythologie grecque, qui poursuit les nymphes à la mi-journée, jusque dans des grottes, pour des unions furtives. I seduced her and she said « oui oui ».
Bref, entre deux giclées de sang et
Par Aude Fournié
Florentijn Hofman
©Florentijn Hofman.
Assoupissement. de songes, à écouter. Des siestes sonores qu’ils composent. Un casque, des oreilles, un cerveau et la transaction soporifique se fait toute seule. « Oui oui, Pan ou pas, je serai plus reposé, déstressé, et donc plus productif cet aprèm ! C’est le boss qui va être content ! » Une pause guyanaise pour la douche froide, une parenthèse marocaine pour l’oasis en terrains hostiles.
La sieste est régénératrice, et remet les idées en place, à poing fermé!
A la base pratique rurale, la sieste venait marquer la mi-journée de durs labeurs pour les paysans, qui après avoir écoulé 3 litres de cidre, avaient bien besoin de se la couler douce quelques minutes à l’ombre des pommiers (non les bretons ne sont pas tous alcooliques, pas plus qu’ils ne sont boiteux. Les prendre pour cible est facile voilà tout, surtout que les pommiers sont en Normandie.) Certains ont eu de grandes idées à leur réveil, souvenez-vous du cas Newton, qui n’était pourtant ni paysan, ni normand. Un p’tit somme, un mars, et c’est reparti ! Le terme vient de l’espagnol siesta issu du latin
autres infections dégueulasses, de façon quasi inespérée au regard des sujets abordés par l’émission, je pique du nez, insidieusement accompagnée par ma mère qui fait semblant de rien.
14H30. Un coup de pendule marque la demi-heure. Je me réveille, complètement ensuquée, amnésique. Juste une vague image de l’invité du jour à l’esprit, et quelques mots (cellule / fractale / cartilage / muqueuse / coupe). C’est la science des rêves. Laisser infuser puis composez un cadavre exquis aux heures les plus créatives de l’après-midi. Hmmm.
Alors quand au bureau de la rédaction (ça le fait grave, même si on est que deux) on s’accorde : « prochaine thématique : la sieste », mon cœur s’emballe, je vais enfin pouvoir parler de ma vie entre midi et deux, si peu enthousiasmante et trépidante soit-elle. Mais en cherchant un peu plus sérieusement du côté des ouvrages de références sur le sujet, je me rends vite compte qu’en fait, je ne suis pas une exception et que non, ce ne doit en aucun cas être honteux de se déclarer siesteuse. Même Chirac, même Churchill, même Bonaparte la pratiquaient. La sieste est recommandée pour la santé, la sécu. et le bon essor capitaliste. Alors que diable, pourquoi les démons ne peuvent-ils pas nous piquer fiévreusement entre midi et deux, dans les entreprises ? Même si les aéroports proposent des isoloirs pour dormir entre deux correspondances, la sieste n’est pas ENCORE à la mode, ça ne saurait tarder. D’ailleurs, le Journal de la santé a présenté les travaux des Contrebandiers du temps et ceux du somnologue Eric Mullens. Un truc très sérieux en somme, même si au passage on se dit que derrière tout un tas de trucs banals et connus de tous, se cachent des sciences insoupçonnées.
Bref, les Contrebandiers du temps, vous proposent de troquer quelques unes de vos minutes « actives » contre une fraction de passivité, juste de quoi vous laisser aller. Ces magiciens sont des marchands
Julian Wolkenstein
©Julian Wolkenstein.
art contemporain _/
Pour ceux qui n’ont pas eu la chance d’assister
au nappening des Contrebandiers du temps lors de notre soirée de
lancement, retrouvez leur travail sur : http://
nappening.free.fr/
sixta (hora), « la sixième heure », c’est à dire midi, (meridianus utilisé dans l’expression « diable méridien » qui donnera plus tard « le démon de midi », allias Michel Cimes bis).
Pour reprendre tout doux, je vais surfer sur internet, et à dos de souris, je tombe sur l’Internationale siesteuse. Un site ou Francis Mizio, son créateur, répertorie tout ce qui est en lien avec la sieste, de façon éparse, en s’efforçant de ne rien y classer pour être le plus ennuyeux et hypnotique possible. « AZERTY » sculpté sur la joue gauche, j’aurais bien piqué l’oreiller du grandissime nounours de Florentijn Hofman. Cet oreiller, ou l’une de ses peluches géantes, qu’il laisse volontairement traîner sur le dallage des places publiques, parcs, quais ou couloirs de galeries. A coup sûr, les plus mal réveillés se prendront les pieds dedans.
Julian Wolkenstein, ne fait rien pour arranger les choses avec sa série « Is yawning is contagious? ». Des portraits qui se regardent par huit. Photographies « quastrictement » scientifique. Un bon bailleur en fait bailler dix, alors faites le test. Regarder les huit et continuez avec les contorsions léthargiques de ces corps pesants, comme des ânes qu’on dirait morts, photographiés par Charlie Engman : Domestic diorama. Si vous n’avez toujours pas les paupières lourdes et les yeux qui piquent, les bras m’en tombent. Tout droit sorti de l’imagination d’un Gondry qui aurait un peu trop abusé de psychotropes à l’ergot de seigle, je ressemble au dormeur de Peter Land. Les pupilles aussi dilatées que ses membres sont étirés. Je fatigue. Je m’endors. Je sieste. C’est la rythmanalyse de Blanchard. Efficacité prouvée dans la Dialectique de la durée: « en restituant une forme, le rythme restitue souvent une matière dans l’espace, indifférente au temps ; elle ne subsiste pas toute constante, tout inerte, dans une durée uniforme ; elle existe, dans toute la force du terme, sur le plan du rythme ». Qui dit rythme dit donc alternance de tension et de relâchement, de pulsion et de repos. Je travaille, je dors, je morcèle ! Rien n’est à raturer, tout est à garder puisque tout fait sens. « Le sillon est l’axe temporel du travail, et le repos du soir, la borne du champ ». Le repos prépare au re-départ, une absence aux autres, une présence à soi-même. Une halte, traçabilité du temps qui passe.
A mes heures perdues je suis donc presque-poète, mais au sixième des douze temps que forment une journée de romain, je roupille. Mon rythme biologique me le demande, sauf qu’à 14H30 pétantes, ce n’est plus l’horloge interne mais la rutilante mécanique empire de la salle à manger parentale, qui me sort de ma torpeur !
9
EDITO _/
Références bibliographiques /
Dialectique de la durée, Gaston Blanchard
Apprendre à faire la sieste, Dr Eric Mullens.
Eloge de la sieste, Bruno Comby
L’Art de la sieste, Thierry Paquot.
Charlie Engman
Peter Land
©Charlie Engman.
©Peter Land.
2 oeufs50 gr de sucre300 gr de mascarpone1 pincée de sel150 gr de biscuit à la cuiller330 ml de grolschcacao en poudre
Séparer les blancs des jaunes. Faire blanchir le mélange oeufs / sucre. Incorporer le mascarpone. Battre les blancs en neige et les ajouter au mélange. Tapisser le fond d’un plat avec la moitié des biscuits. Mouiller les biscuits avec la moitié de la Grolsch. Recouvrir avec la moitié de la crème au mascarpone. Rajouter le reste des gâteaux. Imbiber avec le reste de bière. Recouvrir de crème.Laisser au frigo 6 heures. Soupoudrer de cacao.
Félicitation vous venez de transformer un monument de la cuisine française en bombe à bière.
Haroun tazieff bieramisu
Recette _/
Testé & approuvé par 100 % des utilisateurs. ( réalisé sur un panel de 2 personnes.)
©A4 L’atelier graphique.
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Votre ordinateur s’essouffle? Il rechigne à la tâche, s’exécute avec lenteur et s’échauffe à la première injonction? Offrez-lui une bonne dose d’Electric Sheep, et découvrez avec lui tout l’art de la sieste!
Initiée en 1999 par le «software artist» Scott Draves, Electric Sheep est une oeuvre abstraite collaborative, open source et multi-plateforme. Il est possible de rejoindre le projet en téléchargeant un programme économiseur d’écran, fonctionnant grâce aux ressources des ordinateurs connectés. Ce projet de calcul distribué s’inspire du premier du genre, nommé SETI@home, qui a déjà fait intervenir plus de 5,2 millions de participants dans la recherche d’une intel-ligence extraterrestre. Mais à la différence de ce dernier, Elec-tric Sheep utilise nos ordinateurs pour faire de beaux rêves. En intitulant ainsi son oeuvre, Scott Draves rend hommage au roman «Do Androids Dream of Electric Sheep?» de Philip K. Dick, avant de nous démontrer que les androïdes rêvent bien... de moutons électriques.
Lorsque l’ordinateur s’«endort», l’économiseur d’écran se lance et génère des fractales aléatoires et évolutives. Tous les ordinateurs connectés au serveur forment un supercalculateur et génèrent dif-férentes animations appelées «sheep», compressées puis sauvegar-dées sous forme de fichiers vidéo. Les sheep sont ensuite envoyés au serveur, assemblés, puis visionnés et réutilisés par tous les ordinateurs. Ils sont d’autant plus complexes qu’il y a de machines connectées: à l’heure actuelle, ces rêves sont générés par des mil-liers d’ordinateurs du monde entier.
Mais certains rêves sont plus beaux que d’autres... il est ainsi proposé de voter, à l’aide du clavier, pour nos animations préfé-rées. Par défaut, celles-ci ont une durée de vie limitée: les votes
Sieste Electronique
Sieste Electronique
Par Damien Tenenbaum
positifs permettent alors d’allonger leur longévité, et d’influer sur le caractère de la génération suivante. Le sheep le plus popu-laire vit ainsi plus longtemps, et se reproduit d’après ce que Scott Draves nomme «un algorithme génétique», permettant une infinité de mutations. Le site electricsheep.org recense même les arbres généa-logiques de chaque famille de sheep, en présentant ses parents et sa descendance. Il illustre le souhait de son créateur de «recréer le phénomène biologique de l’évolution et de la reproduction à travers les mathématiques».
Le code d’Electric Sheep est open source, et a ainsi bénéficié de nombreuses contributions. Chacun peut créer son propre sheep et le soumettre au serveur. Le système aurait tellement évolué depuis ses débuts que Scott Draves lui-même n’explique pas toujours comment son algorithme a pu produire certaines caractéristiques. Cela l’a amené à proposer une nouvelle oeuvre, intitulée «Dreams in High Fidelity», et puise dans l’immense quantité de sheep générés au cours des dix dernières années. Elle se présente sous la forme d’un ordinateur, constitué d’une base de données de 55 ou 100 Gigabytes de vidéo assemblées. Les animations, en haute définition, sont jouées infiniment et sans répétition, de telle sorte qu’il faudrait six mois de visionnage pour en faire le tour... ce projet a été proposé sous des formes multiples, allant de la diffusion sur écran plat à la projection extérieure.
Electric Sheep est ainsi une étonnante forme de vie artificielle, hypnotique et quasi magique. Son univers psychédélique mêle habile-ment les hallucinations hypnagogiques de nos machines à notre soif de contrôle. Grâce à Scott Draves, nous voilà devenus des disciples de Dom Cobb: des «extracteurs»... de rêves androïdes.
--> images officielles disponibles sur: http://electricsheep.org/
©electricsheep.org.
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C’est en ces termes que l ’ i n s o l e n t Michael J. Fox se fait remonter les bretelles par Mr. Strickland, son proviseur dans Back To The Future, pour son 4ème retard d’affilé. La Do-lorean stationne encore en 1985 et Marty, dont le sang ne fait qu’un tour lorsqu’il est traité de «mau-viette», ne s’offusque guère de ce vieillot juron. Peut-être s’inter-rogeait-il: «voyons, un streaker est à poil sur un terrain de foot, un shmecker est un junkie en yid-dish, j’ai à priori rien a voir avec tout ça...» Doc aurait dû l’envoyer en 14/18 car c’est ainsi que l’on nommait les pe-tits malins se soustrayant à l’ef-fort de guerre. Généralisé après la seconde guerre pour désigner toute personne évitant l’effort, le tra-vail, les corvées et autres devoirs ou rechignant à exploiter sa produc-tivité au minimum + (le slacker fait le minimum -). Les bigots délais-sèrent l’expression au profit de «beatnik» associant ainsi la Beat-Generation (Kerouac, Burroughs) au communisme (à travers le suffixe du célèbre satellite Sputnik, tor-due l’idée). Tout aussi tordant les déconneurs de la Génération X iro-nisent et s’approprient ce qui se traduit donc par «traîne-savates» ou «tire-au-flanc». Pourquoi perdre son temps dans un domaine d’acti-vité qui n’a rien à voir avec ce que l’on est ou aspire ? Trop cultivés pour les basses besognes, trop dé-senchantés pour la politique, trop méfiants pour la compétition, les slackers peuvent alors être consi-dérés comme appartenant à une contre -culture anti-matérialiste, bien que leur comportement peut simple-ment être du à l’apathie ou la pa-resse : l’exact opposé du yuppie et des golden boys 80’s.
Ainsi, en plein milieu de la décennie de la frime et succédant aux activistes punks, déboule une belle bande de branleurs qui ne cessera de croître. Beat-Happening sort des disques ressemblant à des démos de démos instaurant la production Lo-Fi comme faire-valoir. Dinosaur Jr préconise le chant marmonné et léthargique. Daniel Johnston ex-celle dans les 2 catégories. Less is more ! Quant à la dégaine: jeans usés, vestes en denim rapiécés ou che-mises de bûcherons, les fripiers devaient se mettre à jalouser la garde robe de Neil Young, «le clo-chard électrique» n’avait jamais été aussi hype! Crasseux et mal fagoté pour le slacker grunge ou causal et mal fagoté pour le slac-ker de base. Neil étant entre les 2...Ceux ne s’appliquant pas un mi-nimum ces règles de négligence (c’est pourtant pas compliqué !) sont directement relégués dans les catégories des «pas-cools» (nerds, sportifs, pépettes et autres am-bitieux). Les slackers ne jurent que par l’insouciance de groupes «je m’en foutistes» tel Pavement, Sebadoh, Guided by Voices, Le-monheads ou Royal Trux. N’importe que la spontanéité, un sentiment d’égalité et une pointe de «weir-
By My own ass speaks
Musique _/
di-
t u d e » l o r s q u e
l ’ o n s’adresse à un
public cynique et blasé: on l’a fait
pas aux GenX-ers. Et pourtant ils au-
ront leur hymne (Loser de Beck), leur livre (Genera-
tion X de Douglas Coupland), l e u r magazine (The Idler), leurs la-bels (Drag City, Matador, Sub Pop, Merge), leur religion (The Church of the SubGenius), leur martyr (Kurt Cobain), leur mésestimé (Don Fleming de Gumball), leur comic (Buddy de Peter Badge), leur cartoon (Beavis & Butthead), et même leur film (Clerks de Kevin Smith). Sur ce dernier point Smith déclara que sa prin-cipale inspiration pour devenir réalisateur fut...: «Slacker» ! Docu/fiction culte de Ri-chard Linklater sur les glandeurs loufoques, freaks paranoïaques et autres paumés d’Austin. 20 ans après (cet été) eu lieu la première d’un remake amateur de 23 réalisateurs, dans la ville texane qui se targue du slogan «Keep Austin Weird» et du + gros festival américain: le SXSW, où plus de 2.000 artistes jouent dans plus de 90 sites autour du centre-ville !Car oui en 2011, avec une paire de ray-ban fluo, un tatouage do it myself, une haircut bizarre et une relecture du son indie 90’s, l’esprit et l’attitude slacker est toujours présent avec Wavves, Best Coast, Yuck, Harlem, Beach Fossils, Chad VanGaalen ou simplement...Total Slacker ! Quels branlos ceux là...
‘‘You’ve got a real atti-
tude problem, McFly.
You’re a slacker !’’
©A4 L’atelier graphique.
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©A4 L’atelier graphique.
Laure-Anne porte un chem
isier Andrea Crews de chez Sqwear, 160€ et une b
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chez Oups, 159 €.Rémi po
rte un tee-shirts Insight 51, collection garage
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Kulte, 89 € et des lunet
tes Waiting for the sun chez Kulte, 130 €.
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Modèles / Laure-Anne Carré / Lisa Boostani / Nicolas Coriggio & Rémi Calmont
/ Coiffeur / Sylvain CollonguesMaquillage / Elea Clarac / www.elea-makeup.book.fr/
Consultante mode / Justine Ricaud
Photographie / création décor / A4 l’ atelier graphique
©A4 L’atelier graphique.
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Nicolas porte une cape Max Jenny, 455 €, un pantalon kulte, 95 € et de
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n Ceremony chez Rice & Bean, 250 €.
©A4 L’atelier graphique.
Lisa porte une robe Sessùn chez Lili Léone, 158 € et un bracelet montr
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& Lesquoy chez OUPS, 20 €.
18H17
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MODE _/
8 brumaire de l’an II
En ces temps troublés de campagne électorale, la
question du choix s’impose. Plantée devant mon placard, je tressaille, short ou robe légère? (l’histoire se passe lors du terrible épisode
caniculaire qui s’abatit sur Toulouse le 9 Octobre 2011.) Inconsciente, jusqu’alors de la petite histoire de la mode qui me mena à cet instant décisif, j’entreprends des
recherches :
-5 juillet 1946, à Paris, à la piscine Molitor, un séisme se prépare, vêtue d’un itsi bitsi petit bikini, Micheline Bernardini, outrageuse dan-seuse nue du Casino de Paris, inaugure un nouveau micro pan
de la mode.
-1962, à Londres, Mary Quant taille dans le vif et mini-mise la jupe: scandale tex-tile interdit dans plusieurs
pays.
-1967, hérésie vestimentaire, le nez sur une photo com-
promettante, « mais pourquoi papa est déguisé en John Tra-volta? ». Le pantalon patte d’eph est né, 10 ans plus
tard, le pantalon patte d’eph est mort, vive le pantalon
patte d’eph.
Petite trilogie, de l’his-toire de nos dressing, mais comme dans toute trilogie à succès, il se doit d’avoir un épisode relatant la genèse
par Nolwenn Durand
de l’histoire: comment Anakin Skywalker est devenu l’homme en noir, Batman une chauve souris... Du coup comme tout filon qui s’exploite, je vous livre l’épisode charnière qui mena à ces révolutions tex-
tiles:
-8 Brumaire de l’an II, une date absente de nos livres d’histoire et qui pourtant révolutionna nos placards. Lors de cette journée enso-leillée du 17 Octobre 1793, une loi abroge les codes
vestimentaires imposés, il est désormais autorisé de se vêtir comme bon nous semble. Jusqu’alors des règlements
établis dès le XVIIIème siècle par les magistrats et les sei-gneurs régentaient les codes vestimentaires, gardiens de l’ordre moral, de l’ unifor-mité nationale et surtout de la différenciation des classes sociales. Modestie & simpli-cité pour les classes les plus pauvres, faste et démonstra-tion de leurs richesses fon-cières pour les aristocrates, mieux valait tomber du bon côté. Le 8 Brumaire, abroge
ces codes, dès lors, l’excen-tricité n’est plus l’apanage des plus nantis, mais celui
des plus audacieux.
Une petite révolution, qui eut des conséquences sur la vie
d’une jeune fille. Quel choc se fut pour la sies-teuse la plus connue de nos
contemporains, la bien nommée
La belle aux bois dor-mants porte une robe de
Setareh Motarez.
belle aux bois dormants, déli-vrée de ses ronces et de son col fraise, encore émerveillée de sa longue pause aux pays des étoiles. la belle pouvait quitter col pelle à tarte, cor-set étouffant & jupon puritain & se lancer dans la quête de l’habit de lumière. La belle hésitait entre les créations de Christopher Kane, avec sa robe constellation si seyante & celle plus audacieuce de
Setareh Motarez, avec une robe corollaire galaxie, offrant tous les avantages que l’ont peut demander à un vêtement : style, panache et infroissabi-lité (les + fainéant adhére-ront). A l’aube, la belle aux bois dormants pioche dans le trousseau de sa collègue peau D’Ane, une robe aux couleurs du temps d’Anne Valérie Hash, aux subtils reflets d’orage. Mais laissons la belle dans son monde apolitisé. Ce ma-tin, comme les sans-culottes, le choix est symbolique, je
choisis le short. En ces temps troublés de campagne électo-
rale, de féminisme revigoré, le vêtement est revendicatif.
©A4 L’atelier graphique.
SLEEPs
SUIT
Par Sylvain Bouyer
©forrestjessee.com.
DESIGN _/
SLEEPs
SUIT
Pourrais-je un jour appri-voiser les rythmes de mon
corps ? Pavaner à toutes les heures de la journée au top de ma forme...Je m’en lasserais. Car ce qui est si bon c’est de se laisser aller parfois à quelques minutes, quelques heures de bien être. Allongés
ou assis, les paupières à peine posées l’une contre l’autre.
Détendu, les bras et les jambes relâchées, je m’accroche à mes pensées qui s’estompent dou-cement dans une saine confu-sion. Je m’assoupis conscient
de cette chute volontaire vers des instants privilégiés. Je m’assoupis et d’un seul coup,
un seul, je ressens. Mon corps s’est arrêté là, tous mes sens
sont en éveil accentués par cette fragilité. Chaque son, chaque souffle d’air m’accom-
pagne plus profondément encore vers la plénitude. Cette sen-
sation je la chéris, je l’ali-mente, j’ai le frisson de cet instant, le souvenir de cet évanouissement. Je replonge
immédiatement... Réveille toi maintenant !! Et là comme par miracle, et contrairement à
l’énergie indispensable à mon sortir du lit trop matinal,
tout se passe dans la légèreté et le plaisir. Une sensation
réelle de force et de bien être m’envahit. J’ai presque autant de plaisir à refaire surface que je n’en ai eu à perdre
pied. Quel confort. C’est gri-sant !! Je réessaye tout de
suite ! Faut pas abuser quand même, en plus je crois que ça fait pas le même effet si ça
dure trop longtemps. Je modèle, je façonne, je choisis quand me ressourcer ! Je suis le manipu-lateur de mon temps. Galvanisé par cette maîtrise, je jubile. J’ai prise sur mon humeur, je
me crois même un moment, acteur de mon bien-être. Sans rien
demander à personne, comme un grand, j’ai rechargé mes batteries quand j’en avais
besoin. Je commence à croire, qu’un jour peut-être, je
serai le designer de ma vie. Mais bon c’est pas demain la veille ! Et cette douce eu-phorie s’estompe malgré tout assez vite. Alors la fatigue revient et je me dis qu’il est grand temps de prendre le taureau par les cornes.
Je décide de partir en quête d’idées astucieuses, d’objets judicieux. A défaut de desi-gner ma vie, je modèlerai ma
sieste. Entres deux repos bien mé-rités je poussais mes re-
cherches sur le sujet. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir les expérimenta-
tions d’un chercheuraméricain du siècle dernier. Bien sûr tout çela date de 1943, mais l’anecdote vaut le détour. En espérant que ça ne vous
donne pas l’envie d’en piquer une bonne. Richard Buckmins-ter Fuller inventeur futu-riste de la dymaxion house,
de la dymaxion car et du dymaxion globe 1, (essayez de taper ces mots sur internet c’est assez sympa) a œuvré
et éprouvé ce qui nous inté-resse aujourd’hui et qu’il
nomme son dymaxion sleep. Il s’agit tout simplement d’une étude menée sur lui même afin de vanter et de confirmer les bienfaits d’un rythme de som-meil bien différent de celui imposé par nos sociétés civi-lisées. On pourrait critiquer
l’impartialité du cobaye, mais les résultats constatés par des médecins et plus tard repris par la NASA confirment qu’il semble bénéfique pour le corps et l’esprit de se
reposer par cycles de 30 mi-nutes toutes les six heures.
1.www.google.com rechercher
‘Dymaxion’
2.Socrates et Samuel Johnson
3.www.forrestjessee.com; ‘sleep-
suit’/ ‘futurotextile 3’
Étrange que nous n’ayons pas encore entamé la ‘sleep revo-lution’. Y’a du lobbying dans l’air ! Surtout quand on jette un coup d’œil sur les innova-tions, difficiles à identifier. A croire que « dormir est juste une mauvaise habitude »2. Pour l’anecdote, Buckminster Fuller indique qu’il a dû se résoudre à abandonner ses expériences seu-lement « parce qu’il entrait en conflit avec les horaires de ses collègues ». Un peu plus jeune mais bien avisé, le designer américain Forest Jessee3 a tout compris ! Comme il le dit lui-même ses travaux sont largement inspirés du dymaxion sleep et des expériences de Buckminster Fuller. Une membrane alvéolée de mousse EVA thermoformable en guise de cocon, d’excroissance organique, de seconde peau. La combinaison de sommeil ‘sleep-suit’ résout ainsi tous les petits problèmes de fatigue. Isolant et respirant ce futuro-textile mis au point en 2009 et toujours en cour d’amélioration, est conçu pour permettre à tout un chacun de réaliser quatre siestes par jour, et cela quel que soit le lieu et le moment. Toujours au stade de prototype j’en appelle à investir dans le sommeil, mais surtout ne t’en-dors pas Forest, on a besoin de toi !
SLEEPs
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©forrestjessee.com.
26
INTERVIEW MATALI
CRASSET
Les personnes créatives le deviennent sou-vent dès leur plus jeune âge. Pour cause, y a t-il chez vos parents, des maquettes en allumettes cachées dans le grenier?
Non pas vraiment. Je viens d’un tout petit village. Mes parents sont agriculteurs. L’envie de devenir designer s’est manifes-tée assez tard. J’étais en Bac +3, j’avais 21 ans. J’ai un parcours complètement atypique.
Après des études à l’ENSCI vous travaillez pour P.Starck et devenez directrice artis-tique de Thomson multimédia, puis décidez de monter votre propre structure à l’aube des années 2000. Comment avez-vous évolué dans cet univers encore majoritairement masculin ? On ne m’a jamais fait pensé que je n’étais pas à ma place en tant que femme et en étant designer. Dès le départ, j’ai passé un diplôme en relation avec la technolo-
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prendra ensuite place au cœur de cette forêt, devenue porteuse
de micro-utopies, et derrière les
arbres,
ce seront les
habitants
de
Nottingham Nègrepelisse que vous verrez déguster leur miel.
interview rélisée par A4 l’atelier graphique.
©A4 L’atelier graphique.
gie. Je ne me suis pas dirigée vers des cases ou secteurs dédiés aux femmes. Inconsciemment, j’ai travail-lé sur cette idée d’intégrer, de do-mestiquer la technologie. Très faci-lement j’ai pu ensuite travailler en tant que designer pour dessiner des télévisions, magnétoscopes... chez Thomson, avec P. Starck. Mais on ne m’a jamais fait sentir que je n’étais pas à ma place. Je pense que c’est aussi une question d’attitude. C’est un peu comme l’élite du pouvoir, tout de suite j’ai montré que je n’étais pas intéressée par ces notions là.
Vous êtes un designer industriel pour qui le vivant est au centre du ques-tionnement. Vous formulez des scéna-rii de vie puis les mettez en formes. Vous qualifiez alors votre travail de « design de proximité ». Selon vous, à quel moment une pratique de proxi-mité migre t-elle vers de l’indus-triel ?Ce sont des projets un peu différent. Il m’arrive de travailler avec des entreprises pour faire des objets. Là c’est du design industriel. Puis il y a d’autres projets, comme celui que je présente aujourd’hui à Nègre-pelisse, qui ne se matérialise pas avec des objets mais plus avec une logique, une organisation, une propo-sition visant à se rassembler autour du miel, à échanger autour de la pra-tique de l’apiculture, en investis-sant divers angles de vue, de façon à ce que chacun dans ses propres en-vies, puisse avoir accès au projet.
Pour Sharewood, vous positionnez-vous en designer industriel ou pensez-vous à un autre statut ?
©A4 L’atelier graphique.
Projet Sharewood10 SeptembreNègrepelisse
Mon corps de métier c’est l’industriel mais je fais de l’espace, ou des projets plus artis-tiques. Je n’ai pas vraiment de définition, j’aime bien l’idée que le design n’ait pas vraiment de contours vraiment définis, ce qui me permet d’inter-venir dans n’importe quel lieu, sans faire la même chose aux mêmes endroits. A chaque fois je suis très vigilante sur le contexte du projet et la matéria-lisation du projet se nourrit de ce contexte. Ici nous sommes dans un centre d’art donc je propose quelque chose qui peut être inter-prété comme une instal-lation, mais une ins-tallation où j’invite les visiteurs à s’ins-crire dans le projet en prenant un bâton sur lequel ils auront écrit leur nom. Ces bâtons vont ensuite constituer par petits brins, les touffes qui vont venir
Dans votre travail vous insistez sur l’importance de la rencontre
et du développement des liens sociaux permettant au corps social
d’accoucher de projets communs. Quelle a été pour vous, la ren-
contre la moins commune ?
Concernant la singularité des rencontres, la complicité que je partage avec Patrick Elouarghi et
Philippe Chapelet est peu com-mune. AU delà des projets que nous menons ensemble - le Hi hotel, la plage Hi beach, la Dar Hi et main-tenant le Hi matic, il y un enga-gement autour de valeurs communes et de projets à réinventer autour de l’hôtellerie ce qui est le plus
passionnant.
Avec Sharewood, vous avez dessiné les bases d’une forêt où priment les échanges : un bois à se par-tager. Ces ruchers coopératifs
placent l’abeille et la biodiver-sité, comme étant les maillons
assurant la cohésion et la commu-nion de l’Homme avec la Nature. Pensez-vous qu’en créant de nou-veaux possibles qui détroussent nos habitudes individuelles au
profit d’attitudescollectives, le design incarne le Rob in Hood du
XXI siècle ?Les deux sont mélangés. Il fût un temps où j’étais vraiment très ab-sorbée par le travail. Mais l’arri-vée des enfants a changé beaucoup de choses. Je ne travaille plus
jusqu’à 2h du matin tous les soirs, mais j’ai quand même du mal à dis-
socier ce qui est professionnel et ce qui est d’ordre plus privé. J’aime bien cette imbrication vu que mon travail se nourrit de la
vie.
Si le design est votre mode de vie, quel est votre emploi du temps?
Je dirai plus que le design c’est la vie ou par paraphraser Robert Filliou que le design est ce qui rend la vie plus intéressante que
le design. Après mon emploi du temps est celui d’une personne qui partage sa vie entre sa famille, des rencontres
et des projets. Pour fluidifier le tout, mon bureau est intégré à ma
maison ce qui me donne la chance de voir évoluer mes enfants et de par-
tager avec eux.
se positionner sur les ruches, pour rappeler une fois que le rucher
sera construit, que c’est un projet participatif.
J’entrevois de plus en plus ce métier, à travers les projets que je mène, comme celui d’un accou-
cheur, d’un maïeuticien. Il s’agit de moins en moins de mettre en forme de la matière – de l’es-thétique - mais plutôt de faire
émerger, de fédérer, d’organiser, autour d’intentions et des valeurs communes, des liens et des réseaux de compétences, de connivence, de
socialité. La majorité des projets sur lesquels je travaille actuel-lement mettent en évidence cette dimension de travail collectif et collaboratif. Je pense au récent projet de la Maison des Petits
au 104 à Paris, aux maisons syl-vestres pour le Vent des forêts à Fresnes au Mont dans la Meuse, à l’école Le blé en herbe à Trebe-dan en Bretagne avec la Fondation de France, la Dar’hi à Nefta en Tunisie ou avec Cédric Casanova
et ses huiles d’olive de Sicile à Belleville ou ici à Nègrepelisse. Il y a donc une dimension de plus
en plus locale qui m’intéresse
beaucoup. On voit bien que la contemporanéitén’est plus l’apanage exclusif du monde urbain. Bien évidemment, je dessine aussi des objets, mais les objets ne sont ni le centre, ni la fina-lité du processus de création ; Il en sont une actualisation possible parmi d’autres (une archi-tecture, une scénographie, une exposition...) à un moment déterminé, d’un système de pensée plus vaste.
Dans ce projet, l’organique est donc au cœur du système. Le design devient collaboratif et in-tègre une dimension aléatoire. Outre les tasseaux de bois, témoins du travail collectif, n’avez-vous pas songé à mettre en avant le « work in progress » des abeilles dans la forme des ruches ? Notre revue traite à chaque numéro, d’une théma-tique décalée. La prochaine est « la sieste ». Quel design pour une sieste made by Matali Crasset ?
J’ai dessiné il y a quelques années en 1999 un objet de mobilier pour la sieste, en 1999.Avec Téo, je crois vraiment que j’ai mis les pieds dans un interdit : peut-on être improduc-tif dans un univers d’hyper-productivité. L’objet affiche clairement l’intention avec son panneau “Do not disturb”. “Do not disturb” non pas parce que je travaille mais bien parce que je ne fais rien pour mieux travailler ensuite. Cela est-ce acceptable dans une société, où la logique veut que celui qui travaille le plus est le plus pro-ductif.Un cabinet américain d’études stratégiques a ré-cemment publié une étude sur le sujet démontrant que la sieste augmentait la productivité !“Téo” a été présenté dans une exposition chez un grand consultant A.T. Kearney* : les réactions furent assez admiratives mais remplies d’une cer-taine angoisse,certains consultants se voyaient ainsi quasi enchaînés à leur bureau... Si je peux dormir dans mon lieu de travail, où s’inscrit ma sphère pri-vée ?
* : Neuilly-sur-Seine, A.T. Kearney, “Joint-ven-ture - art in the office (22 créateurs désorga-nisent A.T. Kearney” exposition organisée par Bernard Blistène et Fabrice Bousteau (30 sep-tembre/10 octobre 1999)
Notre édition est nommée IF mag car nous défen-dons une culture Intensément Frivole. De fait, quelle est votre dernière frivolité ?
Je ne pense pas que la frivolité fasse partie de mon monde. Je suis profondément terrienne, sans besoin réel sinon celui de partager des projets qui sont avant tout des aventures humaines.
Théo par Matali Crasset /
1999.
©Matali Crasset.
crédit photo
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