H I S T O I R E COMPLTEDE
SAINT PAULA P O T R E E T D O C T E U R DES NATIONS DE SES
PRDICATIONS, DE SES MIRACLES, DE SES COURSES APOSTOLIQUES, DE SES
PITRES ET DE SON GLORUX MARTYRET I R E E S
P a r t i e des Auteurs canoniques, expliqus par les S S . Pres,
par les Docteurs Se les meilleurs Interprtes ; P a r t i e des
Traditions primitives ;
A c c o m p a g n e de la Rfutation
des erreurs STRAUSS, RENAN, et autnes semblables, Anciennes
& Modernes.
DIVISE
EN CINQ LIVRES
Par M. L ' A B B M A I S T K BChanoine honoraire de Troyes,,
Professeur de Thologie, etc., Evi$ Tssts Cht'sti cid omncs
howinss
Vous serez le Tmoin du Christ devant tous les hommes * (Act.
xxu, 15.)_
JP A ^ i l V. W A T E L I E PijiO^ Rus de
S
L l B R A I R E - i i D I T E UR jSSVVBS) 10.
1 8
7
0
Biblio!que Saint Librehttp://www.liberius.net Bibliothque Saint
Libre 2008. Toute reproduction but non lucratif est autorise.
V P A L
E t mittam ex eis qui salvati f u e r i n t ad Gentes, i n m a r
e , i n . . . . L y d i a m , t e n d e n t e s sagittam, in I t a
l i a m Se Grseciam j ad insulas l o n g e : ad eos qui n o n
audierunt d e m e , et n o n v i d e r u n t gloriam m e a m Se a n
n u n t i a b u n t gloriam m e a m Gentibus : Se adducent o m n e
s fratres v e s t r o s de c u n c t i s Gentibus d o n u m D o m i
n o . . . . . (Le prophte ISAE, . LXVI, V. 1 9 - 2 0 ; Gi Rom. xv,
21).
Je me ferai des Aptres de quelques-uns de ceux qui auront t
sauvs dans Isral, & ils iront vers les Gentils, dans les mers,
dans la Lydie, dont les peuples sont a r m s de flches, dans
l'Italie, dans la Grce, dans les les lointaines; vers ceux qui
n'ont jamais, entendu parler de moi, & qui n'ont point vu ma g
l o i r e , & ils annonceront m a gloire aux Nations, & ils
feront venir tous vos frres de toutes les Nations, comme un prsent
au Seigneur...,, Celui q u i a confi Pierre l'Apostolat..., me l'a
aussi confi pour vangliser les Nations.
Qui operatus est Petro in Apostolaturn..., o p e r a t u s est
et m i h i inter Gentes : (L'Aptre S. PAUL, Galat. n, v. 7 ) .
AVERTISSEMENT DE L'DITEUR
L 'SMst&is'c 18& stsi&tt M*t&n$ & les autres
ouvrages de l'auteur ont t composs Se termins, lorsqu'il occupait
la chaire diocsains de Thologie ; ils ont continu tre dits sous 1B
mme titre, depuis qu'il rside d a n s la c u r e cantonale de
Dampierre, au diocse de Troyes. Le docte professeur a dmontr p a r
des raisons premptoires, p a r des preuves & des tmoignages
irrcusables, la ralit Se la vrit des faits historiques de chacun
des Douze Aptres. Aprs trois sicles d'obscurcissement, ces faits
ont t heureusement remis en lumire, pour l'instruction &
l'dification des fidles, qu'ils avaient dj p r o cure durant quinze
sicles. Bien que les nuages, amoncels p a r l'hrsie, n'aient p a s
compltement obscurci notre atmosphre religieuse, ils ont toutefois
voil e n partie les rayons salutaires de ces grands astres, destins
clairer les Nations & les diriger dans la voie de la vrit. Il
importait donc q u e de nouveau la splendeur de ceux qui, m m e
tant dans le ciel, sont encore de$ Tmoins fidles de Jsus-Christ,
brillt intgralement aux veux des peuples, & rvlt plus
manifestement leurs r e g a r d s les magnifiques horizons de
l'immortalit hp.nrpusft & orlorieuse Ces dmonstrations, ces
publications amples & circonstancies, rjouissent en gnral les
socits, Se procurent, en particulier, le bonheur des familles &
celui de chaque membre qui les compose, en faisant renatre, dans d
e s coeurs dsesprs ou abattus prcieuse & vivifiante lumire d e
l'Esprance chrtienne.
:
E n publiant l'Histoire du grand Aptre, & en m e t t a n t e
n relief l e s sublimes enseignements du Docteur des Nations, n o u
s avons p e n s qu'il n e serait peut-tre p a s h o r s de propos
de les faire p r c -
d e r d e l'Expos gnral de la Grande Christologie, tel qu'il a
tpubli dans le Mmorial Catholique, p a r le Rdacteur en chef d e
cette R E V U E , & de r a p p e l e r ici de nouveau le titre
d e ce grand ouvrage. Ce titre r e m a r q u a b l e tant
pleinement justifi, comme n o u s le v e r r o n s ultrieurement,
par des preuves innombrables & de t r s b o n aloi, le
catholique n e peut assurment qu'tre fier de sa foi. Loin d'en
rougir, il aimera a se ranger sous l'tendard du Christ-Rdempt e u r
, 8c il se glorifiera de porter son n o m .
ARCIS-SCR-AUBE.
~ Typographie Lon FREJIONT,
{Extrait
du MMORIAL CATHOLIQUE, Vol. de 1867).
APERU GNRAL SUR L'OUVRAGE INTITULE :
JESUS - CHRIST AVEC SES PREUVES ET SES TMOINS,00
GRANDE CHRISTOLOGIE.
Il y a quelque temps dj, nous avons eu entre les mains et nous
avons lu, en plusieurs de ses parties, et parcouru dans tout son
ensemble, le manuscrit d'un ouvrage trs tendu intitul : Jsus-Christ
avec ses preuves etses tmoins, ou grande hnstologie prophtique et
historicit, etc.
Cet ouvrage considrable, savant, bien ordonn et trs solide est d
aux patientes recherches, aux veilles d'un digne^cur de campagne
dont les studieux travaux et dont la vie, dvoue avant tout aux
saintes sollicitudes du ministre paroissial, rappellent le pieux et
docte abb Gorini, et font bnir la Providence qui suscite, en nos
jours o le clerg est si mconnu, tant de vnrables prtres qui, du
fond de leurs humbles presbytres, se vouent la dfense de la vrit.
Nous fmes frapp des labeurs qu'une telle uvre a d coter M. l'abb
Maistre, cur de Dampierre, au diocse de Troyes ; nous ne pmes
qu'admirer la masse de preuves et de tmoignages qu'il a su
accumuler et si bien coordonner en faveur du divin Fondateur de
notre sainte Religion, de ses Aptres et de tout le Christianisme, -
et nous exprimmes aussitt le dsir de voir se rencontrer quelque
libraire intelligent et assez courageux pour entreprendre la
publication d'un ouvrage aussi important et si propre combattre
l'incrdulit. Dans le mme temps, on annona la prochaine apparition
d'un livre dont nous lmes le Prospectus dans une Revue
Bibliog?'aphi[ue qui se publiait a Bar-le-Duc, mais qui, depuis
plus d'un an, a cess de paratre.Ce livre a pour titre r La Bible
sans la Bible ou l'Histoire du JYouveau Testament par les seuls
tmoignages profanes, de l'Ancien et par M. l'abb
Gainet (1) ; et quelques personnes prtendirent que cet ouvrage
avait des rapports trs directs avec celui dont nous avions examin
le manuscrit, et(1) Depuis que ces l g e sont p b i e , l o v a e
de M. l a b G i e a paru. Nous e ins uls 'urg 'b a n t n avons fi
l'Examen c i i u dans l Revue des questions historiques, l v a s n
de J n i r at rtqe a irio ave 186S, pp. 235-265. ( o e du r d c e r
en chef du Mmoriit cathoiqwi). Ni atu
Ml
qu'il n e pouvait t r e , au fond, que l'excution du pion que M.
le cur d e Dampierreavat ralis. Nous tions persuad qu'il n'en tait
rien, et q u ' o n se prononait sur les deux ouvrages sans
connaissance suffisante. '.toutefois, nous ne voulmes point nous en
r a p p o r t e r a l'tude q u e n o u s avions faite du manuscrit
do la Grande Chvistologie et la lecture de l'Introduction de l'uvre
de M. Gainet publie dans la Revue prcite, et nous en crivmes M.
l'abbe Maistre, le priant de nous exposer l u i - m m e son plan et
son but, afin de le faire connatre a d'autres et d'aider ainsi,
selon notre faible pouvoir, la publication de sou savant et si m r
i t a n t ouvrage. Le digne et excellent cur de Dampierre voulut
bien r p o n d r e notre dsir, et c'est sa lettre que nous croyons
utile et intressant de faire pass e r sous les yeux de nos
lecteurs, en la divisant toutefois en deux ou trois articles, cause
de sou tendue. Combien nous serions heureux si n o t r e h u m b l
e publicit pouvait s e r v i r a ce travail colossal, fruit de
plusieurs a n n e s d e recherches et de travaux, uvre srieuse et
capitale, e n t r e p r i s e et m e n e bonne fin avec un zle, u n
savoir, un dvouement, un a m o u r d e l'Eglise dignes dd
particuliers loges et de toutes les s y m p a t h i e s d e s
catholiques! L.-F. GURIN. A Monsieur L. -F. Gurin, rdacteur en chef
du Mmorial Catholique.
Monsieur le rdacteur, Vous avKi eu la b o n t de me mander que
diverses personnes vous ont fait. entendre que le travail de M.
l'abb Gainet pouvait tre l'excution du plan que j'ai mo-nime ralsi
et que vous connaissez, ayant eu la bienveillance d'en, faire
l'objet d'un Rapport moth'. C'est une erreur que je vous serai
reconnaissant de dissiper : elle donnerait penser que la
publication de l'un de ces ouvrages doit rendre superflue celle de
l'autre. Il n'en est nullement ainsi. I Ces deux publications sont
diffrentes et me paraissent, toutes doux,de la plus grande utilit
au temps prsent. Jamais l'Apologtique chrtienne n'a t plus
ncessaire qu'aujourd'hui, la foi pratique du christianisme se
trouvant dtruite dans la presque totalit de la socit contemporaine,
surtout chez les hommes. Je le dirai hautement : j ' a i m e l'ide
et le plan de M. Gainct. Plus d'une fois la pense d'un semblable
travail m ' e s t venue l'esprit; mais je me suis constamment arrt
celle de la Grande Christologie, parce que celle-ci tablit tous nos
dogmes la fois et avec une inbranlable force. Le travail de M.
Gainct m e parat la dmonstration scientifique des divers faits
bibliques. Sous ce rapport, nous nous rencontrons invitablement
dans l'expos des tmoignages profaBes, conrmatifs des faits
vangliques. Riais ce point unique de contact sofut-il pour supposer
un fond de ressemblance bien considrable, et u n e m a n i e
identique de traiter cette espce de preuves ? Cinq autres ordres
d'arguments qui figurent dans la Grande Chrstologe, manquent dans
l'ou-
vr3o tic M. Gainct. Et bien loin d'tre superflus, ces cinq
espces d'arguments sont absolument indispensables pour lablir,
sinon la certitude hi$to~ figue des faits de Notre Seigneur, du
moins leur sumaturalit et divinit. Ils sont, en outre, de nature
corroborer singulirement le caractre mme rationnel de ces mmes
faits. M. Gainet poursuit u;i Lut trs gnral, la dmonstration de
tous les faits bibliques : il y arrive par une voie qui est
parfaitement du got de notre sicle, mais il y avait plus faire
encore. Le but de la Grande Christ ologie est, au contraire, trs
spcial; car, bien que le Christ soit la fin unique des Ecritures,
c'est nanmoins un sujet plus circonscrit, plus tranch. Je le
dmontre parle mme genre de preuves, il est vrai, mais d'une manire
fort diffrente, et, surtout, sans omettre cinq autres espces
d'excellentes dmonstrations, qui font de la Christologie un corps
de preuves tout fait indestructible cl complet. Qu'il me soit
permis, celle occasion, d'en exposer succinctement l'ide, le plan,
et la force dmonstrative. II. Un jour quelqu'un examinait
attentivement la situation religieuse de notre poque. En considrant
la commune tendance des hommes s'affranchir si facilement des
pratiques chrtiennes, mme de celles juges indispensables l'intrt le
plus capital de l'existence h u m a i n e , nous reconnaissions
douloureusement le despotique empire que les ides anti-religieuses
ont pris sur l'esprit de notre sicle. Et ce n'tait pas sans la
peine la plus vive que nous envisagions comme gravement compromises
les destinesHinmortelles de tant d'iiommes de nos j o u r s , et
entr'autres de personnes particulirement chres. En prsence de cet
affligeant spectacle, je demandai quoi serait le meilleur moyen de
dtruire les> causes d'une incrdulit si dsastreuse, de porter
remde ce flau endmique et, par l, de contribuer, selon la faible
mesure de nos forces, la rsurrection parmi nous du christianisme,
son refleurissement universel. Aprs avoir constat que le
scepticisme spculatif et pratique a fait invasion dansles esprits
et dans les murs, et qu'il domine tyranniquemenl noire poque, nous
nous sommes dfinitivement arrts cette conclusion, que pour couper
racine l'incroyance actuelle, qui tendrait se gnraliser, et pour
faire revivre la foi chrtienne dans les socits modernes, il ne
pouvait y avoir de moyen plus efficace que le suivant : Mettre en
lumire et tablir invinciblement : En -1 lieu, la ralit historique
des faits de N.S. et des Aptres. En 2 lieu, la svrtiaturalit ou
divinit de ces mmes faits.er e
e
III. Les causes de l'incrdulit disparatraient ncessairement,
a-l-on dit, si les nombreuses et magnifiques preuves du
christianisme, compltement obscurcies aujourd'hui, taient mises en
vidence dans des tableaux qui en seraien la vndique et lumineuse
exposition.Or, c'est une uvre de ce genre, if>, aimororst.
niions le premier; les esprits srieux, les hommes qui veulent
s'instruire donneront la prfrence au second. L'un, source de
passagre dt '(cotation, n'est souvent qu'un moyen de vaine
distraction ; l'autre, source inpuisable d'abondance et de
richesses, procure le bonheur constant. O chercher, en effet, une
plus utile moisson de preuves, une plus abondante rcolte de motifs
de conviction et de foi ? Doutez-vous de la vrit de tel ou tel fait
de la vie de Jsus-Christ ? Lisez attentivement les arguments
relatifs ce fait, et vous serez convaincu. Doutez-vous de
l'ensemble des faits et des vrits vangliques? Parcourez toutes les
preuves, considrez leur force gnrale, de mme que la force
particulire de chacune d'elles, et la conviction la plus forte sera
le rsultat infaillible de cette lecture, faite avec une volont
droite. Mais vous tes croyants ; aucun doute ne s'lve comme un
nur.ge dans votre esprit? Lisez nanmoins, et votre foi ira toujours
croissant. Dans les temps o nous sommes, nous avons besoin d'une
foi hroque. D'ailleurs, quoi de plus propre rjouir le chrtien que
ce faisceau de preuves sans nombre et indestructible venant
fortifier, affermir ses saintes croyances?.. Car, nous le rptons,
la Grande Christclogie est l'histoire de Notre Seigneur
Jsus-Christ: -1 selon les antiques et innombi'ables oracles des
Prophtes Hbreux ; 2 selon les Traditions ant-messianiques des
Hbreux el des divers peuples ; 3 selon les huit autres Auteurs
sacrs ou canoniques ; 4" selon les Saints Pres et les auteurs
primitifs ; 5" d'aprs les hrtiques et les Juifs infidles des
premiers temps ; 6 d'aprs les tmoignages des paens et des auteurs
profanes ; 7 d'aprs les divers monuments traditionnels primitifs,
etc. Tout esprit droit ne peut qu'tre frapp, toute me chrtienne ne
peut qu'tre heureuse de voir environns des rayons de la divinit et
des flots de l'vidence historique, le hros principal, JSUS-CIIUIST,
les hros secondaires, ses Aptres, ses premiers et vritables Tmoins,
les saints el illustres Personnages chrtiens du sicle de Jsus, au
nombre de plusieurs milliers, dont njbus donnerons la vie, ou la
notice biographique, en leur lieu. Tout ce qui les touche, excite
au plus haut degr notre curiosit, attire notre respectueuse ^ct
affectueuse attention, ils sont tels que les exigent la raison et
la foi, tels que les veulent la science cl la pit.1
X. On peut le dire, dans laGrande Christologie se retrouvent, en
quelquesorte, les Archives contenant les titres de noire foi. Je la
compare volontiers un temple considrable, i m m e n s e , lev frais
communs, la gloire du Christ et de tout le Christianisme. Les
matriaux, qui entrent dans sa structure, appartiennent toute
l'Eglise, l'humanit tout entire; ils sonl extraits de toutes les
carrires, de tous les temps et de tous les lieux du monde. Chaque
Prophte, chaque Docteur y apporte sa pierre prcieuse ; chaque
peuple, chaque sicle sa pari, sa dposition clatante, el ce monument
aux vastes proportions porle bien le cachet de l'universalit. Tous
les genres de sciences, on l'a v u , y sonl runis: la Thologie, la
Philo-
12soplio, l'Histoire, l'Archologie, etc. j tout y est mis la
porte de tous les esprits. Quelque considrable quo ft le nombre d
Tmoignages, j e n'ai pas cru devoir le diminuer. Il est bon qu'il
reste dmontr que le Christianisme ne pche point par dfaut de
preuves. Toutefois, si deux ou trois colonnes suffisent tel ou tel
lecteur, il pourra passer outre et aller la thse suivante. Il n'est
pas ncessaire, dans ce cas,, qu'il lise tout ; mais il est trs
avantageux que l'on sache que la quantit des preuves parcourir
excde les exigences des rationalistes de notre poque, mme les plus
difficiles. Telle est la Grande Christologie que nous annonons. Si
sa lecture n'a pas toujours tout l'attrait de l'histoire, dans la
premire partie surtout qui est spcialement consacre la discussion
et la dmonstration,- elle l'offre, du moins, dans la deuxime partie
qui, tout en fournissant de nouveaux motifs de conviction, est
entirement historique. La premire partie prsente tout l'intrt d'un
grand et solennel dbat ; la seconde, celui de plusieurs drames
galement importants 5 et, lors mme qu'en certain endroit la forme
d'argumentation semblerait un peu aride, nanmoins la gravit du
sujet et le profit qui en rsulte, rendent presque insensible cet
invitable inconvnient. Disons, en t e r m i n a n t , que ce grand
ouvrage, qui a reu l'approbation ecclsiastique, a t, de plus, honor
d e l bndiction spciale de N S. P . le Pape Pie IX : BENEDICATTE
DETJS, ET DUIGAT coa TIUMET IATELLIGENTIAM TU AU ! . . Telles sont
les prcieuses paroles que Sa Saintet a envoyes l ' a u t e u r ,
crites de sa propre main.
L abb
MAISTRE,
Cur de Dampierre {Aube)*
Depuis que l'article et la lettre ci-dessus ont t publis dans le
Mmorial Cuihohqu, un premier volume a paru ; il a p o u r titre
:HISTOIRE DE CnACUNDES SOIXANTE DOUZE DISCIPLES DE NOTRE SEIGNEUR
JSUS-
CHRIST, composant la premire Compagnie de Jsus, premiers tmoins
de ses miracles et thaumaturges- eux-mmes j premiers hrauts de
YEvangile, coadjuteurs des Aptres, premiers Pasteurs ouEvquesdes
grandes cits de l'univers ; publie pour la premire fois d'aprs les
rcils scripturaux et patrologiques , d'aprs les monuments indits et
les antiques traditions ; par M. l'abb Maistre, chanoine 'bon. de
Troyes, ancien professeur de thologie, etc. in-8 de VIII-70
pages.
II est en vente la librairie F . Wattelier, 1 9 , rue de Svres,
Paris. La G R A N D E C H R I S T O L O G I E formera environ 1 4
ou 1 5 volumes in8. Prix de chaque volume : 7 f. 5 0 c , et 5 f.
seulement avec une forte remise aux D E U X M I L L E premiers s o
u s c r i p t e u r s . iS'adresser pour la souscription, M. l'abb
Maistre, cur de Dampierre, par Arcis-surAube (Aube).ORLANS. TROP.
CONSTANT AN.
I
QUELLE
langue pourrait clignement parler de Saint PAUL*?...
Qui pourrait compter ses titres glorieux, exprimer l'activit de
son zle, numrer ses conqutes et ses succs dans l'apostolat?...
Nommer Saint P A U L , c'est rappeler le plus illustre triomphe et
le chef-d'uvre de la Grce Divine ; le Vaisseau de la plus
miraculeuse Election, le Temple du Saint-Esprit, l'Oracle de la
Vrit, l'Interprte des plus profonds desseins de la Divinit, et le
fidle Dpositaire de tous ses secrets j l'Instrument des plus
grandes merveilles, l'Aptre infatigable du Fils de Dieu,
l'Ambassadeur de la Nouvelle Alliance ; le Modle sublime des
pasteurs des peuples, particulirement celui des prdicateurs et de
tous les hommes apostoliques ; l e Fleuve de l'loquence divine,
l'minent Docteur des nations civilises et savantes. S. P A U L !
C'est le Tmoin par* excellence du Fils de Dieu ; non seulement l e
tmoin du Christ ressuscit, comme le furent les autres aptres, mais
principalement le tmoin du Christ-Jsus, glorieux et assis la droite
de la Toute-Puissante Majest. Le Christ, lorsqu'il tait dans la
gloire du Pre et qu'avec le P r e il rgnait magnifiquement au plus
haut des cieux, s'est fait voir lui, et lui a rvl les vrits qu'il a
enseignes la t e r r e . S. P A U L ! C'est celui qui a allum dans
le monde l'incendie de ce feu saev, que le Christ est venu jeter
sur la terre.1
II
Dvor du zle de la gloire du Sauveur, Paul n e pouvait contenir
son ardeur dans son me ; il n e pouvait la r e n fermer dans les
bornes trop troites des grandes villes de l'Asie ; il lui fallait
un thtre plus vaste ; p o u r la dployer librement, il lui fallait
un champ illimit ! C'est pourquoi le chef de l'Eglise, S. P i e r r
e , et les a u t r e s Aptres ses collgues, lui donnrent, de
Jrusalem, u n e vaste mission, une mission proportionne son
exceptionnelle vocation ; ils le lancrent comme u n lion dans le
camp ennemi de l'Idoltrie ; et ce Lion de la tribu de Benjamin p o
r t a la destruction et un ravage immense dans le Paganisme. Ils
l'envoyrent au sein de la Gentilit, depuis si longtemps glace p a r
les lments venimeux de l'erreur et p a r le froid de la mort. Cette
nouvelle carrire n'tait pas trop large pour une me si grande.
Semblable u n e t r o m p e t t e clatante, il fit entendre ses
cris puissants p a r toute la terre, et le son de sa voix retentit
jusqu'aux extrmits d e l'univers. A ces accents nouveaux, cette
parole de vie, les nations tout coup rveilles sortirent de leur
sommeil sculaire. A chaque pas du gant, parcourant le monde, c h a
c u n e de ses stations, la parole de vie ressuscitait u n e ville,
u n e p r o vince, une nation. Vainement, dans chaque peuple, le p
r i n cipe du pch et de la mort, l'Enfer, tonn d'un m o u v e ment
si inaccoutum, se lve-t-il pour anantir le principe de la justice
et de la vie : vainement suscite-t-il contre le Christ prch par
Paul, la rvolte de la magistrature paenne, les insurrections de la
multitude j en vain dploiet-il, au dfaut de la raison et de la
force morale, la p l u s brutale violence ; en vain appelle-t-il
son aide toutes l e s ressources de la philosophie humaine,
convoque-t-il toutes
ni
les forces des puissances sculires,, il faut que dans sa lutte
avec Paul il' succombe impuissant; il faut qu'il prisse couvert de
confusion et de h o n t e . Qui n'admirera l'immensit des succs du
grand Aptre, et l'clat de sa gloire ! Jamais capitaine, soit d a n
s l'Antiquit, soit aux ges modernes, a-t-il conquis son monarque
autant de p r o vinces, que Paul a soumis de peuples et de nations
l'ternel empire de J S U S , son Messie, son roi et son Dieu? Que
d'mes infidles ce h r o s vanglique a subjugues la foi I Que
d'intelligences gares ce Docteur des Gentils a ramenes dans a voie
de la vrit ! Que d'hommes engags dans le tnbreux sentier d e la
damnation, ce prdicateur du salut a remis dans le chemin de
l'immortalit ! Quelle gloire l'environnera au dernier iour quand,
la tte de tant
IV
s'tait engag envers J.-G. : J'ai pour vous, disait-il aux
Chrtiens de toutes ces nations, uni amour de jalousie, d'une
jalousie Epoux, de Dieu, car je vous ai fiancs a cet et unique
qui est le Christ, pour vous prsenter lui^ comme castam exhibere
au
une vierge toute pure. .iEmulor enim vos Dei semulatione.
Despondi enim vos uni viro virginem1
Christo . Qui n'envierait le bonheur d'tre prsent Christ p a r
la main d'un si illustre conducteur?
Que de couronnes diverses, dit le grand saint B a s i l e , lui
sont prpares par ceux qu'il a envoys au ciel, avant lui! Que de
nouveaux mrites se multiplient p o u r lui. Que de nouvelles palmes
lui sont rserves p a r tous c e u x qui, depuis tant de sicles,
sont entrs et e n t r e n t encore aujourd'hui dans la voie d e la
foi et de la vertu, clairs et attirs p a r la lumire que rpandent
en tout lieu, s e s admirables ptres ! Quel transport en ce jour-l,
quelle immense gloire p o u r lui et p o u r ses disciples!
L'Esprit-Saint, par la p l u m e des crivains Sacrs, .nous a
lui-mme trac, en grande partie, l'histoire de la vie d e saint
Paul. Nous ne pouvons qu'couter ce rcit divinement inspir. Nous n e
ferons qu'y ajouter les savantes explications des plus clbres
docteurs et interprtes, d e m m e q u e les traditions primitives,
qui e n feront le complment.1. 2,COR.XI,
3
3.
2. S. Basil. De Hrginitale.
HISTOIREDE
S A I N TLIVR.E
P A U LPREMIER
APOTRE DES GENTILS
DUCATION, CONVERSION & ORDINATION DE SAINT PAUL;CHAPITRE
I
Origine de saint Paul. Son ducation. Sa jeunesse. Ses noms. LE
grand Aptre S. P A U L , n o m m auparavant Satil^ tait Isralite,
de la tribu de Benjamin '. c'est pour cela que saint A u g u s t i
n , les P r e s et les autres docteurs de l'glise, lui appliquent
frquemment u n e prophtie du Patriarche Jacob, qui annonait les
ravages qu'il devait exercer d'abord dans l'glise du Christ, comme
perscuteur, et les conversions clatantes et sans n o m b r e qu'il
oprerait ensuite comme aptre au milieu de la Gentilit : Betijamin
est un loup ravissant^ QUI le matin dvorera sa proie, et le soir
partagera les dpouilles .x 3 3
Selon S. Ghrysostme, il naquit deux ans aprs NotreSeigneur, et
il vcut environ soixante-huit a n s . Son pre tait de la secte des
P h a r i s i e n s . Il avait une s u r et un n e v e u , Il donne
le n o m d e parents Andronique et Junias, Jason et Sosipatre '.
C'tait une parent natu4 s G
1. Rom. xi, 1. Philipp. in, S. 2. S. Aug. serni. 333, c. 3 . - 3
. Benjamin lupus tapax, man comedet prwdam, et vespere dividet
spolia (Gen. XLIX, 27). 4. S. CUrysost., (tom. vi, Boni. 30, p.
167. 5. Act xxiii, 6, Ift. 6. Idem, idem. 7. Rom,, xvi, 7. u,
21.
2
relie, selon les u n s ; spirituelle s e u l e m e n t , selon
d'autres. D'aprs le pape S. Zoziroe', la m r e de S. Paul se
nommaitThocvit.
Ses a n c t r e s , avant de se retirer T a r s e , en Cilicie,
demeuraient Gusch-Chaleb ou Gischala., situe dans les montagnes de
la Galile, et o se trouvaient les tombeaux de Semmaias et
d'Abatalion, ces deux clbres docteurs d'Isral, devanciers de Hillel
et d e G a m a l i e l . Ainsi, cet aptre serait aussi Gaiilen
d'origine; et la parole du p r o phte Isae serait de plus en plus
justifie : La Galile des2
Gentils,
le peuple qui habite sur les rivages uvu une grande
de (ti mer,
comme
au-a lu du Jourdain,
lumire *.
Aprs sa naissance, il fut circoncis * conformment aux
prescriptions de a Loi de Mose. Devenu habitant de T a r s e , en
Cilicie, il fut citoyen romain ; car l'Empereur Auguste avait
accord ce droit tous les habitants de Tarse, en considration de
leur attachement ses intrts. En eiet, p a r affection pour la
maison des Csars et pour honorer la mmoire de Jules-Csar, ils
avaient t jusqu' donner leur ville l n o m de Jnliopolis. Ils
avaient eu beaucoup h souffrir durant le temps que Cassius, l'un
des assassins d e Csar, tait matre de l'Asie, et ils avaient t
dpouills d e tous les biens qu'ils possdaient tant en commun qu'en
pari. Vide comm. de Pequigny, in B. Paul, p. 919., dit. Migne. 2.
S. Jrme, comment, in episl. adPhUemon : Aiunt parentes apostol *
Pauli de Gysealiri rcgione fuisse JuJos, et eos.... in Tharsum
Cilicist fuisse translatas, etc. (Voir Sepp, Vie de J.-. t. 1, p.
353 ; Platina, in vit- PP.). Dans son catalogue, S. Jrme dit encore
de S. Paul, qu'il tait de la tribu de Benjamin et de la, ville de
Giscala ; que cette ville ayant t prise par les P.omains, Cilicie
avec ses parents, c E* Toutefois, S. Paul nous dit lui-mme (Act.
xxn, v. 3), qu'il est n Tarse ' ce dont S. Jrme ne se souvenait
pas, lorsqu'il crivait ce passage. Nous voyons par l que c . t
aptre appartenait par ses anctres la ville de Giscala, i * en
Galile, et plus particulirement la tribu de Benjamin, trs
probablement, pare que sa famille habita successivement ces deux
montres, et que ses anctres en sortaient originairemenL 3. Isa, ix,
2. 4. Philipp. ni, 5. S. Act. xxi, iJ9.5
ticulier. Auguste se crut d o n c oblig de les ddommager de
leurs p e r t e s et d e les favoriser autant que Gassius les avait
maltraits. Il leur accorda, en consquence, des honneurs, des t e r
r e s , des privilges, et d'autres avantages considrables, parmi
lesquels tait le droit de colonie libre et de bourgeoisie romaine
*, Les p a r e n t s de Saul envoyrent de bonne heure leur fils
Jrusalem, p o u r y tudier la Loi aux pieds du clbre docteur
Gamaliel. Strabon ~ r e m a r q u e que les citoyens de Tarse
s'adonnaient avec u n e extrme avidit aux sciences et aux
Belles-Lettres, et qu'on en voyait un grand nombre sortir de leur
pays p o u r aller tudier ailleurs. S. Luc confirme ce point,
lorsqu'il rapporte au Livre des Actes , qu'il y avait un bon n o m
b r e de Juifs de Gilicie Jrusalem, o ils avaient m m e u n e
Svnaoo^ue. Saul vcut donc Jrusalem ds sa premire jeunesse ; il fit
d e trs-grands progrs dans ses tudes. Sa vie fut c o n s t a m m e
n t irrprochable aux veux des hommes II observait exactement toutes
les ordonnances d e la Loi de Mose, et dployait le plus grand zle
pour les faire observer II en p r e n d tmoin ses ennemis m m e s
II s'attacha particulirement la secte des Pharisiens la plus exacte
et la plus svre de toutes mai^ aussi la plus orgueilleuse et I i
plus oppose l'esprit de l'Evanouie II tait continuellement dans 1^
t e m p l e avec -Vbibas fils de Gamaliel Selon S Augustin il avait
alors l'clat et la blancheur de l i l a c 6 c o m m e il en avait
aussi le froid et la duret * c i r Dieu n e l'appelait pas e n c o
r e et ne rpandait pas encore clins son coeur la vivifiante c h i l
e u r de ^a grce " P o u r fiiro fondre cette ^dace il fallait q u
e Dieu envoyt sa et son feu cleste.3 1 s fT
Ce fut p e u t - t r e p e n d a n t ce temps-l qu'il apprit
faire1. Dio. !. 47, p. 342, 34b ; Appianus, De bellis civilibus, 1.
4, p. 320; Dio. Chrys. Orat. 31-, p. 320; Tillemont, Mm. t. i, p.
202; Spanli., 1.9,p, 783. 2. Srab. 1. i i , p. 673. 3. ct< vi,
9. -i. Idem, xxv, 4, S. Apud Lucian. De S. Sleph. c. 3, p. 6. 6.
Aug. tn Ps. 147. v. 17, p. 707.
4
des tentes
mtier qu'il exerait
mme
en
prchant
l'Evangile. Du moins il tait d'usage chez les Juifs de faire a p
p r e n d r e un mtier aux enfants, tandis qu'ils tudiaient les
Saintes Lettres, et cela pour deux raisons : 1 A p r e m i r e ,
afin qu'ils se prservassent des dangers de l'oisivet ; la d e u
xime, afin que leur corps fut, ainsi que leur esprit, occup quelque
chose de srieux. Nanmoins S. A u g u s t i n a cru qu'il n'avait
point t lev vivre du travail de ses mains, et qu'il n'apprit u n
mtier, que parce que c'tait u n moven d e s'exempter de recevoir sa
nourriture de ceux qui il prchait l'Evangile. Les Ebionites,
hrtiques des premiers t e m p s , r a p p o r t e n t plusieurs c h
o s e s , concernant la naissance de S. P a u l , son ducation et
sa conversion. Bien que le rcit de ces sectaires soit u n tmoignage
en faveur de la vrit de l'histoire de cet aptre, toutefois les
crivains chrtiens n e le font pas e n t r e r d a n s le corps de
leur narration. O r i g n e p e n s e que l'Aptre des Nations
portait, ds le commencement, ses deux noms de Saul et de Paul A p r
s qu'il se fut servi du premier, pendant qu'il vivait p a r m i les
Juifs, il prit l'autre, qui tait un nom romain, lorsqu'il et
annoncer l'vangile parmi les nations, c'est-dire parmi les Grecs et
les R-omains. Et, en effet, S. Luc c o m m e n c e lui donner le
nom de Paul, lorsqu'il prchait e n Chypre et lorsqu'il
convertissait le pz^oconsul Sergius P a u l u s . Ce qui appuie ce
sentiment, suivi plus c o m m u n m e n t p a r les auteurs
ecclsiastiques, c'est qu'on trouve dans les anciens manuscrits qui
taient entre les mains de S Chrysostme et du vnrable Bde, le n o m
de Paul l'endroit o il e^t dit que cet aptre voulait se joindre aux
disciples lorsqu'il vint Jrusalem, l'an 3 7 , trois ans aprs sa
conversion et quelque temps avant celle du Proconsul.4 3 3
I . APUD BARON, 52, N. 17. 2. AUJJ. inJoun. honi, 122, P . 229.
3 . A P . S. EPIPHAN. HT. 30, C. 16, P . 140. 4 . ORIG. in Rom. 4 ,
P . 458-
CHAPITRE
II
Saul, l'un des juges de S- Etienne- Il est le premier perscuteur
de l'Eglise. Il est le grand agitateur de Jrusalem infidle-
Saul s e distinguait alors au-dessus de ceux de son ge par son
zle p o u r la Loi Mosaque et pour les traditions judaques '. Ce
fut ce zle p e u clair qui fit de lui un b l a s phmateur, u n p e
r s c u t e u r et l'un des plus ardents ennemis de J - C . Il
faisait partie de ces Ciliciens et de ces Asiatiques qui, se
joignant aux Libertiniens, aux Alexandrins et aux Cyrnens,
s'levrent contre S. Etienne, et soutenaient des controverses
thologiques contre lui. Ces grandes associations, composes des
Juifs des diffrentes contres d e l'Univers, taient t r s - n o m b
r e u s e s , et occupaient J r u salem quatre c e n t
quatre-vingts synagogues ou chapelles, peu prs comme R o m e ,
chaque nation a son glise ou s a chapelle particulire. Saul s e
faisait donc remarquer parmi tous les jeunes docteurs qui
brillaient p a r leur loquence, p a r leur savoir, et p a r leur a
r d e u r dans ces diverses assembles religieuses. Il est certain
qu'il consentit la mort d'Etienne, qu'il fut prsent son excution,
et qu'il gardait les vtements de ceux qui le lapidrent. On ajoute
mme qu'il fut l'un des principaux a u t e u r s de sa mort. Saul
consentit son excution, dit l'criture. Or, q u e veulent dire ces
paroles * D'aprs S. J r m e , d'aprs d'autres interprtes, ? et
notamment le docteur S e p p , elles signifient qu'il avait vot
pour la condamnation de S. Etienne, et qu'il assista son supplice,
c o m m e commissaire du Sanhdrin, ou comme j u g e , excuteur des
sentences capitales du Grand-Tribunal. Aussi s'accuse-t-il plus t a
r d lui-mme de complicit dansJ. ACT- XXU, 3, CL GCTLCTL- I, 14. 2.
ACT- VI, 9.2
ce m e u r t r e . Les termes qu'il emploie sont remarquables et
confirment pleinement ce qui vient d'tre d i t i J'ai mis en prison
Jrusalem plusieurs des Saints, dit-il en parlant d u martyre de S.
Etienne et d'autres fidles de c e t t e poque, et lorsqu'on les
faisait mourir* j'ai donn mon suffrage, E T C U M '. C'est pour
Cela q u e les tmoins qui lapidrent Etienne, dposrent leurs
vtements ses pieds. C'tait une manire symbolique d'exprim e r que
c'tait de lui, comme reprsentant du Sanhdrin, qu'ils tenaient le
droit de le lapider en effet. 11 ne garda donc point les habits des
tmoins, comme on le croit ordinairement ; et pourquoi d'ailleurs
les aurait-il gards ? tait-ce pour empcher qu'on n e les drobt ?
L'excution s e faisait en public, et personne d'ailleurs ne pouvait
tre bien tent de voler les habits d'un bourreau. Ce rle d'ailleurs
serait peu di^ne d ' u n disciple des Sages. On dira peut-tre que
Saul est appel un jeune homme, aoeseens. Mais chez les Anciens, on
tait considr c o m m e adolescent ou j e u n e homme jusqu' trente
ans et plus. S c i p i o n , qui commandait les armes romaines, est
appel adolescent, l'ge de vingt-neuf ans. Saul pouvait donc tre
appel ainsi, lui, qui n'tait pas mari, qui n'tait encore que
disciple de Gamaliel, et qui sigeait, comme scribe ou docteur,
parmi les jeunes assesseurs du GrandConseil. C'est donc Saul qui
contribua le plus ardemment la mort du protomartyr Etienne, il le
lapida en quelque sorte, dit S. Augustin p a r l e s mains de tous
les bourreaux. Il entendit la prire que l e gnreux atlhlte d u
Christ fit pour ses perscuteurs, e t il s'en railla, quoiqu'elle e
u t pour principal objet s a conversion ; c a r sans la prire
d'Etienne, n o u s n'aurions pas eu l'aptre S. Paul.OCCIDERENTUR,
DETULI SENTENTIAM4 2 3
1- Dans le grec : XIXTSVSY** 4^i? ' Deluii calculum : J'ai donn
mon vote : ct- xiii, 10 2- Tite-Live 3- S- Aug- 5cmi 316, c 4.
ov
L'an 3 4 , aprs la mort de S. Etienne, il s'leva une grande p e
r s c u t i o n contre l'glise d e Jrusalem. Elle fut excite par
les prtres et les magistrats des Juifs, et Saul tait celui qui
montrait le plus d ' a c h a r n e m e n t perdre les disciples d e
Jsus-Christ et ravager l'glise. Son faux zle, comme il l'avoue
lui-mme, lui fit j o i n d r e la cruaut a l'ignorance et
l'infidlit, et le porta j u s q u ' la fureur. Il entrait dans les
maisons, il e n tirait de force les hommes et les femmes, il les
chargeait de chanes, et les jetait dans les prisons, usant du
pouvoir presque illimit qu'il avait reu des P o n tifes ~. Il
entrait galement d a n s toutes les synagogues, faisait b a t t r e
de vendes, tous c e u x qui croyaient en J s u s Christ, les
tranait en prison, et employait tous les tourments et les supplices
pour les forcer blasphmer le nom du Christ1
En u n mot, il n'y avait rien qu'il ne crut devoir faire contre
le n o m de Jsus-Christ. Le bruit des maux qu'il faisait souffrir
aux Saints dans Jrusalem, se rpandit jusque dans des villes
trs-loignes, o son nom inspirait de la terreur aux mes chrtiennes
les plus g n r e u s e s .s
C'est cette poque que plusieurs crivains ecclsiastiques
rapportent ce q u e dit S. P a u l d a n s l'ptre aux Hbreux* :
Rappelez vous, leur dit il, le premier temps dans lequel vous avez
t illumins pur le baptme i vous avez soutenu de grands combats, et
de grandes afflictions. Vous avez t les uns exposs devant tout le
inonde aux injures et aux lourt ment s ; les autres, vous avez t
les compagnons de ceux qui ont souffert de semblables indignits.
Car vous avez compati ceux qui taient dans les chanes, et vous avez
vu avec joie tous vos b:ens pilles, sachant que vous avez au dedans
d'aut trs biens plus excellents qui ni priront jamais." Les Fidles
p e r d i r e n t , e n effet, leurs b i e n s dans cette
perscution, tant ceux qu'ils possdaient en c o m m u n , que ceux
dont1. Act. VHI, 1 et seq. 2- Act. ix, i-2 3. Idem, vin, 3 ; xxn,
4; ix, 13-14. 4. Hebr. x, 32-34
("[UBlrfucs-utis n e s'taient pas encore dfaits. Le soin q u e
S. Paul prit plus tard de recueillir des aumnes pour l e s Chrtiens
de J r u s a l e m , montre assez . quel dnument ils avaient t
rduits. Cette fureur d e Saul poursuivre les premiers Chrtiens
confirme le trait traditionnel que n o u s avons plac au chapitre
IV de l'histoire de S. Jacques-le-Mineur. Cet Aptre avait par ses
prdications et par ses miracles amen la foi vanglique u n grand
nombre de p r t r e s juifs, et tait sur le point de convertir
J.-C. des personnages trs c o n sidrables de la Synagogue, avec u n
e g r a n d e partie du p e u ple de Jrusalem. C'tait avant le m a
r t y r e de S. Etienne. Lors donc que le Saint vque de Jrusalem et
les Aptres eurent parl d u r a n t sept jours devant le peuple et
les p o n tifes, avec u n tel succs, q u e tous se disposaient dj
recevoir le baptme du Messie, u n h o m m e ennemi, dit l'ancien
auteur des histoires apostoliques , entra alors d a n s le Temple
avec u n t r s petit n o m b r e de p e r s o n n e s , se m i t
crier et dire :1
0 Isralites, q u e faites-vous? Pourquoi vous laissez vous si
facilemeut sduire? Pourquoi vous livrez-vous si prcipitamment des
hommes m a l h e u r e u x , tromps p a r un magicien? Voyant que
tout le peuple entendait ses p a r o l e s , et q u e nanmoins
l'vque S. Jacques obtenait s u r lui l'avantage,, il se mit
troubler l'auditoire, exciter le tumulte et la sdition ; de sorte q
u e le peuple se trouva dans l'impossibilit absolue d'entendre les
paroles de l'Aptre. P a r ses" clam e u r s il jetait p a r t o u t
l'agitation, il renversait tout ce qui avait t dispos et mis en
ordre avec beaucoup de peine ; il accusait en m m e temps les
prtres. P a r ses reproches et p a r ses injures, il soulevait tout
le m o n d e . Et, semblable un h o m m e pris de frnsie, il
excitait tous les Juifs m e t t r e mort les Aptres :i. Aj)9$l.
hist' de Jacobo, fratrc Domini-
9
Que faites-vous, s'cria-t-U? que tardez-vous h o m mes lches et
sans c u r ? Pourquoi n e nous emparons nous pas de ces h o m m e s
et n e les mettons nous pas mort? Il dit ces m o t s , et le
premier il saisit sur l'autel u n tison ardent, et commena u n e
lutte sanglante. Aussitt, son exemple, les autres sont pris d'une
semblable fureur. T o u s jettent des c r i s , ceux qui t u e n t
et ceux qui sont tus ; le sang coule de toutes parts et la
multitude en dsordre prend la fuite. Profitant du trouble gnral,
cet homme ennemi attaque S. J a c q u e s , et le prcipite des
degrs du Temple. L e croyant t u , il n e cherche p a s exercer
davantage sa fureur contre l'Aptre. L'vque d e Jrusalem, dans sa
chute, fut bless la j a m b e , et d e m e u r a estropi et boiteux
(durant quelque temps). Or, l'on sait q u e cet h o m m e ennnemi
des Chrtiens est ce mme Saul, q u e plus t a r d le Seigneur
destina au ministre de l'apostolat. Des savants, comme Alting et
Westein, se demandent si Saul n'est p a s ce Samul-Cafow ou Le
Petit, clbre disciple de G-amaliel, qui, d'aprs le Taltntid, se
distingua p a r son zle contre les Chrtiens : - puis ils dcident
affirmativement cette question et ajoutent que ce nom de Paul,
Paulus, ou Paululus, contract d e Parvulus ou Pauculus, n'est que
la traduction du m o t h b r e u Caton, qui veut dire petit. Nous
voyons ailleurs q u e S. Paul tait de petite taille et qu'il
portait probablement ce s u r n o m avant sa conversion. S'il est
le Samuel-Caton dont parle le Taltnud, les Juifs le reprsentent
comme u n h o m m e trs-distingu parmi les Docteurs du Sanhdrin ;
Suivant les Hbreux, il composa avec l'aveu de Gamaliel, u n e prire
contre les Chrtiens, qui a t mise dans le Brviaire d e la
Synagogue, et il m o u rut sans enfants avant la ruine d u peuple
Juif .1
1. Voir Sepp, Vie de J>-C-, t. 2, p. 316.
10
Cet h o m m e extraordinaire, dou de la n a t u r e imptueuse de
Benjamin, son a n c t r e , lev ds sa jeunesse dans la science des
Paens et des Juifs, se croyant appel par son talent combattre la
doctrine du Messie et soutenir l'honn e u r du Mosasme avec toute
la puissance dont il pouvait disposer, ne se contentait pas de ses
menaces et de ses violences contre l'glise ; il n e respirait q u e
le meurtre des disciples du Seigneur, et il voulait tremper de plus
en plus dans leur sang ses mains dj teintes de celui d'Etienne. Il
vint demander au grand prtre Gaphe aux Pontifes et tout le Conseil
des Anciens, des lettres adresses aux juifs et aux Synagogues des
villes trangres et en particulier de Damas. Il obtint aisment les
pleins pouvoirs, pour arrter tous les Chrtiens qu'il y trouverait,
hommes et femmes, pour les amener Jrusalem, afin de les y faire
punir avec plus de libert, et d'intimider p a r la svrit de la
peine ceux qui seraient tents de les imiter. Mais qu'ils sont vains
les projets et les efforts des homm e s ! Dieu touch p a r les
prires S. Etienne et des autres Fidles perscuts, voulut manifester
dans Saul sa patience et sa misricorde. Il l'arrta dans le feu m m
e de sa passion et dans la plus grande imptuosit d e sa fureur
insense, afin d'en faire u n vase d'lection et de le transformer en
u n aptre intrpide, qui devait avancer l'uvre de l'Evangile, plus
qu'il n e l'avait retarde, et plus que ne l'avait fait prosprer S.
Etienne lui-mme.
C H A P I T R E
III
CONVERSION DE SAUL,
y 4 . Lors donc q u e Saul, accompagn de quelques satellites,
qui devaient l'aider saisir les Chrtiens et les traner Jrusalem,
arrivait au t e r m e de son voyage, et Qu'il approl. Act. ,
i-2
choit de Damas*, il vit tout-acoup, l'heure de midi, venir du
ciel une grande lumire, plus brillante crue le soleil ; elle
l'environna lui et ceux Qui l'accompagnaient. Ils virent tous cette
lumire et tombretit par terre, saisis de f r a y e u r . Dieu
voulut d'abord abattre l'orgueil et la fire obstination dont Saul
tait rempli, afin qu'il reut avec soumission et avec humilit les
ordres qu'il avait lui donner. Il le foudroya pour le sauver, dit
S. A u g u s t i n . Aprs qu,il et ainsi t terrass, il entendit une
voix Qui lui disait en langue hbraque :1 s
SauU Sal. pourquoi me perscutez-vous
?
S.- Chrysostme dit, que Dieu voulut que la lumire prcdt la voix,
afin que Saul frapp divinement par cette lumire si clatante, se
calmt u n peu dans sa fureur, et ft en tat d'couter ensuite la voix
avec plus de docilit. Et S. Ambroise le comparant dans l'garement
de son esprit a u n loup qui court au milieu des tnbres de la nuit,
dit qu'il ft comme aveugl p a r la lumire qu'il vit tout-coup
briller ses yeux. Il est remarquable que JsusChrist n e lui dit pas
: Croyez en moi, ou quelqu'au.tre chose de cette n a t u r e . Mais
il se contente de lui reprocher la perscution qu'il lui fait j et
il lui demande en quelque faon, dit S. Chrysostme , ce qui pouvait
le porter p e r scuter sa personne dans ses membres ; voulant
l'obliger par l faire rflexion sur l'injustice et la violence de sa
conduite..3 4
y 5. Il rpondit : Qui tes-vous, Seigneur ? Et le Seigneur lui
dit : Je suis Jsus que vous perscutez. regimber contre Vaiguillon.
Il vous est dur de
i. Act. ix, 3 ; Jbid- xxn, 6' 2. Aug. Serin l~o, c 6< 3. S-
Ambr. Dt benedict' Patriarch>c. ull. 4. S- Ghrys in Act. hom.
16, p. 181 ; S. Ang. in Ps. 30-
y 6. Alors tout tremblant et tout effray, il dit : Seigneur, que
voulez-vous que je fasse ? Voil donc ce loup dvorant chang
tout--coup en u n agneau. Ne connaissant point encore celui qui
parlait ; mais se sentant nanmoins abattu sous la puissance de
Dieu, il l'appelle Seigneur, et lui demande qui il est ; effray
d'entendre qu'il perscute celui dont la lumire brille ses y e u x ,
dont la voix retentit ses oreilles, lorsqu'il croit rendre un
trs-grand service Dieu en perscutant les Disciples de Jsus. Mais sa
frayeur fut extrme, lorque cette voix lui dit : Je suis Jsus de
Nazareth que vous perscutez. Selon S. Hilaire ~ et S. A u g u s t i
n il voyait en ce m o m e n t Jsus-Christ qui lui apparaissait en
personne. Ce sentiment, adopt par Calmet, est confirm p a r
l'criture. Car Ananie dira expressment, y. 17 : Mon frre Saul, le
Seigneur qui vous est apparu dans le chemin, m'a envoy pour vous
rendre la vue. Quand S. Barnabe aura conduit le nouveau converti
devant les Aptres, il leur racontera comment le Seigneur lui est
apparu sur la route, et au chap. x x n 14 Ananie lui dira Dieu vous
a prdestin pour connatre sa volont afin que vous voyiez le JUSTE
c'est--dire Jsus-Christ et que vous entendiez la parole de sa
bouche On m o n t r e aux de la Terre-Sainte le lieu o S Paul fut
renvers trois lieues de Damas vers le midi Et du t e m p s d e S Au
ustin il y avait u n e glise l'endroit o il fut converti Le Christ,
selon la rflexion de S. Chrysostme, n e dit pas Saul, qu'il tait
Jsus ressuscit d'entre les m o r t s ; qu'il tait Jsus assis la
droite d e Dieu le P r e . Il n e lui dit pas non plus, selon la r
e m a r q u e de S. Grgoire, qu'il tait le Verbe t e r n e l , n de
Dieu avant tous les sicles et le principe de toutes choses. Mais il
lui dclare qu'il estt 3