GEOPOLITIQUE ECS2 1 MODULE III – Thème 1 – CHAPITRE 3 Fiche 4. Approfondissement. L’Italie et l’Espagne L’Italie et l’Espagne, aux parcours européens pourtant différents, sont deux pays qui présentent des similitudes dans leur positionnement ce qui permet d’aborder ces deux pays selon des thématiques communes, même si les dynamiques sont très différentes. Un territoire à l’organisation duale L’Italie, comme l’Espagne, présente un territoire à l’organisation duale. A un nord développé et bien intégré, s’oppose un sud en retard (Mezzogiorno italien ; Estrémadure, Manche, Andalousie pour l’Espagne) qui bénéficie des fonds structurels européens. Les deux pays sont polarisés par une métropole de rang européen au nord (Milan, Barcelone), qui domine économiquement une capitale politique en position périphérique par rapport à la dorsale européenne : Rome et Madrid. Cette concurrence entre villes ajoutée aux inégalités régionales favorise le séparatisme dans les deux pays : § la Catalogne en Espagne est engagée dans un processus d’indépendance. Elle représente 19% du PIB (équivalent à celui de Madrid), et 17% des investissements étrangers pour 16% de la population mais dispose d’un avantage de localisation car elle est la porte d’entrée de la péninsule ibérique et la première destination touristique (Costa Brava). § Le Nord-Ouest italien (Piémont, Lombardie, Ligurie), connaît une autre forme de régionalisme qui ne se fonde pas sur une identité régionale préexistante comme en Catalogne mais sur une identité construite sur le décalage économique entre le Nord industriel (triangle Turin, Milan, Gênes) et le Sud en retard. Le Nord- Ouest représente ainsi 32% du PIB et 40% des exportations pour 26% de la population et 19% du territoire. La ligue du Nord, parti fondé en 1989 par Umberto Bossi, prône le fédéralisme pour affirmer l’identité de la Padanie, entité construite sur une base géographique (plaine du Pô) mais qui n’a aucune légitimité historique. C’est donc une construction politique très différente de la Catalogne qui est une communauté autonome reconnue par la constitution espagnole. Entre le Nord et le Sud, on trouve des régions qui connaissent un développement original fondé sur une industrie diversifiée. Des économies diversifiées qui s’insèrent différemment Avec 2 001 milliards de $ de PIB en 2019 pour l’Italie et 1 394 milliards de $ pour l’Espagne selon la Banque mondiale, les deux pays sont des puissances qui comptent à l’échelle européenne (rangs 4 et 5) et mondiale (rangs 8 et 13). L’Italie est membre du G20 et l’Espagne, qui y a longtemps revendiqué une place (car elle dispose d’une économie qui la place devant l’Australie, le Mexique ou la Turquie en valeur), a acquis le statut « d’invité permanent ». Les deux pays s’appuient sur une économie diversifiée et un modèle de développement atypique pour des pays anciennement industrialisés. Pour le comprendre, on peut évoquer deux exemples emblématiques, originaires de la partie intermédiaire dans les deux territoires, qui permettent aussi de différencier les deux pays : § La partie centrale de l’Italie, souvent évoquée comme une « Troisième Italie », se singularise par un développement économique fondé sur une mise en réseau de petites et moyennes entreprises à base familiale dans le cadre des « districts industriels », forme originale d’encadrement du développement à l’échelle locale. Elle consiste en la constitution de réseaux locaux, par agglomération de PME et de territoires sectoriellement spécialisées, qui permettent une forte souplesse et réactivité en concentrant savoir-faire, main d’oeuvre et circulation d’informations. Ce modèle a ensuite essaimé en Europe (Systèmes Productifs Locaux en France par exemple). Depuis les années 1980, la croissance industrielle italienne se concentre sur cette « Troisième Italie » (80% des emplois industriels créés) mais l’ouverture de l‘Europe à l’Est et la crise a fragilisé cette industrie spécialisée dans la confection, l’ameublement et la mécanique de précision. Le groupe Benetton est un bon exemple de cette réussite, mais aussi des limites de ce modèle : le groupe s’est retiré de la confection qui avait pourtant fait son succès pour se recentrer sur des investissements plus classiques (télécommunications, infrastructures), beaucoup moins pourvoyeurs d’emplois et de développement dans les territoires. Il reste de belles réussites (Beretta dans l’armement, Geox dans la confection). L’ouverture à l’Est, après avoir fragilisé ce modèle, donne de nouvelles perspectives aux entreprises italiennes qui déplacent leur activité vers la Slovénie voisine ou la Roumanie avec laquelle le pays entretient des liens culturels historiques (langues romanes proches). § Proche du modèle Benetton, la réussite du groupe galicien Inditex en Espagne permet d’identifier les stratégies communes (flexibilité, mise en réseau à l’échelle locale), et les différences (internationalisation plus affirmée en Espagne), entre les modèles de développement espagnol et italien. Fondé en 1985, le groupe Inditex trouve son origine dans une première boutique ouverte en 1975 à La Corogne : Zara. Profitant de l’appui des collectivités territoriales espagnoles très investies dans la lutte contre la crise de la pêche dans cette région, puis des financements de l’Europe à l’entrée de l’Espagne dans la CEE, le groupe développe un