Jocelyn Céraline [email protected] UdS/Faculté de Médecine/EA 4438 Service d’Hématologie et d’Oncologie - HUS Gènes, environnement et cancérogenèse
Jan 18, 2016
Jocelyn Cé[email protected]
UdS/Faculté de Médecine/EA 4438Service d’Hématologie et d’Oncologie - HUS
Gènes, environnement et cancérogenèse
Environnement et Cancer
Le cancer est une maladie caractérisée par une prolifération importante et anarchique de cellules anormales qui ont la capacité d’envahir et de détruire les tissus sains, et de se disséminer dans l’organisme.
Les différentes étapes de la carcinogenèse peuvent être initiées ou favorisées :
- par des altérations génétiques acquises ou héritées- par un polymorphisme- par facteurs endogènes (hormones, système immunitaire)- ou par des facteurs exogènes appelés facteurs
environnementaux.
Il existe de grandes variations de l’incidence des cancers parmi les différentes populations vivant dans différentes régions du globe.
Exemple de la 1ère génération d’immigrants japonais vivant à São Paulo
Les incidences de certains cancers sont complètement différentes de celles de la population japonaise, et sont plus proches de celles de la population brésilienne.
Etude comparative de l’incidence de cancers chez des jumeaux homozygotes et hémizygotes
Possibilité de dissocier les facteurs familiaux héréditaires, des facteurs environnementaux.
Ces observations montrent que les facteurs environnementaux sont la principale cause de survenue des cancers sporadiques.
Environnement et Cancer
Les facteurs environnementaux regroupent tous les facteurs de risque qui ne sont pas endogènes ou propres à l’individu comme les mutations acquises, les facteurs héréditaires ou le polymorphisme.
Définition anglo-saxonne de la notion d’environnement
- expositions professionnelles
- expositions à des agents génotoxiques avérés
- reproduction
- style de vie (régime alimentaire, stress….)
- anthropométrie…
Les facteurs environnementaux
Facteurs environnementauxLes polluants
De nombreuses études épidémiologiques ont montré le rôle de certains facteurs dans le développement de cancers.
Ces substances sont appelées xénobiotiques.
L’exposition peut se faire en milieu professionnel ou dans un environnement contaminé ou pollué par ingestion, inhalation, irradiation ou par voie transdermique.
Les polluants physico-chimiques sont classés selon leur structure ou selon leur mode d’action probable.
Classification des polluants
Structure-hydrocarbures aromatiques (benzo(a)pyrène)-organochlorés et organobromés (pesticides, dioxines, PCB)-amines aromatiques-organophosphorés-nitrosamines-fibres (amiante)-métaux lourds-toxines-rayonnement ionisant et non ionisant
Mode d’action-génotoxiques-non génotoxiques-perturbateurs endocriniens-perturbateurs enzymatiques-perturbateurs cellulaires (oestrogéno-mimétiques)-polluants provoquant un stress cellulaire (stress oxydant, inflammation).
Que sait-on des facteurs favorisants ?
Que sait-on des facteurs favorisants ?
Que sait-on des facteurs favorisants ?
Cancer et environnement
Facteurs environnementaux associés à certains cancers (1)
Facteurs environnementaux associés à certains cancers (2)
Le cancer du testicule (CT)
• Cancer rare : 3 à 12 /100 000 en France
• Cancer le plus fréquent chez l’homme jeune (20-35 ans)
• Les principaux facteurs de risque :
- Cryptorchidisme : 1O % des CT, risque x35/population générale
- Dysgénie et atrophie testiculaire
- Hypospadia
- Oligospermie
Facteurs environnementaux associés à certains cancers (3)
Origines fœtales de l’altération des fonctions de reproduction masculine
D’après Sharpe RM, Best Practice & Research Clinical Endocrinology & Metabolism, Vol. 20, No. 1, pp. 91–110, 2006
Régulation hormonale de la masculinisation
Notions importantes :
Il y a une fenêtre d’action de ces hormones au cours du développement embryonnaire.
Les perturbateurs endocriniens peuvent déclencher une réponse hormonale inappropriée dans le temps et dans l’espace.
Augmentation incidence du cancer du testicule
Facteurs environnementaux et susceptibilités génétiques aux cancers
Ces facteurs environnementaux et le mode de vie joueraient un
rôle plus important que l’héritage génétique dans le développement
des cancers.
L’impact de ces facteurs varie d’un individu à l’autre en fonction
d’un profil génomique qui le rend plus ou moins susceptible à ces
facteurs et par conséquence au cancer.
L’influence de ces substance xénobiotiques s’exerce via des mécanismes génétiques
Ces substances n’ont pas d’effet cancérogène direct
C’est au cours des étapes de leur métabolisme qu’apparaissent des métabolites réactifs susceptibles de léser l’ADN
Des gènes codant les enzymes impliquées dans le métabolisme des xénobiotiques sont polymorphes
Ces polymorphismes peuvent être associés à des activités enzymatiques variables.
Facteurs environnementaux et susceptibilités génétiques aux cancers
Processus de détoxification
Les systèmes de détoxication assurent une biotransformation des substances étrangères pour diminuer leur lipophilie, augmenter leur polarité et favoriser leur élimination.
Cellule (hépatocyte)
X X XOR
ROHPhase II
XOR
Phase III
Elimination
: expulsion du xénobiotique inchangé ou conjugué
Phase I: fonctionnalisation
Phase II: conjugaison (+ hydrophile)
Phase III: expulsion de conjugués ou du produit parent (ex: mdr, MRP)
XOH
Phase IO 2
MonooxygénasesP450
Ex: GST
Cellule (hépatocyte)Cellule (hépatocyte)
X XX XOR
ROHPhase II
XOR
ROHPhase II
ROHPhase II
XOR
Phase III
XOR
Phase III
EliminationElimination
: expulsion du xénobiotique inchangé ou conjugué
Phase I: fonctionnalisation
Phase II: conjugaison (+ hydrophile)
Phase III: expulsion de conjugués ou du produit parent (ex: mdr, MRP)
: expulsion du xénobiotique inchangé ou conjugué
Phase I: fonctionnalisation
Phase II: conjugaison (+ hydrophile)
Phase III: expulsion de conjugués ou du produit parent (ex: mdr, MRP)
Phase I: fonctionnalisation
Phase II: conjugaison (+ hydrophile)
Phase III: expulsion de conjugués ou du produit parent (ex: mdr, MRP)
XOH
Phase IO 2
XOH
Phase IO 2
Phase IO 2
MonooxygénasesP450
Ex: GST
Etape de fonctionnalisation
Les enzymes de phase I (dites de "fonctionnalisation") induisent l’introduction d’une fonction chimique nouvelle qui rend la molécule plus polaire.
=> ex : monooxygénation d’une chaîne aliphatique ou aromatique catalysée par des enzymes de la famille du cytochrome p450 :
NADPH + H+ + O2 + RH NADP+ + H2O + R-OH
les enzymes de phase II (dites de "conjugaison") permettent le transfert d’un radical hydrophile sur les métabolites " fonctionnalisés" générés par la phase I, pour les rendre hydrophiles
– UDP-glucuronyltransférases – Sulfotransférases– Glutathion S transférases – Acétyltransférases
les enzymes de phase III (dites d’"élimination") permettent l’exportation active des conjugués de la phase II hors des cellules (Multi drug resistance 1, MDR1).
Etape de conjugaison
Face à une exposition donnée, le risque de développer un cancer ou toute autre maladie multifactorielle varie largement d’un individu à l’autre
Cette variabilité inter-individuelle peut être, en partie, attribuée à des variations nucléotidiques
Il s’agit soit de répétitions de courtes séquences d’ADN (dinucléotide ou trinucléotide) ou de SNP pour Single Nucleotide Polymorphism
Les SNPs sont des variations de séquence de l’ADN suite à un changement d’une base
Exemple : AAGGCTAA to ATGGCTAA
Polymorphismes
Pour qu’une variation nucléotidique soit appelée SNP, elle doit concernée au moins 1% de la population étudiée.
Les SNPs comptent pour environ 90% des variations génétiques chez l’homme.
Les SNP sont abondamment répartis le long du génome, à une fréquence d’environ 1 pour 1 000 paires de bases.
Les SNPs sont donc responsables de polymorphismes génétiques.
Les SNPs (snips)
La plupart de ces polymorphismes sont « muets »
=> Pas de conséquences sur les fonctions cellulaires
Certains polymorphismes peuvent toucher des gènes que l'on sait, ou que l'on suppose, être impliqués dans la cancérogenèse
Les polymorphismes peuvent ainsi jouer un rôle dans :
- la prédisposition aux cancers
- la progression tumorale
- la réponse aux agents thérapeutiques.
Conséquences fonctionnelles des polymorphismes génétiques
Les gènes impliqués dans le contrôle de la croissance à l’échelle cellulaire
- cycline D1, p16INK4a, p21Cip1, c-myc, p53…
Polymorphismes touchant les facteurs impliqués dans l’invasion tumorale et la progression métastatique
- TNF- (tumor necrosis factor-), IL-6, IL-10, VEGF, cadhérine E…
Polymorphismes de gènes impliqués dans la cancérogenèse
Polymorphismes affectant les stimuli hormonaux
- Enzymes impliquées dans la biosynthèse d’hormones
- 5-reductase-2 (SRD5A2), Cytochrome p450c17a (CYP17)…
→ stimulation hormonale augmentée > + grande susceptibilité aux cancers.
- Hormones et Récepteurs d’hormones
- Récepteur des androgènes, récepteur de la vitamine D…
Polymorphismes affectant les fonctions d’enzymes de détoxification
- Mono-oxygénases à cytochrome 450 (CYP…)
- Transférases de conjugaison (glutathion-S-transférase…)
→ métabolites intermédiaires cancérigènes.
Polymorphismes affectant les fonctions de réparation de l’ADN
- Réparation des mésappariements (hMSH2, human MutS homolog-2)
- Réparation par excision de nucléotides (XPD, Xeroderma pigmentosum group D).
→ mutagenèse augmentée.
=> + grande susceptibilité aux cancers.
Polymorphismes de gènes impliqués dans la cancérogenèse
La diminution du nombre de glutamine conduit à une augmentation de l’activité transcriptionnelle du RA
=> Augmentation du risque de cancer de la prostate
Les populations à forte incidence du cancer de la prostate présentent en général une diminution du nombre de glutamines par rapport aux populations à faible risque.
1 919
DBDAF-1 LBD/AF-2
(Q)9-39 (G)
Protéine RA COOHNH2 -
-14 27
Polymorphisme du récepteur des androgènes et
cancer de la prostate
Polymorphisme au niveau de la 5-réductase-2 (SDR5A2)
Testostérone Dihydrotestostérone (DHT)
5-réductase
Répétitions de (TA) → entraînent une stabilisation de l’ARN messager de
SDR5A2 => augmentation de l’expression du gène
→ retrouvées au niveau des populations à haut risque de cancer de la prostate.
Dinucléotide (TA) au niveau de la séquence 3’ non traduite de SDR5A2
5’P - - 3’OHATG Stop
Région 5’ non traduite
Région 3’non traduite
(TA)1, 9 ou 18
ARN messager de SDR5A2
Polymorphismes affectant les fonctions de détoxification et cancer de la prostate
CYP3A4
Stéroïde hydroxylase (enzyme de phase I)
Expression : foie principalement et estomac, colon, glande mammaire et prostate secondairement
Implication dans le métabolisme de plus de 50% des drogues prescrites
Métabolisme et activation de carcinogènes exogènes
Désactivation oxydative de la testostérone
Testostérone DHT5-Réductase
ActiveProduits d’oxydationInactifs
CYP3A4
Polymorphismes de CYP3A4
Polymorphisme au niveau de CYP3A4
Gène localisé en 7q21-3
13 exons protéine membranaire de 57 kDa
78 variations de séquences décrites
Certaines variations de séquences peuvent conduire à une réduction de l’oxydation de la testostérone, conduisant à une plus grande biodisponibilité en DHT.
Testostérone DHT5-Réductase
Active
Produits d’oxydationInactifs
Polymorphismes CYP3A4
Diminution de l’activité enzymatique
Exemple du gène GSTP1 (codant pour une enzyme de phase II)
Allèle Ile105Val de la GSTP1
L’activité enzymatique du variant Val105 est 5 fois plus grande que celle du variant Ile pour la détoxification de certains carcinogènes.
Les fumeurs exprimant le variant Ile/Ile pourrait avoir un risque de cancer augmenté.
Polymorphismes de gènes impliqués dans le métabolisme des carcinogènes
Augmentation de l’activité enzymatique
- allèle NAT1 ou NAT2 et phénotype «higher acetylator » pour la N-
acétyl- transférase 1 ou 2
Enzyme de phase II conversion des arylamines
hétérocycliques en ions nitrenium électrophiles, R2N: +, hautement
carcinogènes.
Association entre phénotype «higher acetylator » et cancer de
la prostate chez les fumeurs (OR = 3.43, 95% CI : 1.68-7.02, P-value
< 0.001).
Polymorphismes de gènes impliqués dans le métabolisme des carcinogènes
Conclusion
Polymorphismes
Interactions Gènes-environnement
Cellule transformée
Altérations génétiques
Modifications épigénétiques
EnvironnementT
ransformation
Cellule normale