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initiale d'au moins 5 ans et prennent la forme d'obligations ou de BMTN (bons à
moyen terme négociables). Si la dette fait l'objet d'une émission publique, elle
s'accompagne d'un "prospectus" visé par l'autorité de marché, donnant les
caractéristiques techniques et juridiques du contrat de dette. La dette est mise sur
le marché par l'intermédiaire d'une banque introductrice (avec ou non garantie de
placement) et il est désigné un représentant des créanciers obligataires qui est
chargé de défendre leurs intérêts en s'assurant que les termes du contrat sont
respectés par l'émetteur (ou en approuvant les modifications) et d'agir pour leur
compte en cas de défaut. Ce "représentant de la masse obligataire" a un droit
d'information et assiste aux AG.
Surtout lorsqu'il prévoit des garanties (collatéralisation d'actifs de l'entreprise),
le contrat de dette doit préciser le rang des créanciers. En effet, tous les créanciers
de l'entreprise sont potentiellement en conflit sur la répartition des flux et le seront
effectivement en cas de défaut puisqu'ils devront alors se partager le produit de la
liquidation des actifs. Dans chaque pays, le droit de la faillite définit des priorités
et fixe les règles de partage des actifs liquidés : les dettes fiscales et sociales
viennent généralement en premier, ainsi que les dettes à l'égard des salariés. Les
créanciers non privilégiés sont a priori équivalents et leur hiérarchisation n'est pas
du domaine du droit mais du domaine des contrats. Ceux-ci distinguent deux
types de dettes : les dettes "senior" dont le paiement est prioritaire et les dettes
"junior" (on dit aussi "equity" ou dette subordonnée) dont le remboursement passe
après (ce qui est rémunéré par une prime de risque). Entre les deux, toute une
gradation est possible. Le contrat de dette doit donc préciser le "rang de séniorité"
des créanciers concernés.
Les principales caractéristiques d'une dette concernent a) son émission, b) son
remboursement, et c) les intérêts.
a) Emission
La première caractéristique est la valeur nominale (valeur de remboursement).
Il faut préciser la date de jouissance (habituellement date de règlement par
l'investisseur) et la date d'échéance.
Par exemple, le 1er septembre, on annonce une émission de 100 mions à 10 ans en parts de 5000, date de règlement 21 septembre 2011, échéance 21 septembre 2021.
Si la dette est émise sur un marché, son prix de marché initial correspondra à la
valeur nominale si les conditions de marché ont été correctement anticipées ou
sera inférieur (décote) ou supérieur (surcote) à cette valeur selon que la demande
sera, respectivement, inférieure ou supérieure aux prévisions.
L'attractivité de la dette peut être renforcée au moyen d'une prime d'émission
ou d'une prime de remboursement : s'il y a une prime d'émission, le titre est
émis au-dessous du pair ; symétriquement, s'il y a une prime de remboursement, le
remboursement se fera au-dessus du pair.
- soit une prime d'émission de 0,5% : le prêteur paye 99,5% de la valeur nominale au lieu de 100%. Avec notre obligation à 5000, il paye 0,995 5000=4975 un titre qui
Dans les crédits bancaires, les flux annuels (ou mensuels) réglés par
l'emprunteur sont constants et incluent habituellement, à chaque période, une
proportion décroissante d'intérêts et une proportion croissante de remboursement.
Pour notre titre de 5000 à 10 ans, si l'amortissement est constant et commence dès la 1ère année, 5000/10 donne un remboursement de 500 chaque année. Dans ce cas, les intérêts courent sur 5000 la 1ère année, 4500 la 2ème etc.).
Le premier flux est donc de 500+0,05 5000=750.
Le second 500 + 0,05 4500= 725
Autre cas : si le remboursement est prévu par annuité constante à partir de la 6ème année, il est de 1000 par ans. Les 5 premiers flux sont des paiements d'intérêt sur toute la somme due et les intérêts diminuent à partir de la 7ème année.
L'avantage de l'amortissement pour le prêteur est que son exposition au risque
de crédit diminue avec le temps (alors qu'il est totalement exposé lorsque le
remboursement est in fine). La conséquence est un taux d'intérêt inférieur puisque
le risque est plus faible.
c) Intérêts : taux du coupon et modalités de paiement
Le "coupon" est le montant périodique des intérêts. Cette dénomination vient
de l'époque où les obligations avaient la forme de documents papier imprimés sur
lesquels figuraient des vignettes à détacher à chaque date de paiement des intérêts.
Le paiement du coupon est généralement annuel mais peut être semestriel,
trimestriel, voire mensuel.
Dans le cas d'un titre coupon zéro, aucun coupon périodique n'est payé : les
intérêts annuels sont capitalisés et payés en un seul flux, soit à l'échéance, avec le
remboursement, (intérêts postcomptés), soit, plus rarement, à l'émission, sous la
forme d'une décote (intérêts précomptés).
Pour un titre de valeur nominale 100 à 5% sur 5 ans, le flux final sera de 127,63, correspondant au remboursement + les intérêts de la 1ère année capitalisés pendant 4 ans + les intérêts de la 2ème année capitalisés pendant 3 ans + etc.
Dans l'autre sens (intérêts précomptés), le montant à payer en t0 est celui qui, au taux d'intérêt convenu 5%, correspond à un paiement à l'échéance de 100 (principal et intérêts), soit 100/1,2763=78,35. L'investisseur paye 78,35 un titre de valeur nominale 100 qui lui sera remboursé 100 à l'échéance.
Le taux d'intérêt (taux du coupon) peut être fixe, variable, révisable ou indexé :
- taux fixe (TF), c'est le cas standard : le montant du coupon est fixé à l'avance,
c'est le taux d'intérêt contractuel multiplié par la valeur nominale du titre. Si un
emprunt de 100 millions à 5% est fragmenté en parts de 5000, chaque titre reçoit
un coupon annuel de 5000 0,05=250. Le montant total des intérêts annuels dûs
par l'emprunteur est évidemment 100m 0,05=5 millions.
- taux variable (TV) : les intérêts dûs sont périodiquement calculés à partir
d'un taux de référence de marché (généralement un taux monétaire comme le
LIBOR) auquel s'ajoute une prime fixe. Le TV est favorable à l'emprunteur quand
les taux du marché baissent et au prêteur quand ils montent. Des couvertures
peuvent alors être nécessaires (swaps ou dérivés de taux).
LIBOR 3 mois + 200 bp sur une base annuelle. Les intérêts de l'année écoulée sont
calculés en faisant la moyenne du LIBOR en fin de journée au cours de la période écoulée, auquel on ajoute 200 points de base (2%).
Soit 4,27% pour la moyenne du LIBOR + 2,00% de prime, le taux est 6,27% qu'on applique à la valeur nominale (0,0627 5000=313,50).
- taux révisable : à tel moment, ou pendant telle période, ou si tel événement
survient, le taux peut être modifié à l'initiative de l'emprunteur ou à l'initiative du
prêteur selon des modalités convenues à l'avance. Pour notre obligation 5000/5%/10 ans, à chaque anniversaire de l'obligation, si le
taux d'intérêt à 10 ans du marché, s'établit 100 points de base (1%) au-dessus (au-dessous) de celui de l'année précédente, le taux d'intérêt pour l'année à venir est majoré (minoré) de 50 bp par l'emprunteur. Un tel contrat diminue le risque de taux (la différence entre le taux fixe et le taux de marché).
- taux indexé : c'est un TV qui n'est pas calculé à partir d'un taux d'intérêt de
référence mais d'une autre variable pertinente, par exemple, le taux d'inflation.
Les obligations indexées sur l'inflation (à ce jour, émises principalement par des
emprunteurs publics) assurent un taux d'intérêt réel fixe en payant un intérêt
nominal selon une formule du type x% (fixe) + taux d'inflation moyen de l'année.
N'importe quelle indexation est possible, dès lors qu'elle est acceptée, par
exemple, les intérêts dûs sur les crédits immobiliers peuvent être indexés sur un
indice des prix immobiliers.
1.3. Clauses spéciales
Ces clauses ont pour effet de donner à la dette certaines caractéristiques des
actions, soit en termes de droits de contrôle (clauses de sauvegarde), soit en
termes financiers.
a) Clauses de sauvegarde
Lors d'un endettement, les créanciers peuvent exiger des clauses de sauvegarde
contractuelles (covenants) qui interdisent ou punissent des comportements
contraires à leurs intérêts.
Créanciers et actionnaires se partagent les flux de trésorerie générés par
l'entreprise (et, en cas de liquidation, les actifs) : les engagements de l'entreprise à
l'égard des créanciers sont prioritaires par rapport aux droits des actionnaires.
Ceux-ci ou les dirigeants qui les représentent peuvent alors être tentés par des
actions frauduleuses (dilapidation des actifs sous forme de dividendes exagérés)
ou imprudentes (endettement excessif et/ou stratégies à haut risque). Les
covenants permettent de surveiller ce "risque moral" (moral hazard). Aussi fixent-
ils souvent des limites à certains ratios financiers (notamment les ratios
d'endettement : dette/EBE ou dette/EBITDA, dette/cash flow consolidé, ratio de
couverture des frais financiers...).
Le non respect de ces clauses est sanctionné par une renégociation coûteuse et
conditionnelle (waiver), des suppléments d'intérêts, voire, en cas de désaccord,
l'exigibilité immédiate de la totalité de la créance.
Ces clauses protègent les créanciers au détriment des actionnaires. Néanmoins,
ceux-ci les acceptent car, en diminuant le risque des créanciers, elles réduisent le
Outre les engagements "de faire" (comme informer les créanciers des décisions
ou événements importants) et de "ne pas faire" (comme ne pas dépasser les
valeurs limites des ratios financiers), les covenants comportent fréquemment deux
clauses standard :
- la clause pari passu (égalité de traitement des créanciers) : si, dans l'avenir,
l'entreprise octroie des garanties supplémentaires à d'autres créanciers de même
rang, elle s'engage à en faire bénéficier les premiers ;
- la clause de cross default (égalité de traitement des créances) : si l'entreprise
fait défaut sur une autre dette, la présente créance deviendra immédiatement
exigible.
Ces covenants peuvent avoir des effets dangereux : lorsqu'ils ont été négociés
dans des périodes d'expansion sur la base de projections en hausse du chiffre
d'affaires, du résultat d'exploitation ou de la capitalisation boursière, ils prennent
l'entreprise au piège si la situation se retourne.
Le cas typique en 2009 a été celui de Lafarge (ci-dessous) mais, avec la crise,
peu d'entreprises respectaient leurs covenants (selon Bucephale Finance) et les
dérogations obtenues après renégociation leur ont coûté en moyenne 300bp
d'intérêt supplémentaire.
Le cas Lafarge (d'après les articles de Les Echos au 1er sem. 09) Lafarge, avec un endettement net déjà important, s'était lourdement endetté pour
racheter Orascom en Décembre 2007 et devenir ainsi le n°1 mondial de son secteur,
avec le soutien enthousiaste des investisseurs. L'endettement net atteignait alors 17mm pour 7mm de capitaux propres (243%).
Les 7 mm de dette Orascom auprès d'un consortium bancaire venaient à échéance par tranches : 1,8mm en 2008 ; 2,3 en 2009 ; 3,1 en 2012.
Mais la dégradation de son marché faisait buter l'entreprise sur une clause de sauvegarde qui rendait la dette Orascom immédiatement exigible si le ratio endettement net/EBITDA passait au-dessus de 3,75.
En réduisant les dividendes de 400m, en lançant un plan interne d'économies de 600m et en empruntant 1000m pour régler l'échéance de juin de la dette Orascom,
Lafarge serait arrivé péniblement à un ratio de 3,72 (hors cessions à effectuer dans le futur pour 1000m). Dès janvier 2009, la note de Lafarge est dégradée à BBB-, dernier stade avant la catégorie "spéculative" qui renchérirait outrageusement l'endettement et, dans les conditions troublées de cet hiver, la prime sur son CDS était multipliée par 6.
L'alternative était : renégocier la clause de sauvegarde ou faire une augmentation de capital. Pour obtenir une dérogation au covenant ("waiver"), l'entreprise aurait dû accepter une majoration d'intérêt et la suppression des dividendes aux actionnaires.
Cependant l'augmentation de capital n'était pas souhaitée par les actionnaires de
référence qui ne voulaient pas être dilués (Bruxelles-Lambert et NNS Holding représentant le tiers des droits de vote). Ils ont dû néanmoins y consentir et, en avril, Lafarge a procédé à une augmentation de capital de 1,5mm (pour une capitalisation boursière de 7mm) avec DPS aux anciens actionnaires et garantie de placement. Pour cela, il lui a fallu consentir à une décote de près de 50% par rapport au cours de bourse, compte tenu de la volatilité du marché. A ce prix, la société réduit son endettement, préserve sa note BBB- et respecte le ratio de 3,75.
b) Les financements structurés
Envisageons d'abord un cas simple, celui des obligations dont le
remboursement n'est pas automatiquement en cash mais peut se faire en actions :
le créancier est alors un actionnaire potentiel de l'entreprise. Une telle Obligation
peut être (totalement ou partiellement) Convertible En Actions Nouvelles
(augmentation de capital) ou Existantes (OCEANE), le taux de conversion étant
fixé à l'émission. Cela revient à accorder aux créanciers un call sur les actions de
l'entreprise dont le prix d'exercice est déterminé par le rapport entre la valeur
nominale et taux de conversion. Par contre, si l'action ne progresse pas ou baisse,
le créancier est protégé puisqu'il sera remboursé à la valeur nominale.
Pour notre titre de dette de valeur nominale 5000, supposons un taux de conversion de10 actions pour une obligation.
Le prix d'exercice est déterminé par le taux de conversion, ici : 5000/10=500. Si, quand le droit à conversion est ouvert, l'action cote 550, il est intéressant pour les
créanciers de convertir : ils payent 500 ce qui vaut 550 sur le marché.
Si cette faculté de conversion n'est ouverte qu'à l'échéance, l'obligation est
remboursable en actions (ORA) à un taux de conversion déterminé. Le résultat
final dépendant de l'évolution de l'action, de telles obligations se comportent, sur
les marchés, comme les actions sous-jacentes. La seule différence pour
l'investisseur est que, pendant leur durée, elles rapportent des intérêts contractuels,
ce qui en fait partiellement un produit de taux. L'ORA est un hybride qui tient
davantage de l'action que de l'obligation.
Au moment de l'émission d'une dette à 10 ans de nominal 5000, l'action vaut 300 et le taux de conversion fixé pour le remboursement est de 8,5 actions pour une obligation.
Le point mort est : 5000/8,5=588.
La perspective de conversion est attractive si l'on anticipe à l'échéance une valeur de l'action suffisamment supérieure à 588.
Si le taux de progression attendu pour les 10 prochaines années est de 8%, la valeur par action à l'échéance est attendue autour de 650. En convertissant 5000 de dette en 8,5 actions, on obtiendra 5525. On peut donc espérer un gain de 525 n.
Une variante est constituée par l'obligation remboursable en cash mais
accompagnée de bons de souscription d'actions (OBSA) : à telle date ou à telle
période ou à l'échéance, les investisseurs peuvent exercer un call sur les actions de
l'entreprises, en payant les actions au prix garanti (et non plus en convertissant
leur créance en actions). Cet avantage accordé aux souscripteurs se paie par un
taux d'intérêt moindre. Comme l'ORA, une telle obligation est un hybride mais
elle tient davantage de l'obligation que de l'action.
Plus généralement, on parle de financement "structuré" (ou "produit structuré")
dès lors que les conditions résultent d'une "formule", d'une règle de calcul (plus ou
moins complexe) reposant sur des éventualités : les effets ne sont connus qu'a
posteriori ...et ils sont parfois ravageurs, pour l'emprunteur (ou pour le prêteur
final).
Même les crédits classiques des banques de détail aux petites et moyennes
entreprises ont fait l'objet ces dernières années d'innovations qui n'ont pas toujours
été favorables aux emprunteurs appâtés par l'espoir, ou parfois la promesse, d'un
endettement moins cher. Le crédit inclut une ou plusieurs options qui impliquent,
en cas de franchissement du seuil par le sous-jacent, des pertes importantes sur
l'option. Ainsi, la minoration initiale des taux expose l'emprunteur à un important
Les taux variables ont des effets "toxiques" pour les emprunteurs lorsque les
taux montent, ce qu'ils essaient de limiter en "capant" leur taux (de fait, une
première modalité de structuration). Dès la fin des 90', les banques ont offert des
"taux fixes à barrière" qui ont des effets plus incertains : le taux est fixe et moins
élevé que les taux fixes classiques tant que le taux de référence (Euribor, Libor)
ne dépasse pas une barrière consistant en un taux déterminé.
Avec un taux fixe classique à 5%, le taux du crédit est fixé à 4% tant que l'Euribor ne dépasse pas 2%. Si la barrière est franchie, le taux passe au-dessus ou très au-dessus du taux classique.
Avec les "produits de pente", le taux est fonction de l'écart entre les taux
courts et les taux longs. Le taux du crédit est faible tant que l'écart entre le taux
fixe long et le taux fixe court est inférieur à un certain seuil et il devient très
nettement supérieur s'il dépasse ce seuil.
Par exemple : le taux du crédit est limité à 2,5% tant que l'écart entre le taux fixe à 10
ans et le taux fixe à 2 ans est inférieur à 0,2 et il bascule à 10% s'il dépasse ce seuil.
Plus risquée encore (et totalement opaque), l'indexation peut être basée sur des
dette prévoit alors que la créance passe après les autres, ce qui en fait du "quasi"
capital. En cas de liquidation de la société, la dette subordonnée n'est remboursée
que s'il reste quelque chose après le règlement de toutes les autres dettes. Les
créanciers subordonnés passent avant les actionnaires mais sont à l'avant-dernier
rang.
La subordination peut porter aussi sur les intérêts dont le paiement sera alors
subordonné au résultat de l'entreprise : en cas d'exercice déficitaire, l'émetteur
peut décider de ne pas payer d'intérêts.
Concernant le remboursement, il peut intervenir à date fixe ou être subordonné
à la décision de la société émettrice (titres subordonnés à durée indéterminée). Le
contrat de dette peut prévoir des options : par exemple, la dette est émise avec une
échéance déterminée ; à cette échéance, si elle n'est pas remboursée, elle est
automatiquement transformée en une nouvelle dette payant un taux d'intérêt
supérieur.
Nous sommes ici devant des passifs que l'entreprise et les autres créanciers
peuvent considérer comme de quasi fonds propres mais qui, étant néanmoins des
dettes, concurrencent les droits des actionnaires. Les créanciers subordonnés sont
"juniors" par rapport aux autres mais "seniors" par rapport aux actionnaires.
Lorsqu'une entreprise peut difficilement lever des fonds propres additionnels,
ce financement (naturellement plus coûteux que la dette senior) constitue une
solution utile (et rémunératrice pour la banque). Il convient mal aux micro
entreprises et ne peut être appliqué dans les PME que si la banque pense assumer
un risque rentable, ce qui présuppose une base financière déjà solide des
entreprises et une stratégie convaincante d’adaptation aux changements du
marché.
Mentionnons encore les financements à effets de levier, notamment les LBO,
massivement utilisés pour les rachats "spéculatifs" d'entreprises. L'opération
(souvent faite par un Hedge Fund) a pour base le constat que la valeur de marché
de l'entreprise cible est inférieure à sa valeur réelle (dans le cas de conglomérat à
démembrer) ou à sa valeur potentielle (dans le cas d'une société mal gérée). La
cible est achetée au prix du marché dans le but de la revendre à la "vraie" valeur
que révélera la séparation des activités ou la réorganisation de la société.
Schématiquement, l'opération consiste à faire acheter les actifs par une société
holding dont les fonds propres sont très inférieurs à la valeur des actifs, le reste
des fonds étant obtenu par endettement (crédits bancaires "seniors" et émission de
titres subordonnés).
Pour acheter une cible de 1md, le fonds mobilise 200m de capital, 400m de crédits bancaires et 400m d'émission de titres, ce qui donne un levier de 1000/200=5. Si tout se passe comme prévu, les emprunts seront remboursés par les dividendes (et surtout les plus values) générés par les actifs achetés et le fonds gagnera la différence. Mais si les repreneurs échouent à créer toute la valeur prévue ou si les conditions de marché (qui conditionnent la revente de la cible) se détériorent, leur dette deviendra insupportable.
La dette financière contractée par une entreprise à une date t0 entraîne dans le
futur des flux de trésorerie (flux entrants pour les prêteurs, flux sortants pour
l'entreprise).
Nous examinerons d'abord les facteurs qui, à t0, déterminent le taux d'intérêt
contractuel (§2.1).
Ensuite, ni la valeur de remboursement (valeur nominale) ni le taux d'intérêt
(taux du coupon) ne changent mais la valeur et le rendement varient en continu
(§2.2).
2.1. Détermination du taux d'intérêt contractuel (à t0)
Le taux d'intérêt proposé lors de l'émission est basé sur le taux du marché à ce
moment. S'il était inférieur, personne ne s'y intéresserait : supposez que, sur le
marché secondaire, les obligations rapportent 5% et qu'un nouvel émetteur
propose 4%, l'émission ne serait pas souscrite et l'émetteur devrait accepter une
décote qui ramène le rendement à celui du marché.
Prenons pour simplifier un titre à 1 an qui propose 4% alors que le taux du marché est 5%. Pour des parts de 5000 le titre donne au bout d'un an 5000 + 5000 0,04=5200.
Pour obtenir un rendement de 5% avec un taux nominal de 4%, il faut payer 4952. En recevant 5200 dans un an contre 4952 maintenant, on gagne (5200-4952)/4952=5%. Cette décote entraîne que l'émetteur, au lieu de 500m, n'obtient que 495,2m alors qu'il devra rembourser 500. En fin de compte, même si le nominal est 4%, l'emprunt lui coûte
bien 5%.
Mais les dettes ont des caractéristiques et des qualités différentes. Elles
diffèrent par leur échéance, par le risque de défaut (non paiement des intérêts ou
non remboursement) et par la liquidité. Moins la dette d'une entreprise donnée est
attractive, plus le taux d'intérêt devra être élevé pour attirer les investisseurs. Il y a
ainsi une échelle des taux d'intérêts : des dettes équivalentes offriront le même
taux, des dettes de meilleure qualité un taux plus bas, des dettes de moins bonne
qualité un taux plus élevé.
Quel est le benchmark ? comment se fixe la hauteur du premier barreau de
l'échelle ? C'est le taux sans risque qui constitue la référence (a). Le taux d'intérêt
que doit proposer un émetteur quelconque est le taux sans risque, augmenté de
primes qui compensent la moindre attractivité de son émission en termes
d'échéance, de liquidité et de risque (b). Nous le verrons plus tard (CH 3), à
l'équilibre (hypothétique), tous les actifs doivent offrir le même rendement net : si
les actifs de qualité inférieure ne sont pas assez rémunérés, ils seront délaissés,
leur prix baissera jusqu'à ce que le rendement ait assez augmenté ; s'ils sont trop
rémunérés, ils seront recherchés, leur prix haussera jusqu'à ce que le rendement ait
assez baissé. Quand tous les rendements sont équilibrés, il n'y a plus d'opportunité
d'arbitrage. Il ne faut jamais oublier que un émetteur offre des actifs à des
investisseurs qui ne recherchent pas un actif particulier mais composent leur
banques. Mais la rémunération (lorsqu'il y en a une) n'est pas un taux de marché,
c'est un policy rate fixé par la BC. Le seul taux adéquat serait donc celui des bons
émis par la BC sous forme de titres de créances. Mais, en général, cet instrument
est peu utilisé et l'encours est faible et, surtout, il ne s'agit pas d'un financement
(encore une fois, la BC ne saurait éprouver aucun besoin de financement en
monnaie nationale) mais d'une opération de "pompage" de liquidité, même si
l'adjudication est entièrement libre.
Idéalement, c'est le taux d'intérêt de la dette de marché de la BC qui constitue
le benchmark ultime mais, en pratique, on utilise comme taux sans risque celui de
la dette publique de première qualité qui présente l'avantage supplémentaire de
couvrir un large éventail d'échéances et d'être très liquide. Il sera prudent de
considérer que, dans la phase actuelle de la crise, cet indicateur est fortement
perturbé. Dans des circonstances normales et pour des Etats normaux, la dette
publique en monnaie nationale, comme celle de la BC, n'expose pas l'investisseur
au risque de défaillance à la différence de toutes les dettes privées, même les
meilleures, pour lesquelles la probabilité de défaut peut être faible mais non nulle.
Cependant, toutes ces dettes (même celle de la BC) ont en commun un type
insidieux de risque, le risque monétaire. Rappelons-nous le nominalisme des
contrats : ce sont les valeurs nominales qui doivent être payées. En présence
d'inflation, la valeur réelle des flux de trésorerie fixes engendrés par la dette
diminue. Si le taux d'inflation p est supérieur au taux d'intérêt fixe r, le taux
d'intérêt réel (qu'on approxime par r-p) devient négatif.
Si vous empruntez 100 à t0, vous devez rembourser 100 à l'échéance. Admettons
que, entre les deux dates, les prix aient doublé, vous avez reçu 100 dont la valeur réelle était 100 et vous rendez 100 dont la valeur réelle est 50. C'est comme si le créancier vous avait fait cadeau de la moitié de la dette (ce qui, pour lui, représente une perte équivalente).
Si vous empruntez à 5% et si, au cours des années où vous payez les intérêts, le taux d'inflation moyen est de 10%, votre taux réel est : 5%-10%=-5%.
Que signifie un taux réel négatif ? que la valeur réelle des montants payés par
le débiteur au créancier est inférieure à celle que le premier a reçu du second.
Vous empruntez 1000 à 5% pour 5 ans, vous devez payer 50 d'intérêts par an. Avec
10% d'inflation, les intérêts à la fin de la 1ère année valent 45,5 (50/1,10); ceux de la 2ème année 41,3 ; ceux de la 3ème année 37,5 ; ceux de la 4ème année 34,1; ceux de la 5ème année 31,0 ; le remboursement final de 1000 vaut 621. Au total la somme des valeurs réelles de ce que vous avez payé est 810 alors que vous aviez reçu 1000. Le débiteur a gagné, le créancier a perdu.
Formellement, le débiteur honore ses engagements mais, en réalité, les
paiements effectués équivalent à un défaut partiel (ou total en hyperinflation).
Nous ne développons pas ici les dérèglements qui en résultent pour le système
financier.
Il est clair que la situation financière de tout débiteur net (dettes>créances) est
améliorée par l'inflation puisque celle-ci allège le poids de la dette. L'Etat est le
plus grand débiteur net. Plus la charge de la dette d'un Etat est élevée, plus le
gouvernement a intérêt à l'inflation qui le dispensera de prendre des mesures
d'ajustement impopulaires. En inflation, les revenus, les patrimoines, le PIB
progressent en termes nominaux, et avec eux le produit des impôts : la charge de
la dette restant fixe, son poids relatif diminue.
Cette tentation inflationniste est l'une des principales justifications de
l'indépendance de la banque centrale à l'égard du gouvernement : à l'époque et
dans les pays où la BC était un instrument du gouvernement, l'insouciance à
l'égard de l'inflation (voire la pression en faveur de l'inflation) étaient habituelles.
Aujourd'hui, l'indépendance des BC a un caractère fonctionnel : les BC ne sont
pas libres de faire ce qu'elles veulent, elles ont la mission d'assurer la stabilité des
prix (= des valeurs réelles) et ne sont soustraites à l'influence du gouvernement
que pour être libres d'atteindre cet objectifs par tous les moyens appropriés.
Néanmoins, aucune BC au monde n'a un objectif de 0% d'inflation, c'est-à-dire
de stabilité absolue du niveau général des prix. D'une part, il y a des facteurs
exogènes (prix des matières premières) ou endogènes (cycle économique). D'autre
part la contrainte qui pèserait sur l'économie serait trop forte. Les BC se donnent
l'objectif de contenir l'inflation et d'éviter que s'enclenche un processus
inflationniste (une augmentation des prix cumulative auto-entretenue). Elles
définissent généralement la stabilité monétaire comme une inflation tendancielle
inférieure à 2% par an.
Il en résulte que le risque monétaire est sous contrôle mais non pas annulé.
Avec 2% d'inflation par an, un taux d'intérêt nominal de 2% se traduit par un taux
réel de 0%.
Aussi le taux sans risque inclut-il une prime d'inflation qui est basée sur les
anticipations d'inflation. Une banque centrale crédible stabilise les anticipations
d'inflation, ce qui empêche qu'une perturbation des prix (eg hausse des prix
énergétiques) se transmette aux anticipations. Cette réduction de l'incertitude se
traduit par la constance de la prime d'inflation à toutes les échéances.
Le taux sans risque qui étalonne tous les taux débiteurs peut ainsi varier, soit
sous l'effet de changement des conditions de l'équilibre financier ou économique,
soit sous l'effet d'une variation des anticipations d'inflation à telle ou telle
échéance.
b) Primes
La principale est la prime de risque (spread). Elle dépend de la probabilité de
défaut et du taux de recouvrement anticipé dans cette hypothèse (quel pourcentage
du passif on peut espérer récupérer à la suite de la liquidation des actifs du
débiteur). Idéalement, la prime égalise le rendement probable du placement risqué
à celui du placement sans risque : si, par exemple, on peut gagner 5 sans risque ou
X avec une probabilité de 0,8 ; pour que, en probabilité, les deux résultats soient
équivalents, il faut : X=5/0,8=6,25. Soit un montant M, p la probabilité de défaut. Le taux de recouvrement (prévisionnel)
TR limite la perte probable à : M.(1-TR).p. Dans l'autre cas, le prêteur gagne les intérêts, M.r.(1-p). Pour un même montant, le placement sans risque aurait rapporté M. rf. Il faut donc que : M.r.(1-p) - M.(1-TR).p = M. rf
Soit une prime de risque (r- rf )= p/(1-p) { (1 -TR) + rf}. Sans surprise, elle est liée
positivement à la probabilité de défaut et négativement au taux de recouvrement. Pour un montant de 1000, un taux sans risque 2%, une probabilité de défaut à 1 an de 0,5% et un taux de recouvrement nul : r-rf=0,005/0,995. 1,02=0,0051= 51 bp.
Avec la même probabilité de défaut et un taux de recouvrement anticipé de 60%, la prime serait de 26 bp.
Comme le montre le graphique ci-après, de 2003 à 2007, la prime moyenne est
restée longtemps faible (trop faible), à environ 1,5% (150 pb) aux Etats-Unis. Elle
augmente avec l'incertitude en période de crise (plus de 300 pb après
l'effondrement des valeurs technologiques, plus de 600 pb après la faillite
Lehman).
2 moyenne
hebdomadaire
des obligations
notées BBB
(indice Merrill Lynch) par
rapport au
rendement de
l'obligation d'Etat
10 ans en
centièmes de %
(pb).
Source : BRI,
Rapport Annuel
2010, Gr III.2.
En pratique, rien n'est plus difficile que d'estimer les probabilités de défaut à
1 an ou à long terme ainsi que les taux de recouvrement. Si, faute de mieux, on
utilise les données historiques, leur extrapolation est problématique.
Les investisseurs non équipés pour ces analyses utilisent les notes données par
les agences de rating (Moody's, S&P, Fitch) qui, à un instant donné, sur la base
des informations disponibles, classent les emprunteurs en catégorie
"investissement", "spéculatif", "très spéculatif". Historiquement (1979/2001), la
fréquence de défaut à 1 an pour les notes de Moody's est : Aaa 0,00% ; Aa
0,02% ; A 0,01% ; Baa 0,15% ; Ba 1,21% ; B 6,53% ; C 24,73% (source
courant, c'est-à-dire déterminer le montant à placer maintenant au taux d'intérêt
courant qui, par capitalisation, sera, à l'échéance T, égal à FT : FT V0.
La valeur aujourd'hui (VA=valeur actuelle) d'une somme S à recevoir dans un
an est le montant x qu'il faut placer aujourd'hui au taux d'intérêt d'aujourd'hui r0
pour que, avec les intérêts, il soit égale à S dans un an.
Soit : x (1 + r0) = S = > x= VA = S
(1+ r0)
Il est clair que, le taux d'intérêt nominal ne pouvant pas être négatif (r 0), la
valeur actuelle est toujours inférieure aux montants des flux futurs. Elle en est
d'autant plus proche que le taux d'intérêt est plus bas et d'autant plus éloignée que
le taux d'intérêt est plus élevé.
Si le taux d'intérêt aujourd'hui est 5%, la valeur actuelle de 1000 dans 1 an est 1000/1,05= 952,38 952
Cela signifie que, au taux d'intérêt courant 5%, il est indifférent d'avoir 952 maintenant ou 1000 dans un an. Il n'y a pas d'opportunité d'arbitrage (F0 - VF1=0). Par
contre, si le choix est entre 952 maintenant et 1050 dans un an, cela revient à prêter, non plus au taux d'intérêt courant 5% mais à r' = 1050/952 – 1 = 10,3%, et cette opération rapporte un profit d'arbitrage.
Avec r=1%, V= 1000/1,01 = 990,1
Avec r =5%, V= 1000/1,05 = 952,4 Avec r = 10%, V = 909,1. Etc.
Si une somme S est prêtée aujourd'hui pour deux ans, les intérêts étant
capitalisés et réglés en bloc avec le remboursement la deuxième année, il n'y a
qu'un flux de trésorerie et il a lieu la 2ème année, soit F2 ce flux.
F2 = {S (1 + r)} (1 + r) = S (1 + r)2 et VA = S
(1+ r )2
En amont des calculs mathématiques, se pose la question du taux d'intérêt à
utiliser : puisque les fonds sont immobilisés pour deux ans, le taux d'intérêt
courant à prendre pour le calcul du taux d'actualisation n'est pas le taux d'intérêt à
1 an, c'est le taux d'intérêt à 2 ans car il doit y avoir coïncidence entre
l'échéance de l'opération envisagée et le taux d'actualisation utilisé.
Nous avions un taux d'intérêt à 1 an (désormais noté r1) = 5%. Si le taux à 2 ans r2
est 5,5% : VA=S/(1,055)2=1000/1,113=898,45.
Revenons à présent à l'expression générale : V = VF1 + VF2 +...VFt...+ VFT
La valeur de l'actif est égale à la somme des valeurs actuelles des flux de
trésorerie futurs, chacun d'entre eux étant actualisé au taux d'intérêt correspondant
à son échéance :
V = F1
(1+ r1)+
F2(1+ r2)
2 + ...+Fi
(1+ ri )i + ...
FT(1+ rT )
T
Si l'actif entraîne le paiement d'intérêts annuels avec remboursement in fine, les
flux successifs de F1 à FT-1 sont des paiements d'intérêts alors que le dernier flux
FT comprend la dernière annuité d'intérêts et le remboursement. Pour clarifier
l'écriture et la rendre homogène, on a l'habitude de "démembrer" l'actif et de
considérer que sa valeur est la somme des flux de trésorerie liés au paiement des
Ainsi, pour une dette d'un montant S à 7 ans dont le taux d'intérêt nominal fixe
est de r, les intérêts annuels (coupon) sont de Sr et la valeur actuelle, avec chaque
flux annuel de date i actualisé au taux correspondant ri. :
V= Sr
(1+ r1)+
Sr
(1+ r2)2 + ...+
Sr
(1+ r7)7 +
S
(1+ r7)7
On peut simplifier l'écriture :
V = Sr1
(1+ ri )i
i=1
7
+S
(1+ r7)7
et, plus généralement :
(1.1) V = Sr1
(1+ ri )i
i=1
T
+S
(1+ rT )T
S = 1000, r = 6,25%. Pour simplifier le calcul, nous supposons que nous sommes à 3 ans de l'échéance et que les intérêts viennent d'être payés. Il y aura 3 flux d'intérêts (dans 1 an, 2 ans, 3 ans) et le remboursement dans 3 ans.
r1 (taux à un an) = 5% ; r2=5,50; r3=5,65
V= 62,5 1
1,05+
1
(1,055)2+
1
(1,0565)3
+
1000
(1,0565)3 = 168,68 + 847,99 = 1016,67
Les taux aux différentes échéances ne sont pas identiques. La prise en compte
de la structure par terme des taux d'intérêt complique le calcul d'actualisation
puisqu'il faut disposer de taux de référence pour toute la gamme des échéances
concernées et utiliser chaque taux pour l'échéance correspondante.
Or il n'y a pas de relation fonctionnelle entre les taux des échéances
successives et le sens même de la relation n'est pas constant. Normalement, la
structure par terme est croissante car, toutes choses égales d'ailleurs, l'incertitude
(donc le risque) croît avec le temps : les taux sont d'autant plus élevés que
l'échéance est plus lointaine. La pente de la courbe des taux traduit les
anticipations d'inflation et la perception de l'incertitude.
Il arrive que cette structure tendancielle soit perturbée par la politique
monétaire ou les conditions de marché. La politique monétaire (taux directeur) ne
se transmet pas homothétiquement à toutes les échéances. Elle agit directement
sur les échéances courtes et indirectement (et conditionnellement) sur les taux des
échéances longues qui sont influencés par la perception du risque et les arbitrages
entre actions et obligations. Si le taux directeur et les taux à court terme
augmentent au moment où les investisseurs préfèrent les obligations aux actions,
les taux à long terme diminuent ou n'augmentent pas et l'écart se réduit ou devient
négatif. Les déterminants de la courbe des taux sont multiples et il n'est pas aisé
de déduire des taux à court terme les taux à échéance, ni fréquent d'observer une
courbe "normale". Dans la période précédant 2008, la désinflation et l'abondance
de liquidité se sont traduits par des écarts relativement faibles ou même des
courbes inversées : les taux longs et sont trouvés inférieurs aux taux courts, et le
durcissement de la politique monétaire ne s'est pas transmis aux échéances plus
éloignées (le "conundrum" de Greenspan). A partir de 2008/2009, la courbe s'est
"repentifiée" (l'écart "taux long - taux court" a augmenté), sans, pour autant,
redevenir normale : l'écrasement des taux de la politique monétaire (en vert) ne
s'est pratiquement pas transmis aux taux à long terme (en rouge). On parle
"repentification par le bas".
BRI, Rapport annuel 2011, Gr I.4
b) Sensibilité et duration
Le type de dette le plus commode pour le calcul est constitué par la dette zéro
coupon à intérêts postcomptés et remboursement in fine qui n'entraîne pas de
paiement périodique d'intérêts : ceux-ci sont capitalisées et, à l'échéance, le
débiteur paye en bloc le principal, les intérêts, et les intérêts sur les intérêts. L'actif
délivre alors un flux unique à l'échéance et le taux d'actualisation à utiliser est le
taux correspondant à l'échéance.
Soit une obligation de 1000 à 10 ans au taux d'intérêt nominal de 5% (intérêts annuels 50). Les intérêts de la 1ère année portent intérêt pendant 9 ans, ceux de la 2ème année pendant 8 ans etc.
Les intérêts postcomptés sont : 50 [ (1,05)9 + (1,05)8 + (1,05)7 +...+(1,05)0] = 628,9
auxquels s'ajoute le remboursement. L'actif délivre donc à 10 ans un flux unique de 1628,90 dont l'actualisation se fait bien sûr au taux à 10 ans.
S'il reste 8 années à courir, avec r8=3%, VA= 1628,90/(1,03)8 = 1285,87.
Cette simplicité mathématique fait de ce type d'obligation un standard,
notamment pour l'émission de dérivés de taux. En effet, le flux final est
S. 1+ r (1+ r)T 1
i=1
T
. Sa valeur actualisée t années après l'émission (à la date
anniversaire pour simplifier) : S. 1+ r (1+ r)T i
i=T t
T
(1+ rT )T t
Mais, avec ce type d'actif, les créanciers sont entièrement exposés au risque de
crédit jusqu'au dernier moment. Ils peuvent le gérer si les titres sont liquides mais
la liquidité diminue lorsque le risque augmente et, dans cette hypothèse, des pertes
sont à attendre.
L'amortissement permet de limiter ce danger, en divisant le remboursement
dans le temps, soit par parties égales, soit progressivement soit dégressivement. A
quel taux actualiser les flux aux différentes dates ? si la courbe des taux est plate
ou à peu près plate, on ne fait pas une grosse erreur en approximant l'éventail des
taux par un taux unique. Par contre, si la pente est sensible (qu'elle soit
normalement croissante avec le terme ou anormalement décroissante),
l'approximation conduit à des résultats inexacts.
L'erreur commise en actualisant au taux de l'échéance dépend, d'une part, de la
pente de la courbe des taux et, d'autre part, de la répartition des flux dans le temps.
Lorsque l'actif délivre un unique flux à l'échéance, la courbe des taux est
indifférente, le taux à l'échéance étant le seul à considérer. Si intérêts périodiques
et remboursement in fine, le dernier flux étant beaucoup plus important que les
autres, l'erreur d'approximation faite en actualisant tous les flux au taux d'intérêt à
l'échéance de la dette est négligeable, même si la pente de la courbe des taux est
forte. Si amortissement linéaire, les flux étant égaux de période en période, c'est
seulement si la courbe est assez plate qu'on peut utiliser le taux à l'échéance
comme taux unique. Ainsi, dès lors qu'il y a amortissement (et plus encore si
celui-ci est dégressif), la structure par terme importe. Or il n'est pas toujours
possible de trouver des valeurs significatives des taux d'intérêt adéquats pour
chaque année.
Quoi qu'il en soit, pour un titre donné dont les flux de trésorerie ont été fixés à
l'émission, la valeur actuelle et le taux d'intérêt vartient en sens inverse. Dans
quelle proportion ? On appelle sensibilité d'un titre le rapport entre la variation de
sa valeur et la variation du taux d'actualisation.
A première vue, la sensibilité dépend de la durée du titre : un titre qui a 10 ans
à courir sera plus sensible qu'un titre de mêmes caractéristiques qui serait à 1 an
de l'échéance.
Exemple soit un titre délivrant des flux annuels (supposés égaux) de 100. S'il est à 10 ans de l'échéance : V= 100 1/(1+r)t Et à un an : V'=100/(1+r)
Si r=5%, V=772 et V'=95,24 Quand r passe de 5% à 6% (+100 bp), la valeur des titres diminue : V=736 et V'=94,34. Le 10 ans a perdu 4,66% de sa valeur; le 1 an 0,94%. Le 10A
réagit cinq fois plus que le 1A.
Mais deux titres ne diffèrent pas seulement par la durée jusqu'à l'échéance, ils
diffèrent aussi par la répartition des flux dans le temps. La durée résiduelle
importe moins que la répartition dans le temps des flux de trésorerie. Le concept
qui rend compte de ce calendrier des flux est la duration.
La duration (D) mesure le délai moyen de versement des flux ou, en d'autres
termes, l'âge moyen des retours : elle est définie comme la somme des années,
chacune étant pondérée par la part de la valeur actuelle du flux de trésorerie
correspondant dans la valeur actuelle totale (Vt / Vt).
Le TRA ne se calcule pas à partir des taux mais de la valeur. Il représente une
synthèse indirecte des différents taux d'intérêts. Lorsque ces taux varient, le TRA
varie dans le même sens et la valeur de l'actif en sens inverse puisque
V= Ft/(1+r)t. Il faut cependant se rappeler que la moyenne ne donne pas toujours
des informations suffisantes. Si les différents taux d'intérêt sont homogènes, les
taux par échéance varient homothétiquement : ces déplacements de la courbe des
taux sont bien traduits par le TRA. Par contre, si la courbe des taux se déforme
(aplatissement, repentification, inversion) ou si la variabilité (risque de taux) des
différentes échéances est différente, le TRA est trompeur.
Une obligation à 3 ans délivre des flux égaux de 100. Initialement, le taux à 1 an est 2%, le taux à 2A 3%, le taux à 3A 5%, V=279 et TRA=
3,7%. Le marché étant supposé efficient, le prix est 279. Une hausse de prix intervient à 284. Le TRA correspondant est 2,8%. Que traduit
cette baisse de 90 bp? On ne sait pas. Cela peut correspondre à plusieurs situations : par exemple, une baisse de tous les taux de 100bp (à 1, 2 et 4%) ou un retournement de la courbe des taux initiale (5,3,2% au lieu de 2,3,5%).
=> si on ne connaît pas les taux par échéance, on est incapable d'interpréter la variation du TRA et de prendre les mesures qui s'imposent.
Il ne faut non plus jamais oublier que la démarche qui induit le TRA du prix de
marché a des fondements hypothétiques peu solides (marchés parfaits).