Yaoundé, octobre 2009 INSTITUT DE FORMATION ET DE RECHERCHE DEMOGRAPHIQUES IFORD ORGANISME INTER-ETATIQUE UNIVERSITE DE YAOUNDE II Mémoire présenté et soutenu en vue de l’obtention du diplôme de MASTER PROFESSIONNEL EN DEMOGRAPHIE Domaine : Sciences Sociales Mention : Droit-Sciences Politiques-Economie et Gestion Filière : Sciences de la population Spécialité : Démographie Par : TANANG TCHOUALA Patrice Comité d’encadrement Directeur : Dr. MIMCHE Honoré Lecteur : Dr. NGANAWARA Didier FACTEURS EXPLICATIFS DE LA MALNUTRITION DES ENFANTS DE MOINS DE CINQ ANS AU CAMEROUN
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Facteurs explicatifs de la malnutrition des enfants de moins ......MDE: Monde Digne des Enfants MDG: Millenium Development Goals MICS: Multiple Indicators Cluster Survey (Enquête
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Yaoundé, octobre 2009
INSTITUT DE FORMATION ET DE RECHERCHE DEMOGRAPHIQUES
IFORD
ORGANISME INTER-ETATIQUE UNIVERSITE DE YAOUNDE II
Mémoire présenté et soutenu en vue de l’obtention du diplôme de
MASTER PROFESSIONNEL EN DEMOGRAPHIE Domaine : Sciences Sociales
Mention : Droit-Sciences Politiques-Economie et Gestion
Filière : Sciences de la population
Spécialité : Démographie
Par : TANANG TCHOUALA Patrice
Comité d’encadrement
Directeur : Dr. MIMCHE Honoré
Lecteur : Dr. NGANAWARA Didier
FACTEURS EXPLICATIFS DE LA
MALNUTRITION DES ENFANTS DE MOINS
DE CINQ ANS AU CAMEROUN
i
Les opinions émises dans ce document sont propres à son auteur et
n’engagent en aucun cas l’Institut de Formation et de Recherche
Démographiques (IFORD).
ii
DÉDICACE
A mes parents,
Pour l’éducation et l’amour donnés à leurs enfants.
A mes frères et sœurs,
Pour que vous vous souveniez toujours que la réussite en toute chose dans la vie se trouve au
bout de l’effort et de la persévérance.
A la mémoire de mon petit frère.
iii
REMERCIEMENTS La r éalisation d e ce t ravail a ét é p ossible grâce au p récieux co ncours de plusieurs
personnes physiques et morales. Qu’il me soit permis de remercier du fond du cœur tous ceux
qui, de près ou de loin, ont contribué à sa réalisation.
Mes r emerciements s ’adressent t out d’ abord a u G ouvernement c amerounais qui , par
l’entremise du MINEPAT(b), a financé cette formation.
Un merci particulier au Dr. MIMCHE Honoré pour avoir accepté de diriger ce travail
et pour sa disponibilité malgré ses multiples occupations.
Je voudr ais remercier m on l ecteur, l e Dr. NGANAWARA Di dier, p our s es l ectures
critiques et suggestions qui ont été d’un apport considérable.
Je d is m erci à mon mentor l e P r. LEGRAND Thomas Kingston qui, pa r s es
observations et conseils, m’a accompagné jusqu’au bout de ce travail.
Je suis heureux d’exprimer ma gratitude à tout le personnel administratif et enseignant
de l’IFORD qui, durant la formation, n’a ménagé aucun effort pour que celle-ci se passe dans
de bonnes conditions.
Je voudrais également remercier les responsables du S ervice Nutrition de l’UNICEF-
Yaoundé e t M. OKA LA Ge orges (Sous-directeur de l’ Alimentation e t d e la N utrition au
MINSANTE) pour leur appui technique.
Aux f amilles L ONTSIE, TCHOMENI, TCHOUATA, CHANYON, DOUOLA et
TCHOUPA j’adresse mes remerciements pour leur soutien sans failles.
Que mes camarades d es 2 8ème, 29 ème et 3 0ème promotions s oient r emerciés po ur l a
convivialité et l’esprit d’équipe qui nous ont conduits durant cette formation.
Je remercie M. NANAN Willibrod et tous mes amis pour leur soutien inconditionnel.
Je ne saurais terminer sans rendre grâce à l ’Eternel notre DIEU qui, par-dessus tout,
m’a guidé tout au long de cette formation.
iv
SIGLES ET ABRÉVIATIONS BIT : Bureau International du Travail
BM : Banque Mondiale
CCA : Common Country Assessment
CDC: Centers for Disease Control and Prevention
CDE : Convention relative aux Droits des Enfants
CE : Communauté Européenne
CEMAC : Communauté Économique et Monétaire d'Afrique Centrale
CENAME : Centrale Nationale d'Approvisionnement en Médicaments Essentiels
CFVSA : C omprehensive F ood S ecurity A nalysis/ Analyse G lobale d e l a S écurité Alimentaire et de la Vulnérabilité
CIN : Conférence Internationale sur la Nutrition
CRPMT : Centre de Recherche sur les Plantes médicinales et la Médecine Traditionnelle
DSCE : Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi
DSRP : Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté
ECAM : Enquête Camerounaise Auprès des Ménages
EDSBF : Enquête Démographique et de Santé du Burkina-Faso
EDSC : Enquête Démographique et de Santé du Cameroun
EDSM : Enquête Démographique et de Santé du Mali
FAO : Food and A gricultural O rganisation (Organisation des N ations U nies pour l’Alimentation et l’Agriculture)
FASR : Facilité d'Ajustement Structurel Renforcée
FED : Fond Européen de Développement
FEMEC : Fédérations des Missions et Églises Évangéliques du Cameroun
FIMA : Fonds d’Investissement des Micro-réalisations Agricoles
GRIPPS : Groupe International de Partenaires Population - Santé
IMC : Indice de Masse Corporelle
v
INS : Institut National de la Statistique
INSAH : Institut du Sahel
MDE : Monde Digne des Enfants
MDG : Millenium Development Goals
MICS : Multiple Indicators Cluster Survey (Enquête par grappes à indicateurs multiples)
MINADER : Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural
MINEFI : Ministère de l'Économie et des Finances
MINEPAT(a) : M inistère d es A ffaires É conomiques, de l a P rogrammation e t de l’Aménagement du Territoire
MINEPAT(b) : Ministère de l’Économie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire
MINPLAPDAT : Ministère de la Planification, de la Programmation du Développement et de l’Aménagement du Territoire
MINSANTE : Ministère de la Santé Publique
MNTA : Maladies Non Transmissibles liées à l'Alimentation.
MPE : Malnutrition Protéino-Énergétique
MSF : Médecins Sans Frontières
NEPAD : Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique
NCHS : National Center for Health Statistics
OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
ONU : Organisation des Nations Unies
PAMDE : Plan d’Action d’Un Monde Digne des Enfants
PAS : Programme d’Ajustement Structurel
PEV : Programme Élargi de Vaccination
PIB : Produit Intérieur Brut
PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement
PPTE : Pays Pauvres Très Endettés
vi
PSSA : Programme Spécial pour la Sécurité Alimentaire
RGPH : Recensement Général de la Population et de l’Habitat
SAN : Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle
SASNIM : Semaine d'Actions de Santé et de Nutrition Infantile et Maternelle
SCN : Comité permanent sur la nutrition des Nations Unies (ex-CAC/SCN)
SIDA : Syndrome de l’ImmunoDéficience Acquise
SME : Sommet Mondial sur les Enfants
SNAR : Système National d’Alerte Rapide et d’informations sur les marchés
SRP : Stratégies de Réduction de la Pauvreté
SSP : Soins de Santé Primaires
SSS : Stratégie Sectorielle de Santé
TAMR : Le Taux Annuel Moyen de Régression
TBS : Tableau de Bord Social
UIESP : Union Internationale pour l’Étude Scientifique de la Population
UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture
UNICEF : U nited N ations International C hildren’s E mergency F und (Fonds de s N ations Unies Pour l’Enfance)
UTAVA : Unité de Traitement par Voie Aérienne
VIH : Virus de l’Immunodéficience Humaine
vii
TABLE DES MATIÈRES DÉDICACE ............................................................................................................................... ii
REMERCIEMENTS ............................................................................................................... iii
SIGLES ET ABRÉVIATIONS .............................................................................................. iv
TABLE DES MATIÈRES ..................................................................................................... vii
LISTE DES TABLEAUX ....................................................................................................... xi
LISTE DES GRAPHIQUES, FIGURES ET CARTES ..................................................... xiii
RÉSUMÉ ................................................................................................................................ xiv
ABSTRACT ............................................................................................................................ xv
Tableau 1A5 : Association entre certaines variables indépendantes ...................................... 164
xiii
LISTE DES CARTES, FIGURES ET GRAPHIQUES Carte 1 : Indices nutritionnels selon la région .......................................................................... 31
Figure 2.1 : Cycle de vie de la nutrition ................................................................................... 36
Figure 2.2 : Schéma conceptuel de la malnutrition des enfants de moins de cinq ans ............. 59
Figure 2.3 : Schéma d’analyse de l’état nutritionnel des enfants de moins de cinq ans .......... 64
Graphique 3.1 : Poids des enfants en fonction de l’âge en mois (données de base) ................ 73
Graphique 3.2 : Représentation d’un point aberrant ................................................................ 74
Graphique 3.3 : Poids des enfants en fonction de l’âge en mois (données corrigées) ............. 75
Graphique 3.4.a : Effectifs des enfants en fonction de l’âge (en mois) au niveau national ..... 76
Graphique 3.4.b : E ffectifs de s e nfants e n f onction de l ’âge ( en m ois) selon l e m ilieu de
RÉSUMÉ Près de 19% d’enfants de moins de cinq ans au Cameroun sont d’un poids trop faible
pour l eur âge. C eci c orrespond à 9,5 fois l e ni veau attendu da ns un e po pulation e n bonne
santé et bien nourrie. De ce constat et de celui d’un Taux Annuel Moyen de Régression de 2%
au lieu des 2,8% nécessaire pour l’atteinte de la seconde cible de l’OMD 1, l’étude analyse les
facteurs explicatifs de la malnutrition des enfants de moins de cinq ans au Cameroun à l’aide
des données de l’enquête MICS réalisée en 2006. Elle utilise les mesures anthropométriques
pour évaluer l’état n utritionnel des enfants e t s e b ase s ur l es n ouvelles n ormes d e
l’Organisation M ondiale d e l a S anté concernant l a c roissance de s nour rissons publ iées e n
2006. Partant de la description du contexte de l’étude, l’investigation s’est faite à l ’aide d’un
cadre théorique qui a permis de déboucher sur des résultats assez révélateurs.
Premièrement, dans une analyse différentielle de la malnutrition désagrégée au milieu
de résidence, on observe que les variables contextuelles, socioéconomiques et culturelles sont
significativement associées à l’état nutritionnel des enfants. Des variables intermédiaires, seul
le sexe de l ’enfant est significativement associé à l eur état nutritionnel, laquelle association
étant le f ait d u milie u r ural. Les r ésultats présentés a u ni veau na tional s uivant l es de ux
standards montrent que les an ciennes r éférences d u N ational C enter for H ealth S tatistics
(NCHS) concernant la croissance des nourrissons jadis recommandées par l’OMS surestiment
l’ampleur du phénomène.
Deuxièmement, l’analyse ex plicative permet d e dé gager l es pr incipaux facteurs
explicatifs de la malnutrition des enfants de moins de cinq ans au Cameroun. Ainsi, la région
de résidence de l ’enfant, l e n iveau d’instruction de la mère, l e niveau de vie du m énage, l e
sexe de l’enfant et la religion du chef de ménage sont les variables qui ont été déterminantes
pour l’explication en milieu rural et au niveau national. L’analyse des mécanismes d’action a
permis de montrer que l’effet de certaines variables est annihilé par d’autres. En milieu urbain
par exemple, on n’a plus que la région de résidence, le niveau de vie du ménage et la religion
comme variables déterminantes en présence de toutes les autres variables.
Enfin, l’étude propose, pour une efficacité de la lutte contre la malnutrition des enfants
au Cameroun, des recommandations sur les plans politique, programmatique et scientifique.
xv
ABSTRACT Around 19% of children in Cameroon are underweight. It corresponds to 9.5 times the
level expected for a healthy and well nour ished population. From this observation added to
the average annual rate of regression es timated at 2% instead of the 2.8% necessary for the
achievement of t he s econd obj ective of M DG1, this s tudy analyses t he factors t hat ex plain
malnutrition of children below five in Cameroon with the help of data collected by MICS in
2006. It uses anthropometric indicators to measure the nut ritional s tatus of children, and, i s
based on ne w norms of WHO concerning infants published in 2006. T he analysis goes from
the de scription of t he c ontext of s tudy t o bring out out standing results t hrough an
investigation into the theoretical framework.
At fi rst, in the differential a nalysis o f malnutrition d isintegrate to t he place o f
residence, one obs erves t hat t he c ontextual, socioeconomic a nd c ultural va riables a re
significantly associated to the nutritional status of children. Among the intermediate variables,
only the one that concerns the sex of children proved worthily associated to their nutritional
status, and this being justified by the rural place of residence in which they live. The results,
presented at t he national l evel following two s tandards, show that t he ol d r eferences of t he
National C enter for H ealth Statistics (NCHS) l ong recommended b y t he W HO c oncerning
infant’s growth overestimate the extend of the phenomenon.
At s econd, t he ex planatory analysis p ermits to b ring o ut th e p rincipal factors th at
explain malnutrition of children be low f ive i n Cameroon. Thus, a re considered de terminant
explanatory in rural milieu and a t the national level: the place o f r esidence of children, t he
level of education of the mother, the financial status of the family, the sex of children, and the
religion of the head of the family. The analysis of interactional mechanisms has permitted to
show that the effect of some variables is annihilated by others. In the urban zone for example,
the only relevant variables are: the place of residence, the financial status of the family, and
religion.
Finally, this study suggests some political, programmatic and scientific proposals for
an efficient fight against malnutrition of children.
1
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Ann M. Veneman1
n 2006, pour l a pr emière f ois, l e nom bre d’ enfants qui m eurent a vant l eur
cinquième anniversaire est tombé en dessous de la barre des 10 m illions, à 9,7
millions précisément. Cette r éduction représente un t ournant i mportant pour l a s urvie de
l’enfant. En effet, selon les estimations des années 1960, 20 millions d’enfants de moins de 5
ans mouraient chaque a nnée. Et , le n ombre d e décès d ’enfants baisse régulièrement d epuis
cette ép oque. C es es timations s ont l e fru it de s t ravaux du g roupe i nter-institutions pour l a
survie de l’enfant qui comprend l’UNICEF, l’Organisation Mondiale de la Santé, la Banque
Mondiale e t l a D ivision de l a popul ation ( Nations U nies). M algré l es p rogrès r éalisés,
l’atteinte du quatrième Objectif du Millénaire pour le Développement, qui consiste à réduire
de de ux t iers l e t aux de m ortalité de s e nfants d e m oins de c inq a ns d’ ici à 2015 , semble
compromise au r egard d u n iveau d e mo rtalité in fantile a ssez élevé d ans de nombreux pa ys
notamment en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud.
De nombreux facteurs et maladies se conjuguent pour accroître la mortalité des enfants
au-delà d es impacts in dividuels. La ma lnutrition e st responsable d’ une p art i mportante des
décès d ’enfants, d irectement o u indirectement ( comme co facteur aggravant d ’autres
pathologies), d’une forte morbidité et de séquelles touchant tous les aspects du développement
(Simondon et al., 1989 ; WHO Working Group, 1986). Chaque année, la dénutrition contribue
au décès d’environ 5,6 m illions d’enfants de moins de cinq ans. Un enfant de moins de cinq
ans sur quatre - soit 146 millions d’enfants dans le monde en développement - présente une
insuffisance pondérale par rapport à son âge (UNICEF, 2006) : ce qui augmente son risque de
décès prématuré. D’après la même source, la dénutrition est la cause sous-jacente d’environ
53 % des décès d’enfants de moins de cinq ans.
1 Directrice Générale de l’UNICEF (Avril 2006)
E
« La réduction de l’extrême pauvreté et de la faim, l’abaissement de la mortalité infantile et la réalisation de tous les autres Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) concernant la santé et l’éducation sont largement tributaires des progrès en matière de nutrition. Si l’on ne vient pas à bout de la dénutrition, il sera difficile d’atteindre les autres OMD »
2
Lorsque l a nut rition n e r épond pa s a ux a ttentes de l’organisme (apport e n
micronutriments entre autres), il en résulte un grand préjudice pour les individus et l’ensemble
de la société. Lorsque les femmes enceintes ne reçoivent pas une alimentation adéquate, elles
mettent au monde des enfants présentant une insuffisance pondérale, ce qui compromet leurs
chances de survie. Lorsque les filles sont sous-alimentées, c’est leur capacité future de donner
naissance à d es enfants s ains q ui es t m enacée. La d énutrition et l es car ences en
micronutriments peuvent causer des retards de développement chez les jeunes pendant toute
l’enfance et l’adolescence, les rendant moins productifs une fois devenus adultes2.
L’OMD 1 co nsiste à réduire l ’extrême p auvreté et l a f aim, en affirmant l e l ien
fondamental qui les uni t. La faim es t souvent une conséquence et une cause de la pauvreté.
Dans t outes l es régions du m onde, e n l ’absence de pol itiques alimentaires, l es pa uvres ont
tendance à av oir de m oins bons r égimes al imentaires que l es r iches. La malnutrition est u n
véritable carcan qui enserre l’humanité, empêchant de nombreux individus, voire des sociétés
entières, d e r éaliser p leinement l eur p otentiel (UNICEF, 2008) . Chez l es en fants en
particulier, ceux qui sont dénutris ont une moindre résistance à l’infection et risquent plus de
succomber à d es m aladies courantes de l ’enfance co mme l a d iarrhée et l es i nfections
respiratoires. Les survivants peuvent être pris dans un engrenage de maladies à répétition et de
problèmes de c roissance qui s ’accompagnent souvent d’atteintes ir réversibles a u
développement cognitif e t s ocial. P our l es générations a ctuelles et f utures, une bonne
alimentation es t l a p ierre an gulaire d e l a s urvie, d e l a s anté et d u d éveloppement. S i l eur
alimentation e st s uffisante, le s f emmes c ourent moins d e r isques p endant la g rossesse et
l’accouchement, et l eurs en fants p euvent avoir un meilleur dé veloppement physique e t
mental. Bien nourris, les enfants auront une meilleure scolarité3, une meilleure santé. Une fois
adultes, ils donneront à l eurs pr opres enfants u n m eilleur dé part da ns la vi e. U ne bonn e
nutrition a également d’importantes retombées sur l’économie. Lorsque les populations sont
bien nourries, la productivité individuelle est en hausse, les dépenses de santé sont en baisse et
la production économique s’accroît.
Selon l ’UNICEF (2006), 28 % d es enfants p résentent une insuffisance p ondérale en
Afrique subsaharienne. L’Afrique subsaharienne arrive en deuxième position après l’Asie du
Sud en ce q ui concerne le pourcentage d’enfants accusant des retards de croissance (41% en
2 Voir l’annexe 1 pour le lien entre la Malnutrition et les OMD 3 Idem
3
Afrique de l’Est e t Australe et 35 % en Afrique de l ’Ouest e t Centrale). Pour la proportion
d’enfants souffrant de cachexie (le poids des enfants est faible pour leur taille, ce qui dénote
une dénutrition a iguë qu i apparaît souvent dans les s ituations d’urgence), l ’Asie du S ud est
suivie p ar l ’Afrique d e l’Ouest et C entrale ( 10 %), l e M oyen-Orient e t l’Afrique du N ord
(8 %) e t l’Afrique de l’Est et Australe (7 %). Toutefois, certains progrès ont été réalisés : la
proportion d’enfants présentant une insuffisance pondérale dans les pays en développement a
été ramenée de 33 % à 28 % entre 1990 et 2004. Pendant cette période, la baisse la plus forte
a ét é en registrée d ans l a r égion d e l ’Asie d e l ’Est et d u P acifique, o ù l e p ourcentage a ét é
ramené d e 25 % à 15 % . M ais i l n’ y a pa s e u de grands c hangements e n A frique
subsaharienne, où l e taux d’insuffisance pondérale est resté pratiquement le même de 1990 à
2004 (UNICEF, 2006) . En ef fet, cette absence d e p rogrès co njuguant s es ef fets av ec
l’accroissement d émographique au gmente le nom bre t otal d ’enfants pr ésentant un e
insuffisance pondérale. Le Taux Annuel Moyen de Régression (TAMR4) dans le monde est
de 1,7 % en 2006. S i rien n’est fait, l’UNICEF estime que 50 millions d’enfants qui auraient
pu bénéficier d’une alimentation suffisante d’ici à 2015 seront lésés et leur vie sera en danger.
L’Afrique de l’Ouest et Centrale (TAMR de 1,6 %) et l’Asie du Sud (1,7 %) ont progressé,
mais pas suffisamment pour atteindre la seconde cible de l’OMD 1 (UNICEF, 2006). Selon la
même source, le Cameroun a régressé à un r ythme d’environ 2 % par an, pas assez pour la
réalisation de l’OMD 1.
Chaque année au Cameroun, au moins 45 000 e nfants succombent de la malnutrition,
selon l e Fonds d es N ations U nies pour l ’enfance. P ourtant, l e C ameroun e st un pa ys
relativement stable de l’Afrique subsaharienne. Selon l’UNICEF, il est difficile de donner une
voix à cet te « urgence s ilencieuse », é clipsée p ar le s c onflits e t le s c rises q ui to uchent le s
populations r éfugiées da ns l es autres p ays de l a région. Pour Garnier5 (2009) : « L’urgence
camerounaise n’est pas très médiatisée. Mais elle pourrait s’aggraver si on ne poursuit pas
nos efforts, surtout auprès des moins de 3 ans ».
Il r essort en ef fet des t rois Enquêtes D émographiques et d e S anté réalisées p ar l e
Cameroun que l es pr oportions d’ enfants m alnutris, s aisies à t ravers l es m esures
anthropométriques, sont élevées p ar rapport à l a m oyenne d e l ’Afrique de l ’Ouest et du
4 Le rythme de changement nécessaire pour parvenir au but est un taux (TAMR) constant de 2,8 % pour
tous les pays. 5 Denis Garnier, Chargé de la nutrition au bureau de l’Unicef à Yaoundé.
4
Centre, soit 17% en ce qui concerne l’insuffisance pondérale modérée (UNICEF, 2006). Selon
l’enquête MICS de 2006, les niveaux de malnutrition sont restés assez élevés chez les enfants
de m oins de c inq a ns au C ameroun : 30,4% s ouffrent d’ un r etard de c roissance m odéré,
19,3% s ouffrent d’ une i nsuffisance p ondérale m odérée et 6 ,1% d’ une é maciation m odérée.
Ces pr oportions s ont ne ttement s upérieures à c elles q ue l'on s 'attend à t rouver d ans une
population en bonne santé et bien nourrie (respectivement 2,3% et 0,1% pour les insuffisances
pondérales m odérées et sévères). Les m oyennes g lobales c alculées pour l es r égions, voi re
pour c haque p ays m asquent g énéralement d es d isparités. U n p ays à faible t aux m oyen
d’insuffisance pondérale peut conserver d’importantes poches de dénutrition dans une région
donnée ou parmi certains sous-groupes de la population.
Malgré une production a limentaire assez importante au Cameroun, l ’état nutritionnel
des popul ations e n g énéral e t c elui de s groupes vul nérables e n p articulier, ces d erniers
composés p articulièrement d es femmes enceintes et allaitantes et des en fants d ’âge
préscolaire, s ’est dégradé au cours de la dernière décennie. Cette s ituation s’explique par la
crise économique qui a secoué le pays et la survenue du VIH/ SIDA (MINSANTE/UNICEF,
2007). Selon la même source, les principales carences nutritionnelles observées au Cameroun
sont :
• l’apport insuffisant en aliments, sources d’énergie et de protéines ;
• la carence en vitamine A ;
• l’anémie par carence en fer ;
• la carence en iode.
L’Enquête Nationale sur la Vitamine A et l’Anémie réalisée en 2000, montre que 40%
des enfants de moins de cinq ans souffrent de la carence en vitamine A. Par ailleurs, 57% des
enfants de 1 à 5 a ns e t 53% de s f emmes enceintes s ont a némiques. Les pr oblèmes
nutritionnels s ont à l ’origine de m illiers de dé cès de j eunes e nfants e t de f emmes, d’ une
réduction drastique du potentiel intellectuel et d’énormes pertes économiques. Ils représentent
un véritable frein pour le développement du pays et compromettent les efforts de lutte contre
la pauvreté.
Eu é gard à ce q ui p récède, les actions m enées j usqu'ici pour l utter c ontre l a
malnutrition des enfants au Cameroun semblent avoir un impact très peu significatif sur l'état
nutritionnel de c eux-ci. D ès l ors, une analyse des f acteurs ex plicatifs est pertinente, ét ant
donné que les séquelles de ce f léau sur la santé, le bien-être de l 'enfant, ainsi que son impact
5
sur la mo rtalité in fanto-juvénile s ont i mportants. A insi, la r éduction d e la ma lnutrition
contribuera fortement à l a baisse de l a mortalité des enfants au Cameroun et permettra à c e
pays de bé néficier du pot entiel r éel de s a popul ation pour s on dé veloppement é conomique,
social, politique.
Cette s ituation de l a m alnutrition a u C ameroun nous a c onduit à l a que stion
suivante : quels sont les facteurs explicatifs de la malnutrition des enfants de moins de cinq
ans au C ameroun ? Au-delà d es c auses i mmédiates que s ont l ’inadéquation de l a r ation
alimentaire e t la ma ladie, q uels s ont le s f acteurs q ui p ourraient ju stifier o u a lors ê tre d es
causes s ous-jacentes de la m alnutrition de s e nfants de m oins de c inq a ns a u C ameroun ?
Comment ces facteurs interagissent pour influencer l’état nutritionnel des enfants ?
L’objectif général d e cette ét ude es t d e rechercher les facteurs ex plicatifs d e l a
malnutrition des enfants de moins de cinq ans au Cameroun afin de mettre à la disposition des
pouvoirs publ ics e t des acteurs i ntervenant dans l e domaine de l a nut rition des enfants, des
connaissances l eur p ermettant d ’améliorer l es s tratégies et p rogrammes de l utte co ntre l a
malnutrition des enfants.
Spécifiquement, il est question de :
Évaluer l e n iveau et l es variations d ifférentielles d e la ma lnutrition c hez le s
enfants de moins cinq ans au Cameroun ;
Dégager le profil des enfants malnutris ;
Identifier et hiérarchiser les facteurs susceptibles d'expliquer les niveaux et les
variations de la malnutrition, ainsi que leurs mécanismes d’action ;
Formuler d es r ecommandations p ermettant d ’améliorer l’état n utritionnel d es
plus jeunes.
Pour a tteindre c es obj ectifs, les d onnées u tilisées seront celles co llectées l ors d e
l’Enquête pa r G rappe à Indicateurs M ultiple (MICS) de tr oisième génération r éalisée au
Cameroun e n 2006. Nous ferons r ecours a ux nouvelles co urbes d e r éférence d e l ’OMS
(OMS/MGRS6 - 2006) pour é valuer l ’état nut ritionnel de s e nfants. En ef fet, l'Organisation
Mondiale d e l a S anté ( OMS) a publ ié, en av ril 2006 , de nouve aux s tandards p ermettant
6 Multicentre Growth Reference Study
6
d'évaluer l a croissance des en fants de l a n aissance à l 'âge d e 5 an s. C es s tandards o nt ét é
élaborés pour remplacer les courbes de référence internationales NCHS qui étaient l’objet de
vives c ritiques. Ces d ernières (les co urbes N CHS) ne s ont pa s adaptées pour é valuer l a
croissance d'enfants nourris au sein, car elles ont été réalisées par la mesure d'enfants pour la
plupart non a llaités, comme c 'est d' ailleurs l e c as pour l a plupart des c ourbes de c roissance
actuellement u tilisées. Les s tandards O MS (WHO S tandards) reflètent u ne cr oissance d ans
des c onditions opt imales e t pe uvent ê tre ut ilisés pour é valuer l a c roissance e n t outes
circonstances, indépendamment de l’origine ethnique, du statut socio-économique et du mode
d'alimentation. Cette é tude s ’inscrit d ans le s premiers p as d e l’ utilisation d es n ouvelles
courbes de référence de l’OMS publiées en 2006.
Ce travail s’articule autour de cinq chapitres. Le chapitre premier présente le contexte
de l’étude. Au deuxième chapitre, il est question d’identifier les causes et les déterminants de
la malnutrition à travers la littérature existante sur le sujet et les différents travaux menés sur
le terrain afin de déboucher sur un cadre conceptuel et un cadre d’analyse adaptés à l’étude.
Dans le troisième chapitre consacré aux aspects méthodologiques, l’on présente les données à
utiliser et la méthodologie d’analyse de ces données. Par la suite, la description des facteurs
associés à la malnutrition est faite dans le quatrième chapitre. Le dernier chapitre est un essai
d’explication des principaux résultats.
7
CHAPITRE I : CONTEXTE DE L’ÉTUDE
i la santé et la mortalité dépendent en partie de l’environnement naturel ou de son
aménagement p ar l ’homme, il f aut néanmoins noter que les i ndividus peuvent
aussi par l eurs co mportements e t ha bitudes de vi e favoriser ou empêcher l’incidence d es
maladies e t de l a m ort (Stanley et J oske, 1980) . Cependant, ces comportements s ont e ux-
mêmes en grande partie déterminés par des attitudes souvent induites par l’héritage culturel,
les conditions de vie et les politiques conduites au niveau local ou n ational, notamment dans
le domaine de la santé en général et des soins accordés aux enfants en particulier. Ce chapitre
présente, en rapport av ec l e t hème d e l ’étude, le co ntexte d ans lequel l’ étude es t m enée. Il
s’agira de l a s ituation g éographique e t a dministrative du C ameroun, de s a s ituation
économique, du contexte socioculturel et démographique, de la situation sanitaire du p ays et
de la situation alimentaire et nutritionnelle.
1.1. Situation géographique et administrative du Cameroun7
Le Cameroun est un pa ys d’Afrique Centrale situé au fond du Golfe de Guinée, entre
les 2e et 13e degrés de latitude Nord et les 9e et 16e degrés de longitude Est. Le pays s’étend
sur une superficie de 475 650 ki lomètres carrés. Il présente une forme triangulaire qui s’étire
au Nord jusqu’au lac Tchad sur près de 1 200 km tandis que la base s’étale d’Ouest en Est sur
800 km . Il pos sède au S ud-Ouest une f rontière m aritime de 420 km l e l ong de l ’océan
Atlantique. Il est limité à l’Ouest par le Nigéria, au Sud par le Congo, le Gabon et la Guinée
Équatoriale, à l’Est par la République Centrafricaine, et au Nord-Est par le Tchad.
Depuis 1996, les institutions de la République sont régies par la constitution révisée. Il
faut s ignaler que cette révision constitutionnelle a consacré la décentralisation de la gestion
des af faires d e l ’Etat. D es s tructures d écisionnelles r égionales s ont p révues au n iveau d es
régions. Il est prévu que de toutes ces institutions centrales et régionales se mettront en place
au fur et à mesure des exigences de l’heure et des moyens nécessaires à cet effet. Ainsi, à la
faveur du dé cret pr ésidentiel N ° 2008/ 376 du 12 nove mbre 2008 por tant or ganisation
7 Les informations contenues dans cette section, lorsque mention n’est pas faite du contraire,
proviennent de l’EDSC-2004.
S
8
administrative de l a R épublique du C ameroun, l e t erritoire e st or ganisé en c irconscriptions
administratives et constituent des circonscriptions administratives : les régions, départements
et les arrondissements. Ce décret consacre le début de la décentralisation et transforme les dix
provinces du C ameroun en dix régions. Avec l a décentralisation, les r égions complètent et
corrigent les différentes actions dans le domaine de la santé. Ce dispositif vise à assurer et à
adapter l ’offre d e s oins aux car actéristiques d e chaque t erritoire. C’est a insi que certains
secteurs s e retrouvent renforcés en fonction de s be soins de l a pop ulation : maternité,
alimentation, urgences, gériatrie.
Le m ilieu na turel du C ameroun e st très diversifié. Trois g rands t ypes de r égions
naturelles contribuent à cette diversité, lui conférant ainsi la réputation d’être une « Afrique en
miniature ».
Le sud forestier (régions du Centre, de l’Est, du Littoral, du Sud et du Sud-Ouest) est
situé d ans le s z ones maritime e t é quatoriale. C ette z one s e car actérise par u ne v égétation
dense, un va ste r éseau hydrographique et un c limat c haud e t hum ide a ux précipitations
abondantes. C’est une zone propice à la culture du cacao, du palmier à huile, de la banane, de
l’hévéa et du t abac, etc. E lle ab rite les deux plus grandes vi lles du pa ys: Douala (principal
port et c apitale é conomique av ec s es activités co mmerciales et i ndustrielles), Y aoundé
(capitale politique). Citons aussi d’importants centres urbains comme Edéa caractérisé par son
industrie lourde et sa centrale hydro-électrique ; Limbe, siège de l’industrie pétrolière et Kribi,
terminal du pipeline Tchad-Cameroun.
Les hauts plateaux de l ’Ouest ( régions de l ’Ouest e t du N ord-Ouest), dont l’altitude
moyenne est supérieure à 1 100 m, forment une région riche en terres volcaniques favorables
à l ’agriculture ( café, m araîchers, et c.). La v égétation y es t m oins d ense q ue d ans l e s ud
forestier et le climat frais qui y règne est favorable à l’éclosion de toutes sortes d’activités. De
plus, l a f orte de nsité d e peuplement, par r apport à l a m oyenne n ationale, en f ait u ne d es
premières z ones d ’émigration. Les p rincipales v illes s ont B afoussam, B amenda e t la v ille
universitaire de Dschang.
Le nord soudano sahélien (régions de l’Adamaoua, du Nord et de l’Extrême-Nord) est
une région de savanes et de steppes. En dehors du plateau de l’Adamaoua où le climat est plus
tempéré, l e reste d e c ette r égion es t ca ractérisé p ar u n cl imat t ropical ch aud et s ec au x
précipitations de plus en plus limitées au fur et à mesure que l’on se rapproche du lac Tchad.
9
La région est propice à l’élevage du bovin et à la culture du coton, de l’oignon, du mil, de la
pomme de terre, de l’igname blanche et des arachides.
Au Cameroun, il existe quatre saisons: deux saisons sèches (une petite et une grande)
et deux saisons pluvieuses (une petite et une grande également). Cette variation des saisons
renvoie à une saisonnalité de la malnutrition due à la variation des composantes climatiques
citées p récédemment. C elles-ci conditionnent l a di sponibilité en eau, surtout dans l es z ones
sans adduction d'eau alors qu'on sait que la consommation directe de l'eau de mauvaise qualité
ou son usage pour la préparation des aliments, surtout les aliments de sevrage du nour risson,
expose à la morbidité (Ngo Nsoa, 2001).
Les fluctuations locales du c limat qui influencent l a qualité des sols peuvent induire
des variations dans l a p roduction agricole. Cette dernière es t susceptible d'affecter de f açon
inégale l 'état nutritionnel des enfants, ca r à ch aque cl imat correspond un type particulier de
végétation et de ressources végétales et animales. Les individus se nourrissent différemment
selon les ressources alimentaires disponibles dans les régions où ils vivent.
1.2. Situation socio-économique8
La s anté de s e nfants, évaluée à t ravers l eur état nutritionnel, dépend à la f ois de l a
qualité des aliments consommés et des soins reçus en cas de maladie ; tous tributaires du coût
des produits de base et plus généralement du niveau de développement socio-économique du
pays e n question. Ainsi, l a pr ésente s ection présente l a s ituation s ocioéconomique du
Cameroun.
Le développement économique du Cameroun repose principalement, comme la plupart
des pa ys e n voi e de d éveloppement, s ur l e s ecteur pr imaire. Une g rande p artie d e l a
population du C ameroun dé pend d e l ’agriculture qui r eprésente e nviron 22,5% du P IB e n
2005(MICS, 2006) . D’après l a m ême s ource, l ’industrie et l e co mmerce co ntribuent
respectivement pour environ 21% et 57% du P IB. Les productions agricoles vivrières (maïs,
manioc, banane plantain, macabo, riz, mil, sorgho et arachide, etc.) et de rente (cacao, café,
coton, c aoutchouc, ba nane, a nanas, e tc.) f ont de l ’agriculture c amerounaise l ’une de s plus 8 Les informations contenues dans cette section, lorsque mention n’est pas faite du contraire,
proviennent de l’EDSC-2004.
10
riches d’Afrique Centrale. Cependant les habitudes alimentaires des populations ne favorisent
pas toujours une alimentation quotidienne équilibrée avec une répercussion néfaste sur l’état
nutritionnel de celles-ci.
Les r essources p étrolières et f orestières s ’ajoutent à cel les d ’origine pastorale et
agricole pour constituer des arguments de poids en faveur d’une base industrielle sur laquelle
le pays pourrait s’appuyer pour accélérer son développement. En 2002, Le PIB est estimé à
7 609 m illiards de F CFA, s oit pr ès de l a m oitié de c elui de l a C EMAC e stimé à 16 627
milliards de FC FA (EDSC, 2004) . C ependant, il r este u n pays pa uvre : s elon l a de uxième
Enquête Camerounaise auprès des Ménages de 2001, près de deux personnes sur cinq (40,2%)
vivent en dessous du seuil de pauvreté, estimé à 232 547 FCFA par adulte et par an. Le taux
d’activité de la population âgée de 15-64 ans est de 66 % en 1987 (deuxième RGPH). D’après
l’ECAM II, l e t aux d’activité (au sens du B IT) est estimé en 2001 à 72 % . D’autre part, l e
taux de scolarisation (personnes de 6-14 ans) qui était de 73 % en 1987 est estimé en 2001 à
79 %. Le taux d’alphabétisation qui se situait en 1987 à 47 % est estimé à 68 % en 2001; mais
reste encore assez faible pour les femmes (55 %).
Sur l e p lan m acro-économique et s ocial, l'économie cam erounaise a, j usqu'en 1985,
affiché une croissance régulière soutenue par un développement continu de la production, des
exportations a gricoles et de l 'exploitation de s r essources pé trolières. Les t aux m oyens de
croissance réelle o nt été d'e nviron 5% (CCA, 1998) sur une di zaine d' années. L'activité
économique s e dé grade à pa rtir de 1985 e n r aison, not amment, de l a ba isse de s c ours
internationaux des principaux produits d'exportation (pétrole, café, cacao et coton), ce qui fait
entrer l e p ays d ans u ne s évère r écession. Le g ouvernement ap plique une pol itique
d'ajustement s tructurel, avec entre au tres u ne baisse d rastique d e s alaires et l e gel d es
recrutements dans la fonction publique. Entre 1985 et 1991, le niveau de l'emploi baisse de 10
% et le chômage touche principalement les jeunes et les femmes, entraînant le développement
du s ecteur i nformel (OMS, 200 5). La b aisse c ontinue de s r evenus des m énages induit une
chute de 40 % d e l a consommation pa r ha bitant e ntre 1985/ 86 et 199 2/93 et une faible
diversification alimentaire d’après la même source.
Le taux d'investissement passe de 27 % à moins de 11 % du P IB. L'offre publique de
services s ociaux d e b ase, p articulièrement l a s anté et l 'éducation, s e t rouve af fectée p ar l es
difficultés f inancières d e l' État. La s ituation s ociale s e d étériore, fragilisant a insi l’ état
nutritionnel des couches les plus vulnérables que sont les enfants.
11
En 1994, la dévaluation du Franc CFA favorise le retour de la croissance économique.
La s ituation m acroéconomique s 'améliore, not amment da ns l es s ecteurs e xportateurs et au
niveau de s finances pub liques. La dé cennie qu atre-vingt d ix es t m arquée p ar l es r éformes
structurelles q ui p ermettent d e consolider l es éq uilibres m acro-économiques. Le pa ys
bénéficie du s outien f inancier du F onds M onétaire International et d e l a B anque M ondiale
sous f orme d' une F acilité d'Ajustement S tructurel R enforcée ( FASR) d e t rois an nées
(1997/2000). La croissance est ininterrompue depuis six ans et a atteint un taux moyen de 4,7
% du P IB entre 1997 e t 2000. P our l a pé riode 1999-2000, l e P IB p ar habitant é tait d e U S
$840. N éanmoins, l a c rise é conomique a a ccentué l a pr ession de l a dette e xtérieure e t
l'accumulation des arriérés de paiements. Elle est estimée, en pourcentage du PIB, à 74,8 %
pour 2000/2001. En octobre 2000, l e Cameroun bénéficie de l'allégement de la dette au titre
de l 'Initiative en f aveur d es P ays P auvres T rès E ndettés ( PPTE) e t s ouscrit à la n ouvelle
approche de réduction de la pauvreté. Le pays s'engage à utiliser les ressources additionnelles
ainsi obt enues pour r enforcer l es services s ociaux d e b ase, es sentiellement l a s anté et
l'éducation. L'initiative de r éduction de l a de tte de vait r endre di sponibles de s r essources
additionnelles d'environ 37 milliards de FCFA pour 2000/2001 et 70 milliards de FCFA pour
2002/2003 (MINEPAT(a)/CE, 2001). Dans le cadre de la santé, les ressources de l 'Initiative
PPTE o nt é té o rientées principalement v ers l a lu tte c ontre le p aludisme, le V IH/SIDA, la
prévention des maladies évitables par la vaccination et le recrutement du personnel de santé.
Malgré une légère hausse de l'Indice de Développement Humain entre 1999 (0,506) et
2000 (0,512), le Cameroun est passé du 125ème rang sur 162 pays en 1999 (PNUD, 2001) au
135ème sur 173 pa ys en 2000 (PNUD, 2002). Comme indiqué plus haut, l’ECAM II montre
que la pauvreté continue de toucher 40,2 % de la population malgré un recul de 13 points par
rapport à 1996 ( 53,3 % de pa uvres). Bien qu 'on obs erve un e croissance é conomique, l es
revenus et le pouvoir d'achat restent faibles même si l'écart entre le revenu moyen des pauvres
et l e s euil d e p auvreté s’est amélioré, passant de 19,1 % e n 1996 à 1 4,1 % e n 2001. La
répartition d es f ruits d e l a cr oissance r este i négale. La p auvreté ap paraît co mme u n
phénomène plutôt féminin e t rural au Cameroun. Les régions à plus fort indice de pauvreté
sont cel les d e l 'Extrême-Nord, du N ord e t de l 'Adamaoua (MINPLAPDAT/PNUD, 2 006).
Toutefois, l a pauvreté ur baine constitue un problème grandissant car l ’appauvrissement des
familles a eu pour conséquence la dégradation des indicateurs sociaux en général et celle des
indicateurs de santé infantile, maternelle et nutritionnelle en particulier. La vulnérabilité de la
femme s’est également accrue, entraînant la précarité de la situation de l’enfant.
12
Pour f aire f ace à c es d ifférents p roblèmes, l es autorités ont t our à t our opt é pour
l’introduction a u c ours des a nnées 1990, de l a D imension S ociale da ns l es P rogrammes
d’Ajustement S tructurel (PAS) e t au cours des années 2000 à l’élaboration de S tratégies de
Réduction d e l a P auvreté ( SRP). D ès l ors, les e fforts du pa ys vont dans l e s ens d e l a
stabilisation dur able de s g rands a grégats m acroéconomiques, l a c ontinuation de l a m ise e n
œuvre des stratégies de réduction de la pauvreté dans le cadre du Document de Stratégie de
Réduction de l a P auvreté ( DSRP) e t la r éalisation d es O bjectifs d u Millénaire p our le
Développement à l’horizon 2015.
En f ormulant une vi sion vol ontariste du d éveloppement à l ong t erme « Cameroun
Vision 2035 » en m ars 2009, l e Gouvernement s'engage à réduire l a pa uvreté à un niveau
socialement acceptable, à accéder au statut des pays à revenu intermédiaire en veillant à u ne
répartition moins inégalitaire des revenus et enfin, à atteindre une croissance de qualité afin de
devenir un nouveau Pays Industrialisé. Cet exercice vise à donner un ancrage à long terme au
Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi (DSCE), adopté en août 2009. Il s’agit
de f onder l es s tratégies du DSCE sur un c ap r eflétant les a spirations pr ofondes d es
camerounais avec un horizon suffisamment long afin d’anticiper les changements structurels
de la société (MINEPAT(a), 2009).
1.3. Contexte socioculturel et démographique9
1.3.1. Principaux repères Depuis 1960, a nnée de son accession à l’indépendance, le Cameroun a organisé trois
grandes opérations de dénombrement de sa population, notamment en 1976, 1987 et 2005. En
attendant la publication des résultats du troisième Recensement Général de la Population et de
l’Habitat ( RGPH 3) de 2005, l es e stimations s ituent l ’effectif de l a pop ulation a utour de
17 000 000 d’ habitants en 2004 ( MICS 2006) . Il existe e nviron 230 e thnies a u C ameroun
réparties en six grands groupes humains, à savoir :
- les Soudanais, les Hamites et les Sémites vivent dans les régions de l’Adamaoua, du
Nord et de l’Extrême-Nord ;
- les Bantous, les apparentés aux Bantous et les Pygmées habitent les autres régions. 9 Les informations contenues dans cette section, lorsque mention n’est pas faite du contraire,
proviennent de l’EDSC-2004.
13
Plusieurs r eligions s ont p ratiquées au C ameroun en l ’occurrence l e c hristianisme,
l’islam et l’animisme. Il en découle une diversité culturelle qui présente ainsi différents traits
en matière de perception de la maladie, des soins à accorder aux enfants, de l’alimentation du
nourrisson et de l’attachement à l’enfant.
La structure de la population montre un l éger déséquilibre en faveur des femmes qui
en représentent 50,8 %. Avec une population largement jeune dont l'âge moyen est de 22 ans,
la pyramide des âges est caractéristique des pays en développement. Les personnes de moins
de 15 ans représentent 46 % d e l a popul ation, tandis que celles âgées de pl us de 65 ans
comptent pour 3,2 %, selon les estimations de l'année 2000. Les enfants de moins de 5 ans
occupent une proportion non négligeable dans la population totale – soit 17% de celle-ci.
La densité de la population est de 32 h abitants au Km² avec des disparités régionales
variant de 6,4 à l'Est à 136,8 à l'Ouest. La population rurale est plus importante que celle des
milieux ur bains qui né anmoins c roît t rès r apidement, pa ssant de 20 % en 1976 à 38 % en
1987, l es vi lles de D ouala e t de Yaoundé é tant l es pl us pe uplées (1,6 e t 1 ,4 millio ns
d'habitants respectivement). Cette population augmente rapidement et le taux d’accroissement
annuel moyen estimé à 1,9 % en 1950 a été évalué à 2,9 % en 1987. Les facteurs déterminants
sont e ntre autres l a f écondité qui dé cline d epuis l a f in de s a nnées 80 , a vec de s i ndices
synthétiques de fécondité qui sont passés de 6,4 enfants par femme en 1978, 5,2 en 1998 à 5,0
en 2004. La fécondité des adolescentes contribue pour 14 % de la fécondité totale, et 50 % des
femmes o nt l eur p remier ac couchement avant l 'âge d e 19 ans. Selon l e M INADER/PAM
(2008), ce dernier taux d’accroissement de la population est supérieur au taux de la production
vivrière depuis plusieurs décennies.
Au Cameroun, l a mortalité a diminué dans l ’ensemble. Le taux brut de mortalité es t
passé de 14‰ en 1987 à 10‰ en 2001. L'espérance de vie à l a naissance est ainsi estimée à
59 ans (56,7 ans pour les hommes et 61,3 ans pour les femmes) contre 55,1 ans en 1987, soit
un gain de 4 a ns. Cette réduction ne s'observe pas pour la mortalité infantile qui connaît une
remontée des t aux entre 1991 e t 1 998 : de 65 ‰ à 77‰. Le ta ux d e mortalité in fantile et
juvénile passe aussi de 126‰ à 150,7‰ pour la même période. La situation est beaucoup plus
préoccupante en milieu rural qu'en milieu urbain où l'accessibilité aux services des soins est
meilleure. Selon l ’UNICEF ( 2007), les m alnutritions pr oteino-énergétiques s ont la cau se
sous-jacente d e 3 8% d e d écès d ’enfants d ’âge préscolaire au C ameroun. La m ême s ource
14
estime à p lus d e 2 18 000 les décès d ’enfants de m oins de ci nq an s suite à la ma lnutrition
protéino-énergétique à l’horizon 2011 si des mesures fortes ne sont pas prises.
Face à ces pr oblèmes d e popul ation, l e pa ys s 'est dot é d' une pol itique n ationale de
population dont le but est d' « améliorer le niveau et la qualité de vie de la population dans le
cadre d’un développement durable en conformité avec la dignité humaine et les Droits
Fondamentaux de l’Homme, en assurant notamment l’adéquation entre la croissance
démographique et les ressources disponibles et accessibles »10 (MINEPAT(a), 2002).
1.3.2. Politique de population
Au dé but de s a nnées 8 0, l e C ameroun a opt é pour une i ntégration de l a va riable
démographique da ns l e processus de d éveloppement s ocio-économique. P our m ener c ette
option à terme, les pouvoirs publics ont mis sur pied d’importantes mesures devant aboutir à
cette f in. C’est ainsi qu’une Commission Nationale de la Population a été instituée en mars
1985, a vec pour pr incipale m ission d’ assister l e G ouvernement d ans l a d éfinition,
l’orientation, l’harmonisation et la recherche des voies et moyens de mise en œuvre de cette
politique. L a Déclaration d e l a Politique N ationale de P opulation a doptée pa r l es pouvoi rs
publics en 2002 v ise, avec u ne l arge p articipation d e t outes l es co uches de l a s ociété
camerounaise, à doter le Cameroun d’un potentiel humain de qualité.
En accord avec cette politique, les objectifs généraux suivants ont été définis :
• a méliorer l ’état de s anté de l a popul ation e n g énéral, e n f ournissant de s e fforts
particuliers dans le domaine de la santé de la reproduction afin d’améliorer l’état de santé des
enfants et celui de leur mère;
• promouvoir l’éducation de base pour tous et celle des filles en particulier ;
• renforcer la lutte contre le chômage ;
• promouvoir l’égalité et l’équité entre les sexes ;
• renforcer l’autosuffisance et promouvoir la sécurité alimentaire ;
• promouvoir l ’occupation r ationnelle de l ’espace e t l a pr éservation de
l’environnement ;
10 cf. Déclaration de Politique Nationale de Population du Cameroun.
15
• am éliorer l es conditions n écessaires à l ’épanouissement e t à l a s auvegarde d e l a
famille et de l’individu ;
• améliorer les conditions de mise en œuvre et de suivi/évaluation des programmes de
population.
Ces obj ectifs gé néraux s ont t raduits e n obj ectifs s pécifiques, et le s o rientations
générales d e l eur m ise en œuvre s ont é galement dé finies. Leur e xécution s ’appuie s ur de s
stratégies opérationnelles élaborées dans chaque secteur (stratégies sectorielles des différents
ministères e t or ganismes). D es a ctions a ppropriées, qua ntifiées e t r éalistes s ont e ntreprises
pour atteindre les objectifs fixés. La coordination est réalisée par la Commission Nationale de
Population qui est secondée par un Comité Technique interministériel.
Les s ources d’ informations l es pl us f iables s ur l e pl an dé mographique r estent les
enquêtes démographiques r égionales o u n ationales et l es r ecensements g énéraux d e l a
population r éalisés e n 1976 et 1987. Le tableau ci -après p résente l es i ndicateurs
Sources : Extrait MINEFI/Direction du Budget, Recueil des Lois de Finances (Hors financements extérieurs)
Dans le cadrage budgétaire de Juillet 2002 du M inistère de la Santé Publique, la lutte
contre la maladie représente 19,6% des dépenses. Ce qui traduit ainsi l’option des autorités de
réduire s ignificativement la charge d e mo rbidité induite p ar le s p athologies p rioritaires q ue
sont le paludisme, le SIDA, la tuberculose, les maladies de l’enfant, les maladies maternelles
et péri n atales. La P rise e n c harge in tégrée d es ma ladies d e l’ enfant dont f ait p artie l a
malnutrition ne représente que 0,4% des dépenses. Toutefois, le programme de promotion de
la santé ayant en son sein le projet de promotion de la santé par l’alimentation et la nutrition
n’occupe que 3% des dépenses.
1.4.3. Principales maladies affectant les enfants de moins de 5 ans
Au C ameroun, l es i nfections r espiratoires ai guës, l a f ièvre et l a d iarrhée o nt ét é
reportées comme des problèmes de santé importants chez les enfants. Au moins un enfant sur
dix souffrait de toux accompagnée de respiration courte et rapide au cours des deux semaines
précédant l ’Enquête D émographique et de S anté de 2004. Durant c ette même période, p rès
d’un quart des enfants avait aussi la fièvre. S’agissant de la diarrhée, moins d’un enfant sur
cinq (16 %) a eu un ou plusieurs épisodes diarrhéiques durant cette même période. Au cours
des é pisodes di arrhéiques, 23 % des en fants n ’ont b énéficié d ’aucun t ype d e r éhydratation.
23
Dans seulement 21 % des cas, des soins ont été administrés au cours de la maladie (EDS III,
2004).
Les résultats de l’enquête CFSVA montrent que le paludisme est la première cause de
morbidité au Cameroun. Les proportions varient de 40 % au Sud-Ouest à 96% dans l’Ouest.
La d euxième m aladie af fectant l es p opulations r urales es t l a d iarrhée, m ais d ans d es
proportions plus faibles. Au Sud-Ouest et à l’Est, elle touche un tiers de la population et est
peu répandue d ans l es régions septentrionales o ù l es m aladies r espiratoires s ont pl us
communes. Les communautés rapportent que ces pathologies affectent le plus les populations
en saison pluvieuse (38 %), mais un tiers indique aussi qu’elles sont présentes tout au long de
l’année.
Pour ce qui est de la vaccination des enfants, le taux global de couverture est encore
faible. En effet, seulement 48 % d’enfants de 12-13 mois ont reçu tous les vaccins essentiels
(Polio, R ougeole, méningite, e tc.) e t 5 % d’entre e ux n’ ont e u a ucun va ccin. T outefois,
lorsqu’on considère les vaccins spécifiques, les taux de couverture sont plutôt encourageants.
Les r ésultats de l ’EDS III indiquent que 86 % des enfants de 12-23 mois ont reçu le BCG,
65% les t rois dos es de DTCoq, 67 % celles d e l a P olio et 6 5% sont v accinés co ntre l a
rougeole. Par rapport à 1998, on note une nette amélioration de la couverture vaccinale (36%
d’enfants t otalement vaccinés en 1998) . Les e nfants qui bénéficient d’ une m eilleure
couverture vaccinale sont ceux de mères instruites, vivant en ville ou qui appartiennent à un
ménage rural plus aisé.
Malgré les efforts appréciables pour suivre les besoins de la population, les stratégies
mises en place n’ont pas encore produit les résultats escomptés. Selon l’OMS (2005), certains
facteurs sont à l’origine de cette situation. Parmi les plus importants, ceux qui relèvent de la
difficulté à mettre en place les districts de santé : i) le Paquet Minimum de Soins qui n’est pas
effectif à c ause d u gel d u r ecrutement d u p ersonnel et d es d ifficultés d e sa g estion ; ii) le s
soins de santé de base qui restent inaccessibles géographiquement e t économiquement a ux
populations ; i ii) l es soins de santé de l a Reproduction de qua lité non d isponibles s elon l es
paquets m inima dé finis l ors du S ymposium N ational s ur l a S R ; i v) l a c oordination
intersectorielle qui n’a pas réussi ; v) l’absence d’un plan directeur national pour canaliser les
interventions des différents partenaires (Etat, coopérations bilatérale et multilatérale, ONG de
Santé et C ommunauté) ; v i) u n cer tain gaspillage d es r essources p ar u ne u tilisation non
efficace et efficiente.
24
On pe ut t outefois r elever que lques atouts : i) la d écentralisation d es s ervices e t la
participation de s communautés à l a gestion a ux di fférents ni veaux de s s ervices ; ii) le s
expériences pi lotes qu i dé montrent l es pos sibilités d e l’ approche d e d istrict ; iii)
l’accroissement d u s ecteur p rivé à b ut lu cratif e t n on lu cratif q ui p ourrait a ider l’ Etat à
augmenter l’accès aux soins ; iv) les possibilités de financement par les ressources internes ;
v) l’ impact d e la C ENAME s ur la d isponibilité e t le p rix d es mé dicaments e ssentiels
génériques vi) la définition d’un cadre conceptuel (Politique de SR, Normes et Procédures).
1.5. Situation en eau et assainissement
Une e au pot able et un environnement s ain sont des éléments de base pour l a bonne
santé des enfants. Une eau non potable peut être un vecteur important de maladies telles que
le t rachome, l e ch oléra, l a f ièvre t yphoïde et l a s chistosomiase qui e xposent à l eur t our
l’enfant à un risque élevé de malnutrition. L’eau de boisson peut également être contaminée
par des produits chimiques, des matières physiques et radiologiques qui ont des effets néfastes
sur l a santé humaine. En p lus de son association aux maladies, l ’accès à l ’eau potable peut
être p articulièrement imp ortant p our l es femmes et l es en fants, n otamment da ns l es z ones
rurales où le transport de l’eau qui s’effectue souvent sur de longues distances leur incombe
principalement. Les enquêtes (DHS, ECAM, M ICS) rendent compte de l’accès à l ’eau et à
l’électricité ainsi que des caractéristiques de l’habitat : existence ou non de toilettes et d’un sol
en ciment. L’impact des infrastructures sur la santé est clairement établi de nos jours : l’accès
à l ’eau p otable, l es t oilettes av ec ch asse d ’eau e t u n s ol en c iment é vitent d e nom breuses
maladies, notamment intestinales, qui retardent la croissance.
1.5.1. Eau
Les donn ées recueillies l ors de l a M ICS 2006 f ournissent que lques i nformations sur
les s ources d’ approvisionnement e n e au. D ans l ’ensemble du C ameroun, e nviron s ept
personnes s ur di x ( 69%) ut ilisent une s ource a méliorée d’ eau pou r l a boi sson. Les
installations modernes (robinets et bornes fontaines) fournissent de l ’eau à quatre personnes
sur dix (40%), les forages et les puits protégés à 29% de la population. Les populations qui
utilisent ces installations ont recours aux robinets, qu’ils soient dans la maison (15% de cas)
ou chez le voisin (7%) e t aux bornes fontaines (18%). Le robinet dans le logement, dans la
25
cour/parcelle, chez le voisin, le puits ou la source non protégée et la borne fontaine sont dans
l’ordre cité, les trois principales sources d’approvisionnement en eau de boisson.
En milieu urbain, neuf personnes sur dix (90%) font usage d'une eau provenant d’une
source améliorée contre moins de cinq personnes sur dix (49%) en milieu rural. Une personne
sur c inq ( 20%) en m ilieu ur bain di spose d 'un robinet da ns l e l ogement e t pr ès de t rois
personnes s ur di x ( 29%) ont a ccès à un r obinet ou une bor ne f ontaine p ublique. E n m ilieu
rural, c’est le puits à pompe ou le forage qui est relativement le plus utilisé (19%).
La proportion de l a pop ulation qui a accès à un e source d 'eau améliorée se s itue au
dessus de la moyenne nationale dans les régions du Littoral (81%), du S ud-Ouest (79%), du
Centre (76%) e t de l ’Ouest (71%). La s ituation parait préoccupante dans le Nord où qu atre
personnes seulement sur dix (41%) ont accès à une source d’eau améliorée. La borne fontaine
est le p remier mo yen d e r avitaillement d es p opulations en eau d ans le S ud-Ouest ( 42%), à
Yaoundé (37%), dans le Littoral (33%) et le Nord-Ouest (27%). A l’Est, les sources protégées
sont relativement les plus usitées (21%).
1.5.2. Assainissement
De manière générale, il ressort de la MICS 2006 que près de trois personnes sur cinq
(59%) utilisent comme lieu d'aisance des latrines à fosse ou un t rou ouvert. Cette proportion
est de 71% en milieu rural et de 47% en milieu urbain. En ce qui concerne les installations
sanitaires am éliorées11, e lles s ont ut ilisées pa r 33% de l a popul ation; s oit 52% e n m ilieu
urbain contre 15% en milieu rural. Les principales installations améliorées utilisées sont les
latrines co uvertes d ans 21% d e cas , s uivies d e l oin p ar l es ch asses b ranchées à l a f osse
sceptique, s oit 9% . Le pourcentage de l a popul ation qui ut ilise l es i nstallations s anitaires
améliorées est plus élevé à Douala (65%), Yaoundé (61%) ainsi que dans les régions du Sud-
Ouest ( 54%) et du Littoral ( 50%) qu e da ns l e r este du pa ys. Les i nstallations s anitaires
sommaires comme les la trines à trou ouvert constituent le p remier mode d’évacuation dans
l’Adamaoua (82%), l ’Ouest (76%), l ’Est (74%), l e Centre (72%), l e Sud (69%), l ’Extrême-
Nord (65%) et le Nord-Ouest (62%).
Concernant l e c as s pécifique d es en fants d e 0 -2 an s, l eurs ex créta s ont s ainement
évacués dans 65% de cas, c 'est-à-dire jetés dans les toilettes ou dans les latrines. Toutefois,
11 Installation améliorée correspond à la chasse branchée à l’égout ou à la fosse septique ou à la latrine, ou à la latrine améliorée auto aérée (LAA), à la latrine couverte ou le seau/pot/tinette.
26
23% de s m énages l es é vacuent da ns l es o rdures m énagères, les la issent à l' air lib re o u le s
enterrent. Ces mauvaises pratiques sont plus répandues dans le Sud (50%), le Centre (42%) et
l'Est (38%). La situation est meilleure à Douala (94%), à Yaoundé (92%) et les autres centres
urbains ( 78%) o ù l es ex créta d es en fants s ont co rrectement év acués. E n m ilieu r ural, cet te
évacuation n’est bien faite que pour un enfant sur deux.
1.6. Situation alimentaire et nutritionnelle
1.6.1. Situation alimentaire L'idée t rop souvent r épandue du s evrage brutal de l 'enfant (son alimentation passant
sans transition du s eul lait maternel au plat préparé pour les adultes) semble vérifier dans le
contexte Camerounais. En effet, les aliments donnés ne conviennent pas toujours au tout petit,
dont le s possibilités d igestives sont limitées (ex. Fali du T ingelin : a rachides grillées p ilées
dans l 'eau, dès l 'âge de deux mois) ; les préparations diverses (décoction de farine, bouillie)
variant s uivant l a r égion ( encadré 1.1) . Même si ceci s emble être l 'exception, u n s evrage
partiel t rès t ardif es t l a co utume d ans cer taines régions et ethnies, ou m ême pour c ertains
enfants d'ethnies pratiquant en principe un sevrage partiel moins tardif.
Encadré : Répartition géographique de l’alimentation
- Tubercules, racines et plantains : alimentation de base pour les populations de la forêt (Centre, Sud,
Est, Littoral et Sud-Ouest) ;
- Céréales (mil et sorgho su rtout) p our celles d e l a s avane s oudano-sahélienne
(Adamaoua/Nord/Extrême-Nord) avec prédominance du maïs pour les céréales ;
- Feuilles et légumes verts pour l es H auts P lateaux d e l’Ouest ( Ouest e t N ord-Ouest) ; la
consommation de viande, poisson, fruits et lait est restreinte.
Source : SSS, Juillet 2002
Les questions de sécurité alimentaire et de protection de l’environnement occupent une
place centrale da ns l es droits a u dé veloppement. D epuis l es i ndépendances, l es pol itiques
nationales de d éveloppement s ont é troitement l iées a ux politiques a gricoles. E lles o nt é té
avant l ’arrivée d e l a r ente p étrolière, l a s ource p rincipale d es r ecettes d ’exportation et
demeurent la base de l’économie alimentaire du pays. Des politiques agricoles, alimentaires et
27
de dé veloppement dur able s ont né cessaires p our f avoriser l a s écurité alimentaire et lutter
contre les carences nutritionnelles.
L’agriculture oc cupe pr ès de 70 % d e l a p opulation act ive et assure d ans u ne l arge
mesure l’approvisionnement alimentaire du pays et elle génère environ un tiers des recettes en
devises, 15% des ressources budgétaires et constitue 32% du PIB (CCA, 2000). L’agriculture
est l’activité qui induit le plus d’effets d’entraînement sur les autres secteurs, contribuant ainsi
à l a diversification des exportations, à l a création d ’emplois et à l a lutte contre l a pauvreté.
Les p roduits agricoles e t forestiers r eprésentent l e t iers des exportations totales, soit un pe u
plus que le pétrole brut. Le tableau 1.4 pr ésente l ’évolution de la production des principales
cultures vivrières en millier de tonnes.
Tableau 1.4 : Production des principales cultures vivrières (en milliers de tonnes)
Produits 1996/97 1997/98 1998/99 Bananes douces 740 763 783 Bananes plantain 1290 1326 1364 Macabo/taro 771 793 815 Riz/paddy 35 36 - Mil/sorgho 366 371 381 Maïs 760 789 819 Pomme de terre 39 - - Source : Ministère de l’agriculture; MINEFI - Direction de la Prévision (2001) - Rapport économique et financier
L’insécurité alimentaire règne au Cameroun parmi cer taines couches défavorisées de
la population urbaine, parmi certaines fractions de la population rurale et surtout dans la zone
septentrionale o ù l a s écheresse et l es p arasites sont d es c alamités n aturelles co urantes. Il
convient de relever que la partie Nord du pays est souvent sujette à des famines épisodiques,
conséquences des aléas climatiques (sécheresse prolongée, inondations) et des invasions des
acridiens (criquets migrateurs). C’est ce qui explique l’inscription de ce pays sur la liste des
pays devant bénéficier du Programme Spécial pour la Sécurité Alimentaire (PSSA), l’objectif
étant d’assurer à tous l’accès matériel et financier aux aliments de base (CCA, 2000). Pour le
réaliser, le Cameroun a mis sur pied avec l’assistance technique de la FAO, un plan national
axé sur quatre composantes : la maîtrise de l’eau, l’intensification de la production vivrière, la
diversification de l a production et l ’analyse des contraintes. Par ailleurs, ce pays a conçu et
mis en œuvre avec le concours de la Banque Mondiale, un programme de sécurité alimentaire
28
qui a a bouti à l a c réation de s tructures t elles que le Fonds d’ Investissement de s M icro-
réalisation A gricoles et communautaires ( FIMA), le S ystème N ational d ’Alerte r apide
(SNAR) e t l’ Unité d e T raitement p ar V oie Aérienne ( UTAVA), l e pr ojet Éducation
Nutritionnelle et le projet des infrastructures de marché.
Selon l e MINADER (Programme spécial pour l a s écurité al imentaire), al ors que s es
disponibilités alimentaires représentaient 96% des besoins en 1980, elles n’en ont couvert que
81% en 1992 et s e s eraient de puis s tabilisées a utour de 80 %. Les p roductions a limentaires
n’ont donc pas suivi l’accroissement démographique et économique. Ainsi, les disponibilités
énergétiques sont passées de 2340 kilocalories par personne et par jour au début des années 80
à 2140 ki localories e n 1995 -1996 (MINADER/PAM, 2008) . P ar ai lleurs, ces m oyennes
nationales ne reflètent pas les larges disparités entre les régions et les groupes de population.
Une analyse spatiale de l’insécurité alimentaire corrélée à l ’observation de la carte de
vulnérabilité m ontre q ue l ’insécurité al imentaire p résente d es n iveaux i négaux d e g ravité
suivant les zones agro-écologiques d’une part et les groupes sociaux concernés d’autre part.
Trois zones agro-écologiques couvrent ainsi le territoire camerounais :
i- Zones rurales à h auts risques et à d éficit al imentaire chronique. Ce sont l es zones
agro-écologiques sahéliennes caractérisées par l’extrême sévérité d’une sécheresse chronique,
un f aible n iveau d e f ertilité et s urexploitation de s ols, dé ficit h ydrique pour l ’agriculture e t
l’élevage, attaques répétées de nombreux ennemis de cultures.
ii- Zones à r isques m oyens et à d éficits al imentaires o ccasionnels. La s écurité
alimentaire es t m enacée par un e s urexploitation du pe u d e terres cultivables et p ar l a
dégradation de l’environnement.
iii- Les c entres ur bains où c ertains groupes s ociaux s ont e xposés à de s dé ficits
alimentaires p ermanents à cau se d e l a f aiblesse d es r evenus. Les p auvres u rbains s ont
confrontés à des fluctuations des prix dues aux approvisionnements difficiles en nourriture.
1.6.2. Situation nutritionnelle
Globalement, l a pos ition du C ameroun e n m atière d’alimentation s’est d étériorée.
Cette d étérioration s ’est acco mpagnée d ’une d égradation d es éq uilibres al imentaires p ar
l’accroissement d es p roduits én ergétiques v égétaux en m ême t emps q ue l a r éduction d es
29
produits pr otéiques, not amment d’ origine animale, c omme l e m ontre l ’évolution de l a
structure de consommation des ménages urbains (cf. tableau 1.5).
Tableau 1.5 : Structure de la consommation totale des ménages urbains entre 1983 et 1996.
1996 1983-1984 Variation relative Alimentation et boissons dans le ménage 44 47 -5% Alimentation et boissons hors ménage 2 6 -73% Habillement et chaussures 7 8 -11% Logement 12 Équipement et entretien de maison 5 6 -23% Santé et soins personnels 10 5 100% Transports et communications 8 9 -10% Éducation 4 3 47% Loisirs et autres services 2 3 -47%
Source: MINEFI -Direction de la Statistique; Synthèse PNUD
La b aisse des s alaires de 1 993, suivie de la dé valuation du F CFA e n 1994 , a
considérablement r éduit le pouvoi r d’ achat de s ménages ur bains. Il s ’en est s uivi une f orte
contraction d e l a c onsommation a limentaire en m ilieu ur bain et don c une di minution du
nombre de r epas e t un e dé térioration de l a va leur nut ritive. La pl upart de s e nquêtes de
consommation m ontrent que l e r égime a limentaire au C ameroun est m onotone et
essentiellement v égétarien. Q uelle q ue s oit la r égion, il est lié à l’ origine e thnique, mê me
après migration des populations en milieu urbain (CCA, 2000).
Entre 1991 e t 1998, l ’on avait observé une détérioration de l `état nutritionnel au Cameroun.
La situation ne s’est guère améliorée entre 1998 et 2004, surtout en ce qui concerne le retard
de croissance et l’émaciation. En effet, la prévalence du retard de croissance chez les enfants
de 0-3 ans est passée de 23 % en 1991 à 29 % en 1998 et se situe à 30 % en 2004, dont 11 %
sous une forme sévère. Celle de l’émaciation aux mêmes âges est passée de 4 % à 6 %, puis à
7 % p our l es m êmes p ériodes. La p révalence d e l ’insuffisance p ondérale q ui s ’était accr ue
entre 1991 et 1998, de 16 % à 22 %, aurait connu une légère baisse entre 1998 et 2004 (19 %).
Les causes peuvent être regroupées en trois catégories:
(i) l a co nsommation alimentaire q ui est i nfluencée p ar l a s tructure et l es s ources d e
revenus au sein de la famille;
(ii) l’accès aux soins médicaux;
(iii) les compétences maternelles.
30
Les causes s tructurelles de c ette s ituation vi ennent de l ’inadéquation de s pol itiques
nationales en matière de vulgarisation agricole ou de stocks de sécurité, celles-ci influencées
par les causes profondes, notamment les variations climatiques et l’impact des prédateurs de
récoltes. L’enquête E CAM 96 s ur l ’état nut ritionnel de s pop ulations ur baines c onfirme c es
tendances. Selon cette enquête, l’alimentation en milieu urbain est très déséquilibrée et expose
les consommateurs à des risques de carences et d’excès. Plus de 51,3 % des pauvres souffrent
de carence d’énergie contre 7 ,9 % pour les intermédiaires et 4 ,2 % pour les familles aisées.
L’incidence de cette forme de carence est plus élevée dans les ménages dirigés par un homme,
soit 13,7 % c ontre 9,2 % a ux f emmes. Les c arences d e f er s ont également not ées da ns l es
ménages étudiés. L’incidence de cette forme de malnutrition est de 6,3 % dont 20,7 % pour
les pauvres, 7,3 % pour les intermédiaires et 1,4 % pour les riches.
Les difficultés d’accès à une alimentation saine et équilibrée se traduisent par un état
nutritionnel préoccupant de la population en général, et plus encore des enfants et des femmes
enceintes. En effet, les indicateurs de l’état nutritionnel des enfants au Cameroun cessent de
se détériorer d’année en année depuis 1991, comme l’indiquent les rapports des EDS de 1991,
1998 et 2004. Les données de l’EDSC-2004 montrent que 32% des enfants âgés de moins de
cinq ans souffrent de m alnutrition chronique modérée, et de 13% sous sa forme sévère. En
outre 68,3% des enfants âgés de 6 à 59 mois sont anémiés dont 4,8% sous une forme sévère.
Les r ésultats d e l ’EDSC-2004 i ndiquent c hez l es f emmes â gées de 15 à 49 a ns, que 45%
d’entre elles s ont an émiées ; c e p ourcentage es t d e 5 1% chez l es f emmes en ceintes. L’état
nutritionnel de s f emmes e n â ge de pr ocréer est un de s dé terminants d e la f orte mo rtalité
maternelle a u C ameroun ( 669 dé cès m aternels pour 100000 na issances vi vantes, E DSC-
2004). L’état nut ritionnel de s f emmes e n â ge de pr ocréer i nfluence aussi l ’issue de l a
grossesse, de la morbidité et de la mortalité des enfants.
Il r essort d e l a c arte 1 que l ’insuffisance pon dérale m odérée est be aucoup pl us
accentuée d ans l es r égions d e l ’Extrême-Nord (36,4%) e t du N ord ( 35,7%) où e lle t ouche
presque deux fois plus d’enfants de moins de 5 ans par rapport à la moyenne nationale (MICS,
2006). E lle e st r espectivement de 9,6% e t 8,8% da ns l es r égions du C entre e t du Littoral.
Yaoundé et Douala enregistrent les taux de 5,0% et 6,4%.
31
Carte 1 : Indices nutritionnels selon la région
Source : INS, MICS 3 Cameroun, 2006
Source : INS, MICS 3 Cameroun, 2006
Source : INS, MICS-2006 Cameroun,
Même si la malnutrition peut être considérée comme relativement élevée, on rencontre
des r égions qui connaissent une r éelle d énutrition ch ez l es en fants et d' autres qui sont
faiblement t ouchées pa r c e phé nomène. La connaissance d es c auses de l a malnutrition est
importante dans le cadre de la mise en œuvre d'une politique sanitaire. Celle-ci peut en effet
tenir compte aussi bien des maladies dominantes, des groupes sociaux à f orte prévalence de
malnutrition et des régions les plus atteintes. Le chapitre suivant fait un état des lieux sur les
causes de la malnutrition des enfants et présente les aspects théoriques de l’étude.
32
CHAPITRE II : CADRE THÉORIQUE
a malnutrition de l’enfant, et dans un cadre général la faim dans le monde, sont
des s ujets qui t ouchent à de s pr oblèmes f ondamentaux du m onde m oderne :
pauvreté, r épartition de s r ichesses, s auvegarde d e l ’environnement, dé mographie... Il n ’est
donc pas surprenant qu’il existe de nombreuses visions du problème et que chaque société en
ait une compréhension différente.
Ce chapitre fait une revue critique d e l a l ittérature pertinente sur l es causes d e la
malnutrition des enfants. Ce qui permettra de construire un cadre conceptuel et de formuler
les hypothèses de l’étude et le cadre d’analyse.
2.1. Revue de littérature
2.1.1. Connaissance biomédicale de la malnutrition
L’approche d es p roblèmes co ncernant l ’aspect m édical et nutritionnel d e la
malnutrition évolue a ussi f ort a u c ours de s années. E n réalité, la compréhension et l es
connaissances dans le domaine de la malnutrition varient souvent d’une spécialité médicale à
l’autre. Parallèlement, les s olutions pr oposées po ur éradiquer l a m alnutrition di ffèrent d’ un
groupe social à l’autre et évoluent au cours du temps.
a) Évolution des concepts sur la malnutrition de l’enfant
Connaître l’ histoire de la ma lnutrition est ut ile pour comprendre l es s tratégies
actuelles : beaucoup de programmes de prévention sont basés sur des visions anciennes de la
malnutrition et l es d écalages en tre l es recommandations r écentes et l es pratiques d e t errain
s’expliquent par cette dimension historique. Par ailleurs, la connaissance de la malnutrition va
certainement continuer à évoluer dans les années futures. L’évaluation d’idées nouvelles est
facilitée par la connaissance des perceptions anciennes dans ce domaine.
Les premières observations
La ma lnutrition a v raisemblablement e xisté s ous to utes le s latitudes depuis des
décennies. Une des premières descriptions complètes d’un tableau clinique correspondant à ce
qu’on appelle le "kwashiorkor" remonte à 1865. Elle est divulguée par deux médecins (les Drs
L
33
HINOJOSA et COINDET, 1865) qui travaillaient dans un village au Mexique (Briend, 1998).
Ces auteurs av aient observé l a p résence f réquente d ’œdèmes chez des en fants dénutris à l a
période du sevrage. Ils avaient aussi remarqué la présence fréquemment associée de diarrhées
et l e r ôle d éclenchant d e l a r ougeole. C es m édecins av aient encore n oté q ue ce t ableau
clinique d ifférait nettement de celui de l a pellagre déjà bien connu à l ’époque, même s i les
enfants œdémateux suivaient un r égime à b ase de m aïs. Le di agnostic d e pellagre avait ét é
catégoriquement rejeté.
Au début du X Xe siècle, la malnutrition de l’enfant devint plus rare en Europe et ce
sont s urtout de s m édecins t ravaillant da ns de s colonies qui décrivirent e n d étail d es cas d e
malnutrition grave. Une des plus anciennes observations vient de l’Annam12. On la doit à un
médecin milita ire français, Normet (1926), qui a vait constaté d es œdèmes chez des enfants
dénutris e t ayant une alimentation à base de r iz. Il appela c ette maladie, qui correspond a u
kwashiorkor d ans l a terminologie m oderne, “ la bouffissure d’Annam”. Il publ ie en 1926 l a
première photo connue. Il soupçonna d’emblée qu’une origine nutritionnelle en était la cause,
ayant r emarqué q u’elle n e s urvenait p as l e l ong d es r ivières poissonneuses. Ce q ui es t
remarquable est que le niveau sanguin et l’excrétion urinaire d’urée étaient abaissés chez ces
enfants bouf fis e t a ttira ai nsi l’attention sur l e r ôle des protéines dans l e développement de
cette affection.
Entre 1933 et 1935, l es p remières observations d’œdèmes as sociés à la m alnutrition
tombèrent dans l ’oubli. E ntre l es de ux g uerres m ondiales, l es c ommunications e ntre l es
différentes p arties d u m onde ét aient ex trêmement l imitées et l es t echniques d e recherche
bibliographique r udimentaires. Williams ignorait le s p ublications de N ormet relatives à l a
"malnutrition o edémateuse" quand e lle dé buta s a c arrière de p édiatre en C ôte d ’Or ( actuel
Ghana) dans les années 30. Elle aussi vit des cas d’œdèmes associés à une malnutrition et elle
les décrivit dans les "Archives of Diseases in Childhood", dans un a rticle publ ié en 1933 et
intitulé : " A nut ritional disease o f c hildhood a ssociated w ith a m aize d iet". Cette p remière
publication insiste sur les lésions cutanées observées et la description clinique met tout aussi
bien en relief les différences entre cette "maladie nutritionnelle" et la pellagre.
12 Partie orientale du Viêtnam actuel
34
Les années protéines
Peu d e t emps ap rès s a cr éation, juste ap rès l a f in d e l a s econde guerre mondiale, la
FAO envoya deux experts, les Drs BROCK et AUTRET, faire le tour de l’Afrique pour faire
le p oint d e la s ituation alimentaire d e ce continent. Leur expédition dura de ux mois e t ils
rédigèrent, à l eur r etour, un rapport i ntitulé “ Le kwashiorkor en Afrique” ( Brock et Autret,
1952). Cette publ ication eut un g rand retentissement dans le monde scientifique. Le rapport
tendait à démontrer d’une part que le kwashiorkor était très répandu en Afrique, surtout si l’on
tenait co mpte d e s es formes m ineures, et d ’autre p art q ue l a m aladie ét ait es sentiellement
imputable à un régime pauvre en protéines. Ce rapport concluait que les carences en protéines
représentaient le p roblème n utritionnel le p lus pr éoccupant en A frique. Le t erme d e
"malnutrition protéique" devint alors un terme général appliqué très largement à tous les états
de malnutrition observés dans les pays pauvres.
Des carences en protéines aux carences en énergie
Les années pa ssant, un c ertain s cepticisme s ’installa q uant a u r ôle v éritable des
carences en p rotéines comme cau se d e m alnutrition i nfantile d ans l es p ays pauvres. O n
comprit dè s l ors que l es p rogrammes d ’aide v isant à augmenter le s apports a limentaires
protéiques a vaient un i mpact f aible, v oire négligeable. C ette conviction d evait s e renforcer
quelques années plus tard à la suite d’une étude portant sur plus de deux cents programmes de
supplémentation à l ’aide d ’aliments r iches en p rotéines et m ontrant q ue l eur ef fet ét ait en
général faible, sinon nul (Beaton et Ghassemi, 1982). Une remise en cause de ces programmes
s’imposait.
En 1968, l ’équipe d’ Hyderabad t ravaillant e n Inde m ontra qu’ il n’ existait pas d e
différence de régime entre les enfants qui allaient développer ultérieurement un kw ashiorkor
et ceux évoluant vers une malnutrition de type marasme (Gopalan, 1968). Cette même équipe
a également constaté qu’une augmentation de la ration alimentaire des enfants vivant dans des
villages, permettait d ’améliorer le ur c roissance. C ette mo dification d iététique d e n ature
purement q uantitative e xerçait ainsi ses e ffets s ans qu’on ne touche à l a c omposition du
régime (Gopalan et al., 1973).
Tous ces éléments amenèrent à ab andonner progressivement le terme de malnutrition
protéique e n f aveur d e cel ui d e "malnutrition p rotéino-calorique" puis de "malnutrition
protéino-énergétique". En 1974, McLaren publia un article dans le Lancet, intitulé “The Great
35
Protein Fiasco”, où il retrace l’évolution des idées sur le sujet. Cet article répandit l’idée selon
laquelle le problème nutritionnel le plus commun à travers le monde n’est pas une carence en
protéines mais un déficit d’apports en énergie.
b) De la malnutrition pluricarentielle
L’approche p luricarencielle ap préhende l a m alnutrition co mme u ne maladie q ui
apparaît l orsque l a nou rriture di sponible n’ a pas l a q ualité n écessaire p our as surer l e
développement du c orps hum ain. E lle e st don c l iée à un m anque d ’éléments nut ritifs
essentiels comme les vitamines et les sels minéraux. Elle affecte particulièrement les enfants
en bas âge et se rencontre même dans des régions où l’on connaît une sécurité alimentaire. La
malnutrition e st p rincipalement c ausée p ar c ette a bsence d ’éléments n utritifs e ssentiels a u
développement de l’organisme (MSF, 2007).
Un e nfant ne r ecevant pa s s uffisamment de nut riments da ns s on alimentation
quotidienne e st e xposé a ux différentes f ormes de m alnutrition. S i l e dé ficit por te
principalement sur les apports en énergie et en protéines, on parle de "malnutrition protéino-
energétique" (MPE) ou protéino-calorifique. Si le déficit porte surtout sur le fer, on parle d’
"anémie nutritionnelle". Par contre, s i le déficit porte p rincipalement sur la v itamine A, les
manifestations de la carence portent le nom de xérophtalmie (Dillon, 2000). Il n’est cependant
pas rare que l ’enfant porte à l a fois et à des degrés d ivers l es t races de ces t rois formes de
malnutrition.
Quant a u dé ficit de l ’apport e n pr otéines, c elui-ci p orte à l a f ois s ur l a q uantité d e
protéines qui est insuffisante et sur la qualité de ces protéines (par défaut de certains acides
aminés dits essentiels). A ce déficit en énergie et en protéines s’ajoutent souvent des carences
en fer, en vitamine A et en vitamines du g roupe B. La conjonction de ces différents facteurs
entraîne d es p erturbations du f onctionnement des or ganes et un ralentissement de l a
croissance que l ’on d ésigne c ommunément sous l e nom d e "malnutrition pr otéino-
énergétique".
D'une m anière générale, il e st a dmis que l a m ajorité de s grands pr oblèmes
nutritionnels s ont l iés e ntre e ux. S ouvent, l a m alnutrition dé marre p endant l a vi e f œtale et,
selon les conditions, peut se prolonger tout au long de la vie, particulièrement chez les filles
ou les femmes, celles-ci donnant à leur tour naissance à des enfants qui présentent un retard
de croissance intra -utérin. La reconnaissance de cette approche "cycle de vie" de la nutrition
36
(figure 2.1) ouvre la voie à des politiques et stratégies nouvelles. De plus, un certain nombre
d'éléments s cientifiques se s ont accu mulés p our montrer que l a m alnutrition pe ndant l a vi e
fœtale et l a petite en fance ac croît l a susceptibilité de développer des M NTA à l 'âge adulte.
Cette susceptibilité est exacerbée lors des modifications des modes de vie et de consommation
alimentaire liées au développement économique et à l'urbanisation.
Figure 2.1 : Cycle de vie de la nutrition
2.1.2. Approche holiste de la malnutrition
a) L’approche des six «P»13
Si, a u l ieu d’ une pe rspective pur ement s ectorielle, on a dopte une perspective
multisectorielle et pluridisciplinaire, les causes de la malnutrition apparaissent différemment
et on pe ut r echercher, p lus que pa r l e passé, d es s olutions d’ envergure. Les c auses de l a 13 Approche développée par le Centre d’Étude et de Recherche en Population et développement (CERPOD),
Bamako-MALI, 2008.
37
malnutrition e t le d omaine d ’expertise à me ttre e n je u varient certes, mais selon l es
circonstances. N éanmoins, s ix f acteurs de m alnutrition s ont pa rticulièrement i mportants,
même si aucun d’eux n’est à lui seul la cause exclusive de la malnutrition, ni le seul secteur à
être concerné par les stratégies nutritionnelles. Ces six facteurs - les six «P»- sont :
• La Production, es sentiellement a gricole e t a limentaire, car l es agriculteurs et l es
Ministères de l’Agriculture ont un rôle vital à jouer dans l’amélioration de l’état nutritionnel.
• La Préservation ou conservation des aliments pour éviter le gaspillage et les pertes et
apporter une valeur ajoutée aux aliments grâce à la transformation.
• La Population, q ui a t rait au ssi b ien à l ’espacement d es n aissances au s ein d ’une
famille qu’à la densité de population dans une région ou dans un pays.
• La Pauvreté, qui ramène aux causes économiques de la malnutrition.
• La Politique : les c hoix e t le s a ctions p olitiques in fluencent la n utrition lorsqu’ils
n’en déterminent pas. Des politiques visant à promouvoir l’accès des femmes aux ressources
pour gé nérer d es r evenus, ceci pour l ’éducation e t pour l es s oins de s anté, amélioreraient
sensiblement le bien-être nutritionnel de toute la famille.
• La Pathologie : car l es m aladies, en p articulier l es i nfections, n uisent à l ’état
nutritionnel.
b) Impact de l'évolution actuelle de la société sur l'alimentation et la nutrition
De nom breux phé nomènes c ontemporains ont une i nfluence di recte ou i ndirecte s ur
l'alimentation e t la n utrition d es p opulations : c roissance e t v ieillissement d e la p opulation,
urbanisation et industrialisation, mondialisation, problèmes environnementaux, changements
climatiques. De manière plus ou m oins prononcée, ces phénomènes modifient les modes de
vie et les pratiques alimentaires vers une plus grande sédentarisation (diminution de l'activité
physique due à l a m écanisation, à l 'utilisation de t ransports m otorisés, di minution non
compensée par des activités de loisirs ou sportives), une dépendance plus grande aux aliments
produits pa r d' autres ( l'autoconsommation di minue), une a ugmentation de l a c onsommation
d'aliments ma nufacturés, é nergétiques ma is à f aible d ensité n utritionnelle ( les in dustries
agroalimentaires p roduisent d es al iments av ec d es t eneurs s ouvent él evées en m atières
grasses, sel et sucre, faciles à t ransporter et à p réparer, et bon m arché) et une consommation
croissante de pr oduits a nimaux. O n obs erve é galement une a tténuation, s inon une p erte d e
transmission du savoir-faire et des traditions culinaires ancrées dans la culture, notamment de
certains r égimes r econnus comme "protecteurs". Ce phénomène contribue à une pe rte de l a
diversité alimentaire et culinaire.
38
Cependant, la conjoncture actuelle ne peut expliquer à el le seule le fait que la moitié
de l a popul ation m ondiale s oit t ouchée pa r de s problèmes nut ritionnels. Le s ous-comité d e
nutrition de s N ations U nies a a insi t enté d' analyser l es r aisons pour l esquelles on e st r esté
aussi l oin de s obj ectifs chiffrés de r éduction de s m alnutritions qui a vaient é té f ixés l ors du
sommet de l'enfance et de la CIN. Il a identifié cinq facteurs fondamentaux :
Absence de lieu pour que les universitaires/chercheurs et les représentants des
Organisations Non Gouvernementales (ONG) puissent dialoguer avec les autorités politiques
et les décideurs afin de faire avancer des initiatives dans le domaine de la nutrition ;
Échec fréquent des secteurs de l 'agriculture et de la santé pour combiner leurs
forces dans la mise en place de plans d'actions cohérents ;
Rivalités au sein même d'un pays (souvent amplifiées par le soutien sélectif de
programmes spécifiques par des ONG, des organisations des Nations Unies, ou la coopération
bilatérale) ;
Incapacité de c ertaines i nstitutions f inancières à pr endre l es m esures
intersectorielles préconisées par la Banque Mondiale pour améliorer la sécurité alimentaire et
la santé dans la mise en place de plans de réforme et de développement économique ;
Échec de s a utorités pol itiques qui n' ont pa s r éalisé que de s pr ogrès r apides
pouvaient avoir lieu si elles donnaient la priorité à la nutrition dans leur répartition du budget
de l'Etat".
2.1.3. Approche relationnelle de la malnutrition
Pour le s p sychanalystes, l' allaitement ma ternel c onstitue u n é lément ma jeur d e la
relation mè re-enfant, « une s ituation qui l 'implique, e lle, p rofondément, da ns s on c orps e t
dans sa vie psychique » (Siksou, 2002). Dans l'interaction mère-enfant, à cette période initiale
de la vie où la mère et l 'enfant sont étroitement unis en une véritable dyade, le contact étroit
favorisé par l 'allaitement au sein peut jouer un r ôle essentiel dans la spirale transactionnelle
qui lie la mère à son enfant, c'est-à-dire dans le renforcement du bien-être psychologique de la
mère par celui de son enfant et réciproquement.
L’hypothèse générale qui sous-tend cette approche est que l’attachement14 sécure sera
également pr opice à l ’exploration de l ’enfant s ur l e plan alimentaire, autrement d it à l a
14 Les comportements d’attachement sont des signaux et des gestes d’approche (téter, s’agripper, suivre, pleurer, appeler,
crier, sourire, se rapprocher...) qui visent à maintenir l’enfant à proximité de sa figure d’attachement dans un but de
protection (recherche de sécurité) (Bouville, 2003).
39
diversification de ses apports nutritionnels au-delà du lait maternel (ingestion de la bouillie de
complément et de s a liments s olides a daptés à s es be soins nut ritionnels). Le corollaire «
négatif » de cette h ypothèse es t q ue l ’enfant i nsécure r efusera par des co mportements
anorexiques plus ou m oins prononcés de diversifier son alimentation avec des conséquences
potentiellement néfastes sur le plan nutritionnel, notamment dans un m ilieu tropical souvent
carencé de ce point de vue. Cette idée rejoint en particulier les travaux de Collomb et Valentin
(1980) qui considèrent le kwashiorkor (malnutrition sévère) comme une anorexie mentale de
l’enfance et u n symptôme ps ychosomatique se dé veloppant s ur f ond de m alnutrition
chronique.
Cette d imension r elationnelle dans l’ étiologie de la ma lnutrition in fantile a é té
reconnue par l’UNICEF (1990) sous le nom de « caring » (ou « soins ») comme une des trois
conditions essentielles – avec l’alimentation et la santé – à la croissance et au développement
de l’ enfant. C ette d imension r elationnelle e st d ’autant p lus v itale à la s urvie e t a u
développement de l ’enfant lorsque les conditions de vie sont défavorables (Bouville, 2003).
La malnutrition sévère est associée ici à un environnement familial très inadéquat du point de
vue de l’affection et de l’attention à accorder à l’enfant.
L’approche permet de mieux comprendre l’implication de l’environnement relationnel
dans la formation de symptômes nutritionnels chez le jeune enfant en milieu urbain africain.
La qualité de la relation d’attachement, telle qu’elle peut être évaluée en milieu naturel par la
sensibilité d es a dultes maternants e t le s c omportements d ’attachement et d’ exploration de
l’enfant, est d irectement associée à l ’apparition e t à l’ évolution d e la m alnutrition in fantile
(Bouville, 2003). Selon la qualité de la relation d’attachement, certains enfants parviennent à
dépasser une s phère e xclusivement m aternelle p our ex plorer l e m onde e nvironnant et
diversifier leur alimentation, tandis que d’autres refusent de différentes manières d’incorporer
les aliments autres que le lait maternel.
Des é tiologies r elationnelles p lus s pécifiques s ont c onstituées de modèles
d’interactions enfant-entourage, de comportements alimentaires et de formes de malnutrition
particuliers, dont la dynamique sous-jacente dépend, du mode d’attachement mère-enfant. Ici
encore, le mode relationnel de l’enfant détermine son rapport particulier à l’aliment.
La relation de l’enfant avec d’autres adultes maternants, beaucoup plus variable dans
le t emps, j oue elle aussi un r ôle p rimordial da ns l a dé gradation ou l’amélioration d e s es
symptômes s ur f ond d’attachement i nsécure a vec l a m ère. P lus s pécifiquement, l a
40
malnutrition précoce semble associer au refus de l’enfant de diversifier ses relations, avec un
comportement d’attachement exacerbé envers sa mère, tandis que l’apparition plus tardive des
symptômes semble d avantage liée à l’ insensibilité de l’ entourage maternant (mère et autres
adultes) malgré les sollicitations diversifiées, cette fois, de l’enfant. Le maintien d’un bon état
nutritionnel e t l’ amélioration d es s ymptômes s ont a ssociés à u n a justement r elationnel «
sensible » entre l’enfant et plusieurs autres adultes maternants. Cette dynamique relationnelle
de prévention et d’amélioration des symptômes dépend notamment de la qualité de la relation
d’attachement mère-enfant de par son influence majeure sur le comportement de l’enfant, de
la ma turation p sychomotrice d e l ’enfant ( capacité p lus grande de s ollicitation et
d’exploration) e t de l’ implantation sociale de la mère ou de la famille. Le p rincipal f acteur
mis en exergue ici est l’allaitement maternel.
Allaitement
L'allaitement m aternel e st généralement l e m ode d'alimentation de l 'enfant dur ant l a
première année de sa vie. Pour l 'ensemble de l 'Afrique, la règle est encore une longue durée
moyenne d'allaitement dont les extrêmes se situent entre 12 e t 36 mois, la durée 18-24 mois
étant la plus courante. Cependant, cette durée est moins longue, se situant autour de 12 mois,
dans certains pays comme l'Algérie, ou en milieu très urbanisé des grandes villes (Morrisson
et Linskens, 2000 ). C ette situation n 'indique p as f orcément qu e dur ant cette pé riode l e l ait
maternel est le seul aliment de l'enfant.
Les résultats d'une enquête conduite dans le Nord-Est de la Thaïlande, relayés en 2002
par J acqueline M ondot Bernard du C entre de D éveloppement de l ’OCDE, indiquent de s
niveaux cal oriques t rès faibles pou r l es en fants d e 6 m ois à 3 a ns. Il e st pr obable que
nombreux sont ceux dont le régime consiste jusque vers 18 mois uniquement en une quantité
de lait maternel de plus en plus faible, puis en une ration inadéquate d'a liments solides ( riz
principalement). Toujours en Thaïlande, une enquête conduite en 1974 auprès des mères de
120 j eunes enfants (72 % ont m oins de 10 mois) hospitalisés pour m alnutrition pr otéo-
calorique grave, montre que seulement 17 % de ces enfants sont al laités (51 % des femmes
travaillent en dehors de chez elles) et que 36 % des enfants ne sont nourris que de riz et d'eau.
Dans l es c onditions où il e st pr atiqué, le s evrage p artiel t rès p récoce provoque l 'arrêt de
croissance d e l 'enfant. T outes ces r aisons m ettant en l umière l es co nséquences d e
l'alimentation mal conduite du j eune enfant sont en faveur de la mise à l a di sposition de la
41
population d' aliments d e s evrage c onvenables, s ans pour a utant f aire di minuer l 'allaitement
maternel.
L'introduction précoce d'une alimentation de complément et/ou de fluides fait que les
enfants soient en partie rassasiés et, compte tenu de la capacité limitée de leur estomac, ils ont
tendance à moins téter, ce qui peut réduire la production de lait maternel. Cette pratique peut
ainsi entraîner é galement une di minution de l a f réquence d e l 'allaitement m aternel q ui, en
écourtant la d urée d e l 'aménorrhée p ost-partum, a ugmente l e r isque pour l a f emme d e
retomber en ceinte. L’OMS s ouligne l ’importance du colostrum et recommande a ujourd’hui
qu’il faut allaiter l’enfant durant la première heure de sa vie ; que durant les 4 premiers mois
aux 6 premiers mois de son existence.
2.1.4. Approche socioculturelle de la malnutrition
Depuis de nombreuses années, la notion de « négligence sociale » est évoquée par des
chercheurs en sciences sociales (anthropologues, démographes) comme pouvant exercer une
influence sur la ma lnutrition. U ne p remière th èse sociodémographique (Scrimshaw, 1978)
suggérait que certains enfants des pays en voie de développement seraient moins investis que
d’autres au sein de familles à descendance élevée. Avec de petits espacements de naissance
entre les enfants, les derniers-nés recevraient moins de soins médicaux que ceux qui ont passé
le cap d e l a p remière a nnée. La négligence m aternelle et s ociale dans cette t hèse place la
mortalité infantile comme une réponse à une forte fécondité. Également, la taille de la famille
correspond a u t emps e t a ux r essources dont elle dispose (Frank, 1994). A insi, pour
Scrimshaw, l e m anque d e co mpétence maternelle i nvoqué par c ertains or ganismes
internationaux, pr écisément lors de l a r ééducation nut ritionnelle de l ’enfant, n’ est pa s un
manque d’ intelligence, de s avoir ou d’ habileté de l a femme m ais pl utôt une a bsence
d’engagement de la mère vis-à-vis de l’enfant.
Une de uxième th èse d’une a nthropologue a méricaine, Scheper-Hugues (199l),
s’appuie essentiellement sur des critères culturels. Selon l’auteur, la négligence sociale est liée
aux r eprésentations d e l’enfant et d e la ma ladie in fantile. Scheper-Hugues fonde s on
argumentation s ur l’observation d’ un manque d e m anifestations affectives à la mo rt d ’un
enfant (Scheper-Hugues, 1992). Cette mise en relation entre l’expression sociale de l’émotion
et l ’affect pose l a qu estion de s r elations e ntre l e ps ychologique et l e c ulturel (Crapanzano,
1994). P our c ette ethnologue, l ’absence de l armes à la mo rt d’un enfant t émoigne d e la
construction sociale de l’attachement maternel, lui-même fondé sur les représentations de la
42
maladie et de la mort, alors que, pour certains membres du pe rsonnel de santé, il révèle une
moindre affectivité résultant d’un vécu répété de mort d’enfants.
Si la problématique mise à jour par la notion de « négligence sociale » est critiquable,
c’est parce que la culture est considérée comme un obstacle au développement ; un obstacle
ici à l’amélioration de la santé de l’enfant et même à sa survie. La mort de l’enfant, attribuée à
une n égligence s élective d e la mère, d éresponsabilise les s ervices de s anté qui ont dé jà
tendance à culpabiliser les m ères. C e m essage d e « mauvaise m ère » ne peut avoir que des
effets négatifs et conduire la femme à ne plus se présenter au service de santé. Toutefois, elle
a l’intérêt de poser la question de la responsabilité sociale de la maladie de l’enfant (l’enfant-
acteur, la mère, la famille, le groupe social, 1’État) selon la place où l ’on se situe. La notion
de négligence sélective introduit aussi l’idée que la malnutrition est une forme de maltraitance
à l’égard des enfants par « délit » d’indifférence parentale (Mead, 1962). Si cet argumentaire,
pris au cas p ar cas, p eut s ’avérer p arfois ex act, i l s uggère, a u r egard d e l a pr otection de
l’enfance, l’éventuelle condamnation des parents d’enfants malnutris pour « mise en danger
de la vie d’autrui ».
L’étude de s r eprésentations d e l a m aladie d ans l es différentes s ociétés af ricaines
permet, d’emblée, de comprendre la difficulté d’un dialogue entre des interlocuteurs qui n’ont
pas les mêmes catégories de pensée. La principale di fficulté, dans le cas de la malnutrition,
réside dans le fait que les populations ne l’associent pas à un problème alimentaire : c’est une
maladie (Bonnet, 1996) . D e f ait, l es mères n e s e d éplacent p as vers une s tructure de s oins
pour un amaigrissement de leur enfant, mais pour une diarrhée ou une fièvre persistante.
L’anthropologue Petitjean (1996) aborde l a que stion de certaines d e ces cat égories
d’interprétation. Le déséquilibre physiologique de l’enfant est associé dans certaines sociétés
africaines ( Sogo et S ere p ar ex emple dans l e c ontexte du B urkina Faso) à une d éviance
sociale. Il r appelle aux p arents, et donc à la société, l’exigence d ’une m aîtrise des rapports
sexuels après la naissance d’un enfant. Cela ne signifie pas pour autant que toute malnutrition
soit systématiquement associée à un désordre social. Ces catégories ont des causes variées et
variables s elon l’ histoire d u s ujet e t d e s a f amille, selon l’apparition d es s ymptômes e t
l’évolution de la maladie. Pour Bonnet (1996), le système interprétatif n’est jamais ferme et il
autorise a ussi bi en une e xplication mécanique (« l’enfant est n é petit e t me nu ») que
surnaturelle (sorcellerie) ou sociale (interdit sexuel du pos t-partum) et aujourd’hui médicale.
Le système est cumulatif et non exclusif.
43
Jaffré (1996) analyse les raisons qui conduisent les mères à ne pas « voir » la maladie
de leur enfant. L’explication qu’il en donne s’appuie sur la théorie des étiologies sociales. A
ce titr e, il e xplore la no tion de « danger », cause é voquée pa r l ’entourage du m alade pour
justifier la ma ladie. Cette p rocédure m éthodologique s ’abstient, l à aussi, de t out j ugement
moral : il n ’y a pas « un qui sait » et « un qui ignore », il y a deux mises en perspective de la
maladie. P rogressivement, on mesure l e m alentendu qui pe ut s ’installer e ntre l es i ndividus.
D’un c ôte, l e personnel s oignant, pa r s es r ecommandations, a ppréhende la ma lnutrition
davantage comme un déséquilibre nutritionnel que comme une maladie ; de l’autre, la famille
du malade qui ne comprend pas les raisons pour lesquelles on n’administre pas à l’enfant des
médicaments. S upplémentation nutritionnelle e t médicament n ’ont p as l e mê me s tatut : la
nourriture est collective, le médicament individuel. I1 est donc admissible d’un point de vue
social, pour les populations, d’acheter à l’enfant un médicament que de privilégier un membre
de l a f ratrie au n iveau alimentaire. La supplémentation n utritionnelle e ffectuée da ns une
famille rurale polygame au bénéfice de l’un des enfants risque de susciter des conflits entre
les é pouses. Ce qui pe ut ê tre pe rçu comme un « favoritisme » risque d e cr éer un e j alousie
entre deux ou plusieurs femmes aux relations déjà marquées par la concurrence.
Les principaux facteurs i dentifiés d ans cet te a pproche q ualifiée d e s ocioculturelle
sont : l’ethnie, l a religion e t l ’instruction qui , elle, confère aux i ndividus un de gré de
modernisation socioculturelle.
Ethnie et religion
Les facteurs culturels tels que la religion et l’ethnie sont d’une grande importance pour
la prévalence de la malnutrition. Selon Akoto (1985), « la religion véhicule un certain nombre
de valeurs et de normes qui régissent la vie des fidèles sur le plan comportemental,
physiologique, et psychique. Elle peut refléter l’ouverture à la civilisation occidentale
(religion catholique et protestante), le niveau de traditions des gens (religion traditionnelle),
et parfois la situation des individus dans la hiérarchie sociale ».
Cadre par excellence d e production de cultures ou coutumes, l ’ethnie exercerait une
influence considérable s ur l es comportements de s mères dans di fférents domaines de l a vi e
dont l' alimentation et la s anté. La cu lture i nfluence l'état nut ritionnel des e nfants ; ce ci à
travers les tabous alimentaires, les croyances relatives à l'alimentation, la manière de préparer
et de conserver la nourriture.
44
Les a ttitudes e t le s p erceptions va rient s elon l 'ethnie. O n obs erve un e r elation e ntre
l'ethnie, les croyances et la nutrition des enfants, notamment durant et après la grossesse, et
les pratiques d'allaitement et de sevrage (Rakotondrabe, 1996). Ceci s'explique par le fait que
dans certaines ethnies, l es interdits alimentaires par exemple privent les petits enfants et les
mères au co urs d e l eurs g rossesses de cer tains al iments riches en cal ories. Dans cer taines
sociétés, la crainte de l 'accouchement d'un « gros bébé » amène certaines femmes à s e priver
de nour riture. Il e n résulte al ors u ne car ence d ans l eur alimentation et el les enfantent d es
bébés de petite taille et/ou à insuffisance pondérale.
En Afrique, les chrétiens ont pu profondément modifier leur vision du monde et leurs
normes s ur l e t ype d 'aliments à donne r a ux e nfants. Ils ont a insi t endance à pr atiquer une
bonne alimentation des enfants qui a un effet positif sur l 'état nutritionnel de ces derniers. A
l'opposé, la religion traditionnelle véhicule les valeurs traditionnelles ancestrales (Ngo Nsoa,
2001) qui s ont l e pl us souvent né fastes à la bonne nut rition de s e nfants. C ependant, l a
différence o bservée p eut ég alement r efléter l a v ariation d e l a s colarisation s elon
l’appartenance r eligieuse. A u C ameroun, l es c hrétiens ont pl us d e ch ance d e b énéficier d e
l’éducation moderne dans le cadre des écoles missionnaires ; la même situation est observée
au Sénégal (Rakotondrabe, 1996).
Niveau d’instruction des parents
La relation entre le niveau d’instruction de la mère et la malnutrition des enfants peut
être perçue à travers l’apport de la mère en termes de temps, d’attention et de soutien destinés
à s atisfaire l es be soins ph ysiques, m entaux e t s ociaux de l ’enfant. E n g énéral, pl us
l’instruction d e l a m ère es t él evée, p lus el le apprécie a u m oment opp ortun c es di fférents
besoins et y apporte la réponse appropriée.
On obs erve, s elon l ’INSAH, da ns pl usieurs p ays d’ Afrique s ubsaharienne (Mali,
Tchad, Burkina Faso, Niger, Sénégal, Cap Vert, Gambie) une relation inverse entre chaque
indicateur de malnutrition des enfants et le niveau d’instruction de la mère. Les enfants des
mères de niveau supérieur ont les niveaux de malnutrition les moins élevés. Les écarts sont
particulièrement importants entre les niveaux de malnutrition des enfants des mères de niveau
supérieur et l es enfants de l eurs co ngénères non i nstruites, avec d es i ndicateurs p assant d u
simple au double et parfois davantage. Entre pays, il faut noter qu’à niveau d’instruction égal,
les enfants de mères maliennes ont le plus souvent des niveaux de malnutrition plus faibles,
suivis par les enfants burkinabè.
45
Tout comme pour la mère, le niveau d’instruction du partenaire est négativement lié à
la malnutrition de l ’enfant. Les niveaux de malnutrition des enfants sont d’autant plus bas
que le niveau d’instruction du partenaire est élevé. Il joue également un grand rôle dans l’état
nutritionnel de s e nfants. N otons que l es hom mes à un ha ut ni veau d ’instruction s e m arient
généralement avec des femmes assez instruites et dans de tels cas, l’effet de l’instruction de
l’homme passe par celui de la mère.
De m anière générale, l e n iveau d ’instruction d e l a m ère a plus d’ influence s ur l a
morbidité, la malnutrition et la mortalité des enfants que celui du pè re. Pour Akoto (1987) :
« l’instruction de la mère apparaît toujours discriminante (notamment entre 0-3 années et 4
années et plus d’école), tandis que celle du père intervient surtout aux deux situations
extrêmes (mère illettrée ou très instruite) ».
2.1.5. Approche socioéconomique de la malnutrition
La pauvreté est généralement considérée comme la cause profonde de la malnutrition
tant i l est vrai que, dans la majorité des pays, c’est surtout chez les pauvres que l’on trouve
des enfants souffrant de MPE grave ou modérée, ou présentant des signes évidents de carence
en vitamine A (INSAH, 2008).
Cette approche justifie la malnutrition des enfants par le n iveau de vie des ménages,
lequel es t l ui-même corrélé à l a q ualité d e l ’habitat, au t ype d ’activité é conomique d es
parents, à l ’accès à l’électricité, à l’eau potable et à l ’assainissement. L'individu est dénutri,
voire mal nourri parce que le ménage n'a pas les moyens de lui procurer assez de nourriture de
bonne qua lité : c 'est l a t hèse dé fendue pa r Sen (1998). Murdoch (1985) à son tour, a ssocie
malnutrition et pauvreté puisqu'il affirme que les ménages pauvres n'ont pas suffisamment de
nourriture à c ause du m anque de s m oyens f inanciers. P our l es t enants de c ette a pproche,
l'explication des variations de l'état nutritionnel des enfants en Afrique trouve son fondement
dans l 'inégalité du ni veau de vi e de s m énages. Toutefois, c ette opi nion e st r elativisée pa r
Delpeuch et a l (1996) qui f ont r emarquer q ue ma lgré la c rise économique (suivie d e l a
dévaluation du Franc CFA), certains plats culturellement sollicités sont cependant restés les
mêmes. Akoto (1993) ne partage pas cette vision, car pour lui, l 'état nutritionnel des enfants
ne s'explique qu'à travers les normes et valeurs sociales en matière d'alimentation. Cet auteur
souligne a insi l' importance d e l a c ulture e t de l 'organisation s ociale, not amment en ce q ui
concerne la co mpréhension d e c ertaines h abitudes al imentaires. A ce p ropos, i l s e p ose l a
46
question de l'importance p our u n m énage d e v ivre d écemment s i l a cu lture, à t ravers s es
interdits sociaux, ne permet pas à l 'enfant de consommer un bien nécessaire à s a croissance.
Dès lors, il est très peu indiqué de se focaliser uniquement sur les facteurs économiques pour
expliquer la variation de la malnutrition.
La p auvreté s e m anifeste d e p lusieurs m anières : ce s ont d es m énages a ux r evenus
insuffisants, m ais a ussi de s c ommunautés ou des pa ys p auvres, qui n’ont pa s de quoi
construire et financer des écoles et des programmes de formation, ni améliorer les systèmes de
distribution d’eau et d’assainissement, ni fournir les services sociaux et de santé nécessaires
pour r éduire de f açon s ignificative l a m alnutrition. Le r ôle p articulier des f emmes et d es
jeunes filles est mis en exergue ici. Elles sont à la fois victimes et «agents de transmission» de
la malnutrition. Dans les milieux défavorisés, les femmes peuvent contribuer à la perpétuation
d’un cercle vicieux dans la mesure où les petites filles sous-alimentées sont des futures mères
susceptibles de s e r etrouver dans un é tat nut ritionnel peu s atisfaisant au commencement d e
leur vie reproductive. A cette situation de départ à risque s’ajoutent les mauvaises habitudes
alimentaires e t le s ma ladies in fantiles in fectieuses à r épétition p our g énérer d es conditions
défavorables aux processus vitaux de développement de la personne.
Habitat, accès à l’eau, à l’assainissement et électricité
L’impact des infrastructures sur la malnutrition des enfants passe par l’état morbide de
ces derniers : l’accès à l’eau potable, les toilettes avec chasse d’eau et un sol en ciment évitent
de nom breuses m aladies, not amment i ntestinales, qui a rrêtent l a croissance ; l’électricité
permet d’utiliser un réfrigérateur.
La m alnutrition t ouche plus l es e nfants qui c onsomment l ’eau pr ovenant d’ autres
sources que les enfants qui consomment l’eau des canalisations, des puits couverts et des puits
protégés (Bougma, 200 7). Les enfants vi vant da ns l es m énages di sposant de m oyens
d’assainissement s ont m oins t ouchés pa r l es t rois t ypes de m alnutrition que l es e nfants de s
ménages ne disposant pas de moyens d’assainissement. Au Mali, la prévalence du retard de
croissance touche 38,1 % des enfants vivant dans les ménages sans moyens d’assainissement
contre 36,8 % chez les enfants des ménages disposant de moyens d’assainissement (INSAH,
2008). Le s prévalences d es d eux au tres t ypes d e m alnutrition ( émaciation / maigreur,
insuffisance pondérale) sont aussi plus élevées chez les enfants de moins de 5 ans vivant dans
les ménages ne disposant pas de moyens d’assainissement que chez les enfants des ménages
disposant de moyens d’assainissement.
47
La qualité de la toiture reflète assez bien la qualité générale du logement et les risques
de mo rbidité e t d e ma lnutrition y as sociés (Kuate D efo, 1997) . L’explication g énéralement
émise à ce n iveau es t q u’un l ogement moderne t end à pr otéger s es oc cupants c ontre de s
dangers de l ’environnement e t di minue a insi l ’exposition à la m orbidité, cau se d irecte de
malnutrition. L’existence d’un sol en ciment semble encore plus importante que la disposition
des toilettes. En effet, à t ravers l’étude réalisée dans 16 pays d’Afrique au sud du Sahara par
l’OCDE, cette variable a un coefficient significatif, qui peut aussi s’élever à 0,5 (soit un gain
de 1,8 centimètres à l ’âge de 3 a ns), e t on not e un s eul pays avec un c oefficient négatif, le
Togo. Le coefficient de la variable toilettes est positif dans neuf pays, mais négatif en zone
rurale au Burkina a insi qu’en z one ur baine a u Cameroun. La di sponibilité d e l ’eau pot able
s’avère t rès s ouvent u n f acteur s ignificatif (il l ’est d ans s ept p ays). La di sponibilité de
l’électricité a un coefficient positif 11 fois sur 18, avec des coefficients atteignant 0,7 (ce qui
correspond à un gain de 2,5 centimètres pour un enfant de 3 ans).
L’absence d ’électricité d ans l es l ogements d evrait êt re as sociée à u ne augmentation
des r isques d e malnutrition car e lle s ignifie que le ménage ne peut r éfrigérer ses aliments :
l’exposition de s a liments c uits a ux a gents pa thogènes e t l eurs c onditions de c onservation
peuvent ainsi susciter de sérieux problèmes de santé dont la malnutrition. Par ailleurs, dans la
plupart d es p ays en v oie d e d éveloppement, l a p résence d ’électricité d ans u n l ogement
suppose généralement que celui-ci soit accessible. Cette accessibilité va normalement de pair
avec l ’amélioration d u système d e t ransport d e l a r égion ; or un s ystème de t ransport
financièrement ab ordable f avorise l a s anté en a méliorant l ’accès au x s ervices et au x s oins
(Kuate Defo, 1997).
Activité économique des parents
L’activité économique de la mère est une variable importante dans l’étude des causes
de la malnutrition. L’occupation de la femme peut influencer l’état nutritionnel des enfants à
travers l’alimentation de ces derniers (allaitement, sevrage) ou l’attention et les soins qui leur
sont accordés (Akoto et Tabutin, 1989). L'activité de la mère peut la contraindre à écourter la
durée d e l 'allaitement maternel et à p ratiquer l e s evrage p récoce et partant, f avoriser l a
survenance d e l a m alnutrition ch ez l 'enfant. Si en O ccident p ar exemple, l es f emmes
travailleuses recourent aux structures organisées pour assurer la garde des enfants, en Afrique
subsaharienne, e lles n 'ont d'a utres r ecours qu e de c onfier l eurs enfants aux m embres de l a
famille souvent t rès jeunes (frère, sœur, cousin (e), etc.) ou â gés (mère, belle-mère), voire à
48
une f emme d e m énage. C ela a u n i mpact n égatif s ur l a q ualité d es s oins à administrer à
l'enfant, notamment concernant son alimentation.
Par ailleurs, l’activité de la mère peut avoir un impact positif sur l'état nutritionnel des
enfants. A t ravers l 'amélioration du ni veau d e vie du m énage et de l a di sponibilité de s
ressources d u m énage, l'emploi d e l a femme permet d 'améliorer l a q ualité d es s oins à
administrer à l 'enfant, n otamment e n ma tière d 'alimentation e t d e s anté ( Bougma, 2007) .
Ainsi, l'exercice d 'une profession par la mère est susceptible de nuire à l ’état nutritionnel de
l’enfant o u d e f avoriser s on am élioration. M ême s i l 'activité éco nomique d e l a m ère p eut
exercer à la fois un effet négatif et positif sur l'état nutritionnel des enfants, nous pensons que
son effet positif l 'emporte dans un c ontexte de pauvreté, dans la mesure où cette activité lui
permet d'avoir un pouvoir d'achat élevé et pourrait donc renforcer celui de son conjoint ou des
autres membres de la famille. Il s'en suit alors un meilleur état nutritionnel de l’enfant.
Les t ests r éalisés p ar l e C entre d e D éveloppement d e l ’OCDE s ur p lusieurs p ays
d’Afrique subsaharienne (dont le Cameroun), montrent que l’effet négatif domine : dans six
pays, l e coefficient d e l a variable « travail de l a mère » est n égatif e t il n’est positif qu’au
Burundi e t a u N igeria. S elon l ’INSAH, a u M ali, l es di fférences observées ne s ont
significatives ni pour la malnutrition taille pour âge, ni pour la malnutrition poids pour âge (au
seuil de 5%). Par contre, les résultats semblent indiquer des taux de malnutrition poids pour
taille p lus f aibles p our les f emmes tr availlant a ctuellement ( au mo ment d e l’ enquête) à
l’opposé de s f emmes q ui ne t ravaillent pa s. A u T chad, l es di fférences e ntre l es t aux de
malnutrition des enfants de mères travaillant actuellement et de mères ne travaillant pas sont
significatives à la fois pour les indicateurs poids pour âge et poids pour taille. Elles indiquent
des niveaux de malnutrition plus élevés pour les enfants de mères qui travaillent actuellement.
L’occupation du père ou son statut professionnel influence indirectement le niveau de
vie du m énage. E n e ffet, l es c onditions da ns l esquelles vi t l ’enfant (la di sponibilité de s
installations s anitaires, la q ualité d es a liments, l a f acilité d ’accès au x s oins d e s anté)
dépendent des r evenus g énérés p ar l ’occupation du pè re ( duquel est tributaire le niveau
économique du ménage).
49
2.1.6. Approche biodémographique
La quantité d’aliments disponibles par personne dans une famille, dans un district ou
dans un pa ys e st l a qua ntité de nour riture pr oduite ou a chetée di visée pa r l e nom bre de
personnes qui y ont accès. U ne famille de hui t pe rsonnes, qui p roduit et ach ète l a m ême
quantité de nourriture qu’une famille de quatre personnes, dispose de moins de nourriture par
personne. Toutefois, dans les familles de producteurs, plus la famille est nombreuse, plus la
productivité familiale peut ê tre importante. Dans certains pays, le p roblème démographique
est généralement perçu comme un problème majeur. La surpopulation, la taille des familles et
l’espacement d es n aissances s ont co nsidérés co mme d es f acteurs d éterminants d e
malnutrition. Dans de nombreux pays, l’espacement des naissances est une priorité au sein des
structures gouvernementales responsables de la planification familiale. Mais tout comme en
production, il serait naïf de croire qu’un contrôle des naissances ou une planification familiale
réussie résoudront à eux seuls les problèmes de faim et de malnutrition.
Les principaux facteurs mis en exergue dans cette approche et qui peuvent influencer
le s tatut nutritionnel des enfants sont : l ’âge et le sexe de l ’enfant, l’âge à la maternité et la
parité d e l a m ère, le s tatut ma trimonial e t l’indicateur d ’IMC d e cet te d ernière, l’intervalle
intergénésique, les infections et maladies contractées par l’enfant et enfin les soins préventifs.
Age de l’enfant
L’âge de l’enfant est dans l’ensemble parmi les variables les plus discriminantes : plus
l’âge augmente, plus la malnutrition prévaut (INSAH, 2008). L’alimentation du nourrisson et
du jeune enfant varie au fur et à m esure qu’il prend de l’âge : le nourrisson de moins de six
mois nourri au lait maternel bénéficie de la protection des anticorps de sa mère. Au delà de six
mois, le sevrage l’expose aux agents pathogènes et à la malnutrition lorsque les aliments de
sevrage ne sont pas assez riches pour couvrir les besoins de sa croissance.
Il est généralement o bservé q ue l a s anté d e l ’enfant t elle que m esurée par l’état
nutritionnel se détériore surtout durant la première année de vie et ce jusqu’à l ’âge de deux
ans, pour se stabiliser plus au moins par la suite. Cette tendance a été constatée dans les pays
en voie de développement dont le Guatemala (Handa, 1999).
Quel que soit l’indice anthropométrique choisi, le taux de malnutrition augmente avec
l’âge d e l ’enfant d e l a naissance à 2 4 m ois au M ali ( EDS-2001), au Burkina Faso ( EDS-
2003), au Cameroun ( EDS-2004) et au Tchad (EDS-2004). C ette t endance s ’inverse t rès
50
rapidement et d e façon significative après 24 m ois pour l e poi ds/âge et l e p oids/ taille. L a
tendance est mitigée pour la taille/âge après 24 mois. Il apparaît clairement que la nutrition de
l’enfant est fonction de son âge. Le nourrisson de moins de 6 mois ne devra pas être alimenté
comme l’enfant de 6 à 1 1 mois et ce d ernier ne doit pas être alimenté comme celui de 12-23
mois (INSAH, 2008). Au Gabon, un grand nombre de décès surviennent entre 1 et 3 ans des
suites de rougeole et de malnutrition : maladies qui frappent rapidement après le sevrage de
l’enfant (Bakenda, 2004).
L’incidence d e l’ âge s ur l’ état n utritionnel de s e nfants pe ut ê tre pr is en co mpte d e
plusieurs manières. Soit on utilise des tranches d’âge (Strauss, 1990 ; Stifel et al., 1999), soit
on préfère une forme quadratique : solution que Morrisson et Linskens ont retenue en 2000
lors de la recherche des facteurs explicatifs de la malnutrition en Afrique Subsaharienne. Dans
presque tous les pays explorés, ils ont obtenu des coefficients très significatifs, celui de l’âge
(en mois) étant négatif et celui de l’âge au carré étant positif. D’après ces coefficients, le mois
à partir duquel l ’âge exerce un effet positif au lieu de négatif est en moyenne à partir de 35
mois (point d’inflexion). Jusqu’à cet âge, la situation se détériore avec le temps. Ce schéma
concorde a vec l es r ésultats de S tifel e t a l. ( 1999) qui c onsidèrent s eulement t rois t ranches
d’âge de 3 à 35 m ois comme avec ceux de Strauss (1990) pour la Côte d’Ivoire qui met en
évidence un ha ndicap croissant qui atteint son maximum vers 40-48 mois. Ainsi, quelle que
soit la forme choisie, les épisodes temporaires de malnutrition s’accumulent pendant les trois
ou quatre p remières années de t elle sorte que l e r etard d e poids par r apport aux en fants du
pays de référence, les États-Unis, croît d’année en année pour s’inverser avec le changement
de régime alimentaire permis par l’âge (Morrisson et Linskens, 2000).
Sexe de l’enfant
Dans certaines sociétés où l’on a une préférence pour les enfants de sexe masculin, le
sexe de l’enfant joue un rôle important sur son état nutritionnel (Dackam, 1990). En Afrique
subsaharienne, de s a uteurs c omme Gbenyon et Locoh (1989), ont m ontré l ’existence d’ une
discrimination a limentaire s elon le s exe, ma is c ette d ifférence n ’était p as to ujours
significative. Au M ali, au cune d ifférence s ignificative d ans l ’état n utritionnel n ’a ét é
observée, ni en milieu urbain, ni en milieu rural (Mbacké et Legrand, 1992).
Pour é tudier l ’incidence du s exe, l e c entre de d éveloppement de l ’OCDE en 2000 ,
grâce au x données de 20 pa ys d’ Afrique s ubsaharienne, fait re cours à u ne d iversité d e
l’échantillon ( du poi nt de vue r evenu, m entalités, r eligion…). C ontrairement à c e que l ’on
51
pourrait i maginer, l es f illes s ont pr esque t oujours pr ivilégiées. D ans de ux c as s ur t rois, on
obtient de s c oefficients né gatifs pour un garçon, da ns l es a utres c as, l e coefficient e st non
significatif et il existe seulement deux coefficients positifs pour les garçons (en zone urbaine
au Ghana et au Cameroun). Ces résultats confirment les conclusions de Svedberg (1998) et les
tests a ntérieurs ( un c oefficient né gatif pour l es g arçons a u B résil, e n C ôte d’ Ivoire, a ux
Philippines, m ais pos itif a u M aroc). Le c as du M aroc pour rait l aisser c roire qu’ on a ccorde
plus d’attention aux garçons dans les pays musulmans. Pourtant, on a observé une prévalence
de la malnutrition plus élevée chez les garçons dans des pays de confession musulmane. Au
Niger par exemple, il r essort des données relatives à la malnutrition que les petites filles ne
souffraient p as de discrimination e n ma tière de s oins e n général e t d’alimentation e n
particulier. La proportion des enfants touchés par la malnutrition chronique y est légèrement
plus élevée pour le sexe masculin (43%) que pour le sexe féminin (40%) (EDS Niger, 1998 :
154).
L’attention a ccordée aux f illes p ourrait s ’expliquer p ar d es s pécificités des s ociétés
rurales. Les filles y sont beaucoup moins scolarisées qu’en ville et aident leurs mères pour les
tâches domestiques dès leur plus jeune âge. Mais on observe une prévalence plus élevée chez
les garçons aussi souvent en ville qu’à la campagne. De plus, pour des raisons physiologiques,
les f illes s upportent mi eux que l es g arçons une a limentation pa uvre e t/ou i nsuffisante
(Ntsame, 2001) . Cependant, l a p ersistance d e c ette dernière l aisse o bserver l e d ésavantage
chez les filles au profit des garçons. A ce propos, l’EDS Togo (1998) enregistre 23% de cas
de bonne nutrition chez les garçons contre 20% seulement chez les filles.
L’hypothèse qu’on puisse avancer serait que ce biais en faveur des filles diminue avec
le développement même s’il n’apparaît pas dans des pays moins pauvres comme le Zimbabwe
(Morrisson et L inskens, 2000) . De f açon générale, là où il n ’existe pas d e d iscrimination à
l’égard d es f illes, la ma lnutrition to uche d e m anière i dentique l es f illes co mme l es garçons
(Ntsame, 2001).
Age à la maternité et parité de la mère
Au r ang de n aissance supérieur, l es r isques d e m orbidité, de m alnutrition e t de
mortalité s’élèvent (Aaby, 1995). En effet, les enfants qui ont de nombreux frères et sœurs,
surtout s’ils dorment dans un logement surpeuplé, sont plus sujets aux maladies infectieuses,
telle l a r ougeole. C ette i nfluence s e f ait s urtout s entir p endant l a p ériode n éonatale s elon
Akoto et Hill (1988). Pour ces derniers, le risque de malnutrition est relativement plus élevé
52
chez les enfants nés de mères âgées de moins de vingt ans ou plus de trente cinq ans que celui
des enfants dont les mères ont un âge intermédiaire. Pour Penders et al. (2000), les enfants de
mères très jeunes ou âgées sont beaucoup plus exposés à un retard de croissance prénatale et à
une m ortalité él evée. C eci es t d û es sentiellement au x r aisons p hysiologiques et
comportementales. E n général, l es j eunes m ères n ’ont p as encore atteint l a m aturité
biologique. P ar a illeurs, e lles m anquent d’ expérience pouva nt l es a mener à a dopter de s
comportements a déquats e n m atière de nut rition de s e nfants. D u f ait de l eur m anque
d’expérience, el les n e s ont p as cap ables d e s ’occuper correctement d e leurs en fants et d e
satisfaire leurs besoins alimentaires, surtout lorsque l’état nutritionnel des enfants est menacé.
A l’âge élevé de la mère correspond très souvent un rang de naissance élevé. C’est surtout la
fatigue physiologique de la mère « syndrome d’épuisement maternel » qui confère à l ’enfant
une c onstitution f ragile à la n aissance, ainsi que l es m alformations c ongénitales qui l e
prédisposent à certaines infections (Akoto et Hill, 1988).
Indicateur d’IMC de la mère
L’état d e s anté d e l a m ère n ’est p as m oins i mportant que l’éducation. L’Indice d e
Masse Corporelle ( IMC) de la mère permet de mesurer cet état et est défini comme étant le
rapport du poids (en kilogrammes) à l a taille (en mètres) élevée au carré. Celles dont l’IMC
est inférieur au seuil (le seuil de 18,5) sont considérées comme malnutries. Les enfants de ces
mères sont théoriquement à risque eu regard à la théorie dite du « cycle de vie » à laquelle il a
été fait allusion précédemment.
La r épartition de s i ndicateurs de m alnutrition s uivant l e ni veau d ’IMC de s m ères
confirme la relation positive entre la malnutrition de l’enfant et celle de la mère dans plusieurs
études m enées en A frique s ubsaharienne. Les n iveaux de m alnutrition s ont é levés pour l es
mères dont l’IMC est inférieur au seuil. En outre, les écarts entre les deux groupes de mères
sont particulièrement importants pour la malnutrition poids pour taille : de 12 points d’indice
au T chad (EDST-2004) à pr ès d e 6 poi nts a u Burkina F aso ( EDSB-2003). P our l es a utres
indicateurs, l es é carts s ont pl us importants au Burkina Faso s auf pour l a m alnutrition taille
pour âge au Mali (INSAH, 2008).
Statut matrimonial de la mère
En Afrique subsaharienne, le mariage continue d’assurer aux femmes un sentiment de
sécurité et de s outien d e l a pa rt du groupe s ocial, f ait s usceptible d ’être as socié à u ne
53
meilleure santé de l’enfant (Kuate Defo, 1996). L’idée généralement avancée ici est que les
enfants de f emmes non mariées s ont plus susceptibles de s ouffrir d’ une m alnutrition pl us
élevée du fait qu’ils appartiennent à u ne famille jouissant d’une s tabilité sociale plus faible.
Néanmoins, cette influence peut être inverse. Les enquêtes DHS permettent de distinguer les
trois cas : la famille monogame, la famille polygame et la famille monoparentale (la mère vit
seule). A propos de l’impact des structures familiales : dans 12 pays d’Afrique subsaharienne
(OCDE, 2000) , l es e nfants de s m ères qui vi vent e n uni on pol ygame ont un r etard de
croissance. Il y a un s eul c as, l a z one ur baine du G hana, où on not e l ’effet oppos é de l a
polygamie. En e ffet, l es pè res pol ygames ont , e n m oyenne, b eaucoup pl us d’ enfants et
d’adultes à nour rir, et m ême s ’ils d isposent de p lus d e r essources que l es autres, ces
ressources ne croissent pas en proportion des charges familiales. C’est ce qui explique aussi
cette di fférence not ée pa r S trauss ( 1990) e n C ôte d’ Ivoire : l es e nfants de l ’épouse l a pl us
âgée ( seule épouse au début) sont plus grands q ue ceux de l ’épouse l a p lus j eune. On peut
supposer que l es f emmes s eules di sposent é galement de m oins de r essources. D e f ait, on a
obtenu un coefficient négatif dans 8 pays. Mais dans 4 pays (Ghana, Mali, Niger et Togo), le
coefficient est positif en zone urbaine. Il faut toutefois rappeler que dans la plupart des pays,
les mères qui vivent seules sont peu nombreuses et dans certains cas, elles se distinguent des
autres mères par un niveau d’éducation plus élevé ou la possession de biens durables. Si elles
sont a insi pl us « favorisées » matériellement que l es autres f emmes, l eur condition
monoparentale n’entraîne pas systématiquement une incidence négative sur les enfants.
Durée de l’intervalle inter génésique précédent
La r elation entre la ma lnutrition d e l’ enfant et l’ intervalle in ter génésique p récédent
est t héoriquement appréhendée s uivant de ux h ypothèses. La p remière e st l’ effet d it d e «
compétition ». Lorsqu’un e nfant e st né pe u de t emps a près s on a îné, on pe nse que t ant l es
ressources familiales que l’attention de la mère seront partagées entre les deux jeunes enfants
et que chacun d’eux en souffrira, surtout le plus grand. La seconde hypothèse est celle de la «
carence ou déficience physiologique » de la mère. Une mère qui tombe enceinte de nouveau
avant que s on c orps a it e u l e t emps de r écupération né cessaire, accumule u ne d éficience
physiologique qui peut affecter la croissance normale du nouveau fœtus, le prédisposant à des
risques de maladie ou de mortalité, ou encore à la malnutrition s i, à son tour, cet enfant est
suivi prématurément d’un autre.
54
Infections et maladies contractées
La maladie et la malnutrition sont fortement corrélées, la maladie pouvant aggraver la
malnutrition e t v ice-versa ( INSAH, 2 008). La d iarrhée et l a f ièvre s ont corrélées d e f açon
significative avec la taille/âge, le poids/âge et le poids/taille au Burkina Faso (EDSBF-2003),
au Tchad (EDST-2004) et au M ali (EDSM-2001). Un enfant qui n’a a ttrapé aucune de ces
deux maladies dans un passé récent est nettement moins malnutri qu’un enfant qui a contracté
l’une ou l es deux maladies à l a fois. Par ai lleurs, le taux de malnutrition a iguë passerait de
18,4% pour les enfants qui auraient attrapé les deux maladies à la fois dans un passé récent à
8,4% pour les enfants qui ne seraient pas malades dans la même période au Mali en 2001. On
peut bien penser que le contrôle de la malnutrition se fait par un bon c ontrôle des maladies
diarrhéiques et de la fièvre.
Les infections ont toutes un impact négatif sur l’état nutritionnel des enfants affectés.
La fréquence de ces dernières est une cause de la malnutrition aussi importante que le manque
de nourriture (UNICEF, 1986). La prévalence des maladies infectieuses tend à être maximale
à l a pé riode de pl us grande vul nérabilité nut ritionnelle c hez l ’enfant, c ’est-à-dire l orsque
celui-ci est âgé de six à vingt-quatre mois et que l’allaitement maternel à lui seul ne satisfait
plus ses besoins énergétiques et protéiques (Assi Adepo, 2008).
Des ét udes s ur l a cr oissance et l a m orbidité ch ez l es en fants o nt m ontré q ue l es
infections diarrhéiques jouent un rôle important sur la genèse de la malnutrition (Akre, 1989 ;
Garenne, 2000 ; Banza-Nsungu, 2004). En effet, il ressort de l’étude de Banza-Nsungu qu’à
Yaoundé, le risque diarrhéique est presque deux fois plus élevé chez les enfants malnutris que
chez ceux qui ne pr ésentent a ucun i ndice de c arence nut ritionnelle. La part du r isque
attribuable à l a m alnutrition es t d e 4 7%. La d iarrhée p eut av oir u ne i ssue f atale, car elle
entraîne habituellement une déshydratation sévère.
D’autres études soutiennent que certaines maladies comme la rougeole et le paludisme
ont des impacts négatifs sur l a croissance et l e développement des en fants. La rougeole es t
une crise majeure de la vie de l’enfant en période de croissance. Ceci tient à plusieurs raisons:
non s eulement e lle e st en s oi une m aladie grave, m ais l ’immunosuppression15 qui p eut
persister pe ndant t rois ou qua tre m ois après l ’infection f avorise l ’installation d’ une s érie
d’autres infections qui provoquent leurs propres problèmes nutritionnels (Akre, 1989). 15 L’ummunosuppression désigne la déficience des mécanismes immunitaires.
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Toutes ces m aladies co ntribuent l argement à l a g enèse d e l a m alnutrition ch ez l es
enfants car elles provoquent une diminution de l’absorption des aliments nutritifs nécessaires
à le ur croissance, d es p ertes n utritives, d es altérations mé taboliques e t i mmunitaires q ui s e
manifestent par des pertes pondérales, des retards de croissance et de développement. A titre
d’exemple, la rougeole provoque l’irritation prononcée du tube intestinal et est susceptible par
ce fait d’affecter le processus de digestion et d’absorption. Ces maladies infectieuses sont les
principaux déterminants de la malnutrition chronique et aiguë dans les sociétés ne souffrant
pas de déficit alimentaire persistant ou de famine (Mata, 1983).
Soins préventifs
Les s oins p réventifs d éterminent l es ch ances d ’une b onne s anté et d ’une m eilleure
croissance d e l ’enfant. Ils s e d éclinent en : l a surveillance m édicale d e l a grossesse, d e
l’accouchement et du nouveau-né.
Au Burkina Faso par exemple, Bougma (2007) montre que l es en fants non vaccinés
sont plus affectés par la malnutrition (44,5%) que ceux qui sont vaccinés (35,5%). Cet écart
de 9 points de pourcentage est significatif au seuil de 1%.
Une carence de la future mère en vitamine A et en fer par exemple la prédispose à une
anémie ferriprive (UNICEF, 1986) qui aura des répercussions négatives sur le fœtus et par la
suite s ur s on é tat nut ritionnel. C es i nfections qu i s ont de s f acteurs dé terminants du f aible
poids à la naissance sont facilement dépistées et traitées lors de la surveillance de la grossesse.
C’est l ors de c es vi sites qu’ on pe ut a ussi s ’assurer de l ’immunisation d e la f uture mè re e t
fournir de s s uppléments a limentaires a ux f emmes pr ésentant de s s ignes de m alnutrition
(Dackam, 1990) . Les c onsultations pr énatales ne s ont pa s f réquentes e n A frique e t va rient
selon la culture des individus, les couches sociales et la région de résidence (Bougma, 2007).
Par ailleurs, la vaccination fait partie des priorités pour améliorer le statut nutritionnel
des jeunes enfants. L’immunisation par la vaccination es t l ’un des moyens efficaces d’aider
les en fants à bas âge à passer l ’étape d ifficile de s evrage en l es p rotégeant contre cer taines
infections ( rougeole, di arrhée, infections respiratoires) dont l a s ynergie avec la malnutrition
n’est pl us à dé montrer. Le nouv eau-né hérite de s a m ère une i mmunité c ontre pl usieurs
maladies. Cependant, en raison du caractère éphémère de cette immunité, il est important que
l’enfant acq uière une i mmunité act ive p ar l e b iais d e l a v accination afin d e f aire face a ux
maladies infectieuses les plus communes. Cependant, l’étude de Letonturier (1996) a montré
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que l’effet protecteur de l’allaitement maternel diminue rapidement à partir du quatrième mois
de la naissance. L’organisme de l’enfant doit sécréter lui-même ses anticorps pour assurer son
immunité. P our a ssurer c e pr ocessus a u ni veau de l’enfant, l ’OMS r ecommande d e l ui
administrer l es v accins n écessaires à s a p rotection co ntre l es p rincipales m aladies q ui
sévissent dans l e milieu environnant. Il s ’agit de ceux retenus dans l e cad re du Programme
Elargi de Vaccination (PEV). A chaque type de maladies correspond un type de vaccin. Il doit
être a dministré en nom bre s uffisant et da ns l e délai r equis. C ’est à c ette c ondition qu’ un
vaccin peut agir sur la santé de l’individu, c’est-à-dire prévenir certaines maladies et réduire le
risque de survenance d’autres maladies et partant, de la malnutrition.
Le nombre et la dose des vaccins combinés aux autres facteurs de prévention tels que
le s uivi d e l a grossesse, l ’accouchement d ans l es f ormations s anitaires et d es v isites
postnatales permettent, selon l’UNICEF(1998), de maîtriser, sinon de diminuer l’importance
de la malnutrition chez les enfants.
2.1.7. Facteurs environnementaux
Milieu de résidence
On o bserve en général un ni veau d e m alnutrition pl us é levé e n m ilieu r ural qu’ en
milieu urbain (EDSBF-2003, EDSM-2001, EDSC-2004). Ces disparités se traduisent par des
risques inégaux d'exposition entre les populations urbaines et rurales.
Par ai lleurs, de nombreuses é tudes r écentes sur l a malnutrition des enfants montrent
que l’effet de cette variable est amoindri lorsqu’on contrôle pour les effets des caractéristiques
socioéconomiques et culturelles du ménage (Bakenda, 2007 ; Camara, 2005). L’avantage du
milieu u rbain s ur le milie u r ural p rovient e ssentiellement d e la f orte c oncentration d es
infrastructures socio-sanitaires en v ille (Rakotondrabe, 1996). Grâce à ces infrastructures, i l
est plus facile de mettre en œuvre des mesures de santé publique dans les villes que dans les
campagnes (Contrôle des épidémies, programme d’éducation nutritionnelle, programme élargi
de v accination, p rogramme d e p rotection m aternelle et i nfantile). C 'est d ans l es v illes en
général et d ans l a cap itale en p articulier, q ue s e co ncentrent l es h ôpitaux d e r éférence
(Ntsame, 1999). Le milieu de résidence peut ainsi influencer de façon significative la pratique
alimentaire des mères et leurs comportements en matière de soins à donner aux enfants.
57
Région de résidence
La malnutrition présente d’importantes variations spatiales dans la plupart des pays en
Afrique. Les indicateurs produits par les travaux descriptifs et analytiques de l 'EDSBF-2003
sur l 'état nut ritionnel de s e nfants montrent que la p révalence d e l a m alnutrition v arie t rès
fortement s elon l a r égion de r ésidence. En e ffet, 16% de s e nfants de moins de c inq a ns
accusent un retard de croissance à Ouagadougou contre 49% au Sahel et 59% dans la région
de l'Est (Bougma, 2007). Toutefois, il est difficile de déterminer les facteurs qui peuvent être
à l 'origine de cette variation sans prendre en compte les spécificités des différentes régions.
Ces s pécificités s ont observables not amment a u ni veau de l a pr écarité é cologique, de la
culture, du développement socio-économique, des ressources naturelles. Des conditions agro-
écologiques particulières différencient les cultures pratiquées ou les rendements obtenus selon
les régions. Ces caractéristiques ont une incidence sur le régime alimentaire des populations
résidentes, r égime qui à s on t our, e st s usceptible d'e xpliquer l es di sparités r égionales d e l a
malnutrition des enfants (Agbessi, 1987). Ngo Nsoa (2001) a montré qu'il existe des inégalités
régionales de la malnutrition au Cameroun et que ce phénomène ne frappe pas avec la même
acuité les enfants dans les différentes régions de ce pays. L'auteur explique cette situation par
l'inégale r épartition de la di sponibilité a limentaire, de s r essources e n eau pot able e t d es
centres de santé maternels et infantiles. En évoquant des raisons similaires, Camara (2005) a
montré q ue la région n aturelle d iscrimine fortement le s e nfants p ar r apport à leur ét at
nutritionnel en Guinée Conakry. Cornu (1980) a montré qu'au Nord du Cameroun, les enfants
de 6 à 1 2 m ois r égulièrement s uivis d ans l es centres d e P MI p ossédaient d es m esures
anthropométriques plus normales que celles des enfants du même groupe d'âges non suivis.
58
2.2. Cadre conceptuel
2.2.1. Hypothèse générale et schéma conceptuel
L’hypothèse générale qui s ous-tend cet te étude es t la s uivante : le contexte de
résidence, les facteurs socioculturels et économiques influencent la malnutrition des enfants
de moins de cinq ans. Cette influence passe par les caractéristiques sociodémographiques de
l’enfant et de la mère, le comportement de cette dernière en matière de nutrition et de santé.
Le s chéma conceptuel q ui d écoule d e cette h ypothèse d e b ase est représenté p ar l a
figure 2.2 ci-après. Il est inspiré du schéma explicatif de la mortalité des enfants de Mosley et
Chen (1984) et du schéma conceptuel de l a malnutrition développé par l’UNICEF en 1997
(UNICEF, 1998). Le premier modèle (celui de Mosley et Chen) classe les déterminants par
niveau d’ observation ou d’ analyse, e n dé terminants individuels relatifs au m énage et
déterminants communautaires. La volonté a ffirmée des au teurs était de p roposer un schéma
qui i ntègre l ’approche des s ciences s ociales et cel le d es s ciences b iomédicales. Le c adre
conceptuel d e l a m alnutrition dé veloppé pa r l ’UNICEF est largement accepté au niveau
international, bien q u’utilisé p rincipalement d ans l e co ntexte d e l a s ous-nutrition da ns l es
zones rurales d es p ays en d éveloppement. Ce c adre an alytique a l ’avantage s ur l es au tres
d’embrasser t ous l es f acteurs e xplicatifs pos sibles de l a m alnutrition ( INSAH, 2000) . Il
montre que les causes de la malnutrition sont multisectorielles (alimentation, santé, pratiques
de soins). Ces causes sont classées en causes immédiates (niveau de l’individu), sous-jacentes
(niveau du f oyer ou de l a f amille) e t f ondamentales ( niveau de l a communauté ou de l a
société) ; l’influence des facteurs à un niveau se faisant sentir aux autres niveaux aussi.
Le co ntexte d e r ésidence de l ’enfant influence l a malnutrition. Il comprend l es
ressources pot entielles disponibles da ns l ’environnement na turel d’ un pa ys ou d’une
communauté, y compris la qualité de ces ressources. Les facteurs économiques, culturels et
sociaux influencent la manière dont ces ressources potentielles sont utilisées pour la sécurité
alimentaire, l es s ervices d e s oins et d e s anté et u n en vironnement s ain. Ces f acteurs s ont
considérés comme les causes de base qui contribuent à la malnutrition.
59
Figure 2.2 : Schéma conceptuel de la malnutrition des enfants de moins de cinq ans
La capacité de soins, autre déterminant sous-jacent, es t l ’apport dans l es ménages et
communautés de temps, d’attention et de soutien destinés à satisfaire les besoins physiques,
mentaux et sociaux de l ’enfant qui grandit ( INSAH, 2008). On ci tera à titre d ’exemples de
pratiques de soins l’alimentation des enfants, les comportements adoptés pour être en bonne
santé, le s outien e t la stimulation c ognitive de s e nfants e t l es s oins a ux m ères pe ndant l a
grossesse e t l’ allaitement. L’adéquation de c es s oins dé pend du c ontrôle de s r essources
économiques, de l’autonomie décisionnelle, de l’état physique et mental de celui qui dispense
ces s oins. Les ca ractéristiques sociodémographiques d es m ères et d es enfants influencent
l’état nutritionnel des enfants à t ravers les comportements des mères en matière de soins, de
nutrition.
Contexte de résidence
Facteurs socioculturels
Facteurs socioéconomiques
Malnutrition
Comportements de la mère en matière de nutrition et de
santé
Caractéristiques sociodémographiques des
mères et des enfants
60
Ce modèle relie les facteurs explicatifs de la malnutrition à différents niveaux socio-
organisationnels.
2.2.2. Définition des concepts
Malnutrition
La malnutrition est un concept polysémique qui revêt plusieurs formes :
la sous alimentation (manger insuffisamment)
les carences alimentaires (manger mal ou de façon déséquilibrée)
la suralimentation (manger trop)
La m alnutrition es t, en effet, u n ét at co mplexe o ù p euvent s e m êler d es car ences
multiples et co ncomitantes en cal ories, en p rotéines et en m icro-nutriments. Le t erme «
malnutrition » e nglobe la ma lnutrition généralisée q ui s e m anifeste p ar u n r etard d e
croissance, un déficit pondéral, l’émaciation, et les carences en micro-nutriments tels que le
fer, la v itamine A , l’ iode, le z inc e t l’ acide f olique (UNICEF, 2005) . La m alnutrition,
contrairement à la faim, ne dépend pas seulement de la satisfaction de l’appétit : un enfant qui
mange suffisamment pour calmer sa faim immédiate peut néanmoins être malnutri.
L’évaluation d e l’ état n utritionnel d e l’ individu s e f ait le p lus c ommunément p ar le
biais de l ’anthropométrie. En d’autres t ermes, o n p rend l a m esure d es paramètres co rporels
tels que l e poids et l a t aille, l esquels sont ensuite comparés avec l es moyennes en registrées
pour des personnes bien nourries du même sexe et appartenant aux mêmes tranches d’âge. Les
mesures anthropométriques peuvent êt re décrites comme des indicateurs de résultat, dans l a
mesure où elles reflètent (chez une personne) tous les facteurs qui affectent l’état nutritionnel.
Il existe d es mé thodes p lus complexes d ’établissement d u bilan nut ritionnel, not amment ce
qui a t rait aux carences en v itamines et en minéraux, mais ces méthodes sont généralement
d’un emploi plus lourd à l’échelle d’un pays dont les moyens sont limités, notamment dans le
domaine médical.
La malnutrition chronique est caractérisée par un retard de croissance (rapport taille-
âge) e t l a m alnutrition a iguë ( rapport poi ds-taille) p ar u ne n ette i nsuffisance d e p oids p ar
rapport à la taille. La forme globale de la malnutrition (chronique ou aiguë) caractérisée par
une i nsuffisance pondé rale s e m esure pa r l e r apport poi ds-âge. Les t ermes « s évère » et
61
« modéré » sont employés pour décrire le degré de sévérité de la malnutrition, les deux stades
constituant une urgence médicale et nécessitant une prise en charge efficace et rapide. Enfin,
on pa rle d e ma lnutrition a iguë c ompliquée q uand u ne ma ladie a ssociée à la ma lnutrition
nécessite des soins médicaux plus importants. Il y a donc plusieurs formes de malnutrition,
mais celle qui nous intéresse dans cette étude est celle due à un déséquilibre alimentaire ou à
un dé ficit nut ritionnel. E lle s era a ppréhendée par l’état nutritionnel de l’enfant, mesuré à
l’aide de l’insuffisance pondérale.
Caractéristiques sociodémographiques des mères et des enfants
Il s 'agit d’une part, des caractéristiques liées à l'enfant et d’autre part celles liées à l a
mère, toutes susceptibles d'affecter l’état nutritionnel de l’enfant. Au niveau de l’enfant nous
retenons le sexe et l’âge. A u ni veau de l a m ère, nous r etenons s on groupe d’âges à la
naissance de l’enfant, la participation de celle-ci aux dépenses de santé du ménage.
Comportements de la mère en matière de nutrition et de santé
Ils d ésignent l a co nnaissance et l ’ensemble d es pratiques q ui o ptimisent l’ utilisation
des ressources physiques e t de l ’environnement (alimentaires et sanitaires) ; par l ’apport du
temps, de l’attention et du soutien nécessaires pour couvrir les besoins physiques, mentaux et
sociaux de l’enfant. Ils seront saisis par : les soins prénatals, le colostrum, la vaccination, les
suppléments en vitamines et la qualité de l’eau de boisson.
Facteurs socioéconomiques
Les f acteurs socioéconomiques s ont pe rçus comme d es él éments q ui traduisent la
position s ociale et l a capacité matérielle et f inancière d 'accès au x s oins m édicaux et à u ne
alimentation adéquate pour les jeunes enfants. Ils déterminent les conditions dans lesquelles
vivent l es m embres du m énage et qui s ont susceptibles d ’affecter l’ état n utritionnel d es
enfants. Nous les appréhendons à partir du niveau de vie du ménage, l’occupation ou activité
économique de la mère et le type de toilette.
Facteurs socioculturels
Ce s ont de s a ttributs qui s ont f ortement i nfluencés p ar l es no rmes e t va leurs
institutionnalisées pa r u n g roupe s ocial e t c onditionnant l es c omportements de l ’individu,
puisqu’ils favorisent ou non le contact de l’individu avec des idées et mentalités occidentales.
En d’autres termes, ce sont les perceptions, les croyances, les normes et les valeurs véhiculées
62
au sein d'un groupe d'individus donné, susceptibles de modifier les choix économiques et les
pratiques r elatives à l a santé d e l ’enfant, l a va leur de l ’enfant, les c royances à p ropos d e
l’origine des maladies, les préférences et les interdits alimentaires. Nous les saisissons à partir
de la religion, et le niveau d’instruction de la mère.
Contexte de résidence
Il s ’agit d e ce qui caractérise le ménage et l ’environnement f amilial d ans le quel
l’enfant vi t. Le contexte d e r ésidence r envoie au milieu de résidence et à l a région de
résidence de l’enfant. La ville s'oppose au village par les modes de vie, les types d’activités et
la disponibilité alimentaire (en quantité et en qualité). Elle bénéficie également des avantages
de l'urbanisation. La région de résidence quant à elle est une entité géo-administrative. Il y a
un déséquilibre dans la répartition spatiale des vivres (en quantité et en qualité) à cause de la
précarité é cologique différentielle, d es d isparités en m atière de d éveloppement
socioéconomique et le manque dans certaines régions d'infrastructures telles que les routes et
les marchés né cessaires pour é couler de s p roduits i mportés pour l a consommation de s
individus, en l’occurrence les jeunes enfants.
63
2.3. Cadre d’analyse
La clarification de l’hypothèse générale posée nécessite la construction d’une théorie
auxiliaire, encore appelée cadre d’analyse, découlant directement du cadre conceptuel.
2.3.1. Hypothèses spécifiques
Les hypothèses spécifiques à tester dans cette étude sont les suivantes :
H1 : Les en fants des régions septentrionales du Nord e t de l’Extrême-Nord courent
plus de risques d’avoir un mauvais état nutritionnel que ceux des autres régions.
H2 : Les en fants d es m ères sans i nstruction ou de ni veau d’ instruction pr imaire
courent pl us d e r isques d’avoir un m auvais état n utritionnel que ceu x des mères de n iveau
d’instruction « secondaire ou plus ».
H3 : L’état nutritionnel de l’enfant se détériore au fur et à mesure que le niveau de vie
du ménage baisse.
H4 : Comparés a ux f illes, l es g arçons ont pl us de risques d’avoir un m auvais é tat
nutritionnel.
H5 : Les en fants non va ccinés ou pa rtiellement va ccinés c ourent pl us de r isques
d’avoir un mauvais état nutritionnel, comparés à ceux qui sont totalement vaccinés.
2.3.2. Schéma d’analyse
La s ynthèse d es hypothèses à v érifier es t p résentée p ar l a f igure 2 .3. Ce s chéma
d’analyse complète et explicite le schéma conceptuel de la figure 2.2.
64
Figure 2.3 : Schéma d’analyse de l’état nutritionnel des enfants de moins de cinq ans
Région de résidence
Milieu de résidence
Occupation de la mère
Niveau de vie du ménage
Type de toilette
Religion Niveau
d’instruction
Etat nutritionnel de l’enfant
Vaccination
Supplémentation
Soins prénatals
Qualité de l’eau
de boisson Colostrum
Participation aux dépenses de santé
Age à l’accouchement
Sexe de l’enfant
Age de l’enfant
65
En parcourant l a l ittérature sur l es f acteurs explicatifs de l a malnutrition, on se rend
compte qu’ elle t ouche pl usieurs dom aines, à s avoir : l a s anté, l a d émographie,
l’environnement, l ’économie, l a s ociologie, l ’anthropologie, e tc. La m alnutrition a pparaît
comme un phé nomène particulièrement complexe, é tant donné l ’intrication de s ni veaux
explicatifs plausibles à prendre en compte. En effet, une hiérarchie des causes est sans doute
plus di fficile à é tablir pour l a m alnutrition qu e pour d’ autres pa thologies ( Gruénais et
Delpeuch, 1992 ). P otentiellement, t out c e qui pe ut j ouer s ur l es qu antités e t l’équilibre e n
nutriments consommés peut contribuer à la malnutrition.
Parmi l es causes généralement at tribuées à l a malnutrition, cer taines sont l iées à d es
pathologies particulières qui interviennent comme facteurs aggravant, mais ces pathologies ne
définissent pas en elles-mêmes la malnutrition ; le schéma de l’agent pathogène unique dont
l’action s erait a ggravée par ce rtains co mportements s emble p eu v alide ( Payne, 1985 ). La
malnutrition est aujourd’hui envisagée plutôt comme un é tat produit par l’accumulation d’un
ensemble d e f acteurs : a pport dé séquilibré e n nut riments, d éficience d e l a co uverture
vaccinale, e nvironnement i nsalubre, pr atiques de s evrage t rop b rusque, absence ou f aible
niveau de scolarisation, faible niveau socioéconomique des familles, etc. Faire la part entre le
domaine strictement biomédical et celui de l’environnement physique, social, voire politique,
s’avère particulièrement difficile ; bien plus, il s ’agit là peut-être d’une des rares pathologies
pour laquelle des causes sous-jacentes d’ordre socioéconomique sont a priori mises en avant
puisque, e n p remière a nalyse, pl usieurs études s ’accordent pour l ier l a m alnutrition à l a
pauvreté.
Toutefois, une conceptualisation du phénomène et des différents facteurs susceptibles
de l’expliquer a été faite. A la suite de la conceptualisation, un ensemble d’hypothèses ont été
définies e t dont les d ifférentes r elations s ont p résentées p ar le schéma d ’analyse. Avant de
vérifier ces hypothèses, le chapitre suivant présente les aspects méthodologiques qui seront
adoptés dans la suite de ce travail en fonction des objectifs assignés à l’étude.
66
CHAPITRE III: ASPECTS MÉTHODOLOGIQUES
’analyse d es d onnées es t u ne ét ape es sentielle dans l a r echerche en s ciences
sociales. Elle e xige t outefois que lques pr éalables, not amment la co llecte d es
données qui permettront de tester les hypothèses formulées. Cependant, face aux contraintes
financières et de temps, cette étape de recherche en sciences sociales ne sera pas menée. Pour
pallier à c e problème, l es d onnées u tilisées d ans l e cad re d e cette étude s ont cel les de l a
MICS-2006 du C ameroun. Après avoir présenté la source de données et évalué la qualité de
ces donné es, il s era qu estion de définir les va riables opé rationnelles e t l es m éthodes de
construction des principaux indicateurs avant de préciser les méthodes d’analyse pour mettre
à l’épreuve des faits les hypothèses.
3.1. Source de données16
Les données utilisées dans le cadre de cette étude sont celles de l’Enquête par grappes
à indicateurs multiples, traduction française de Multiple Indicators Cluster Survey (MICS 3),
réalisée en 2006 p ar l’ Institut National de la S tatistique (INS) du C ameroun. C ette enquête
visait essentiellement à produire des indicateurs de suivi de la réalisation des objectifs et des
cibles définis pa r l es c onventions i nternationales r écentes. Il s ’agit pr incipalement de l a
Déclaration d u Millénaire a doptée en s eptembre 2000 à l ’unanimité par l es 191 États
membres d e l ’ONU et d u Plan d ’action d e l a cam pagne « U n M onde D igne de s E nfants »
adopté par 189 États membres lors de la Session spéciale des Nations Unies sur l’Enfance en
mai 2002. C es de ux e ngagements s’inspirent de s pr omesses f aites pa r l a c ommunauté
internationale lors du Sommet Mondial sur les Enfants (SME) de 1990. Le Gouvernement du
Cameroun, en signant ces conventions internationales, s’est engagé à améliorer les conditions
de vie des enfants et à assurer le suivi de la mise en œuvre de ces engagements. L’UNICEF
s’engage pour sa part, à l’accompagner dans ce processus en jouant un rôle d’appui.
16 Les chiffres contenus dans cette section sont tirés du Rapport principal de la MICS 3 du Cameroun
L
67
L’enquête M ICS e st un e opé ration s tatistique de c ollecte de donn ées da ns di vers
domaines sociaux. Cette édition de la MICS est la troisième génération à être réalisée dans le
monde. Elle consistait en de s i nterviews d ans l es m énages et p articulièrement auprès d es
femmes âgées de 15 à 49 ans et des enfants de moins de 5 ans (0 à 59 mois). On posait à ces
femmes des questions sur leurs caractéristiques sociodémographiques, l’anatoxine tétanique,
leur s anté et celle d e l eurs n ouveaux nés, l eur union/mariage, l 'utilisation de s m éthodes de
planification f amiliale, l eur c omportement s exuel, le V IH/SIDA e t l eur p articipation au
développement. Les femmes ou l es pe rsonnes e n c harge de s enfants de m oins de 5 a ns
répondaient aux que stions c oncernant l eurs enfants et r elatives à l a v itamine A, à
l’allaitement, au x s oins d es en fants m alades, au p aludisme, à l a v accination, et à
l’anthropométrie.
3.1.1. Objectifs de l’enquête
La MICS 3 visait les principaux objectifs suivants :
Fournir des indicateurs récents pour l’évaluation de la situation des enfants et
des femmes au Cameroun ;
Fournir les données et l es indicateurs nécessaires pour le suivi/évaluation des
Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) et pour l e rapport du P lan d’Action
pour Un Monde Digne des Enfants (PAMDE) comme base de l’action future ;
Contribuer à l ’amélioration de s s ystèmes de c ollecte de donné es e t de
suivi/évaluation du Cameroun et au r enforcement d e l ’expertise t echnique en m atière d e
conception, de mise en œuvre et d’analyse de ces systèmes.
Spécifiquement, la MICS 2006 devait pouvoir :
- Fournir des données permettant d’apprécier les progrès réalisés dans le cadre du suivi
et de l’évaluation du DSRP1, du PAMDE2 et des OMD ;
- Fournir d es donné es permettant d’ apprécier l e n iveau d e m ise en œuvre de l a
Convention relative aux Droits des Enfants (CDE) ;
- Fournir des informations complémentaires sur certains indicateurs pour la troisième
édition du T ableau de Bord S ocial ( TBS III) s ur l a s ituation de s e nfants e t de s f emmes au
Cameroun ;
68
- Fournir de s donn ées pour l ’actualisation de l a ba se d e donné es G éo-reférencées
DEVINFO ou AFRICAINFO de suivi des OMD, du NEPAD3, du DSRP, de l’UNDAF4, du
MDE, etc.
3.1.2. Constitution de l’échantillon
L’échantillon c hoisi po ur l ’enquête a é té c onstitué da ns l e but d’ obtenir de s
estimations basées sur un grand nombre d ’indicateurs concernant l a s ituation des enfants e t
des femmes au niveau national, en zones urbaine et rurale, et ce pour 12 régions : Yaoundé,
Douala et les 10 régions à savoir : Adamaoua, Centre à l ’exception de la vi lle de Yaoundé,
Est, Extrême-Nord, Littoral à l’exception de la ville de Douala, Nord, Nord-Ouest, Ouest, Sud
et Sud-Ouest. Ces 12 régions ont été identifiées comme domaines d’étude et stratifiées suivant
le milieu de résidence. L’échantillon a été tiré suivant un plan de sondage à deux degrés.
- Au pr emier de gré, de s z ones de dé nombrement ont é té t irées da ns c haque dom aine
d’étude avec une probabilité proportionnelle à la taille de la population.
- Au deuxième degré, on a tiré un nombre variable de ménages, après la mise à jour des
cartes des zones tirées (dénombrement des ménages de la zone).
L’échantillon e st c onstitué de 9 856 m énages a u s ein de squels on a r ecensé 9 408
femmes de 15- 49 ans et 6 495 enfants âgés de moins de 5 ans.
3.1.3. Répartition de l’échantillon
Sur les 9 856 ménages tirés, 9 848 ont été identifiés. Parmi ces derniers, 9 667 ont été
effectivement enquêtés, soit un t aux de réponse relativement s atisfaisant de 98,2% chez l es
ménages. Toutes les grappes sélectionnées ont été entièrement couvertes par l’enquête.
Dans les ménages identifiés et enquêtés, 9 408 femmes âgées de 15 à 4 9 ans étaient
éligibles pour l’enquête in dividuelle f emme. P armi c elles-ci, 9 009 ont é té effectivement
interrogées, soit un taux de réponse de 95,8%. En outre, 6 495 e nfants de moins de 5 ans ont
été recensés et des informations ont été collectées pour 6 362, ce qui correspond à un taux de
réponse de 98,0%.
69
Les t aux g lobaux de r éponse17 sont de 94,0% e t de 96,2% r espectivement ch ez l es
femmes de 15-49 ans et chez les enfants de moins de 5 ans.
3.1.4. Questionnaires
Trois supports ou types de questionnaire ont été utilisés pour collecter les données au
cours d e l a M ICS 3 au C ameroun. Il s ’agit : du que stionnaire m énage, du que stionnaire
femme de 15-49 ans et du questionnaire enfant de moins de 5 ans.
Les questionnaires du C ameroun étaient conformes aux questionnaires du modèle de
la M ICS 3 avec quelques modifications e t a jouts. Le questionnaire m énage a p ermis entre
autres de collecter les informations sur les caractéristiques démographiques (sexe, âge, lien de
parenté) des membres du ménage, ainsi que sur la survie des parents des enfants de moins de
18 ans, sur la fréquentation scolaire des enfants de 5-24 ans, sur le travail des enfants de 5-14
ans, sur la discipline des enfants de 2-14 ans, sur le handicap des enfants de 2-9 ans, sur l’eau
et l’ assainissement. Il a servi aussi à recueillir l es d onnées s ur l es caractéristiques d u
logement, la possession et l’utilisation des moustiquaires, les orphelins et enfants vulnérables,
les dépenses de santé des ménages et l’iodation du sel. A travers le questionnaire ménage, on
a id entifié le s p opulations c ibles ( femme d e 1 5-49 a ns e t e nfant de m oins de 5 a ns) ou
éligibles à l’enquête individuelle.
Dans chaque ménage enquêté, un questionnaire femme de 15-49 ans était administré à
chaque femme éligible à l’enquête individuelle. Il permettait de collecter les informations sur
les caractéristiques sociodémographiques, sur l’anatoxine tétanique, sur la santé des femmes
et celle des nouveaux nés, les soins prénatals et post-natals, leur union/mariage, l’utilisation
des méthodes de planning familial, notamment la contraception, leur comportement sexuel, la
connaissance du V IH/Sida et la stigmatisation à l’égard des personnes séropositives et le test
du V IH. Il a p ermis a ussi d e r ecueillir d es in formations s ur le ur p articipation a u
développement.
Dans le questionnaire enfant de moins de 5 ans, économie a été faite des modules sur
les mo rtalités in fantile, in fantojuvénile et m aternelle d éjà t raités p ar l a t roisième en quête
démographique et de santé du Cameroun (EDSC 3) de 2004.
17 Le taux global de réponse pour chaque enquête individuelle est obtenu en faisant le produit du taux de réponse de l’enquête ménage par celui de l’enquête individuelle considérée.
70
Pour c haque e nfant de m oins de 5 a ns i dentifié da ns un m énage enquêté, un
questionnaire enfant de moins de 5 ans était administré à l a mère ou à l a personne en charge
de cet enfant. Ce questionnaire permettait à ces personnes de donner les informations relatives
à l ’enregistrement d es naissances à l ’état civil, à l ’éducation d e l a petite enfance, au
développement de l’enfant, à la vitamine A, à l’allaitement maternel, à la prise en charge des
maladies intégrées de l’enfance, au paludisme, aux pratiques nutritionnelles chez ces enfants
et à l a vaccination des enfants. Il a permis aussi d’enregistrer les mesures anthropométriques
de ces enfants en vue du calcul des indices nutritionnels.
En plus du panneau d’informations sur l’enfant (UF), les modules de ce questionnaire
sont :
- Enregistrement des naissances et éducation de la petite enfance (BR) ;
- Développement de l’enfant (CE) ;
- Vitamine A (VA) ;
- Allaitement (BF) ;
- Soins des enfants malades (CA) ;
- Paludisme (ML) ;
- Vaccination (IM) ;
- Anthropométrie (AN).
Les que stionnaires de l a M ICS 3 ut ilisés au C ameroun av aient fait l’ objet d ’un te st
préliminaire en février 2006. Sur la base des résultats de ce test, des modifications avaient été
apportées à la formulation et à la traduction des questionnaires.
3.2. Population cible
La popul ation ciblée p ar l ’étude est l ’ensemble de s e nfants de m oins de c inq a ns
enquêtés l ors d e la MICS-2006. C ependant, la v ariable « poids » qui es t u tilisée d ans l a
construction de l’état nutritionnel des enfants n’est disponible que pour les enfants survivants.
La population cible est réduite aux survivants sous l’hypothèse de non s élection des enfants.
C'est-à-dire q ue, l es en fants d écédés au raient eu l e m ême ét at n utritionnel q ue l es en fants
survivants s ’ils é taient e n vi e. L’analyse de s d onnées por tera donc s ur l es s urvivants a u
moment de l ’enquête. Toutefois, i l convient de signaler que l ’exclusion des enfants décédés
71
de l’échantillon pourrait entraîner une sous-estimation de la malnutrition dans la mesure où la
plupart des enfants atteints de malnutrition « extrême » seraient décédés avant l’enquête.
3.3. Évaluation de la qualité des données
L’échantillon de pe rsonnes i nterrogées da ns l e c adre de l ’Enquête pa r g rappes à
indicateurs multiples de 2006 (MICS 3) du Cameroun n’est qu’un lot parmi tant d’autres qui
auraient pu être choisis au sein de la même population, en utilisant la même composition et la
même t aille. C hacun de ces éch antillons au rait donné des r ésultats l égèrement di fférents de
ceux de l’échantillon réellement choisi.
Les estimations obtenues à partir des données de la MICS 3 sont sujettes à deux types
d’erreurs : les erreurs de mesure et les erreurs de sondage. Les erreurs de mesure sont relatives
à la mise en œuvre de la collecte (omission des ménages sélectionnés, erreurs de contenu) et
de l’exploitation des données (erreurs lors de la saisie des données). Si des précautions sont
prises pour é viter l es e rreurs de m esure ( formation de s a gents e nquêteurs, pr atique de l a
double saisie des questionnaires, etc.), il est important d’évaluer celles-ci. Néanmoins, avant
l’utilisation de s donné es pr ovenant de l a M ICS-2006, i l c onvient d ’évaluer l a q ualité d es
informations qui y sont contenues afin de cerner la portée des résultats qui en découleront.
3.3.1. Évaluation interne
a) Taux de non-réponse des variables
Les non -réponses p roviennent s oit de l ’enquêté(e) qui r efuse d e r épondre à une
question, soit de l’enquêteur par omission ou pa r erreur de remplissage, soit d’une erreur de
saisie. Nous présentons dans le t ableau 3.1, l e t aux de non-réponse correspondant à chaque
variable. Ces taux sont négligeables car tous inférieurs au seuil autorisé de 10% à l’exception
des variables soins prénatals et colostrum. Le taux élevé pour chacune de ces deux dernières
variables s’explique par le fait que les questions relatives à c elles-ci ne concernaient que les
femmes a yant eu u ne naissance v ivante au cours d es d eux d ernières an nées p récédant
l’enquête. Ces variables ne seront pas utilisées dans les analyses, car sujettes à une sélectivité
de l’échantillon, ce qui risquerait en plus de réduire considérablement la taille de l’échantillon
dans les analyses multivariées.
72
Pour les autres variables présentant un t aux de non-réponse non s trictement nul, nous
admettons que les insuffisances dénotées ne sont pas de nature à biaiser les résultats.
Tableau 3.1 : Taux de non-réponses des différentes variables
Variables Cas valides Cas manquants Taux de non réponse (%)
Urbain Rural National Urbain Rural National Urbain Rural National
Standard OMS Standard NCHS Urbain Rural National National
Etat morbide
A souffert 12,4 24,3 20,2 24,3 N’a pas souffert 7,8 17,6 13,4 15,9
Khi-deux 12,25*** 22,85*** 45,060*** 60,24*** V de cramer 0,07*** 0,08*** 0,09*** 0,102***
Age de l’enfant
0-11 mois 7,6 16,0 12,8 9,3 12-23 mois 11,3 24,2 19,3 28,1 24-35 mois 9,4 21,7 16,4 22,0 36-47 mois 8,2 19,0 14,7 17,1 48-59 mois 9,4 20,0 15,7 18,4
Khi-deux 4,78(ns) 18,09*** 22,02*** 158,94*** V de cramer 0,05(ns) 0,07*** 0,06*** 0,17***
*** Significatif au seuil de 1%
(ns) non significatif au seuil de 10%
Source : Exploitation des données de la MICS-2006, Cameroun.
4.1.8. Classification des facteurs associés à l’état nutritionnel des enfants
Au niveau bivarié, l’on peut classifier les facteurs associés à l’état nutritionnel des
enfants en examinant la statistique "V de Cramer" associée et son seuil de significativité.
Ainsi, ces facteurs se présentent dans les tableaux 4.8 comme suit:
Tableau 4.8.a : Classification des facteurs associés à l’état nutritionnel des enfants au niveau national
N° d’ordre Variable V de Cramer
1 Région de résidence 0,26 2 Niveau d’instruction de la mère 0,22 3 Niveau de vie du ménage 0,21 4 Milieu de résidence 0,15 5 Occupation de la mère 0,14 6 Religion 0,12 7 Qualité de l’eau de boisson 0,10 8 Type de toilette 0,08 9 Sexe de l’enfant 0,05 10 Participation aux dépenses de santé 0,04
Plus que t out a utre f acteur, l a r égion d e r ésidence es t fortement associé à l ’état
nutritionnel (V de Cramer supérieur à 0 ,23) au niveau national et pour les deux milieux de
109
résidence. On pourrait penser à ce niveau qu’il est un important facteur de différenciation de
l’état nutritionnel des enfants de moins de cinq ans au Cameroun.
Tableau 4.8.b : Classification des facteurs associés à l’état nutritionnel des enfants en milieu urbain
N° d’ordre
Variables V de Cramer
1 Région de résidence 0,23 2 Niveau de vie du ménage 0,20 3 Niveau d’instruction de la mère 0,18 4 Religion 0,16 5 Occupation de la mère 0,13 6 Qualité de l’eau de boisson 0,07 7 Type de toilette 0,06 8 Age à l’accouchement 0,06 9 Participation aux dépenses de santé 0,05
Tableau 4.8.c : Classification des facteurs associés à l’état nutritionnel des enfants en milieu rural
N° d’ordre Variables V de
Cramer 1 Région de résidence 0,23 2 Niveau d’instruction de la mère 0,18 3 Niveau de vie du ménage 0,13 4 Occupation de la mère 0,13 5 Religion 0,11 6 Sexe de l’enfant 0,07 7 Participation aux dépenses de santé 0,05 8 Type de toilette 0,03 9 Qualité de l’eau de boisson 0,03
Les au tres f acteurs as sociés à l ’état n utritionnel au n iveau n ational l e s ont d ans l es
deux m ilieux d e r ésidence, à l ’exception du sexe de l ’enfant et d e l ’âge d e l a m ère à
l’accouchement. Le sexe est significativement associé à la malnutrition en milieu rural tandis
que le groupe d’âges de la mère à l’accouchement l’est uniquement en milieu urbain.
110
4.2. Profil des enfants malnutris
L’un des objectifs de notre étude est de "dégager le profil des enfants malnutris". Pour
cela nous f aisons r ecours à l’Analyse Factorielle d es C orrespondances Multiples ( AFCM).
L’AFCM m et en év idence l es i nterrelations entre p lusieurs v ariables à p artir d esquelles on
peut apercevoir des regroupements de variables par « affinité » ou par proximité statistique et
la position des unes (ou de certains groupes de variables) par rapport à d ’autres. A contrario,
l’analyse b ivariée ne m et en év idence q ue la r elation en tre d eux v ariables. L’AFCM a
l’avantage d e résumer u ne m asse d ’informations contenues d ans p lusieurs v ariables. C ette
technique pe rmet a insi d’obtenir un nom bre r éduit de variables r ésumées appelées f acteurs,
qui d ans l a p résente ét ude p ermettent d e caractériser les en fants p ar rapport à l eur ét at
nutritionnel.
Le logiciel utilisé pour cette méthode est le logiciel SPAD (version 5.5). Les variables
prises en compte sont les variables explicatives et la variable dépendante de l’étude.
4.2.1. Détermination des axes factoriels
Pour p résenter l es r ésultats d e l ’AFCM, i l f audrait d’ abord d éterminer l e nom bre
d’axes nécessaires pour l’interprétation. Plusieurs règles permettent de le faire.
Nous pr ivilégions l’éboulis des valeurs propres car cette m éthode permet d e
sélectionner un s ous-espace s table t out en n e s urestimant p as le nom bre de c omposantes
pertinentes à l’ instar d e la R ègle d e K aiser (Baccini et B esse, 2005) . L’histogramme des
valeurs pr opres (cf. annexe 4) présente la d écroissance d e celles-ci. L e principe c onsiste à
rechercher, s’il existe un “coude” et de ne conserver que les valeurs propres jusqu’à ce coude.
Nous r etenons l es de ux pr emiers a xes pr incipaux, c ar i ls suffisent pour m ieux
représenter les interdépendances entre variables. En effet, le premier axe représente 11,63% et
le deuxième axe 7,60%, soit au total 19,23% de l’inertie totale expliquée par l’ensemble des
axes. C e p ourcentage, a pparemment f aible n e c ompromet p as l ’étude, car l es t aux d ’inertie
sont en général faibles dans la plupart des tableaux disjonctifs complets.
L’analyse compte après apurement 13 variables et 43 modalités actives. Pour chaque
axe, l e p ourcentage d’inertie t héorique m oyen e xpliqué pa r c haque m odalité e st de 2,3%
111
(100%/43). Or on constate sur l’axe 1 que les contributions varient de 0% à 9,7% tandis que
les contributions vont de 0% à 18,4% sur l’axe 2.
Seules les modalités dont la contribution est élevée (nettement supérieure à 2,3%) sont
à considérer pour l’interprétation d’un axe.
Premier axe factoriel
Il o ppose l es en fants d es m énages d e n iveau d e v ie f aible à ceu x d es m énages d e
niveau de vie élevé (cf. tableau 4.9.a).
Tableau 4.9.a : Description de l’axe 1 par les modalités
Libellé de la variable Libellé de la modalité
Niveau de vie du ménage faible Milieu Rural Niveau d'instruction de la mère Sans instruction Qualité de l’eau de boisson Npotable Occupation de la mère Menage/Travaux domes Région de résidence Extreme Nord Région de résidence Nord religion Musulman Etat nutritionnel malnutri
Participation aux dépenses de santé Nparticip
Région de résidence Adamaoua Z O N E C E N T R A L E
Participation aux dépenses de santé particip
Occupation de la mère Industrie/commerce Etat nutritionnel Bnourri Région de résidence Centre religion Catholique/Prot Occupation de la mère Etude ou Service/Adm Région de résidence Littoral Qualité de l’eau de boisson Potable Niveau d'instruction de la mère Secondaire & + Milieu Urbain Niveau de vie du ménage élevé
112
Les pr emiers, m alnutris pour l a pl upart, résident e n m ilieu r ural da ns l es r égions
septentrionales du Nord, de l’Extrême-Nord et de l’Adamaoua. Leurs mères, sans instruction,
ne participent pas aux dépenses de santé dans le ménage et ont comme principale occupation
« Ménagère/Travaux domestiques ». Ces enfants appartiennent à d es ménages musulmans où
l’eau consommée peut être qualifiée de « Non potable ».
Les s econds, dont l es m ères ont un ni veau d’ instruction s econdaire ou s upérieur et
travaillant dans l’ industrie, commerce, s ervice/administration ou pour suivant l eurs é tudes e t
participant aux dépenses de santé du ménage, sont bien nourris pour la plupart. Ils résident en
milieu urbain dans les régions du Centre et du Littoral. Ces enfants sont dans des ménages à
chef catholique/protestant où l’eau consommée peut être qualifiée de «potable ».
Deuxième axe factoriel
Le second axe oppose (cf. tableau 4.9.b) :
D’une pa rt, l es e nfants vi vant da ns l e m ilieu r ural de s r égions de S ud, S ud-Ouest,
Nord-Ouest et de l’Est qui sont nés des mères agricultrices et de niveau d’instruction primaire.
Ces dernières participent aux dépenses de santé du ménage. Ces enfants consomment de l’eau
non potable et appartiennent à des ménages catholiques ou protestants où le niveau de vie est
moyen.
D’autre part, les enfants du milieu urbain des régions de l ’Adamaoua, de l ’Extrême-
Nord, du N ord e t du Littoral. Ils appartiennent à des ménages musulmans de niveau de vie
élevé. Leurs mères sont sans instruction, ne participent pas aux dépenses de santé du ménage
et ont à titre d’ occupation pr incipale l es t ravaux dom estiques. L ’eau c onsommée pa r c es
enfants peut être qualifiée de potable.
113
Tableau 4.9.b : Description de l’axe 2 par les modalités
Libellé de la variable Libellé de la modalité
Occupation de la mère Agriculture Niveau d'instruction de la mère Primaire Participation aux dépenses de santé particip
Milieu Rural religion Catholique/Prot Région de résidence Nord Ouest Niveau de vie du ménage moyen Région de résidence Sud Région de résidence Sud Ouest Région de résidence Est Qualité de l’eau de boisson Npotable
Z O N E C E N T R A L E
Région de résidence Nord Région de résidence Littoral Eau de boisson Potable Région de résidence Adamaoua Région de résidence Extreme Nord Niveau d'instruction de la mère Sans instruction Niveau de vie du ménage élevé religion Musulman Milieu Urbain Participation aux dépenses de santé Nparticip
Occupation de la mère Menage/Travaux domes
Pour affiner notre typologie, l’on fait recours au plan factoriel.
4.2.2. Représentation graphique et caractérisation des enfants malnutris
La q ualité d e r eprésentation d es modalités s ur l’ axe est d onnée p ar l ’analyse d es
contributions r elatives, o u co sinus car rés. P our l ’interprétation, on r ecourt a u pl an f actoriel
(graphique 4.4) où sont sélectionnées les modalités qui ont les cosinus carrés les plus forts :
elles s ont l es m ieux r eprésentées au s ens o ù l es d istances s ont l es moins a ltérées p ar la
projection. En plus, certaines informations mieux ajustées par le troisième axe peuvent êt re
représentées sur le plan factoriel.
114
Graphique 4.4 : Catégorisation des enfants selon certaines caractéristiques
L’analyse d e c e p remier p lan f actoriel p ermet de m ettre en ex ergue d eux g roupes
d’enfants :
Premier groupe :
Le premier groupe est constitué d’enfants bien nourris vivant dans des ménages riches
dont le chef est de religion catholique. Ils sont complètement vaccinés et consomment une eau
que l’on qualifierait de potable. Ils résident pour la plupart en milieu urbain dans les régions
du Centre, du Littoral et de l ’Ouest. Leurs mères ont un ni veau d’ instruction secondaire ou
supérieur et s ont sans oc cupation ou t ravaillent dans l ’Industrie/Commerce,
115
l’administration/service ou poursuivent leurs études. Elles participent également aux dépenses
de santé dans le ménage.
Deuxième groupe :
Le deuxième ensemble regroupe les enfants malnutris qui vivent en milieu rural dans
des ménages pauvres des régions de l’Extrême-Nord, du Nord, de l’Adamaoua et de l’Est. Ils
n’ont r eçu j usque l à a ucun va ccin ou a lors s ont partiellement vaccinés. Ils c onsomment de
l’eau non potable et ne reçoivent pas de suppléments en vitamines. Ils sont issus des femmes
ménagères ( ou effectuant d es t ravaux d omestiques), sans i nstruction, qui ne p articipent pa s
aux dépenses de santé du ménage et qui ont généralement moins de 20 ans à leur naissance.
Nombre des chefs de ménage de ces enfants sont de religion musulmane, animiste ou même
sans religion.
Il ressort de la description des deux groupes ci-dessus que le second groupe présente le
profil des enfants malnutris.
En somme, ce chapitre a permis de décrire, dans une analyse bivariée, les niveaux et la
variation de l a m alnutrition de s e nfants de m oins de c inq a ns s uivant les v ariables
comportementales, contextuelles et certaines caractéristiques socioculturelles, économiques et
démographiques. Il ressort de cette analyse que chacun de ces grands groupes de facteurs est
significativement associé (au seuil de 5%) à l’état nutritionnel des enfants. L’analyse selon le
milieu de résidence, dans l a p lupart des cas, fait observer une tendance similaire à celle du
niveau na tional. O n r elève une di fférence de proportions d’ enfants m alnutris ne ttement
supérieure en m ilieu r ural par rapport au m ilieu ur bain. Le p rofil de s e nfants m alnutris,
dégagé par la suite, montre que ces derniers vivent en milieu rural dans des ménages pauvres
des régions de l’Extrême-Nord, du Nord, de l’Adamaoua et de l’Est.
Force est de constater que les niveaux de prévalence de la malnutrition sont nettement
plus élevés lorsqu’on c ompare l es m esures anthropométriques des enfants a ux courbes de
référence NCHS plutôt que les nouvelles courbes de référence de l 'OMS (2006). Ce constat
traduit l a di fférence de méthodologie d ans l ’élaboration de s de ux s tandards de r éférence et
confirme l ’hypothèse selon laquelle « le profil de croissance de nourrissons en bonne santé
allaités au sein diffère considérablement de la référence internationale NCHS » (OMS,
116
1999). Au titre des différences constatées entre standards, Turck21 (2007) souligne que « En
comparant les références françaises et les nouveaux standards de l’OMS, on relève surtout
des différences pour la longueur couchée à tous les âges (valeurs françaises plus basses) et
pour la corpulence entre 6 mois à 2 ans (valeurs françaises plus élevées) ».
Les regroupements f aits à ce n iveau n e s auraient t enir l ieu d e d éterminants dans l a
mesure où une association n’est pas synonyme de causalité. Ainsi, un examen en profondeur
des relations dégagées sera l’objet du prochain chapitre. Il s’agira plus précisément de vérifier
les hypothèses d’étude, d’identifier les déterminants de la malnutrition et de les hiérarchiser.
21 Dominique TURCK, Unité de Gastroentérologie, Hépatologie et Nutrition, Clinique de Pédiatrie,
Hôpital Jeanne de Flandre et Faculté de Médecine, Université de Lille 2.
117
CHAPITRE V : ESSAI D’EXPLICATION DE LA
MALNUTRITION DES ENFANTS
’objectif de c e c hapitre e st d’ identifier, da ns u ne ap proche m ultivariée, les
facteurs ex plicatifs d e la m alnutrition d es en fants d e m oins d e 5 a ns au
Cameroun ainsi que leurs mécanismes d’action. L’analyse multivariée est basée sur le modèle
de r égression lo gistique dont la ju stification du c hoix e t l es fondements t héoriques ont é té
brièvement exposés au chapitre 3 . L’analyse se fait au niveau national et selon le milieu de
résidence des enfants.
Le chapitre est articulé en trois sections. La première section permet de spécifier l es
modèles d’ analyse t out en vérifiant l’adéquation des m odèles. La d euxième section met en
exergue l es f acteurs i nfluençant l ’état n utritionnel d es en fants de m oins de 5 a ns a insi que
leurs mé canismes d ’action. Il es t également q uestion dans cet te deuxième section de
confronter les résultats issus des modèles d’analyse des données observées (MICS-2006) aux
hypothèses émises dans le chapitre 2. La troisième et dernière section est une vue d’ensemble
permettant de discuter les résultats obtenus.
5.1. Spécification des modèles
5.1.1. Descriptions des modèles d’analyse
Les d ifférents m odèles d ’analyse s ont p résentés d ans les t ableaux 5 .2.a (au n iveau
national), 5.2.b (pour le milieu urbain) et 5.2.c (pour le milieu rural).
Ces tableaux présentent les rapports de côtes du r isque d’être malnutri. Ils mettent en
exergue dans un premier temps les effets bruts de chaque variable indépendante avant qu’il ne
soit procédé à l’introduction successive des différentes variables explicatives selon le schéma
d’analyse de l’étude. Ensuite, ils présentent les effets nets de ces variables. On part du modèle
M0 (variable dépendante en rapport avec les variables de contrôle uniquement) au modèle M9
(au ni veau na tional) e t M8 ( pour l es m ilieux ur bain e t r ural) qui s ont le s modèles saturés
(finaux).
L
118
Nous a vons opt é pour de s m odèles pa s à pa s d ans l e but de mettre en ex ergue l es
mécanismes d’action des différentes variables explicatives, ceci conformément à la logique de
notre cad re d’analyse. Le m odèle f inal, qui c ontient t outes les v ariables de l ’étude, pe rmet
d’identifier les facteurs déterminants la malnutrition et de rendre compte du degré d’influence
de chacun. L’ordre d’introduction des variables est le suivant :
Au niveau national :
· Le modèle M1 : M0 + Région de résidence ;
· Le modèle M2 : M1 + Milieu de résidence ;
· Le modèle M3 : M2 + Religion ;
· Le modèle M4 : M3 + Niveau d’instruction ;
· Le modèle M5 : M4 + Niveau de vie ;
· Le modèle M6 : M5 + Age à l’accouchement ;
· Le modèle M7 : M6 + Sexe de l’enfant ;
· Le modèle M8 : M7 + Vaccination ;
· Le modèle M9 : M8 + Supplémentation + Qualité de l’eau de boisson
Pour les milieux urbain et rural
· Le modèle M1 : M0 + Région de résidence ;
· Le modèle M2 : M1 + Religion ;
· Le modèle M3 : M2 + Niveau d’instruction ;
· Le modèle M4 : M3 + Niveau de vie du ménage ;
· Le modèle M5 : M4 + Groupe d’âges de la mère à l’accouchement ;
· Le modèle M6 : M5 + Sexe de l’enfant ;
· Le modèle M7 : M6 + Vaccination ;
· Le modèle M8 : M7 + Supplémentation + Qualité de l’eau de boisson
119
Le niveau de vie du ménage est la seule variable socioéconomique qui sera introduite
dans l es m odèles d e r égression en r aison d e l a f orte as sociation en tre c ette d ernière et les
autres variables que sont le type de toilette et l’occupation de la mère (cf. annexe 5).
Tout c omme l e ni veau de vi e du m énage, le niveau d’instruction de la mère est
fortement associé à la participation de la mère aux dépenses de santé du ménage (cf. annexe
5). C’est pourquoi, cette dernière variable ne sera pas introduite dans les modèles parmi les
variables intermédiaires.
5.1.2. Tests d’adéquation des modèles
Pour Taffé (2004), on considérera que l’ajustement est satisfaisant si :
i) La d istance en tre l ’« outcome » observé y e t l ’« outcome » prédit par le modèle ŷ est
petite ;
ii) Le modèle es t b ien « cal ibré », c 'est-à-dire que les f réquences pr édites s ont pr oches de
celles observées ;
ii) Le modèle permet de bien discriminer entre les valeurs de y = 0 et y = 1 en fonction des
variables ex plicatives x 1, x 2, …, x p, c 'est-à-dire qu’ on obt ient de bonn es s ensibilités e t
spécificités.
Dans cette section, il est question de réaliser des tests statistiques d’adéquation (qualité
d’ajustement) des modèles de régression l ogistique a ux donné es à l ’aide de l a p rocédure
« lroc » du logiciel STATA. Ceci permettra de déterminer si ces modèles sont adéquats pour
tester la structure causale de l’étude.
La démarche de construction consiste à :
- fixer d’abord un seuil de probabilité (généralement 0,5) au-delà duquel, on considère
que la réponse est positive ;
- ensuite, à c omparer la s ensibilité ( « s ensitivity »), c ’est-à-dire l a pr oportion de
réponses positives obs ervées qui s ont c orrectement c lassées pa r l e m odèle ( « observed
positive ») et la spécificité (« specificity »), c’est-à-dire la proportion de réponses négatives
observées qui sont correctement classées par le modèle (« observed negative »).
Dans une vi sualisation gr aphique, on m et e n r apport l e c omplément à 1 de l a
spécificité en ab scisse et l a s ensibilité en or donnée (graphique 5. 1). I l e st imp ortant d e
120
signaler que le pouvoi r pr édictif réel correspond à l a s urface s éparant la co urbe R OC («
Received Operating Characteristic ») et la diagonale principale.
La surface sous cette courbe ROC nous permet d’évaluer la précision du modèle pour
discriminer les « outcomes » positifs y = 1 des « outcomes » négatifs y = 0.
On retiendra comme règle, la règle du pouce :
Si aire ROC = 0,5, il n’y a pas de discrimination ;
Si aire 0,7 ≤ ROC < 0,8, la discrimination est acceptable et l’ajustement est adéquat ;
Si aire ROC ≥ 0,8, la discrimination est excellente et l’ajustement est excellent.
Pour illustrer ceci, le graphique ci-après représente la courbe ROC obtenue du modèle
saturé M9 (au niveau national).
Graphique 5.1 : Évaluation du pouvoir discriminant du modèle saturé M9 (au niveau national)
0.00
0.25
0.50
0.75
1.00
Sens
itivi
ty
0.00 0.25 0.50 0.75 1.001 - Specificity
Area under ROC curve = 0.7315
Source : Exploitation des données de la MICS-2006, Cameroun
Le t ableau suivant donne les pouvoi rs di scriminants de s di fférents modèles de
régression logistique au niveau national et par milieu de résidence.
121
Tableau 5.1 : Pouvoir discriminant des modèles de régression logistique
Nous ét ablissons d ans cet te s ection u ne h iérarchie d es f acteurs ex plicatifs d e l a
malnutrition de s e nfants de m oins de c inq a ns, identifiés p récédemment, selon l eur
contribution à l ’explication. Dans u n c ontexte d e limita tion budgétaire, l a h iérarchie
contributive d es f acteurs es t indispensable dans l a m esure o ù el le permet d e d éfinir d es
échelles de priorités pour l’action et la recherche (Beninguisse, 2003).
Le t ableau 5 .3 ci-après p résente l a co ntribution à l ’explication d es v ariables
déterminantes à l a v ariation d e l’ état n utritionnel d es e nfants. E lle e st calculée s uivant la
formule décrite au chapitre 3.
Tableau 5.3 : Contribution des variables à l’explication de l’insuffisance pondérale des enfants de
moins de 5 ans
Niveau d'analyse
Variables explicatives
Khi-deux du modèle saturé
Khi-deux du modèle sans la variable
Contribution (en %)
Rang
Nat
iona
l
Région de résidence 527,885 443,936 15,90 1 Niveau de vie 527,885 506,127 4,12 2 Niveau d'instruction 527,885 507,388 3,88 3 Sexe de l'enfant 527,885 510,695 3,26 4 Religion 527,885 516,960 2,07 5
Urb
ain Région de résidence 159,769 133,713 16,31 1
Niveau de vie 159,769 138,659 13,21 2 Religion 159,769 149,484 6,44 3
Rur
al
Région de résidence 272,925 212,052 22,30 1 Sexe de l'enfant 272,925 252,563 7,46 2 Niveau d'instruction 272,925 259,009 5,10 3 Religion 272,925 261,226 4,29 4 Niveau de vie 272,925 265,881 2,58 5
Source : Exploitation des données de la MICS-2006, Cameroun
Il e n ressort q ue l e co ntexte d e r ésidence es t u n i mportant f acteur ex plicatif d e l a
malnutrition de s e nfants. E n e ffet, on not e un e p rédominance de l a région d e r ésidence d e
l’enfant co mme p rincipale v ariable ex plicative d e l ’insuffisance p ondérale p our l es t rois
niveaux d’analyse. Elle possède le plus grand pouvoir explicatif en milieu rural.
135
A c ôté de l a r égion de r ésidence, l e ni veau de vi e de s m énages vi ent e n s econde
position au niveau national et en milieu urbain. En milieu rural, c’est le sexe de l’enfant qui
revêt la deuxième plus grande contribution parmi les facteurs explicatifs.
5.3. Explication et discussion des résultats
Cette étude converge ve rs plusieurs autres menées dans d ifférents pays. Il en ressort
que t ous l es f acteurs co nsidérés ( le co ntexte d e r ésidence, l es f acteurs s ocioculturels,
socioéconomiques et les facteurs intermédiaires) ont une influence certaine sur la malnutrition
des enfants de moins de cinq ans au niveau national et en milieu rural. En milieu urbain, les
facteurs intermédiaires n’ont pas une influence significative sur la malnutrition des enfants.
Le contexte de résidence
Des variables influençant l’état nutritionnel des enfants, la région de résidence revêt la
plus grande importance au Cameroun. Que ce soit au niveau national, en milieu urbain ou en
milieu rural ; la région de résidence a gardé un effet significatif. Rappelons ici que les régions
septentrionales du Nord et de l’Extrême-Nord s’identifient comme des zones à haut risque de
malnutrition pour les enfants (aux trois niveaux d’analyse). Dackam et al (1993) attribuent ces
disparités constatées dans la répartition spatiale de la malnutrition dans une large mesure à la
grande diversité géographique du Cameroun. En effet, nous avons montré au premier chapitre
que le Cameroun pouvait être divisé en plusieurs zones bioclimatiques ou agro-écologiques,
même si les limites de telles régions « naturelles » ne coïncident pas toujours avec celles des
unités a dministratives. Les p laines du N ord et de l’Extrême-Nord sont caractérisées p ar
l’aridité du climat, s’accentuant à m esure qu’on se rapproche du lac Tchad. C’est dans cette
partie que l ’on retrouve l es M onts M andara, d ’accès d ifficile, m arqués p ar u n climat
relativement sec. Les éléments f ondamentaux du m ilieu é cologique qui i nterfèrent i ci pou r
influencer l a s anté d es e nfants ou pl us précisément l eur é tat nut ritionnel sont : le c limat, la
végétation e t l es s ols. En fait, c es éléments agissent : soit d irectement e n c onditionnant e n
particulier la régulation thermique et on sait que celle-ci est plus difficile pour les enfants en
bas âge ; soit indirectement, d’une part en favorisant la prolifération des agents infectieux ou
leurs ve cteurs, d’ autre p art en d éterminant l e type, l a q ualité et l a q uantité d e r essources
136
alimentaires et d ’eau (plus d isponible à cer taines p ériodes d e l ’année qu’à d ’autres et d e
quantité variable). De l’enquête menée au Cameroun par le SNAR en octobre 2000, il ressort
que l ’insécurité a limentaire e st particulièrement él evée d ans l es régions du N ord e t de
l’Extrême-Nord. La situation agricole des deux régions était si préoccupante que la campagne
en cours devait enregistrer un déficit céréalier de plus de 250 000 tonnes.
A cô té d es s pécificités des di vers m ilieux é cologiques, pl usieurs autres facteurs s e
conjuguent pour expliquer également les disparités régionales du r isque d’être malnutri pour
un e nfant. Par ex emple, l a p art d es d épenses co nsacrée à l a santé s elon l ’ECAM-II (2 001)
était estimée au niveau national à 7 ,6% (8,5% en milieu urbain contre 6,5% en milieu rural)
des dépenses t otales des m énages. D’après l a m ême source, cette part n ’est pas uniforme à
travers les régions : les régions de l’Extrême-Nord, de l’Est et du N ord dépensent beaucoup
moins pour ce service social essentiel par rapport à leur budget (respectivement 3,2%, 5,2% et
5,4%). A l’opposé, les ménages des régions du Littoral, du Centre et du Nord-Ouest sont ceux
qui y consacrent 9% ou plus de leur budget.
Une autre raison pourrait être : la t rès faible couverture en infrastructure sanitaire de
certaines régions, limitant ainsi l’accessibilité aux soins pour les plus jeunes en particulier. En
effet, les informations données par la carte sanitaire de 1999 au Cameroun et reprises dans la
SSS de 2001, font état du fait que les régions du Nord et de l’Extrême-Nord ont chacune une
structure s anitaire pour plus de 72000 ha bitants. La région du S ud-Ouest quant à el le a un
ratio de 44058 ha bitants pour un e s tructure s anitaire nettement supérieur à l a m oyenne
nationale qui est de 42623 habitants pour une structure sanitaire.
Au niveau na tional, l es résultats ont montré que l e contexte de résidence influençait
également la malnutrition des enfants via l es facteurs économiques. En effet, en p renant en
compte l’effet du niveau de vie des ménages où vivent les enfants, l’influence du milieu de
résidence d es enfants s ’est e stompée. Ces résultats s ont c orroborés par l e R apport s ur l a
Pauvreté Rurale au Cameroun (MINPLAPDAT/PNUD, 2006) qui indiquait déjà que le niveau
de vie influence l’effort budgétaire des ménages en faveur de la santé et que cette différence
est nette entre les non-pauvres ruraux et urbains.
137
Les variables socioculturelles
La r eligion du c hef d u ménage où vi t l’enfant s’est distinguée comme un f acteur
explicatif de s on état n utritionnel pour l es t rois ni veaux d’ analyse. Les d ifférences d ’état
nutritionnel selon l a r égion s eraient l e r eflet des écar ts en tre l es m odèles cu lturels «
traditionnels » et les modèles culturels « modernes ». Les chrétiens catholiques ou protestants
ont pu modifier leur vison du monde sur le type d’aliments et de soins à donner aux enfants,
contrairement aux autres religions et les animistes. Les résultats obtenus en milieu urbain font
par contre état d’une différence significative entre les chrétiens catholiques ou protestants et
les musulmans uniquement. Cette différence n ’existe pas pour l es modèles rural et national
lorsqu’on contrôle les autres facteurs explicatifs. L’urbanisation ne semble donc pas avoir une
influence considérable s ur l es c ommunautés m usulmanes. P our E vina ( 2005), de s r eligions
comme l ’islam a u C ameroun s ont restées : « longtemps at tachées au x m odèles cu lturels
traditionnels ».
Selon l’étude réalisée en milieu urbain camerounais par Odia Ndongo et al. (2006), il
apparaît que l es c ommunautés c atholiques et p rotestantes sont cel les qui p otentiellement
possèdent l e ni veau de c apital s ocial22 religieux le p lus b as tandis que les communautés
pentecôtistes et m usulmanes possèderaient l e n iveau p otentiel d e cap ital s ocial religieux le
plus élevé. La même source révèle que le niveau de confiance des enquêtés est plus grand vis-
à-vis des membres de leur communauté religieuse que vis-à-vis des gens en général, ce qui
indique un capital social religieux plus important que le capital social dans l’ensemble de la
société s elon l a m esure d e M ontalieu et Baudassé ( 2006). S euls l es catholiques et l es
protestants enquêtés dé clarent dans une p roportion plus grande f aire confiance aux gens en
général qu’ aux m embres de l eurs c ommunautés. Ceci e xpliquerait pour quoi m algré
l’urbanisation, certaines communautés auront moins de chance d’écouter, voire de mettre en
pratique les règles d’hygiène et autres conseils favorables à la santé des enfants prodigués par
les médecins, infirmiers ou les nutritionnistes notamment.
22 L’idée centrale du concept de capital social est que les réseaux et les normes de comportement qui y sont
attachées ont une certaine valeur. Cette valeur est double, puisque le capital social est une richesse à la fois
pour les membres du réseau et pour l’ensemble de la société.
138
Par ailleurs, la relation inverse entre l’instruction de la mère et l’état nutritionnel des
enfants au n iveau n ational e t e n milie u r ural dénote, au f ur et à m esure q ue l a m ère es t
instruite, d’une plus grande c apacité de cette de rnière à apprécier au moment oppor tun, les
différents be soins e t s oins n écessaires à l a s anté d e l ’enfant. Les m ères éduquées r ompent
généralement avec la tradition et les interdits alimentaires. Elles deviennent moins fatalistes à
l’égard d e l a m aladie et el les ad optent en m atière d’alimentation, de s oins à l ’enfant et d e
traitement d es ma ladies, un bon nom bre de s olutions qui de viennent pos sibles dans une
société en évolution. Tout ceci ayant des répercussions sur l’état de nutritionnel de l’enfant.
Pour D ackam et V an der P ol (1988) : « l’une des plus grandes influences de
l’éducation institutionnalisée est l’enseignement des connaissances médicales modernes ; là
où un tel enseignement est donné, à la mère en particulier, il peut changer du tout au tout les
soins qu’elle choisira de donner à son enfant et modifier significativement la survie de
l’enfant, souvent sans exiger des ressources économiques supplémentaires ». Que ce soit dans
le mode de vie ou dans la participation au niveau de la prise de décision, l’éducation sanitaire
est la composante de l’éducation globale qui est prise en compte par les auteurs. Ainsi, dans
plusieurs c adres conceptuels ( Akoto, 1985 ; P alloni, 1985 ; Garenne et V imard, 198 4)
l’instruction de l a f emme e st é galement un i ndicateur du ni veau de c ompréhension de s
services de santé et d’hygiène ainsi que de la capacité d’utiliser les services de santé existants.
En m ilieu ur bain, m ême s i on pe ut r emarquer u ne d ifférence s ignificative en tre l es
enfants des mères de niveau d’instruction primaire et ceux des mères de niveau secondaire ou
plus, la variable niveau d’instruction influence l’état nutritionnel des enfants via le niveau de
vie des ménages. Cet état de choses traduit le coût élevé de la vie en milieu urbain, limitant
ainsi l’accès aux aliments et soins de santé de qualité pour les ménages pauvres tant il est vrai
que l’instruction confère en milieu urbain, plus qu’en milieu rural, un certain confort de vie.
Les variables socioéconomiques
Le niveau de vie du ménage est l’indicateur composite qui a été choisi pour mesurer
l’impact de s f acteurs s ocioéconomiques s ur l a malnutrition de s e nfants. Son i nfluence s ur
l’état nutritionnel des enfants peut être située à p lusieurs niveaux. Les parents défavorisés ne
peuvent offrir une nourriture adéquate à leurs enfants, essentiellement parce qu’ils n’ont pas
assez d’argent pour acheter des aliments nutritifs. Les revenus très bas ont une conséquence
particulièrement d évastatrice : un a pport é nergétique dé ficient ou l a f aim, m alaise
physiologique provoqué par un manque de nourriture. Par ailleurs, les horaires de travail des
139
parents a insi qu e l e m anque de t emps pour acheter e t p réparer de s r epas nour rissants
constituent d’autres obstacles à une bonne alimentation.
Un certain nombre d’études sur les ménages dans les pays en voie de développement
ont démontré l’existence d’une relation inverse entre le revenu et la malnutrition des enfants.
Le pa trimoine e n bi ens dur ables a une i ncidence pos itive s ur l’état n utritionnel d e l’ enfant
dans 17 s ur 20 pa ys d ’Afrique S ubsaharienne (Morrisson e t Linskens, 2000) ; de pl us, cet
effet e st l e pl us s ouvent t rès s ignificatif. L’effet a pparaît pl us e n z one urbaine qu’ en z one
rurale, p arce qu ’il di scrimine mieux l es ménages en vi lle, où b eaucoup p ossèdent plusieurs
biens dur ables t andis qu’ en z one r urale b eaucoup de m énages pe uvent n’ avoir qu’ un s eul
bien, voire aucun, en raison d’une plus grande pauvreté.
Le type de toilettes utilisées par un ménage reflète également sa situation économique.
Les ménages pauvres ayant une probabilité moindre de disposer de toilettes adéquates et par
conséquent, les installations sanitaires inadéquates dont ils disposent augmentent le risque de
diarrhée et contribuent à la malnutrition des enfants.
Sexe de l’enfant
L’un des résultats importants ici est la malnutrition différentielle des enfants selon leur
sexe au niveau national et particulièrement en milieu rural. Contrairement au net retard (non
significatif au seuil de 5%) de -2 points qu’avaient les garçons par rapport aux filles en 2004
(EDSC-2004), l es garçons sont p lus t ouchés cette fois. On as siste l à à un retournement de
situation puisque ce constat était déjà fait en 1998 (EDSC-1998) mais plutôt chez les enfants
de moins de trois ans. Des études réalisées dans plusieurs pays mettaient déjà en exergue un
niveau de malnutrition plus élevé chez les garçons par rapport aux filles (EDS Niger, 1998 ;
Nstame, 2001 ; Bougma, 2007). De leur côté, Garenne et al (2000) constatent dans une zone
rurale au Sénégal que les filles sont légèrement avantagées sur le plan nutritionnel si l’on se
fie a ux m esures a nthropométriques. De m ême, à p artir d es d onnées de l ’EMIS-Bobo-
Dioulasso, G ueye ( 1987) m ontre que l a d étérioration d e l a cr oissance pondérale es t p lus
précoce et plus sévère pour les garçons que pour les filles.
L’attention accordée aux filles trouverait son essence dans les spécificités des sociétés
rurales. Les filles y sont beaucoup moins scolarisées qu’en ville et aident leur mère dans les
tâches domestiques dès leur plus jeune âge. Au-delà des raisons physiologiques évoquées par
Ntsame ( 2001), l es j eunes garçons échapperaient a u c ontrôle parental du f ait de l eur pl us
140
grande mobilité comparés aux filles. Autrement dit, ils souffriraient d’une négligence sociale
en milieu rural. A ce titre, Desgrées (1996) souligne que les filles sortent moins de la maison
que l es g arçons d ans l es s ociétés af ricaines ; elles attraperaient à la m aison d es m aladies
comme la rougeole que leurs frères contractent en dehors de la maison.
Pour conclure, nous disons que cette dernière partie a permis de mettre en évidence les
facteurs explicatifs de la malnutrition chez les enfants de moins de cinq ans au Cameroun qui
sont : la région de résidence, la religion, le niveau d’instruction, le niveau de vie des ménages
et le sexe de l’enfant au niveau national et pour le milieu rural. En zone urbaine, trois de ces
cinq f acteurs s ont dé terminants : la r égion d e r ésidence, l a r eligion et l e n iveau d e v ie d es
ménages. Parmi ces facteurs, la région de résidence revêt une plus grande importance dans la
l’explication de l’état nutritionnel des enfants pour les trois niveaux d’analyse.
Par ailleurs, l’analyse tenant compte du milieu de résidence a révélé une malnutrition
différentielle des enfants selon leur le sexe en milieu rural ; ce facteur possédant le deuxième
plus g rand pouv oir e xplicatif. Les f acteurs i ntermédiaires, à l ’exception d u s exe en m ilieu
rural, se sont révélés non discriminants de l’état nutritionnel, toutes choses égales par ailleurs.
L’examen d es m écanismes d ’action a m ontré q ue le milieu d e r ésidence influençait
l’état nutritionnel des enfants via le niveau de vie des ménages, laquelle variable médiatisait
l’effet du ni veau d’instruction de s m ères e n m ilieu ur bain. Les m odèles p artiels e t g lobaux
utilisés ont été l’objet de tests d’adéquation qu’on qualifierait de satisfaisants.
141
CONCLUSION GÉNÉRALE
es qu estions de santé en général et de nutrition en particulier sont de nos jours
indissociables des ch oix g lobaux f aits d ans l e cad re d es p rogrammes d e
développement i nitiés et m is en p lace p ar l es o rganismes i nternationaux et les pouvo irs
publics en Afrique au Sud du Sahara. Ces questions sont surtout basées sur l’amélioration de
la q ualité d e v ie d es populations. O r une popul ation bien por tante à l ’âge ad ulte p asse
nécessairement p ar u ne meilleure al imentation d ans l ’enfance. C ependant, l a p lupart d es
études antérieures ont mis en exergue l’impact négatif d’un certain nombre de facteurs qui se
conjuguent pour agir s ur l’état n utritionnel. D’après l es r ésultats de l ’EDSC-2004, près de
19% des e nfants de m oins de c inq a ns ont un p oids t rop f aible pour l eur â ge (insuffisance
pondérale). Ceci correspond à 9,5 fois le niveau attendu dans une population en bonne santé et
bien nour rie. Cette pr oportion e st r estée qu asiment i nchangée pui squ’en 2 006, l ’enquête
MICS trouvait le même taux de prévalence de la malnutrition. Face à l’ampleur du problème,
on a co nstaté u ne f orte mo bilisation d e l’ Etat, ma is le s a ctions c onduites ju squ’ici s ont
essentiellement o rientées v ers l ’aspect cu ratif av ec d e f ortes disparités da ns l a c ouverture
géographique. Les actions de prévention et de responsabilisation des communautés sont très
timidement ex écutées d ans u n co ntexte m arqué par l a p auvreté, des problèmes de f aible
couverture s anitaire, d ’hygiène et d ’assainissement et de faible t aux d’alphabétisation en
milieu rural.
Au r egard d e ce q ui précède, l ’objectif d e cette ét ude était d e r echercher l es
déterminants de la ma lnutrition des e nfants de m oins d e cinq ans au C ameroun.
Spécifiquement, elle visait à :
- Évaluer le niveau et les variations différentielles de la malnutrition chez les enfants de
moins de cinq ans ;
- Dégager le profil des enfants malnutris ;
- Identifier e t hiérarchiser l es f acteurs s usceptibles d ’expliquer l es n iveaux et l es
variations de la malnutrition, ainsi que les mécanismes d’action ;
- Formuler de s r ecommandations pe rmettant d’ améliorer l’état nut ritionnel de s pl us
jeunes.
L
142
La réalisation de ces objectifs allait de pair avec cinq hypothèses dont la vérification
s’est faite à l’aide des données de la MICS-2006. L’évaluation de ces données montre qu’elles
sont d’une qualité acceptable pour l’étude.
Les paramètres an thropométriques des enfants ont é té comparés aux normes établies
par les nouvelles courbes de croissance publiées par l’OMS en 2006. Les résultats obtenus au
niveau des variations différentielles de la malnutrition ont montré une tendance similaire pour
les d eux standards a u n iveau na tional m ême s i on not e de s s cores ne ttement pl us f aibles
lorsqu’on ut ilise l e s tandard OMS/MGRS. Les écarts négatifs sont suffisamment importants
pour am ener l es agents d e s anté à p rendre d es d écisions inopportunes c oncernant d es
nourrissons nourris au sein dont la croissance leur paraît insuffisante et, de ce fait, à conseiller
inutilement a ux m ères de f ournir une a limentation c omplémentaire ou m ême de s upprimer
totalement l’allaitement au sein. Compte tenu des avantages sanitaires et nutritionnels de ce
type d ’allaitement, c ette in terprétation p otentiellement e rronée d u p rofil d e c roissance d e
nourrissons e n bonne s anté a llaités a u s ein a u ne gr ande i mportance e n m atière de s anté
publique. L’introduction pr ématurée d’ aliments de c omplément p eut êt re ex trêmement
dangereuse pour l es nou rrissons da ns de nom breux c ontextes, not amment l à où l e r ôle de
l’allaitement au sein dans la prévention de maladies infectieuses graves est essentiel pour la
survie de l’enfant (OMS, 1999).
Les résultats de l’analyse descriptive étaient en conformité, pour la plupart, avec ceux
attendus a u r egard de la revue d e littérature p réalablement ef fectuée. A insi, l ’Analyse
Factorielle en Composantes Multiples révèle que la plupart des enfants malnutris sont nés de
jeunes mères sans instruction, ne participant pas aux dépenses de santé dans le ménage et sur
lesquelles repose toute la responsabilité en matière d’éducation et d’alimentation des enfants
qui sont souvent partiellement vaccinés lorsqu’ils ne sont t out s implement pas vaccinés. I ls
vivent en milieu rural dans les ménages pauvres des régions du Nord, de l’Extrême-Nord, de
l’Adamaoua e t de l ’Est. Ces en fants consomment une e au non pot able e t sont i ssus de s
ménages où le chef est de religion musulmane, animiste ou même sans religion.
Les résultats de la régression logistique ont mis en évidence l’effet net de la région de
résidence s ur l’état nut ritionnel de s e nfants. La prévalence d e l a malnutrition est en core
élevée dans les régions septentrionales du Nord, de l’Extrême-Nord et en milieu rural au Sud-
Ouest. Malgré une amélioration constatée, comparativement à 1998 (standard NCHS), l e
niveau de l a p révalence de malnutris tr aduit e ncore un ni veau supérieur au niveau d ’alerte
143
reconnu internationalement (10%) compte tenu du caractère systémique et multidimensionnel
de la situation du problème et de ses implications socioéconomiques et culturelles. La qualité
des a liments c onsommés c onstitue un problème cr ucial, l ’alimentation es t p eu v ariée et
essentiellement composée de céréales pour les régions les plus touchées. La prise en compte
du s exe d ans l ’analyse a p ermis d e m ettre en ex ergue l a d ifférence significative d ’état
nutritionnel en faveur de filles en milieu rural notamment.
L’accessibilité éco nomique d es p roduits al imentaires d emeure ég alement
préoccupante. Elle est liée à des coûts de production élevés vis-à-vis d’une population dont le
pouvoir d’achat s’érode de plus en plus au fil du temps. Dans le milieu rural en particulier, il
est admis que la pauvreté a une influence directe sur l ’insécurité al imentaire et par r icochet
l’état nutritionnel des plus jeunes.
Le bilan de la vérification empirique des hypothèses de travail est globalement positif.
Pour c hacune d es cinq hypothèses s oumises à l’ empirie aux tr ois niveaux d ’analyse, l a
relation postulée pouvait être :
- confirmée, c’est-à-dire vraie ;
- infirmée, c’est-à-dire fausse ;
Toutes les hypothèses formulées, à l’exception de la dernière (H5), ont été confirmées pour le
milieu r ural e t au ni veau na tional. E n m ilieu ur bain, les h ypothèses H 2, H 4 e t H5 ont é té
infirmées.
En clair, les f acteurs explicatifs de l a malnutrition des enfants de moins de cinq ans
sont dans l’ordre :
Au niveau national : la région de résidence, le niveau de vie, le niveau d’instruction, le sexe
de l’enfant, la religion.
En milieu urbain : la région de résidence, le niveau de vie et la religion ;
En milieu rural : la région de résidence, le sexe de l’enfant, le niveau d’instruction, la religion
et le niveau de vie.
En dépit des résultats évoqués précédemment, l’étude présente quelques limites qu’il
convient de souligner :
144
L’effet de s élection de s e nfants dé cédés qu e n ous a vons m is e n é vidence d ans l e
troisième chapitre pourrait conduire à une sous-estimation de la malnutrition dans la
mesure o ù la p lupart d ’entre e ux q ui é taient atteints d e ma lnutrition sévère seraient
décédés avant la date de l’enquête ;
Une de s i nsuffisances m ajeures de s i nformations i ssues de l a M ICS-2006 du
Cameroun est l e f ait q ue d es v ariables i ntermédiaires co mme l e t ype et la d urée d e
l’allaitement, le rang de naissance de l’enfant n’aient pas été saisies pour les enfants de
moins de cinq ans ;
Le m anque d’ informations sur l a va leur nut ritionnelle des d ifférents repas p ropres à
chaque communauté limite quelque peu l’explication ;
L’utilisation de l’indice poids-pour-âge reste l imitée car i l ne permet pas toujours de
distinguer les déficiences alimentaires de longue durée (retard de croissance) de celles
récentes (émaciation).
Les modèles utilisés ignorent la dépendance intra-groupe (les enfants de moins de cinq
ans ayant une même mère par exemple), et par conséquent pourraient conduire à des
variances es timées d es ef fets i ndividuels biaisées, donna nt d es i ntervalles d e
confiances trop étroits.
RECOMMANDATIONS
Le niveau de prévalence de la malnutrition est encore une préoccupation qui nécessite
une m obilisation co ntinue et à grande échelle de l ’Etat et d e s es partenaires qui doi vent
conséquemment adopter de nouvelles stratégies pour gérer au mieux la situation nutritionnelle
des en fants. Dans l e c adre d e l ’amélioration d e l ’état nut ritionnel d es pl us j eunes au
Cameroun, nous formulons les recommandations suivantes :
Au niveau politique et programmatique :
• Toute in tervention v isant à a méliorer l’ état n utritionnel des en fants doit c ibler en
priorité les régions du Nord, de l’Extrême-Nord et le milieu rural au Sud-Ouest. A cet effet, il
serait i mportant, à court terme, de créer d es c entres n utritionnels thérapeutiques dans l es
districts de santé situés en zone rurale de la région du Sud-Ouest, ceci en plus des 19 centres
opérationnels existant dans les hôpitaux de district des régions de l’Extrême-Nord, du Nord,
145
de l’Adamaoua et de l’Est. A moyen terme, il faudrait équiper chaque structure sanitaire sur
toute l’étendue du territoire d’un centre nutritionnel thérapeutique.
• Intégrer au x activités d e la S emaine d 'Actions d e S anté e t d e N utrition Infantile e t
Maternelle (SASNIM), la d istribution des pâtes nutritives « plumpy'nut »23 aux mères dont
les e nfants ont un poids très f aible p ar r apport à l eur âge ou pr ésentent de s s ignes
d’émaciation.
• Impliquer l es i ndustries agro-alimentaires sur p lace. Il f aut que ces a cteurs fortifient
les aliments qu’ils mettent en vente, qu’ils y ajoutent de la vitamine A par exemple.
• Améliorer la c ouverture g éographique de s actions de l utte co ntre l a p auvreté et
renforcer les activités en milieu rural.
• Accroitre l’accessibilité à l’assainissement en milieu rural notamment.
• Intégrer l’éducation nutritionnelle dans l’enseignement primaire formel et élaborer une
politique vi sant à g arantir a u m oins un ni veau s colaire s econdaire a ux jeunes f illes
permettraient d’améliorer l’état nutritionnel des enfants à long terme.
• Dans la mise en œuvre d’activités IEC pour améliorer les comportements des ménages
et en matière de nutrition et d’hygiène et assainissement, mettre l’accent sur les communautés
musulmanes en milieu urbain, les nouvelles religions chrétiennes e t le s animistes en mi lieu
rural.
• Mettre en p lace un pr ogramme de s ensibilisation de l a popu lation a u problème de
santé en rapport av ec l es en fants d e s exe masculin. Les act ions i nitiées à cet ef fet d oivent
s’étendre au milieu rural tout en incluant les lieux de culte et les établissements scolaires sans
oublier les centres de santé.
• Informer et éduquer les populations en milieu rural sur la prise en charge à domicile de
la diarrhée.
• Incorporer les nouveaux diagrammes de l'OMS dans les carnets de santé existants (cf.
annexe 6).
23 Nouveaux produits thérapeutiques dont l’apparition a révolutionné le traitement de la malnutrition.
146
Au niveau scientifique
Promouvoir de s r echerches biodémographiques ba sées su r la croissance d es enfants
visant à mettre en place un standard africain de mesure de l’état nutritionnel des enfants. Cette
référence permettra de tenir compte des spécificités purement africaines dans la construction
des indicateurs anthropométriques pour les études futures sur la malnutrition des enfants.
L’étude n ’a pas pu cerner un certain nombre de facteurs identifiés dans la l ittérature
comme déterminants de la malnutrition des enfants de moins de cinq ans. Cette limite est liée
au f ait que l’enquête MICS de t roisième génération ne l es a p as s aisis. I l s erait intéressant,
pour les études futures, de recueillir des informations sur la durée de l’allaitement, l’intervalle
intergénésique, l’utilisation des centres de santé (les visites prénatales de la mère pour toutes
les naissances de moins de cinq ans), le rang de naissance de l’enfant et la religion de la mère.
Perspective de recherche
Dans une a pproche m ultiniveau, i l serait i ntéressant de m ener une é tude s ur l a
malnutrition différentielle des enfants selon leur sexe au Cameroun.
147
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