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Chrystelle MARÉCHAL. Etudes ďétymologie graphique chinoise,à la lumière de données comparatives. Thèse de doctorat (nouveaurégime). Paris : Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales.1997. 328 p.
Approche et objectif de cette étude
La présente thèse exploite la particularité pictographique del'écriture chinoise pour remettre en cause certaines etymologiestraditionnelles, notamment celles des caractères dits idéo-phonogrammes représentant les mots "tête" et "temps", en étayant
l'interprétation des documents paléographiques par des donnéesparallèles venant des langues indo-européennes. Elle pose en effetl'hypothèse que, si l'origine ultime des mots est a priori hors de
portée des recherches linguistiques, certaines formes graphiques duchinois ancien, véritables "fossiles sémantiques", préservent lasignification des mots au moment de la création de leurreprésentation écrite et sont, de ce fait, susceptibles d'éclairer despoints obscurs de l'histoire des caractères, voire même de la languechinoise.
Un caractère chinois ne peut se concevoir sans uneprononciation, un sens (ou une fonction grammaticale) et une formegraphique. A la différence de la phonologie et de la sémantique, legraphisme chinois est le seul à avoir conservé des traces concrèteset matérielles d'un passé lointain. Aussi l'approche dite del'étymologie graphique, adoptée dans cette étude, est-elle destinée
Les formes plus tardives sont exclues de ce corpus, caraprès l'instauration du xiaozhuan qui marque la dernière grandeétape de la création des caractères, l'écriture chinoise n'a plus connuque des changements morphologiques de l'ordre de lasimplification. Ces formes simplifiées entraînant la plupart du
temps une suppression des traces anciennes ne peuvent donc, pardéfinition, contribuer à éclaircir l'origine graphique des caractères.
Particularité du système idéo-phonographique chinois
La présente étude apporte une contribution inédite à l'étudedu processus de l'idéo-phonographie, vers laquelle les Chinois sesont tournés dès l'époque des Shang pour faire face à l'évolution dela société nécessitant, dans un espace de temps relativement court,de nombreux néologismes graphiques. Si ce mécanisme associe unélément dit bushou д$"Ц\ indiquant la catégorie sémantique du motà représenter graphiquement, et un élément dit phonique dont lerôle est de suggérer sa prononciation approximative, on sait que,dans certains cas, le choix d'un composant exploité comme
indicateur phonique se révèle également sémantiquement motivé etque, de cette particularité, Wang Shengmei au Xle siècle a tiré unethéorie généralisable que ses excès ont discréditée aux yeux de lapostérité. Avançant avec prudence, mais détermination sur ceterrain glissant, Ch. Maréchal dévoile, au terme d'unedémonstration détaillée et, espérons-le, convaincante, le caractèresémantiquement motivé du composant phonique d'un petit nombred'idéo-phonogrammes et éclaire ainsi d'un jour nouveaul'étymologie de caractères qu'on croyait bien connus.
Contenu de la thèse
Ce travail comprend trois parties constituées de septchapitres à travers lesquels se dessinent en filigrane différentsaspects du graphisme chinois. Dans la première partie, il est à
européennes est également illustrée dans cette première partie parl'étude parallèle des paires chinoise quan Ц "source/fontaine" -
yuan Щ "abîme" et latinefons "source/fontaine" -fondus "fond". A
cette occasion, il est démontré que l'exploitation de la démarche del'interprétation visuelle, initiée par Yau Shun-chiu [You Shunzhao](1992), permet d'obtenir de singuliers résultats comme l'atteste, parexemple, l'explication plus harmonieuse de l'évolution sémantiquedu caractère yuan jj|[ "plaine" ou encore l'interprétation graphiquedu caractère di ЛЦ "fond".
Cette première partie traite par ailleurs de quelquescaractères chinois autour de la notion d'origine qui permettent denous rendre compte de la manière dont une notion abstraite
s'incarne à travers plusieurs images concrètes chez les anciensChinois. Ainsi les graphies chu f# et shi $p illustrent, par exemple,que les Chinois ont exploité deux aspects différents liés auphénomène naturel de la venue au monde d'un enfant pourreprésenter graphiquement les mots "début" et "commencement".
La deuxième partie de cette thèse est entièrement consacréeà l'étude de caractères aux etymologies très controversées afin de
faire prendre conscience, d'une part, des limites de l'approche del'étymologie graphique et, d'autre part, de la manière dont il estpossible de parer à certains de ses inconvénients. A cet effet,quelques controverses étymologiques, au demeurant insolubles,font tout d'abord l'objet d'une réflexion ; les graphies concernées,telles que shen Щ "pouvoir céleste", quan |Ц "pouvoir", di ~Щ"souverain du ciel", wang 3E "r°i" ou encore zu f|[ "ancêtremasculin", sont regroupées sous la rubrique "détenteurs du pouvoircéleste et terrestre". Cette deuxième partie s'achève sur l'étude des
deux graphies fang ~)^ "région ; carré" et pang Щ "côté",appartenant à un groupe de caractères apparentés, qui révèlecombien la question de l'identification d'un artefact dans lacomposition d'un caractère est déterminante dans le cadre d'uneanalyse sémantico-graphique et combien la paléographie est
section permet de mettre en relief l'empreinte socio-culturelle que
ces trois référents-objets ont laissé jusque dans l'écriture actuelle.Sur ce point, contrairement à ce que l'on aurait pu être tenté decroire à la lumière d'un article influent de Jacques Gernet (1952)
laissant entendre au travers des cas de yang Èfc "bélier" et he ^zcéréale" que les composants catégoriels sont dotés d'une valeur
connotative intrinsèque, l'analyse du processus de ramificationgraphique a permis, dans un premier temps, de présupposer laneutralité de ces composants sur le plan connotatif et, de laconfirmer dans une étude ultérieure (Maréchal, 1998) ; c'est cette
neutralité qui permet au système d'écriture d'acquérir la flexibiliténécessaire pour faire face à la création de néologismes graphiquestoujours plus nombreux.
[Résumé de l'auteur]
REFERENCES
BUCK Carl Darling (1988 [1949]). A Dictionary of Selected Synonyms in
the Principal Indo-European Languages. Chicago ; London : TheUniversity of Chicago Press.
CHOU Fa-kao [ZHOU Fagao] (1974). Jinwen gulin й:£1Ш = AnEtymological Dictionary of Ancient Chinese Bronze Inscriptions.Hong Kong : The Chinese University of Hong Kong.
GERNET Jacques (1952). Comportements en Chine archaïque. Annales :économies, sociétés, civilisations, 7e année, n°l? pp . 31-38.
MARECHAL Chrystelle (1998). Composants catégoriels commemarqueurs de transitions sociales dans la Chine ancienne. In : 12eConférence de l'Association Européenne des Etudes Chinoises,10-13 septembre 1998. Edinburgh. [A paraître].