ecole nationale de la statistique et de l’administration economique Mémoire d’actuariat Etude d’un produit d’assurance paramétrique contre le risque de pluie torrentielle en Jamaïque Présenté par : Florent Ritleng Cuong Nguyen Suivi par : Pierre Picard Eric Strobl Mémoire présenté devant l’ENSAE Paristech pour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat et l’admission à l’Institut des Actuaires juin 2014
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ecole nationale de la statistique et del’administration economique
Mémoire d’actuariat
Etude d’un produit d’assuranceparamétrique contre le risque de pluie
torrentielle en Jamaïque
Présenté par :Florent Ritleng
Cuong Nguyen
Suivi par :Pierre Picard
Eric Strobl
Mémoire présenté devant l’ENSAE Paristechpour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat
3 Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 223.1 Détection des événements et calcul des indices . . . . . . . . . . . . . . . . 223.2 Choix de la fonction de vulnérabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 273.3 Construction d’une courbe de dommage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
II Modélisation statistique de l’indice paramétrique 32
Table 1.1: Sélection de catastrophes naturelles en Jamaïque avec leur impact écono-mique
1.2 Le Caribbean Catastrophe Risk Insurance Facility
Les petits Etats insulaires ont des difficultés à absorber l’impact financier des dé-
sastres décrits plus haut. En effet, leur capacité budgétaire limitée les empêche d’établir
des réserves financières suffisantes et l’inter-financement régional est impossible en rai-
son de leur petite taille et de leur diversité économique. Après une catastrophe, le niveau
élevé de dette limite l’accès au crédit. De même, l’accès à l’assurance catastrophe est
difficile en raison des coûts de transaction élevés résultant d’une faible activité de ce
marché aux Caraïbes.
Le Caribbean Catastrophe Risk Insurance Facility (CCRIF) est le premier pool d’assu-
rance multi-pays crée dans le monde à adosser un mécanisme d’assurance paramétrique
2. La catégorie des ouragans (de 1 à 5) est établie selon l’échelle de Saffir-Simpson à partir de lavitesse des vents. A titre d’exemple, la catégorie 4 correspond à des vents soutenus entre 210 et 240km/h.
3. Milliards de dollars Jamaïcain (JMD). 1,00 USD ≈ 100 JMD en 2014.
Chapitre 1. Présentation générale des concepts 6
soutenu à la fois par les marchés traditionnels et de capitaux. Il s’agit d’un fonds régional
pour les gouvernements des Caraïbes visant à limiter l’impact financier des ouragans et
des tremblements de terres dévastateurs en fournissant rapidement des liquidités lors-
qu’une police est déclenchée. Le CCRIF a été développé grâce à un financement du gou-
vernement japonais et a été capitalisé à l’aide des contributions à un fond de coopération
technique par la Banque Mondiale, le gouvernement du Canada, l’Union Européenne, les
gouvernements du Royaume-Uni et de France, la Banque de développement des Caraïbes
et les gouvernements d’Irlande et des Bermudes.
Seize gouvernements sont actuellement membres de la structure à but non lucratif qu’est
le CCRIF : Anguilla, Antigua et Barbuda, les Bahamas, Barbade, Belize, Bermudes, les
îles Caïmans, la Dominique, Grenade, Haïti, la Jamaïque, Saint-Kittset Nevis, Sainte-
Lucie, Saint-Vincent, l’île de la Trinité et les îles Turques et Caïques. Ces pays mutua-
lisent leur risque via la structure du CCRIF qui constitue un intermédiaire entre ces pays
et les marchés internationaux de la réassurance. En effet, les gouvernements souscripteurs
mutualisent leur risque dans un fonds commun pour accéder à une aide budgétaire dont
nous étudierons le mécanisme dans la troisième partie du mémoire.
Figure 1.1: Structure du CCRIF
Le CCRIF permet d’atténuer les problèmes de flux de trésorerie des petites économies
en développement après avoir subi des catastrophes naturelles. A court terme, il est in-
dispensable de trouver la liquidité nécessaire au maintien des services gouvernementaux
(ex : assurer la sécurité dans le pays, envoyer des secours sur les zones touchées, . . . )
jusqu’à ce que des ressources supplémentaires soient disponibles. Le CCRIF constitue
donc un moyen pour combler l’écart entre une réponse immédiate et des besoins de fi-
nancement à plus long terme.
Chapitre 1. Présentation générale des concepts 7
Depuis son lancement en 2007, le CCRIF a réalisé 8 paiements totalisant près de 32
millions de dollars à 7 gouvernements. Tous les paiements ont été effectués dans les 14
jours après le déclenchement d’un événement extrême. Ces indemnités sont résumées
dans le tableau ci-dessous :
Evénement Pays affecté Indemnités (US$)Séisme, 29 Novembre 2007 Dominique 528,021Séisme, 29 Novembre 2007 Saint Lucia 418,976
Tempête Tropicale Ike, Septembre 2008 ÎlesTurques-et-Caïques 6,303,913
Séisme, 11 Janvier 2010 Haïti 7,753,579Tempête Tropicale Earl, Août 2010 Anguilla 4,282,733Tempête Tropicale Tomas, Octobre 2010 Barbades 8,560,247Tempête Tropicale Tomas, Octobre 2010 Saint Lucia 3,241,613
Tempête Tropicale Tomas, Octobre 2010 St Vincent & lesGrenades 1,090,388
Total pour la période 2007-2011 US$ 32,179,470
Table 1.2: Indemnités versées aux états fondateurs du CCRIF depuis 2007
1.3 L’assurance paramétrique
1.3.1 Généralités
Comme énoncé précédemment, le CCRIF est le premier fonds multi-pays a adossé
un mécanisme d’assurance paramétrique. Contrairement à une assurance traditionnelle
qui reverse des indemnités en fonction des dégâts réels constatés au sol, l’assurance pa-
ramétrique se base sur la mesure d’un indice spécifique pour établir le montant des
indemnités. En général, la police d’assurance se déclenche lorsqu’un événement prédé-
fini dans le contrat survient. Cet événement concerne le plus souvent des catastrophes
naturelles comme par exemple le dépassement d’un seuil de vent maximal sur une zone
géographique donnée et sur une période donnée. Ce principe peut être aussi appliqué à
l’assurance agricole comme par exemple le niveau de pluie en dessous d’un seuil lors d’un
épisode de sécheresse [15]. Cela permet à des petits agriculteurs de se protéger contre les
pertes engendrées par la destruction de leur récolte.
Un des points positifs de ce type d’assurance concerne la rapidité des paiements. A titre
d’exemple, le CCRIF garantit un délai maximal de 2 semaines entre la survenance d’un
événement et son indémnisation. Dans le cas de l’assurance indemnitaire classique, le
délai peut aller jusqu’à 2 ans avant que la totalité des dégâts ne soit évaluée. L’assurance
Chapitre 1. Présentation générale des concepts 8
classique est adaptée à des risques de faible intensité et/ou de faible fréquence comme
l’assurance automobile, mais semble moins appropriée aux risques rares et extrêmes que
constituent les ouragans ou les pluies torrentielles.
Par rapport à une assurance classique, le principal avantage de l’assurance paramétrique
repose sur l’absence d’asymétrie d’information. En effet, l’assureur et l’assuré disposent
de la même information donnée par la mesure d’une variable météorologique. Dans le cas
de l’assurance agricole classique, l’asymétrie d’information entraîne à la fois un phéno-
mène d’aléa moral (les agriculteurs savent qu’ils seront indemnisés en cas de mauvaises
récoltent donc prennent plus de risques) et un phénomène d’anti-sélection (les « mauvais
» agriculteurs ont plus intérêt à s’assurer contre le risque de mauvaise récolte que les «
bons »). L’assurance paramétrique permet alors la transparence de l’indemnisation grâce
à la mesure d’un indice géré par un organisme indépendant de la compagnie d’assurance,
ce qui réduit les phénomènes liés à l’asymétrie d’information.
En revanche, il est possible que la variable mesurée ne reflète pas totalement les dé-
gâts réels. Le risque de base est alors défini comme la différence entre le coût économique
des dégâts réels au sol et l’indemnisation apportée par l’assurance paramétrique. Il est
cependant à noter que la transparence pour l’investisseur, que ce soit au niveau de la
réassurance ou de la titrisation, est bien meilleure pour l’assurance paramétrique que
pour l’assurance classique car l’anti-sélection et l’aléa moral sont fortement réduits.
Figure 1.2: Risques de base et Transparence selon le type d’investisseur 4
1.3.2 Présentation d’un produit d’assurance paramétrique : la couver-ture contre les ouragans
Le CCRIF offre exclusivement trois types de produit paramétrique :
— Une couverture contre les ouragans utilisant comme indice la vitesse du vent
— Une couverture contre les tremblements de terre utilisant comme indice la magni-
tude sur l’échelle de Richter
— Plus récemment, une couverture face aux pluies torrentielles ou Excess of Rainfall
(XSR) dont l’indice paramétrique est construit grâce aux précipitations agrégées
sur différentes zones géographiques.
Le produit de couverture des pluies torrentielles étant très similaire à celui des ouragans,
nous nous sommes intéressés au mécanisme du dernier, celui-ci ayant fait l’objet d’un
mémoire d’actuariat dans les années précédentes [7].
Le CCRIF propose une couverture paramétrique face aux ouragans par le biais d’un
indice lié au vent. Dans l’idéal, cet indice doit refléter les dégâts réels causés par l’évé-
nement assuré. Il est donc important d’établir au préalable la fonction de dommage qui
relie les pertes économiques réelles aux indices paramétriques mesurés lors des différents
événements.
Figure 1.3: Fonction de dommage
Les vitesses maximales des vents sont enregistrées sur plusieurs zones géographiques
pendant l’ouragan, ce qui permet le calcul de l’indice paramétrique. L’agrégation des
informations locales dans l’indice paramétrique permet de réduire le risque de base par
rapport à un indice qui prendrait en compte uniquement la vitesse moyenne des vents sur
le pays. L’indice paramétrique du produit contre les ouragans est donné par la formule
Chapitre 1. Présentation générale des concepts 10
ci-dessous :
Iévénement = α∑n
i=1wi ×max(vi − vseuil, 0)β
où
n nombre de stations de mesure
vi vitesse maximale du vent enregistrée dans la station
de référence de la zone
wi poids de la région i (∑n
i=1wi = 1)
α et β paramètres d’échelle
Les paramètres sont propres à chacun des 16 pays membres du CCRIF. Les pondérations
wi sont censées refléter l’importance économique de la zone géographique concernée et
traduisent leur exposition au risque d’ouragans. De plus, l’indice ne prend en compte que
les vitesses supérieures à un seuil vseuil prédéfini dans le contrat (ex : 22.5 m/s pour la
Jamaïque). Si N ouragans surviennent au cours de l’année, l’indice annuel des pertes est
défini par :
I =N∑k=1
Iévénement k
Une fois la fonction de dommage établie, le montant d’indemnité dû au pays est déter-
miné par la fonction de paiement définie dans le contrat. Cette fonction relie l’indice
paramétrique au paiement effectué par le CCRIF au pays souscripteur. Si l’indice an-
nuel I est inférieur à une borne inférieure appelée Attachment Point, le pays ne reçoit
aucune indemnité. Dans le cas où l’indice est supérieur à une borne supérieure appelée
Exhaustion Point, le pays reçoit comme indemnité le montant limite de couverture ap-
pelé Coverage Limit. L’introduction d’un paiement limite permet de caper les indices qui
seraient trop extrêmes afin de pouvoir tarifier le contrat. Enfin, le montant de l’indem-
nisation est proportionnel à l’indice paramétrique si ce dernier se situe entre les deux
bornes Attachment et Exhaustion. La fonction de paiement s’écrit :
Paiement =
0 si I < Attach.
I−Attach.Exhaustion−Attach. × Coverage Limit si Attach. < I < Exhaustion
Coverage Limit si Exhaustion < I
La représentation graphique de la fonction de paiement est donnée comme suit :
Chapitre 1. Présentation générale des concepts 11
Figure 1.4: Fonction de paiement
En général, les points Attachment et Exhaustion sont déterminés comme des quantiles
bien précis de la distribution de probabilité de l’indice I. Le montant Coverage Limit
peut être déduit grâce à la fonction de dommage, ou bien simplement être décidé par le
pays souscripteur.
La prime pure annuelle du contrat est définie comme l’espérance mathématique des
paiements versés au pays :
Prime Pure = E[Paiements]
L’aléa repose sur l’indice paramétrique qui dépend lui-même des vitesses des vents re-
levées sur les régions de mesure. Pour calculer la prime du produit, il est nécessaire de
connaître la distribution de probabilité du vent. La tarification se base sur la simulation
de cet indice avec des techniques de type Monte-Carlo dont nous verrons l’application
dans le troisième chapitre du mémoire.
Chapitre 2
Le produit XSR
Depuis 2008, le CCRIF s’est engagé dans le développement d’un produit d’assurance
pour faire face aux excès de pluie dans la région des Caraïbes. Cela a constitué une
réponse directe à l’intérêt manifesté par les pays membres et les actionnaires du CCRIF.
Le but d’un tel produit est de couvrir les inondations catastrophiques, c’est-à-dire les
pertes relatives à des pluies extrêmes de courte durée à savoir quelques jours. Ce produit,
nommé Excess of Rainfall ou XSR, a été développé à l’aide de l’expertise de Swiss Re
notamment sur la modélisation des catastrophes naturelles. Le produit XSR est construit
à l’aide de l’estimation paramétrique de l’impact de fortes pluies en utilisant les inputs
propres à un pays suivant :
— Précipitations mesurées par satellite. Il s’agit d’une part des données histo-
riques pour estimer les distributions de probabilités nécessaires à la tarification
du contrat, et d’autre part des données en temps réel pour calculer l’indice para-
métrique servant au paiement
— Exposition des différentes zones géographiques au risque de pluie. Les valeurs
d’exposition sont calculées et fournies par le CCRIF
— Vulnérabilité en ajustant une courbe empirique aux pertes historiques.
Malgré des recherches débutées en 2010, le produit XSR n’a pu être lancé qu’en 2013
à cause de la complexité de son développement. En effet, la pluie est l’un des aléas
climatiques les plus difficiles à modéliser et il n’y a pas de consensus scientifique quant
à la méthodologie à appliquer. Nous verrons plus en détails cette problématique dans le
second chapitre du mémoire.
12
Chapitre 2. Le produit XSR 13
2.1 Description du produit
2.1.1 La nécessité d’un produit XSR dans la région des Caraïbes
Une étude sur l’adaptation des économies au changement climatique menée par le
CCRIF en 2012 a révélé que les risques naturels pourraient augmenter les pertes prévues
de 1 à 3% du PIB de l’ensemble des pays des Caraïbes d’ici 2030. D’après ce rapport,
le changement climatique aura un impact indéniable sur l’augmentation du niveau de
la mer, de l’intensité des ouragans, des précipitations et des températures. L’étude a en
outre montré que de nombreuses mesures d’adaptation comme l’atténuation et le trans-
fert des risques sont disponibles pour répondre à la menace croissante du changement
climatique. En fonction des caractéristiques de chaque pays, ces mesures permettraient
d’éviter jusqu’à 90% de la perte attendue en 2030 dans un scénario catastrophique. Les
mesures de transfert de risque ou d’assurance jouent également un rôle clé dans la lutte
contre les conséquences financières de ces événements météorologiques et en particu-
lier sur les phénomènes hydrométéorologiques. Alors que la couverture d’assurance du
CCRIF a été extrêmement bénéfique dans le cas des ouragans et des tremblements de
terre, les gouvernements membres du CCRIF et certains pays non-membres (par exemple
la Guyane) ont encore une exposition significative aux inondations. Un questionnaire des
membres du CCRIF entrepris par la Banque mondiale en 2010 avait révélé que 94% des
répondants estiment que les risques de pluies torrentielles devraient être couverts. Ceci
explique le lancement du produit XSR par le CCRIF.
2.1.2 Le développement du produit : une collaboration entre le CCRIFet Swiss Re
Comme indiqué précédemment, le modèle du XSR a été développé après que les
membres du CCRIF et les intervenants avaient exprimé un vif intérêt pour l’achat de
couverture contre les pluies torrentielles. Entre 2009 et 2010, le CCRIF a retenu les ser-
vices de l’Institut de météorologie et d’hydrologie des Caraïbes (CIMH) et de Kinetic
Analysis Corporation (KAC) pour développer un modèle de simulation de précipitations.
Lors d’un examen approfondi de ce modèle, le CCRIF a jugé que le modèle CIMH / KAC
nécessitait d’autres tests avant de pouvoir être utilisé.
C’est à la suite de ce développement que le CCRIF a commencé en 2011 une collabora-
tion avec Swiss Re, réassureur mondial de premier plan, afin de développer un produit
Chapitre 2. Le produit XSR 14
paramétrique de couverture des pluies torrentielles. Grâce à l’expertise technique com-
binée du CCRIF et de Swiss Re, et en s’appuyant sur des données publiques, le CCRIF
est maintenant en mesure d’offrir un contrat d’assurance à ses membres.
2.1.3 Le modèle XSR du CCRIF et de Swiss Re
Le modèle XSR du CCRIF-Swiss Re se base sur les données de la mission de mesure
des précipitations tropicales (TRMM). Le TRMM est une initiative de recherche entre-
prise par la NASA et par l’agence d’exploration spatiale Japonaise (JAXA). Il fournit
une estimation satellitaire précise et en temps réel des pluies agrégées sur des cellules
géographiques de 625 km2 toutes les 3 heures.
La carte de la Jamaïque est divisée en 28 cellules géographiques. Un taux d’exposi-
tion au risque, qui traduit la propension de la zone à être impactée économiquement lors
de fortes pluies, est fourni sur chacune des 28 zones. La répartition est la suivante :
Figure 2.1: Répartition des 28 cellules géographiques sur la Jamaïque
Les données de précipitation journalière sont disponibles sur chacune de ces cellules 1.
Nous allons voir comment le modèle XSR utilise ces données pour calculer l’indice para-
métrique en question.
1. Les valeurs d’exposition sont données en annexe D.
Chapitre 2. Le produit XSR 15
2.2 Méthodologie de calcul de l’indice paramétrique relatif
au produit XSR en Jamaïque
Dans le contrat XSR proposé par le CCRIF, un évènement extrême ainsi que son
indice paramétrique associé sont définis selon les 4 étapes suivantes :
1) Sur chacune des 28 cellules géographiques de la Jamaïque, le cumul des 5 derniers
jours de pluie est calculé jour après jour (c.f figure 2.2)
Figure 2.2: Agrégation des pluies journalières sur 5 jours
Un événement local est déclenché lorsque ces précipitations agrégées sur 5 jours 2
dépassent 250 mm. L’événement se termine lorsque le cumul des pluies sur 5 jours
redescend en-dessous de ce seuil (cf. figure 2.3)
Figure 2.3: Détection des événements extrêmes locaux
2) Sur chacun des événements locaux détectés, seul le pic des pluies agrégées sur 5 jours
est utilisé pour calculer un indice de perte via une courbe de vulnérabilité qui relie
la quantité de pluie à un taux de vulnérabilité. 3
3) Le pourcentage d’exposition de la cellule géographique est appliqué au taux de vul-
nérabilité de chaque événement local afin de donner l’indice de perte de la cellule sur
l’événement local.2. On définit les prépcipitations agrégées 5 jours comme la somme des précipitations journalières sur
les 5 jours antérieurs.3. L’information sur cette fonction de vulnérabilité ne nous a pas été communiquée et nous tenterons
de remédier à ce problème ultérieurement.
Chapitre 2. Le produit XSR 16
Figure 2.4: Détection des événements extrêmes nationaux à partir des événements lo-caux
4) Pour calculer l’indice de perte national, les 28 indices de pertes locaux sont addition-
nés jour par jour. Au niveau national, un événement est défini comme une période
continue où l’indice de perte local est positif dans au moins une des 28 cellules.
Les indices locaux sont strictement positifs uniquement les jours où le pic de pluie est
atteint lors d’un événement de pluie intense. Par convention, l’indice est nul le reste du
temps. Dans l’exemple de la figure 2.4, trois événements au niveau national sont détectés.
Pour le premier événement, l’indice national correspond à la somme des trois indices
locaux. L’indemnité reversée au pays est calculée en fonction des indices nationaux via
la fonction de paiement 1.4.
2.3 Comparaison avec le produit Ouragan
Ce produit se distingue du produit contre les ouragans dans la mesure où les précipi-
tations sont enregistrées en temps réel 24h/24h et pas seulement lors des épisodes d’ou-
ragans ou de tempêtes tropicales. La problématique de tarification est donc différente.
Dans le cas du produit Ouragan, la prévision du nombre moyen d’Ouragan est fonda-
mentale car les vents n’y sont mesurés que dans ce cas. De plus, il est en théorie possible
que le produit XSR déclenche plusieurs événements locaux espacés dans le temps, donc
plusieurs événements nationaux lors d’une même tempête. Ce n’est donc pas forcément le
nombre d’événements nationaux qui est important mais plutôt le nombre d’événements
Chapitre 2. Le produit XSR 17
locaux. En écrivant l’indice national comme somme d’indices locaux I =∑28
i=1 Icellule i
le second chapitre du mémoire consistera à modéliser la dynamique des indices locaux
Icellule i afin de déduire l’indice national.
Par ailleurs, le contrat stipule que la couverture peut être offerte sur base événementielle
Figure 2.5: Deux cas de configuration possibles lors d’un épisode de pluies extrêmes
ou annuelle. La définition de la fonction de paiement et de son indice est importante dans
la tarification du contrat. En effet, les deux cas de configuration de pluie possibles sont
représentés dans la figure 2.5.
Dans le cas d’une fonction de paiement à base événementielle, le CCRIF doit indem-
niser la Jamaïque à chaque détection d’événements nationaux :
1. Dans le scénario 1, un seul indice est calculé en prenant en compte les 2 pics de
pluies locaux : I = Icellule i + Icellule j
2. Dans le scénario 2, deux indices sont calculés sur les deux jours Icellule i et Icellule j.
En accord avec la fonction de paiement de la figure 1.4, le CCRIF devrait payer un
montant probable plus important dans le scénario 1 que dans le scénario 2 alors que les
deux sont engendrés par le même épisode de pluie torrentielle, ce qui peut correspondre
à une limite du produit XSR.
Chapitre 2. Le produit XSR 18
2.4 Présensation des données
2.4.1 Données Pluviométrique
Nous avons à notre disposition les données de précipitation journalière en milimètre
de la Jamaïque de 1998 jusqu’en 2013. Il s’agit des données satellitaires en temps réel col-
lectées par la Tropical Rainfall Measurement Mission (TRMM). Les précipitations sont
estimées sur 28 noeuds satellitaires équidistants d’environ 25 km. Les 28 cellules d’obser-
vation associées aux 28 points d’observation recouvrent entièrement la Jamaïque (cf. 2.1).
Le choix des données satellitaires de la TRMM au détriment d’autres sources mesu-
rées sur place, même si ces dernières sont en général plus précises, s’explique par le souci
de consistence des données à travers la région des Caraïbes. De plus, la TRMM fournit
un degré d’indépendance important étant donné qu’elle prend ses sources directement
de la NASA.
i. Profil pluviométrique de la Jamaïque
La Jamaïque possède un climat tropical humide, marqué principalement par deux
périodes : une période pluvieuse entre Mai et Décembre et une période plus calme et
sèche de Janvier à Avril. Cette bi-saisonnalité est largement observée sur nos cellules
d’observation (figure 2.6 ) :
2 4 6 8 10 12
5010
015
020
025
0
month
x
Figure 2.6: Moyenne des précipitations mensuelles (en mm) depuis 15 ans
— De Décembre à Avril : la précipitation mensuelle est en dessous de 100 mm.
Chapitre 2. Le produit XSR 19
— De Mai à Novembre : la précipitation est au dessus de 100 mm. Il est également
à noter que la saison des cyclones est en général de Juin à Novembre.
On observe que les précipitations sont au-dessus des 200 mm pour les mois de Mai,
Septembre, Octobre, Novembre.
ii. Profil pluviométrique d’une cellule de la TRMM
Dans ce paragraphe, on s’intéresse à la précipitation journalière sur une cellule d’ob-
servation TRMM. Pour cela, on a décidé de regarder arbitrairement la cellule 20 qui
inclut l’agglomération de Kingston, Portmore et Spanish Town, où l’on peut trouver la
plus forte concentration de population et de richesse du pays.
a. Précipitations journalières – Figure 2.7.
Le profil pluviométrique jounalier de cette région peut être décrit comme suivant :
— La moyenne des précipitations journalières est de 11.4 mm. Cependant, 75% des
précipitations journalières sont inférieures à 21,83 mm donc il s’agit d’une distri-
bution très concentrée sur les petites valeurs.
— La bi-saisonnalité est bien présente dans cette région : une période pluvieuse entre
Mai et Novembre et une période plus sèche de Décembre à Avril.
— La précipitation maximale est de 303 mm, atteinte lors du passage de l’ouragan
Gustave en Jamaïque le 29 Août 2008.
Histogram of Rainfall
Rainfall
Fre
quen
cy
0 50 100 150 200 250 300
010
020
030
040
0
(a) Histogramme de précipitation journalière
2 4 6 8 10 12
5015
025
0
month
x
(b) Précipitation mensuelle
Figure 2.7: Précipitation d’une cellule TRMM de Jamaique
b. Précipitations agrégées – Figure 2.8.
On a vu que dans la construction de l’indice paramétrique, le CCRIF utilise les pré-
cipitations aggrégées 5 jours. Il est donc naturel de s’intéresser à cette distribution.
La forme de la distribution des précipitations 5 jours est similaire à celle des précipi-
tations journalières. En agrégant les pluies, on remarque que la queue de distribution
Chapitre 2. Le produit XSR 20
Histogram of 5 days Rainfall
Rainfall.5days
Fre
quen
cy
0 100 200 300 400 500
010
030
050
0Figure 2.8: Précipitation 5 jours aggrégés en Jamaique
semble plus épaisse que pour les pluies journalières. Ceci peut s’expliquer par la per-
sistance des pluies lors des pluies torrentielles.
2.4.2 Exposition
Le CCRIF possède une base de données d’exposition, le Multi-Risk Estimation Sys-
tem (MPRES), qui permet d’estimer les expositions aux pertes sur un pays membre à une
résolution de 1km2. Les exposition se basent sur des statistiques économiques, démogra-
phiques et les données de type "Remote Sensing" 4. La base de données a été construite
afin de pouvoir fournir une estimation convenable des pertes sur les actifs corporels dues
aux castastrophes hydrométéorologiques et géophysiques. Les données d’exposition sur
la Jamaïque dont nous diposons sont générées à partir de données internes datant de
2010. La Jamaïque est scindée en 12990 cellules de 1km2. La répartition des expositions
sur ces cellules est représentée dans la figure 2.9.
Figure 2.9: Répartition des expositions
4. système de détection spatiale à distance
Chapitre 2. Le produit XSR 21
Il est faciclement observable que les zones à exposition faible correspondent soit aux
zones inhabitées, soit des zones montagneuses à l’intérieur du pays. On remarque aussi
que les zones à exposition importante se trouvent sur le littoral de la Jamaïque et que les
zones à exposition les plus importantes correspondent à des villes ayant plus de 40.000
habitants : Kingston, Spanish Town, Portmore et Montegro Bay.
Par souci d’homogéneïté avec les données pluviométriques, nous avons regroupé les expo-
sitions niveau cellules CCRIF (12990 cellules) en expositions niveau TRMM (28 cellules).
Chapitre 3
Calcul des indices et construction de
la courbe de dommage
Dans cette partie, nous nous proposons d’appliquer la méthodologie utilisée par le
CCRIF sur les données dont nous avons à disposition, à savoir :
— L’historique des précipitations journalières de 1998 à 2013 sur les 28 cellules géo-
graphiques de la Jamaïque
— Les taux d’exposition au risque de pluie torrentielle pour ces 28 cellules
— Les montants globaux des pertes engendrées par les ouragans et les tempêtes
tropicales sur les 15 dernières années en Jamaïque
3.1 Détection des événements et calcul des indices
3.1.1 Evénements locaux
La première étape consiste à agréger les pluies, c’est-à-dire à cumuler les précipita-
tions sur les 4 jours précédents inclus la date de mesure. A l’issue de ce calcul, nous
disposons de 28 séries de pluies correspondant au 28 zones de la Jamaïque sur lesquelles
nous allons détecter les événements de pluies extrêmes définis par le CCRIF 1.
Entre 1998 et juin 2013, il y a eu exactement 200 pluies torrentielles locales extrêmes ce
1. Pour rappel, un événement local extrême débute lorsque les précipitations agrégées dépassent leseuil de 250 mm et se termine lorsqu’elles redeviennent inférieures à ce seuil.
22
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 23
qui représente en moyenne 13 événements locaux par an. Par ailleurs, le nombre d’évé-
nements diminue en fonction du seuil choisi (250 mm pour le CCRIF) comme le montre
la figure 3.1.
200 300 400 500
010
020
030
040
050
060
0
Seuil en mm
Nom
bre
d'év
énem
ents
loca
ux
Figure 3.1: Evolution du nombre d’événements détectés en fonction du seuil de préci-pitation
Répartition géographique Il peut être intéressant d’étudier la répartition géogra-
phique de l’occurrence de ces événements. La figure 3.2 retrace le nombre d’événements
locaux qui se sont produits les 15 dernières années par cellule géographique.
Figure 3.2: Répartition géographique des événements extrêmes en Jamaïque
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 24
La première chose à noter est que l’Est de l’île est plus touché par les pluies torrentielles.
Ceci aura un impact non négligeable sur la tarification du contrat car le tiers des ri-
chesses de l’île est concentré sur la région de la capitale Kingston (cellules 20, 21, 23 et
24 cf. 2.1). De même, 40% de l’exposition totale au risque est concentrée sur les zones
surlignées en rouge sur la carte précédente qui correspondent à plus de 10 événements
détectés sur les 15 dernières années.
Il est à noter que la durée moyenne d’un événement est de 3,5 jours. Sur les 15 der-
nières années, un seul événement a duré 6 jours sur la région de Kingston le 1er octobre
2010 et représente le 3ème indice le plus élevé.
Répartition annuelle La répartition annuelle des indices locaux est donnée via l’his-
togramme 3.3.
Figure 3.3: Répartition des événements extrêmes par mois
Aucun événement n’est détecté pendant les mois de Janvier à Avril et pendant le mois de
Juillet. Aussi, les pluies torrentielles ont lieu principalement en Mai, Septembre et Oc-
tobre. Cela concorde avec la saison des pluies décrite plus haut dans la partie descriptive
de la pluviométrie en Jamaïque.
Indice paramétrique local Une fois que les événements locaux ont été détectés sur
les 15 dernières années, nous calculons les indices associés. Pour rappel, le calcul de
l’indice local se base seulement sur le pic de pluie journalière de l’événement considéré. La
fonction de vulnérabilité permet de relier ce pic de pluie au pourcentage de vulnérabilité
de la zone touchée. Cette information nous étant inconnue pour le moment, nous avons
calculé les indices locaux sur base de la fonction de vulnérabilité de la figure 3.4.
Cette fonction a volontairement été choisie positive à partir de 250 mm : à tous les évé-
nements détectés sera reversée une indemnité. La vulnérabilité de 100% signifierait que
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 25
Figure 3.4: Fonction de vulnérabilité pour le calcul des indices locaux
le territoire de la cellule concernée serait entièrement détruit. Nous avons arbitrairement
choisi le niveau de 800 mm de pluie pour atteindre ce seuil. Nous reviendrons sur le choix
de la forme de la fonction de vulnérabilité dans le paragraphe suivant. Dans tous les cas,
cela n’a aucun impact sur la détection des événements de pluies extrêmes 2.
Les 6 indices les plus élevés sont sur les cellules 20 et 21 correspondant à la région
de Kingston. Les dates des événements sous-jacents sont le 25 Mai 2005 3, le 30 Août
2008 4 et le 1er Octobre 2010 5. Entre 1998 et 2012, les événements extrêmes n’ont pas
été distribués de manière uniforme comme le montre la figure 3.5.
Figure 3.5: Répartition annuelle des événements extrêmes
D’après l’histogramme 3.5, aucune pluie torrentielle n’a eu lieu en 1998 et en 2006. En
revanche, l’année 2002 a été particulièrement intense. La Jamaïque a connu des épisodes
de pluies torrentielles intenses les mois de Mai et de Juin 2002 et ceux sur une grande
partie de l’île (24/28 cellules ont été impactées). De plus, nous pouvons remarquer que les
pluies ne sont pas distribuées identiquement tous les ans. Par souci de simplification, nous
considérerons toutefois dans la partie modélisation du mémoire que les pluies suivent des
cycles saisonniers qui se répètent tous les ans. En d’autres termes, nous négligeons par
la suite l’effet d’un changement climatique potentiel sur les précipitations en Jamaïque.
2. Nous verrons dans le chapitre 3 que le taux de vulnérabilité maximal n’influence pas le calcul dela prime. Le taux à 100 % est choisi arbitrairement.
3. pluie torrentielle recensée sur le site internet de l’institut d’hydrologie des Caraïbes4. tempête tropicale Gustav5. tempête tropicale Nicole
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 26
3.1.2 Evénements nationaux
Une fois les indices locaux calculés, il est possible de déduire d’une part les dates
des événements nationaux et d’autre part les indices nationaux associés. Un événement
national se définit comme une succession continue d’événements locaux.
Toujours entre 1998 et 2012, les 200 événements locaux s’agrègent en 29 événements
nationaux. La liste des 29 indices nationaux est donnée dans l’annexe A.
Figure 3.6: Répartition dans le temps des événements extrêmes nationaux
L’histogramme 3.6 s’interprète de la même façon que la répartition des indices locaux
par années :
— Il y a au moins 1 événement tous les ans à l’exception de 1998 et de 2006
— L’année 2002 est la plus touchée avec 5 événements
Enfin, nous pouvons nous demander si les catastrophes naturelles en Jamaïque entre
1998 et 2012 décrites à travers le tableau 3.1 ont été détectées comme des événements
de pluie torrentielle via l’indice utilisé par le CCRIF. Nous comparons ainsi les dates des
événements nationaux de pluies extrêmes avec les dates des catastrophes naturelles :
Catastrophe naturelle Année Début Fin Détecté 6
Ouragan Michelle 2001 28/10/2001 05/11/2001 OuiPluies torrentiells de Mai/Juin 2002 22/05/2002 02/06/2002 OuiOuragan Ivan 2004 10/09/2004 12/09/2004 OuiOuragan Dennis & Emily 2005 18/07/2005 05/08/2005 NonOuragan Wilma 2005 13/10/2005 19/10/2005 OuiOuragan Dean 2007 19/08/2007 20/08/2007 NonTempête tropicale Gustav 2008 28/08/2008 29/08/2008 OuiTempête tropicale Nicole 2010 26/09/2010 01/10/2010 OuiOuragan Sandy 2012 23/10/2012 25/10/2012 Non
Table 3.1: Détection des catastrophes naturelles par l’indice CCRIF entre 1998 et 2012
6. Au niveau national selon l’indice XSR.
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 27
Sur les 9 catastrophes naturelles, trois ne sont pas détectées par les événements natio-
naux au sens du CCRIF. Une pluie torrentielle est tout de même détectée une semaine
avant l’ouragan Dean sur l’Est de l’île le 12 août 2007. Les ouragans peuvent en effet
être précédés de fortes précipitations. De même, il a extrêmement plu 3 semaines avant
l’ouragan Sandy sur les pointes Est et Ouest de l’île. Enfin, les ouragans Dennis et Emily
n’ont pas été détectés. La raison possible est que les ouragans sont généralement accom-
pagnés à la fois de forts vents et de pluies, contrairement aux tempêtes tropicales qui se
caractérisent par de fortes pluies.
3.2 Choix de la fonction de vulnérabilité
Une des étapes du processus de calcul de l’indice paramétrique consiste à relier le
pic de pluie à un taux de perte plus communément appelé taux de vulnérabilité. Cette
fonction est définie par le CCRIF mais ne nous a pas été communiquée. Nous considérons
qu’elle est identique sur toutes les cellules.
Cette fonction traduit les dégâts occasionnés par un événement local dont on connait
le pic de pluie journalière. Nous avons calculé l’indice via une fonction linéaire du type
de la fonction utilisée pour le calcul de nos indices locaux (cf. figure 3.7).
Figure 3.7: Fonction de vulnérabilité simple
— Choix de A : Nous avons vu que dans le contrat XSR, une pluie torrentielle
est détectée lorsque le pic de pluies agrégées 5 jours dépasse 250 mm. Il est donc
logique de choisir A = 250 mm de façon à ce qu’un indice local strictement positif
définisse un événement local.
— Choix de B : Nous avons observé sur l’historique de 15 ans que le pic maximal
des pluies agrégées est de 623 mm. Nous pensons qu’il est judicieux de choisir
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 28
un paramètre B supérieur à cette valeur. En effet, ce paramètre traduit un effet
de saturation des dégâts. A ce stade, nous choisissons B=800 mm. Nous verrons
dans le troisième chapitre que la prime est peu sensible à la valeur B.
— Choix de C : Pour l’instant, nous prenons la valeur C = 100 % ( destruction
totale à partir du seuil de saturation B). Nous verrons que nous pourrons choi-
sir C selon la fonction de dommage historique mais que ce paramètre n’aura pas
d’influence dans le calcul de la prime.
3.3 Construction d’une courbe de dommage
Un produit d’assurance paramétrique a pour objectif d’indemniser un pays dans les
plus brefs délais suite à la survenance d’un événement naturel extrême. Dans le cas du
produit XSR, l’indice de pluie agrégé sur 5 jours doit refléter les dégâts probables sur
chacune des régions de la Jamaïque. Pour réduire le risque de base de non adéquation
de l’indice avec les dégâts, il est important de pouvoir relier les indices détectés lors des
15 dernières années avec les dégâts réels, ces derniers nous étant inconnus.
En revanche, nous avons à notre disposition les rapports sur l’impact socio-économique
et environnemental des principales catastrophes naturelles ayant touché la Jamaïque ces
15 dernières années (cf. [14], tableaux 1.1 et 1.2). Ces rapports ont été rédigés en grande
partie par l’Institut de planification de la Jamaïque, mission gouvernementale rattachée
au ministère des finances, et par le comité de coopération et de développement des Ca-
raïbes. La première chose à noter est que les dommages ne sont connus qu’au niveau de
l’île entière et non par région. Dans ces rapports, les dommages liés aux catastrophes
naturelles sont catégorisés de la façon suivante :
— Impacts sociaux : destruction partielle ou totale de maisons et d’écoles
— Impacts sanitaires : destruction partielle ou totale d’infrastructures médicales,
pertes de fournitures et d’équipements, besoin en médicaments pour les popula-
tions touchées, propagation de maladies telle que la dengue
— Impacts productifs : pertes agricoles (submersion des cultures et perte de bétails),
déclin du tourisme
— Impacts sur les infrastructures : routes détruites ou impraticables, endommage-
ment des conduits d’eau et d’électricité, télécommunications interrompues
— Impact environnemental :érosion du sol, destruction d’arbres.
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 29
Pour construire une courbe de dommage, nous relevons les pertes totales directes dans
chacun des rapports et les relions aux événements extrêmes potentiellement détectés par
l’indice national XSR du CCRIF. Sur les 9 catastrophes naturelles, seules 6 d’entre elles
ont été détectées par l’indice XSR. Il est donc difficile d’analyser une courbe à 6 points,
mais c’est la seule information dont nous disposons. Il serait dangereux de vouloir simuler
des pertes dans le but d’avoir plus de points car la courbe de dommage est censée relier
les indices aux pertes historiques. De plus, nous avons pris en compte l’inflation afin de
comparer les montants de perte car le dollar Jamaïcain est 3 fois plus élevé en 2012 qu’en
1999.
La courbe de dommage devrait être construite grâce aux points précédents de la façon
schématique suivante :
Figure 3.8: Construction de la courbe de dommage à partir des pertes historiques
Les bornes Attachment et Exhaustion doivent soit être définies comme des quantiles pré-
cis de la distribution de l’indice national, soit être fixées par le pays lui-même. Dans le
cas où les bornes sont des quantiles, le montant limite de couverture (cf. fonction de
paiement 1.4) peut être déduit de la courbe de dommage comme l’écart entre les dégâts
correspondant aux points Attachment et Exhaustion. Dans le cas où la Jamaïque choisit
les bornes, la limite de couverture doit aussi être donnée par le pays.
Les dégâts sont en général beaucoup plus importants lors des ouragans que pour les
tempêtes tropicales car la force du vent est le facteur principal de destruction des in-
frastructures. L’indice XSR ne détectant que les pluies torrentielles, il est important de
connaître la partie des dégâts liés aux pluies dans les dégâts totaux. C’est pour cela que
nous avons ajusté les dégâts recensés dans les rapports aux données de vent. Pour cela,
nous avons utilisé le modèle de K. Emanuel dans le mémoire sur le produit Ouragan [7].
Ce dernier modèle estime la proportion de dommage liée à la force du vent lors d’un épi-
sode catastrophique. Le pourcentage de destruction p est défini de la manière suivante :
Chapitre 3. Calcul des indices et construction de la courbe de dommage 30
p = v3/(1 + v3) où v représente la vitesse maximale agrégée du vent lors d’un événement
extrême. A titre d’exemple, 80% des dégâts occasionés par l’Ouragan Ivan proviendrait
de la force du vent selon le modèle.
Après avoir isolé les dégâts liés à la pluie 7, les dommages par la pluie sont représen-
tés dans la figure 3.9. La première chose à noter est que le montant des dommages est
0 5 10 15 20 25
34
56
7
Courbe de dommage
Indice national XSR
Dom
mag
es e
n m
illia
rds
J$
Figure 3.9: Courbe de dommage en fonction de l’indice national XSR
croissant avec l’indice national, à l’exception des inondations de mai 2002 qui constitue
un indice élevé mais des dégâts moindre (2,47 milliards de dollars Jamaïcain) par rap-
port aux autres catastrophes naturelles. Il serait cependant imprudent d’émettre toute
hypothèse sur la forme de la fonction de dommage car nous ne pouvons pas juger sur
6 historiques de pertes. De plus, n’ayant pas les pertes historiques pour les 29 indices
nationaux calculés les 15 dernières années, il est probable que les 6 points constituent
la partie haute de la fonction de dommage. Il y a donc un problème de troncature à
gauche : seuls les dégâts des catastrophes naturelles majeurs sont observés.
7. Nous faisons l’hypothèse que les dégâts proviennent principalement du vent et de la pluie.
Conclusion de la première partie
Nous avons utilisé le maximum d’information dont nous avions à disposition pour
calculer les indices nationaux du produit XSR. La courbe de vulnérabilité ne nous ayant
pas été communiquée par le CCRIF, nous avons décidé de rester sur une forme linéaire
simple. De même, la construction de la fonction de dommage s’est avérée délicate dans
le sens où les données sur les dégâts historiques sont manquantes. Mais la détermination
de ces deux dernières courbes ne constitue pas un point crucial dans la tarification du
contrat. En effet, les paramètres de ces fonctions sont déterminés dès la signature du
contrat et peuvent être demandés explicitement par la Jamaïque. La pluie est le facteur
qui constitue la variable aléatoire du contrat, et c’est elle que nous allons tenter de
modéliser dans la seconde partie du mémoire.
31
Deuxième partie
Modélisation statistique de l’indice
paramétrique
32
Modélisation statistique de l’indice
paramétrique
Après avoir identifié les événements locaux et nationaux sur les 15 dernières années,
le problème essentiel consiste à trouver la prime du produit XSR, c’est-à-dire le coût ac-
tuariel qu’engendre une couverture contre les pluies torrentielles en Jamaïque. Le profil
de risque de la Jamaïque est donné par les expositions sur les 28 zones géographiques,
la courbe de vulnérabilité à la pluie et les précipitations. Pour tarifier correctement le
contrat XSR, il est nécessaire de comprendre le comportement des pluies. Cette partie
consiste à modéliser au plus juste les précipitations afin d’anticiper les indemnités re-
versées probables et donc la prime du contrat. La première étape consiste à modéliser
les pluies journalières afin d’en déduire les pluies agrégées sur 5 jours puis les indices
locaux. Nous verrons les limites de cette méthodologie et tenterons de modéliser dans
une seconde étape les pics journaliers sur chacune des cellules de façon indépendante par
la théorie des valeurs extrêmes. Enfin, nous tenterons de modéliser la dépendance des
pics de pluie entre cellules afin d’obtenir la dynamique de l’indice national.
33
Chapitre 4
Modélisation de la pluie journalière
en Jamaïque
Pour rappel, l’indice d’un événement local est calculé à partir du pic des pluies agré-
gées sur 5 jours. Le niveau de modélisation de l’indice local « le plus fin » repose sur
la modélisation des précipitations journalières. En effet, les pluies agrégées 5 jours puis
les indices locaux sont déduits une fois que le comportement des pluies journalières est
caractérisé. Afin de prendre en compte la saisonnalité des pluies, nous considérons dans
cette partie que les précipitations suivent des rythmes mensuels qui se répètent tous les
ans sur chacune des régions de la Jamaïque. En d’autre termes, la variable aléatoire «
pluie journalière » est homogène donc identiquement distribuée par cellules et par mois.
Il est vrai que nous avions recensé certaines années plus pluvieuses que d’autres mais il
est difficile d’établir des cycles annuels sur un historique de 15 ans. La littérature sur les
générateurs de pluie au pas de temps journalier étant très vaste, nous avons décidé de
nous concentrer sur deux appoches : les processus de Bartlett-Lewis et la modélisation
par Chaîne de Markov (cf. thèse de A.Muller [10]). Les deux types de modèles combinent
un processus d’occurrence des jours de pluie avec un modèle d’intensité de pluie pour
modéliser la quantité précipitée dans l’événement.
4.1 Processus de Bartlett-Lewis
4.1.1 Méthodologie
Le modèle de Bartlett-Lewis est basé sur des processus d’agrégation qui sont des
combinaisons de plusieurs processus stochastiques. Neyman et Scott furent les premiers
34
Chapitre 4. Modélisation de la pluie journalière en Jamaïque 35
à utiliser ce type de processus en 1958 pour traiter de façon probabiliste la représenta-
tion des galaxies dans l’univers. Dans le cas des pluies journalières, les trois processus
modélisés sont respectivement la date de début d’un événement pluvieux, la durée de
l’événement pluvieux et l’intensité des pluies journalières lors de l’événement. Le modèle
se résume de la façon suivante :
— Les dates de début d’un événement pluvieux suivent un processus de Poisson
homogène sur chaque cellule et chaque moi. En d’autre termes, les temps d’inter-
arrivées des dates de début de pluie suivent une loi exponentielle d’intensité
constante (cf. Rappel sur les processus de Poisson en annexe C.1).
— La durée d’un événement pluvieux suit une loi exponentielle
— A chaque date d’un événement pluvieux, l’intensité des précipitations suit une loi
exponentielle ou autre à définir.
— Si deux événements pluvieux se chevauchent, à savoir qu’un événement pluvieux
finit après que le suivant a commencé dans le modèle, alors les intensités journa-
lières s’additionnent.
Le modèle est résumé sur la partie gauche de la figure 4.1.
Figure 4.1: Principe des modèles basés sur un processus d’agrégation
4.1.2 Application aux précipitations journalières
La première limite du modèle concerne la continuité du processus de pluie par rapport
au temps. Le modèle suppose que les espacements entre les dates de début de pluie ainsi
Chapitre 4. Modélisation de la pluie journalière en Jamaïque 36
que la durée des pluies sont continues alors que nos données ne peuvent fournir que des
Table 7.2: Evolution de la prime nationale et du nombre d’événements couverts enfonction de l’Attachment
Le tableau 7.2 permet de voir l’impact de l’augmentation de l’Attachment sur la baisse
de la prime. La Jamaïque a la possiblité de payer une prime moins chère mais en contre
partie, il y a aura moins d’événements couverts. La baisse de la prime est significative
pour des valeurs de quantile supérieures à 60%.
Nous allons tenter de comparer dans le prochain chapitre la somme des primes locales
avec la prime nationale.
Chapitre 8
Risques de modèle et calcul de
sensibilités
8.1 Comparaison des primes pures locales et de la prime
nationale
Dans le chapitre précédent, nous avons calculé les primes locales et la prime nationale
selon deux approches différentes :
— Pour la tarification locale, nous proposons 28 produits d’assurance paramétrique
de montant de couverture 1 million de dollars. Les 28 indices locaux associés à ces
produits sont modélisés de façon indépendante selon la théorie des dépassements
de seuil.
— Pour la tarification nationale, nous proposons un produit d’assurance paramé-
trique de montant de couverture 28 millions de dollars. L’indice national associé
dépend des 28 indices locaux. La dépendance entre les indices locaux des 28 cel-
lules est modélisée selon la théorie des copules. La loi de l’indice national s’obtient
par la sommation des indices locaux dont la dépendance est modélisée par la co-
pule gausienne.
L’avantage de la seconde modélisation par rapport à la première est qu’elle permet de
prendre en compte la dépendance des événements extrêmes locaux. En effet, une pluie
extrême arrive en général simultanément dans plusieurs cellules de l’île. Le risque est
donc plus important lors d’un événement national et se traduira par une prime pure plus
importante que celle issue de l’agrégation d’événements locaux indépendants.
74
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 75
En premier lieu, il peut être tentant de comparer la somme des primes locales obtenues
selon l’approche univariée (1,29 millions de dollars) avec la prime nationale obtenue
selon l’approche multivariée (8,68 millions de dollars). Cependant, il n’est pas forcément
raisonnable de répartir le montant de couverture national uniformément sur les 28 cellules
car les expositions au risque sont différentes. En effet, il est plus stratégique pour la
Jamaïque d’allouer un montant de couverture plus important dans les zones à haut
risque. Pour ce faire, nous proposons de créer 28 fonctions de paiement différentes dont
le montant national est réparti selon les expositions des cellules. Nous recalculons la prime
totale avec ces 28 nouvelles fonctions de paiement. La prime totale est de 5,12 millions
de dollars au lieu des 1,29 millions de dollars obtenue avec une fonction de paiement
identique pour toutes les cellules. L’écart entre la modélisation univariée et multivariée
est ainsi réduit mais reste important. Voici plusieurs raisons possibles à cet écart :
— La modélisation des valeurs extrêmes univariées ne prend pas en compte la dé-
pendance des pluies sur les cellules, ce qui sous-estime le montant de prime de la
couverture sur l’ensemble du pays.
— Les fonctions de paiement ne sont pas les mêmes selon les deux approches. Les
points Exhaustion et Attachment sont définis comme des quantiles (Value at Risk
ou VaR) de la distribution de l’indice. Or nous savons que la VaR est une mesure
de risque non sous-additive, en particulier pour des lois de Pareto, ce qui implique
que V aR(Inat =
∑28i Iloc
)>∑28
i V aR (Iloc).
Dans tous les cas, il vaut mieux que le CCRIF propose le contrat national avec tarification
par modélisation multivariée car celui-ci intègre le risque global des indices. Cela dit, il
serait intéressant de rechercher quels sont les paramètres à l’origine de cet écart mais
nous n’avons pas eu le temps nécessaire pour approfondir cet aspect.
Dans la suite, nous analysons la sensibilité de la prime face à des changements de para-
mètre.
8.2 Convergence numérique de la prime
Nous avons vu que la tarification des primes locales et de la prime nationale se base
sur la méthode de Monte-Carlo. Dans les calculs effectués précédemment, nous avons fixé
le nombre de simulations à 10 000. Dans ce paragraphe, nous nous interrogeons sur la
convergence du calcul de prime en fonction du nombre de simulations avec les hypothèses
du chapitre 7.
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 76
8.2.1 Prime locale
La figure 8.1 reproduit l’évolution du montant de la prime totale en fonction du
nombre de simulations des variables X|X > 250. La convergence se stabilise dès 1000
simulations et le résultat des 10 000 simulations est de 1 290 180 $ (les montants sont
divisés par 10 000 dans les graphiques).
Figure 8.1: Convergence des simulations de Monte-Carlo pour la prime pure locale
8.2.2 Prime nationale
De la même manière, nous avons analysé la convergence de la prime nationale en
fonction du nombre de simulations. Le résultat est stable à partir de 5000 simulations.
Pour rappel, la prime calculée pour 10 000 simulations était de 8,69 millions de dollars.
Selon l’intervalle de confiance à 5% obtenu par le théorème central limite, la prime est
fiable à 400 dollars près.
0 5000 10000 15000 20000
040
080
012
00
Prime en fonction du nombre de simulation
Nombre de simulations
Prim
e na
tiona
le
Figure 8.2: Convergence des simulations de Monte-Carlo pour la prime nationale
En résumé, le nombre de 10 000 simulations est suffisant dans le calcul de nos primes.
Dans la suite, nous gardons ce paramètre pour analyser les risques liés au choix de modèle.
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 77
8.3 Les risques de modèle
La prime du produit XSR exigée par le CCRIF dépend du modèle choisi pour l’indice
paramétrique. Dans ce paragraphe, nous nous proposons de tester la sensibilité du calcul
de la prime face à un changement de modèle.
8.3.1 Choix de modèle GEV
i. Impact sur les primes locales
Dans la partie précédente, nous avons calculé des primes pures locales grâce à un
modèle de dépassement de seuil des pluies agrégées. Le modèle sous-jacent a pour para-
mètre de forme ξ > 0 (Fréchet) sur 24 cellules et ξ < 0 (Weibull) sur 4 cellules. Pour
rappel, nous avions effectué un test de Student sur le paramètre ξ de la ville de Kingston
et avions conclu qu’il n’était pas significatif. En choisissant ξ > 0, nous considérons que
les queues de distribution sont plus épaisses que dans le cas ξ = 0 (Gumbel), ce qui a
priori augmenterait la prime pure du contrat. C’est pourquoi nous recalculons les primes
en estimant à nouveau les modèles de dépassement sous la contrainte ξ = 0 pour les 28
cellules (cf. annexe B). Les primes sont recalculées sur les 28 couvertures locales dont le
montant limite de couverture est de 1 million de dollars. La prime totale est de 916 000
$ qui est à comparer avec les 1,29 millions de $ obtenues lorsque ξ 6= 0. La prime pure
est alors abaissée de 40%, ce qui est non négligeable. Cela illustre la problématique de
sélection du modèle de dépassement de seuil des pluies agrégées.
ii. Impact sur la prime nationale
De la même manière, nous avons simulé à nouveau la distribution jointe des pluies 5
jours sous la contrainte ξ = 0. A partir de celle-ci, nous en déduisons une distribution de
l’indice paramétrique national.
Avant de passer à la tarification du contrat XSR, nous comparons tout d’abord la nouvelle
distribution avec la distribution lorsque ξ 6= 0. Par la figure 8.3, nous pouvons voir que
la nouvelle distribution de l’indice national fournit une queue de distribution plus fine.
Cela est réconfortant car nous avons des marginales de Gumbel (ξ = 0) qui fournissent
une queue de distribution plus fine que les lois de Fréchet (ξ > 0). Nous comparons dans
la table 8.1 les quantiles de la distribution simulée lorsque ξ = 0 et lorsque ξ 6= 0. Les
niveaux de quantiles de la nouvelle distribution sont nettement en baisse, ce qui ne sera
pas sans impact sur la prime nationale.
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 78
0 20 40 60 80 100
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Index
Pro
babi
lity
ξ>0ξ=0
Figure 8.3: Distribution de l’indice national selon la valeur de ξ
Période de retour Quantile Indice lorsque ξ 6= 0 Indice lorsque ξ = 0
1/2 ans 75% 4,94 3,411/5 ans 90% 14,23 9,321/10 ans 95% 23,65 14,791/20 ans 97.5% 34,14 20,77
Table 8.1: Quantile et période de retour de l’indice national
Avec les mêmes hypothèses du chapitre 7, la prime pure calculée est égale à 6,20 millions
lorsque ξ = 0 contre 8,68 millions lorsque ξ 6= 0, soit une baisse de 28 %. La prime
est donc un peu moins sensible au changement de modèle multivarié par rapport au
changement de modèle univarié.
Le fait de choisir la loi Gumbel pour modéliser les dépassements des pluies 5 jours permet
à l’assureur de faire baisser le tarif du contrat. Cela rend le contrat XSR plus attratif
pour les bénificaires potentiels mais en échange l’assureur prend plus de risque liée à la
sous-estimation des extrêmes.
8.3.2 Choix de copule
Dans ce paragraphe, nous revenons sur le choix de la copule gaussienne et nous
interrogeons sur l’adéquation de ce choix à notre problématique.
Pour rappel, la copule gaussienne est souvent utilisée pour modéliser la corrélation des
risques en finance car elle est simple à utiliser et à paramétrer. La structure de dépendance
de la copule gaussienne est représentée par la matrice de variance Γ. Dans le cas où nous
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 79
souhaitons modéliser la dépendance entre 28 variables aléatoires, la copule gaussienne
apparait comme un candidat opérationnel.
Cependant, il est souvent reproché à la copule gaussienne de ne pas pouvoir modéliser
la dépendance des risques extrêmes. La modélisation de l’indice paramétrique reposant
sur le dépassement des pluies agrégées 5 jours, leur corrélation doit être prise en compte.
Afin de quantifier la dépendance des valeurs extrêmes, nous introduisons une mesure plus
adaptée que le tau de Kendall et le rho de Spearman (c.f 6)
Définition 8.1. Soit (X,Y ) couple de variables aléatoires, X ∼ F , Y ∼ G :
1. Le coefficient de queue supérieure de (X,Y ) est :
λu = limt−→1−
P (G(Y ) > t|F (X) > t)
= limt−→1−
P (G(Y ) > t, F (X) > t)
P(F (X) > t)
2. Le coefficient de queue inférieure de (X,Y ) est :
λl = limt−→0+
P (G(Y ) < t|F (X) < t)
= limt−→0+
P (G(Y ) < t, F (X) < t)
P(F (X) < t)
Les coefficients de dépendance de queue sont des limites des probabilités condition-
nelles respectives P (G(Y ) < t|F (X) < t) (coefficient inférieur) et P (G(Y ) > t|F (X) > t)
(coefficient supérieur) lors que t tend respectivement vers 0 et 1. Afin de pouvoir représen-
ter graphiquement le comportement limite de ces coefficients, il est préférable d’utiliser
les fonctions suivantes :L(t) = P(F (X)≤t,G(Y )≤t)
P(F (X)≤t) pour la queue de distribution inférieure
R(t) = P(F (X)≥t,G(Y )≥t)P(F (X)≥t) pour la queue de distribution supérieure
Pour étudier la structure de dépendance des extrêmes entre les cellules, nous nous fo-
calisons sur deux cellules particulières qui sont la 20 et la 21. Pour rappel, la cellule 20
contient l’agglomération de Kingston tandis que la 21 se situe au nord de Kingston. Ce
sont les deux coefficients d’exposition les plus élévés parmi les 28 zones.
Sur la figure 8.4, nous avons représenté en trait noir plein d’une part la courbe (u, L(u))
pour 0 < u < 0, 5 et d’autre part (u,R(u)) pour 0, 5 < u < 1 sur les données historiques.
Les valeurs de R(u) et L(u) pour u = 0, 5 sont toutes les deux égales à 0, 81. Cette valeur
coincïde avec la covariance estimée 1 pour la copule gaussienne associé à l’indice national.
1. estimation par la méthode d’inversion du tau de Kendall
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 80
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Queue inf. Queue sup.
Figure 8.4: Corrélation en fonction de quantile sur les données historiques (noir) et lesdonnées simulées par copule Gausienne (rouge)
Notons que pour les quantiles supérieurs à 90%, la dépendance en queue supérieure est
instable car le nombre d’observations est réduit. De manière globale, la corrélation est
plus forte pour les grandes valeurs que pour les petites valeurs. Cela est réconfortant
dans la mesure où les deux régions sont voisines et donc vraisemblablement impactées
de la même manière lors de la traversée d’une pluie torrentielle. Le profil de dépendance
entre ces deux régions est asymétrique par rapport au quantile 50%.
De la même manière, nous avons représenté en trait plein rouge les mêmes courbes mais
sur les données simulées à l’aide de la copule gaussienne. Rappelons que le paramètre de
corrélation pour la copule gaussienne est estimé à 0, 81. Le graphique nous permet de
visualiser comment les queues de distribution sont modélisées par la copule gaussienne.
Nous constatons en premier lieu que la copule gaussienne modélise de manière symétrique
(par rapport au quantile 50%) la dépendance de queue. Pour des valeurs intermédiaires,
situées entre les quantiles 40% et 60%, la copule gaussienne modélise de manière conve-
nable leur dépendance. Cependant, pour des valeurs extrêmes, la dépendance modélisée
par copule gaussienne est loin d’être convaincante. En effet, la corrélation de queue infé-
rieure est sur-estimée tandis que la corrélation de queue supérieure est sous-estimée en
raison du profil asymétrique de la dépendance historique. Etant donné que la modéli-
sation du produit XSR s’appuie essentiellement sur la queue supérieure de distribution,
une sous-estimation de la dépendance de celles-ci se traduirait en une sous-estimation de
la prime nationale.
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 81
Pour remédier à ce problème, nous avons tenté d’utiliser la copule bivariée de Gumbel
plus reconnue pour modéliser la dépendance des extrêmes.
Définition 8.2. Copule de Gumbel bivariée
La copule de Gumbel est défnie par la fonction bivariée :
Cα(u, v) = exp−[(− lnu)α + (− ln v)α]1/α,
où α ≥ 1 est le paramètre de la copule.
Le paramètre α de la copule de Gumbel permet de spécifier le comportement de la
dépendance en queue supérieure. Nous représentons la fonction Cα en fonction de (u, v)
pour α ∈ 2; 3 dans la figure 8.5. Comme l’on peut constater sur le tracé, pour des
valeurs de u et v proches de 1, la concentration des points devient importante dès lorsque
α augmente, ce qui signifie que la dépendance en queue supérieure est d’autant plus forte
que le paramètre α est grand.
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
u
v
(a) α = 2
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
u
v
(b) α = 3
Figure 8.5: Tracé (u,v) de la copule de Gumbel
Sans entrer plus en détails, nous avons utilisé la copule de Gumbel pour modéliser conjoin-
tement les dépassements des pluies des cellules 20 et 21. Les fonctions de dépendances
L(u) et R(u) sont ainsi re-calculées dans le cas de la copule de Gumbel. Elles sont repré-
sentées en trait bleu plein sur la figure 8.6.
Le profil de dépendance fourni par la copule de Gumbel est désormais asymétrique. La
dépendance en queue inférieure de distribution est beaucoup plus faible que celle en
queue supérieure. La fonction de dépendance inférieure L est une arc de parabole pour
des quantiles entre 0 et 50% tandis que la fonction R est plutôt linéaire décroissante
pour des quantiles supérieures à 50%. Il est à noter que la valeur de la dépendance au
quantile 50 % coincïde pour les trois courbes (historiques, copule Normale et copule
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 82
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
0.0
0.2
0.4
0.6
0.8
1.0
Queue inf. Queue sup.
Figure 8.6: Corrélation en fonction du quantile de la copule Gumbel
de Gumbel). Nous notons aussi que la copule de Gumbel reproduit de manière plutôt
convenable la dépendance en queue supérieure, surtout pour des quantiles entre 50%
et 90% (le comportement de R sur les données historiques est très aléatoire au delà
de 0,9 à cause du nombre d’observations). De plus, la calibration de la dépendance de
queue inférieure par la copule de Gumbel est meilleure que celle fournie par la copule
Gaussienne. L’utilisation de la copule de Gumbel est donc plus adaptée au problème de
dépassement de seuil dans le cas bidimensionnel.
Cependant, l’utilisation de la copule de Gumbel multidimensionnelle n’est plus adaptée
à notre problème lorsque la dimension est supérieure à 2. En effet, la copule de Gumbel
multidimensionnelle est toujours paramétrée par un seul paramètre α. Il est imprudent
de vouloir modéliser la structure de dépendance mutelle entre 28 cellules par 1 seul
paramètre. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avons privilégié l’utilisation de la
copule gausienne en dimension 28. Cela dit, il est toujours possible d’utiliser la copule
de Gumbel mais il faudrait faire appel aux copules de type Nested Archimedean Copulas.
Leur connaissance et application dépassent le cadre de notre mémoire.
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 83
8.4 Calcul de sensibilités
8.4.1 Changement de la base d’estimation
Jusqu’à présent, les primes pures ont été estimées sur l’ensemble des pluies annuelles.
En effet, le produit XSR est censé protéger la Jamaïque sur toute l’année de souscription
du contrat. Si le CCRIF proposait une couverture par mois, alors la prime serait bien plus
importante en Mai qu’en Janvier. En proposant une couverture annuelle, le CCRIF se
heurte au problème de sous-tarification de la prime car le calcul ne prend pas en compte
la saisonnalité des pluies. Nous nous proposons d’estimer la prime pure lorsque la base
d’estimation ne comporte que les pluies de la saison pluvieuse de Mai à Décembre. Les
lois des indices locaux sont estimées à nouveau sur les 28 cellules. La nouvelle prime pure
résultant des 10 000 simulations de l’indice locale est de 932 000 $ lorsque ξ = 0 et de 1,27
millions $ de lorsque ξ 6= 0. En d’autre terme, la prime augmente de 1,7% lorsque seule
la saison des pluies sert à l’estimation des lois de Pareto pour ξ = 0 . Paradoxalement,
la prime diminue de 1,5% lorsque seule la saison des pluies sert à l’estimation des lois
de Pareto pour ξ 6= 0. Le paramètre d’échelle augmente car les pluies sont plus intenses
pendant la saison des pluies. Les pluies sont en revanche moins dispersées que sur la
totalité de l’année ce qui a pour conséquence de diminuer le paramètre d’échelle σ. Le
deuxième effet étant plus important que le premier, la somme σ + ξ × (250 − 100) va
faiblement diminuer rendant la prime plus faible que lors du premier calcul. Cependant,
l’effet reste négligeable par rapport à la sensibilité de la prime calculée dans le paragraphe
8.3.1.
8.4.2 Changement du seuil d’estimation
Pour rappel, les paramètres sont estimés sur un échantillon dont le seuil u0 est sé-
lectionné visuellement (cf. chapitre 5). N’ayant pu automatiser cette phase, nous avons
choisi le seuil de la cellule de Kingston (100 mm) sur les 28 cellules afin d’estimer les lois
GPD puis nous avons déduit les lois de dépassement du seuil 250 mm. Nous testons la
sensibilité du calcul des primes locales face au changement du seuil de modélisation u0.
L’augmentation du seuil provoque deux effets opposés plus connus sous le nom de biais-
variance. En augmentant le seuil u0, les pluies extrêmes sélectionnées sont en moyenne
plus intenses ce qui diminue le biais des estimateurs du dépassement de 250 mm. En
revanche, le nombre d’événements sélectionnés est moins important ce qui augmente la
variance des estimateurs. Les primes ont été calculées pour des seuils variant de 50 à 240
mm.
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 84
Lorsque le paramètre de forme est choisi nul, la prime totale augmente car le modèle
de Gumbel ne prend en compte qu’un paramètre d’échelle représentant la moyenne des
dépassements. La prime varie de 753 000 $ à 1 116 000 $ en fonction du seuil choisi
lorsque ξ = 0. L’évolution des primes en fonction du seuil u0 est représentée dans la
figure 8.7. La prime étant croissante en fonction du seuil de sélection, c’est l’effet biais 2
qui l’emporte sur l’effet variance 3.
50 100 150 200
8090
100
110
Prime en fonction du seuil de sélection
Seuil de sélection
Prim
e to
tale
Figure 8.7: Variation de la prime en fonction du seuil (ξ = 0)
En revanche, lorsque le modèle spécifie un paramètre ξ 6= 0, alors l’effet variance l’em-
porte sur l’effet biais car la prime estimée décroit avec le seuil de sélection d’après la
figure 8.8 .
50 100 150 200
105
115
125
135
Prime en fonction du seuil de sélection (Ksi<>0)
Seuil de sélection
Prim
e to
tale
Figure 8.8: Variation de la prime en fonction du seuil (ξ 6= 0)
En conséquence, si l’on choisit un seuil de sélection trop grande, la prime risque d’être
sous-estimée. Nous preférons un modèle qui discrimine cet effet. C’est la raison pour la
quelle il vaut mieux utiliser un modèle où ξ 6= 0.
2. Diminution du biais avec l’augmentation du seuil3. Augmentation de la variance avec l’augmentation du seuil
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 85
8.4.3 Changement des paramètres de la courbe de vulnérabilité
Comme énoncé dans le chapitre 3, la fonction de vulnérabilité reliant le pic d’un
événement local au pourcentage d’indemnité ne nous a pas été communiquée. Dès lors,
nous avons choisi de calculer les indices sur base d’une fonction de vulnérabilité linéaire
avec un seuil maximal B=800 mm et un taux d’indémnité maximal C=100%. Nous nous
proposons de démontrer que la modification des paramètres B et C n’a pas d’influence
majeure sur les primes calculées.
i. Calibration du paramètre C
La fonction de vulnérabilité reliant une précipitation à un pourcentage de destruction,
il serait légitime d’estimer un paramètre C reflétant un pourcentage historique lié aux
pluies torrentielles. Pour ce faire, nous utilisons les 6 données historiques de pertes afin
de calibrer un modèle linéaire sur fonction de dommage modifiée 4. Pour chacune des
6 catastrophes, nous prenons comme abscisse le maximum par cellule des pics de pluie
enregistrés lors de l’épisode et comme ordonné le pourcentage des pertes 5 par rapport
au PIB de la Jamaïque.
Catastrophe naturelle Pertes en % du PIB Max des pics deprécipitation (en mm)
Ouragan Michelle 0,8 306Pluie torrentielle Juin 0,02 407Ouragan Ivan 1,6 378Ouragan Wilma 0,7 358Tempête tropicale Gustav 2 419Tempête tropicale Nicole 1,9 503
Table 8.2: Pertes liées au catastrophe naturelle en fonction du pic de précipitation
Nous pouvons estimer un coefficient directeur de la vulnérabilité entre 250 mm et 800
mm par la méthode des moindres carrés ordinaires. Nous pouvons dans un second temps
déduire le taux d’indemnité limite C. Nous ne prenons pas en compte les pertes liées aux
pluies torrentielles en Juin car elles sont trop petites par rapport à la tendance historique
des autres pertes. Le calcul donne un coefficient directeur égal à 0.0084. On en déduit
que C = (800− 250)× 0.0084 = 4, 62% (cf. figure 8.9).
4. L’abscisse est une précipitation en mm et non plus un indice comme précédemment5. Les pertes ont été ajustées par les dommages liés à la force du vent.
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 86
0 200 400 600 800 1000
01
23
4
Estimation de la vulnérabilité par les pertes historiques
pic de précipitation en mm
Per
tes
en %
du
PIB
− Estimation de C=4.62%
Figure 8.9: Calibration de C sur les données historiques
ii. Impact sur la prime locale
Après avoir modifié le paramètre C de la fonction de vulnérabilité, nous recalculons
la prime locale sur les 28 cellules avec les hypothèses du chapitre 7. La prime totale reste
égale à 1,29 millions de dollars. En prenant différentes valeurs de C, nous réalisons que
la prime n’est pas modifiée. En effet, la valeur des quantiles des événements historique
change en même temps que la fonction de vulnérabilité est modifiée ce qui permet de
rendre la prime consistante.
Dans la même idée, il est possible de modifier le paramètre B. On fait varier B entre
600 et 10 000 mm. La prime totale n’est pas modifié et converge vers la valeur de 1,314
millions de dollars, soit une augmentation de 1,5% par rapport au calcul original.
iii. Impact sur la prime nationale
De même, nous calculons l’impact lié à la modification de la fonction de vulnérabilité
sur la prime nationale.
Comme pour les primes locales, cette dernière est insensible au changement de paramètre
C et reste toujours à 8,68 millions de dollars.
Lorsque B = 10 000 mm, la prime augmente de 0,04 % par calcul original, soit 8,72
millions de dollars. Pour B = 600 mm, la prime est de 8,52 millions de dollars, soit une
baisse de 2% par rapport à l’hypothèse initiale B = 800 mm.
En conclusion, le calcul de prime est peu sensible à la modification de la fonction de
vulnérabilité. Cependant, le choix du modèle de valeurs extrêmes est important dans
Chapitre 8. Risques de modèle et calcul de sensibilités 87
la mesure où la prime diminue de 40% si le modèle utilisé considère des queues de
distribution moins épaisses.
Pour limiter l’impact de la sous-estimation de la prime, le CCRIF a la possibilité à faire
appel à des acteurs externes afin de transférer une partie du risque supporté. C’est ce
que nous allons voir dans le dernier chapitre de ce mémoire.
Chapitre 9
Les mesures de transfert de risque
du produit XSR
Après avoir calculé les primes et les avoir confrontées à plusieurs sensibilités, ce
dernier chapitre a pour but d’ouvrir sur les concepts de transfert de risque potentiels
liés au produit XSR. Dans un premier temps, nous allons discuter des techniques de
réduction du coût de la prime. Nous allons ensuite introduire la notion de réassurance et
son impact dans la tarification du contrat. Enfin, nous parlerons du transfert potentiel
de risque sur les marchés financiers via la titrisation. Dans ce chapitre, nous considérons
uniquement le contrat basé sur l’indice national.
9.1 La diminution du coût de la prime
9.1.1 Modification de la fonction de paiement
Pour un montant de couverture de 28 millions de dollars, nous avons calculé que la
prime anuelle pure du contrat XSR national devait être de 8,68 millions de dollars. Les
bornes Attachment et Exhaustion sont choisies de sorte que les 29 événements nationaux
des 15 dernières années soient couverts. Cette prime représente 30% du montant de cou-
verture limite, ce qui est peu abordable pour un pays comme la Jamaïque. En pratique,
le montant de la prime peut être réduit de deux façons :
— La prime étant proportionnelle à la limite de couverture, cette dernière peut être
allégée. A titre d’exemple, la prime est 1 000e si le montant de couverture est
réduit à 3 225e.
88
Chapitre 9. Les mesures de transfert de risque du produit XSR 89
— Les bornes Attachment et Exhaustion peuvent être modifiées selon le niveau de
risque choisi par le pays. La prime de 8,68 millions de dollars est calculée avec une
borne Attachment égale au plus petit indice national historique, qui correspond à
une période de retour moyenne bi-annuelle (deux paiements par ans). Le nombre
moyen de paiement pourrait donc être réduit en augmentant la borne Attchament.
A titre de comparaison, le montant limite de couverture du produit Ouragan est de 57
millions de dollars et les bornes Attachment et Exhaustion sont définies respectivement
comme des périodes de retour moyennes de 1/30 ans et 1/250 ans. Si l’on prend les
paramètres Coverage Limit, Attachment et Exhaustion comme ceux du produit Ouragan,
la prime du produit XSR est réduite à 1,85 millions d’euros ce qui est proche des 2,1
millions d’euros de prime contre les Ouragan (cf. [7]). Même si le ratio prime/couverture
passe de 30,1% à 3,2%, la prime reste toujours élevée pour un pays comme la Jamaïque.
9.1.2 Nécessité de l’apport des bailleurs de fonds
Comme nous venons de le voir, le ratio de prime/couverture est relativement élevé à
cause du profil de risque de la Jamaïque. Le but du CCRIF est de rendre accessible son
produit contre les pluies torrentielles. Ce dernier peut réduire les coûts commerciaux de
la prime. Pour ce faire, le CCRIF reçoit des fonds publics (cf. chapitre 1) et des fonds
privés de la part des actionnaires afin de créer un pool XSR capable de soutenir le risque
lié à la sous-tarification potentielle de la prime. Ce mécanisme appliqué à la couverture
contre les Ouragans a permis au CCRIF de diviser la prime réclamée au pays par deux.
Selon Simon Young 1, une allocation en capital plus importante permettrait de souscrire
jusqu’à deux fois plus de contrats dans les autres pays des Caraïbes. Ceci permettrait
de diminuer la dépendance du produit en réassurance et diminuerait donc le coût des
chargements inclus dans la prime commerciale. Nous allons montrer dans les prochains
paragraphes quels sont les moyens dont le CCRIF dipose pour céder ses risques.
1. Président de la société Caribbean Risk Managers, partenaire du CCRIF. Source :http://www.ccrif.org