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Chapitre 5Espaces vectoriels normés
Dans tout ce chapitre, K désigne R ou C.
5.1 Normes5.1.1 Définitions et exemplesa) Définition
Soit E un K-espace vectoriel.
Définition (norme)Une norme sur E est une application N : E ≠æ R
vérifiant les trois propriétés suivantes :
1. ’x œ E, N(x) > 0, avec égalité si, et seulement si, x =
02. ’x œ E, ’⁄ œ K, N(⁄x) = |⁄|N(x)3. ’x, y œ E, N(x + y) 6 N(x) +
N(y) (inégalité triangulaire).
Un espace vectoriel muni d’une norme est appelé espace vectoriel
normé. La norme d’un vecteur estsouvent notée ||x|| au lieu de
N(x).
Exemple 1. Si E est un R-espace vectoriel muni d’un produit
scalaire noté È· | ·Í, la norme || · || définiepar
||x|| =
Èx | xÍ
est bien une norme au sens défini ci-dessus.
Remarque 1. Dans un espace vectoriel normé, on a aussi l’autre
inégalité triangulaire :--||x|| ≠ ||y||
-- 6 ||x + y||.
En e�et, il su�t d’écrire||x|| = ||(x + y) + (≠y)|| 6 ||x + y||
+ ||y||
et||y|| = ||(x + y) + (≠x)|| 6 ||x + y|| + ||x||
pour obtenir l’encadrement souhaité.
Une norme sur un espace vectoriel permet de mesurer la distance
entre deux vecteurs :
Définition (distance)Soit || · || une norme sur l’espace
vectoriel E. La distance associée est l’application
d : E ◊ E ≠æ R+(x, y) ‘≠æ d(x, y) = ||x ≠ y||
.
Elle vérifie les propriétés suivantes :
73
-
74 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
1. ’x, y œ E, d(x, y) = 0 ≈∆ y = x2. ’x, y, z œ E, d(x, z) 6
d(x, y) + d(y, z)
(en e�et, il su�t d’écrire que z ≠ x = (z ≠ y) + (y ≠ x)).
b) Normes usuelles sur Kn
Exemple 2. Sur l’espace E = Rn, la norme euclidienne est définie
par
’x = (x1, . . . , xn), ||x||2 =Ò
x21 + · · · + x2n :
c’est la norme associée au produit scalaire canonique sur
Rn.
Exemple 3. Sur l’espace E = Cn, la norme hermitienne est définie
par
’x = (x1, . . . , xn), ||x||2 =
|x1|2 + · · · + |xn|2 =Ô
x1x1 + · · · + xnxn.
La seule chose non évidente à vérifier est l’inégalité
triangulaire. Pour la vérifier, considérons deux vecteursx et y de
Cn. Il s’agit de démontrer que
nÿ
i=1|x
i
+ yi
|2 6nÿ
i=1|x
i
|2 +nÿ
i=1|y
i
|2 + 2ı̂ıÙ
nÿ
i=1|x
i
|2ı̂ıÙ
nÿ
i=1|y
i
|2,
soit encore, en développant le membre de gauche, que
2ŸeA
nÿ
i=1x
i
yi
B6 2
ı̂ıÙnÿ
i=1|x
i
|2ı̂ıÙ
nÿ
i=1|y
i
|2.
Pour cela, il su�t de démontrer que-----
nÿ
i=1x
i
yi
----- 6ı̂ıÙ
nÿ
i=1x
i
xi
ı̂ıÙnÿ
j=1y
j
yj
,
ce qui s’écrit encoreA
nÿ
i=1x
i
yi
B Q
anÿ
j=1x
j
yj
R
b 6A
nÿ
i=1x
i
xi
B Q
anÿ
j=1y
j
yj
R
b ,
soit Anÿ
i=1x
i
yi
B Q
anÿ
j=1x
j
yj
R
b 6A
nÿ
i=1x
i
xi
B Q
anÿ
j=1y
j
yj
R
b ,
ou encore ÿ
16i,j6nx
i
yi
xj
yj
6ÿ
16i,j6nx
i
xi
yj
yj
.
Après suppression des termes correspondant à j = i, égaux des
deux côtes de l’inégalité et regroupementdu terme obtenu pour le
couple (i, j) (i > j) avec celui obtenu pour le couple (j, i),
il reste à démontrerque
0 6ÿ
16i
-
5.1. Normes 75
Exemple 4. Sur Kn, l’application || · ||1 définie par
’x = (x1, . . . , xn) œ Kn, ||x||1 = |x1| + · · · + |xn|
est une norme. En e�et, les deux premières propriétés sont
clairement vérifiées. Démontrons l’inégalitétriangulaire. Pour
cela, choisissons deux vecteurs x, y œ Kn. On a alors
||x + y||1 = |x1 + y1| + · · · + |xn + yn| 6 |x1| + |y1| + · · ·
+ |xn| + |yn| = ||x||1 + ||y||1.
Dans le cas réel, cette norme n’est pas issue d’un produit
scalaire : sinon, on retrouverait le produitscalaire par la
formule
Èx | yÍ = ||x + y||21 ≠ ||x||21 ≠ ||y||21
2 .
Or, à y fixé, l’application x ‘æ ||x+y||21≠||x||
21≠||y||
21
2 n’est pas linéaire !
Exemple 5. Sur le même espace Kn, l’application || · ||Œ définie
par :
’x = (x1, . . . , xn) œ Kn, ||x||Œ = max(|x1|, . . . , |xn|)
est également une norme. À nouveau, seule l’inégalité
triangulaire n’est pas triviale. Choisissons deuxvecteurs x, y œ
Kn. Considérons ensuite l’entier p (resp. q) tel que
|xp
| = max(|x1|, . . . , |xn|) = ||x||Œ et |yq| = max(|y1|, . . . ,
|yn|) = ||y||Œ.
Pour tout entier i œ [[1, n]], on a
|xi
+ yi
| 6 |xi
| + |yi
| 6 |xp
| + |yq
| = ||x||Œ + ||y||Œ.
L’inégalité étant valable pour tout entier i œ [[1, n]], on en
déduit que
max(|x1 + y1|, . . . , |xn + yn|) 6 ||x||Œ + ||y||Œ,
c’est-à-dire la formule ||x+y||Œ 6 ||x||Œ +||y||Œ. Cette norme
n’est pas non plus issue d’un produit scalaire.
c) Normes dans les espaces de fonctions
On peut mesurer la distance entre fonctions de bien des façons
di�érentes. En voici deux, dont nousverrons qu’elles sont bien
di�érentes l’une de l’autre.
Norme uniforme
Soit E = B(I,K) l’ensemble des fonctions bornées d’un intervalle
I de R (ou réunion d’intervalles) àvaleurs dans K. Notons, pour f œ
E,
||f ||Œ = suptœI
|f(t)|
(ce qui a bien un sens car la fonction f est bornée). Démontrons
que l’application || · ||Œ définit une normesur E.– On a ||f ||Œ
> 0 pour toute fonction f œ E, avec égalité si, et seulement si,
la fonction f est la fonctionnulle.– Pour tout scalaire ⁄ œ K, on a
également ||⁄f ||Œ = |⁄| ||f ||Œ.– Démontrons que l’inégalité
triangulaire est également vérifiée. Pour cela, soient f, g deux
fonctionsappartenant à E. Pour tout réel t œ I, on a
|(f + g)(t)| = |f(t) + g(t)| 6 |f(t)| + |g(t)| 6 ||f ||Œ +
||g||Œ.
Par suite, on asuptœI
|(f + g)(t)| 6 ||f ||Œ + ||g||Œ,
soit||f + g||Œ 6 ||f ||Œ + ||g||Œ.
Définition (norme uniforme)La norme || · ||Œ sur l’espace E est
appelée norme uniforme (ou norme de la convergence uniforme,
ounorme infini).
-
76 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
Remarque 2. Si I est un segment de R (rappelons que c’est un
intervalle fermé et borné, du type [a, b]),toutes les fonctions
continues définies sur I sont bornées. L’application || · ||Œ
définit donc une norme surl’espace C ([a, b],K).
Remarque 3. Une fonction périodique définie sur R et continue
est également bornée : en e�et, si Test une période de f , la
fonction est bornée sur le segment [0, T ], donc sur R (elle
reprend les mêmesvaleurs que sur le segment [0, T ]...).
L’application || · ||Œ définit donc une norme sur l’espace des
fonctionsT -périodiques continues.
Norme de la convergence en moyenne
Rappelons que, si I est un intervalle, on note L1c
(I,K) l’ensemble des fonctions continues définies sur I,à
valeurs dans K et intégrables, et que cet ensemble est un K-espace
vectoriel.
Proposition (norme de la convergence en moyenne)L’application f
‘æ ||f ||1 =
sI
|f | est une norme sur L1c
(I,K), appelée norme de la convergence enmoyenne.
Démonstration. Soient f, g œ L1c
(I,K) et ⁄ un scalaire. On a :
||⁄f ||1 =⁄
I
|⁄f | = |⁄|⁄
I
|f | = |⁄| · ||f ||1
et, pour tout t œ I, |f(t) + g(t)| 6 |f(t)| + |g(t)|, d’où
||f + g||1 =⁄
I
|f + g| 6⁄
I
|f | + |g| =⁄
I
|f | +⁄
I
|g| = ||f ||1 + ||g||1.
On a bien sûr ||f ||1 > 0. De plus, si ||f ||1 = 0, i.e.
sis
I
|f | = 0, alors la fonction |f | est la fonction nulle(car elle
est continue et positive), donc f = 0.
5.1.2 Ouverts, fermésDans la suite, E désigne un K-espace
vectoriel muni d’une norme, notée || · ||. La distance associée
est
notée d.
Définition (boules et sphères)Soit a un point de E, r un réel
strictement positif. La boule ouverte (resp. boule fermée) de
centre aet de rayon r est l’ensemble
B(a, r) = {x œ E | d(a, x) < r}resp.
Bf
(a, r) = {x œ E | d(a, x) 6 r}.La sphère de centre a et de rayon
r est l’ensemble
S (a, r) = {x œ E | d(a, x) = r}.
B(a, r)
a
r
Bf
(a, r)
a
r
S (a, r)
a
r
Figure 5.1 – Boules et sphères
-
5.1. Normes 77
Définition (partie ouverte)Une partie U non vide de E est dite
ouverte si, et seulement si,
’a œ U, ÷Á > 0 | B(a, Á) µ U.
On convient que l’ensemble vide est ouvert.
a
Á
U
Figure 5.2 – Une partie ouverte
Exemple 1. Dans R2 muni de la norme euclidienne, considérons U1
= {x = (x1, x2) œ R2 | x1 > 0}.
a
a1
Á
U1
x10
La partie U1 est un ouvert : en e�et, soit a = (a1, a2) œ U1 :
alors a1 > 0. Posons Á = a1/2 : on aB(a, Á) µ U1.
Exemple 2. Considérons maintenant U2 = {x = (x1, x2) œ R2 | x1
> 0}.
U2
x1
La partie U2 n’est pas un ouvert : en e�et, considérons le point
O = (0, 0) œ U2. Pour tout réel Á > 0, laboule B(O, Á) « déborde
» de U2 : le point (≠ Á2 , 0) appartient à cette boule mais pas à
U2.
Exemple 3. Une boule ouverte B(a, r) est ouverte
-
78 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
a
xd
Á
En e�et, soit x appartenant à cette boule et d = d(a, x) : on a
0 6 d < r. Alors, pour tout réel Á < r ≠ dla boule B(x, Á)
est incluse dans B(a, r) car, si y appartient à cette boule,
alors
d(a, y) 6 d(a, x) + d(x, y) < d + r ≠ d = r.Exemple 4. Une
boule fermée B
f
(a, r) n’est pas ouverte : en e�et, les points x de la sphère S
(a, r) nevérifient pas la condition : toute boule ouverte de centre
x et de rayon Á, aussi petit ce dernier soit-il,« déborde » de la
boule B
f
(a, r).
a
Définition (partie fermée)Une partie A µ E est dite fermée si,
et seulement si, son complémentaire U = {
E
A est ouvert.
Exemple 5. L’ensemble vide, la partie U2 = {(x1, x2) œ R2 | x1
> 0}, les boules fermées... sont desfermés.
Attention! Dire que les fermés sont les complémentaires des
ouverts ne signifie en aucun cas qu’unepartie est soit ouverte,
soit fermée. De même que dans R pour les intervalles, une partie de
E n’est engénéral ni ouverte ni fermée.
Proposition (intersections et réunions d’ouverts ou de
fermés)Soit E un espace vectoriel normé. Soient A1, . . . , An des
ouverts de E et B1, . . . , Bn des fermés de E.Alors– les ensembles
A1 fl · · · fl An et A1 fi · · · fi An sont ouverts ;– les
ensembles B1 fl · · · fl Bn et B1 fi · · · fi Bn sont fermés.
Démonstration. Démontrons que la partie A = fini=1Ai est
ouverte. Pour cela, choisissons un point a œ A,
et considérons un indice i œ [[1, n]] tel que a appartienne à
l’ouvert Ai
. Il existe un réel Á > 0 tel queB(a, Á) µ A
i
. Ce réel vérifie donc B(a, Á) µ A, donc A est
ouverte.Démontrons maintenant que l’ensemble AÕ = A1 fl · · · fl An
est ouvert. Pour cela, choisissons un point
a œ AÕ. Pour chaque i œ [[1, n]], a appartient à l’ouvert Ai
, donc il existe un réel Ái
tel que B(a, Ái
) µ Ai
.Posons Á = min(Á1, . . . , Án). On a alors B(a, Á) µ Ai pour
tout i œ [[1, n]], donc B(a, Ái) µ AÕ, ce quiprouve que AÕ est
ouvert.
Le résultat sur les fermés s’en déduit pas passage au
complémentaire : en e�et, pour montrer queB = fln
i=1Bi est fermé, il faut montrer que son complémentaire {EB est
ouvert. Or
{E
B = {E
An‹
i=1B
i
B=
n€
i=1{
E
Bi
est ouvert en tant qu’intersection d’un nombre fini d’ouverts,
donc B est fermé. La démonstration estsimilaire pour une
l’union.
-
5.1. Normes 79
Définition (partie bornée)Une partie A de E est dite bornée si,
et seulement si, il existe un réel positif R tel que A µ B(O,
R).
Exemple 6. Les boules ouvertes et fermées sont bornées ; les
parties U1 et U2 des exemples précédents nele sont pas.
Définition (intérieur)Soit A une partie de E. Un point a œ A est
dit intérieur à A si, et seulement si, il existe un réel Á >
0tel que B(a, Á) µ A.L’ensemble des points intérieurs à A est
noté
¶A : c’est l’intérieur de A (c’est une partie de A).
Remarque 1. Une partie A est donc ouverte si, et seulement si,
elle est égale à son intérieur. Dans lesautres cas, l’inclusion
¶Aµ A est stricte.
Définition (adhérence)Soit A une partie de E et x un point de E.
On dit que x est adhérent à A si, et seulement si, touteboule
ouverte de centre x rencontre A.L’ensemble des points adhérents à A
est noté A : c’est l’adhérence de A.
a /œ A
A
a œ A
A
Autrement dit : les points de l’adhérence A de A sont les points
qui, s’ils n’appartiennent pas néces-sairement à A, en sont aussi
proches que possible (à distance nulle). En particulier, tout point
de A estadhérent à A. C’est en ces points que l’on pourra parler de
limite (éventuelle) d’une fonction définie surla partie A.
Définition (frontière)
La frontière d’une partie A de E est l’ensemble Fr(A) = A\¶
A.
Exemple 7. La frontière de la boule fermée de centre a et de
rayon r est la sphère de centre a et derayon r ; c’est aussi la
frontière de la boule ouverte B(a, r).
Définition (segment)Soient a, b deux vecteurs de E. Le segment
d’extrémités a et b est l’ensemble, noté [a, b], des
vecteurspouvant s’écrire sous la forme x = ta + (1 ≠ t)b, où t œ
[0, 1].
L’application t œ [0, 1] ‘æ ta+(1≠ t)b est une paramétrisation
du segment (pour t = 0, on obtient b, pourt = 1, on obtient a, pour
t = 12 , le milieu de [a, b]).
-
80 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
Définition (partie convexe)Une partie A non vide de E est dite
convexe si, et seulement si, pour tous a, b œ A, le segment [a,
b]est inclus dans A. On convient que l’ensemble vide est
convexe.
Exemple 8. L’ensemble E est convexe ; tout sous-espace vectoriel
de E est convexe.
Proposition (convexité des boules)Toute boule, ouverte ou
fermée, est une partie convexe.
Démonstration. Démontrons le résultat pour la boule ouverte de
centre Ê et de rayon r > 0, la démons-tration est similaire pour
les boules fermées. Soient donc a, b œ B(Ê, r) : ils vérifient d(Ê,
a) < r etd(Ê, b) < r. Il s’agit de montrer que, pour tout
réel t œ [0, 1], le vecteur x = ta + (1 ≠ t)b appartientencore à
B(Ê, r). Pour t = 0 ou t = 1, c’est évident. Dans les autres cas,
on a
d(Ê, x) = ||x ≠ Ê|| = ||ta + (1 ≠ t)b ≠ tÊ ≠ (1 ≠ t)Ê|| = ||t(a
≠ Ê) + (1 ≠ t)(b ≠ Ê)||6 t||a ≠ Ê|| + (1 ≠ t)||b ≠ Ê|| car t > 0
et 1 ≠ t > 0= t d(Ê, a) + (1 ≠ t) d(Ê, b) < tr + (1 ≠ t)r car
t > 0 et 1 ≠ t > 0= r
5.1.3 Suites à valeurs dans EDans tout ce paragraphe, E désigne
un espace vectoriel normé. On note || · || sa norme et d la
distance
associée.
Définition (convergence d’une suite)Soit (x
n
)nœN une suite à valeurs dans E et ¸ un point de E. On dit que
la suite (xn)n converge vers ¸,
on note xn
≠æn æ Œ
¸, si, et seulement si, la suite numérique d(xn
, ¸) tend vers 0 lorsque n tend versl’infini.
En langage formalisé :
xn
≠æn æ Œ
¸ ≈∆ ’Á > 0, ÷N œ N | ’n > N, d(xn
, ¸) 6 Á.
Théorème (unicité de la limite)Soit (x
n
)nœN une suite à valeurs dans E, ¸1 et ¸2 deux points de E. Si
xn ≠æ
n æ Œ¸1 et xn ≠æ
n æ Œ¸2, alors
¸2 = ¸1.
Démonstration. Raisonnons par l’absurde en supposant ¸2 ”= ¸1.
Posons alors Á = d(¸2,¸1)3 : c’est un réelstrictement positif.
Á
¸1
d ¸2
-
5.1. Normes 81
Choisissons deux entiers N1 et N2 tels que, pour tout entier n
> N1 (resp. n > N2), on ait d(xn, ¸1) 6 Á(resp. d(x
n
, ¸2) 6 Á) et considérons l’entier N = max(N1, N2) : il vérifie
N > N1 et N > N2, donc on a
d(¸2, ¸1) 6 d(xN , ¸2) + d(xN , ¸1) 6 Á + Á =2 d(¸2, ¸1)
3 ,
ce qui est absurde.
On pourra donc, dans le cas où une suite admet une limite,
parler de sa limite ; celle-ci sera notée
¸ = limn æ Œ
xn
.
Définition (suite convergente)Une suite est dite convergente si,
et seulement si, elle admet une limite. Dans le cas contraire, elle
estdite divergente.
Remarque 1. Cette notion de convergence d’une suite d’éléments
de E dépend du choix d’une norme surl’espace vectoriel normé. Il
est possible que, pour une certaine norme, la suite (x
n
)n
converge vers unelimite ¸, mais que ce ne soit plus vrai pour
une autre norme.
Exemple 1. Considérons la suite (fn
)n
de fonctions continues sur R+ définies par :
fn
(x) =
Y_]
_[
0 si x 6 n ≠ 1n
ou x > n + 1n
n(x ≠ n + 1n
) si x œ [n ≠ 1n
, n]≠n(x ≠ n ≠ 1
n
) si x œ [n, n + 1n
].
1
n ≠ 1n
nn + 1
n
Ces fonctions appartiennent toutes à l’espace vectoriel E des
fonctions bornées, continues et intégrablessur R+. Considérons les
normes || · ||1 et || · ||Œ sur l’espace E. Nous allons prouver
que, pour la norme|| · ||1, la suite de fonctions (fn)n converge
vers la fonction nulle, alors que ce n’est pas le cas relativementà
la norme || · ||Œ. En e�et, en notant f la fonction nulle, on a,
pour tout n :
||fn
≠ f ||1 =⁄ +Œ
0|f
n
(t)| dt = 1n
≠æn æ Œ
0,
alors que||f
n
≠ f ||Œ = suptœR+
|fn
(t)| = 1
qui ne tend pas vers 0. En particulier, on obtient deux (au
moins) façons de mesurer la distance entredeux fonctions qui sont
fondamentalement di�érentes.
Exemple 2. Sur le même espace E, considérons maintenant la suite
(fn
)n
de fonctions définies par
fn
(x) =
Y_]
_[
0 si x 6 n2 ou x > 32 n2
n
2 (x ≠ n2 ) si x œ [n ≠ 1n , n]≠ 2
n
2 (x ≠ 3n2 ) si x œ [n, 3n2 ].
-
82 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
1n
n
2n 3n
2
Cette fois-ci, la suite converge vers la fonction nulle f au
sens de la norme || · ||Œ car
||fn
≠ f ||Œ = suptœR+
|fn
(t)| = 1n
≠æn æ Œ
0,
alors qu’elle ne converge pas vers cette même fonction au sens
de la norme || · ||1 car
||fn
≠ f ||1 =⁄ +Œ
0|f
n
(t)| dt = 12 ,
qui ne tend pas vers 0.
Proposition (convergence des suites extraites)Soit (x
n
)n
une suite d’éléments de E.– Si la suite converge, toute suite
extraite de E converge vers la même limite.– Réciproquement, s’il
existe un élément ¸ œ E tel que les deux suites extraites (x2n)n et
(x2n+1)n
convergent vers ¸, alors (xn
)n
converge vers ¸.
Proposition (opérations linéaires)Soient (x
n
)n
, (yn
)n
deux suites d’éléments de E et ⁄ un scalaire. On suppose que
xn
≠æ ¸1 et yn ≠æ ¸2.Alors x
n
+ ⁄yn
≠æ ¸1 + ⁄¸2.
Démonstration. En e�et, pour tout entier n, on a
d(xn
+ ⁄yn
, ¸1 + ⁄¸2) = ||(xn + ⁄yn) ≠ (¸1 + ⁄¸2)||= ||(x
n
≠ ¸1) + ⁄(yn ≠ ¸2)||6 ||x
n
≠ ¸1|| + |⁄| ||yn ≠ ¸2|| ≠æn æ Œ
0.
Définition (suite bornée)Une suite (x
n
)n
est dite bornée si, et seulement si, il existe un réel M > 0
tel que, pour tout entier n,on ait ||x
n
|| 6 M .
Proposition
Toute suite convergente est bornée. La réciproque est
fausse.
Théorème (caractérisation séquentielle de l’adhérence)Soit A une
partie de E et a un point de E. Le point a est adhérent à A si, et
seulement si, il existeune suite de points de A qui converge vers
a.
Démonstration. Supposons l’existence d’une telle suite (xn
)n
de points de A et démontrons que a estadhérent à A, i.e. que
pour tout Á > 0, l’ensemble A fl B(a, Á) est non vide. Soit donc
Á > 0 un réel.Choisissons un entier N tel que, pour n > N ,
on ait d(x
n
, a) < Á. Alors xN
appartient à A est vérified(a, x
N
) < Á, donc xN
œ A fl B(a, Á).
-
5.1. Normes 83
Réciproquement, supposons que a soit adhérent à A ; construisons
une suite (xn
)n
de points de A quiconverge vers a. Pour cela, choisissons, pour
chaque entier n > 1, un point x
n
œ A fl B(a, 1n
) : la suite(x
n
)n
convient.
Définition (domination et négligeabilité des suites à valeur
dans E)Soit (u
n
)n
une suite de points de E et (–n
)n
une suite de réels. On dit que la suite u est– dominée par la
suite – si, et seulement si, la suite numérique
!||u
n
||)n
est dominée par la suite –. Onnote u
n
œ O(–n
) ou, abusivement, un
= O(–n
).– négligeable devant la suite – si, et seulement si, la suite
numérique
!||u
n
||)n
est négligeable devantla suite –. On note u
n
œ o(–n
) ou, abusivement, un
= o(–n
).
5.1.4 Limites et continuitéDans tout ce paragraphe, E et F
désignent des espaces vectoriels normés. Leurs normes sont
notées
|| · ||E
et || · ||F
respectivement, les distances associées dE
et dF
.Commençons par définir la notion de limite d’une fonction à
valeurs vectorielles. Pour cela, considérons
une partie A de E, une fonction f : A ≠æ F , a un point adhérent
à A et b un point de F .
Définition (limite d’une fonction vectorielle)On dit que f admet
pour limite b en a si, et seulement si,
’Á > 0, ÷÷ > 0 | ’x œ A,!||x ≠ a||
E
6 ÷ =∆ ||f(x) ≠ b||F
6 Á".
Comme pour les fonctions à valeurs dans K, on a alors le
Théorème (unicité de la limite)Si la fonction f admet deux
limites b1 et b2 en a, alors b1 = b2.
Démonstration. Raisonnons par l’absurde en supposant b2 ”= b1.
Posons alors Á = ||b2≠b1||F3 : c’est un réelstrictement positif.
Choisissons deux réels ÷1 > 0 et ÷2 > 0 tels que, pour tout
point x œ A, on ait
!||x ≠ a||
E
6 ÷1 =∆ ||f(x) ≠ b1||F 6 Á"
et!||x ≠ a||
E
6 ÷2 =∆ ||f(x) ≠ b2||F 6 Á".
Posons ÷ = min(÷1, ÷2) et choisissons un point x œ A vérifiant
||x≠a||E 6 ÷ (il en existe car a est adhérentà A). On a alors
||b1 ≠ b2||F = ||!b1 ≠ f(x)
"+
!f(x) ≠ b2
"||F
6 ||b1 ≠ f(x)||F + ||f(x) ≠ b2||F 6 2Á =2||b2 ≠ b1||F
3 ,
ce qui est absurde.
Définition
Lorsque la fonction f admet une limite en a, celle-ci est
appelée la limite de f ; elle est notée lima
fou lim
x æ a f(x).
Théorème (caractérisation séquentielle de la limite)Soit f : A
≠æ F une fonction (A : partie de E), a un point adhérent à A et b
un élément de F .La fonction f admet pour limite b en a si, et
seulement si, pour toute suite (x
n
)n
de points de A quiconverge vers a, on a f(x
n
) ≠æ b.
Démonstration. Supposons que f admette pour limite b en a. Soit
(xn
)n
une suite de points de Aqui converge vers a ; démontrons que la
suite
!f(x
n
)"
n
converge vers b. Pour cela, choisissons un réelÁ > 0.
Choisissons ensuite un réel ÷ > 0 tel que, pour tout point x œ A
vérifiant ||x ≠ a||
E
6 ÷, on ait
-
84 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
||f(x) ≠ b||F
6 Á. Choisissons enfin un entier N tel que, pour tout entier n
> N , on ait ||xn
≠ a||E
6 ÷.Alors, pour tout entier n > N , on a ||f(x
n
) ≠ b||F
6 Á, ce qui prouve que f(xn
) ≠æ b.Réciproquement, supposons que f n’admette pas pour limite
b en a ; construisons une suite (x
n
)n
depoints de A qui converge vers a sans que la suite
!f(x
n
)"
n
ne tende vers b. On sait qu’il existe un réelÁ > 0 tel que,
pour tout réel ÷ > 0, il existe un point x œ A vérifiant ||x ≠
a||
E
6 ÷ et ||f(x) ≠ b||F
> Á.Choisissons un tel réel Á > 0. Pour tout entier n >
1, choisissons alors un élément x
n
œ A vérifiant||x
n
≠ a||E
6 1n
et ||f(xn
) ≠ b||F
> Á : la suite (xn
)n
converge vers a mais f(xn
) ne tend pas vers b.
Théorème (composition des limites)Soient f : A ≠æ B et g : B ≠æ
G (A : partie de E et B : partie de F ), a un point adhérent à A, b
unpoint adhérent à B et c un point de G. On suppose que– f(x)
≠æ
x æ ab
– g(x) ≠æx æ b
c.Alors g(f(x)) ≠æ
x æ ac.
Démonstration. Résulte immédiatement de la définition.
Proposition (opérations linéaires)Soient f, g : A ≠æ F , a un
point adhérent à A, ⁄ œ K. On suppose f(x) ≠æ
x æ ab1 œ F et g(x) ≠æ
x æ ab2 œ F .
Alors (f + ⁄g)(x) ≠æx æ a
b1 + ⁄b2.
Démonstration. Elle est en tout point similaire à celle énonçant
le même résultat pour les suites (ou s’endéduit en utilisant la
caractérisation séquentielle de la limite).
Définition (domination et négligeabilité des fonctions
vectorielles)Soient f : A ≠æ F , Ï : A ≠æ K et a un point adhérent
à A. On dit que la fonction f est– dominée par la fonction Ï si, et
seulement si, la fonction numérique ||f || est dominée par la
fonction Ï.
On note f(x) œ Oa
(Ï(x)) ou, abusivement, f(x) = Oa
(Ï(x)).– négligeable devant la fonction Ï si, et seulement si,
la fonction numérique ||f || est négligeable devant
la fonction Ï. On note f(x) œ oa
(Ï(x)) ou, abusivement, f(x) = oa
(Ï(x)).
La notion de limite permet ensuite de définir la continuité
d’une fonction :
Définition (continuité)Soit f : A ≠æ F une application et a un
point de A. L’application f est dite continue en a si, etseulement
si, elle y admet une limite (qui est alors nécessairement f(a)).
Elle est dite continue si, etseulement si, elle l’est en tout point
de A.
Remarque 1. Si f admet une limite b en a mais que a n’appartient
pas à A, on peut prolonger la fonction fen une fonction définie en
a également en posant f(a) = b. Ce prolongement, encore noté
abusivement f ,est alors continu en a.
Proposition (continuité d’une restriction)Soit f : A ≠æ F une
fonction continue. Toute restriction de f est encore continue.
Théorème (continuité d’une composée)Soient f : A ≠æ B et g : B
≠æ G (A : partie de E et B : partie de F ). Soient a œ A et b œ B.–
Si f est continue en a et g continue en b, alors g ¶ f est continue
en a.– Si f est continue (partout) et g continue (partout), alors g
¶ f l’est aussi.
-
5.1. Normes 85
Proposition
Soient f, g : A ≠æ F , a un point de A et ⁄ œ K un scalaire. Si
f et g sont continues en a (resp.partout), alors f + ⁄g l’est
aussi.
Remarque 2. Dans le cas particulier où les fonctions sont à
valeurs dans K (et non dans un espace vectorielnormée F
quelconque), on peut les multiplier et les diviser (pourvu que le
quotient ne s’annule pas). Onobtient alors que le produit de deux
fonctions continues l’est encore, de même que l’inverse d’une
tellefonction, pourvu qu’elle ne s’annule pas.
Proposition (continuité, ouverts et fermés)Soit f : E ≠æ R une
application continue. Alors– l’ensemble U = {x œ E | f(x) > 0}
est un ouvert de E– les ensembles V = {x œ E | f(x) > 0} et W =
{x œ E | f(x) = 0} sont des fermés de E.
Démonstration. Si l’ensemble U est vide, c’est un ouvert. Sinon,
il s’agit de démontrer que, pour toutélément a œ U , il existe un
réel Á > 0 tel que la boule ouverte B(a, Á) soit incluse dans U
. Choisissonsdonc un élément a œ U . Le réel 12 f(a) est
strictement positif, donc il existe un réel Á > 0 tel que,
pourtout x œ B(a, Á), on ait
--f(x) ≠ f(a)-- < 12 f(a). Pour tout x œ B(a, Á), on a
donc
f(x) = f(a) +!f(x) ≠ f(a)
"> f(a) ≠ 12f(a) =
12f(a) > 0,
donc x appartient à U . On a donc bien B(a, Á) µ U .La deuxième
assertion s’en déduit : en e�et, le complémentaire de V est
l’ensemble
V = {x œ E | ≠f(x) > 0}.La fonction ≠f étant continue, cet
ensemble est ouvert, ce qui signifie que V est fermé. Enfin, W
estl’intersection de V et de l’ensemble V Õ = {x œ E | f(x) 6 0},
qui est fermé pour les mêmes raisons,donc W est fermé.Remarque 3.
En considérant la fonction ≠f à la place de f , on obtient
immédiatement que les ensembles
U = {x œ E | f(x) < 0} et V = {x œ E | f(x) 6 0}sont
respectivement ouvert et fermé (pourvu que f soit encore continue).
Il en est de même si l’on remplacela valeur 0 par un réel
quelconque m (remplacer la fonction f par f ≠ m). Si la partie est
définie parplusieurs inégalités et non une seule, on utilise les
résultats sur les intersections d’ouverts ou de fermés...Autrement
dit, il faut retenir que, lorsqu’une partie est définie
– par des inégalités strictes (faisant intervenir des fonctions
continues), elle est ouverte ;– par des inégalités larges (faisant
intervenir des fonctions continues), elle est fermée.
Si elle fait intervenir à la fois des inégalités strictes et
larges, elle n’est en général ni ouverte ni fermée.Exemple 1.
L’ensemble U = {(x1, x2, x3) œ R3 | x1 > 0, x2 > 0, x3 >
0, x1 + x2 + x3 < 1} est un ouvertde R3 ; l’ensemble V = {(x1,
x2, x3) œ R3 | x1 > 0, x2 > 0, x3 > 0, x1 + x2 + x3 6 1}
est fermé (c’estl’adhérence de U).Remarque 4. Si la fonction f
(définie sur E) est à valeurs complexes, parler de l’ensemble U =
{x œ E |f(x) > 0} n’a plus de sens ; on peut en revanche
toujours considérer l’ensemble W = {x œ E | f(x) = 0}.Celui-ci est
toujours fermé : il s’écrit encore sous la forme W = {x œ E |
|f(x)| = 0}, où la fonction |f |est continue et à valeurs réelles.
La remarque vaut aussi pour l’ensemble W Õ = {x œ E | f(x) =
a}.
Définition (application lipschitzienne)Une application f : A ≠æ
F (A : partie de E) est dite lipschitzienne si, et seulement si, il
existe unréel k > 0 tel que, pour tous x, y œ A, on ait ||f(x) ≠
f(y)||
F
6 k||x ≠ y||E
.
Proposition (continuité des applications lipschitziennes)Toute
application lipschitzienne est continue.
-
86 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
Démonstration. Soit k > 0 un réel vérifiant que, pour tous x,
y œ A, on ait ||f(x) ≠ f(y)||F
6 k||x ≠ y||E
.Soit a un point de A. Pour tout x œ A, on a
||f(x) ≠ f(a)||F
6 k||x ≠ a||E
≠æx æ a
0,
ce qui prouve que f(x) ≠æx æ a
f(a), autrement dit que f est continue en a. Ceci étant vrai
pour tout a œ A,la fonction f est continue.
Exemple 2. L’application «norme» : E ≠æ R est lipschitzienne
(donc continue). En e�et, pour tousx, y œ E, on a alors --||x|| ≠
||y||
-- 6 ||x ≠ y||.Remarque 5. Si f : E ≠æ F est une application
linéaire, il su�t de trouver une constante k > 0
vérifiant||f(x)||
F
6 k||x||E
(pour tout x œ E) pour prouver que f est lipschitzienne : en
e�et, pour tous x, y œ E,on a
||f(x) ≠ f(y)||F
= ||f(x ≠ y)||F
6 k||x ≠ y||E
.
5.2 Espaces vectoriels normés de dimension finie5.2.1 Suites et
fonctions à valeurs dans E
Dans un espace vectoriel normé E quelconque, la notion de
convergence d’une suite (xn
)n
de pointsde E dépend essentiellement du choix d’une norme sur E,
i.e. d’une façon de mesurer la distance. Dansle cas particulier des
espaces de dimension finie, cet arbitraire disparaît grâce au
Théorème
Soit E un K-espace vectoriel normé de dimension finie. Soient N1
et N2 deux normes sur E. Alors ilexiste deux réels c1, c2 > 0
tels que
’x œ E, N1(x) 6 c1N2(x) et N2(x) 6 c2N1(x).
Démonstration. Ce théorème est admis. Il est d’ailleurs hors
programme.
On en déduit immédiatement le résultat suivantThéorème
Soit E un K-espace vectoriel normé de dimension finie. Soient N1
et N2 deux normes sur E. Alors– si une suite (x
n
)n
est convergente au sens de la norme N1, elle l’est aussi au sens
de la norme N2 ;– si c’est le cas, sa limite au sens de la norme N1
est la même que sa limite au sens de la norme N2.
Démonstration. Choisissons deux constantes c1, c2 > 0 telles
que, pour tout x œ E, on ait N1(x) 6 c1N2(x)et N2(x) 6 c2N2(x).
Considérons une suite (xn)n de vecteurs de E.– Supposons la suite
(x
n
)n
convergente au sens de la norme N1 et notons ¸ sa limite. Pour
tout entier n,on a
N2(xn ≠ ¸) 6 c2N1(xn ≠ ¸) ≠æn æ Œ
0,
ce qui prouve que N2(xn≠¸) ≠æn æ Œ
0, i.e. que la suite converge aussi vers la limite ¸ au sens de
la norme N2.– L’autre implication se traite de la même façon, en
utilisant l’inégalité N1 6 c1N2.Remarque 1. C’est ce théorème qui
est au programme (mais évidemment pas sa démonstration,
puisqu’elleutilise le théorème précédent).
De cette façon, la question de la convergence de la suite
(xn
)n
vers une limite ¸ œ E ne dépend pasdu choix d’une norme sur E.
On pourra donc choisir la norme la plus adaptée pour traiter le
problème.En particulier, si E = Kp, on pourra choisir parmi les
normes || · ||1, || · ||2 ou || · ||Œ (ou d’autres encore).
Dans le cas où E est un espace vectoriel normé de dimension p
(espace quelconque, pas nécessaire-ment Kp), munissons-le d’une
base B = (Á1, . . . , Áp). Chaque vecteur x œ E est alors repéré
par la famille(x1, . . . , xp) œ Kp de ses coordonnées dans la base
B. Grâce à ce choix d’une base, travailler avec unvecteur de E
revient à travailler avec un vecteur de Kp. En particulier, on peut
définir plusieurs normessur E, par ((x1, . . . , xp) désigne
toujours la famille des coordonnées de x dans la base B) :
-
5.2. Espaces vectoriels normés de dimension finie 87
– ||x||1 = |x1| + · · · + |xp| ;– ||x||2 =
|x1|2 + · · · + |xp|2 ;
– ||x||Œ = max(|x1|, . . . , |xp|).Le théorème précédent assure
que, pour étudier la convergence d’une suite, on peut choisir l’une
quel-conque de ces trois normes (ou d’autres encore).
Remarque 2. Il est facile, pour chacune de ces trois normes, de
trouver des constantes telles que décritesdans le théorème
d’équivalence des normes. En e�et, pour tout vecteur x (de
coordonnées x1, . . . , xp), ona (en notant k l’indice qui réalise
le maximum ; indice qui dépend bien sûr du vecteur x)
||x||Œ = |xk| =
|xk
|2 6Ò
|x1|2 + · · · + |xp|2 = ||x||2,
||x||22 = |x1|2 + · · · + |xp|2 6 |x1|2 + · · · + |xp|2 + 2ÿ
i
-
88 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
En termes de continuité, on obtient :
Théorème
Soit f : A ≠æ E, où A est une partie d’un espace vectoriel normé
F . Soit a un point de A.La fonction f est continue en a si, et
seulement si, chaque fonction coordonnée f
k
est continue en a.
Définition (fonction polynomiale)Une fonction f : A ≠æ K (A :
partie de E) est dite polynomiale si, et seulement si, il existe
une base Bde E telle que l’expression de f(x) soit un polynôme en
les coordonnées de x exprimées dans la base B.
Les formules de changement de base étant linéaires, il est
immédiat de constater que, si c’est le cas,pour toute base B de E,
l’expression de f(x) est un polynôme en les coordonnées de x
exprimées dansla base B (mais en changeant de base, les formules
pour calculer f(x) en fonction des coordonnéeschangent...).
Proposition (continuité des fonctions polynomiales)Toute
fonction polynomiale est continue.
Démonstration. Choisissons une base B de E et munissons E de la
norme ||x||Œ = max16i6n |xi| (où les xisont les coordonnées de x
exprimées dans la base B). Chaque application p
i
: x ‘æ xi
est 1-lipschitziennedonc continue : en e�et, pour tous x, y œ E,
on a
--pi
(x) ≠ pi
(y)-- = |x
i
≠ yi
| 6 max16j6n
|xj
≠ yj
| = ||x ≠ y||Œ.
Une application polynomiale n’étant rien d’autre qu’une
combinaison linéaire de produits d’applica-tions p
i
, elle est encore continue.
Exemple 3. Soit A œ Mn
(R) une matrice. Considérons l’application
f : Mn,1(R) ≠æ RX ‘≠æ XTAX
(où l’on identifie la matrice XTAX, de taille (1, 1), à son
unique coe�cient). La quantité f(X) est unpolynôme en les
coe�cients x
i
de la matrice colonne X, donc la fonction f est continue.
Proposition (continuité de l’application
déterminant)L’application déterminant det : M
n
(K) ≠æ K est continue.
Démonstration. Le déterminant d’une matrice est une combinaison
linéaire de produits de coe�cients decette matrice ; l’application
déterminant est donc polynomiale, donc continue.
Corollaire
L’ensemble GLn
(K) des matrices inversibles est un ouvert.
Démonstration. Son complémentaire est l’ensemble {M œ Mn
(K) | det(M) = 0}, qui est donc un fermé.
Remarque 3. En particulier, si une suite (Mn
)n
de matrices inversibles converge, sa limite A n’est
pasnécessairement une matrice inversible ! Par exemple, pour tout n
> 0, la matrice 1
n
Ip
est inversible ;la limite de cette suite de matrices est la
matrice nulle. En revanche, si aucune des matrices M
n
n’estinversible, la limite ne peut pas être non plus inversible
(on a det(M
n
) = 0 pour tout n, donc det(A) = 0par passage à la limite).
Remarque 4. Une fonction rationnelle (i.e. le quotient de deux
fonctions polynomiales) est donc elle aussicontinue.
-
5.2. Espaces vectoriels normés de dimension finie 89
5.2.2 Fonctions continues sur des parties fermées bornéesDans ce
paragraphe, E désigne un espace vectoriel normé de dimension
finie.
Théorème (extrema d’une fonction numérique définie sur un fermé
borné)Soit E un espace vectoriel normé de dimension finie, A une
partie fermée, bornée et non vide de E etf : A ≠æ R une fonction
continue. Alors l’application f est bornée et atteint ses
bornes.
C’est-à-dire qu’il existe deux éléments a, b œ A vérifiant : ’x
œ A, f(a) 6 f(x) 6 f(b). Le nombre f(a)(resp. f(b)) est le minimum
(resp. maximum) de la fonction f ; il est atteint en a (resp. en
b), et peut-êtreen d’autres points également !
Remarque 1. Ce théorème généralise celui que vous connaissez
déjà concernant les fonctions d’une variableréelle : une fonction
(à valeurs réelles) continue définie sur un segment (qui est bien
une partie ferméeet bornée) est bornée et atteint ses bornes. Une
autre façon de formuler ce résultat est : «l’image d’unsegment par
une application continue est un segment». À ne pas confondre avec
le théorème des valeursintermédiaires, moins fort, dont une
formulation possible est : «l’image d’un intervalle par une
applicationcontinue est un intervalle».
Pour démontrer ce résultat (dont la démonstration est non
exigible), commençons par énoncer unlemme (hors-programme).
Lemme
De toute suite bornée de E on peut extraire une suite
convergente.
Démonstration. Indiquons l’idée de la preuve dans le cas où E =
R. La suite étant bornée, on peut trouverun segment I0 = [a0, b0]
contenant tous les termes de la suite. Divisons ce segment en deux
moitiés demême longueur : l’une au moins de ces deux moitiés
contient encore une infinité de termes de la suite.Notons I1 = [a1,
b1] cette moitié. En recommençant le procédé, on construit une
suite (In)n de segmentsemboîtés tels que chacun de ces segments
contienne une infinité de termes de la suite. En notant a
n
< bn
les deux extrémités du segment In
, on dispose d’une suite (an
)n
croissante, une suite (bn
)n
décroissante,telles que b
n
≠ an
tende vers 0 (la longueur du segment est divisée par deux à
chaque étape). Les suitessont donc adjacentes et convergent vers
une limite commune ¸. Par construction, ce réel ¸ appartient àtous
les I
n
.Construisons maintenant une suite extraite de u convergeant
vers cette limite ¸. Pour cela, on choisit
pour premier terme u0. Ensuite, le segment I1 contient une
infinité de termes de la suite, donc on choisitun entier Ï(1) >
0 tel que u
Ï(1) œ I1. Puis un entier Ï(2) > Ï(1) tel que uÏ(2) œ I2...
Par construction,on a a
n
6 uÏ(n) 6 bn pour tout entier n, d’où uÏ(n) ≠æ
n æ Œ¸.
Le cas où E = R2 se traite de façon analogue, à ceci près qu’à
chaque étape, au lieu de découper unsegment en deux, on découpe un
carré en quatre ; dans R3, on découpe un cube en huit...
Le cas où E = Cn se ramène, en séparant parties réelle et
imaginaire, au cas où E = Rn.Enfin, le cas E quelconque (de
dimension fini) se ramène au cas E = Kn via le choix d’une base
et
l’utilisation de coordonnées.
Démonstration du théorème (non exigible). Commençons par montrer
que l’ensemble f est majoré.Si ce n’était pas le cas, on pourrait
trouver, pour tout entier n, un élément x
n
œ A tel que f(xn
) > n.La suite (x
n
)n
étant à valeurs dans A, elle est bornée, donc on peut en
extraire une suite (xÏ(n))n
convergente. Notons ¸ la limite de cette suite. Comme l’ensemble
A est fermé, cette limite appartientencore à A. La continuité de f
en ¸ implique alors que f(x
Ï(n)) ≠æn æ Œ
f(¸), ce qui contredit le fait quef(x
Ï(n)) ≠æn æ Œ
+Œ.Cet ensemble étant majoré, il admet une borne supérieure,
notée M . Il s’agit de montrer que cette
borne supérieure est en fait le plus grand élément de l’ensemble
f. Pour cela, on utilise que, pourtout n > 0, le réel M ≠ 1
n
n’est pas un majorant de l’ensemble f, donc on peut trouver un
élémentx
n
œ A tel que f(xn
) > M ≠ 1n
. On extrait encore une suite (xÏ(n))n convergente de cette
suite ; sa limite ¸
appartient à A. L’encadrement M ≠ 1Ï(n) 6 f(xÏ(n)) 6 M montre,
par passage à la limite, que f(¸) = M ,
autrement dit que M est bien une valeur atteinte par la fonction
f , donc que c’est son maximum.La démonstration est identique pour
le minimum.
-
90 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
5.2.3 Continuité des applications linéaires
Théorème (continuité des applications linéaires en dimension
finie)Soient E, F deux espaces vectoriels normés de dimensions
finies. Toute application linéaire f : E ≠æ Fest lipschitzienne,
donc continue.
Démonstration. Notons || · ||E
et || · ||F
les normes de E et F .Choisissons une base B = (e1, . . . , ep)
de E et considérons la norme définie sur E par :
||x1e1 + · · · + xpep||B = max(|x1|, . . . , |xp|).
Pour tout vecteur x = x1e1 + · · · + xpep appartenant à la boule
unité B = {x œ E | ||x||B 6 1} de E, ona en particulier |x
i
| 6 1 pour tout i. Par suite, pour tout vecteur x œ B, on a
||f(x)||F
= ||x1f(e1) + · · · + xpf(ep)||F 6 |x1|||f(e1)||F + · · · +
|xp|||f(ep)||F 6 ||f(e1)||F + · · · + ||f(ep)||F .
Notons M la constante M = ||f(e1)||F + · · · + ||f(ep)||F . Pour
tout vecteur x non nul de E, le vecteur1
||x||B x appartient à B, donc vérifie ||f! 1
||x||B x"||F
6 M , d’où l’on déduit ||f(x)||F
6 M ||x||B (la majorationrestant valable pour x = 0).
Choisissons maintenant une constante c > 0 telle que || · ||B
6 c|| · ||E . Pour tout x œ E, on a
||f(x)||F
6 M ||x||B 6 cM ||x||E .
Par linéarité, on en déduit que, pour x, y œ E, on a
||f(x) ≠ f(y)||F
= ||f(x ≠ y)||F
6 cM ||x ≠ y||E
:
l’application f est cM -lipschitzienne (donc continue).
Remarque 1. Seule l’hypothèse de dimension finie de l’espace E
de départ nous a servi ; le résultat restevrai même si F est de
dimension infinie. En revanche, l’hypothèse de finitude de la
dimension de E estessentielle.
Exemple 1. Soit (Mn
)n
une suite de matrices appartenant à Mp
(K). On suppose que
Mn
≠æn æ Œ
A œ Mp
(K).
Alors, pour toute matrice P œ GLn
(K), on a
P ≠1Mn
P ≠æn æ Œ
P ≠1AP.
En e�et, l’application� : M
p
(K) ≠æ Mp
(K)M ‘≠æ P ≠1MP
est linéaire, donc continue.Cet argument très simple est à
retenir et à savoir réutiliser.
Exemple 2. Sur l’espace E = C ([0, 1],R) muni de la norme || ·
||1, considérons l’application linéaire� : E ≠æ R définie par �(f)
= f(0). Considérons également la suite de fonctions (f
n
)n
définies par ledessin ci-dessous.
fn
1
1n
1
-
5.2. Espaces vectoriels normés de dimension finie 91
Notons f la fonction nulle. La suite de fonctions (fn
)n
converge vers la fonction f : en e�et, on a
||fn
≠ f ||1 =⁄ 1
0|f
n
(t) ≠ 0| dt = 12n ≠æn æ 0 0.
Cependant, la suite!�(f
n
)"
n
ne converge pas vers �(f) = 0 : en e�et, pour tout n, on a
�(fn
) = 1. Lafonction � n’est donc pas continue, bien que
linéaire.
Proposition (continuité des applications bilinéaires en
dimension finie)Soient E, F, G trois espaces vectoriels normés de
dimensions finies. Toute application bilinéaire B :E ◊ F ≠æ G est
continue.
Démonstration. Notons à nouveau || · ||E
, || · ||F
et || · ||G
les normes de E, F et G.Choisissons une base B = (e1, . . . ,
en) de E et une base C = (Á1, . . . , Áp) de F et munissons E et F
desnormes définies par
||x1e1 + · · · + xnen||B = max(|x1|, . . . , |xn|) et ||y1Á1 + ·
· · + ypÁp||C = max(|y1|, . . . , |yp|).
Pour tout (x, y) œ E ◊ F vérifiant ||x||B 6 1 et ||y||C 6 1, on
a en particulier |xi| 6 1 et |yj | 6 1 pouri œ [[1, n]] et j œ [[1,
p]]. Pour un tel couple, on a
||B(x, y)||G
=
------
------B
1 nÿ
i=1x
i
ei
,pÿ
j=1y
j
Áj
2------
------G
=
------
------
nÿ
i=1
pÿ
j=1x
i
yj
B(ei
, Áj
)
------
------G
6nÿ
i=1
pÿ
j=1|x
i
yj
|||B(ei
, Áj
)||G
6nÿ
i=1
pÿ
j=1||B(e
i
, Áj
)||G
= M
Par suite, pour x ”= 0 et y ”= 0, on a------ x||x||B
------B
6 1 et------ y||y||C
------C6 1, d’où
----
----B1 x
||x||B,
y
||y||C
2----
----G
6 1,
ce qui s’écrit encore||B(x, y)||
G
6 M ||x||B||y||C ,l’inégalité étant encore vraie si x = 0 ou y =
0 (car B(0, y) = B(x, 0) = 0). En choisissant deux constantesc1, c2
> 0 telles que || · ||B 6 || · ||E et || · ||C 6 || · ||F et en
notant M Õ = c1c2M , on a aussi
||B(x, y)||G
6 c1c2M ||x||E ||y||F = M Õ||x||E ||y||F .
Soit maintenant a un vecteur de E et b un vecteur de F . Pour
tout couple (x, y) œ E ◊ F , on a
||B(x, y) ≠ B(a, b)||G
= ||B(x, y) ≠ B(x, b) + B(x, b) ≠ B(a, b)||G
6 ||B(x, y) ≠ B(x, b)||G
+ ||B(x, b) ≠ B(a, b)||G
= ||B(x, y ≠ b)||G
+ ||B(x ≠ a, b)||G
6 M Õ||x||E
||y ≠ b||F
+ M Õ||x ≠ a||E
||b||F
≠æ(x,y) æ(a,b)
0,
ce qui prouve que B est continue en (a, b). Ceci étant vrai pour
tout (a, b) œ E ◊ F , l’application B estcontinue.
Exemple 3. Si E est un espace vectoriel de dimension finie,
l’espace L(E) en est encore un. L’applicationbilinéaire (f, g) ‘æ f
¶ g est donc continue. Par suite, si f
n
≠æ f et gn
≠æ g, alors fn
¶ gn
≠æ f ¶ g.
-
92 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
5.3 Test de compréhension du chapitre5.3.1 Questions
1. Soit (un
)n
une suite de vecteurs d’un K-espace vectoriel normé E et ¸ un
vecteur de E. Quels lienslogiques y a-t-il entre les deux
assertions suivantes :i) ||u
n
≠ ¸|| ≠æn æ Œ
0 ii) ||un
|| ≠æn æ Œ
||¸||.
2. Dessiner les boules Bf
(0, 1) de R2 pour les trois normes || · ||2, || · ||1 et || ·
||Œ.3. Soit F un sous-espace vectoriel d’un espace vectoriel normé
E. On suppose que B(0, 1) µ F . Démontrer
que F = E.4. Soient x1, x2 deux vecteurs d’un K-espace vectoriel
normé E, et r1, r2 deux réels strictement positifs.
a) Calculer la distance du vecteur y = 1r1+r2 (r2x1 + r1x2)
(interprétation géométrique de ce vecteur ?)
aux vecteurs x1 et x2.b) Démontrer que la boule B
f
(x1, r1) rencontre la boule Bf (x2, r2) si, et seulement si,
||x1 ≠x2|| 6 r1 +r2.5. Pour tout polynôme P =
qŒn=0 anX
n œ R[X] (somme finie bien sûr), on pose
||P ||1 =Œÿ
n=0|a
n
|, ||P ||Œ = supnœN
|an
|.
a) Justifier que ce sont deux normes sur R[X]. Trouver une
constante A telle que, pour tout P œ R[X],on ait ||P ||Œ 6 A||P
||1.b) Pour tout entier n, on pose P
n
= (1 + X + · · · + Xn≠1)/n. Étudier la convergence de la suite
(Pn
)n
pour chacune des deux normes.c) Existe-t-il une constante B
telle que, pour tout polynôme P œ R[X], on ait ||P ||1 6 B||P
||Œ.
6. Soit a un vecteur d’un K-espace vectoriel normé E. Démontrer
que l’application sa
: x ‘æ a + x estcontinue.
7. On considère un produit scalaire È· | ·Í sur un espace E et
on munit celui-ci de la norme associée. Soit aun vecteur de E.
L’application s
a
: x ‘æ Èa | xÍ est-elle continue ?8. Soit A une partie dense
d’un K-espace vectoriel normé E (i.e. que tout vecteur x œ E est
limite d’une
suite d’éléments de A). Soient f, g : E ≠æ K deux fonctions
continues telles que, pour tout x œ A, on aitf(x) = g(x). Démontrer
que f = g.
9. Démontrer que l’application f : [0, 1] ≠æ R, x ‘æ Ôx, n’est
pas lipschitzienne.10. Peut-on parler de la convergence d’une suite
de polynômes sans faire référence à la norme utilisée pour
parler de limite ? Même question en supposant tous les polynômes
considérés de degré inférieur ou égalà une constante d.
11. Parmi les applications suivantes, définies sur Mp
(K), indiquer lesquelles sont continues :i) trace ii)
déterminant iii) rang iv) transposition
12. Soient E, F deux espaces vectoriels normés. Est-il vrai que
toute application linéaire de E dans F estcontinue ?
13. Soient E, F deux espaces vectoriels normés et f œ L(E, F ).
Quels liens logiques y a-t-il entre les assertionssuivantes :i)
l’application f est continue ii) l’application f est continue en
0.
-
5.3. Test de compréhension du chapitre 93
-
94 Chapitre 5. Espaces vectoriels normés
5.3.2 Réponses1. La première entraîne la seconde (car
--||un
|| ≠ ||¸||-- 6 ||u
n
≠ ¸||) ; la réciproque est fausse (sauf si ¸ = 0).2. – La boule
B
f
(0, 1) pour la norme || · ||1 est l’ensemble des (x, y) œ R2
tels que |x| + |y| 6 1. On étudieséparément les quatre quarts de
plan définis par les signes de x et y. Dans le quart de plan défini
parx, y > 0, l’inégalité s’écrit x + y 6 1. Dans le quart de
plan x > 0, y 6 0, l’inégalité s’écrit x ≠ y 6 1...– Pour la
norme || · ||Œ, cette même boule est l’ensemble des (x, y) œ R2
tels que max(|x|, |y|) 6 1, i.e.|x| 6 1 et |y| 6 1.
1
1
boule pour la norme || · ||1
1
1
boule pour la norme || · ||2
1
1
boule pour la norme || · ||Œ
3. Soit x un vecteur non nul de E : alors le vecteur y = 12||x||
x est de norme 12 , donc appartient à B(0, 1),donc à F , donc x
appartient à F .
4. a) Le vecteur y est le barycentre de x1, a�ecté du coe�cient
r2 et de x2, a�ecté du coe�cient r1. Il vérifie||x
i
≠ y|| = rir1+r2 ||x1 ≠ x2|| (pour i œ {1, 2}).
b) Si les deux boules se rencontrent, tout point z appartenant à
leur intersection vérifie ||xi
≠ z|| 6 ri
,d’où
||x1 ≠ x2|| = ||(x1 ≠ z) + (z ≠ x2)|| 6 ||x1 ≠ z|| + ||z ≠ x2||
6 r1 + r2.Réciproquement, si cette inégalité est vérifiée, le point
y de la question a) appartient à l’intersection.
5. a) Tout revient en définitive à manipuler des sommes finies.
Mais attention : bien que chaque somme soitune somme finie,
l’indice N à partir duquel les coe�cients a
n
sont tous nuls dépend de N . Lorsque l’ona a�aire à deux
polynômes, on commencera par choisir un entier N tel que, pour tout
n > N , on aita
n
= bn
= 0... La constante A = 1 convient (remarquer que, les an
étant nuls à partir d’un certain rang,le sup définissant ||P ||Œ
est en fait un max).b) La suite (P
n
)n
converge vers le polynôme nul pour la norme || · ||Œ mais pas
pour la norme || · ||1.c) S’il existait une telle constante B,
l’inégalité ||P
n
||1 6 B||Pn||Œ montrerait que la suite (Pn)n convergevers le
polynôme nul pour la norme || · ||1, ce qui n’est pas.
6. L’application sa
est 1-lipschitzienne.7. L’application s
a
est ||a||-lipschitzienne.8. Si x est un vecteur de E, choisir
une suite (a
n
)n
d’éléments de A telle que an
≠æ x. Utiliser la continuitéde f et de g pour passer à la limite
dans la relation f(a
n
) = g(an
), valable pour tout entier n.9. S’il existait une constante K
> 0 telle que, pour tous x, y œ [0, 1], on ait |f(x) ≠ f(y)| 6
K|x ≠ y|, on
aurait, pour tout x œ ]0, 1],Ô
x
x
6 K, d’où une contradiction (pourquoi ?).10. Non pour la
première question : l’espace K[X] est de dimension infinie, donc il
est possible que la suite de
polynômes soit convergente pour une certaine norme et divergente
(ou convergente, mais vers une autrelimite) pour une autre norme.
En revanche, si l’on travaille dans K
d
[X] qui est de dimension finie, la notionde convergence ne
dépend pas du choix d’une norme, ni la valeur de la limite en cas
de convergence.
11. Les deux premières sont continues car polynomiales ; la
troisième ne l’est pas. En e�et, pour tout entier n,on a rg( 1
n
Ip
) = p, mais 1n
Ip
≠æ 0, de rang 0. La dernière l’est car linéaire en dimension
finie.12. En dimension infinie, non (voir l’exemple 2 du paragraphe
5.2.3). Si E est de dimension finie, oui.13. La première assertion
entraîne évidemment la seconde. La seconde entraîne aussi la
première. En e�et,
soit x un vecteur quelconque de E. On a
f(x + h) = f(x) + f(h) ≠æh æ 0
f(x) + f(0) = f(x)
grâce à la continuité de f en 0, donc f est continue en x. Ceci
étant vrai pour tout x, f est continue.
Espaces vectoriels normésNormesDéfinitions et exemplesOuverts,
fermésSuites à valeurs dans ELimites et continuité
Espaces vectoriels normés de dimension finieSuites et fonctions
à valeurs dans EFonctions continues sur des parties fermées
bornéesContinuité des applications linéaires
Test de compréhension du chapitreQuestionsRéponses