Volume collectif La Route de l’Esclave, UNESCO 1 Esclavage et abolitions, colonies françaises, recherche et transmission des connaissances Nelly Schmidt Résumé La connaissance de l’histoire de la traite humaine transatlantique et du système esclavagiste dans les Caraïbes a beaucoup progressé depuis le dernier tiers du XXe siècle. L’analyse des conditions de leurs abolitions permet aujourd’hui de répondre à de nombreuses questions qui se posent encore dans les pays concernés par ces phénomènes. Des lacunes subsistent toutefois. Le long oubli du passé dont cette histoire a souffert a engendré l’élaboration de mythes, généré des célébrations le plus souvent infructueuses malgré les objectifs affichés. Les médiateurs de cette histoire que sont l’enseignement, les organismes de recherche, les diverses manifestations de la mémoire publique par les commémorations les plus diverses, les médias ou les vecteurs audiovisuels, proposent aujourd’hui une offre considérable d’informations. Ce chapitre propose un bref état des connaissances et des pistes de recherche et travaux à effectuer dans ces différents domaines en ce qui concerne les colonies françaises. Une synthèse – non exhaustive – des voies d’accès aux réalisations existantes est ensuite proposée, ainsi qu’une sélection bibliographique française, devant ouvrir les indispensables perspectives comparatives avec les autres aires géographiques. ***** La recherche historique, et plus généralement dans les domaines des sciences humaines et sociales, a connu à partir des années 1960-1970, une évolution déterminante au sujet des colonies ayant subi la traite négrière et l’esclavage. Les mouvements sociaux et politiques qui s’y produisirent alors ont induit un renouveau des questions que les contemporains posèrent à l’histoire. Les colonies françaises des Caraïbes, dont environ 80% des populations totales vécurent sous le régime esclavagiste depuis le XVIIe siècle, connurent une expérience spécifique, celle d’une première abolition de l’esclavage - en 1794 -, du rétablissement de la servitude en 1802 puis d’une seconde abolition, définitive, en 1848.
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Volume collectif La Route de l’Esclave, UNESCO
1
Esclavage et abolitions, colonies françaises, recherche et transmission des connaissances
Nelly Schmidt
Résumé
La connaissance de l’histoire de la traite humaine transatlantique et du système esclavagiste
dans les Caraïbes a beaucoup progressé depuis le dernier tiers du XXe siècle. L’analyse des
conditions de leurs abolitions permet aujourd’hui de répondre à de nombreuses questions qui
se posent encore dans les pays concernés par ces phénomènes. Des lacunes subsistent
toutefois. Le long oubli du passé dont cette histoire a souffert a engendré l’élaboration de
mythes, généré des célébrations le plus souvent infructueuses malgré les objectifs affichés.
Les médiateurs de cette histoire que sont l’enseignement, les organismes de recherche, les
diverses manifestations de la mémoire publique par les commémorations les plus diverses, les
médias ou les vecteurs audiovisuels, proposent aujourd’hui une offre considérable
d’informations.
Ce chapitre propose un bref état des connaissances et des pistes de recherche et
travaux à effectuer dans ces différents domaines en ce qui concerne les colonies françaises.
Une synthèse – non exhaustive – des voies d’accès aux réalisations existantes est ensuite
proposée, ainsi qu’une sélection bibliographique française, devant ouvrir les indispensables
perspectives comparatives avec les autres aires géographiques.
*****
La recherche historique, et plus généralement dans les domaines des sciences humaines et
sociales, a connu à partir des années 1960-1970, une évolution déterminante au sujet des
colonies ayant subi la traite négrière et l’esclavage. Les mouvements sociaux et politiques qui
s’y produisirent alors ont induit un renouveau des questions que les contemporains posèrent à
l’histoire. Les colonies françaises des Caraïbes, dont environ 80% des populations totales
vécurent sous le régime esclavagiste depuis le XVIIe siècle, connurent une expérience
spécifique, celle d’une première abolition de l’esclavage - en 1794 -, du rétablissement de la
servitude en 1802 puis d’une seconde abolition, définitive, en 1848.
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Comme ce fut le cas pour l’ensemble des colonies des Caraïbes-Amériques, l’histoire
y fut longtemps écrite par des colons-planteurs, des administrateurs, des juristes qui
transmirent une image pour le moins incomplète, voire erronée et mythifiée des réalités. Leurs
écrits furent en fait un ensemble de revendications liées aux contextes successifs : désir de
liberté commerciale, doléances en faveur d’une autonomie politique à l’instar des possessions
britanniques, mais aussi de l’envoi de forces de l’ordre plus importantes. En contrepoint,
aucun témoignage d’esclave, que ce fût pendant la période esclavagiste ou au moment de
l’abolition, n’est disponible. Il s’agit d’une lacune grave et profonde dans le corpus de
documents dont disposent les historiens.
Autre caractéristique de l’accès à la connaissance du passé des colonies françaises :
l’écriture de leur histoire et sa transmission ont souffert depuis les événements de Saint-
Domingue/Haïti en 1791-1804, puis à partir de l’abolition de 1848, d’une politique d’oubli du
passé savamment maîtrisée. L’apparition de mythes historiques de longue durée fut la
conséquence majeure – et durable – de cet état de fait.
Enfin, cette histoire qui fut longtemps dominée par une orientation coloniale, demeura
jusqu’aux années 1960-1970 à l’écart des progrès de l’Ecole historique française. Ce n’est
qu’à partir de cette période en effet, que des questions nouvelles furent posées, que les
documents officiels furent réexaminés et confrontés à des sources différentes. Chaque
génération réécrit son histoire, dit-on. Elle relit les textes, en découvre de nouveaux, multiplie
et confronte les informations : écrites, orales, littéraires, archéologiques, artistiques. Depuis
trois décennies, les travaux de recherche sur la traite humaine transatlantique, le système
esclavagiste aux Caraïbes-Amériques, les abolitions et leurs lendemains ont à nouveau
progressé, permettant un réel renouvellement de l’historiographie et une rupture avec la
canalisation de la mémoire.
La célébration en 1998 du 150e anniversaire de la suppression de l’esclavage dans les
colonies françaises puis, en 2001, la reconnaissance de la traite négrière et de l’esclavage en
tant que crimes contre l’humanité par la Conférence mondiale de l’ONU contre le racisme, la
discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance réunie à Durban et par le parlement
français – par le vote de la loi du 21 mai 2001 - ont ouvert des débats souvent fructueux. Mais
l’ensemble des progrès et des acquis est encore loin de compte dans de nombreux domaines.
La canalisation de la mémoire fit appel à des modes de transmission spécifiques -
enseignement, commémorations - et généra des mythes très construits, susceptibles de résister
aux réalités comme au temps. De fait, beaucoup de constructions mythiques des lendemains
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immédiats de l’abolition de 1848 survivent de nos jours encore. Commémorations et
programmes d’enseignement en sont encore porteurs. En France et dans ses anciennes
colonies, les citoyens, comme les historiens, interrogent encore les révolutions de 1848,
tentent de dénouer les ambiguïtés que la période de l’abolition de l’esclavage révéla et suscita.
Peut-être convient-il de rappeler ici que lorsqu’un historien pénètre cet univers de
misère, d’incohérence, mais aussi de puissance économique, de force politique et de
coercition que fut aux Caraïbes-Amériques, du XVIe au XIXe siècle, celui de la traite
négrière et d’un esclavage massif, il s’aperçoit bien vite qu’aucune norme, aucun critère usuel
d’évaluation et de construction de l’histoire ne fonctionne, aucun n’est adapté à un tel
processus historique, jusqu’alors inédit. Aucune comparaison à d’autres systèmes
d’enfermement et d’exploitation de travail forcé n’est opérante.
Ce chapitre propose un rapide état des connaissances et des ressources auxquelles
chacun pourra recourir en fonction de sa demande, de ses besoins.
L’histoire complexe des réseaux de traite humaine d’Afrique vers les Caraïbes-
Amériques et celle du système esclavagiste ont fait l’objet de nombreux travaux. Ces points
de repère présentent certains axes des recherches effectuées ou qui restent à entreprendre.
Traite négrière et système esclavagiste
Les grands circuits de traite humaine au départ des côtes africaines sont de mieux en mieux
connus. L’UNESCO soutient des recherches archéologiques et le recueil de la tradition orale,
traces et témoignages déterminants de ce long passé de trafics humains (voir en
bibliographie : Gueye, Niane, Mikala). Le déroulement des opérations de traite, tant du point
de vue commercial, stratégique que matériel est de mieux en mieux connu. Les négociations
entreprises sur le continent africain, l’installation de comptoirs, la construction de forts ont
fait l’objet de recherches archivistiques. Il en est de même de l’équipement des navires, des
approvisionnements en marchandises d’échange, en eau et en nourriture pour la traversée de
l’Atlantique, du maintien de l’ordre à bord, de la mortalité des captifs et des équipages.
Les débuts de la traite française, à partir du milieu du XVe siècle, demeurent pourtant
mal connus. Les sources relatives aux premiers armements ne sont pas disponibles, ou si peu
nombreuses. Les réseaux financiers qui sous-tendirent ce trafic en Europe et plus
particulièrement en France ont toutefois fait l’objet de travaux de recherche relativement
ponctuels qui devraient aboutir à une synthèse des intérêts impliqués dans ce type
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d’opérations, qu’il s’agisse des financiers, des armateurs, des assureurs. Il devrait en être de
même des manufactures multiples qui, depuis les arrière-pays côtiers, fournirent pendant
quatre siècles les denrées commerciales de toutes sortes embarquées pour les colonies (voir en
Les enjeux économiques liés à ce trafic humain appellent par conséquent des travaux
complémentaires. Toutes les sources de financement et les réseaux d’intérêts n’ont pas été
repérés. De nombreux fonds documentaires ont disparu ou demeurent hors d’atteinte, n’ayant
pas fait l’objet de versement aux archives publiques. Les chiffres les plus extrêmes furent
avancés concernant les bénéfices tirés de cette activité économique qui, bien que
particulièrement risquée, n’en dura pas moins de trois siècles de manière légale et se
poursuivit de manière intensive de manière illégale au XIXe siècle.
Les récits de circuits de traite - qui pouvaient durer jusqu’à un an et demi - sont rares
pour les domaines maritimes français. Il en est de même des relations de révoltes de captifs -
pourtant nombreuses - sur les côtes africaines et sur les navires en cours de traversée. La
résistance aux razzias et aux circuits de traite en Afrique – liés aux réseaux
d’approvisionnement des traites des océans Indien et Atlantique - est progressivement mieux
connue. Archéologues et historiens africains confrontent leurs données à la tradition orale elle
aussi recueillie (en bibliographie : travaux de l’UNESCO).
Une autre piste documentaire à exploiter est le recours aux archives étrangères sur le
même sujet, dans une démarche comparatiste. Les rivalités apparues entre puissances
européennes dès les débuts de la traite transatlantique, dans les années 1440, ont généré des
témoignages qui devraient permettre des repérages comparatifs, indiquant par exemple la
présence de négociants et capitaines européens sur les côtes africaines, les traités passés avec
divers royaumes des lieux et les conflits qu’ils purent provoquer.
Quant aux chiffres, et plus précisément au nombre de captifs victimes de ce trafic, la
plus grande réserve doit être observée. Si des dénombrements minutieux ont été effectués
(voir en bibliographie : Mettas, Daget), il n’en reste pas moins que tous les documents de
traite ne furent pas examinés, tous les capitaines et armateurs ne procédèrent pas aux
déclarations pourtant obligatoires aux amirautés, tous les documents d’amirautés ne furent pas
conservés. Les déclarations de vente d’esclaves ne furent pas toutes exactes, loin de là. Par
ailleurs, de nombreux navires des ports français se livrèrent à la traite illégale après la période
d’interdiction allant du Congrès de Vienne en 1815 à la dernière loi française réprimant ce
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trafic en 1831. Dans les colonies, peu, voire aucune trace de l’arrivée des navires négriers et
des comptes rendus de vente de leurs cargaisons humaines n’a été conservée.
Le commerce des êtres humains alimentant plantations et mines des Caraïbes eut
également lieu sur place, des circuits de traite reliant le Brésil, les côtes du golfe du Mexique,
celles de l’Amérique du Nord et les Caraïbes insulaires. Un trafic constant, du XVIe au XIXe
siècle, quasiment non chiffrable, mais qu’il convient de prendre en considération. Guadeloupe
et Martinique reçurent pendant trois siècles des esclaves en provenance d’autres colonies de la
région des Caraïbes, insulaires et continentales (cf. en bibliographie : Lara, Caraïbes en
construction), dont le trafic s’opérait par les plaques tournantes de la traite humaines que
furent Saint-Thomas, Saint-Martin ou Saint-Barthélemy. Peu de traces subsistent, enfin, des
circuits que les navires négriers entreprenaient avant de repartir vers l’Europe. Beaucoup
d’entre eux, en effet, effectuaient des rotations vers l’Amérique du Nord, jusqu’au Canada et à
Terre-Neuve, ramenant par exemple du bois et des barriques de morue séchée ou salée. Ainsi
la notion de « commerce triangulaire » apparaît-elle bien simpliste (voir en bibliographie :
l’ensemble de la rubrique « Traite négrière »).
Le formidable moteur économique que devinrent les colonies européennes des
Caraïbes à partir du XVIIe siècle, jusqu’au milieu du XIXe - elles exportaient dans les années
1770, en valeur, deux fois et demie plus que les Treize Colonies d’Amérique du Nord avec
une population deux fois moindre - reposait sur la réduction en esclavage de 80 à 90% de
leurs populations totales et sur un système de contrôle et de mort sociale alors inédit. Le sucre
représentait, dans les colonies françaises, 80% des exportations.
La rentabilité du système n’est plus remise en question. Les techniques de production
demeurèrent longtemps relativement archaïques, mais les planteurs ou leurs administrateurs
avaient rapidement maîtrisé la gestion économique des exploitations et les circuits de vente.
Ils maîtrisèrent également le régime d’oppression imposé aux esclaves, le système qui leur
permettait, en toute légalité et en toute impunité, d’imposer des châtiments et d’exercer leur
droit de vie et de mort dans le secret de ce qu’il était convenu d’appeler leurs « habitations ».
Un terme très édulcoré, spécifique aux colonies françaises, désignant à l’époque les
exploitations de ceux qu’on appelait les « habitants », c’est-à-dire les colons propriétaires. Un
terme que l’historien cite entre guillemets, mais qui est emprunt d’une connotation d’accueil
et de protection qui correspond mal à la réalité esclavagiste. Le mot « plantation », utilisé
dans le domaine britannique, indique de manière plus exacte les fonctions de ce type
d’exploitation vouée exclusivement au travail, à la production et à son exportation.
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Il convient de signaler la grande rareté et la disparité des archives émanant de
plantations – inventaires, comptes, correspondances – pour les colonies françaises. Seuls sont
conservés en fonds publics des bribes de documents relatifs à des plantations de Saint-
Domingue ou de Martinique pour le XVIIIe siècle et un fonds documentaire pour une
exploitation de Guadeloupe dans la première moitié du XIXe siècle, récemment acquis par les
Archives nationales (voir en bibliographie : Schmidt). Ceci explique que depuis les
descriptions du travail, des techniques de production utilisées sur ces exploitations, des
conditions de vie des esclaves ou des châtiments subis, publiées par des observateurs
voyageurs ou missionnaires aux XVIIIe et XIXe siècles, la connaissance du quotidien des
esclaves a relativement peu progressé. Les données démographiques, dans ces conditions,
demeurent davantage des suppositions et hypothèses que des résultats de calculs opérés sur
des données nombreuses et fiables. Les documents émanant
Une plantation dans une colonie des Caraïbes. Gravure italienne, 1820.Coll. UNESCO.
des planteurs des colonies françaises – correspondance, journaux – sont eux aussi
relativement rares, contrairement aux possessions britanniques1.
1 Des journaux et des éléments de correspondance de planteurs ont été publiés, tels le Journal de Pierre Dessalles, parus sous le titre La vie d’un colon à la Martinique au XIXe siècle, vol. I à IV, édité par Henri de Frémont et Léo Elisabeth, Courbevoie, H. de Frémont, 1980-1986. Voir également les journaux de Elodie Dujon-Jourdain et Renée Dormoy-Léger publiés par Henriette Levillain sous le titre Mémoires de Békées, Paris, Editions L’Harmattan, vol.I,
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Les Caraïbes devinrent dès la fin du XVIIe siècle un lieu global de coercition et de
répression. Les gouvernements européens élaborèrent tous pour leurs territoires coloniaux une
série de réglementations de la mort sociale des esclaves et de terreur répressive, sans cesse
renouvelées. Un contrôle social particulièrement coercitif inscrit dans ce qu’il fut convenu
d’appeler les coutumes coloniales puis dans le Code noir de 1685 (voir en bibliographie :
Sala-Molins, Lara). Un système mortifère dans lequel on estime que pour un captif africain
parvenu vivant aux Caraïbes-Amériques, cinq autres étaient morts en amont, au cours de leur
capture en Afrique, sur les chemins menant vers les côtes, dans les baracoons côtiers ou à
bord des navires négriers. Les nouveaux arrivés dans les colonies avaient une espérance de vie
de cinq à six ans. 40 à 50% d’entre eux mouraient dans la première année suivant leur
débarquement.
Une longue succession de mesures réglementaires fixa sans cesse l’encadrement des
esclaves, le contrôle de leurs travaux, de leurs déplacements, de leurs éventuelles activités
hors des plantations, des événements de leur vie ainsi que la grande liberté d’action, de
décision de châtiment des maîtres à leur égard. En 1771, l’intendant nouvellement nommé
dans la riche colonie française de Saint-Domingue recevait des instructions dénuées
d’ambiguïté. Il était en effet précisé : « Si quelques maîtres abusaient de leur pouvoir, il faut,
en les réprimant en secret, laisser toujours croire aux esclaves que les premiers ne peuvent
avoir de torts envers eux » (Archives nationales d’outre-mer, Instructions du 24 avril 1771, C
9A/139).
2002, et le journal d’Elodie Huc, publié sous le même titre, ibidem, vol. 2, 2006. Des lettres, notes et extraits du journal personnel de Victor Schœlcher ont été publiés et sont en cours de parution, par Nelly Schmidt : La correspondance de Victor Schœlcher, Editions Maisonneuve et Larose, Paris, 1995, et Victor Schœlcher, Documents inédits, Editions l’Harmattan, Paris, 3 vol., 2007-2008. Au sujet des archives de plantations, signalons par exemple les travaux de Gabriel Debien qui rechercha notamment des archives de plantations de Saint-Domingue. Voir la collection de ses Notes coloniales conservée à la Bibliothèque nationale de France.
2 Extrait d’une lettre de Victor Schœlcher à Laurent-Antoine Pagnerre, secrétaire général du Gouvernement provisoire, 1er mai 1848, conservée à la Bibliothèque Schœlcher, Fort-de-France, Martinique.
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Victor Schœlcher, en tant que président de la Commission d’abolition et rapporteur de
ses travaux auprès du Gouvernement provisoire, procéda à une étude détaillée des documents
de la Révolution française dans le domaine colonial et des travaux de la Commission
coloniale présidée par le Duc de Broglie entre 1840 et 1843. Il s’inspira également beaucoup
du précédent britannique et des soixante six articles du décret d’abolition de 1833 dans les
colonies anglaises. Il s’efforça d’atténuer la rupture trop brusque que provoquerait la
transition du régime de l’esclavage auquel étaient soumis 75% de la population des colonies, à
celui de la liberté et du travail rémunéré. Il indiquait au gouvernement que la commission
avait entrepris « ce grand acte de réparation d’un crime de lèse-humanité » afin qu’il
« s’accomplît de la manière la plus profitable à ceux qui en ont été les victimes » tout en
prévenant « toute influence funeste (qui pourrait) en compromettre les résultats »3.
Les décrets organiques - rédigés et signés en avril 1848, en même temps que le décret
d’abolition lui-même - instauraient les droits et libertés de réunion, d’expression, de
publication de presse, le vote au suffrage universel masculin pour la désignation de
représentants à l’Assemblée nationale, la liberté du travail, l’accès à l’éducation pour tous. Ils
étaient aussi porteurs de leur négation. Les textes proclamant la liberté contenaient tous les
recours nécessaires et légaux pour la surveiller, la réglementer, la réduire enfin4.
Si le décret français d’abolition diffère du précédent britannique par son caractère
immédiat – alors que les Anglais avaient imposé à leurs esclaves une période d’apprentissage
de quatre ans chez leurs anciens propriétaires sans rémunération – il lui est similaire par bien
d’autres aspects. Les deux textes attribuent une indemnisation aux planteurs. Les esclaves
restent quant à eux démunis de toute compensation financière ou lopin de terre. Ils sont même
priés de quitter leur case et le terrain qu’ils mettaient en valeur sur la plantation si le
propriétaire l’exige (en bibliographie : Fuma, Lara).
Après une longue période historiographique de glorification pour le moins simpliste,
présentant une émancipation des esclaves due à l’action d’un homme, Victor Schœlcher, et de
construction mythique autour du personnage, les historiens ont analysé l’ensemble des
sources disponibles. Ils ont pu montrer la complexité du contexte, les difficultés rencontrées
par Schœlcher lui-même face aux intérêts en jeu – ceux des planteurs, des armateurs et
négociants des grands ports – mais aussi face aux hésitations des républicains de 1848 eux-
mêmes. Ils ont amorcé l’analyse des conditions concrètes de l’émancipation dans les colonies, 3 Victor Schœlcher, président, et Henri Wallon, secrétaire de la commission, Premier rapport fait au ministre de la Marine et des Colonies par la commission d’émancipation, paru dans le Moniteur universel du 3 mai 1848. 4 Cf. les analyses et les documents très complets fournis par Oruno D. Lara dans l’ouvrage La liberté assassinée. Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion, 1848-1856, Paris, Editions L’Harmattan, 2005.
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de la difficile et très lente transition de l’esclavage au régime du salariat. Ils ont mesuré les
répercussions de la mise en œuvre d’une nouvelle politique coloniale que les autorités
dotèrent des mesures d’encadrement les plus coercitives.
Des recherches menées dans le cadre du CERCAM (Centre de Recherches Caraïbes-
Amériques) ont tout récemment abouti à l’établissement de listes de propriétaires d’esclaves
en 1848 dans les colonies françaises où l’esclavage fut supprimé, en Guadeloupe, en
Martinique, en Guyane, à Saint-Barthélemy et au Sénégal (voir en bibliographie : Fisher-
Dans sa première intervention devant l’Assemblée nationale constituante, l’ancien
esclave Louisy Mathieu, élu représentant de la Guadeloupe en 1848 dans les rangs
schœlcheristes, remerciait la France pour la liberté de ses frères. Il tint, dans sa courte
allocution, à souligner la « générosité » des anciens esclaves qui avaient également voté en
faveur du fils de l’un des plus grands planteurs de l’île, Charles Dain, lui-même s’étant
présenté dans les rangs schœlcheristes : « Ils ont tendu la main, précisait-il, et ils ont dit cette
parole si noble : A l’oubli du passé ! ». Quant à François-Auguste Perrinon, « homme de
couleur libre » de la Martinique devenu commissaire général de la République de l’île au
lendemain de l’abolition, il avait dès le 27 février 1848 lancé un appel au calme « à (ses)
frères des colonies » et leur recommandait « le plus entier oubli du passé ». Le candidat
martiniquais Cyrille Bissette, « homme de couleur » né libre, affirmait à l’intention des
« nouveaux libres-nouveaux citoyens » les vertus de la « réconciliation sociale aux colonies »,
de l’oubli du passé et de l’unité des citoyens coloniaux appartenant à « une même patrie »
(voir en bibliographie : Lara, Schmidt).
C’est par une efficace politique d’intimidation des populations et d’oubli du passé que
les autorités coloniales firent disparaître pour plus d’un siècle de la mémoire collective le plus
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retentissant procès politique qu’aient connu les Caraïbes au XIXe siècle, celui de
l’indépendantiste guadeloupéen - séparatiste était le terme employé à cette époque - Léonard
Sénécal et de ses partisans. Sénécal était accusé d’avoir voulu répéter les événements de
Saint-Domingue en Guadeloupe au lendemain de l’abolition de 1848. Le procès au terme
duquel il fut condamné au bagne en 1851 fit l’objet de la publication, aux frais du
gouvernement, de plaquettes de compte rendu des débats et des condamnations destinées à
éradiquer toute idée séparatiste (voir en bibliographie : Lara).
Cependant que les « nouveaux libres » de 1848 étaient engagés à honorer et à
remercier une République libératrice – et son représentant version coloniale, Victor
Schœlcher – en « oubliant le passé », une geste historique spécifique fut progressivement
élaborée. Une histoire manipulée servit les intérêts que défendaient ses auteurs, planteurs,
administrateurs coloniaux qui transmirent non pas l’histoire, mais leurs revendications
économiques, commerciales, politiques, et leurs peurs sociales. L’enseignement, le clergé, la
presse furent les principaux relais de cette politique.
La traite négrière, l’esclavage et les résistances qu’ils suscitèrent furent réduits, dans
les œuvres écrites, à leur plus simple et brève expression. Des récits du temps de l’esclavage
furent transmis oralement au sein de certaines familles, mais les témoignages demeurèrent
bien furtifs. Cet « oubli du passé » dans des colonies où la connaissance de l’histoire risquait
d’être source de vengeances ou tout au moins de la perpétuation de partitions sociales
profondes, se doubla d’une occultation équivalente en France. Les échos coloniaux s’y
limitèrent à des faits de gloire, à l’hommage rendu à des colons pionniers et courageux, à une
abolition présentée comme ayant réglé tous les problèmes, à des encouragements adressés aux
candidats investisseurs.
Servitudes contemporaines
Il n’existe plus, aujourd’hui, de trafic humain et d’esclavage équivalents à ceux qui se
développèrent de manière intensive et légale du XVIe au XIXe siècle. Aucun amalgame n’est
possible, mais on parle, au XXIe siècle, de réduction en servitude d’une quantité encore
jamais atteinte d’individus dans le monde (27 à 30 millions d’adultes, 250 à 300 millions
d’enfants de 5 à 17 ans, selon Anti-Slavery International et l’UNICEF). Le dénuement
économique, un contexte de guerre, l’endettement familial sont aujourd’hui les causes
essentielles des trafics humains et de la réduction en servitude. L’Asie du Sud, l’Inde, le
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Pakistan, le continent africain, l’Indonésie, l’Amérique centrale et du Sud sont les plus
touchés, mais les pays occidentaux à haut niveau de vie ne sont pas épargnés.
Le rôle des organismes internationaux est déterminant depuis les années 1920-1930
dans le repérage des faits de traite humaine et d’asservissement. La Société des Nations publia
dans sa Convention de 1926 la première définition internationale, au XXe siècle, de
l’esclavage, qualifié d’« état ou condition d’un individu sur lequel s’exercent les attributs du
droit de propriété ou certains d’entre eux ». L’Organisation Internationale du Travail (OIT),
l’ONU, le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme de l’ONU, l’UNICEF, l’UNESCO
émirent, depuis lors, recommandations, programmes d’aide et d’éducation pour avertir et
lutter contre l’asservissement.
La Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne signée en décembre 2000
interdit l’esclavage, le travail forcé et la traite des êtres humains. La Commission Européenne
s’est prononcée en faveur de sanctions économiques contre les pays dans lesquels des
violations des droits de l’homme tels que la réduction en servitude et le travail des enfants
seraient avérés.
En France, le Comité contre l’Esclavage Moderne (CCEM) fournit une aide juridique
aux personnes en situation de servitude domestique. Une mission parlementaire sur
l’esclavage moderne a remis un rapport en décembre 2001 sur L’esclavage en France
aujourd’hui, dont certaines propositions ont été retenues pour « combattre la traite des êtres
humains et en reconnaître les victimes ». En mai 2001, le Parlement français a voté la loi
qualifiant « la traite et l’esclavage (des XVe-XIXe siècles) en tant que crime contre
l’humanité ». En 2002, l’Assemblée nationale adoptait une loi visant à « combattre la traite
des êtres humains » (voir en bibliographie : rubriques « Servitudes contemporaines » et
Sitographie).
A propos de l’enseignement
Les programmes scolaires français reflètent très directement la méconnaissance du processus
colonial qui reposa sur l’esclavage et les traites humaines entre les XVIe et XIXe siècles. Ils
en offrent même, en quelque sorte, une perception « zoomée ». Ils n’abordent cette
thématique que par le biais des échanges économiques, des « découvertes », ou par celui de
personnages ayant marqué cette histoire, tel l’abolitionniste Victor Schœlcher7. En outre, la
7 Cf. L’analyse des programmes des cycles primaires et secondaires de l’enseignement a fait l’objet de travaux de travaux et de propositions du Comité pour la Mémoire de l’Esclavage entre 2004 et 2008, dont l’essentiel fut publié dans Mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions, rapport du Comité pour la Mémoire de l’Esclavage,
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plupart des manuels scolaires ne mentionnent au mieux que l’un ou l’autre des faits : la traite
négrière transatlantique, la condition d’un esclave du Surinam par le biais du Candide de
Voltaire, la première abolition de l’esclavage de 1794 ou encore celle de 1848.
Aucun chapitre des programmes et des manuels n’est consacré de manière spécifique
et globale à la question du processus colonial, aux phénomènes de traite humaine, au système
esclavagiste et à leurs abolitions. La discipline désignée en tant qu’« éducation civique »
mentionne au mieux l’abolition de 1848 au chapitre des « Libertés individuelles et
collectives ». Certes la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et La Réunion disposent depuis
2000 de programmes « adaptés » aux contextes « locaux » à l’appui desquels une
bibliographie de manuels spécifiques existe8. L’enseignement national demeure toutefois bien
à l’écart de cette évolution. Les textes et l’iconographie reproduits à l’intention des élèves
consacrent le mythe d’une liberté octroyée par une République triomphante9.
Plus encore que la consultation de la thématique des manuels d’enseignement, celle
des instructions ou « consignes » émises par le ministère de l’Education nationale à l’appui
des programmes est révélatrice. Une circulaire ministérielle convia, en février 1998, les
recteurs d’académies à organiser des formations à destination des enseignants sur l’histoire de
la traite négrière, de l’esclavage, de leurs abolitions. Une autre, en novembre 2005, leur
recommandait d’engager les enseignants à évoquer la thématique à l’occasion de la
commémoration de la « Journée des esclavages et des abolitions » fixée au 10 mai de chaque
année10. En fait, l’histoire est depuis de nombreuses années, dans l’enseignement français des
classes primaires, reléguée au rang de ce qu’on a appelé « discipline d’éveil ». Une pratique
qui fut considérée comme laissant aux enseignants la liberté d’aborder une thématique
historique de leur choix, pourvu que l’école primaire inculque aux élèves - je cite les
instructions ministérielles relatives aux programmes - une « conscience nationale ». Mais
qu’en était-il des expansions coloniales ? Ces dimensions étaient en fait envisagées comme
Paris, Editions La Découverte, 2005. Je renvoie au sujet de l’évolution de l’enseignement et des débats entraînés par le vote de la loi française du 21 mai 2001 reconnaissant la traite négrière et l’esclavage comme crimes contre l’humanité, à Nelly Schmidt, “Teaching and Commemorating Slavery and Abolition in France: From Organized Forgetfulness to Historical Debates”, in Ana Lucia Araujo, Ed., Politics of Memory : Making Slavery Visible in the Public Space, Chapter 6, Annual Meeting of the American Historical Association, Boston, January 2011, Londres, Routledge, 2012. 8 Voir le Bulletin Officiel de l’Education nationale, n°8, 24 février 2000, « Spécificités des Départements d’outre-mer dans les programmes d’histoire-géographie ». 9 Un matériel pédagogique complémentaire existe. Cf. par exemple dans le DVD de l’UNESCO intitulé « Routes de l’Esclave. Une vision globale » : Nelly Schmidt, dossier pédagogique Asservir, Quiz et informations contenues dans « Pour en savoir plus », 2010. 10 Voir le Bulletin Officiel de l’Education Nationale, n°41, 10 novembre 2005, « La mémoire de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions ».
Volume collectif La Route de l’Esclave, UNESCO
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devant confirmer la « cohésion nationale », par l’intermédiaire d’un choix judicieux
d’événements à signaler, à faire apprendre, aux dépens d’autres, souvent moins glorieux.
Le statut de l’histoire est différent dans l’enseignement secondaire. Elle y est une
discipline obligatoire depuis toujours, certes, mais de récentes mesures ministérielles - en
2009-2010 - tendent à réduire son enseignement dans les dernières classes du cursus. Il est ici
utile d’évoquer les « consignes » ou instructions auxquelles doit répondre l’enseignement de
l’histoire en France de nos jours. Ces consignes s’adressent en fait à la mémoire, elles sont
affaires de mythes, de certitudes à transmettre. Il ne s’agit pas de comprendre, mais d’avoir en
mémoire un certain nombre de faits qui permettent d’acquérir, comme le préconisèrent
Michelet ou Lavisse il y a plus d’un siècle, cette fameuse « conscience nationale ». Il s’agit de
transmettre une sélection de faits symboliques d’une nation, de son émergence, de son unité,
de sa puissance, au nom de valeurs considérées comme « universelles »...
Commémorations
Parmi les questions que soulève l’analyse d’une commémoration, certaines concernent le
sens, les fonctions du phénomène, et la mémoire qu’il est sensé transmettre. La liaison
apparaît ainsi immédiate entre commémoration et pouvoir politique. Une commémoration se
choisit, se décide, s’organise, se rend visible du grand public par de multiples moyens.
L’étude des fonctions qui lui sont assignées, de manière plus ou moins explicite, est
particulièrement révélatrice de la manière dont l’autorité commémoratrice entend guider,
voire canaliser la mémoire du fait commémoré. Les questions qui se posent alors sont
directement liées au rapport existant entre histoire et pouvoir.
Dans le cadre spécifique des célébrations liées à l’histoire des colonies françaises des
Caraïbes, et notamment de l’esclavage et de ses abolitions, quatre périodes commémoratives
sont évoquées ici : la célébration du premier anniversaire de l’abolition de l’esclavage en
Guadeloupe en 1849, la commémoration du Tricentenaire des Antilles et de la Guyane en
1935, le centenaire de l’abolition de l’esclavage en 1948 puis son cent cinquantenaire en
1998.
1849
En 1849, malgré les instructions très précises adressées aux gouverneurs coloniaux par le
ministère de la Marine et des Colonies pour le déroulement de l’événement, le premier
anniversaire dit « de la liberté » donna lieu, en Guadeloupe, à des incidents qui opposèrent les
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tendances politiques en lice pour les élections législatives du mois de juin. Un arbre de la
liberté devait être planté par le gouverneur en présence du préfet apostolique. Les leaders du
premier courant indépendantiste de l’île, apparu en 1848 à l’initiative de Marie-Léonard
Sénécal, entreprirent de subtiliser l’arbre préparé pour l’événement et d’en détourner
l’utilisation à leur profit. Ils organisèrent une commémoration parallèle à grands renforts
d’annonces dans les campagnes. Alors que les trois-quarts de la population de la colonie
venaient d’accéder au statut de liberté, proclamations officielles et cérémonies se multipliaient
pour encourager au travail, au respect de la propriété privée, de l’ordre public, pour établir un
système de contrôle social susceptible de remplacer les cadres de l’esclavage.
A la fin du XIXe siècle, si les commémorations de l’abolition se traduisirent, à Paris,
sous la forme de banquets en l’honneur de Schœlcher, elles prirent un caractère plus politique
après sa mort survenue en 1893. Les associations du souvenir se multiplièrent, à Paris et dans
les colonies. C’est en son hommage que les premiers soldats de Guadeloupe et de Martinique
engagés pour le premier conflit mondial partirent pour l’Europe. Cependant qu’en 1914, le
gouverneur de Guadeloupe Emile Merwart faisait du 21 juillet, jour de la Saint-Victor, une
fête légale.
1935
Comme une réponse aux alertes lancées au sujet des maux dont souffraient les colonies depuis
des décennies, aux grèves des travailleurs de la canne des années 1930, mais aussi aux
difficultés liées à la reconstruction de la Guadeloupe après le cyclone dévastateur de
septembre 1928, le gouvernement organisa une grande célébration, celle du Tricentenaire du
rattachement des Antilles et de la Guyane à la France, 1635-193511. En écho au succès de
l’Exposition coloniale internationale de Paris en 1931, un programme de commémoration des
débuts de la colonisation française était élaboré alors que des mouvements de remise en cause
des « bienfaits » du processus colonial se faisaient jour tant aux Caraïbes, en Afrique qu’en
Asie.
L’Etat prit les rênes de cette entreprise inédite de manipulation de l’histoire. On
organisa, à Paris, les manifestations les plus diverses, conférences, réalisation de films,
spectacles à l’opéra, expositions, dîners commémoratifs. Une luxueuse croisière transporta
plus de trois cents personnalités vers les Caraïbes sur le paquebot Colombie. Rues, routes,
ponts et monuments de Guadeloupe, de Martinique et de Guyane étaient restaurés à la hâte 11 La loi du Tricentenaire du rattachement des Antilles et de la Guyane à la France, dont le projet fut présenté le 25 février 1935, fut votée le 25 avril suivant.
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pour l’occasion. La presse fut sollicitée pour chanter en un chœur uni les louanges et les
promesses de l’attachement indéfectible de ces colonies à la « mère patrie » depuis trois
siècles.
Les récits historiques les plus fantaisistes évoquèrent les dangers courus par les
premiers colons faisant face aux populations autochtones présentées comme de redoutables
cannibales. On souligna la compétence des premiers administrateurs, le caractère salvateur de
la traite négrière et le généreux traitement de la main-d’œuvre esclave. L’un des objectifs
principaux était d’attirer capitaux et commerçants dans des colonies qui se remettaient mal de
troubles sociaux chroniques. Mais si l’Exposition coloniale internationale de 1931 devait
étonner ses visiteurs par la vision d’une « plus grande France », les manifestations du
Tricentenaire des Antilles et de la Guyane n’avaient pas le même objectif. Il fallait en effet
convaincre les populations coloniales elles-mêmes des bienfaits de leur dépendance, et la
population française que ces terres lointaines étaient des prolongements exotiques de la
France qui avaient, depuis trois siècles, montré les preuves de leur attachement à l’hexagone.
Une adroite propagande devait, sur ces fondements, persuader investisseurs et entrepreneurs
de réelles promesses de prospérité outre-Atlantique.
1948
Le contexte de la commémoration du centenaire de l’abolition de l’esclavage, celui des
lendemains du second conflit mondial, était aussi celui du vote de la toute récente loi de
départementalisation. Le mythe schœlcherien forgé au lendemain de l’abolition de 1848
n’avait fait que s’amplifier. Il avait justifié bien des décisions politiques et symbolisé le mythe
républicain dans les domaines coloniaux. Pendant la seconde Guerre mondiale, le nom de
Victor Schœlcher avait été invoqué tant par la propagande des autorités de Vichy que dans les
rangs de la Résistance. On célébra de toutes parts l’« attachement à la patrie » par des
célébrations publiques de la Saint Victor.
Aimé Césaire, en 1946, s’était référé à plusieurs reprises à Schœlcher, en tant
qu’héritier des Principes de 1789 et de la première République, au cours du discours qu’il
prononça en tant que rapporteur du projet de loi de départementalisation des « anciennes
colonies ». En 1947, Emile Merwart et Gaston Monnerville étaient à la tête d’un Comité
fédéral des originaires d’outre-mer pour l’organisation du centenaire de l’abolition de
l’esclavage et le transfert des cendres de Victor Schœlcher et de Félix Eboué au Panthéon. Les
comités départementaux créés dans les colonies organisaient les festivités locales et la
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« plantation d’un arbre de la liberté »12. La personnalité de Schœlcher, la date du 27 avril
1848, jour de la signature des décrets d’abolition par une majorité des membres du
Gouvernement provisoire à Paris, étaient les deux références célébrées et retenues par le
ministère de l’Education nationale. Le ministère recommandait aux recteurs d’organiser la
commémoration de l’abolition en joignant à la circulaire d’instruction une « Notice sur Victor
Schœlcher »13. En Sorbonne, Gaston Monnerville, Léopold Sedar Senghor et Aimé Césaire
étaient invités à prononcer des conférences le 27 avril 194814.
Le discours commémoratif était simple : l’abolition de l’esclavage était due à l’action
d’un homme qui avait renouvelé le courant d’assimilation coloniale apparu sous la Révolution
Française et dont l’aboutissement avait été le vote de la loi de départementalisation du 19
mars 1946. Il bénéficia de relais efficaces dans la presse, de conférences et d’émissions de
radio organisées par le Grand Orient de France, de circulaires ministérielles dans le domaine
de l’éducation qui transmirent sans variante le leitmotiv prévu. Mais malgré de nombreuses
publications, réalisées tant à Paris15 que dans les colonies16 - recueils de textes de Schœlcher,
de correspondances de divers contemporains - aucune initiative de recherche, aucun
mouvement historique ne naquit de l’ensemble de ces manifestations.
1998
Cent cinquante ans après l’abolition de l’esclavage, les médiateurs demeuraient surpris
lorsque des historiens leur expliquaient la réussite plus que séculaire de la politique d’oubli du
passé mise en œuvre en 1848. L’iconographie abondamment répandue recourait sans critique
à l’imagerie mise au point sur commande en 1848-1849. Le cliché de l’esclave aux chaînes
rompues portant un regard reconnaissant vers l’abolitionniste et la République libérateurs était
encore à l’ordre du jour. Des tableaux commandés par le gouvernement de la IIe République,
tels que ceux de François Auguste Biard, « L’abolition de l’esclavage dans les colonies 12 Voir le récit des événements de Guadeloupe dans le fascicule intitulé Commémoration du Centenaire de l’abolition de l’esclavage, conférence prononcée le 27 avril 1948 à Basse-Terre, en Guadeloupe, par Raoul Bogat, Imprimerie officielle, Basse-Terre, 1949. 13 Circulaire du 16 avril 1948 signée par le directeur de cabinet du ministre de l’Education nationale H. Viguier. La notice intitulé « Schœlcher et l’abolition de l’esclavage », due à l’historien Charles-André Julien, était un extrait de la revue encyclopédique Le Larousse mensuel de mai 1948. 14 Les discours prononcés en Sorbonne furent publiés par les Presses universitaires de France en 1948. 15 Par exemple, le recueil d’extraits d’ouvrages de Schœlcher réuni par Emile Tersen sous le titre Esclavage et colonisation, paru aux Presses universitaires de France en 1948, l’article « Centenaire de la liberté » publié par la Revue d’histoire des colonies la même année, celui de L. Joubert, intitulé « Les conséquences géographiques de l’émancipation des Noirs aux Antilles, 1848 » dans les Cahiers d’outre-mer, ou l’ouvrage de Gaston-Martin, L’abolition de l’esclavage : 27 avril 1848, paru dans la Collection du Centenaire de la Révolution de 1848 ouverte par les Presses universitaires de France. 16 Voir par exemple Pierre Baude, Centenaire de l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises et la Seconde République française, 1848-1948, Fort-de-France, Imprimerie o
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françaises »17 ou d’Alphonse Garreau, « Proclamation de l’abolition de l’esclavage à La
Réunion »18 glorifiaient la liberté apportée par les commissaires généraux de la République
qui remplaçaient les gouverneurs du temps de la monarchie, mais des éléments importants de
ces œuvres de grande dimension étaient, aussi, des instruments aratoires, des profils d’usines
sucrières, de champs de canne à sucre et, au loin, de navires de commerce en attente de leurs
cargaisons de barriques de sucre et autres denrées coloniales. Pas de liberté sans travail, ordre
public, respect de la propriété privée, soumission à la nouvelle « police du travail ». La même
remarque peut d’ailleurs être faite au sujet du célèbre tableau « A Slave Family in
Exaultation » conservé à la Bibliothèque nationale de la Jamaïque, et qui figure parmi les
représentations les plus largement utilisées de la période de l’émancipation dans les British
West Indies. La lithographie représentant la « Plantation d’un arbre de la liberté à Basse-
Terre »19 en Guadeloupe, en mai 1848, annonce de manière tout aussi précise quels seraient
les médiateurs de la politique républicaine en matière coloniale. Sur fond de foule porteuse de
piques, de baïonnettes, de bonnets phrygiens évocateurs et de crucifix, la scène représente la
plantation, en guise d’arbre de la liberté, d’une tige de canne à sucre en présence du
gouverneur, de ses conseillers privés et du préfet apostolique de la colonie.
Le discours du cent-cinquantenaire fut quant à lui particulièrement ambigu. Le slogan
des principaux organisateurs des manifestations au niveau national, le ministère de la Culture
et le secrétariat d’Etat à l’Outre-Mer, fut « Tous nés en 1848 ». Ainsi aboutissait-on à une
manière de nier les siècles de résistance des esclaves qui avaient précédé, et de conférer à
1848 un caractère de fatalité heureuse, de solution à tous les problèmes qui se posaient alors,
en une sorte de réconciliation nationale. Les siècles d’esclavage, les phénomènes de résistance
des esclaves et les processus d’abolition au sujet desquels tant de travaux historiques restaient
à entreprendre, se voyaient dissous dans un discours célébrant « l’expression créative de
l’identité » des continents mis en présence par la traite négrière transatlantique en un
« métissage »20 joyeux et positif, qui gommait les antagonismes du passé… S’il convient de
reconnaître l’impact indéniable qu’eurent les multiples manifestations de tous ordres qui
furent organisées en 1998, tant sur l’opinion publique, les médias qu’à plus long terme sur la
recherche et l’enseignement, force est de constater que l’ensemble demeura très franco-centré.
17 Aujourd’hui conservé au musée national du Château de Versailles. 18 Aujourd’hui conservé au musée du Quai Branly à Paris. 19 Lithographie, Bibliothèque nationale de France. 20 Voir le vocabulaire employé dans le Préambule de la liste officielle des manifestations et initiatives culturelles de la commémoration du 150e anniversaire de l’abolition de l’esclavage pour l’année 1998, ministère de la Culture et secrétariat d’Etat à l’Outre-Mer.
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La dimension comparatiste internationale qui eût permis de situer les événements
commémorés dans leur large contexte – mis à part quelques colloques universitaires – resta
étrangère à la démarche générale. Le programme de « La Route de l’Esclave » avait pourtant
été lancé par l’UNESCO depuis 1994.
En 1983, la loi du 30 juin (n°83-550) relative à la commémoration de l’abolition de
l’esclavage a fixé une date spécifique à chaque ancienne colonie, le choix étant lié à la période
la plus significative en ce domaine dans l’histoire de chacune d’elles. Les dates suivantes sont
devenues des jours fériés : Martinique : 22 mai ; Guadeloupe : 27 mai ; Guyane : 10 juin, La
Réunion : 10 décembre, Mayotte : 27 avril. La date du 10 mai fut choisie en 2005 pour la
France hexagonale, suite aux recommandations de la loi du 21 mai 2001 et aux travaux du
Comité pour la Mémoire de l’Esclavage, pour la célébration de la « Journée nationale des
mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions ».
***
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RESSOURCES
La recherche historique
La recherche historique relative aux traites négrières, à l’esclavage, à leurs abolitions
est, on le voit, en perpétuelle évolution depuis les années 1970. Elle souffrit toutefois,
jusqu’aux années 2000, d’une réelle sous-considération au sein des organismes de recherche
en sciences humaines et sociales, pourtant susceptibles de lui accorder reconnaissance et
financements. Si aucune chaire d’histoire de l’esclavage et de ses abolitions n’existe encore à
ce jour dans l’université française, certaines équipes se sont toutefois constituées.
Centres de recherche universitaires :
‐ Université Paris IV-Sorbonne, Centre R. Mousnier - Histoire et Civilisations
(UMR 8596 du CNRS) : Programme « Esclavage, abolitions, abolitionnistes de
‐ Musée Dapper, Paris, Festival cinématographique «Regards sur l’esclavage : Mémoire
vive» ;
‐ Musée d’Aquitaine, Bordeaux, salles permanentes pour l’exposition « Bordeaux, le
commerce atlantique et l’esclavage », depuis 2009 ;
‐ Musée du Château des Ducs de Bretagne, Nantes (exposition temporaire De
l’esclavage à son abolition, catalogue de l’exposition réalisée au musée (1992-1994)
par l’association Les Anneaux de la Mémoire) et salles permanentes ;
‐ Musée du Nouveau Monde, La Rochelle (publication : L’esclavage dans les
collections du Musée du Nouveau Monde, par Thierry Lefrançois, Editions des Musées
d’art et d’histoire) ;
‐ Musée de la Compagnie des Indes, Lorient ;
‐ Musée de la Marine de Loire, Châteauneuf-sur-Loire ;
‐ Muséum d’Histoire Naturelle, Nîmes ;
‐ Musée africain, Lyon.
Bibliothèques :
‐ Bibliothèque nationale de France, site Gallica ;
‐ Bibliothèque de l’Arsenal, Paris, Bibliothèque nationale de France ;
22 Cf. Nelly Schmidt, Victor Schœlcher, Paris, Editions Fayard, 1994, annexe : Les « dons Schœlcher » et Inez Fisher-Blanchet, Catalogue de l’exposition Victor Schœlcher au Musée de l’Homme, à partir des dons Schœlcher, Centre de Recherches Caraïbes-Amériques, 1994.
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‐ Bibliothèque Schœlcher et Archives Départementales de la Martinique, Fort-de-
France, Martinique : site web « Histoire et Patrimoine. Autour de la correspondance de
Victor Schœlcher », écrit par Nelly Schmidt ;
‐ Bibliothèque universitaire, Université de La Rochelle, exposition « La Route des
Abolitions de l’Esclavage et des Droits de l’Homme », réalisée par l’association du
même nom.
Organismes gouvernementaux :
‐ Assemblée nationale : « Histoire et patrimoine », « Abolition de l’esclavage »,
Le prisme colonial est particulièrement révélateur des non-dits et des lacunes qui
subsistent lorsqu’on aborde les sujets relatifs à la colonisation et aux phénomènes de servitude
dans l’histoire. Les a priori sont encore légions non seulement dans l’enseignement, mais
aussi dans les media et dans certains milieux mêmes de la recherche. Les amalgames opérés
récemment – à partir du début de ce XXIe siècle – au sujet des lois dites « mémorielles » ont
éclairé les fosses béantes qui séparent encore la recherche de ses moyens de transmission vers
le public le plus large.
L’un des effets de la captation du passé qui se mit en place après l’abolition de
l’esclavage de 1848 en France et dans les colonies françaises se manifeste encore dans les
réactions de surprise, de déni parfois, quand une histoire jusqu’alors minorée, souvent
édulcorée, parfois falsifiée, se propulse au rang de commémoration nationale. Ce fut le cas
lorsqu’après le vote de la loi française de mai 2001 qualifiant la traite négrière et l’esclavage
de crimes contre l’humanité, une journée nationale de commémoration fut fixée au 10 mai.
Les débats suscités, par exemple, par l’article 4 de la loi du 23 février 2005 relatif à
l’enseignement des « bienfaits » de la colonisation française - abrogé depuis - témoignent de
la difficulté qu’éprouvent la France et certains pays d’Europe à se tourner vers leur passé
colonial, passé de traites humaines et de réduction en servitude de millions d’individus23.
Il paraît encore bien laborieux, en effet, de lever le voile sur les enjeux de la réalité
coloniale et esclavagiste française alors que semblent renaître certains hymnes à la
glorification de la colonisation, tant au sein du parlement français que dans certains milieux
universitaires européens, et que les media sortent à peine d’une longue période d’autocensure
sur ces thèmes. Comment comprendre que si certains historiens estimèrent à juste titre qu’il
s’agissait là de pans entiers de l’histoire de l’humanité qu’il convenait d’étudier, de critiquer,
de transmettre, d’autres jugèrent tout à fait obsolète, voire déplacée la qualification en tant
que crime contre l’humanité dont traite négrière et esclavage firent l’objet ? Comment
accepter que certains estiment tout à fait injustifiée l’affirmation d’un traumatisme inscrit
23 Je me réfère notamment aux débats suscités par cet article de loi de février 2005 votée par l’Assemblée nationale française, portant que « Les programmes de recherche universitaire accordent à l’histoire de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, la place qu’elle mérite » et que « Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l’histoire et aux sacrifices des combattants de l’armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit ». Voir également, concernant l’historiographie britannique, l’article de Seumas Milne, « Réhabilitation du colonialisme », in Le Monde Diplomatique, Paris, mai 2005.
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dans le long terme, provoqué par ces événements et ressenti aujourd’hui encore par les
héritiers de cette histoire ? Comment admettre que l’on ait pu méconnaître à ce point, nier
parfois, l’ampleur et la longévité des séquelles liées à un système colonial dont de si
nombreux aspects sont encore sensibles aujourd’hui ? La politique de l’oubli du passé mise en
œuvre en 1848 et la canalisation des mémoires avaient-elles à ce point atteint leurs objectifs ?
Pour en savoir plus
Il s’agit là d’une sélection bibliographique en langue française. Pour une bibliographie
internationale, indispensable pour situer et comparer les thèmes évoqués, voir les autres
indications bibliographiques contenues dans cet ouvrage et sur le site web correspondant,
ainsi que le DVD de l’UNESCO « Routes de l’Esclave. Une vision globale », éléments
pédagogiques en PDF : « Asservir » et « Pour en savoir plus ».
Traite négrière
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