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DIASPORAS DOSSIER THE PARIS GLOBALIST A STUDENT INTERNATIONAL AFFAIRS MAGAZINE VOL III. Issue 1. - JAN. 2009 www.global21online.org/paris Diasporas : les difficultés d’une définition INTERVIEW : Riva Kastoryano “Une diaspora est avant tout une identité-refuge” La diaspora, un levier de pouvoir pour la Chine contemporaine ? Outsourcing extremism : Diaspora Funding & Hindu Nationalism Diasporas as legal actors : challenges & opportunities for international law Mizos juifs : une diaspora autoproclamée ? > > > > > > EN PARTENARIAT AVEC L’ ASSOCIATION FRANÇAISE POUR LES NATIONS UNIES
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Diasporas

Mar 09, 2016

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Numéro de l'hiver 2009 du Paris Globalist
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Page 1: Diasporas

DIASPORASDOSSIER

THE PARIS GLOBALISTA STUDENT INTERNATIONAL AFFAIRS MAGAZINE

VOL III. Issue 1. - JAN. 2009www.global21online.org/paris

Diasporas : les diffi cultés d’une défi nition

INTERVIEW : Riva Kastoryano “Une diaspora est avant tout une identité-refuge” La diaspora, un levier de pouvoir

pour la Chine contemporaine ?

Outsourcing extremism : Diaspora Funding & Hindu Nationalism

Diasporas as legal actors : challenges & opportunitiesfor international law

Mizos juifs :une diaspora autoproclamée ?

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EN PARTENARIAT AVEC L’ ASSOCIATION FRANÇAISEPOUR LES NATIONS UNIES

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5 ÉDITORIAL

DOSSIER THÉMATIQUE :

DIASPORAS pp. 6 à 33

THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1. THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

SOMMAIRE

06 DIASPORAS : LES DIFFICULTÉS D’UNE DÉFINITION Jean Doursounian

10 INTERVIEW : Riva Kastoryano,“Une diaspora est avant tout une identité-refuge” Naïké Desquesnes

12 DIASPORAS AS LEGAL ACTORS : challenges & opportunities for international law Priscilla Rouyer

14 REGULATING DIASPORA TRANSACTIONS : an international security challenge Steven Koch

16 OUTSOURCING EXTREMISM : Diaspora Funding and Hindu Nationalism Vikramaditya Singh

18 La diaspora, un levier de pouvoir pour la Chine contemporaine ? Alain-James Palisse et Magali Robert

20 LE PARADOXE DE LA DIASPORA JUIVE Laura Waisbich 22 MIZOS JUIFS : une diaspora auto-proclamée ? Julien Levesque

24 LA DIASPORA LIBANAISE, une chance pour le Liban ? Clara Tardy

26 BRIDGING THE GULF : Diasporas and Democracy Janhavi Naidu

28 Diaspora, identité et culture : LE CAS BERBÈRE Farida Belkacem

30 PHOTOSPREAD : À PARIS, LES TAMOULS ONT TROUVÉ LEUR CHAPELLE Philippe Calia

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SOMMAIRESOMMAIRESOMMAIRESOMMAIRESOMMAIRE

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> THE PARIS GLOBALIST is a member of

Photo 1è et 4è de couverture -Creative Commons licence photo credit : sayheypatrick

34 Le franquisme en procès Inès Levy

35 La guerre du froid n’aura pas lieu Nathan Grison

36 The Future of UN Peacekeeping Yovan Jankee

37 China, Colonialism and the Congo Marissa Dooris

38 The Far Right in Slovakia Michal Onderco

39 La peur du (trou) noir Tom Morisse

BOOK REVIEWS :

40 Pour en fi nir avec la repentance coloniale, Daniel Lefeuvre, par Clémence Léobal

41 Le Mur de fer : Israël et le monde arabe, Avi Shlaim, par Mari-Ann Larsen-Volay

42 The Brief and Wondrous Life of Oscar Wao, Junot Diaz, by Joanna Margueritte

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L’

THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

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ÉDITORIAL

importance économique, politique voire légale des diasporas est de plus en plus reconnue et étudiée. Pourtant, la recherche peine à arrêter une défi nition unique et englobante du phénomène diasporique.

Extrêmement ancien, le terme « diaspora » diaspora » diaspora est forgé dès l’Antiquité pour désigner l’étendue du monde grec. Mais dans son usage contemporain, l’expression est pendant longtemps réservéservéserv e à l’expérience juive. Elle se réfèfèf re alors à des communautés dispersées unies par des liens fondés sur une perte tragique de la terre ancestrale, assortie d’un fort désir de retour. Mais le « modèle archétypal Juif » typal Juif » typal Juif suffi t-il aujourd’hui à recouvrir la diversité des expériences diasporiques ? Peut-on seulement établir qu’une diaspora existe selon des critères objectifs et clairement identifi ables ?

Souvent vidée de son sens, l’expression est utilisée à tort et à travers dans les médias qui évoquent évoquent él’existence de diasporas scientifi ques ou encore artistiques, et tendent à utiliser le terme, visiblement très en vogue, pour désigner de manière assez fl oue tous les groupes de nationaux installés hors de leur pays d’origine. Parler de diaspora française au même titre que de diaspora arménienne n’nienne n’nienne na pourtant que peu de sens. S’accorder sur les critères diffédiffédiff renciatifs des diasporas est donc essentiel afi n d’éviter que le ph’éviter que le ph’é énomène diasporique ne se mêle, dans le langage courant, à toutes les formes de migration et d’expatriation.

Car les diasporas recouvrent une réalité bien spécifi que, une réalité qui se négocie actuellement une place prépondérante sur la scène internationale.

Économiquement, les diasporas jouent un rôle qui force à les envisager comme des interlocuteurs cruciaux, tant pour leurs pays d’origine que pour leurs pays d’accueil. Via des transferts de fonds croissants, elles constituent en effet un acteur central du processus de développement des États éveloppement des États équittés.

Politiquement, certaines diasporas servent explicitement la politique étrangère de leur terre de

provenance au travers d’activités de lobbying très structurées. D’autres se révévé èvèv lent un habile outil de soft power : c’est le cas de la diaspora chinoise, qui multiplie les « Chinatowns » aux quatre coins du globe. Certaines diasporas contribuent par ailleurs à l’évolution du droit dans leur patrie d’évolution du droit dans leur patrie d’é ’origine où elles jouent un rôle essentiel dans le processus de transition démocratique. En témoigne la diaspora cambodgienne de France et de Belgique qui, par sa mobilisation, s’est faite le catalyseur de la justice transitionnelle au Cambodge.

Acteurs à part entière des relations internationales, les diasporas ont acquis un tel poids que certains Éles diasporas ont acquis un tel poids que certains Éles diasporas ont acquis un tel poids que certains

tats nomment au sein de leur gouvernement des ministres en charge des nationaux de l’extérieur. C’est le cas de l’Arménie qui, en juin dernier, a confi é à Hranush Hakobian le tout nouveau poste de ministre responsable de la diaspora.

Diffi ciles à cerner, les diasporas semblent ne rentrer dans aucune case. Et alors qu’elles s’immiscent de plus en plus clairement dans le paysage international, tant économiquement que politiquement, elles ne jouissent toujours d’aucun statut légal. C’est la raison pour laquelle l’équipe du Paris Globalist a souhaité s’y int’y int’ éresser.

À la découverte d’un objet politique non identifi é, bienvenue dans notre première édition de 2009. Outre un dossier consacré aux diasporas, ce numéro vous emmènera en Arctique, une région qui est aujourd’hui l’objet de convoitises et de tensions internationales, puis vous invitera, entre autres, à réfl échir à l’avenir des forces de maintien de la paix des Nations Unies. Le magazine vous guidera enfi n à travers les mots et les pages, dans le meilleur et le plus polémique des essais politiques.

En vous souhaitant une riche et agréable lecture,

> ÉDITORIAL> ÉDITORIALÉDITORIALÉDITORIALÉDITORIALÉDITORIALDIRECTRICE DE

LA RÉDACTION

Chine Labbé

RÉDACTEUR EN CHEF

Julien Levesque

RESPONSABLE PARTENAIRES

Priscilla Rouyer

ASSISTANTE PARTENARIAT

Inès Lévy

ÉDITEURS ANGLOPHONES

Andrew Kessinger

Vikramaditya Singh

Julian Weideman

ÉDITEUR FRANCOPHONE

Côme Déchery

PHOTOGRAPHE -

ICONOGRAPHE

Philippe Calia

GRAPHISME

Camille Bui

L’Chers lecteurs,

> Chine Labbé,étudiante en 5è année,

École de journalisme de Sciences Po

< (c) Philippe Calia

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DIASPORAS :

Phénomène ancien, la diaspora demeure diffi cile à défi nir. Étant « at home abroad » et profi tant de la mondialisation, les diasporas se caractérisent pourtant par une relation complexe avec le passé. Intégrée mais jamais assimilée, moderne mais ayant toujours un compte à régler avec l’histoire, une diaspora apparaît comme un OVNI dans le monde des relations internationales.

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DIASPORASDIASPORASles diffi cultés d’une défi nition

« Où que vous alliez, vous serez une polis ». Cette phrase célèbre fut plusieurs fois présentée par Hannah Arendt comme le « mot de passe » de la colonisation grecque, colonisation qui allait constituer les prémisses d’une diaspora. Le mot diaspora (qui signifi e littéralement « graines dispersées ») est d’ailleurs forgé dès l’Antiquité pour désigner l’étendue du monde de culture grec à travers les colonies helléniques qui essaimaient tous les rivages de la Méditerranée, et prouve de par lui-même que le phénomène n’est pas récent. Ancien, ce phénomène s’est pour autant accentué avec la globalisation qui permet plus que jamais d’être « at home abroad »abroad »abroad , ce qui est la situation par excellence d’une diaspora.1

Désormais, les diasporas réalisent leur idéal commun, à savoir pouvoir être en contact avec la « mère patrie » sans quitter leur terre actuelle, terre considérée presque toujours, malgré parfois des siècles d’implantation, comme le « pays d’accueil »accueil »accueil .2

La mondialisation aurait pu nuire aux diasporas. Alors que les moyens de communications s’améliorent, que les distances se réduisent, on pourrait croire que ces visions idéalisées du pays d’origine, terre ancestrale sur laquelle sont projetés tous les fantasmes de puissance, sont amenées à se fracasser sur les « réalités du terrain »du terrain »du terrain . Bien au contraire, insérées dans le « village global »village global »village global , les diasporas profi tent de la mondialisation sans se sentir menacées. Dans son rapport de 2005, la Commission globale sur les migrations internationales éinternationales éinternationales tablissait qu’environ 600 millions d’individus vivaient en situation de migrants.3 C’est donc quasiment 10% de

l’humanité qui est potentiellement concerné par le phénomène diasporique.

De fait, les diasporas sont de plus en plus visibles, et chaque nationalité semble en voie de posséder sa propre diaspora : on parle ainsi communément des diasporas irlandaise, grecque, arménienne, juive, libanaise, chinoise, indienne, portugaise, espagnole, italienne, mais aussi philippine, vietnamienne, turque, kurde, mexicaine, cubaine, coréenne, etc. Le terme englobe parfois un continent entier (la « diaspora africaine »), et se retrouve dès lors utilisé sans grande rigueur.4 Les manifestations du ph4 Les manifestations du ph4 énomène diasporique soulèvent de nombreuses questions sans rèvent de nombreuses questions sans rè éponse : Qu’est-ce qu’une diaspora ? Comment se constitue t-elle ? En quoi diffè? En quoi diffè? En quoi diff re t-elle d’une communauté d’expatriés ?

Diaspora et émigration

D’emblée, il faut s’accorder sur les termes utilisés : quelle diffé: quelle diffé: quelle diff rence établit-on entre une communauté d’expatriés ou de réfugiés et une diaspora ? La presse parle très souvent, dans le cas de la France, des diasporas juive et arménienne, alors que parallèlement le terme n’est jamais usité à propos des Tunisiens, Algériens ou Portugais. Sur ce point, on peut déceler deux premiers signes distinctifs : tout d’abord que la diaspora est un phénomène qui s’inscrit dans la durée, dans l’enracinement d’une population à l’extérieur de sa

terre d’origine ; ensuite que cet enracinement ne peut laisser place à une assimilation totale, sans quoi les émigrés se fondent dans la masse nationale.

C’est pourquoi il semble diffi cile de parler de diaspora marocaine ou algérienne en France, car les communautés constituées par les mouvements d’émigration en France provenant de ses anciennes colonies sont encore trop récentes. Il s’agit de communautés en gestation, d’autant plus que les vagues d’immigration sont désormais continues : l’immigration se poursuit, rendant diffi cile les tentatives d’organisation de ses membres. C’est aussi pourquoi on ne peut parler, toujours dans le cas de la France, de « diaspora italienne » ou de « diaspora espagnole » : malgré les forts mouvements d’émigration, suivis d’un enracinement dans le territoire durant plusieurs décennies, il n’cennies, il n’cennies, il ny pas de diaspora car ’y pas de diaspora car ’l’assimilation a été parfaitement réalisée.

On touche ici à la distinction développéveloppé ée par la sociologue Dominique Schnapper entre intéintéint grationégrationé et assimilation : une diaspora est un ensemble d’individus qui serait parvenu à s’intégrer parfaitement, mais qui refuserait en partie l’assimilation.5 La diaspora juive a, par exemple, longtemps été critiquée aux États-Unis pour pratiquer une « integration without assimilation », qui se traduisait par le fait que les Juifs ne fréquentaient des non-Juifs que dans le cadre professionnel, mais restaient entre eux dans leur vie privéleur vie privéleur vie priv e.6 A l’heure actuelle, en France, ce reproche d’une

intégration civique et économique réussie mais dépourvue de toute assimilation culturelle est régulièrement formulé à l’encontre des communautés chinoises.

La diaspora, une communauté unifi ée ?

Ainsi, une diaspora est constituée d’une population issue d’une émigration, qui parvient à s’intégrer durablement dans son pays d’accueil sans pour autant s’assimiler parfaitement. Pourtant, cette défi nition reste bien large : aucune diffé: aucune diffé: aucune diff rence n’existerait alors entre la « diaspora chinoise » et la « diaspora juive ». Or on peut constater qu’il existe des difféil existe des difféil existe des diff rences fondamentales entre les diasporas, chacune ayant été créée dans un contexte historique particulier, et ayant ses propres points de ralliements communautaires. Il faut aussi souligner qu’une diaspora se distingue toujours par une très forte hétérogénéité culturelle en son sein : diffé: diffé: diff rente des autres diasporas, une diaspora est aussi un lieu de cohabitation entre des diffédes diffédes diff rences très marquées. Par exemple, le Juif ashkées. Par exemple, le Juif ashkées. Par exemple, le Juif ashk naze de Pologne ou d’Ukraine n’Ukraine n’Ukraine na que peu de choses en commun avec un Juif tunisien. Mis à part les prières rituelles, on serait bien en mal de trouver un quelconque point commun entre un Juif de France, un Falasha ( Juif d’Ethiopie) et un Juif yéEthiopie) et un Juif yéEthiopie) et un Juif y ménite.7

Néanmoins, certaines communautés parviennent à transcender les divergences culturelles qui les traversent et réussissent à constituer

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1 Sheffer, Gabriel, Diaspora Politics : At Home abroad, Cambridge, Cambridge University Press, 2003.

2 Schnapper, Dominique – Bordes-Benayoun, Chantal, Diasporas et Nations, Paris, Editions Odile Jacob, 2006.

3 Prévélakis, Georges (dir), Les réseaux des Diasporas, Paris, L’Harmattan-KYREM, 1996.

4 Chaliand, Gérard - Rageau, Jean-Pierre, Atlas des Diasporas, Paris, Editions Odile Jacob, 1991.

5 Schnapper, Dominique, Qu’est-ce que l’intégration ?, Paris, Editions Gallimard, Collection Folio Actuel, 2007.

6 Whitfi eld, Stephen J., In Search of American Jewish Culture, Cambridge, Brandeis University Press, 1999; Goren, Arthur, The Politics and Public Culture of American Jews, Indianapolis, Indiana University Press, 1999; Diner, Hasia, The Jews of the United States, 1654 to 2000, Berkeley, University of California Press, 2004.

7 De même, à l’exception de l’usage en commun d’un même alphabet, un arménien de Russie sera bien en mal de s’entendre avec un arménien du Liban (ne parlant même pas la même langue). Ritter, Laurence, La longue marche des Arméniens – Histoire et devenir d’une diaspora, Editions Robert Laffont, Paris, 2007.

8 Guerassimoff, Carine, L’État chinois et les communautés chinoises d’outre-mer, Paris, L’Harmattan, 1997 ; Leveau, Arnaud, Le destin des fi ls du dragon : l’infl uence de la communauté chinoise au Vietnam et en Thaïlande, Paris, L’Harmattan – IRASEC, 2003..

9 Lacoste, Yves, Géopolitique des diasporas, Revue Hérodote, N°53, avril-juin 1989.

10 Cette réfl exion vaut aussi pour la “diaspora indienne”: environ 20 millions

d’individus face à un pays d’1,1 milliard de personnes. Vertovec, Steven, The Hindu Diaspora. Comparative Patterns, Londres, Routledge, 2000; Lal Brij, V. – Reeves, Peter Dennis – Rai, Rajesh, L’encyclopédie de la diaspora indienne, Paris, Editions du Pacifi que, 2008.

11 C’est par exemple le cas des Arméniens qui commémorent le génocide le 24 avril de chaque année, par référence au 24 avril 1915, date du début des massacres. De même, chez les Juifs, la chute de la Massada en 73 et le suicide collectif qui s’en est suivi ont été intégrés dans la mémoire communautaire juive, pour transformer un élément de défaite en un élément d’identité (très signifi cativement, le serment d’honneur que prêtent les soldats de l’armée israélienne est « Massada ne tombera pas une nouvelle fois »).

12 Dieckhoff, Alain, La nation dans tous ses États – Les identités nationales en mouvement, Editions Flammarion, Paris, 2000.

13 On peut noter la permanence quasi-obsessionnelle, très signifi cative sur le plan psychologique, dans les vocabulaires des diasporas, des termes comme « recréer », « rétablir », « restaurer » ou encore « seconde naissance ». L’État grec est ainsi restauré après 1966 ans d’absence (absence limitée à « juste » 377 ans si on considère, comme les Grecs l’ont fait a posteriori, que l’Empire byzantin était un Empire grec). L’État Juif a disparu pendant 1878 ans jusqu’à sa re-création en 1948. Entre la disparition du dernier royaume d’Arménie en 1375 et la création de la première République d’Arménie en 1918, c’est 543 ans qui séparent ces deux entités, géographiquement distantes de plus 500 kilomètres si on considère leurs frontières les plus proches.

14 Economiquement, les diasporas, comme les communautés d’expatriés, peuvent être d’une importance colossale au niveau des transferts de fonds. Selon la Banque Mondiale (étude de 2005), les transferts de fonds des individus d’origine libanaise au Liban représentent 25,8% de la part du PIB du Liban.

15 L’Arménie a ainsi récemment créé, en juin 2008, un Ministère de la Diaspora. En Italie, un Ministère des Italiens de l’Etranger avait été créé par Silvio Berlusconi en 2001, puis remplacé en 2006 par un secrétariat d’État sous Romano Prodi. Désormais, cette tâche incombe à une direction du ministère italien des Affaires étrangères. De même, Ehoud Barak avait établi en Israël, en 1999, un Minister of Social and Diaspora Affairs, supprimé par Ariel Sharon en 2001 avant d’être recréé en 2003 : il sera aboli en 2006 pour être rétabli en 2007 sous le nom assez vague de Diaspora, Society and the Fight Against Antisemitism Minister. Globalement, ces ministères semblent poser des problèmes au niveau de leurs attributions et relèvent plus de la communication.

> Jean Doursounian,Diplômé de Sciences Po en 2007,actuellement en master à l’ESCP

des instances de solidarité ethnique et communautaire sur une échelle globale (comme l’Agence juive pour la diaspora juive). Or de telles instances communautaires, au sens d’entités qui possèdent de réelles capacités de mobilisation, de transmission et d’éducation, demeurent extrêmement rares : on n’en trouve encore aucune, à un niveau global, pour les communautés indiennes et chinoises.8

La clef du problème peut résider dans le but de ces instances, à savoir agir sur la communauté mais aussi vis-à-vis du pays d’origine. Ce qui distingue la communauté de la diaspora, c’est que la communauté ne se soucie que de sa propre conservation, alors que la diaspora ne se soucie de sa préservation que dans le but de garder un lien – réel ou imaginaire – avec la terre d’origine, sur laquelle elle souhaite agir – parfois fantasme d’agir - via des via des viaaides économiques, des revendications politiques et des moyens de pression.

L’L’Limportance démographique

Le géopoliticien français Yves Lacoste a formulé une distinction fondamentale sur cette question : une diaspora n’fondamentale sur cette question : une diaspora n’fondamentale sur cette question : une diaspora nexisterait que si elle représente une force démographique conséquente vis-à-vis du pays d’origine ou de la terre natale, voire si elle en est l’unique force (ce qui fut le cas de la diaspora juive durant des siècles).9 Certes très discutable, cette distinction introduit une dimension quantitative aisément applicable : ainsi que « pèsent » sent » sent les 60 millions de Chinois, issus des communautés d’expatriées, face à une Chine d’1,3 milliard d’habitants ? 10 En revanche, dans cette logique, les démographies des diasporas arménienne et juive leurs permettent de « compter » compter » compter face aux « homelands » homelands » homelands respectifs. Ce point de vue fait cependant débat, dans la mesure où il part de l’hypothèse que la diaspora n’la diaspora n’la diaspora nexiste que vis-à-vis de son pays d’origine.

Diaspora, mythe et traumatisme

Par conséquent, une diaspora serait une communauté qui parvient, du fait de sa puissance démographique relative, à compter vis-à-vis de sa mère patrie. Mais l’explication demeure insuffi sante : pourquoi les Italiens et personnes d’origine italienne hors d’Italie, dont le nombre s’élèvent èvent è à plus de 60 millions d’individus, n’agissent pas en tant que diaspora face à une Italie peuplée de 59 millions d’habitants ? Il apparaî? Il apparaî? Il appara t clairement qu’une diaspora ne se résume pas à une communauté construite et organisée d’émigrés qui entretiennent des rapports avec une terre d’origine tout en comptant démographiquement vis-à-vis d’elle.

Ce qui caractérise la diaspora, c’est son rapport inconscient à la terre d’origine, rapport qui lui fournit une identité par procuration dans un environnement considéré comme étranger (le pays d’accueil). Reconstruite et fantasmée, cette identité est basée sur des mythes, des légendes historiques qui renforcent le sentiment d’appartenance à la diaspora en nourrissant un inconscient collectif. Or parmi ces mythes se trouvent bien évidemment lévidemment lé ’origine de la diaspora, la cause de l’émigration. Chaque diaspora se distingue par une naissance douloureuse, souvent forcée, qui pousse les membres de

la communauté à rester attachés à celle-ci, mais aussi à la terre que l’on a quittée, que les parents ont quitté. Un passé douloureux, un passé qui ne passe pas et sur lequel on voudrait revenir est à la base même des motivations qui président aux efforts des diasporas.

On peut aisément dresser une brève liste dève liste dè ’exemples : effondrement de Judée et destruction du second Temple de Jérusalem pour les Juifs ; famine meurtrière en Irlande sous domination anglaise pour les Irlandais ; génocide sous l’Empire ottoman pour les Arméniens ; guerre et destruction de la présence multimillénaire hellénique sur les côtes est de la mer Egée pour les Grecs ; guerre et occupation pour les Palestiniens ; guerre civile pour les Libanais ; joug communiste pour les Cubains, etc.

Dans chacun des cas, les diasporas concernées ont fi ni, au fi l des décennies et parfois des siècles, à se réapproprier la catastrophe, à en faire l’év’év’é évév nement fondateur de l’histoire de la communauté, celui avec lequel il y a un « avant » avant » avant (mythe de l’âge d’âge d’â ’or) et un « après » (situation actuelle, nécessairement injuste et qu’il convient de réparer).11 Par conséquent, la diaspora diffèquent, la diaspora diffèquent, la diaspora diff re de la communauté au sens où elle a un compte à régler avec l’histoire. L’histoire. L’histoire. Lattachement à la terre originelle est d’autant plus fort que le départ n’part n’part na pas été volontaire ni réfl échi, mais s’est fait sous la contrainte : c’est en cela que le cas des Italiens à l’étranger diffètranger diffètranger diff re beaucoup des autres pays, car l’émigration italienne n’migration italienne n’migration italienne na presque été qu’économique. On constate d’ailleurs que, si l’on se réfèfèf re exclusivement aux critères exposés précédemment, le nombre de diasporas et relativement réduit : la diaspora juive, la diaspora grecque, la diaspora irlandaise, la diaspora arménienne, la diaspora libanaise, la diaspora palestinienne et la diaspora cubaine. On pourrait aussi spéculer sur l’actuelle gestation d’une future diaspora irakienne, laquelle concernerait déjéjé à plus de 3 millions d’individus.

Liens ambigus avec la terre d’origine

Au fi nal, la seule interrogation qui demeure est celle des rapports de la diaspora avec l’État concerné, si cet État existe : liaison forcément ambiguë, entre une communauté motivémotivémotiv e par des intérêts passionnels et affectifs et une entité politique aux intérêts rationnels.12 Dans certains cas, le concept de nation a même précédé la construction de l’État moderne national (cas juif, arménien, grec et irlandais), et c’est parfois la diaspora qui a créé l’État (cas d’Israël, même si pour la diaspora juive, il s’agit non pas de créer un État mais de le « re-créer »er »er ).13 Cependant, pour la très grande majorité des pays concernés, l’État utilise sa diaspora pour servir ses intérêts, souvent économiques mais aussi politiques.14 C14 C14 ’est dans cette perspective qu’il faut relever les créations de multiples « ministères de la diaspora » res de la diaspora » res de la diaspora dans plusieurs pays.15

Pour autant, dès que l’utilisation concerne le domaine politique et diplomatique, les diasporas font preuve de bien plus d’autonomie que ne le souhaiteraient les États concernés : les Irlandais des États-Unis ont durant longtemps soutenu l’action de l’IRA malgré l’hostilité de Dublin, et le rapprochement actuel entre Erevan et Ankara ne plaîAnkara ne plaîAnkara ne pla t que très modérément à la diaspora arménienne.

La diaspora apparaîLa diaspora apparaîLa diaspora appara t donc comme une reconstruction durable d’une communauté politique, se rattachant imaginairement à une terre d’origine tout en s’intégrant dans une multitude d’États. A l’heure où la mondialisation semble parfois bouleverser les notions de nations, d’identités et de frontières, la diaspora prouve par son existence que l’appartenance à une communauté, l’attachement à la terre d’origine, la multiplicité des identités et la force de la mémoire restent plus que jamais d’actualité. Phénomène ancien, la diaspora n’a jamais été autant en adéquation avec son environnement que dans notre monde globalisé

Page 6: Diasporas

Riva Kastoryano> INTERVIEW

1 « Vers un nationalisme transnational. Redéfi nir la nation, le nationalisme et le territoire », Revue française de science politique. vol. 56, n° 4, août 2006, p. 533-553.

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Professeur à Science Po depuis 1988,

Riva Kastoryano enseigne la sociologie

politique. Elle a contribué dernièrement

à l’ouvrage Identities, Affi liations and

Allegeances édité par Seyla Behabib et

Ian Shapiro, et publié en 2007 par les

presses de Cambridge. Le cours qu’elle propose aux étudiants de Master

Recherche, intitulé «le transnationalisme», l’amène naturellement

à s’intéresser aux diasporas, à leur rapport

au territoire et à la nation.

Une diaspora est avant tout une identité-refuge”

De nombreux chercheurs ont tenté d’apporter une défi nition au terme de diaspora, et ils sont loin d’être tous d’accord. Si vous deviez défi nir ce qu’est une diaspora, que diriez-vous ? Le terme de diaspora est à dissocier d’un autre terme, le transnationalisme. La diaspora, c’est avant tout une identité-refuge, qui mobilise différefuge, qui mobilise différefuge, qui mobilise diff rentes allégeances, qui joue sur l’hybridité. Un Juif chinois et un Juif américain vont ainsi pouvoir se réclamer de la même diaspora. La diaspora, c’est la réféféf rence identitaire de leur dispersion. Lorsqu’on parle de diaspora, on parle de la dispersion d’une population expulsée du lieu où elle vivait. Ce lieu devient alors la terre de réféféf rence à reconquérir. Derrière la diaspora, il y a à la fois un drame – une expulsion, un massacre, un crime, un génocide – et un mythe du retour. Il en est ainsi des Juifs avec Jérusalem. En revanche, lorsque l’on parle de diaspora, on ne parle pas encore de territoire. C’est la notion de terre qui intervient ici : nous sommes dans un espace-temps où il n’il n’il ny a pas d’y a pas d’ ’État-nation, pas d’entité politique.

Pourquoi alors, dans notre contexte actuel où les États-nations sont la norme politique, les diasporas n’ont-elles pas disparues ?Les choses sont bien plus compliquées car il y aura toujours des gens qui rêvent de êvent de êla terre promise. Lorsque les Arméniens cherchent la reconnaissance du génocide, c’est pour moi le symbole de cette quête de la reconnaissance perdue, un autre genre de terre promise. D’autres recherchent encore le « bout de terre » sur lequel s’installer. C’est le cas des Tamouls qui se constituent en diaspora en attendant de retrouver une terre à eux, découpée sur le territoire du Sri Lanka.

Mais lorsqu’il s’agit d’un phénomène ancien, lorsque l’ « expulsion » à déjà des centaines d’années, comment maintient-on le mythe ?La force de l’expulsion maintient une mémoire vive, collective, qui se doit d’être transmise. En ceci réside la force de la diaspora. Cette mémoire douloureuse du peuple est transmise à plusieurs niveaux : d’abord, ce sont les parents, les grand-parents, qui racontent l’histoire,

qui évoquent sans cesse, au quotidien, le évoquent sans cesse, au quotidien, le ésouvenir. Ensuite, c’est la communauté qui prend le relais en organisant des activités, des fêdes fêdes f tes, des rassemblements. Certaines institutions, comme la religion, et je pense par exemple aux prières juives qui évoquent évoquent éJérusalem, contribuent également à maintenir le mythe. Et surtout, c’est le regard de l’autre qui encourage à se retrouver en communauté d’expérience. Plus l’Arménien est compris comme difféest compris comme difféest compris comme diff rent, plus il cherche l’Histoire qui le rend difféHistoire qui le rend difféHistoire qui le rend diff rent. La violence perdure lorsque certains ÉHistoire qui le rend diff

ÉHistoire qui le rend diff

tats, par exemple, refusent d’accepter l’Histoire. Il en est ainsi pour l’État turc. Plus il renie l’histoire des Arméniens et plus l’identité diasporique se renforce. D’ailleurs, ce renforcement de l’identité diasporique fait apparaîdiasporique fait apparaîdiasporique fait appara tre un nouveau phénomène : aujourd’hui, ce qui était culturel et identitaire devient politique, surtout chez certains jeunes Turcs ou Arméniens.

Dans ce cas, peut-on dire que cette communauté qui se retrouve autour d’une histoire commune est une « diaspora mobilisée », notion que vous évoquez dans votre article « Vers un nationalisme transnational 1» ?Ce concept a été beaucoup utilisé par le sociologue John A. Armstrong qui défi nit une diaspora mobilisée comme « un groupe ethnique qui n’ethnique qui n’ethnique qui na ni statut ni avantages ». À mon avis, une diaspora mobilisethnique qui nÀ mon avis, une diaspora mobilisethnique qui n

ée, c’est une diaspora qui a un certain pouvoir économique : c’est cette ressource fi nancière qui lui permet ensuite de mobiliser sa population. Les Juifs, les Arméniens, les Sikhs sont des diasporas mobilisées : elles entretiennent le lien en envoyant des sommes énormes d’argent dans leur pays d’appartenance, en participant à des festivals culturels, en écoutant la radio dans leur langue d’origine et en lisant un journal édité dans le pays quitté. Cette mobilisation entraîentraîentra ne ensuite une politisation, afi n de reconquérir la terre d’où l’on a été chassé.

Cette mobilisation est pourtant à l’œuvre chez d’autres communautés où le mythe du retour n’est pas mis en avant : on ne cherche alors pas à quitter le pays d’origine. Vous appelez cela le transnationalisme. Quelle est la différence avec la diaspora ?

L’L’Lexpérience de l’histoire apporte de nouvelles dynamiques qui brouillent la frontière entre diaspora et communauté transnationale. Le nationalisme de diaspora est ancré dans un temps précis, alors que le nationalisme transnational est un processus plus récent. C’est une mobilisation plus actuelle et plus fl uctuante qui a une caractéristique très importante : il n’: il n’: il ny a pas de volonté de retour à la terre d’origine. Ainsi, les Turcs d’Europe ne sont pas une diaspora. Ils vont bien sûr retrouver la communauté, à l’occasion d’un mariage ou d’un match de foot, mais ils s’installent réellement sur le territoire d’accueil. Nous sommes donc dans un processus de dé-territorialisation. Le nationalisme transnational se développe éveloppe échez la population issue de l’immigration postcoloniale. Chez eux, on maintient le lien avec le pays d’origine, mais en même temps on vote, on s’investit… et on investit dans le pays d’accueil. Que ce soit dans le cas de la diaspora ou dans celui du transnationalisme, c’est une élite qui organise le réseau. Elle connaîconnaîconna t à la fois les codes communautaires et les codes de l’État. L’État d’origine joue un rôle majeur dans le cas du transnationalisme : puisque les migrants décident de rester, il faut trouver le moyen de maintenir le lien. Les États d’origine ont donc intérêt à être acteurs en prenant part dans un processus de reconnaissance des nouvelles dynamiques identitaires. Un de leurs leviers importants réside par exemple dans la double nationalité. Cela permet à l’État d’origine de maintenir l’allégeance.

Lorsque ce processus de normalisation n’est pas enclenché et que les tensions identitaires perdurent, les diasporas et les groupes transnationaux peuvent-ils devenir dangereux ?À partir du moment oÀ partir du moment oÀ ù il y a création d’un nationalisme de minorité, il y a remise en cause de l’identifi cation à l’État-nation. À ce moment, cela peut être jugé

comme dangereux car le pays d’accueil comprend que cette dynamique n’comprend que cette dynamique n’comprend que cette dynamique nest pas celle de l’intégration. On entre alors dans les problématiques de repli sur soi, de communautarisme. Et lorsque l’on va chercher dans l’extrême, le terrorisme, qui peut naîpeut naîpeut na tre d’organisations diasporiques, est un défi aux É

organisations diasporiques, Éorganisations diasporiques,

tats. Lorsque le terrorisme est la seule arme de mobilisation pour un mouvement qui cherche à se faire reconnaîreconnaîreconna tre sur la scène internationale, alors la mobilisation devient lutte.

Aujourd’hui, considérez-vous la mobilisation des communautés face à la guerre de Gaza comme dangereuse ?La cristallisation des identités autour de la communauté palestinienne accentue bien sûr les tensions, et le phénomène va bien au delà de la mobilisation de la diaspora palestinienne ! Ainsi, les Pakistanais et les Turcs se mobilisent aujourd’hui pour le peuple palestinien. Du coup, c’est l’Islam qui est utilisée comme identité de réféféf rence. L’ « L’ « L oumma » oumma » oumma devient une nation, et l’Islam se dé-territorialise par rapport aux identités nationales qui, elles, sont territorialisées. La religion comme seule identité peut s’avéavéav rer dangereuse car cela cristallise les antagonismes, notamment avec les Juifs qui manifestent dans certains pays leur soutien à Israël, surtout pour ne pas laisser le terrain aux Musulmans. Face à cela, l’É

l, surtout pour ne pas laisser le terrain É

l, surtout pour ne pas laisser le terrain tat d’accueil

a un grand rôle à jouer ! L’! L’! Lallégeance à l’État doit être plus forte que celle à la diaspora ou à l’identité nationale afi n de maintenir l’unité de la Nation.

> Propos recueillis par Naïké Desquesnes,

étudiante en 5è année, Master Recherche Politique

Comparée Mention Asie

(c) Naïké Desquesnes

Page 7: Diasporas

As an increasingly potent political and legal force, Diasporas present a challenge to standard paradigms of international law.But this challenge has yet to be fully addressed. While lawmakers have tended to avoid the legal implications of Diasporas by confi ning themselves to traditional constructs such as “immigrant” and “minority”minority”minority , scholars in the humanities have tended to treat Diasporas as historical and cultural processes with little legal or political relevance. Diasporas, in short, have received a mixture of insuffi cient and biased attention. They demand new consideration in international law.

Recent cases have revealed both the great legal potential of Diasporas and the limits of the laws that should be recognizing them. Consider, for instance, the efforts of the Cambodian Diaspora in France and Belgium to prosecute the Khmer Rouge offi cials responsible for crimes committed in Cambodia between 1975 and 1979. At the time of the opening of court hearings in the early 2000s, the Cambodian Diaspora in France and Belgium created victims’ associations (such as the Khmer Rouge Victims’ Committee and the Khmer Rouge Genocide Victims) and used legal action to fi ght impunity by bringing lawsuits before national and international courts. Operating abroad, the Diaspora was an important source of outreach and awareness building and a partial substitute for a justice system in Cambodia that proved unable or unwilling to prosecute. But lacking formal recognition as a distinct, legal community, the Diaspora was unable to properly pursue its legal initiatives through the key channels of international law. Indeed, if some in the Cambodian Diaspora testifi ed before institutions like the International Criminal Court, the European Parliament, and the United Nations, they did so as individual witnesses to genocide rather than as members of any legally-recognized group.

Diasporas have emerged as powerful legal actors in a wide range of other socio-political contexts. In criminal proceedings, the Chilean and Argentinean Diasporas have appealed to universal jurisdiction laws in attempts to have criminals arrested and tried while traveling through Europe. And in truth-seeking activities, the Haitian Diaspora has actively participated in the creation and operation of a truth commission, while the Liberian Diaspora is deeply involved in a truth-seeking process designed to take depositions from exiled Liberians living in the United States, as well as from those in refugee camps in Ghana.

These cases demonstrate that the role of Diasporas in the fi ght against impunity – especially through legal mechanisms such as universal jurisdiction – is crucial. Ignored in the past, the legal potential of Diasporas has begun to receive some scholarly attention. In one recent study, Anupam Chander, Professor of Law at the University of California, researched the rise of Diasporas as a challenge to the dominant model of international law and created a typology of legal claims Diasporas may make in the future.

Any legal research on Diasporas is a positive sign, and Chander’s is particularly signifi cant. His study makes a crucial distinction between Diasporas and a group that is often confl ated with them – immigrants – by arguing that Diasporas maintain uniquely strong bonds with their homeland. According to Chander, these bonds explain why the majority of legal claims that Diasporas are likely to make are fi rst linked to recognition – by both their adopted countries and by their homelands. While this recognition can take different forms – from claiming dual nationality and allowing individuals in a Diaspora to maintain offi cial connections to a foreign state, to seeking a minimum of self-governance, to seeking direct governance by homeland government – implicit in all of them is the issue of the adopted country’s assimilationist strategies ’s assimilationist strategies ’

in law and education. Claims of recognition thus raise a powerful tension between integration and assimilation on one hand, and preservation of ties to the home country on the other.

Chander also argues that Diasporas may themselves desire representation in international lawmaking. As a transnational community, their lives will be especially vulnerable to international sanctions and restrictions. Diasporas are distinct from nongovernmental organizations, which have become accepted participants in international lawmaking, and they may not be able to depend on their adopted or homeland governments to champion their interests internationally.

Thinking about Diasporas in legal terms exposes important shortcomings in the international legal system. It also distinguishes Diasporas, as an analytical concept, from close alternatives such as “ethnic groups,” “immigrants,” and “minorities,” all of whose legal claims may overlap with those of Diasporas while not coinciding perfectly. Lawmakers must identify a larger, more complex category of legal claims in order to treat these challenging theoretical distinctions with appropriate nuance rather than with ad hoc solutions. The recognition of Diasporas – as forceful legal actors in international law and politics – depends on it.

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Diasporas as legal actors :challenges & opportunities for international law

International law has no categories for transnational actors. How can Diasporas’

scattered individuals unite to form a powerful force? How

should international law adapt to such challenges?

Creative Commons licence photo credit : La Xtina

> Priscilla Rouyer,5th year student,

Master’s degree in Public Affairs

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Hawala, an informal money transfer system, is used by Diaspora populations to transfer remittances

around the world, yet the system is vulnerable to abuse by criminals and

terrorists due to its lack of regulation.

Creative Commons licence photo

How does a Pakistani construction worker living in New York send money to his brother in Karachi? The answer may surprise you.

Instead of going to a bank and paying for a wire transfer, he goes to a local hawala operator, or hawala operator, or hawala hawaladar. This hawaladar. This hawaladar hawaladar accepts hawaladar accepts hawaladarthe construction worker’s US dollars, plus a modest fee, then calls ’s US dollars, plus a modest fee, then calls ’a fellow operator in Karachi with instructions to deliver Pakistani Rupees to the construction worker’s brother. The New York ’s brother. The New York ’hawaldar can repay the debt to his Karachi counterpart with future hawala transfers to recipients in New York, or even a shipment of commercial goods, like cell phones, to offset the Karachi hawaladar’s expenses. No fors expenses. No fors mal banking relationship is needed and no currency ever crosses an international border.

This system of international transactions, or hawala, can best be described as a “money transfer without money movement.” Of the billions of dollars of remittances among Diasporas and their native countries, which provide vital support to numerous families and whole economies, the money that fl ows through this informal banking system is at present almost impossible to monitor. This unregulated fi nancial instrument presents unique and diffi cult challenges to governments attempting to prevent criminals and terrorists from funding their global operations. The informal fi nancial system known as hawala operates parallel to legal hawala operates parallel to legal hawalabanking systems and is therefore extremely vulnerable to abuse. International efforts are needed to regulate and bring transparency to hawala, in order to facilitate legitimate remittances and increase global security.

Hawala is older than mainstream Western banking, and even Hawala is older than mainstream Western banking, and even Hawalatoday can be more convenient and effi cient, making it attractive to both legitimate and criminal actors. Hawaladars often offer better Hawaladars often offer better Hawaladarscurrency exchange rates than banks, which are obligated to adhere to offi cial exchange rates. In addition, most banks require their customers to provide personal information and documentation, which can be a problem for immigrants, like the construction worker, who may have over-stayed his visa, may have language diffi culties, or may otherwise be unable or unwilling to provide the requested documents. Hawaladars are generally content to do Hawaladars are generally content to do Hawaladarsbusiness asking few, if any, questions of their customers.

This is where hawala becomes vulnerable to abuse. The qualities hawala becomes vulnerable to abuse. The qualities hawalathat make it so desirable and convenient for honest customers, like the construction worker, also make it attractive to money launderers and terrorists. A hawala transaction leaves almost no hawala transaction leaves almost no hawalapaper-trail since hawaladars generally note only their obligations hawaladars generally note only their obligations hawaladarsto and from other hawaladars, and not those related to individual customers. Our construction worker’s hawala transaction may have hawala transaction may have hawalabeen bundled with a dozen others, making it nearly impossible for investigators to determine whose money is going where. With no formal record of transactions, and few questions asked, hawala is hawala is hawalaan attractive option for criminals and terrorists.

Indeed, hawala has been widely used in money laundering hawala has been widely used in money laundering hawalaoperations. The US government has identifi ed the use of hawalain everything from drug traffi cking operations, to welfare fraud, insider trading and terrorism. The 1993 Bombay attacks that killed and wounded hundreds were fi nanced through hawalatransactions in the United Kingdom, Dubai and India.

an international security challenge

Regulating diaspora

transactions :

RRegulating RRegulating

The 9/11 attacks on the United States were fi nanced mostly through traditional banks, and not hawala, but as the United States and other countries tighten the security of their fi nancial institutions with measures such as the USA PATRIOT Act and the monitoring of SWIFT transactions, there is a growing concern that terrorists will move more and more underground into hawala. As Arnaud de Borchgrave pointed out in the Washington Times, “For al Qaeda, hawala is fast, reliable and secure.hawala is fast, reliable and secure.hawala ” The Paris-based Financial Action Task Force, the global authority on anti-money laundering, stated in its February 2008 report on terrorist fi nancing that “alternative remittance systems have been used to disguise terrorist movement of funds,” often to transfer money to “operational cells”.

The International Monetary Fund has suggested a two-track plan for mitigating the threats related to hawala. First, governments should launch a program to register all hawalas operating on their soil. In the United States, hawalas are generally illegal because they provide certain fi nancial services without having registered as offi cial “money services businesses.” Yet they often operate relatively openly, advertising their services in local, especially ethnic, newspapers. The 2007 US Anti-Money Laundering Strategy estimated that “fewer than 20%” of all money service businesses have registered with the Treasury Department. Once registered, the IMF proposal would require hawalas to improve hawalas to improve hawalasthe transparency of their records. Such a program would require that governments commit resources and manpower, especially multilingual investigators, to enforce the hawala regulations. hawala regulations. hawala

The second part of the IMF strategy would involve assisting countries with weak or undeveloped banking systems to improve the quality of their formal banking sectors. By decreasing bureaucracy and improving reliability of the formal banking sector, the trust needed between customers and banks would grow, edging out unregulated hawalas.

Hawalas, however, will not go away anytime soon. The services they provide to countless people are an important part of the global economy. Yet the fact that no one can reliably estimate how many people are using them, or how much money is being transferred through them, illustrates just how unregulated the system is. Governments should work to create an environment in which hawalas operate more openly, while leaving enough room for honest people to use their services to send money home. Financial systems are often overlooked as an important front in the wars on terrorism and organized crime, and improving the security of hawalas would be an important step toward ensuring global prosperity and security.

> Steven Koch, exchange student

from the University of Pennsylvania

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The rise of India has been mirrored by the growing wealth and prominence of its Diaspora. However, links between the Diaspora and Hindu nationalists involved in incidents of communal violence have highlighted the religious tensions threatening to undermine the world’s largest democracy.

Outsourcing Extremism

Within the course of three bloody days in February 2002, an upwards of two thousand Muslims were systematically slain in the Indian state of Gujarat. The press euphemised the mass slaughter as “rioting” – a spontaneous, chaotic eruption of aggression, – a spontaneous, chaotic eruption of aggression, –apparently in response to an earlier incident of Muslim violence. The truth is somewhat different. The assault was organized and orchestrated with the support of the state government, run by the Hindu-nationalist right-wing party, the Bharatiya Janata Party (BJP) and other affi liated religious organisations. More recently, another gruesome attack was conducted by the same organisations conducted by the same organisations conductedin the eastern state of Orissa, only the victims this time were Christians.

Such communal tensions and incidents of inter-faith confl ict have often undermined India’s vibrant democracy, founded, amongst other things, on principles of secularism. Gujarat however is in many ways the most chilling example of the potential destructiveness and danger posed to India’s secularity by Hindutva, the core ideology of such prominent Hindu fundamentalist groups as the Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), the Vishwa Hindu Parishad (VHP) and the aforementioned political entity, the BJP. and the aforementioned political entity, the BJP. and

Hindutva envisions India as a strictly Hindu nation with no place Hindutva envisions India as a strictly Hindu nation with no place Hindutvafor Muslims or Christians, considering them aliens even though they have lived there for centuries. The ideology has little grounding in traditional, mainstream Hinduism, but rather emerged in the early 1920’s with the founding of the RSS, an organisation explicitly modelled on Fascist ideals. The RSS gained particular notoriety after one of its members assassinated Mahatma Gandhi;

Hindu NationalismandDiaspora Funding

> Vikramaditya Singh,exchange student

from St Stephen’s College, Delhi University, India

an attack motivated by Gandhi’s secular preaching and demand of concessions for Muslims. In what is surely a painful irony, Hindu extremism remains on full display in Gujarat, the very state of Gandhi’s birth.

But apart from Gandhi and its history of recent religious turmoil, Gujarat is noteworthy for two other reasons : its industrial progress and its considerable and powerful Diaspora. The two are interlinked; the Gujaratis are a phenomenal trading community and have spread out across the world, forming perhaps the most prominent of India’s regional Diasporas. Of the roughly 2 million members of the Indian Diaspora in America, almost 40 percent are affl uent Gujaratis.

Hindu nationalists, long aware of the economic and political potential of these large populations, set up wings such as the Global Hindu Council (VHP), Hindu Swayamsevak Sangh (HSS) and charities such as Sewa International and India Development and Relief Fund (IDRF) to deal exclusively with the Diaspora. The VHP acts as an umbrella organisation that taps the wealthy Diaspora for contributions to “charity”charity”charity and then funnels these ” and then funnels these ”funds to be used by its operatives, primarily for training and propaganda purposes in India. For example, it was revealed that in the year 2000, almost 80% of the funds collected by the IDRF were channelled to organisations affi liated with the Sangh Parivar, a broad term for the coalition of Hindutva-endorsing groups.

The VHP uses a number of means to secure funding from the Diaspora. It regularly organises seminars and “value-instilling”

workshops in temples across America and the UK. It also sets up student groups who canvass for support and funding on university campuses. Furthermore, it taps companies with a signifi cant number of Indian employees for corporate donations.

However after numerous complaints revealed a signifi cant amount of the funds raised by Sewa and IDRF for relief work in the aftermath of the 2001 earthquake were instead put to use for promoting Hindu extremist ideology, certain companies, including software giants Cisco and Sun Microsystems, permanently barred the organizations from their charities list. The Hindu charities responsible for collecting the funds testifi ed that they were not aware or had not ‘intended’ to support extremism, tenuous claims made all the more untenable thanks to incriminating reports published by watchdogs such as the Human Rights Watch and the South Asia Watch (AWAAZ).

The VHP’s most worrisome achievement however, and one that is crucially linked to its success in generating support, has been its transformation of the Indian Diaspora’s identity from one that is grounded in nationalism (“Indian”Indian”Indian ) to one grounded in religion (“Hindu”). The VHP has also successfully diluted the perceptual difference between Hinduism and the brand of Hindu fascism that it espouses. The Hindu Diaspora, eager to reconnect to its homeland through community organisations in its adopted countries, has contributed heavily to these organisations, ostensibly in the name of promoting Hindu solidarity and empowerment. The majority of the Diaspora believes they are supporting mild religious activism. What they are actually doing is supporting

terror, oppression and religious fascism.

The Hindutva-fueled riots of Gujarat have been followed by a “retaliatory”retaliatory”retaliatory spate of Islamist terror attacks, a potentially endless and ” spate of Islamist terror attacks, a potentially endless and ”tragic cycle of violence. There is grave fear that the unprecedented scope of the recent Mumbai attacks may spark a similarly unprecedented level of co-ordinated communal violence. The Indian Diaspora needs to recognize its potential and complicity in promoting or averting such crises. Before donating their dollars and pounds, Indians abroad must realize that the “empowering of Hindus” is merely a euphemism for the desecularization of India. ” is merely a euphemism for the desecularization of India. ”Standing on the cusp of greatness, the world’s largest democracy cannot divorce from its secular roots.

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La diaspora chinoise représente aujourd’hui

plusieurs dizaines de millions d’individus répartis

aux quatre coins du globe. Une telle communauté

joue-t-elle un rôle dans la politique étrangère de sa

puissante patrie d’origine? Au fi l des années, les

Chinois d’outre-mer sont passés d’un rôle d’acteur à celui d’instrument de la

diplomatie chinoise.

Dans la Chine classique, la diaspora est avant tout composée de marchands partis à l’étranger trouver des opportunités commerciales qui n’existaient pas dans une Chine impériale fermée, où l’Écommerciales qui n’existaient pas dans une Chine imp

Écommerciales qui n’existaient pas dans une Chine imp

tat exerçait de nombreux monopoles. La notion même de « relations étrangères » n’existe pas : selon le système tributaire confucéen, socle scolastique de la doctrine culturaliste chinoise, la Chine est sans équivalent et ne saurait traiter avec des États étrangers d’égal à égal. Par ailleurs, le mépris que les confucianistes éprouvent à l’égard des marchands n’gard des marchands n’gard des marchands nincite pas à l’entretien de liens politiques entre la métropole et sa diaspora.

L’empire au 19e siècle intègre le concert des nations, mais sans s’intéresser davantage à sa diaspora, qui se diversifi e et dont les

> Alain-James Palisse et Magali Robert, étudiants en 5è année, Master Recherche,

Politique comparée, mention Asie

effectifs augmentent continuellement. C’est pourtant au sein des communautés d’outre-mer que se joue déjéjé à l’avenir de la Chine post-impériale. À c

s d’outre-mer que se joue driale. À c

s d’outre-mer que se joue dôté de la migration de travail, on trouve

également les premiers étudiants qui partent faire l’apprentissage de l’Occident et de ses savoirs. Des intellectuels, des réformistes et des révolutionnaires en exil les y rejoignent, et ensemble ils évolutionnaires en exil les y rejoignent, et ensemble ils écherchent à constituer l’élite politique de la Chine de demain. C’est au Canada en 1899 que Kang Youwei, Liang Qichao et les monarchistes constitutionnalistes, vivant proscrits suite à l’échec la réforme des 100 jours, fondent la « Société de protection de l’Empereur » l’Empereur » l’Empereur (保皇会–baohuanghui). C’est au sein de la diaspora baohuanghui). C’est au sein de la diaspora baohuanghuichinoise en Asie, en Amérique et en Europe que Sun Yat-Sen recrute pour sa « Société de Réde Réde R génération de la Chine » (兴中会–xingzhonghui), puis xingzhonghui), puis xingzhonghui à partir de 1905 pour la « Ligue Jurée » (同盟会–tongmenghui), noyau fondateur du futur Parti Nationaliste (tongmenghui), noyau fondateur du futur Parti Nationaliste (tongmenghui 国民党–guomindang–guomindang– ). C’est d’ailleurs en partie grguomindang). C’est d’ailleurs en partie grguomindang âce à l’argent de la diaspora que Sun fi nance ses activités révolutionnaires. évolutionnaires. é

Après la première Guerre Mondiale, dans le même esprit, nombre de futurs cadres du Parti Communiste Chinois parmi lesquels Zhou Enlai, Zhu De ou encore Deng Xiaoping feront leurs classes en travaillant ou en étudiant à l’étranger, particulièrement en France, en Allemagne et en Union Soviétique. Jusqu’en 1949, le renouveau politique chinois est donc fortement infl uencé par la diaspora, dont l’argent et les protégés jouent un rôle majeur dans les affaires intérieures et extérieures d’une métropole qui se redéfi nit politiquement.

Dès l’avèavèav nement de la Chine communiste, le lien entre diaspora et politique étrangère s’inverse. La diaspora chinoise passe d’un rôle actif à un rôle passif et devient l’instrument de la politique de Pékin. Les Chinois d’outre-mer doivent pouvoir infl uencer politiquement leurs États d’accueil en faveur d’une réunifi cation avec Taïavec Taïavec Ta wan ainsi que dans la propagation de lïwan ainsi que dans la propagation de lï ’idéologie maoïste. De plus, ils deviennent un outil économique pour le développement éveloppement édu continent en étant les premiers investisseurs « étrangers » en Chine, ainsi qu’à travers leurs envois de remises aux familles restées au pays et qui représentent une importante source de devises pour la RPC.

À partir de 1966, alors que la RÀ partir de 1966, alors que la RÀ é partir de 1966, alors que la Ré partir de 1966, alors que la R volution culturelle en Chine est évolution culturelle en Chine est é à l’œuvre, les Chinois d’outre-mer en tant que patriotes et membres des partis communistes des diffédes partis communistes des diffédes partis communistes des diff rents É

outre-mer en tant que patriotes et membres É

outre-mer en tant que patriotes et membres tats d’Asie du Sud-Est,

jouent un rôle militant. Pékin est alors un soutien essentiel pour les partis communistes et les mouvements de guérillas révolutionnaires évolutionnaires élocaux (en Birmanie, en Indonésie, au Cambodge par exemple).

Après la mort de Mao en 1976, l’utilisation de la diaspora par le pouvoir central s’inscrit dans la ligne d’une politique étrangère défendant les intérêts nationaux. Les Chinois d’outre-mer se retrouvent alors plongés dans la rivalité Chine-TaïChine-TaïChine-Ta wanïwanï : en 1979, Deng Xiaoping les présente comme des représentants « politiques » qui « jouent un rôle de plus en plus important et actif dans la réunifi cation de la patrie » (Carine Pina-Guerassimoff ). Parallèlement, l’implication économique (largement encouragée par Pékin) des Chinois d’outre-mer à TaïTaïTa wan, Hongkong et dans ïwan, Hongkong et dans ïles zones côtières du Sud de la Chine a conduit à une intégration économique poussée dans la région.

Les migrations chinoises contemporaines viennent confi rmer l’utilisation économique de la diaspora par Pékin. Depuis la fi n des années 1990, on assiste en Afrique et au Moyen-Orient à un affl ux de migrants chinois dont l’arrivéarrivéarriv e est clairement liée à la politique étrangère de la Chine. Motivére de la Chine. Motivére de la Chine. Motiv e par la recherche constante de nouveaux marchés, la RPC envoie de nombreux ouvriers dans ces pays, nourrissant ainsi la formation autonome de nouvelles communautés chinoises. Certains auteurs, comme Antoine Kernen, ont clairement montré le lien entre la politique africaine de la Chine et ces migrations. Cependant, cette présence chinoise supposée servir la « diplomatie du sourire » de Pékin ne

La diaspora, un levier de pouvoir pour la Chine contemporaine ?

se fait pas sans heurts. Rése fait pas sans heurts. Rése fait pas sans heurts. R cemment, les troubles en Angola dus à la concurrence chinoise sur le marché économique local ne sont qu’une des premières manifestations des effets pervers que peuvent entrainer l’affl ux de ressortissants chinois dans ces nouveaux pays d’immigration.

Alors que Pékin s’affi rme comme un acteur majeur sur la scène mondiale et s’engage dans un processus évident dévident dé ’adaptation aux normes internationales, il apparaînormes internationales, il apparaînormes internationales, il appara t pertinent de s’interroger sur les évolutions de la position chinoise évolutions de la position chinoise é à l’égard de sa diaspora : comment les nouvelles générations du PCC vont-elles gérer la question des émigrés clandestins qui continuent d’arriver dans les pays occidentaux ou qui restent après la fi n de leurs contrats temporaires dans des pays sans tradition d’immigration ancienne comme c’est le cas en Israël ? Quelle attitude la RPC va-t-elle adopter face aux effets du déferlement d’étudiants chinois sur les bancs des universités américaines ? Ainsi, au-delà des défi s économiques et politiques actuels, la Chine a devant elle un défi humain de grande ampleur, la gestion de ses fl ux migratoires mondiaux.

Chinepour la Chine Chinepour la Chine contemporaine ?

Chinecontemporaine ?pour la Chine contemporaine ?pour la Chine Chinepour la Chine contemporaine ?pour la Chine

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L’L’Lavèavèav nement du sionisme moderne au 19e siècle fait du judaïcle fait du judaïcle fait du juda sme un projet national. Son père, Théodore Herzl, l’associe aux mouvements nationalistes européens de l’époque, fondés sur le principe des nationalités. Il ressuscite ainsi l’idée de diaspora comme exil temporaire. Idée que l’on retrouve dans le slogan politique des réfugiés juifs en Palestine à partir de 1919: « Une terre sans peuple, pour un peuple sans terre ». Néanmoins, le succès des nationalismes en Europe n’nationalismes en Europe n’nationalismes en Europe noffre aux Juifs ni l’espoir d’un État ni la perspective de retour. Ce n’est que scandalisés par les barbaries de la Shoah que les dirigeants du monde entier embrassent, par culpabilité ou croyance, la cause sioniste. Celle-ci, une fois dotée du soutien international, se matérialise par la résolution 181 de l’Assemblée Générale de l’ONU, le 29 novembre 1947.

Soulageant une frustration politique séculaire, la création du foyer juif entend terminer l’exil, mettre fi n à l’existence de la diaspora, qui n’existerait que par défaut, en l’absence d’un É

l’existence de la diaspora, qui É

l’existence de la diaspora, qui tat. La déclaration

d’indépendance du 14 mai 1948 confi rme cette intention: « Nous lançons un appel au peuple juif de par le monde à se rallier à nous dans la tâche d’immigration [...] et à nous assister dans le grand combat que nous livrons pour réaliser le rêve poursuivi êve poursuivi êde génération en génération : la rédemption d’Israël »l »l . Suite aux appels gouvernementaux, les vagues migratoires successives arrivent en Israël.

La première aliyah (aliyah (aliyah « ascension » ascension » ascension en hébreu) est celle des immigrants d’Europe de l’Est, suivis des ressortissants de l’URSS puis d’une vague d’É

Europe de l’Est, suivis des ressortissants de l’É

Europe de l’Est, suivis des ressortissants de lthiopiens. Depuis 1948, Israël a ouvert ses

portes à plus de quatre millions de Juifs, et plus de 600 000 non-Juifs, surtout des Philippins et des Soudanais dans la dernière décennie. Tandis que la citoyenneté israélienne n’lienne n’lienne nest aujourd’hui plus uniquement liée au fait d’être juif, la naissance de l’État n’tat n’tat na pas entraîentraîentra né la fi n de la diaspora. Paradoxalement, celle-ci conserve l’imaginaire de l’Exil, contraint, alors que l’É

la fi n de la diaspora. Paradoxalement, celle-ci conserve ’É

la fi n de la diaspora. Paradoxalement, celle-ci conserve tat permet (par la loi

du retour) à n’importe quel Juif dans le monde de demander la nationalité israélienne.

De fait, il existe aujourd’hui deux appartenances indépendantes : être juif et être israélien. La diaspora reste à la marge de l’É

pendantes’É

pendantestat

tout en dialoguant constamment avec lui, participant d’un échange constant de fl ux transnationaux : personnes, ressources, informations. L’informations. L’informations. Lexemple de la communauté juive aux É

: personnes, ressources, É

: personnes, ressources, tats-Unis

est en cela signifi catif. Comptant 5,2 millions de personnes en 2000, elle constitue la plus importante communauté juive hors

d’Israël, et a un poids politique non négligeable dans les affaires politiques des deux pays.

Si la diaspora juive est aujourd’hui une réalité fondamentalement diffédiffédiff rente de celle de l’ÉSi la diaspora juive est aujourd

’ÉSi la diaspora juive est aujourd

tat d’Israël, elle joue néanmoins un rôle géopolitique considérable, notamment concernant le confl it israélo-palestinien. Les Juifs non-israéliens se voient parfois forcés de prendre position. Leur implication devient presque automatique : soit par leur alignement aux problématiques contemporaines soit par leur silence politique. Le confl it est lui-même source de fracture entre les communautés dispersées, façonnant l’identité contemporaine juive diffécontemporaine juive diffécontemporaine juive diff remment de l’appartenance israélienne.

Ainsi, faire partie de la diaspora juive ne signifi e guère une volonté migratoire. La construction étatique en 1948 est venue s’ajouter à l’existence des Juifs éparpillés dans le monde et possédant déjéjé à une autre nationalité. Fils de générations de migrants, nomades par tradition, ces Juifs, sédentarisés dans d’autres parties du monde, ne demandent pas forcément plus de l’État israélien que le partage symbolique d’une culture millénaire.

Israël et diaspora juive sont aujourd’hui deux réalités distinctes mais non distantes. Malgré la naissance de l’État d’Israël, les communautés juives se sont solidifi ées. La dissociation de l’identité diasporique et de l’identité israélienne relève plus dève plus dè ’une coexistence que d’un paradoxe, faisant du mythe du retour un choix personnel.

Le paradoxe de la diaspora juive

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Singulière en son existence et parcours, la diaspora juive regroupe les individus de tradition et de religion juive rattachés par leur mémoire collective à la terre d’Israël. Première en son genre, elle incarne peut-être le devenir de ce phénomène social. Mais le projet sioniste du 19e siècle, puis son aboutissement en 1948, semble vider de son sens la diaspora juive, qui trouvait dans l’espoir du retour sa raison d’être à travers les siècles. Doit-on voir un paradoxe dans sa permanence après la création de l’É

cles. Doit-on voir un paradoxe dans sa É

cles. Doit-on voir un paradoxe dans sa tat d’Israël ?

L’L’Limaginaire du « Juif errant » Juif errant » Juif errant symbolise l’attachement profond du peuple à l’expérience d’exil. Les Juifs, éloignés de leur terre ancestrale, ont fait de la diaspora leur identité.

La destruction du second Temple, en 70 après J.-C., pendant la domination romaine, marque le début de la diaspora juive. La dispersion des communautés juives entraîs juives entraîs juives entra ne leur diversifi cation. C’est cette fragmentation des pratiques religieuses, problématique pour les communautés rabbiniques, et la marginalisation des groupes juifs (non reconnus ou mal intégrés) qui génèrent le concept d’Exil et le rêve du retour dans lêve du retour dans lê ’imaginaire collectif juif.

La permanence de la diaspora juive, historiquement fondée sur le mythe du retour, garde-t-elle un sens après la création d’Israël, ou constitue-t-elle un paradoxe?

Le paradoxe de la diaspora juive Lde la diaspora juive L

Creative Commons licence photo credit : CyberAndy

> Laura Waisbich, étudiante en 4è année, Master Recherche,

Relations Internationales

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De nombreuses incohérences peuvent de plus être relevétre relevétre relev es concernant les rites et coutumes : ainsi, du porc est consommé à quasiment tous les repas au Mizoram. Par ailleurs, la comparaison entre les coutumes mizos et les traditions juives est faite sur la base des rites juifs tels que décrits dans la Bible, et dont de nombreux pans ont été abandonnés.

Dans l’espoir de prouver de façon indéniable leur origine israélite, les institutions juives du Mizoram, soutenues par des organisations israéliennes telles que Amishav ou Shavei Israel ont eu recours au test ADN, afi n de déceler dans les populations mizos des gènes censés être communs à tous les Juifs. L’aliyah d’environ 1500 Mizos aliyah d’environ 1500 Mizos aliyahà partir du milieu des années 1990 s’est certes faite sur la base de leur pratique du Judaïleur pratique du Judaïleur pratique du Juda sme et non sur la base de génotypes, mais l’absurdité d’une telle démarche soulève une question polève une question polè émique: l’activité d’Amishav ou de Shavei Israel, œuvrant pour le retour des tribus perdues en Israël, n’est-elle pas une forme de prosélytisme ? En d’autres termes, ces Mizos auraient-ils embrassé le Judaïle Judaïle Juda sme de cette façon sans l’intervention extérieure de ces organisations ?

En outre, comment ne pas accuser les Mizos juifs d’opportunisme, utilisant la loi du retour israélienne pour échapper à une marginalisation politique et économique ? On observe par exemple que l’émergence du Judaïmergence du Judaïmergence du Juda sme au Mizoram se fait parallèlement à l’affi rmation de mouvements nationalistes de lutte armée contre l’État central indien (1966-1986), favorisant le mouvement de conversion.

L’anthropologue Shalva Weil souligne le fait que les Mizos n’ont pas procédé à une conversion, mais à une double conversion : tout

d’abord de pratiques tribales au Christianisme, puis au Judaïd’abord de pratiques tribales au Christianisme, puis au Judaïd’abord de pratiques tribales au Christianisme, puis au Juda sme. En conséquence, il semblerait que la plupart des notions bibliques des Mizos aient été acquises lors de la première conversion, et non transmises à travers les générations. La conversion au Judaïrations. La conversion au Judaïrations. La conversion au Juda sme se serait donc faite dans le but « de couper court au Christianisme et en quête d’une importance ethnique d’une nouvelle forme. » La seconde conversion a permis aux Mizos de restaurer la dignité de leurs ancêtres, alors que les missionnaires chrétiens les qualifi aient de sauvages.

La judaïLa judaïLa juda tïtï é de ces Mizos est de toute évidence un évidence un é « produit du Christianisme », fruit de leur première conversion par des missionnaires occidentaux. Tenter de prouver un lien avec une tribu perdue a donc peu de sens. Néanmoins, que leurs origines se mêlent ou non à la diaspora, c’est bien par leur pratique du JudaïJudaïJuda sme que ceux qui se nomment les Bnei Menashe se distinguent Bnei Menashe se distinguent Bnei Menashecomme Juifs, une pratique qui, bien qu’elle leur ait été enseignée par des rabbins d’Israël et de Bombay, répond à une réelle volonté de conversion.

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(c) Julien Levesque

Quel intérêt à se proclamer branche perdue d’une diaspora puissante ? C’est la question qu’on ne peut s’empêcher de se poser lorsque l’on se penche sur la conversion au Judaïlorsque l’on se penche sur la conversion au Judaïlorsque l’on se penche sur la conversion au Juda sme de milliers de Mizos. Au Mizoram, un Élorsque l’on se penche sur la conversion au Juda

Élorsque l’on se penche sur la conversion au Juda

tat du nord-est de l’Inde coincé entre le Bangladesh à l’Ouest et la Birmanie à l’Est et comptant moins d’un million d’habitants, un nombre croissant de personnes se met à pratiquer les rites Juifs à partir des années 1950. Puis, dans les années 1980, ce groupe, aujourd’hui large de huit à neuf mille fi dèles, se revendique comme la descendance de la tribu de Manassé, une des dix tribus perdues d’Israël dispersées suite à la destruction du royaume d’Israël par les Assyriens en 722 avant J.-C. Ceci est la version de l’histoire mise en avant tant par les Bnei Menashe, ou enfants de Manassé, que par Shavei Israel, une organisation qui s’est donnée la mission d’identifi er les tribus perdues afi n de les ramener en Israël.

Mais comment ne pas rester perplexe face à cette population aux traits mongoloïdes, aux langues tibéto-birmanes, évangévangé élisée au début du 20e siècle par des missionnaires britanniques et américains, qui affi rme soudainement faire partie du peuple élu? Deux théories principales sont avancées pour justifi er cette revendication. La théorie de l’origine retrace la migration de la tribu de Manassé depuis son expulsion d’Israël: après avoir traversé le Moyen-Orient et l’Asie centrale, elle se serait retrouvéle Moyen-Orient et l’Asie centrale, elle se serait retrouvéle Moyen-Orient et l’Asie centrale, elle se serait retrouv e au Tibet, puis dans le sud de la Chine, d’où, chassée et persécutée, elle aurait trouvé trouvé trouv refuge dans des grottes, avant de fi nir dans le nord de la Birmanie puis sur l’actuelle frontière indo-birmane.

La théorie des coutumes met quant à elle en lumière un certain nombre de parallèles entre les coutumes mizos pré-chrétiennes et les traditions juives, tant au niveau des croyances (monothéisme) que des rituels (mariage, sacrifi ces animaux, trois festivals religieux rythmant l’année). De plus, les prières et chants mizos font constamment réféféf rence à Manasia ou Manasia ou Manasia Manase, un ancêtre idéalisédont le nom est interprété comme un dérivé rivé riv de Manassé.

Néanmoins, l’absence d’information fi able empêche de confi rmer scientifi quement ces hypothèses. L’émigration jusqu’en Chine des tribus perdues au cours de leur errance n’a par exemple rien d’évident, puisqu’il semblerait que les communautévident, puisqu’il semblerait que les communauté és juives de Chine (Kaifeng) soient une branche issue des peuples juifs d’Iran.

Mizos juifs :

Dans une région du nord-est de l’Inde, plusieurs milliers

de personnes pratiquent le Judaïsme depuis les

années 1950 et se disent les descendants de la tribu de

Manassé, une des dix tribus perdues d’Israël. Prouver

l’authenticité de leurs revendications a peu de sens,

mais induit une question polémique: la conversion des Mizos est-elle le résultat d’un

prosélytisme juif ?

une diaspora auto-proclamée ?

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> Julien Levesque, étudiant en 4è année,

double diplôme Sciences Po-SIPA en Affaires Internationales

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était motivé tait motivé tait motiv par d’autres raisons que la seule tradition commerciale et le seul désir de partager des idées ?

Si le douanier ivoirien s’était interrogé sur les raisons profondes de l’association libanais-commerçant qu’il avait spontanément établie, sans doute aurait-il conclu qu’il n’il n’il ny a pas une diaspora mais ’y a pas une diaspora mais ’des diasporas. Cette propension à l’exil ne serait-elle pas liée à la structure même de l’identité libanaise ? Ne serait-elle pas le refl et du sentiment de « minorité partagée» que ressentent nombre de Libanais ? Car, pas plus au Liban qu’ailleurs, « nul n’nul n’nul nest prophète en son pays ». Et le musulman chiite, le chrétien maronite ou le druze ont tous une excellente raison de se sentir, d’une façon ou d’une autre, minoritaire dans leur propre pays. Chacun dans son village, sa ville, son statut social et son appartenance religieuse peut se sentir l’objet, sinon la victime d’une discrimination latente.

« Beit min ? » ? » ? Question incontournable, quasi-rituelle que s’adressent mutuellement deux Libanais qui font connaissance. Au premier degré, l’interrogation, bien innocente, porte sur le patronyme de l’interlocuteur, son nom de famille. Mais au-delà du caractère anodin de la question, le but recherché est de parvenir à jauger l’autre, à le situer dans le spectre politique, religieux, économique et social du pays : exercice complexe et subtil qui va établir un rapport de force latent qui va lui-même conditionner la nature des relations qui vont s’en suivre.

Or, une fois à l’étranger, ces données n’ont plus cours : le patronyme, la gloire des ancêtres, la fi liation politique, l’appartenance religieuse ou le statut social ne sont plus perçus comme des critères discriminants. En ce sens, la diaspora est une chance pour les Libanais : au-delà des aspects matériels, elle leur offre une opportunité de s’émanciper sur un plan psychologique et humain. VéVéV ritable échappatoire à la pesanteur des traditions, elle leur permet d’exister en tant qu’individus hors des contraintes et des carcans

inhérents à la société libanaise. Mieux encore, cette émancipation les autorise à entretenir des relations sociales et amicales avec des Libanais issus de milieux diamétralement opposés, chose que le regard du voisin interdit parfois au Liban.

Une chance pour les Libanais, donc. Reste à savoir si le phénomène constitue une chance pour le Liban. La réponse à cette question est plus nuancée. Certes le Liban est susceptible de tirer profi t de sa diaspora sur le court et le long terme. En témoignent la capacité de la diaspora à faire pression depuis l’étranger (lobbys), ou encore les 6 milliards de dollars que représentent les transferts de fond vers la patrie en rythme annuel. À plus long terme, le Liban est en les 6 milliards de dollars que reprvers la patrie en rythme annuel. À plus long terme, le Liban est en les 6 milliards de dollars que repr

droit d’espérer un retour sur investissement.

Reste que ce pari sur l’avenir est risqué. Car le phénomène diasporique a lui aussi son revers de médaille. Parfaitement intégrés dans leurs sociétés d’accueil (trop bien ?) et acteurs de la vie politique et économique de leurs pays d’adoption, il n’adoption, il n’adoption, il nest pas rare que les Libanais renoncent à leurs projets de retour et envisagent une installation défi nitive qui s’accompagne bien souvent d’une demande de naturalisation. C’est la rançon de l’intégration, ou plutôt de l’assimilation, étape ultime de ce processus, point de non-retour d’un cheminement non seulement spatial mais aussi identitaire. L’identitaire. L’identitaire. Linvestissement, loin d’être rentabilisé, n’est plus que pure perte ; l’exil prometteur, fuite de cerveaux.

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La scène a pour théâtre la frontière ivoiro-ghanéenne. « Papiers ! » mâchonne le douanier. «Nationalité ? » « Libanaise », réplique le voyageur au teint clair. « J’ai dit nationalité ! », beugle le gabelou. « Libanais », insiste l’autre, interloqué. La réplique cingle : « Mais enfi n, ce n’enfi n, ce n’enfi n, ce nest pas une nationalité, c’est une profession ! »

Cette anecdote rapportée par l’Express’Express’ du 24 octobre 2002 en dit Express du 24 octobre 2002 en dit Expresslong sur un certain nombre d’idées reçues concernant l’identité libanaise telle qu’elle est perçue par les étrangers. Mais à quelle « profession » profession » profession notre homme faisait-il allusion ? Celle de marchand, à l’évidence, ’évidence, ’é étiquette si souvent collée au peuple libanais. Au demeurant, cette réputation de commerçant invéant invéant inv téré n’est pas usurpée s’il l’on songe que depuis des temps immémoriaux, les Libanais se sont distingués par leur aptitude à commercer de par le monde.

Cinq mille ans après l’établissement des premiers comptoirs phéniciens en Méditerranée, les Libanais excellent toujours dans les domaines de la banque ou de l’import-export. D’où leur propension à dépasser les étroites frontières du Liban pour s’en aller courir la fortune sous d’autres cieux. Les exemples récents de Carlos Ghosn, PDG de Renault, Nicolas Hayek, président de Swatch Group, ou encore Elie Saab, couturier à renommée internationale le prouvent mieux que jamais.

Aussi pourrait-on penser que le motif principal du phénomène diasporique libanais est économique, si ce n’économique, si ce n’économique, si ce n tait son aptitude à exporter ses idées, sa culture, ses traditions. En témoigne les vagues successives de journalistes, intellectuels, écrivains, tel un Khalil Gibran, qui, parfois contraints, ont choisit l’exil vers les États-Unis ou l’Europe pour exprimer leur talents.

Culture, commerce, échange, partage… Et si la diaspora à la libanaise trouvait ses ressorts ailleurs ? Et si l’attrait pour l’Occident

La diaspora libanaise, une chance pour le Liban ?

Seul pays au monde à compter plus de ressortissants en dehors de ses frontières qu’à l’intérieur, le Liban ne peut se comprendre

qu’à travers sa diaspora.

LLa diaspora libanaise, LLa diaspora libanaise,

> Clara Tardy,étudiante en 2è année

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The Gulf region has never been known as a beacon of democratic liberty. In particular, Diaspora communities living there are marked by a lack of integration into mainstream society, remaining a visible stain on this region’s human rights record. The governmental policies of these host countries are largely to blame. But in order for the region to continue fl ourishing economically, they must change.

We cannot underestimate the role that trade and the liberal markets of the world have played to encourage Diasporas in the Gulf region (Saudi Arabia, Qatar, Bahrain, Oman, Kuwait, and the United Arab Emirates). The Islamic kingdoms there began opening their borders in the mid-1980s thanks to the discovery of enormous oil reserves and the consequent need for manpower. This labor vacuum was initially met by such neighboring countries as Yemen, Pakistan and Oman; by Egypt, India, Nepal, Philippine, Bangladesh, Indonesia, Jordan, and Syria in a second wave; and

most recently, by the United States and Britain. The reputation of certain Gulf countries as tax havens further encouraged economic exodus.

As a result, Diaspora communities now make up around 13 million of the 39 million people that live in the Gulf States and constitute not only a large part of the unskilled labor force, but skilled as well, most of whom come from Asia. However, in contrast to other parts of the world, Diaspora populations in the Gulf have not profoundly affected the domestic and foreign policies of their host countries - an irony when one considers their sheer numbers.

Their lack of infl uence stems from the little unity between Diaspora groups and to an even greater extent, their lack of integration with the locals. For example, with no effi cient formal education system, the region has allowed for different school systems based on nationality to exist simultaneously, thus creating an ethnic divide. Furthermore, the extremely expensive British and American schools remain inaccessible for most Asians, reinforcing such divides.

Further complicating matters, American and British workers receive better benefi ts for the same job, including higher pay scales and exemption from long and tiresome administrative procedures. In addition, different professions are treated differently; laborers, regardless of their cultural or religious affi nities, are given little interaction with other classes. Thus Diaspora communities are twice divided: not only along lines of nationality and origin (to an extent, racially), but also along lines of class.

Another challenge to Diaspora populations stems from their cultural differences with their host country. Communities coming from Islamic states might not fi nd it very challenging to adjust to Gulf society, but others fi nd the rules restrictive, especially since they cannot identify with the religious culture. With the exception of Dubai, life in the kingdoms comes with a long list of societal standards; failure to live within these codifi ed rules could mean deportation, imprisonment and in certain cases even execution. With such severely curtailed liberties, many communities fi nd it diffi cult to maintain their cultural identities, let alone connect to mainstream society.

In light of the challenges described, one wonders why people migrate by the millions to the Gulf and subject themselves to a societal double standard. The answer is evident - high salaries. In 2007, remittances from the Gulf totaled 24.7 billion US dollars, accounting for 17% of the global fi gure. These large amounts of money being sent back “home” speak volumes of the golden employment opportunities available in the Gulf.

Bridging the Gulf :Diasporas and Democracy

The lack of societal integration found in Diaspora communities living in the Gulf

region is a matter worth considerable attention. It is only through advancing

their equal treatment that Gulf leaders can sustain their much-needed foreign

workforce and continue prospering economically.

> Janhavi Naidu, 4th year student

Master’s degree in International Affairs

Yet, is it enough for host countries to generously compensate these Diaspora communities while ignoring their larger problems of integration? The long-term answer is no. Despite an increasingly skilled workforce thanks to decades of foreign apprenticeship, native Gulf populations remain very small in number; for the realization of all their ambitions, natives must continue to rely on a foreign infl ux of human resources. Indeed statistics show that by 2015, the number of foreign workers in the Gulf will be close to 50 million. Keeping this in mind, there are several measures of ensuring a higher degree of integration.

One would be to abolish employment discrimination based on race and class within the different Diasporas, and between the local population. This would mean enacting legislation promoting equal opportunities for employment and education. With no difference in pay scales, class divisions on lines of nationality would decline. Another effort would be to extend citizenship to foreign workers after a certain number of years of residence. This process has already begun in Saudi Arabia, and should be carried out in the rest of the Gulf. In the absence of the possibility of citizenship, long-term and permanent integration is signifi cantly hindered.

The courts are needed to enforce such measures. In general, justice systems in the Gulf are known for their arbitrary and disproportionate penalties, especially against women, and must do more to ensure equality. In particular, the court’s role should be seen within a broader scope toward progressive democratization, and must be matched with political backing from the ruling authorities.

It is only through advancing such measures that Gulf leaders can sustain their foreign workforce, and in doing so, continue basking in the glory of their wealth.

Page 15: Diasporas

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Diaspora, identité

et culture : le cas berbère

Le 12 janvier, dans toute l’Europe, les Berbères célébraient leur nouvel an, « Yennayer »Yennayer »Yennayer . Selon leur calendrier agraire utilisé depuis l’Antiquité, nous sommes en l’an 2959.

Les Berbères, communément défi nis comme les habitants autochtones des pays d’Afrique du Nord, ont émigré par vagues successives en Europe à partir de l’après-guerre. Fait certainement méconnu puisqu’on les confond avec leurs compatriotes arabes, ils représentent une part importante de l’immigration « maghrébine ». Rien d’étonnant à cela : avec l’arabisation du Maghreb aux 7e et 8e siècles, les Berbères, ou Imazighen, ont été assimilés à une culture arabo-musulmane, ce qui fait que l’on a longtemps ignoré la spécifi cité de leur identité et de leur histoire.

C’est tout l’intérêt de défi nir aujourd’hui la « diaspora berbère » comme tente de le faire Tassadit Yacine, spécialiste de la question berbère et enseignante à l’EHESS. S’il y a diaspora lorsqu’un peuple « homogène » se disperse et se reforme à l’étranger en communautés, comment parler de « diaspora berbère » quand on sait que ce « peuple », dans son identité comme dans ses revendications, reste contesté et méconnu d’abord chez lui ?

Cette réalité, fruit de l’histoire, impose de s’interroger sur l’existence même d’un « peuple » berbère. Organisés sur un mode clanique et tribal, les Berbères ne forment pas, à l’origine, un peuple homogl’origine, un peuple homogl’origine, ène. Les conquêtes successives puis la décolonisation cristallisent cette disparité des peuplades. Les groupes berbères, isolés les uns des autres, évoluent dans leurs pays respectifs de maniévoluent dans leurs pays respectifs de manié ère divergente et le tamazight (langue berbtamazight (langue berbtamazight ère) se divise en plusieurs variantes (rifain, kabyle, chleuh notamment).

Les nouveaux occupants exploitent ces disparités pour mieux affaiblir la culture berbère. Les Berbères sont marginalisés dans les montagnes et les campagnes, à l’écart de la ville et des Arabes, eux-mêmes peu désireux de mixité.

La décolonisation vient enfi n entériner la négation du peuple berbère dans son essence : les gouvernements préfèfèf rent affi cher une unité « arabo-musulmane » plutôt que reconnaît que reconnaît que reconna tre l’existence d’une culture berbère autochtone, qui s’est pourtant distinguée dans la lutte contre le colonisateur.

Comment une « diaspora berbère » émerge-t-elle alors, malgré la pluralité des peuples berbères et la négation de leur berbérité ?

À partir des annÀ partir des annÀ ées 1950, pour des motifs d’abord économiques, des hommes puis des familles entières d’origine berbère quittent les montagnes du Maghreb par milliers. Ils se dispersent en Europe (certains avancent le chiffre de trois millions de citoyens européens d’origine berbère), mais également aux ÉEurope (certains avancent le chiffre de trois millions de citoyens

ÉEurope (certains avancent le chiffre de trois millions de citoyens

tats-Unis et au Canada. Leur préoccupation première est d’assurer le quotidien des leurs, ce qui laisse peu de place à des questionnements relatifs à la transmission des savoirs et de valeurs ainsi qu’à la revendication de l’identité berbère.

Pourtant, la dispersion des Imazighen s’accompagne d’un resserrement de leur communauté à l’étranger. Les familles issues du même village se retrouvent très souvent dans la même ville ou le même quartier (aux alentours de l’entreprise qui les a recrutés par exemple). Elles cultivent entre elles leurs coutumes et leurs traditions.

C’est fi nalement par le biais des artistes, des associations culturelles et des générations les plus jeunes qu’émerge l’idée d’une « diaspora berbère », une identité berbère qui se reformerait à l’étranger.

Les artistes, écrivains, peintres, chanteurs forment un des fi ls conducteurs de cette diaspora. Idir en est un exemple assez connu. Nombreux sont ceux qui ont découvert la cause berbère par ses chansons en kabyle.

Méconnus ou méprisés chez eux, les Berbères sont rarement considérés comme un peuple à part entière. Cependant, à l’étranger, ils semblent trouver enfi n les ressorts leur permettant de revendiquer leur identité.

> Farida Belkacem,étudiante en 4è année, Master Recherche,

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Les associations, comme l’Amazigh-Büro à Frankfort, l’Amazigh Association à Londres, ou encore l’Association de la Culture Berbère en France se multiplient en Europe. Elles militent en faveur de l’enseignement facultatif du berbère ou de l’inclusion du fait berbère dans les manuels scolaires. Elles proposent également des cours de langue et soutiennent la création artistique et culturelle berbère.

Les nouvelles générations, pourtant nées et scolarisées dans les pays d’accueil de leurs parents, s’avèd’accueil de leurs parents, s’avèd’accueil de leurs parents, s’av rent particulièrement réceptives à ce phénomène. Leur quête identitaire trouve une des ses expressions sur Internet. Relais des revendications berbères, des sites comme berberes.net, amazighworld.org, ou mondeberbere.com, promeuvent aussi nouveautés musicales et artistiques berbères à travers le monde. Valorisant ce renouveau, des festivals sont dédiés à la culture berbère, tel que celui des Découvertes Berbères qui se tient chaque année dans l’agglomération lyonnaise et qui conjugue théâtre, expositions, et concerts.

L’expression « diaspora berbère » est donc à prendre avec des pincettes. La diversité des peuples berbères et la méconnaissance

dont ils sont l’objet pourraient laisser croire que leur dispersion n’implique pas l’existence d’une « diaspora »diaspora »diaspora . Pourtant, ces dernières années, les évévé évév nements culturels berbères se sont multipliés en Europe et les nouvelles générations sont de plus en plus désireuses de connaîde connaîde conna tre et de défendre leurs racines. L’idée d’une « diaspora berbère » commence donc peut-être à prendre tout son sens. La spécifi cité de cette diaspora résiderait alors peut-être dans le fait qu’elle existe contre toute attente.

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À Paris, les Tamouls ont trouvé leur chapelle.Contrairement aux apparences, le quartier de La Chapelle n’est pas tout à fait la « petite Inde » de Paris. En réalité, ces barbiers, épiciers, bijoutiers, vendeurs de saris et de DVD qui animent la rue du faubourg Saint-Denis sont en grande partie des Tamouls d’origine sri-lankaise. Minoritaires dans leur propre pays, les membres de cette communauté se sont exilés en grand nombre, pour fuir la guerre civile les opposant aux cingalais depuis maintenant plus de 25 ans. Aujourd’hui, ils sont près de 70 000 en France et constituent 90% de la communauté tamoule, les autres étant originaires d’Inde, de La Réunion ou de l’île Maurice. La plupart de ces tamouls vivent en banlieue mais La Chapelle reste le véritable lieu de rassemblement pour la communauté. C’est dans ces environs que l’on trouve la plupart de leurs associations, qu’elles soient sportives, culturelles ou religieuses.

En ce début d’année, les tamouls sont en deuil. Au Sri-Lanka, l’armée gouvernementale vient de remporter une bataille décisive contre la rébellion armée des « Tigres tamouls », organisation qualifi ée de terroriste par l’Union Européenne depuis 2006. Si la perspective d’un État tamoul indépendant s’affaiblit, c’est surtout le sort réservé aux civils qui inquiète et mobilise la communauté. Car c’est la vie de leur famille restée au pays qui est en jeu : « Contre la barbarie d’état SRI-LANKAIS » peut-on ainsi lire sur les vitrines ces jours-ci, au coté de photos d’enfants blessés, gisants sur leur lit d’hôpital.

Dans les manifestations, les nouvelles générations sont à l’avant-poste. Près de l’Assemblée Nationale, John tente de sensibiliser les passants en distribuant quelques tracts. « On doit faire ce que nos parents n’ont pas su réaliser, à savoir informer les Français sur la guerre que nous subissons au Sri-Lanka » affi rme ce Français de 26 ans, d’origine tamoule, qui s’engage depuis plusieurs années pour défendre la cause de son peuple. Cependant, parmi ces jeunes militants, qui comme John ont vécu la plupart de leur existence en France, peu envisagent un retour défi nitif au Sri-Lanka. Craignant de se sentir étrangers dans leur propre pays, attachés à celui dans lequel ils ont été éduqués, ces jeunes tamouls veulent libérer leur terre, mais pas pour y vivre.

1

(1) Le signe sacré de l’hindouisme (« aum »), religion majoritaire chez les tamouls.

(2) Ces jeunes tamouls sont tous les quatre originaires de Pondichéry (Tamil Nadu, Inde).

(3) A l’intérieur du temple de Ganesh (Sri Manika Vinaikar Alayam), le plus ancien lieu de culte hindou de la capitale, fondé en 1983.

(4) Dans la rue du Faubourg Saint-Denis, la plupart des commerces sont tenus par des Tamouls(5) comme chez ce coiffeur (6) ou dans ce magasin de DVD.

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> Philippe Calia

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8 (à g.) - 9 (à dr.)

10

(7) Cours élémentaire dans une école privée tamoule. L’enfant, ici au centre, est d’origine cin-galaise.

(8) Le professeur S. Sachchitha-nantham, originaire du Sri-Lan-ka, a créé cette école en 1983.

(9) Thiru, dans les locaux de l’as-sociation CCTF, pose en dessous des portraits de Nicolas Sarkozy et de Velupillai Prabhakaran, chef des Tigres tamouls.

(10) Scène de prière à l’intérieur de l’autre temple hindou du quartier de La Chapelle (Muthu-mariamman).

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(11) Le 7 janvier 2009, manifestation place de la République de la communauté tamoule contre la politique de l’État sri-lankais

(12) Ce même 7 janvier, devant le refus des militants de se disperser, les policiers autoriseront fi nalement le déroulement de la manifestation.

(13) À la sortie du temple de Muthumariamman, Malar fait la quête. Selon elle, les fonds récoltés sont destinés aux tamouls victimes de la guerre.

(14) Le 17 janvier 2009, manifestation silencieuse place de la Chapelle.

http://indiary.blogspot.com/

> Texte & photos : Philippe Caliaétudiant en 5è année,

Master Recherche, Politique Comparée, Mention Asie

Le retour au pays, on y croit de moins en moins

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Le 2 août 2007, pour la première fois dans l’histoire, l’expédition Arktika 2007 atteignait le fond de l’Océan Arctique, sous le pôle Nord. Un drapeau russe y fut planté, tandis que furent récoltés des sédiments destinés à prouver la légitimité des revendications du Kremlin sur une large part de l’Arctique et de ses gigantesques ressources naturelles.

Depuis qu’il a été découvert que l’Arctique pourrait abriter, selon les chiffres les plus optimistes, près de 25% des ressources mondiales en hydrocarbures, la région est l’objet de convoitises internationales. Avec la fonte de la banquise, leur extraction et leur transport pourraient devenir possibles d’ici 2030-2040. L’2030-2040. L’2030-2040. Laccélération de la fonte des glaces polaires devrait permettre de réduire le volume d’investissement nécessaire à l’exploitation des champs pétroliers et gaziers. Pour autant, les sommes nécessaires sont telles que ce sont sans nul doute les cours mondiaux du pétrole qui indiqueront le pas à suivre en Arctique. Ainsi, en contraignant les pays polaires à revoir leurs ambitions à la baisse, la chute du prix du baril au quatrième semestre 2008, fortement liée au contexte de crise économique, pourrait ralentir provisoirement les projets d’exploitation.

Par ailleurs, les changements climatiques récents permettent d’envisager l’utilisation du Passage du Nord-Est, au nord de la Russie, et du Passage du Nord-Ouest, au nord du Canada, comme routes maritimes pour acheminer les hydrocarbures depuis l’Arctique vers l’Europe et l’Asie. Des voies dont la possession est encore contestée, étant considérées, selon les intérêts de chaque pays, comme des eaux intérieures ou comme des routes maritimes internationales. La fonte de la banquise devrait également permettre un accès à de nouvelles zones de pêche, autre futur sujet de tensions entre Éde nouvelles zones de p

Éde nouvelles zones de p

tats.

L’L’Lexpédition polaire russe a mis en évidence évidence él’imprécision du statut légal de l’Arctique. La Russie, le Canada, la NorvèLa Russie, le Canada, la NorvèLa Russie, le Canada, la Norv ge, les É

Arctique. É

Arctique. tats-

Unis (avec l’Alaska) et le Danemark (avec le Groenland, qui a toutefois voté, en novembre 2008, pour une autonomie renforcée vis-à-vis du Danemark avec le droit, dès juin 2009, de contrôler ses propres ressources naturelles) ne cessent d’affi rmer leur souveraineté sur cette région du monde longtemps éloignée des grands

enjeux internationaux. D’après la Convention des Nations Unies sur la Loi de la Mer (CNUDM) de 1982, les États ne peuvent étendre leur souveraineté que sur une Zone Économique Exclusive de 200 miles nautiques au-delà de leurs côtes. Cependant, si un ÉExclusive de 200 miles nautiques au-del

ÉExclusive de 200 miles nautiques au-del

tat parvient à prouver que son plateau continental sous-marin s’étend au-delà de cette zone, il peut se voir accorder par l’ONU le droit d’exploiter les fonds marins revendiqués. C’est pourquoi le Kremlin affi rme que les fonds arctiques prolongent le plateau continental sibérien et qu’ils doivent, à ce titre, être placés sous sa tutelle. Face à Moscou, Washington, Ottawa et Copenhague réaffi rment leurs revendications en Arctique et repensent leurs stratégies dans la région. Washington, tout comme Copenhague, a d’ailleurs lancé, peu après l’annonce de l’initiative russe, une mission censée la concurrencer. Cependant, c’est au Canada que la question provoque les réactions les plus passionnées. Le premier ministre Harper a ainsi affi rmé qu’il recourrait à la force si les intérêts canadiens dans la région étaient menacés.

L’L’Limage d’une expédition plantant un drapeau national sur un territoire presque vierge d’empreinte humaine n’empreinte humaine n’empreinte humaine nest pas sans rappeler les conquêtes du 19e siècle. Pourtant, les tensions géopolitiques qui entourent le statut de l’Arctique ne sont pas des résurgences conjoncturelles de ces luttes passées : elles correspondent à de nouvelles formes d’expression de la mondialisation. Si ce sont les É

expression de la mondialisation. Si É

expression de la mondialisation. Si tats qui revendiquent à la fois les

territoires et leurs richesses dans cette course aux ressources naturelles, ils dépendent en réalité largement des entreprises possédant l’expertise technologique et l’expérience nécessaires à l’extraction du gaz et du pétrole en zone polaire. Ainsi, un pays comme le Royaume-Uni, qui n’est pas concerné par la partition de l’Arctique,

pourrait voir ses compagnies spécialisées profi ter de cette ruée vers l’or noir du grand Nord. British Petroleum (BP) et la fi rme britannico-néerlandaise Shell comptent en effet parmi les leaders de ce marché. Les perspectives de l’exploitation arctique pourraient aussi conduire des pays avides d’énergie comme la Chine à investir sur le marché.

La question arctique, à la fois économique, environnementale et politique, est source de tensions interétatiques à considérer avec prudence et neutralité. Les choix opérés quant à l’avenir de l’Arctique et de ses richesses auront des conséquences durables à l’échelle mondiale. Contrairement à l’Antarctique, l’Arctique n’Arctique n’Arctique nest pas protégé par un traité international. Si les Épas protÉpas prot

tats proches du pôle Nord ont signé, le 28 mai 2008, la déclaration d’Ilulissat, un texte appelant à un règlement pacifi que et concerté de la question arctique, nul doute que les tensions subsistent. C’est pourquoi les grandes institutions internationales, dont l’Union européenne, cherchent un équilibre entre la préservation de l’environnement et l’exploitation durable des ressources naturelles. Le Parlement européen s’est prononcé, en octobre 2008, pour l’adoption d’un traité qui permettrait d’assurer que la guerre du froid n’du froid n’du froid naura pas lieu.

> La guerre du froid

L’Arctique, dont les ressources naturelles deviennent exploitables grâce au réchauffement climatique, est un territoire âprement disputé. La question arctique, liée à la mondialisation, est à la fois économique, environnementale et politique. Un arbitrage international est indispensable.

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La Transition démocratique espagnole, à la majuscule signifi cative de l’étape historique qu’elle représente, a trouvé sente, a trouvé sente, a trouv son maîson maîson ma tre mot dans le consensus. Les deux Espagne qui s’étaient affrontées dans une guerre fratricide ont décidé de se pardonner mutuellement pour rétablir une démocratie moderne, tout en « passant l’éponge » sur les torts passés des uns et des autres. C’est ce qu’on a appelé depuis le pacte de l’oubli, dont la loi d’amnistie de 1977 est l’expression la plus tangible. Elle protège aussi bien les fonctionnaires et les dirigeants franquistes en amnistiant les actes commis dans l’exercice de leurs fonctions (même « les délits à l’encontre des droits des personnes ») que les militaires putschistes et les activistes politiques opposés au régime. Mais cette loi, dont la validité est d’ailleurs contestée par l’ONU, qui a soutenu l’initiative de Garzon (déclaration du comité des droits de l’homme de l’ONU le 31 octobre 2008), laisse en l’état une situation dans laquelle les vainqueurs et les vaincus le restent, et les victimes n’le restent, et les victimes n’le restent, et les victimes nont été ni reconnues ni dédommagées : des milliers de personnes gisent encore dans des fosses communes.

Le débat a été relancé depuis la proposition en 2006 et le vote en octobre 2007 de la loi dite de Mémoire Historique (qui reconnaî(qui reconnaî(qui reconna t et élargit les droits des victimes de répressions, promet des réparations, établit la non-validité des jugements sommaires, se propose de retrouver les fosses communes, rend la nationalité espagnole aux enfants de réfugiés en exil, etc.). Mais c’est le 16 octobre 2008 que le juge Garzon s’est emparé des plaintes déposées par des associations regroupant les familles de victimes de la répression franquiste, pour accuser Franco et d’autres dirigeants franquistes de « délits contre de Hauts Organismes de la Nation et la forme du gouvernement » du gouvernement » du gouvernement dans le cadre de crimes

Trente-trois ans après la mort du dictateur, l’héritage

du franquisme est encore polémique en Espagne.

L’initiative du juge Baltasar Garzon de lancer une procédure

contre le régime franquiste en octobre dernier a lancé un débat qui remonte aux

fondements mêmes de la jeune démocratie espagnole.

contre l’humanité, et ordonner la réouverture de 19 fosses communes.

La polémique ne s’est pas faite attendre. D’abord, de la part de toute une partie de la classe politique qui refuse, notamment à droite de l’échiquier politique, de remettre en cause le pacte de l’oubli. C’est ainsi que le gouvernement de M. Zapatero s’est vu accuser de diviser les Espagnols en faisant ressurgir de vieilles rancœurs, trahissant du même coup le pacte de la Transition. La volonté de Garzon de déclarer le soulèvement du 18 juillet èvement du 18 juillet è1936 illégal est d’autant moins bien reçue que le PP (Parti Populaire) a en quelque sorte assumé l’héritage du franquisme en intégrant une partie de ses élites reconverties à la démocratie : son fondateur et président d’honneur, M. Fraga, qui est aussi un des pères de la Constitution de 1978, fut ministre sous Franco entre 1962 et 1969 et reste encore actif dans la vie politique. Il a déclaré que « d’un point de vue politique, ressusciter les problèmes de la Guerre civile, qui fut une tragédie pour les deux camps, est une grave erreur »grave erreur »grave erreur . Une partie du clergé s’est aussi vivement opposé aux développements de la loi éveloppements de la loi éde Mémoire historique. L’moire historique. L’moire historique. Larchevêarchevêarchev que de Madrid le cardinal Rouco Varela déclarait dans El Pais le 25 novembre : « Il est parfois nécessaire de savoir oublier. Pas par ignorance ou par lâcheté, mais en vertu d’une volonté de réconciliation et de pardon véde pardon véde pardon v ritablement forte et responsable ». Il est pourtant un soutien enthousiaste de la béatifi cation massive des prêtres victimes des violences anticléricales entre 1934 et 1938.

Le modèle espagnol de démocratisation après 40 ans de dictature et par une société agitée de profonds clivages fut un exemple de volontarisme politique, de dialogue, de compromis, et son résultat, la constitution de 1978, une synthèse

démocratique originale. Pourtant aujourd’hui ce refus de la part d’une partie des Espagnols de revenir sur le statu quo, cette obstination à préféféf rer à la véla véla v rité un oubli partiel et partial des faits historiques dénote peut-être un sentiment de fragilité de cette jeune démocratie.

Mais cette question divise aussi profondément la société espagnole. Peut-être la forme employéemployéemploy e par Garzon n’ée par Garzon n’ée par Garzon n tait-elle pas la bonne. Le procureur général, M. Zaragoza, a opposé à cette procédure un recours, considérant que le juge avait ouvert ainsi « une sorte d’inquisition générale incompatible avec les principes qui inspirent le procès pénal dans un État de

rale incompatible avec les principes qui nal dans un État de

rale incompatible avec les principes qui

droit comme celui qu’établit la Constitution espagnole », ce qui a fi nalement poussé Garzon à s’en dessaisir (le 18 novembre) avant qu’elle ne soit invalidée par l’Audience Nationale le 28 novembre. Il semble évident en tout cas évident en tout cas équ’un procès publique, social ou politique, est nécessaire en Espagne afi n de poser dans la mémoire collective les bases de la démocratie et du respect de la légalité constitutionnelle, mises entre parenthèses pendant 40 ans.

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> Inès Levy,

étudiante en 1è année

> Nathan Robinson Grison,

étudiant en 3è année,

en échange à Harvard University

n’aura pas lieu

> Le franquisme en procès

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China’hina’hinas escapades in Africa are a big deal ’s escapades in Africa are a big deal ’ – about US$55 billion big in fact. And the buck won’US$55 billion big in fact. And the buck won’US$55 billion big in fact. And the buck wont ’t ’stop there. Seen by some as a positive investment in Africa’in Africa’in Africas future and by others as a neo-colonial ’s future and by others as a neo-colonial ’scramble for resources, the numbers paint a clear picture, showing China’clear picture, showing China’clear picture, showing Chinas emergence as the continent’s second-largest trading partner ’s second-largest trading partner ’after the United States, with the trade revenue expected to reach US$100 billion by 2010. Finalized in May last year, China’Finalized in May last year, China’Finalized in May last year, Chinas US$9 ’s US$9 ’billion mining-for-infrastructure deal with the Democratic Republic of Congo represents the zenith of this giant’s insatiable appetite for ’s insatiable appetite for ’resources.

Even after several months of negotiation, the minutiae of the Congo contract remains shrouded in secrecy. For now, the only common knowledge is that in exchange for 10 million tones of copper and 400 000 tonnes of Cobalt to China, Congo will get $6 billion worth of desperately needed infrastructure. For a country roughly the size of Western Europe but with only 2160 miles of road, the promise of an addition 2420 miles of road, 2000 miles of railway, 32 hospitals, 145 health centers and two universities, all to be built in 36 months to boot, is attractive, but likely, too good to be true. While many Congolese, deeply patriotic, have welcomed the deal as a sign of their country’s ability to successfully negotiate ’s ability to successfully negotiate ’with another state, one gets the feeling that after years of crushing war and oppression, people’s trust – or rather desperate hope for change – is misplaced.

The DRC has had its share of exploitative foreign powers making deals in the so-called best

interests of the population. The ghost of King Leopold II – the Belgian King who personally orchestrated Congo’s past colonization and ’s past colonization and ’exploitation of its seemingly endless supply of natural resources – never quite left. More of a curse than a blessing, most Congolese blame the country’s abundant riches as the cause of their ’s abundant riches as the cause of their ’perpetual misfortune and confl ict. It’s hard to ’s hard to ’believe that the Chinese deal, no matter how well negotiated, will not suffer from the same maladies of the past. History has an uncanny way of repeating itself.

Like most African nations, the DRC has a history of crooked leadership and apart from President Kabila’President Kabila’President Kabilas fl owery promises, what is ’s fl owery promises, what is ’the guarantee that this deal will prove any less dishonest? For a country consistently ranked in the bottom ten for corruption by Transparency International, one can be forgiven for thinking that gains from this multi-billion dollar contract will disappear into the black hole of the Congolese state machinery.

Apart from roads with no cars, schools with no teachers and hospitals with no doctors, the average Congolese stands to benefi t little tangible good. If the government’s management of the ’s management of the ’current minimal infrastructure is any indication of how things will run in the future, institutions will remain seized by strikes and fi lled with underpaid, disillusioned public servants who turn to bribery or violence to feed their families. Furthermore, the deal reeks in favor of China with some estimating that it will stand to benefi t $42 billion even after its investment in infrastructure. That’s hardly “win-win”win-win”win-win .

And what of human rights ? According to a report released in December 2008 by the United Nations Group of Experts, there is credible evidence that China violated an arms embargo on eastern DRC; one that, as a permanent member of the Security Council, it voted to impose. While China is certainly not the only offender, it should be held accountable for further destabilizing the region. Instead, its signing of a lucrative contract with an already unstable and corrupt country is a subversive slap in the face to ideals of African security. Human rights and international law deserve more than lip service.

There are undoubtedly benefi ts for the DRC stemming from this deal, but as with all things economic in Africa, the perennial question is one of distribution. In the end, who really stands to profi t ? King Leopold still lurks in Congo – only this time he speaks Chinese.

> China,Colonialism& the Congo && &&

> Marissa Dooris,

exchange student

from the University of Queensland, Australia

China’s recent mining-for-infrastructure deal

with the Democratic Republic of Congo

seems dubious at best.

THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

The concept of peacekeeping underwent a massive change since it was fi rst crafted in 1948 by then Secretary General Dag Hammerskjold, and Lester B Pearson, Canada’and Lester B Pearson, Canada’and Lester B Pearson, Canadas Minister of ’s Minister of ’Foreign Affairs. Peacekeeping was designed to be a temporary buffer force to pacify warring States, so as to allow for a solution to be found through diplomatic means. Blue Helmets were not to engage in battle unless their own lives were at stake. They remained neutral keepers of the peace. However, towards the end of the Cold War, their missions started to broaden to meet excessively new situations. For instance, they engaged in humanitarian service, helping the civilian population recover in the aftermaths of war. After medical aid, they started providing education and helped repair public infrastructure as did the UNIFIL mission in Lebanon. It reached a paramount with the UNMIK in Kosovo where the Force engaged in nation-building, effectively taking on the role of the State.

This evolution from traditional to complex Peacekeeping was brought about by a change in the nature of the confl icts that Blue Helmets faced. Troops were originally sent in to counter State-to-State confl ict, only after the warring parties had consented to their presence under the aforementioned conditions of neutrality and non-use of force. Nowadays, Blue Helmets are often dispatched in confl icts where the belligerents are mostly non-state actors. Warlords such as Laurent N’Kunda form rebel factions that challenge the authority of the ruling government, leading to gruesome civil wars. Not recognized in any offi cial way, their consent to the presence of UN peacekeepers is not sought. They often perceive Blue Helmets protecting civilians as allies of the government and target them in ambush attacks. This has created a challenge-fi lled environment in which peacekeepers must learn to evolve.

> The Future of UN Peacekeeping

> Yovan Jankee,

2nd year student

Ronald Hatto, Professor at Sciences Po,

contributed to this article.

The recent outbreak of violence in the Democratic Republic of Congo has highlighted worrying discrepancies in UN Peacekeeping. Faced with an evolving frame of intervention, governed by new laws and with new players, Blue Helmets seek new ways of maintaining peace.

Acknowledging this, the Department of Peacekeeping Operations (DPKO) has spent the last year adapting UN Peacekeeping to constraints posed by the new type of confl icts where peacekeepers are required, in particular through the application of the 2001 Brahimi recommendations. While the Brahimi Report analyzed external issues concerning the new challenges faced, the more recent Capstone Doctrine, a comprehensive guide to the best practices on mission, shed light on the internal problems – most notably the question of abuse by peacekeeping staff. The scope and depth of these multi-faceted problems vary greatly from one mission to another, as well as from one contingent to another within the same mission. That is due to the fact that Blue Helmets battalions hail, on a voluntary basis, from member-state armies, making for impressive differences in training and gear between the contingents. Furthermore, individual peacekeeper’s loyalty to the UN mandate is sometimes challenged because of their home country’s foreign policy, such as ’s foreign policy, such as ’between Indians and Pakistanis, the two main providers of Blue Helmets.

In order to minimize such cultural biases, future missions should tap into the forces and expertise provided by regional organizations or even Non-Governmental Organizations. For instance, the African Union is currently involved in UNAMID, the mission in Darfur. AU troops have cultural affi nities with the inhabitants allowing the Force to better integrate and carry out its missions. While these structures can rapidly become a liability in tense situations due to their lack of peacekeeping know-how, with some standard training by the DPKO there is undoubtedly much to gain from this type of cooperation. Some specialists have also considered resorting to Private Military Companies, whose expertise in combat situations could help future missions strike a balance between protection of the mandate and security of the troops on

the ground. But the DPKO remains wary of such initiatives over concerns of perceived illegitimacy. In confl icts where UN Forces are not acknowledged by rebel groups, sending in private forces would be even less welcomed and viewed as private militias.

Given the challenges, the most promising way to employ future mandates may be through Mission Integration. Under UN leadership, integrated missions coordinate civilian, police and military action toward peace. They rely on NGOs and other structures like the EU to improve the end result. By taking part, peacekeepers can adapt not only to the rules that govern war today, but also to the presence of new actors in the fi eld. Notwithstanding, political cleavages and daunting bureaucratic procedures threaten integrated missions from reaching their full potency, a potential pitfall that should always be kept in mind.

The last two decades have been marked by repeated scandals related to UN Peacekeeping, even as the number of operations doubled, emphasizing the United Nations Organization’emphasizing the United Nations Organization’emphasizing the United Nations Organizations key security role. It remains certain, given the nature of confl icts nowadays, that operations will extend over longer periods and involve at least some form of nation-building. Either way, complex peacekeeping is not yet fully adapted to meet the challenges entailed by these situations. Three paths are laid out: evolve into a more holistic system through the Capstone doctrine, resort to allies or take the best of both through Mission Integration.

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> The Far Right in Slovakia

Over the last ten years, Central Europe has seen rising unemployment, increasing controversy over immigration, and the resurgence of a new far right that offers extreme solutions to both of those issues by combining economic populism with violent nationalism.

Slovakia has been one of the hardest hit. After years of far right mobilization on the fringes of mainstream politics, a far right party has actually entered Slovakia’entered Slovakia’entered Slovakias governing coalition.The party ’s governing coalition.The party ’in question is the Slovak National Party (SNS), led by the infamously outspoken Jan Slota. The SNS is the most visible icon of extreme Slovak nationalism, fueled by strong anti-Hungarian sentiment. The growing antipathy between the two nations has been stirred by incidents like the football match in Dunajska Streda last November, which saw the Slovak police attack visiting sections of Hungarian fans. The brutal attack, which Slovaks claim was provoked, is only the latest in a series of events that have led to the worsening of relations between the two countries, who share a troublesome historical past.

The end of the First World War and the collapse of the Austro-Hungarian Empire saw the signing of the Treaty of Trianon, which, after centuries of oppression, forcible “Hungari-zation” Hungari-zation” Hungari-zation and suppression of national sentiment, fi nally accorded Slovaks freedom. Mutual feelings of hostility between the two countries nevertheless continued. After the Second World War, when both countries formed part of the Communist Bloc, all anti-Hungarian feelings were suppressed along with other movements associated with the far right. But as soon as the Iron Curtain went down and Slovakia became independent, a class of politicians who made their living from spreading fear of Hungary appeared. Slota, a charismatic 55-year old with a criminal past, is

the foremost fi gure in this fold. He has become known for his strong sentiments on issues such as immigration and (denial of ) minority rights, which combined with his passion for alcohol have led to a number of statements that would normally end a politician’normally end a politician’normally end a politicians career. Among his ’s career. Among his ’dubious masterpieces are claims that the ten-percent Hungarian minority in Slovakia “are a cancer in the body of the Slovak nation” a cancer in the body of the Slovak nation” a cancer in the body of the Slovak nation and vowing to “sit in a tank and fl atten Budapest.”

The Slota-led Slovak National Party, often described by observers as the Slovak equivalent of the French National Front, has made it to the parliament in all elections except that of 2002. The SNS’s major support base remains those ’s major support base remains those ’in the country favorable with war-time regimes and, in particular, the clerical part of the Slovak establishment of that period. But the SNS represents only the mainstream political element of the far right in Slovakia. Other, more extreme factions have also been making headlines for the wrong reasons.

Prominent among these groups was the Marian Kotleba-led Slovenska Pospolitost (Slovak Togetherness). Members of this movement were notorious for parading through the streets in uniforms closely resembling the ones used by WWII-era paramilitary troops. Their increased presence on the national scene even prompted political ambitions, although their extremist agenda prevented them from rallying wider support and getting elected in any capacity. However, the Togetherness was seen as a suffi cient enough security threat for the Slovak Supreme Court to forcibly dissolve it in 2006.

The far right has predictably generated its fair share of detractors, prominent among whom former Justice Minister and politically moderate Daniel Lipsic, whose vocal presence has been

continually criticized. Indeed, since his party’s inclusion in the governing coalition, Slota has been viewed by political observers in the region as highly damaging for numerous reasons. Some claim that his very presence in the government has given a sense of legitimacy and impunity to more radicalized elements of the far right. This has been highlighted by incidents such as the brazen attack on a Hungarian student in August 2006, simply because she was overheard speaking in Hungarian.

Another often-made claim is that Slota and his party are damaging the image of Slovakia abroad and especially its relations with its neighbors, in particular Hungary, where politicians have reacted unfavorably to many of Slota’unfavorably to many of Slota’unfavorably to many of Slotas comments. There ’s comments. There ’is no denying the destabilizing effect Slota’is no denying the destabilizing effect Slota’is no denying the destabilizing effect Slotas presence has had, and the reactionary radicalism that it has prompted in Hungary, where the far right has been strengthened by the presence of a visible opposition fi gure in Slovakia.

As the fastest-growing economy in the European Union, Slovakia now stands at a crucial juncture. It can ill-afford to have its image sullied, its progress sabotaged, and its historic tensions reignited by an extremist politician who refuses reconciliation.

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> La peur du (trou)

noir

« La fi n du monde est pour ce soir. » Tel pourrait être le titre des déchaîchaîcha nements de passions qui ont précédé la mise en route du LHC. Le LHC (Large Hadron Collider), le plus grand accLarge Hadron Collider), le plus grand accLarge Hadron Collider élérateur de particules au monde – 27km de circonféde particules au monde – 27km de circonféde particules au monde – 27km de circonf rence – a en effet été activé activé activ le 10 septembre dernier au Cern – un grand laboratoire international de physique fondamentale à Genève ève è – avec pour principal but l’étude des particules élémentaires constitutives de la matière. Mais les semaines précédant sa mise en service ont vu s’accumuler les peurs concernant le risque d’apparition d’un immense trou noir qui engloutirait la Terre. Ces peurs se sont matérialisées par le biais de divers supports, allant de vidéos montrant cette fi n du monde sur YouTube à YouTube à YouTube des lettres de menace de mort envoyémort envoyémort envoy es à Frank Wilczek, un chercheur du Cern, en passant par le suicide d’une jeune Indienne de 16 ans, effrayéIndienne de 16 ans, effrayéIndienne de 16 ans, effray e par l’idée que son village tout entier puisse disparaîvillage tout entier puisse disparaîvillage tout entier puisse dispara tre. Cette vague de peurs n’est donc pas un phénomène isolé dans un pays particulier, mais bien le refl et d’une préoccupation scientifi que globale.

Cette peur n’est en fait que l’aboutissement d’une chaîchaîcha ne d’évévé èvèv nements survenus en amont. Les médias, tout d’abord, ont largement diffusé ces théories de fi n du monde, certains n’hésitant pas à tirer sur une fi bre sensationnaliste vendeuse. Le Sun a ainsi fait sa Une sur le titre « End of the World Due in 9 Days ». Les médias ont donné trop de place aux paroles d’experts pour le moins douteux, que l’on qualifi era au pire de charlatans, au mieux d’opportunistes. Tel le théoricien

allemand Otto Röallemand Otto Röallemand Otto R ssler, qui a déposé le 28 août 2008 une plainte devant la Cour européenne des droits de l’homme – fi nalement déboutée – en considérant que le risque de trou noir était contraire à la Convention européenne des droits de l’homme qui établit un « droit à la vie ». Quand bien même un rapport de sécurité du Cern publié deux mois avant – qui réactualisait un précédent rapport de 2003 – avait écarté tout risque de destruction planétaire, arguant qu’au « cours des derniers milliards d’années, la Nature a déjéjé à produit sur Terre autant de collisions qu’en généreraient un million d’expériences LHC, et la planète est toujours là. » C’est donc bien plus la crédulité des médias et des individus qui a engendré la peur, plutôt que la prise de conscience d’un danger réel.

Ce genre de peur à caractère technicophobe n’est pas nouveau : chacun se souvient du fameux – et non moins imaginaire – bogue de l’an 2000, qui était sensé anéantir nombre de technologies basées sur l’informatique, provoquant en conséquence des catastrophes aériennes, par exemple. Ces peurs récurrentes illustrent bien toute l’ambivalence des rapports qu’entretiennent les hommes avec les sciences et techniques. D’un côté, chacun utilise ou est conscient de l’apport de ces dernières à notre quotidien : qui serait prêt à renoncer à son ordinateur ? Mais de l’autre, le moindre petit danger pouvant résulter d’une utilisation mal contrôlée de ces sciences et techniques provoque une montée soudaine de peurs irrationnelles, qui avec le LHC ont atteint

un paroxysme : le suicide d’une personne. Ce rapport ambigu est d’ailleurs parfaitement vérapport ambigu est d’ailleurs parfaitement vérapport ambigu est d’ailleurs parfaitement v rifi é par le succès que rencontrent les fi lms-catastrophe comme Le jour d’aprèLe jour d’aprèLe jour d’apr sèsè ou s ou s Armageddon : on aime se faire peur, sans pour autant se rendre compte que ces fi ctions infl uent sur notre perception de la réalité et notre appréciation des risques de fi n du monde.

Le problème est que, s’il est probable que la majorité des hommes aimerait comprendre les concepts scientifi ques, il sera toujours plus simple d’assimiler la possibilité d’une fi n du monde pure et simple que la théorie de la relativité et le modèle standard de physique. En clair, le mythe du savant fou popularisé par Metropolis ou Metropolis ou Metropolis Frankenstein a encore de beaux jours devant lui, du fait de notre incompréhension de recherches scientifi ques à la complexité croissante. Or cette attitude n’est pas sans risques : nous regardons les dangers potentiels de destruction de l’humanité que fait courir la science avec parfois beaucoup plus d’attention qu’ils ne méritent, sans pour autant voir les risques concrets, et cette fois-ci bien réels, que fait peser l’usage des technologies les plus récentes – en particulier celles de l’information et de la communication, et les biotechnologies – sur nos libertés les plus fondamentales.

Toutefois, la médiatisation des peurs scientifi ques telle celle du LHC a au moins un mérite : celui de pousser les scientifi ques à vulgariser des thèmes jusqu’alors peu connus du grand public. On a ainsi vu des physiciens du monde entier fréquenter – sans doute pour la première fois – des plateaux de télévision, explicitant le évision, explicitant le éfonctionnement du LHC ou encore les concepts de la physique fondamentale, comme cela avait rarement été fait auparavant. On peut donc espérer que cet épisode du LHC incitera à l’avenir les scientifi ques à mettre davantage en avant l’importance des projets internationaux qu’ils poursuivent, et ce en s’assurant de la bonne information des citoyens. Car sans compréhension des enjeux, pas d’adhésion. L’avenir de la science est à ce prix.

La mise en route du Large Hadron Collider, plus grand accélérateur de particules au monde, a suscité une vague de peur internationale. Que

penser d’une telle réaction ? Comment la science doit-elle faire face à ce genre de phobies ?

> Tom Morisse,

étudiant en 1è annéeCreative Commons licence photo : credit : ImageEditor

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Slovakia has been one of the hardest hit by a wave

of far right movements in Central Europe.

Jan Slota’s nationalist party, now part of the

governing coalition, threatens Slovakia’s

development.

> Michal Onderco,

exchange student

from Jacobs University, Bremen

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THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

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Si le propos de l’auteur a le mérite d’aller au-delà du « politiquement correct » politiquement correct » politiquement correct sur la colonisation, le ton de l’essai est très polémique, quasi pamphlétaire ; cela s’explique par le contexte de publication. Le débat public et politique sur le poids du passé colonial, loin de se circonscrire au petit monde des historiens, a en effet pris de l’ampleur ces dernières années, notamment autour de la loi de 2005 sur la colonisation. En témoignent la multiplication des initiatives associatives, la profusion d’ouvrages universitaires et d’articles, ou encore le succès du fi lm IndigèIndigèIndig nes en 2006. Il snes en 2006. Il snes ’inscrit aussi dans le débat autour des lois mémorielles, relancé récemment par l’appel de Pierre Nora et Françoise Chandernagor Liberté Liberté Libertpour l’Histoire’Histoire’ . Par ailleurs, la « repentance » a été fortement critiquée lors de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy en 2007, qui a depuis mené une politique mémorielle en rupture avec celle de son prédécesseur.

Au cœur de la diatribe de l’auteur se trouvent les « Repentants ». On peut regretter que l’auteur ne précise à aucun moment qui il désigne exactement sous ce terme assez fort, presque insultant. C’est au hasard des notes de bas de page que l’on découvre que les foudres de l’auteur s’adressent tant à certains historiens, comme Pascal Blanchard ou Catherine Coquery-Vidrovitch, qu’à des acteurs de la société civile comme Tarik Ramadan, ou encore le Mouvement Indigènes de la Rénes de la Rénes de la R publique, créé en 2005. Il est contestable que les discours de toutes ces personnes constituent un ensemble homogène.

Que reproche l’auteur à ce bloc de « Repentants » ? Il les accuse de défendre une vision noircie de la colonisation, dans l’objectif inavoué de « saper les fondements » de la Réde la Réde la R publique elle-même. L’me. L’me. Lauteur montre que de nombreuses accusations portées sur la période coloniale de l’histoire française sont de faux procès. Il s’appuie principalement sur des sources françaises : les archives de l’É

appuie principalement sur des sources É

appuie principalement sur des sources tat français, et des témoignages

de colons. Tout d’abord, il remet en cause l’assimilation entre la conquête coloniale et l’Holocauste, qui repose sur un amalgame douteux assez malhonnête intellectuellement, et peu respectueux des réalités historiques. Si la preuve par les chiffres qu’entreprend l’auteur fait parfois fi gure de décompte macabre assez malsain, il relativise les violences de la conquête coloniale par comparaison avec d’autres confl its. Il s’applique ensuite méticuleusement à démontrer que la colonisation n’écolonisation n’écolonisation n tait pas rentable pour la métropole ; que relativement peu de matières premières étaient importées des colonies, y compris pendant la Première Guerre mondiale ; ou encore que les immigrés coloniaux n’s coloniaux n’s coloniaux nont pas joué un rôle prépondérant pour la reconstruction de la France d’après 1945. Tous ces arguments, parés du sceau de la vés du sceau de la vés du sceau de la v rité des archives, et en soi incontestables, aboutissent à un récit historique qui semble, lui aussi, tiré par un objectif bien

présent : prouver qu’il n’il n’il nexiste pas de créance de la France à l’égard des colonisés ou de leurs descendants.

Plus encore, l’auteur récuse sans nuance l’idée d’un continuum entre la période coloniale et la nôtre. Pour lui, les diffi cultés des migrants africains n’s des migrants africains n’s des migrants africains nont rien de spécifi que comparées à celles des migrants européens. Le racisme, l’islamophobie, ou encore le fort contrôle policier n’le policier n’le policier nont pas leurs racines dans des représentations issues de la colonisation, mais sont pour lui des constructions récentes. Cette idée est l’exact rejet des études postcoloniales. Cet ouvrage refl ète la méfi ance assez courante vis-à-vis de ce champ, qui s’est récemment développéveloppé é en France sous l’impulsion, non des universitaires, mais des acteurs sociaux. Ce débat rejoint au fond des conceptions divergentes de l’identité républicaine française : Daniel Lefeuvre rejette ce qu’il perçoit comme une forme de communautarisme de la part de personnes issues de l’immigration des anciennes colonies. Un communautarisme qui menace selon lui l’unité de la Réde la Réde la R publique et risque de conduire à une « France de l’Apartheid »Apartheid »Apartheid . Quant aux historiens français « repentants », l’auteur les voit comme de graves cas de haine de soi franchement masochiste. Épingler les porteurs de cette mémoire post-coloniale de manière unilatérale, sans parler des nostalgiques de la colonisation, peut prêter à confusion, et donner une impression de partialité.

De plus, cette vision unitaire de la RéDe plus, cette vision unitaire de la RéDe plus, cette vision unitaire de la R publique s’oppose à des conceptions de la nation plus enclines au multiculturalisme. On peut par exemple se demander avec Marie-Claude Smouts si ce phénomène de « repentance » n’est pas une façon de vouloir s’intégrer dans la société française : surfant sur la vague des revendications mémorielles de divers groupes de victimes, à commencer par celles de l’Holocauste, les porteurs de ces mémoires post-coloniales ne feraient qu’adopter le langage des revendications mémorielles les ayant précédé.

> Pour en fi nir avec la repentance coloniale,

Daniel Lefeuvre, Flammarion, Paris, 2006

Daniel LefeuvrePour en fi nir avec la repentance coloniale

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Le Mur de fer : Israël et le monde arabeAvi Shlaim

Avi Shlaim, lAvi Shlaim, lA ’un des plus fervents représentants du mouvement des nouveaux historiens israéliens, questionne dans son ouvrage Le Mur de fer l’histoire offi cielle de l’Le Mur de fer l’histoire offi cielle de l’Le Mur de fer É

liens, questionne É

liens, questionne tat

juif. S’appuyant sur des documents déclassifi és israéliens, américains, britanniques ainsi que sur de nombreuses interviews avec des personnalités politiques, il retrace dans ce livre l’opposition, depuis la création de l’É

s politiques, il retrace dans ’É

s politiques, il retrace dans tat hébreu,

entre Israël et le peuple palestinien.

Juif d’origine irakienne, Avi Shlaim fait partie des rares universitaires israéliens ayant pris du recul sur les pratiques politiques d’Israël. Dénonçant l’intransigeance, la rigidité idéologique et les aspirations à l’expansion territoriale de la grande majorité des dirigeants israéliens, il veut montrer comment la politique israélienne contribue à empêcher l’établissement d’un consensus de paix au Proche-Orient. Comment Avi Shlaim s’y prend-il pour critiquer de façon convaincante la politique israélienne, qui invoque le droit à la légitime défense ?

Le fi l directeur de l’ouvrage est la « théorie du mur de fer » orie du mur de fer » orie du mur de ferdéveloppéveloppé ée par Ze’ev Jabotinsky dans les années 1920, au tout début des spéculations sur l’établissement d’un État israélien en terre palestinienne. Selon cette théorie, Israël devrait ériger un mur de protection contre l’hostilité de ses ennemis arabes. L’emploi d’une stratégie sécuritaire infaillible avec le soutien américain lui assurerait dans un premier temps la supériorité militaire. Israël, ainsi en position de force, pourrait dans un second temps envisager des négociations en sa faveur avec le peuple palestinien et ses homologues arabes.

Insistant sur une bipolarisation des relations politiques entre le camp des activistes et celui des modérés, Avi Shlaim illustre par quel moyen les dirigeants israéliens ont mis en pratique la « théorie du mur de fer »orie du mur de fer »orie du mur de fer . L’. L’. Lauteur énumère toutes les occasions de paix manquées par Israël. Ces échecs seraient dus, sous l’ère Ben Gourion, à la prévalence au sein évalence au sein éde la classe politique israélienne du camp traditionaliste aux stratégies expansionnistes, puis par le simple refus de faire des concessions « terre contre paix » terre contre paix » terre contre paix sous Golda Meir, Menachem Begin, Yitzhak Rabin, Shamir et Benjamin Netanyahu.

Avi Shlaim considère donc que la ligne dure de la politique israélienne prêche la « théorie du mur de fer »orie du mur de fer »orie du mur de fer . En revanche, les quelques rares modérés, tels Moshe Sharett et Levi Eshkol, respectivement deuxième et troisième premier ministre, étaient eux pour un règlement diplomatique de la situation. L’situation. L’situation. Lauteur regrette plus ou moins ouvertement que ces acteurs, qu’il qualifi e de plus « réfl échis », n’aient pas pu avoir une infl uence plus décisive sur le cours des négociations

de paix, maintes fois avortées, entre l’État d’Israël et ses voisins arabes.

En entrant dans le détail des relations israélo-arabes, l’ouvrage met en lumière la manière avec laquelle les dirigeants israéliens fi nirent par interpréter la « doctrine du mur de fer » mur de fer » mur de fer comme une « doctrine du confl it permanent »doctrine du confl it permanent »doctrine du confl it permanent , en omettant totalement la seconde partie de la théorie de Jabotinksy qui suggère un règlement dans le long terme avec le peuple palestinien. La relation entre l’Israël de Ben Gourion et l’Egypte de Nasser illustre bien cela : tandis que la version offi cielle affi rme qu’ « Israël rechercha toujours le contact direct et se heurta systématiquement à un refus arabe » (p.154), Nasser aurait en réalité fait des offres de discussion qu’Israël repoussa. Selon Avi Shlaim, les dirigeants politiques modérés qui purent exceptionnellement accéder au pouvoir en Israël fi rent tout de même avancer la cause de la paix mais restèrent limités dans leur action en raison des fortes pressions exercées par le Likoud et la ligne dure israélienne.

Avi Shlaim dénonce ainsi l’intransigeance diplomatique d’Israël.Il affi rme qu’alors même que la Ligue arabe soutient la nécessité d’une négociation conjointe entre Israël et les pays arabes, l’État juif exploite les divisions internes de la Ligue en nouant des relations bilatérales avec certains de ses membres stratégiques comme l’Égypte et la Jordanie. Il souligne aussi la cruauté militaire d’Israël, notamment à propos des représailles militaires aux frontières, par une citation du général de guerre et homme politique Moshe Dayan: « Harceler les villages, femmes, enfants et personnes âgâgâ ées compris, est la seul méthode qui ait fait la preuve, non pas de sa légitimé ni de sa moralité, mais de son effi cacité, quand les Arabes posent des mines de notre côté. » (p.133)

Retracer les rapports confl ictuels israélo-arabes permet de montrer comment les dirigeants israéliens n’liens n’liens nont pas su interpréter la « stratégie du mur de fer » gie du mur de fer » gie du mur de fer de Ze’ev Jabotinsky. De façon générale, la plupart des dirigeants n’rale, la plupart des dirigeants n’rale, la plupart des dirigeants nont pas su dépasser la première étape de la doctrine, adoptant ainsi une doctrine de confl it permanent, ce que semblent confi rmer les évévé évév nements récents dans la bande de Gaza. La seconde étape, un règlement avec les Arabes palestiniens et non-palestiniens, n’palestiniens, n’palestiniens, na toujours pas été abordée, faisant sans aucun doute de la question palestinienne un des problèmes majeurs de ce début de 21e siècle.

> Le Mur de fer, Avi Shlaim, Buchet-Chastel, Paris, 2008Le Mur de fer, Avi Shlaim, Buchet-Chastel, Paris, 2008Le Mur de fer

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Dans ce court essai, l’historien Daniel Lefeuvre combat les idées reçues sur la colonisation et l’usage qui en est fait. Il s’insurge avec une certaine violence contre les excès de la mémoire post- et anticoloniale, qui selon lui piétine la vérité historique dans un souci de reconnaissance sociale actuelle.

> Clémence Léobal,

étudiante en 5è année, Master Recherche,

Histoire et Théorie du Politique

> Mari-Ann Larsen-Volay,

étudiante de McGill University,

en échange à Sciences Po

Allant à l’encontre de l’histoire offi cielle d’Israël, Avi Shlaim montre comment l’Etat hébreu a interprété la « doctrine du mur de fer » de Ze’ev Jabotinsky comme une doctrine du « confl it permanent ».

THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

Page 22: Diasporas

The Brief Wondrous Life of Oscar Wao Junot Díaz

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> Joanna Margueritte,

4th year student, Research Master’s

in International Relations

The Brief Wondrous Life of Oscar Wao The Brief Wondrous Life of Oscar Wao T is a free-fl owing, eclectic chronicle of the highs and lows of three generations in one family belonging to the Dominican Diaspora. As it leads readers through the history of La Inca, her daughter Belicia, and her children Lola and Oscar, the novel does to the reader what emigration does to any member of any Diaspora in the world. It leaves him confused, vulnerable, and dislocated. Like an immigrant who knows twice the number of homes, twice the lifestyles, two languages at least, this book turns its readers into metaphorical immigrants.

The overall tone is casual at best, and readers may feel dislocated in the structure (some chapters contain three lines, others twenty pages) and the language: over and beyond the constant mix of English and Spanish, you can never get used to the tone, which keeps evolving from casual – “What you doing? Ana asked. Like nothing. Like let’s go to a ’s go to a ’movie, then” – movie, then” – movie, then to geekishly obscure to downright obscene, nor to the style, with its iconoclastic use of outlandishly long brackets, its use of all caps to indicate high emotional charges – “F***ING SANTO DOMINGO” – and its other liberties, like the “No” repeated over four full lines on page 102.

Critics have taken special note of the story of Oscar and his family fi rst and foremost because of its bold legitimation of Spanglish, the combination of English and Spanish used daily by the 45 million Hispanics living in the US, as a literary language. It should be noted that as surprising as the seamless, effortless intertwinement of Spanish into the English language may appear in Díaz’s work, this bizarre ’s work, this bizarre ’new language is its own, thanks to the malleability of its substrate, English. Indeed, readers will doubtless be surprised by exchanges such as this one: “She was very guapa, I said casually. Abuela snorted. Guapa soy yo. Your mother was a diosa. But so cabreza dura”.

Language is one of the means by which Díaz makes his reader an immigrant of sorts. Oscar de Leon is described as a “parig“parig“ üparigüparig yaoüyaoü ”, a person standing on the sidelines and watching as others make things happen in his life. According to one of the narrator’s many footnotes, the term is derived from the ’s many footnotes, the term is derived from the ’English “party watcher“party watcher“ ”, which was used to describe the US Marines who stood around at Dominican parties without getting any of the “action”action”action . This word has voyaged back and forth like Oscar himself: the English has been transformed into Spanish, and you must understand them both to grasp the meaning of the whole.

Díaz’s fi rst passion is describing the ’s fi rst passion is describing the ’ “gaps in stories,” putting special weight on those insignifi cant lapses of time that most writers ignore. His main character, Oscar, is a gap in the stories of all those who surround him. His is a “nameless life.” He lacks adventurousness, spiritual wit, willpower. Díaz seems intent on defying readers’ natural curiosity as he persists in not letting anything notable happen in Oscar’s life. What ’s life. What ’Oscar lacks in imagination and attractiveness, though, the author more than compensates for in descriptions of Oscar’s fate, specifi cally in the opulent footnotes, written in an even more street-wise language than the narrative itself, providing sometimes informative, sometimes unnecessary details of historical facts or unfounded prejudices. Interestingly, the spiciest footnotes are those inspired by the main character’s utter hopelessness. “You really want to know what being an X-Man feels like? Just be a smart bookish boy of color in a contemporary US ghetto. Mamma mia! Like having bat wings or a pair of tentacles growing out of your chest.”

The adopted home, New Jersey, remains anonymous, bloodless, compared to Santo Domingo and its haunting streets, dangerous thugs, mysterious neighbors and dictatorial past. There are passages focusing intently on the trepidations of the dislocated, like when Oscar refuses to “succumb to that whisper that all long-term immigrants carry inside themselves, the whisper that says You do not belong”, or when Beli, his mother, fl ies to the US for the fi rst time without yet apprehending “the loneliness of Diaspora”Diaspora”Diaspora .

Yet these are not the novel’s strongest. Its originality and ’s strongest. Its originality and ’freshness stand out when it affi rms itself, through the audacious, sometimes authoritative use of Spanglish, through the off-handed character portrayals, through the ruthlessness and sympathy combined in the narrator’s voice. ’s voice. ’Even though America as a character, even as a texture, is the great absente, a faceless place - the novel is one of the most bewildering pieces of current American fi ction.

> The Brief and Wondrous Life of Oscar Wao

Junot Diaz, Riverhead, New-York, 2007

An American archetype ? America has rewarded Dominican-born writer Junot Díaz the 2007 Pulitzer Prize for his novel about a family wandering back and forth between their home of Santo Domingo and their adopted city of Paterson, New Jersey. Díaz’s fun, sometimes hilarious page-turner is also a vast fresco on home, dislocation, and plural identity.

L’équipe du Paris Globalist remercie pour leur soutien

l’Association Française pour les Nations Unies

& Sciences Po.

THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

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Directrice de la Rédaction : Chine LabbéRédacteur en chef : Julien LevesqueImpression : Impression Design, 17, rue de la Ferme, 92100 Boulogne-BillancourtDate de parution : janvier 2009 - Dépôt légal : à parutionPUBLICATION GRATUITE - 2500 exemplaires

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