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Chapitre in Thomas Paris, La Libération audiovisuelle - Enjeux technologiques, économiques et réglementaires, Paris Dalloz , 2004. Conclusion : Des modes de régulation de l’audiovisuel Cécile Méadel, Thomas Paris La loi pour la confiance dans l’économie numérique (LEN) a été adoptée le 13 mai 2004. Le projet de loi relatif aux communications électroniques le sera vraisemblablement à l’heure où paraîtra ce livre. Le projet de loi relatif au droit d’auteur et aux droits voisins est, quant à lui, en cours de discussion au Parlement. Le Conseil de la concurrence a rendu son avis sur les plaintes d’Iliad et de Free à propos de l’exigence de must carry de la télévision par ADSL. Les instances régulatrices diverses et multiples proposent, expérimentent et adoptent des normes spécifiques qui, petit à petit, construisent un nouveau cadre pour les activités de l’audiovisuel. 191
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Des modes de régulation de l’audiovisuel

Feb 25, 2023

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Page 1: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Chapitre in Thomas Paris, La Libération audiovisuelle - Enjeux

technologiques, économiques et réglementaires, Paris Dalloz , 2004.

Conclusion :

Des modes de régulation de l’audiovisuelCécile Méadel, Thomas Paris

La loi pour la confiance dans l’économie

numérique (LEN) a été adoptée le 13 mai 2004. Le

projet de loi relatif aux communications

électroniques le sera vraisemblablement à l’heure

où paraîtra ce livre. Le projet de loi relatif au

droit d’auteur et aux droits voisins est, quant à

lui, en cours de discussion au Parlement. Le

Conseil de la concurrence a rendu son avis sur

les plaintes d’Iliad et de Free à propos de

l’exigence de must carry de la télévision par ADSL.

Les instances régulatrices diverses et multiples

proposent, expérimentent et adoptent des normes

spécifiques qui, petit à petit, construisent un

nouveau cadre pour les activités de

l’audiovisuel.

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Page 2: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Pourtant ce cadre est loin d’être stabilisé, s’il

peut jamais l’être, et ce pour au moins deux

raisons. Premièrement, le monde de l’audiovisuel

est lui-même dans une phase de transformations

radicales et multiples. Les usages évoluent avec

de nouveaux dispositifs : consommation sur

téléphones mobiles (sonneries, clips, films…),

échanges de fichiers par Internet, choix ouvert

de programmes de télévision ou de vidéo sur ADSL.

Les producteurs expérimentent de nouvelles

formules qui interrogent, voire remettent en

question le droit à l’image, la séparation vie

privée/vie publique, les droits de propriété

intellectuelle, le droit de la concurrence, etc.

La Ligue de football professionnel doit lancer un

nouvel appel d’offres pour la commercialisation

des droits des rencontres de Ligue 1, dans un

contexte où l’exclusivité est envisageable.

Limitation de l’accès du public à l’information,

atteinte à la libre concurrence, ou nécessité

économique de protection des diffuseurs et des

programmes ? La question des clauses

d’exclusivité, aujourd’hui discutées et

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Page 3: Des modes de régulation de l’audiovisuel

controversées, est loin d’être réglée. Certes,

des normes se mettent en place, mais la

régulation du domaine reste pourtant largement

ouverte ; et les acteurs naviguent à vue, qu’il

s’agisse de ceux qui en ont la charge ou de ceux

à qui elle s’applique.

Cela nous conduit à la deuxième raison : la forme

même de la régulation pose question et fait

l’objet de débats et de propositions nombreux. Un

encadrement, une régulation, une gouvernance…

s’impose indéniablement, mais sous quelles formes

et sous quelles conditions alors que l’échelon

national est, plus qu’il ne l’a jamais été,

concurrencé par d’autres types de régulation,

supranationale, interprofessionnelle,

internationale ? Le flou même de la notion de

régulation (avec son faux ami anglais) trace la

carte des nombreuses questions qui restent en

suspens en matière de fixation des règles, de

mise en œuvre des décisions, de choix des

acteurs, de dispositifs de contrôle, de

sanctions…

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Page 4: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Au terme de ce parcours, reste donc une question

qui traverse l’ensemble du livre, de manière plus

ou moins frontale : quelles sont les formes de

régulation possibles, acceptables et souhaitables

pour l’audiovisuel ? comment et sous quelles

conditions l’État peut-il et doit-il intervenir

en matière de communication ? Faut-il privilégier

les modes de gouvernance privés, les régulations

sectorielles, la normalisation, la co-régulation

par les acteurs eux-mêmes ?

I. UN PAYSAGE BOULEVERSÉ, DE L’ÉTAT AUX MÉDIAS

La mise en question du rôle de l’État en matière

d’audiovisuel a une source triple : la crise de

l’État comme régulateur incontesté, qui est loin

de se limiter aux affaires d’audiovisuel ou de

communication, la transformation de l’offre en

matière de technologies de la communication, et

la modification de la demande.

Si les premières années du téléphone ou de la

radio furent marquées par la coexistence

d’entreprises privées et publiques, cela ne

remettait pourtant pas en cause la légitimité de

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Page 5: Des modes de régulation de l’audiovisuel

l’État et il fallut attendre les vingt dernières

années du vingtième siècle pour que se pose

nettement le problème du bien-fondé de

l’intervention publique en matière de

communication1. L’État est d’abord remis en cause

dans ses fonctions régaliennes puisqu’il n’est

plus en mesure de contrôler les échanges de

biens, de populations, mais aussi d’informations.

Ses prérogatives ne sont plus sanctuarisées dans

des situations où la territorialisation même des

États – qui les a si longtemps protégés et

définis – devient un handicap dans certaines

configurations (par exemple pour lutter contre

les pirates informatiques). Le développement, par

ailleurs, d’interdépendances généralisées et

mondialisées entre les acteurs économiques rend

de moins en moins tenable les niveaux de décision

nationaux et remet implicitement en cause leur

rôle2. Les États-nations sont déstabilisés par la

gestion de certains types de problèmes, qui ne1 Catherine Bertho (dir.), L’État et les télécommunications en France

et à l’étranger, 1837-1987, Genève, Librairie Droz, 1991.2 Josepha Laroche, Mondialisation et gouvernance mondiale (dir.),

Paris, PUF, 2003.

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Page 6: Des modes de régulation de l’audiovisuel

sont pas spécifiquement liés aux questions de

communication, comme le domaine de

l’environnement et les difficiles mises en place

d’accords intergouvernementaux, autour du

protocole de Kyoto. Point n’est utile ici de

s’interroger sur les fondements ou les

manifestations d’une – éventuelle – crise des

États, mais seulement de constater que la

dégradation de leur pré carré régalien les a

contraints, bon an, mal an, à reconfigurer leurs

positions sur la scène internationale et à

renouveler leurs moyens d’intervention.

Si cette évolution n’est pas spécifique à

l’audiovisuel ou à la communication, ce secteur

présente des caractéristiques qui renforcent

encore les difficultés auxquelles sont confrontés

les États. L’inaptitude des administrations à

produire des évaluations technologiques, ou pour

être plus précis à produire seules une évaluation

acceptée et reconnue par les acteurs, donc

performante (en raison à la fois de la pluralité

de vue des administrations elles-mêmes et des

acteurs eux-mêmes, les lignes de débat des

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Page 7: Des modes de régulation de l’audiovisuel

acteurs se retrouvant dans le secteur public)

n’est pas nouvelle ; elle était déjà reconnue et

assumée aux débuts des années 1990, quand, pour

contrer l’offensive de la NHK tendant à imposer

de manière exclusive la norme japonaise de

télévision haute définition, les industriels et

le secteur public se sont alliés pour bâtir une

contre-proposition technique crédible, ou du

moins assez crédible pour contrecarrer leurs

adversaires : le D2MacPaquet3. Cette impéritie

n’est pas liée seulement à la difficulté

technique de dossiers mais aussi à la complexité

des réseaux dans lesquels se déploie l’action

publique, avec une grande hétérogénéité

d’acteurs, d’enjeux, de programmes et une

multiplicité d’interactions. Autre reconnaissance

de ces difficultés des organismes publics, dans

plusieurs pays européens se sont mis en place

avec le soutien des pouvoirs publics des

organismes de « corégulation d’Internet » (comme

le Forum des Droits de l’Internet, il Forum per

3 Cécile Méadel, “Le D2Mac ou les revers de la

compatibilité”, Quaderni, n°26, été 1995, pp 99-112.

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Page 8: Des modes de régulation de l’audiovisuel

le Tecnologie dell’Informazione, l’Observatoire

des droits d’Internet belge…) qui, par delà leur

grande diversité institutionnelle, partagent une

même hypothèse sur la nécessité d’en passer par

un modèle délibératif de gouvernance d’Internet4.

Il est vrai que s’y ajoute, dans ce domaine

spécifique d’Internet, le rejet de la part de

certains acteurs, en particulier les pionniers

« libertaires », ou de certains utilisateurs

pilotes et informaticiens, de l’autorité

centralisée et hiérarchisée des États et

administrations5. Moins reconnu, l’État est aussi

considéré comme plus mal armé et les analyses en4 http://network.foruminternet.org/. Cécile Méadel et Meryem

Marzouki, « La corégulation d’Internet : du consensus au

consentement » in Crise de l’État, revanche des sociétés. Nouveaux regards

sur les relations transnationales, Montréal, Actes du 72e Congrès

annuel de l’ACFAS, à paraître.5 Les références sont innombrables ; citons deux,

séminales : Johnson et Post en 1996 et Rheingold, Howard

(2000). The Virtual Community. Homesteading on the Electronic Frontier,

revised edition. Cambridge: The MIP Press. Sur le cas français,on lira par exemple Auray, Nicolas (2002). "L'Olympe de

l'Internet français et sa conception de la loi civile". Les

Cahiers du numérique, 3, 79-90.

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Page 9: Des modes de régulation de l’audiovisuel

terme de bureaucratie pointent sa moindre

efficience supposée.

Cette remise en cause du rôle traditionnel de

l’État ou plutôt de sa position en surplomb se

nourrit des nombreuses transformations de l’offre

audiovisuelle : transformation des contenus sous

l’effet de la concurrence avec le secteur privé,

transformations technologiques et passage d’un

contexte de rareté des ressources (les fréquences

hertziennes) à une multiplication des offres6 ;

transformations économiques – et des modèles

économiques –, dont l’évolution des rapports, à

la fois concurrentiels et complémentaires, du

cinéma7 et de la télévision donnent l’exemple le

plus éclatant avec le développement du marché des

DVD, le rôle décroissant de l’économie des salles

dans la production, le désengagement de certains

acteurs comme, en France, Canal +, etc.8. Ces

changements affectent nécessairement le rapport

de l’usager à son média ; de la télévision au6 Cf. F. Rochelandet, chapitre 4.7 Joëlle Farchy, L’Industrie du cinéma, Paris, PUF, 2004.8 Laurent Creton, (dir.), Économie du cinéma. Paris: Nathan,

2001.

199

Page 10: Des modes de régulation de l’audiovisuel

téléspectateur par exemple : on passe d’un modèle

de la gratuité (à la redevance près, mais qui

n’est pas directement associée à la consommation

et est assimilé à un impôt) à un modèle de

l’abonnement ou du paiement à la consommation qui

vient relayer la ressource publicitaire, d’un

choix entre des programmes à un choix entre des

prescripteurs9. La définition de l’usager est

modifiée : il est tout à la fois celui qui peut

choisir, celui qui paie ce qu’il consomme au

comptant (et non plus par la publicité), celui

qui marque sa fidélité par un abonnement, celui

qui introduit des segmentations dans son foyer

avec des « profils » de programme spécifiques,

celui qui peut privilégier une certaine qualité

technique, celui qui opte pour la

télésurveillance sur un canal de son téléviseur

ou pour une sélection de jeux vidéo… Face à cette

offre que son comportement nourrit et suscite en

même temps, le consommateur lui aussi se

9 Pierre-Jean Benghozi, Thomas Paris, "De l'intermédiation

à la prescription : le cas de la télévision", Revue française

de gestion, 2003, 142, janvier-février, pp 205-227.

200

Page 11: Des modes de régulation de l’audiovisuel

transforme. Pour beaucoup d’acteurs, il apparaît

comme moins fidèle, plus autonome, ou peut-être,

ainsi que l’ont montré les travaux sur le

développement du marketing10, comme un

consommateur qui a fait l’apprentissage d’un

monde de choix et est capable d’arbitrer entre

des différentes propositions en fonction de ses

(pré)occupations du moment, un consommateur dont

les attachements peuvent être moins durables,

moins lisibles, moins prévisibles. En matière de

télévision, perdure trop souvent l’image d’un

téléspectateur passif ou, au mieux déterminant

ses comportements en fonction des prescriptions

du média, fusse pour s’en méfier. On oublie par

exemple que si la quasi totalité des foyers est

désormais équipée en téléviseurs, ils ne sont

allumés chaque soir que dans moins de la moitié

d’entre eux, ou que l’expérience des

téléspectateurs est diverse et les pratiques

plurielles11, que le téléspectateur inscrit son10 Franck Cochoy, (1999). Une histoire du marketing. Discipliner

l'économie de marché. Paris: La Découverte.11 Brigitte Le Grignou (2003), Du côté du public. Usages et réceptions

de la télévision. Paris, Economica.

201

Page 12: Des modes de régulation de l’audiovisuel

loisir comme activité peu légitime d’un point de

vue culturel, qu’il a connaissance des critiques

faites au média, et des injonctions qui lui sont

faites, en matière de contrôle du temps ou du

contenu (ce qui ne signifie pas qu’il s’y soumet

nécessairement)12, que les réactions face aux

programmes sont très clivées13, qu’aujourd’hui

encore, face à une offre très élargie, plus des

deux tiers des foyers préfèrent s’en tenir aux

cinq chaînes hertziennes gratuites… C’est aussi

un usager qui ne s’arrête plus nécessairement aux

frontières de la consommation : sans revenir aux

conjectures des années 1970 sur la vidéo pour

tous et la fable du récepteur-producteur, notons

que la production d’informations n’est plus

réservée aux professionnels : les émissions des

radios locales, pour l’essentiel associatives,

comme de certains télévisions locales sont

assurées par des auditeurs ou téléspectateurs.12 Dominique Boullier (2004), La Télévision telle qu'on la parle - Trois

études ethnologiques, Paris, L’Harmattan.13 Dominique Pasquier (1999), La culture des sentiments. L’expérience

télévisuelle des adolescents. Paris, éditions de la MSH (à propos

de la série Hélène et les garçons)

202

Page 13: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Plus encore, sur Internet, les sites personnels –

les blogues14 –, mais aussi les forums de

discussion conduisent à la production de formes

de connaissance ou de savoirs qui aspirent

toujours à toucher un public, aussi réduit soit-

il15, et donc qui se revendiquent bien comme

média. Tous ces bouleversements interrogent la

légitimité de l’action de l’État en matière de

régulation de l’audiovisuel, régulation qui pour

l’essentiel s’inscrit dans deux modèles

différenciés.

II. DEUX MODÈLES DE RÉGULATION DE LA COMMUNICATION

Les techniques de communication relèvent en

France de l’autorité de l’État, dans la

continuité du monopole sur les télécommunications

(institué par la loi de mai 1837), monopole qui14 « Page Web évolutive et non conformiste présentant des

informations de toutes sortes, généralement sous forme de

courts textes mis à jour régulièrement, et dont le contenu

et la forme, très libres, restent à l'entière discrétion

des auteur », Grand dictionnaire en ligne de l’Office québécois

de la langue française.15 Christine Hine, (2000). Virtual Ethnography. London: Sage.

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Page 14: Des modes de régulation de l’audiovisuel

ne fut appliqué qu’au bout d’une dizaine d’années

d’existence pour le téléphone (1889), une

vingtaine pour la radio (1945) en même temps que

pour la télévision naissante16. L’autorité directe

de l’État et son monopole sur les techniques de

communication sont remis en cause au tournant des

années 1980, avec, du côté de l’audiovisuel, un

dessaisissement de l’emprise directe de l’État,

du côté des télécommunications, une

déréglementation qui aboutit in fine à la fin du

monopole public. A grands traits, on peut dire

que, dès lors que la légitimité du pilotage

public des communications est contestée, se

développent concomitamment deux modèles de

régulation, l’un par le contenu et l’autre par

l’architecture, étant entendu qu’ils constituent

des types idéaux et n’existent pas sous leur

forme pure.

La régulation par le contenu définit un cadre a

priori avec des exigences sur les programmes, la

répartition des rôles entres les acteurs, les

16 Catherine Bertho, Télégraphes et téléphones de Valmy au

microprocesseur, Paris, Le livre de poche, 1981, 558 p.

204

Page 15: Des modes de régulation de l’audiovisuel

règles de fonctionnement, et repose sur une forme

de contractualisation du régulateur avec chaque

acteur ; elle ne s’arrête pas au cahier des

charges initial mais se construit et se modifie

dans l’application qui en est faite ensuite et

dans le contrôle qu’elle exerce. La régulation

par l’architecture, davantage articulée avec la

compétition économique internationale, repose à

la fois sur les règles classiques du droit de la

concurrence et sur l’encadrement des

architectures techniques. Les bouleversements que

connaît actuellement l’offre audiovisuelle

mettent en concurrence ces deux modèles de

régulation, qui se distinguaient jusque là par

leurs terrains d’action : l’audiovisuel relevait

plutôt d’une régulation par le contenu, les

télécommunications plutôt par l’architecture ;

ces mutations les opposent mais montrent aussi

leurs limites et suscitent de nouvelles

propositions, explorent de nouvelles voies pour

la régulation.

205

Page 16: Des modes de régulation de l’audiovisuel

1. La régulation par le contenu

Lorsque le contrôle direct des moyens de

communication n’a plus été accepté ni considéré

comme efficace, la régulation a été confiée à une

structure juridique conçue ad hoc : l’autorité

administrative indépendante. Significatif des

ambitions de cette innovation organisationnelle,

le premier avatar a été en 1978 la CNIL dont la

mission était de garantir « en toute

indépendance, les libertés individuelles contre

les atteintes pouvant résulter du développement

des fichiers personnels informatisés ».

L’organisme reçut ainsi de l’État une mission de

préservation des libertés publiques et de

régulation des acteurs impliqués, deux tâches

distinctes et parfois contradictoires, ou du

moins difficiles à concilier.

En matière d’audiovisuel, la voie est alors

ouverte pour la création de la Haute autorité de

la communication audiovisuelle (HACA17), première

avatar du CSA, qui doit être indépendante à la

17 Agnès Chauveau, (1997). L'audiovisuel en liberté ? Histoire de la Haute

Autorité. Paris: Presses de Sciences Po.

206

Page 17: Des modes de régulation de l’audiovisuel

fois des pouvoirs publics et des secteurs qu’elle

contrôle. Les modèles étrangers qui semblent

avoir inspiré le législateur, FCC américaine

créée par le Radio Act de 1927, et double

régulateur britannique (Board of Governors de la

BBC et Independant Broadcasting Authority)

situent les ambitions fixées à l’organisme dans

une tentative de réconcilier les pouvoirs de

régulation économique du premier et

l’indépendance – supposée et sans doute mythifiée

– à l’égard des milieux politiques du second.

Aussi, la HACA va définir sa politique au nom de

l’État, mais non sous son contrôle : elle ne sera

pas soumise à l’autorité hiérarchique d’un

ministre et disposera d’un certain nombre de

pouvoirs de réglementation et de sanction.

Quoi qu’il en soit, la création de cette autorité

de régulation n’empêche pas que l’intervention

des États reste importante pour de nombreux

aspects de la régulation de l’audiovisuel :

l’État est le maître des services publics de

l’audiovisuel et, en France, l’actionnaire unique

des entreprises publiques du secteur ; il définit

207

Page 18: Des modes de régulation de l’audiovisuel

les règles du jeu au nom de l’intérêt général,

fixe le statut juridique des produits avec leurs

droits propres18 et régule le marché en

sanctionnant les manquements.

Dans cette forme de régulation audiovisuelle, le

choix des entrants est fixé en fonction d’une

pluralité de critères qui portent à la fois sur

le statut économique des acteurs et sur le

contenu des programmes ; l’ambition étant de

donner chair à la politique audiovisuelle par ces

sélections. Le CSA s’est ainsi donné pour

principe de maintenir une certaine variété de

services (quels que soient les résultats du

marché) et un respect du pluralisme (religieux,

politique, communautaire…).

Une telle politique a un impact indéniable sur

l’organisation de l’offre, lorsqu’elle impose par

exemple qu’il y ait au moins un cinquième de

radios associatives (mais sans avoir toujours le

moyen de vérifier ce que cette catégorie

recouvre), que les plus grands genres musicaux

18 Voir Thomas Paris, chapitre 1, sur la consubstantialité

du juridique et de l’économique.

208

Page 19: Des modes de régulation de l’audiovisuel

soient représentés, que l’ensemble des « cibles »

désignées par les opérateurs soient visées ; elle

structure aussi l’offre quand elle tente

d’équilibrer les bouquets numériques en fonction

d’une définition à la fois encyclopédique et

industrielle de l’offre télévisuelle, puisqu’elle

se donne pour double ambition de couvrir les

champs des activités possibles, culturelles, de

loisirs…, et de répartir la manne entre les

acteurs existants… Elle construit aussi le

marché, lorsqu’en application de la loi du 30

septembre 1986, elle doit vérifier que l’offre de

« chaînes » des câblo-opérateurs est conforme à

l'intérêt du public au regard notamment de la

variété des services proposés, de l'équilibre

économique des relations contractuelles avec les

éditeurs de services. Le CSA exerce là un

contrôle « qualitatif » sur la composition du

bouquet de chaînes distribuées par le câblo-

opérateur (art. 34 de la loi du 30 septembre

1986).

Cependant, nombre d’acteurs ont pu s’interroger

sur l’applicabilité d’une telle politique face à

209

Page 20: Des modes de régulation de l’audiovisuel

des acteurs puissants, des services mal définis,

un intérêt du public bien flou ou morcelé. Le CSA

a ainsi été contesté dans son rôle de régulateur

des contenus, par exemple, lorsque qu’il a pris

la décision d’interdire Ici et Maintenant, radio

locale parisienne « historique » qui usait et

abusait des émissions de libre antenne propices

aux dérapages. Le Conseil d’État, par une

décision de mars 1997, a jugé la sanction

disproportionnée, annulé la décision du CSA qui

réduisait d’un an l’autorisation de la radio et

obligé le régulateur à redonner une fréquence à

la radio.

Le régulateur est également contesté par des

acteurs qui estiment qu’en ayant la main sur le

choix des entrants, la puissance publique

organise la segmentation. Il est donc des

diffuseurs qui, au nom d’une certaine

représentation de la culture, en appellent à une

régulation des entrants plus interventionniste

qu’elle ne l’est à l’heure actuelle. Ils y

ajoutent des arguments de spécificité culturelle

et de respect de la différence nationale

210

Page 21: Des modes de régulation de l’audiovisuel

lorsqu’ils militent pour que soient différenciées

les chaînes selon leur modèle économique, et même

pour que soit contenu l’espace accordé aux

télévisions nourries de programmes étrangers fort

peu coûteux puisque rentabilisés sur de larges

marchés intérieurs.

En matière de choix des participants, le

calendrier des procédures, entre ses mains, peut

venir encore renforcer le poids de l’organisme

régulateur. Les acteurs présents du domaine ont

un avantage concurrentiel fort par rapport aux

nouveaux entrants, comme en témoigne, par

exemple, le bénéfice tiré par les chaînes de

première génération du câble (Canal J, Paris

Première, Planète, Eurosport…) en terme de

notoriété et, partant, d’audience.

Pièce centrale de ce modèle de régulation, les

contenus voient le régulateur négocier puis

contrôler leur teneur par un cahier des charges

qui fixe les obligations de l’opérateur en

matière de programmation. En cela, il est

conforme à la tradition française qui considère

que les produits culturels ne sont pas des

211

Page 22: Des modes de régulation de l’audiovisuel

marchandises comme les autres, que la radio-

télévision fait bien partie de ces biens

culturels, et qu’en tant que tels et quel que

soit leur statut, privé ou public, ils relèvent

de réglementations et de financement assez

éloignés de la pure logique du marché19. Dès ses

débuts, la première instance de régulation de

l’audiovisuel, la Haute autorité est chargée de

veiller à la fois au « respect du pluralisme », à

« l’équilibre politique », à la « diversité

culturelle » (quotas de créations, de chansons

françaises), et même au fonctionnement

économique : plafonnement des recettes

publicitaires, nombre de coupures publicitaires,

formes des parrainages… Le régulateur est

pourtant assez mal armé pour faire respecter les

cahiers des charges et il y a une solution de

continuité entre une régulation exigeante ex-ante

(en matière de contenus, par exemple les

conventions des radios privées) et peu suivie,

mal assumée ex-post.

19 Monique Dagnaud, , L'État et les médias. Fin de partie, Paris,

Odile Jacob, 2000.

212

Page 23: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Le modèle de la régulation par le contenu

transpose donc une politique culturelle par le

processus de choix des acteurs et cherche à la

poursuivre à travers un contrat passé avec les

opérateurs. Ce format a trouvé ses limites dans

la difficile articulation avec le marché d’un

côté, les autorités politiques de l’autre. La

colossale manifestation organisée par NRJ en

décembre 1984 lorsque la Haute Autorité a voulu

faire cesser le brouillage des ondes constitue à

la fois un événement emblématique des limites de

l’action publique et une dissuasion toujours

prégnante. En matière de radiodiffusion, on peut

dire que le CSA, comme les organismes qui l’ont

précédé, se sont pour l’essentiel appliqués à

suivre les modifications induites par les acteurs

économiques et à adapter leur corpus

réglementaire à ces adaptations. Cependant, on

peut faire l’hypothèse que les cahiers des

charges, les conventions, les auditions et tous

les autres mécanismes d’encadrement ont un effet

performatif sur les contenus audiovisuels, ne

serait-ce que dans la mesure où ils engagent les

213

Page 24: Des modes de régulation de l’audiovisuel

acteurs dans une explicitation et une

présentation publiques de leur programmation. Du

côté du politique, les limites de l’indépendance

du régulateur ont été trop souvent soulignées

pour qu’il soit besoin de s’appesantir sur les

nombreux incidents qui émaillent leurs relations,

la nomination des dirigeants de l’audiovisuel

public constituant un poids nodal des

controverses. En la matière, ce mode de

régulation a navigué à vue et avec des bonheurs

divers, entre l’interventionnisme du politique,

la puissance des entreprises du domaine, et la

faiblesse de ses outils d’intervention. Ces

limites ont sans doute contribué à faire rejeter

les velléités du CSA de se voir octroyer la

tutelle des nouveaux moyens de communication et

en particulier d’Internet.

2. La régulation par l’architecture

Dans ce second modèle, l’autorité fixe

l’architecture20 et laisse les acteurs économiques

faire le reste. Elle applique le droit de la

20 au sens de Lawrence Lessig, cf. Code and other laws of

cyberspace. New York: Basic Books, 1999.

214

Page 25: Des modes de régulation de l’audiovisuel

concurrence et s’en remet au marché. La

contrainte d’innovation apparaît comme

prioritaire dans cette forme de régulation qui

doit favoriser la mise sur le marché de nouveaux

services ou produits. Est-ce à dire que la

régulation par l’architecture est une manière de

circonscrire l’intervention du régulateur à la

définition de quelques points fixes du réseau,

les standards, et de laisser ensuite le marché

organiser la compétition ? Ce serait confondre

régulation et normalisation, entendue au sens du

processus de concertation entre des acteurs

internationaux qui permet d’aboutir au choix d’un

standard, d’une norme. La normalisation

intervient de manière centrale dans la régulation

par l’architecture, elle est appliquée depuis

fort longtemps aux télécommunications, puisque

une première conférence s’est tenue en 1865 à

Paris afin de discuter des standards

télégraphiques, et qu’elle a donné lieu peu après

à la création de l’UIT (Union internationale des

télécommunications) ; elle a permis à la fois la

rémunération des échanges internationaux puis le

215

Page 26: Des modes de régulation de l’audiovisuel

partage des ressources rares et l’unification des

règles d’échange en matière télégraphique puis

téléphonique…

Mais la régulation par l’architecture utilise

plutôt la normalisation comme un outil, dans une

situation de forte concurrence où l’État n’est

plus le maître des réseaux. Le travail de

normalisation conduit par les acteurs économiques

avec le soutien des pouvoirs publics est en fait

repris par le régulateur ; c’est ainsi que

l’entend l’Autorité de régulation des

télécommunications pour laquelle « le régulateur

intervient très ponctuellement dans le processus

normatif, au travers d’une présence dans

certaines instances institutionnelles, afin de

soutenir dans les produits de la normalisation

les principes associés à l’ouverture des modèles

économiques, au libre choix du consommateur, à la

gestion prospective du spectre et des ressources

en numérotation, à l’interprétation et au respect

des exigences essentielles, etc. »21 Ce modèle de

régulation organise les télécommunications depuis

21 http://www.art-telecom.fr/

216

Page 27: Des modes de régulation de l’audiovisuel

l’ouverture de la concurrence par la loi du 6

juillet 1996 et la privatisation de l’opérateur

historique qui donnent lieu à la création de

cette autorité administrative indépendante,

l’Autorité de régulation des télécommunications

(ART). A la différence de l’audiovisuel, c’est la

compétition économique et les règles de la

Commission européenne qui poussent au

dessaisissement de l’État et à la mise en place

d’une telle institution, l’Europe ayant

privilégié la rationalité techno-économique en la

matière, comme en témoigne le très significatif

rapport Bangemann de mai 199422.

Ce modèle est loin de se limiter aux

télécommunications stricto sensu : une recommandation

22 Laurence Monnoyer-Smith, "Heurs et malheurs de la société

de l'information dans l’Union européenne", in Communication

et Médias, Eric Maigret (dir.), Paris, La documentation

française, 2003. La déréglementation » de l’audiovisuel et

la remise en cause du rôle culturel traditionnel des États

en la matière est lisible dès le début des années 80 : cf

Kenneth Dyson (1993), « Les politiques de changement de

réglementation dans l’audiovisuel européen », réseaux,

n°59, pp 65-80

217

Page 28: Des modes de régulation de l’audiovisuel

de la Commission européenne propose d’inclure

dans la liste des secteurs dont elle assure la

régulation « les services de radiodiffusion

destinés à livrer un contenu audiovisuel aux

utilisateurs finaux » ; autrement dit la radio et

la télévision par ADSL, mais aussi peut-être – la

décision n’est pas prise et la définition reste

ouverte – la câblodistribution, et ce au nom de

la convergence attendue des technologies et de

l’inadaptation du régime juridique actuel du

câble, qui pénaliserait son développement et

entraverait sa rentabilité. Son application à

l’audiovisuel n’est pas entièrement nouvelle : au

tournant des années 1980, les décisions

politiques en matière de communication, par câble

comme par satellite (fibre optique, satellites

TDF1 et Telecom1), sont définis par des choix de

politique industrielle et par la volonté

d’occuper le terrain des créneaux industriels de

pointe plus que par une politique culturelle, ou

de communication orientée vers les usages23. Même

23 Jean-Louis Missika, « La déréglementation de

l’audiovisuel en France », Revue d’économie industrielle, n°39, 1er

218

Page 29: Des modes de régulation de l’audiovisuel

après l’ouverture de la concurrence en matière

audiovisuelle, l’intervention de l’État demeure

si prégnante que certaines innovations ou

expérimentations des acteurs économiques

privilégient une stratégie politique davantage

que le marché. Par exemple, au début des années

1990, la Lyonnaise des eaux, un des trois

principaux câblo-opérateurs de la période, met en

place à grand prix une expérimentation de pay-

per-view en grandeur réelle en banlieue

parisienne. Le produit offert aux clients est en

fait minimal tant du point de vue des programmes

que des services eux-mêmes alors que tout le

travail mené par l’entreprise consiste à

convaincre les diffuseurs que le projet n’entre

pas en concurrence avec leur propre produit, à

persuader les producteurs d’accepter une

modification des contrats, à inciter les pouvoirs

publics – avec l’aide des médias et en

particulier l’appui de la presse – à modifier les

règlements du secteur, à faire assumer par

l’opérateur une part des risques en liant sa

trimestre 1987.

219

Page 30: Des modes de régulation de l’audiovisuel

rémunération à la consommation effective, à

concilier les objectifs divergents de ces acteurs

autour d’un projet commun… Le travail de

construction de l’organisation a primé sur celui

du marché et contribué à l’arrêt du pay-per-view,

sans qu’il soit possible de parler d’échec

commercial tant cet aspect était secondaire dans

l’expérimentation.

Appliqué, comme le souhaite l’ART, à

l’audiovisuel, ce modèle de régulation pose dans

sa forme actuelle, au moins deux questions.

D’abord, comment gérer la compatibilité des

dispositifs ? La fixation de standards oblige à

poser la question du renouvellement ou de la

transformation du parc des équipements. Qui

l’impose, comment et avec quelles échéances ?

Comment et sous quelles conditions doit-il

intervenir pour favoriser des standards communs

aux différentes applications, et en particulier à

celles qui s’adressent au grand public ? Laisser

les acteurs économiques répondre à ces questions

peut aboutir à une situation de blocage, comme

cela a été le cas pour le D2MacPaquet. Mais

220

Page 31: Des modes de régulation de l’audiovisuel

aujourd’hui, la transition entre équipements

anciens et nouveaux équipements pour la TNT,

fixée par le CSA, est considérée par certains

diffuseurs comme une entrave dans la mesure où,

obligeant les chaînes à une double diffusion

(dans les deux standards), elle limite l’avantage

de la TNT pour le téléspectateur et, partant, sa

propension possible à s’équiper. S’y ajoute la

question de l’interopérabilité (c’est-à-dire la

capacité qu’ont deux systèmes de communication,

qui peuvent être différents ou incompatibles, à

communiquer) ? Cette interopérabilité, pierre

angulaire d’Internet, semble aujourd’hui

compromise, avec le développement de mesures

techniques de protection, standards privés,

limitation d’accès et autres dispositifs

techniques. Dans quelle mesure le régulateur

doit-il alors intervenir, par exemple, pour

empêcher la privatisation de pans entiers

d’Internet ? Enfin, la régulation par

l’architecture permet-elle l’égalité entre les

acteurs de l’audiovisuel : si les chaînes

satellitaires étrangères ou les télévisions par

221

Page 32: Des modes de régulation de l’audiovisuel

ADSL sont soumises par l’ART au seul régime

déclaratif, comme le prévoit la LEN, leurs

obligations seront bien inférieures à celles des

chaînes dépendant d’un conventionnement du CSA et

la coexistence de deux modèles régulateurs sera

complexe voire problématique.

III. LE CADRE DE L’AUDIOVISUEL : LES QUESTIONS-CLÉS

Au terme de ce travail, il apparaît qu’un certain

nombre de choix, de pratiques, de règles

s’avèrent très structurantes pour l’économie de

l’audiovisuel. Chacune d’entre elles mériterait

certainement d’être interrogée, quant à son

origine, sa fonction et ses conséquences, et

quant à sa dynamique d’évolution, très libérale

et laissée au jeu des acteurs, ou au contraire

largement impulsée par la puissance publique.

Pour certaines d’entre elles, l’Etat n’a peut-

être plus vocation à intervenir ; pour d’autres,

l’intervention d’un acteur extérieur peut peut-

être s’imposer. Bref, il s’agit de ré-interroger

de façon systématique l’ensemble des structures

222

Page 33: Des modes de régulation de l’audiovisuel

de l’économie actuelle de l’audiovisuel, à la

lumière des évolutions et des tendances que nous

avons mis au jour. La question de la définition

du nouveau cadre de l’audiovisuel se polarise

aujourd’hui principalement autour de deux grandes

questions, apparues en filigrane tout au long de

ce travail : il s’agit de la concurrence et de la

propriété intellectuelle.

3. Quel régime de concurrence ?

Selon certains auteurs, dont Philippe Achilléas,

ce que nous avons appelé le modèle de la

régulation par l’architecture prendrait

progressivement la place de la régulation par le

contenu. Le secteur de l’audiovisuel aurait dans

cette perspective vocation à rentrer petit à

petit dans le champ du droit de la concurrence24,

la multiplication des canaux de diffusion

justifiant l’abandon d’une forme de régime

d’exception en vigueur jusque là. La convergence,

annoncée depuis longtemps, se traduirait enfin24 Cf. Chapitre 7. Sur le modèle traditionnel, on se

référera à Bernard Guillou et Jean-Gustave Padioleau, , La

régulation de la télévision, Paris, La Documentation française,

1988, 154 p,

223

Page 34: Des modes de régulation de l’audiovisuel

dans les technologies et les usages et l’unité

numérique se déclinerait dans des machines

partagées25. Pour autant, comme l’ont montré par

exemple les affaires des droits de diffusion du

football ou la question de l’application du must

carry à la télévision par ADSL, l’application de ce

droit dans l’audiovisuel ne va pas de soi et se

heurte à des questions de fond.

La première est de savoir si, effectivement, les

différents médias exigent une forme commune de

régulation ; il faut en d’autres mots se demander

dans quelle mesure le canal de diffusion modifie

le format audiovisuel et, partant, la gouvernance

qui l’encadre. La normalisation du transport des

données, nous l’avons dit, permet d’abolir pour

certains contenus les frontières entre les

télécommunications, l’informatique et les médias.

Les contenus diffusés sur les réseaux de

télécommunication peuvent être repris sur

différents supports éditoriaux, comme le CD ou le

DVD, ou faire l’objet d’une économie du spectacle

(concerts, salles de cinéma). Les stations de

25 Cf Ph Rouger, chapitre 2.

224

Page 35: Des modes de régulation de l’audiovisuel

radio sont reprises sur les bouquets numériques

et tous ces réseaux ont les mêmes fournisseurs,

qu’il s’agisse des droits de la musique ou des

événements sportifs. Les questions de transfert

d’utilité – par exemple, entre les détenteurs des

droits et les fournisseurs d’accès, telle qu’elle

est au centre de la problématique du peer-to-peer

–, ou de transfert de ressources – entre le

cinéma et le football professionnel dans la

question de l’exclusivité des droits du football,

ou encore entre le budget musique et le budget

DVD chez les consommateurs26 –, montrent combien

les frontières entre secteurs peuvent être

perméables. Mais la question se décline aussi en

d’autres termes : chaînes gratuites et chaînes

payantes relèvent-elles du même marché ? Et quid

des thématiques et des généralistes, qui

fonctionnent sur des économies radicalement

différentes ?27

26 Cf. F. Gimello-Mesplomb, chapitre 9.27 Cf. Th. Paris, chapitre 1, Ph. Chazal & G. Gronier,

chapitre 12.

225

Page 36: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Dans quelle mesure la puissance publique doit-

elle se mêler de ces contrats ? Comment le

régulateur intervient-il sur l’équilibre

financier des chaînes ? Si ces questions se

posent avec autant d’acuité, c’est que

l’audiovisuel présente une particularité

importante par rapport aux secteurs où le droit

de la concurrence s’applique sans difficulté

majeure : il met en jeu des produits « uniques ».

La retransmission de la Coupe du monde de

football n’a pas de produit de substitution.

C’est pour cette raison que plusieurs grands

événements sportifs sont obligatoirement repris

par des chaînes gratuites, en vertu de la

directive européenne « Télévision sans

frontières ». Mais c’est surtout pour cette

raison que l’exclusivité pose tant de questions :

d’un côté, elle bride le développement de

chaînes, de réseaux ou de modes de distribution ;

de l’autre, elle apparaît comme la condition sine

qua non pour les chaînes pour affirmer leur

identité et construire leur marque. Peut-on

traiter les chaînes et distributeurs comme les

226

Page 37: Des modes de régulation de l’audiovisuel

autres distributeurs, ceux des produits

physiques ? Cela semble délicat, compte tenu de

la singularité de chacun des produits qu’elles

distribuent : un distributeur pourra toujours

substituer dans ses rayons à un yaourt de telle

marque un yaourt d’une autre marque sans que cela

nuise beaucoup à sa fréquentation ; dans

l’audiovisuel, certains produits ne sont pas

substituables et c’est ce qui en fait sa

spécificité.

L’asymétrie dans les rapports entre acteurs est

une deuxième question, par exemple entre

distributeurs et éditeurs28 ou entre fournisseurs

de contenus et diffuseurs29. Aujourd’hui,

l’économie du secteur et la concentration de la

distribution mettent les éditeurs en situation de

dépendance face à eux. Ils semblent à l’heure

actuelle, aux dires de leurs représentants, peu

en mesure de peser dans la relation, et attendent

de l’État la mise en place d’une régulation

28 Cf. Ph. Chazal & G. Gronier, chapitre 12.29 Cf. B. Montels et F. Patti, chapitre 11.

227

Page 38: Des modes de régulation de l’audiovisuel

sectorielle qui fixerait leurs rapports avec les

distributeurs, préciserait les obligations de

chacun et arbitrerait les litiges30. L’arrivée de

la TV par ADSL, en ouvrant les possibilités de

diffusion, est susceptible de rééquilibrer les

rapports de force, mais à condition de disposer

d’une base de clients suffisamment importante

pour ne pas rester dans une position de niche.

Pour autant, même dans la régulation par le

contenu, le régulateur ne se mêle pas du détail

des contrats entre les maillons de la chaîne

audiovisuelle, tout au plus vérifie-t-il, par

exemple pour les radios locales, que la nature

des prestations faisant l’objet du contrat entre

bien dans le cadre de la convention que

l’opérateur a signé avec lui, et contrôle-t-il un

certain nombre de clauses contractuelles, non pas

au nom de l’équilibre des parties, mais de la

responsabilité des distributeurs (par exemple

l’encadrement strict des sous-traitances en

matière de programmes radiophoniques). Dans

quelle mesure pourrait-il se mêler de rendre plus

30 Cf. Ph. Chazal & G. Gronier, chapitre 12.

228

Page 39: Des modes de régulation de l’audiovisuel

symétriques les relations entre les acteurs, et à

quoi cela conduirait-il ? A l’opposé, à quelle

télévision conduirait une régulation qui ne

s’occuperait pas de la structuration du marché,

de la nature des contrats, des accords

interprofessionnels, de l’avantage compétitif des

programmes américains, peu coûteux car déjà

amortis ? En matière radiophonique, le

législateur a répondu en séparant deux

fonctions : d’un côté, il fixe au régulateur des

exigences en matière culturelle (par exemple un

certain pourcentage de radios associatives) ; de

l’autre, il distribue aux acteurs financièrement

désavantagés, mais jugés culturellement ou

socialement importants (avec des critères

multiples et pondérés), une subvention qui leur

permet d’assurer une programmation significative

sans dépendre du marché publicitaire, mais sans

le lui interdire totalement.

Comme on le voit, quel que soit le régime de

régulation privilégié, se pose la question du

régime de concurrence que permet et favorise

l’intervention publique. A l’heure actuelle, le

229

Page 40: Des modes de régulation de l’audiovisuel

modèle est flou, se décline en fonction des

situations et des rapports de force et fait

l’objet de discussions controversées. Mais la

question dépend en fait du statut que l’on

attribue aux contenus audiovisuel.

4. Définir la propriété intellectuelle,

définir le contenu…

Toute gouvernance implique en effet de définir le

cœur de son activité, soit, dans le domaine qui

nous intéresse, le programme, l’œuvre

audiovisuelle. Aussi, toutes les dispositions sur

la propriété intellectuelle ont-elles des

incidences centrales sur la régulation car elles

structurent l’évolution des technologies. La

question ne s’arrête pas ici à l’évolution

juridique : elle touche beaucoup plus

fondamentalement à la nature de l’activité

intellectuelle, au statut accordé aux œuvres, au

statut concédé au public, au droit à l’éducation,

à la définition de l’invention… Elle est depuis

fort longtemps du ressort de l’État en dernière

instance puisque sa législation définit les

230

Page 41: Des modes de régulation de l’audiovisuel

droits d’auteur, ou, plus largement, les droits

de la propriété intellectuelle, et qu’en outre,

la puissance publique négocie les conventions

internationales permettant de régir les

circulations de biens culturels.

Aujourd’hui, en matière de production

intellectuelle (ou artistique), on assiste à une

bataille acharnée pour l’extension des droits, et

à la mise en place d’une « machine à perception

inflationniste » qui nuit tant à l’usager dont

les droits ne cessent d’être bornés, qu’à la

création intellectuelle elle-même, dont les

sources et les filiations risquent de se voir

contraints31. Sur Internet, le mouvement est

particulièrement net, les risques semblant

supérieurs, au point que James Boyle a pu parler

d’un deuxième « mouvement d’enclosure »32, avec un

31Lawrence Lessig (2004), Free Culture: How Big Media Uses Technology

and the Law to Lock Down Culture and Con trol Creativity, The Penguin

Press.32 (2003) « The second enclosure movement and the

construction of the public domain », Law and Contemporary

Problems, 66.33.

(http://www.iprsonline.org/resources/iprs.htm)

231

Page 42: Des modes de régulation de l’audiovisuel

contrôle croissant des détenteurs de droits sur

la propriété intellectuelle et une érosion

concomitante du domaine public, le premier ayant,

comme on le sait, conduit, à limiter les usages

collectifs au prix à la fois d’une extension des

capacités productives mais aussi d’un

accroissement des inégalités. Comment le

régulateur peut-il aujourd’hui intervenir sur

cette question de la définition des droits et

quels en sont les enjeux ?

Le P2P comme laboratoire

Cette question de la propriété intellectuelle se

focalise aujourd’hui avec acuité sur l’échange de

fichiers entre particuliers sur Internet, le

peer-to-peer, et les moyens à mettre en œuvre

pour assurer un développement durable du secteur.

Force est de constater qu’aucun consensus ne se

dessine aujourd’hui, sur le diagnostic, sur les

moyens à mettre en œuvre, et ce, tant dans le

champ des praticiens que dans celui des

232

Page 43: Des modes de régulation de l’audiovisuel

économistes33. L’on peut simplement dire

aujourd’hui que l’application du droit de

propriété intellectuelle au sens strict paraît

impensable – et peu réaliste –, car quelle est la

légitimité d’une loi qui contredit les normes de

comportement ? Qu’on fasse l’hypothèse que les

internautes pirates ont conscience du caractère

transgressif de leurs pratiques ou qu’on leur

suppose un certain aveuglement ne change rien au

fait qu’une pratique aussi diffusée ne peut être

simplement contrainte par un dispositif technique

ou un texte de loi, s’il ne prend pas en compte

la réalité du phénomène. C’est-à-dire le fait que

ces internautes n’ont pas un comportement

purement opportuniste au sens des économistes ;

33 Outre le rapport dirigé par Olivier Bomsel (Enjeux

économiques de la distribution des contenus, Étude RIAM-Contango-

Cerna, janvier 2004) qui propose de taxer le flux

ascendant, on peut citer La Société de l’information, rapport du

Conseil d’analyse économique, Nicolas Curien et Pierre-

Alain Muet, La Documentation française, Paris, 2004, les

commentaires d’Elie Cohen faisant suite au rapport, et un

article de Pierre-Noël Giraud publié dans Le Monde, « Un

spectre hante le capitalisme, la gratuité », 6 mai 2004.

233

Page 44: Des modes de régulation de l’audiovisuel

mais qu’ils sont sensibles à la forme spécifique

de la communication pratiquée, l’échange,

vraisemblablement perçue comme pratique distincte

de celles de l’achat/consommation de biens

culturels ; il faut encore ajouter que les

situations diffèrent selon les pays, selon la

conception juridique et économique du copyright,

la médiatisation du problème par les producteurs

de musique, les types de contrat liant auteurs et

distributeurs de contenus, la disponibilité en

réseau à haut débit…. L’autre enseignement que le

petit recul historique de la question permet de

tirer est que la réponse ne pourra être toute

technologique ni toute judiciaire, mais qu’elle

articulera ces deux aspects avec une dimension

d’innovation en termes de modèles économiques et

d’offre34. Il semble seulement certain que

l’économie du secteur devra se redéfinir, et son

droit avec.

L’exclusivité : un modèle non unique

Les interrogations sur la propriété

intellectuelle ne s’arrêtent pas au P2P.

34 Cf. M. Boukobza, chapitre 6.

234

Page 45: Des modes de régulation de l’audiovisuel

L’économie de l’audiovisuel s’est construite,

nous l’avons dit, autour de la notion

d’exclusivité, qui apparaît aujourd’hui

fondamentale dans le secteur. Mais l’économie de

la radio, tout au moins pour un de ses pans35,

s’est développée autour d’un autre modèle, celui

de la licence légale, dans lequel les stations ne

demandent pas d’autorisation au coup par coup

pour la diffusion des œuvres mais puisent au sein

d’un catalogue en échange d’une rémunération

gérée par les sociétés de gestion collective des

droits. Il ne s’agit point ici de dire qu’une

solution est meilleure que l’autre, mais que deux

coexistent, qui permettent autant l’une que

l’autre le développement d’une économie

diversifiée. S’il fallait se livrer à une analyse

comparative, on pourrait relever que le système

de la licence légale, malgré un nombre élevé de

concurrents en compétition pour les mêmes

contenus, semble avoir limité l’effet

inflationniste observé dans le marché des droits

35 A côté de la musique, il existe une économie des

programmes, proche de la situation de la télévision.

235

Page 46: Des modes de régulation de l’audiovisuel

audiovisuels. À ce stade, on ne peut qu’arrêter

là la comparaison, trop complexe pour être

analysée en quelques lignes, notamment du fait

que la radio et la diffusion télévisuelle n’ont

pas la même place au sein respectivement de

l’économie de la musique et de l’économie des

programmes. Contentons-nous de dire que le modèle

des droits exclusifs n’est a priori pas le seul

envisageable.

Enfin, nous pouvons inclure dans les questions

relatives à la propriété intellectuelle celles de

la répartition des droits entre les différents

intervenants de la chaîne de valeur. Dans la

mesure où les chaînes interviennent dans le

financement des programmes, à quels droits de

propriété peuvent-elles prétendre, et quelles

conséquences cela peut-il avoir ?

IV. UN NOUVEAU MODÈLE DE RÉGULATION ?

Force est de constater, au terme de cet ouvrage,

que l’utopie (ou le mythe) de la libération

audiovisuelle ne résiste pas à l’analyse. Tout au

moins au sens de l’affranchissement vis-à-vis des

236

Page 47: Des modes de régulation de l’audiovisuel

contraintes qui régulent le secteur. L’autre

libération, celle des individus, par l’accès aux

savoirs, à la connaissance et à la culture, hante

l’audiovisuel depuis ses premières réalisations

dans les années vingt. Nous y reviendrons.

Qu’une forme de régulation s’impose, nous

espérons en avoir fait dans cet ouvrage la

démonstration. Un récent rapport du Conseil

d’analyse économique en a proposé une

explication. Les biens informationnels, suggère-

t-il, ont des caractéristiques de bien public.

C’est la raison pour laquelle Internet, en

fluidifiant l’information, semblait promettre le

marché parfait mais exige en réalité une économie

publique, en tout cas qui nécessite une

régulation36.

On l’a vu dans cet ouvrage, trois attitudes se

dégagent dans la façon d’envisager la régulation

de l’audiovisuel : la tentation de la

dérégulation, la préservation des situations en

36 « La société de l’information », N. Curien et P.A. Muet,

Rapport du Conseil d’analyse économique, La Documentation

française, 2004, p. 38.

237

Page 48: Des modes de régulation de l’audiovisuel

place, l’encouragement de l’innovation. Ce sont

là trois logiques en conflit le plus souvent, qui

prennent parfois le pas sur ce que sont,

devraient ou pourraient être les principes de la

régulation de ce secteur : la diversité

culturelle, l’accès libre à l’information, la

compétitivité culturelle autant qu’économique, la

démocratisation des contenus… On retrouve

derrière ces attitudes, et de façon combinée, des

logiques d’acteurs : les acteurs installés dans

un cas, les nouveaux entrants dans un autre, les

chantres de la croissance que peuvent être les

autorités publiques ou communautaires…

La nouvelle régulation ne sera ni libérale, ni

administrée, et devra composer avec les voies

ouvertes en matière de cogestion ou de

gouvernance non étatique. Pour la gouvernance non

étatique, Internet pourrait aussi constituer un

laboratoire pour expérimenter de nouveaux modes

de régulation qui prennent en compte toutes les

catégories d’acteurs, industriels, usagers,

chercheurs, États… Le cas de l’ICANN, qui devrait

théoriquement statuer sur toutes les décisions

238

Page 49: Des modes de régulation de l’audiovisuel

qui affectent la forme du réseau, comme exemple

supra-étatique ou plutôt substitutif des États-

nations, fournit une piste de réflexion sur les

formats de régulation actuellement expérimentés,

dans le contexte qui rappelle nos hypothèses de

départ, c’est-à-dire une méfiance croissante à

l’égard des États et de leur difficulté à avoir

une action efficace en la matière. L’ICANN ne se

définit pas contre les États, ni en complément de

leur action mais comme un dispositif de

représentation qui échappe à la représentation

étatique et qui rassemble dans des groupes

informels des acteurs aux statuts très divers

(individus, organisations commerciales ou non,

États, organisations intergouvernementales…37). Le

format est loin d’être abouti et sa limite

majeure est moins sa dépendance à l’égard du

département du commerce du gouvernement

américain38 que son incapacité à contrebalancer le

37 Cf Eric Brousseau (2004), « Internet : un laboratoire

institutionnalisé », Sciences Humaines, n°44, mars.38 Milton Mueller (2002), Ruling the root: Internet governance and the

taming of cyberspace, Cambridge and London, MIT Press, 317 p.

239

Page 50: Des modes de régulation de l’audiovisuel

poids des acteurs économiques et de contenir la

montée de la privatisation d’Internet.

La question de la cogestion ou de l’intervention

des parties prenantes (« stake-holders ») au

processus de mise en place de la décision en

matière de communication n’est pas nouvelle ; dès

1935, au moins, elle fut expérimentée pour la

cogestion du cinéma. Mais elle ne confrontait pas

alors une telle diversité d’acteurs, de

technologies, d’intérêts. Comme dans tout système

de cogestion, se pose la question de l’intérêt

public : qui le représenterait en matière

d’audiovisuel ? Les usagers ont depuis longtemps

témoigné « qu’ils votaient avec les pieds » ou,

pour le dire moins trivialement, que leur

implication dans l’audiovisuel se manifestait, de

façon individualiste, dans leur comportement

d’écoute et non dans la participation à des

associations, comités de programmes, etc. C’est

dire que la puissance publique doit encore jouer

son rôle…

Derrière les questions que nous avons abordées,

qui peuvent paraître techniques au profane, c’est

240

Page 51: Des modes de régulation de l’audiovisuel

la forme même de la création qui est en jeu. Nous

ne l’avons pas beaucoup évoqué ; nous avons plus

parlé de tuyaux que de contenus ; d’industrie que

d’information, de culture et d’éducation. Mais

c’est bien là le cœur du problème, car, ne

l’oublions pas, la vocation première des écrans

est de diffuser des programmes, des

connaissances, des oeuvres… La place que peut

prendre l’audiovisuel dans la vie des individus

mérite qu’on s’interroge sur ce que ces

dispositifs techniques vont diffuser. Peut-être

la diversité nouvelle des acteurs et le fait

d’aller vers un marché plus concurrentiel va

naturellement dans un sens positif, en matière de

contenus. Mais cela reste à démontrer.

Le secteur vit, à la fois sur le plan des

technologies et des usages, une révolution qui

conduira à une redéfinition de son économie.

L’occasion est belle d’avoir une vraie réflexion

aujourd’hui sur ses aspects culturels et

éducatifs et sur les choix politiques qui doivent

l’accompagner.

241

Page 52: Des modes de régulation de l’audiovisuel

242

Page 53: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Sigles et acronymes utilisés

ACCeS : Association des chaînes du câble et du satellite

ADSL : Asymetric Digital Suscriber Line

AFORM : Association française des opérateurs de réseaux

multiservices

ANGOA : Association nationale de gestion des œuvres

audiovisuelles

ARPU : average revenue per user (revenu moyen par

utilisateur)

ART : Autorité de régulation des télécommunication

B2B : business to business

BIT : Binary digIT

CPL (ou PLC) : courants porteurs en ligne

CSA : Conseil supérieur de l’audiovisuel

DRM : Digital Rights Management

DSL : Digital Suscriber Line

DSLAM : Digital Subscriber Line Access Multiplexor (point

de raccordement au réseau des lignes ADSL)

DVB : Digital Video Broadcasting

DVB-H : DVB-Handheld

DVR : Digital Video Recorder

DVD : Digital Video Disc ou Digital Versatile Disc

EGP : électronique grand public

FAI : fournisseur d’accès à internet

FT: France Telecom

GPRS : General Packet Radio Services

243

Page 54: Des modes de régulation de l’audiovisuel

GSM: Global System for Mobile communications

ICANN: Internet Corporation For Assigned Names and Numbers

IHM : interface homme-machine

IP: Internet Protocol

LFP : Ligue de football professionnel

Mbit/s : Mégabits par seconde

MMS : Multimedia Messaging Service

MPAA : Motion Picture Association of America (syndicat

professionnel des studios de cinéma américains)

mp3 : MPEG Audio Layer 3

MPEG : Motion Picture Experts Group

(N)TIC : (nouvelles) technologies de l’information et de la

communication

ORTF : Office de radiodiffusion et de télévision française

PAF : paysage audiovisuel français

P2P : peer-to-peer

PC : Personal Computer

PDA : Personal Digital Assistant

PLC (ou CPL) : powerline communications

PVR : Personal Video Recorder (décodeur-enregistreur à

disque dur)

RAM: Random acces Memory

RIAA : Recording Industry Association of America (syndicat

professionnel des maisons de disques)

RTC : réseau téléphonique commuté (réseau de téléphonie

historique, dont la terminaison, chez le client final, est

la « paire de cuivre »).

SACD : Société des auteurs, compositeurs dramatiques

244

Page 55: Des modes de régulation de l’audiovisuel

SACEM : Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de

musique

SCAM : Société civile des auteurs multimédia

SECAM : SEquentiel Couleur Avec Mémoire

SVOD : Subscription Video On Demand

TNT : télévision numérique terrestre

TVHD: télévision haute-définition

TV par ADSL : télévision par le réseau internet haut-débit

UMTS : Universal Mobile Telecommunications System

USB : Universal Serial Bus

VOD : Video on Demand

WAN : Wide Area Network

WAP : Wireless Application Protocol

Wi-Fi : wireless fidelity (technologie de transmission de

données sans fil)

245

Page 56: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Les contributeurs

Thomas Paris est chercheur au CNRS (GREG HEC/CRG

Ecole polytechnique), où il travaille notamment

sur l’économie et la gestion des industries de la

création. Il est l'auteur d'un livre sur le

système du droit d'auteur (Le Droit d'auteur : l'idéologie

et le système, PUF, 2002) et a coordonné un numéro

spécial de la revue CinémAction (« Quelle diversité

face à Hollywood ? », Corlet, 2002).

Philippe Achilléas, maître de conférences à la

Faculté Jean Monnet, Université Paris Sud – 11,

dirige l’Institut du Droit de l’Espace et des

Télécommunications (IDEST).

Frédéric Gimello-Mesplomb est maître de

conférences en économie du cinéma à l’Université

de Metz et chercheur au Centre de Recherches sur

l’Action Politique en Europe (CRAPE, unité mixte

du CNRS, de l’Université de Rennes 1 et de

l’Institut d’Études Politiques de Rennes). Il est

246

Page 57: Des modes de régulation de l’audiovisuel

l’auteur de travaux sur les politiques publiques

de soutien à l’audiovisuel et les nouvelles

formes d’organisations sociales autour de la

culture cinématographique (« L’État et le cinéma

français », Politix, 2003 ; « Une politique du

cinéma : la sélection française pour Cannes »,

Protée, 2004).

Agathe Lepage, agrégée des Facultés de droit, est

professeur à l’Université Paris Sud-XI. Elle

collabore à la revue Communication Commerce

électronique et est l’auteur notamment de Libertés et

droits fondamentaux à l’épreuve de l’Internet, paru en 2002

aux éditions Litec.

David Mabillot : allocataire-moniteur de

recherche à l'Université Paris XIII et membre du

Centre d'économie de Paris Nord (CEPN - UMR CNRS

7115).

Ses recherches portent sur l'économie du

numérique et l'économie du ciné[email protected]

247

Page 58: Des modes de régulation de l’audiovisuel

Cécile Méadel est chercheuse au Centre de

sociologie de l’innovation de l’École des mines

de Paris, CNRS, et chargée de cours à l’Institut

d’études politiques de Paris. Ses recherches

portent sur les technologies de la communication,

leurs usages, leur histoire, leur gouvernance.

Ses dernières publications concernent les TIC et

la santé (direction du n°22-1 de Sciences sociales et

Santé) et la corégulation d’Internet (article à

paraître dans Réseaux). [email protected]

Benjamin Montels est maître de conférences à la

Faculté de Droit et de Science politique de

Rennes 1, membre du Centre de Droit des Affaires.

Il est notamment l'auteur d'un ouvrage sur Les

Contrats de représentation des oeuvres audiovisuelles (PUAM,

2001).

Fabrice Patti est juriste au secrétariat général

de TF1.

Isabelle Proust : spécialisée dans les aspects

économiques et financiers du secteur des médias

248

Page 59: Des modes de régulation de l’audiovisuel

et de l'audiovisuel, a été directeur financier

adjoint du groupe UGC pendant 5 ans.

Fabrice Rochelandet est maître de conférences en

économie à l'Université Paris 11 et fait partie

du centre de recherche ADIS (www.adislab.net). Il a

publié plusieurs articles sur l'analyse

économique du droit d'auteur et sur l'économie

numérique.

Philippe Rouger : dirigeant de la société E-

Netkey intervenant dans les domaines de

l'identification et la sécurisation

numériques, après avoir participé au lancement du

fournisseur d'accès Club Internet dont il a été

le secrétaire général.

249