de Solms Camille Diplôme préparé : Master II « Expertise en stratégie Marketing et commerciale » Sujet : En quoi l’éveil des sens influence-t-il le consommateur ? Illustration par un cas pratique dans le domaine des boissons fraîches Responsable de mémoire : Cyril Victor
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de Solms Camille
Diplôme préparé :
Master II « Expertise en stratégie Marketing et commerciale »
Sujet :
En quoi l’éveil des sens influence-t-il le consommateur ?
Illustration par un cas pratique dans le domaine des boissons
fraîches
Responsable de mémoire : Cyril Victor
Année universitaire 2008/2009
SOMMAIRE
SOMMAIRE 2
RESUME 4
1ère PARTIE 8
Environnement : 8
1. Concept du Marketing expérientiel : 8
A. Littérature en la matière : 8
B. Définition : 13
C. Caractéristiques : 14
2. Concept du marketing sensoriel : 17
A. Littérature en la matière 18
B. Définition : 21
C. Caractéristiques 22
2ème PARTIE 25
L’influence sensorielle sur le consommateur 25
1. Thématiser l’offre : 26
A. Vue : 26
B. Odorat : 29
C. Ouïe : 31
D. Toucher : 32
E. Goût : 34
2. Réactions clients : 35
A. Réponses cognitives : 35
B. Affectives : 38
C. Comportementales : 41
D. Eléments à prendre en compte : 43
2
3. Effet de mode ou stratégie à long terme ? 44
A. Exemples de réussite 44
B. Évolution de la discipline : 46
3ème PARTIE 48
Cas pratique : proposition d’une stratégie produit à un acteur du marché 48
1. État des lieux du marché : 48
A. Évolution du marché 48
B. les segments de marché : 52
C. Acteurs 53
2. Perrier 54
A. Historique : 54
B. Analyse de l’entreprise : 56
C. Stratégies Marketing 58
3. Recommandations sensorielles 61
A. Les PRELIMINAIRES 61
B. Le CONCEPT 63
C. BUSINESS PLAN 65
CONCLUSION 76
BIBLIOGRAPHIE 78
ANNEXES 84
3
RESUME
Le marketing sensoriel, variante du marketing expérientiel se définit comme un
outil ou technique de marketing visant à créer une atmosphère sensorielle afin de rendre plus
agréable le passage du client en magasin. Cet outil, apparu en 1982 dans la recherche en
marketing avec les travaux d’Holbrook et Hirshman, a eu beaucoup de mal a apparaître dans
les travaux de recherche en comportement du consommateur. Or, aujourd’hui on sait que
l’atmosphère sensorielle influence le consommateur. Des réactions cognitives,
comportementales et affectives ont été observées. C’est une technique tout à fait pertinente
pour agir sur le consommateur, notamment au sein d’un point de vente.
Aujourd’hui de nombreuses enseignes ont adopté cette stratégie marketing en mettant
en place dans leur point de vente une atmosphère particulière, c’est le cas de Ralph Lauren,
Nature & Découvertes, ou Andaska. Elles ont réussi à construire leur succès sur un concept
sensoriel original. Ces enseignes ont très vite compris la mutation du comportement du
consommateur, elles ont su réagir et s’adapter à ces nouvelles attentes. Beaucoup de
chercheurs accusent la société quant à l’évolution des exigences de nos clients. Ce nouveau
consommateur se caractérise par un perpétuel besoin de faire quelque chose d’intéressant, il
est donc à la recherche d’expérience dans son acte de consommation. C’est donc en réponse à
ces changements d’attentes qu’est apparu le marketing sensoriel, beaucoup de sociétés se sont
alors crées pour proposer aux entreprises des solutions en matière d’environnement sonore,
olfactif, visuel ou tactile.
Afin d’illustrer ce mémoire nous avons choisi de proposer une stratégie sensorielle à
un acteur du marché des boissons rafraîchissantes. De par sa notoriété et son originalité, nous
avons choisi la marque Perrier. Nous avons donc créé un concept de bar sensoriel en
harmonie avec le positionnement et l’image de la marque. Pour créer ce concept, nous avons
donc recommandé des sociétés spécialisées dans le domaine. Nous communiquerons
l’événement d’ouverture par le biais d’Internet, principal moyen de communication du cœur
de cible du bar et nous aurons une forte présence sur les sites communautaires.
En guise de conclusion, nous avons pu montrer la rentabilité du projet et la necessité
de le combiner avec d’autres techniques de marketing telles que le marketing viral ou
communautaire dans le but de le pérenniser,
4
INTRODUCTION
La société, ces dernières années, a foncièrement transformé le consommateur dont le
comportement et les besoins ont évolué. Ce nouveau type de consommateurs est de plus en
plus difficile à satisfaire et adopte surtout un comportement irrationnel, ce qui ne facilite pas
la tâche des marketers.
La guerre des prix et de la qualité menée par les entreprises pour se distinguer dans un
environnement concurrentiel a fait considérer ces facteurs comme acquis par le
consommateur. Certes nécessaires, ils ne sont plus suffisants pour le convaincre d’acheter. Le
consommateur d’aujourd’hui est las, car trop sollicité de toute part. N’oublions pas qu’en
moyenne chaque mois un individu est soumis à 30 000 marques et 7 000 annonces
publicitaires. Les consommateurs rejettent les publicités qui se ressemblent de plus en plus. Ils
sont à la recherche de nouveautés. Ils veulent être surpris pour changer leur quotidien. Il
devient donc primordial pour les entreprises de sortir de l’ordinaire pour marquer les
individus.
Longtemps, les marketers se sont basés sur le postulat que les décisions des consommateurs
résultaient d’un processus réfléchi et raisonné (homo economicus). Aujourd’hui, force est de
constater que les attentes des consommateurs ne sont plus les mêmes et que par conséquent
leur comportement en est aussi modifié.
De nombreux écrits ont mis en exergue ce phénomène qui va à contre-courant de la
théorie traditionnelle du marketing. C’est pourquoi, de très nombreuses innovations marketing
sont apparues dans le courant des vingt dernières années pour mieux s’adapter aux nouvelles
exigences du marché et notamment aux attentes des consommateurs. Parmi ces innovations,
on peut citer le marketing expérientiel et ses déclinaisons : marketing sensoriel, tribal, viral,
etc. (cf. figure 1, p.85 : essai de panorama généalogique des innovations marketing).
5
Le consommateur dont comportement a radicalement changé, se laisse plus volontiers
guider par la passion, si on lui en offre l’occasion, que par la raison. Auparavant la
consommation devait répondre à des besoins primaires, aujourd’hui elle doit surprendre.
Les approches marketing ont du se sophistiquer pour séduire ce nouveau consommateur. Elles
ont dus mettre en situation le produit aux bons moments et aux bons endroits.
Le nouveau consommateur se caractérise par des variables individuelles comme
l’hédonisme, l’affect, l’esthétisme, la volonté d’appropriation mais aussi par des variables
sociologiques ou psychologiques comme la recherche identitaire, la recherche de lien social,
la culture de la nostalgie et une nouvelle relation au temps et à la distance. Ainsi le
consommateur perçoit le temps et la distance différemment, en effet il voit le temps passer
plus vite lorsqu’il vit une expérience surtout quand il peut se l’approprier, que celle-ci lui
permet de créer des liens et un sentiment d’appartenance à une communauté. A tout cela
s’ajoute le besoin de voir de belles choses, de se faire plaisir et de ressentir des émotions dans
les moments de consommation.
Cependant le consommateur n’est pas le seul initiateur de ces nouvelles tendances.
Des contraintes commerciales de plus en plus fortes, l’arrivée des nouvelles technologies et la
découverte de nouvelles formes d’influence efficaces ont aussi contribué à l’émergence de ces
nouvelles stratégies.
La concurrence de plus en plus rude et les difficultés de différenciation des produits
ont amené les entreprises à innover en mettant en place ou en rénovant des points de vente
afin de les rendre plus modernes et sensoriels. Ces rénovations nécessitent de lourds
investissements pour l’entreprise au départ, mais s’avèrent très souvent rentables. De plus, ces
points de vente sont des vecteurs d’image pour la marque. La concurrence du web, comme
nouvel outil de communication et de distribution, est une nouvelle raison pour l’existence de
ces points de vente qui permettent un contact physique avec le produit.
La découverte de nouvelles formes d’influence comme l’atmosphère sensorielle et ces
effets sur le consommateur ont permis de développer ces techniques.
Les nouvelles technologies ont, elles aussi, contribué à l’émergence de ces techniques
modernes qui ont aboutis à des points de vente toujours plus sophistiqués. Des sociétés
spécialisées dans la diffusion d’odeur, la gestion de l’ambiance sonore et l’aménagement du
point de vente sont alors nées.
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Compte tenu de ces évolutions, le marketing expérientiel a donc fait son entrée en
France au début des années 90. Cette approche se base sur le « vécu du client » et considère
que l’individu est à la recherche d’expériences à travers le processus de consommation. Il est
désireux de vivre quelque chose à travers le processus de consommation et recherche des
sensations lors de l’achat. L’expérience de consommation se traduit souvent par la présence
d’une atmosphère spéciale autour d’un produit ou dans un point de vente, c’est donc à cet
instant que le sensoriel entre en jeu. Ce marketing permet de stimuler le consommateur afin
de lui rendre son achat agréable et mémorable.
A travers ce mémoire, nous allons recenser l’ensemble des recherches existantes dans
le domaine du sensoriel et illustrer le tout par des exemples concret afin de répondre à la
problématique suivante :
En quoi l’éveil des sens, ou marketing sensoriel, influence-t-il le consommateur ?
Pour répondre à cette problématique, nous présenterons dans un premier temps un
nouvel environnement du marketing. Dans une deuxième partie, nous aborderons les
fondements du marketing sensoriel et montrerons comment il influence le consommateur.
Enfin, nous illustrerons ce mémoire par un cas pratique.
7
1 ère PARTIE
Environnement :
Dans cette partie, nous évoquerons les concepts du marketing expérientiel et sensoriel.
1. Concept du Marketing expérientiel :
Afin de présenter le concept du marketing expérientiel, nous étudierons la littérature
existante dans ce domaine pour ensuite définir ce concept et présenter ses caractéristiques.
A. Littérature en la matière :
L’expérience de consommation :
Le marketing expérientiel est un concept nouveau qui tire sa théorie d’un procédé
rhétorique du marketing classique, dans lequel il s’agit de recréer le passé en le rendant bien
réel. Par contre, la recherche d’expérience ou la consommation expérientielle, est beaucoup
moins récente. Elle est apparue avec les travaux de Holbrook et Hirschman (1982ab). Ces
articles, pionnier dans le domaine, font suite à la crise du paradigme dans la discipline du
marketing. Alors que les marketers pensaient voir arriver l’apogée du marketing relationnel
dans les années 90, ils ont vu une toute nouvelle discipline apparaître : le marketing
expérientiel. En effet, le marketing relationnel instrumentalisait trop la relation entre le
consommateur et l’entreprise. C’est pourquoi cette approche, vite essoufflée, a laissé place à
d’autres innovations telle que l’expérience de consommation. Cependant, il a fallu près de
vingt années entre l’article pionner de Holbrook et Hirschman et cette piste de refonte du
marketing (Hetzel et Volle 2002).
8
Les notions d’esthétisation et d’hédonisme sont donc apparues dans les années 80.
L’accent est mis sur le sensualisme et le vécu. Auparavant la consommation devait répondre à
des besoins primaires, aujourd’hui elle est vecteur d’identité. On est passé d’une offre
utilitaire à une offre hédonique ou le subjectif prédomine sur l’objectif. Ce ne sont plus les
attributs d’un produit qui intéresse le consommateur, ce sont les expériences que ce produit
procurent (réponses subjectives). C’est ainsi que le modèle de traitement de l’information a
fait place au paradigme expérientiel.
Holbrook et Hirshman (1982) ont développé un modèle fondé sur la recherche d’expériences
qui tentent d’analyser un comportement davantage tourné vers la recherche d’expériences
vécues plutôt que vers la recherche de l’utilité que procurent les attributs d’un produit ou d’un
service.
La recherche en comportement du consommateur n’avait jusque-là pas prêté attention aux
aspects expérientiels de la consommation. Hors chaque acte de consommation suscite une
interaction entre le consommateur et le produit.
Selon Bourgeon et Filser (1995, p. 6), « le modèle de recherche d’expériences s’attache à
l’explication des variables qui déterminent le comportement de l’individu à l’égard d’objets
ou de services dont la consommation se traduit par une expérience qui en est elle-même
source de satisfactions ». C’est ainsi que l’on détermine que dans l’acte de consommation, la
personne peut ressentir des sensations, émotions et fantasmes. De nombreuses significations
symboliques, de réponses hédoniques et de critères esthétiques ressortent de cet acte de
consommation (Holbrook et Hirshman, 1982).
Ce modèle diffère des modèles traditionnels en comportement du consommateur : au niveau
des stimuli et au niveau du processus de prise de décision (Bourgeon et Filser, 1995 ;
Holbrook et Hirschman, 1982).
Modèles de l’expérience de consommation :
La classification de Heilbrunn :
Elle permet de distinguer et mieux comprendre les différents niveaux d’attentes
expérientielles des consommateurs. Heilbrunn a défini un carré sémiotique avec quatre types
de valeur afin de mieux comprendre le consommateur et les valeurs importantes pour lui.
- L’approche pratique valorise la facilité d’utilisation, la simplicité, la qualité, le
confort...
- L’approche existentielle valorise le lien et le rapport à l’autre, le goût, la provenance
géographique des produits…
- L’approche critique valorise le rapport qualité/prix, la garantie, l’efficience, la
sécurité…
- L’approche hédonique valorise la notion de plaisir, la surprise, l’étonnement,
l’amusement…
Elle met aussi en relief une ambivalence: l’objet de l’expérience devra conjuguer des valeurs
d’usage (pratique et critique) avec des valeurs plus existentielles (utopique et ludique).
La typologie d’Holbrook :
Cette analyse, plus détaillée que la typologie d’Heilbrunn la rejoint sur plusieurs
points. Elle sert notamment de base aux marketers dont l’objectif est de mettre en place et
analyser une stratégie de marketing expérientiel et valoriser des éléments précis afin d’avoir
un impact maximal sur le consommateur.
Cette typologie est structurée autour de trois variables :
- Le caractère intrinsèque ou extrinsèque de la valeur :
o Valeur extrinsèque de l’expérience de consommation : le produit est acheté
parce qu’il permet d’atteindre un objectif et non pour ses qualités.
o Valeur intrinsèque : le produit est apprécié pour ses qualités, c’est une
expérience auto justifiée, ludique.
- L’orientation vers soi ou vers les autres de la valeur:
o Valeur orientée vers soi : l’expérience de consommation est essentiellement
destinée au propre plaisir et usage de l’individu.
o Valeur orientée vers les autres : l’achat crée de la valeur pour l’individu qui
acquiert le produit mais également pour l’entourage (proche ou éloigné).
- Le caractère actif ou réactif de la valeur :
o Valeur active : suppose une action mentale ou physique sur un objet tangible
ou intangible, et émane d’actes de consommation opérés sur ou avec un
produit dans le cadre d’une expérience de consommation.
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o Valeur réactive : résulte, quant à elle, de l’effet produit (appréhension ou
admiration) sur le consommateur par un objet, une marque ou une expérience
d’achat ou de consommation.
(Cf. Figure 3 p.87 : la typologie de la valeur consommateur de Holbrook)
Selon Holbrook, la valeur pour le consommateur réside dans l’expérience d’achat et de
consommation qu’il vit à cette occasion et non pas uniquement dans le produit acheté. Ainsi
l’acte de consommation créerait des expériences de satisfaction, de désirs ou de besoins.
Cependant, Badot et Cova (2003) soulignent les limites d’une telle grille d’analyse en
signalant une certaine redondance entre les notions abordées (efficience/excellence,
statut/estime…) et la difficulté de classer certains éléments de l’offre (rapport qualité/prix).
Cette recherche reste néanmoins une base sur laquelle il est utile de s’appuyer.
Les quatre niveaux d’expérience :
Cova et Cova (2002) signent une approche complémentaire aux typologies de valeur-
consommateur vues précédemment et proposent un nouvel axe d’action à une stratégie
marketing expérientiel efficace en décomposant l’acte de consommation en quatre étapes et
en y intégrant la recherche d’expérience :
- L’expérience d’anticipation : pendant cette phase l’individu va rechercher, planifier,
rêver, budgéter ou fantasmer l’expérience.
- L’expérience d’achat : cette phase va se dérouler lors du choix, du paiement, de
l’emballage, de la rencontre de service et de l’ambiance.
- L’expérience de consommation : cette phase inclut la sensation, la satiété, la
satisfaction ou l’insatisfaction, la transformation.
- L’expérience de souvenir : grâce à des photographies, récits ou autres éléments
matériels ou non.
Cet axe ajoute donc aux valeurs recherchées une notion de temporalité.
La roue expérientielle :
En essayant de comprendre comment créer de la valeur à travers l’expérientiel et à
partir de la grille d’analyse de Holbrook, Hetzel a abouti à la création d’un concept : « la roue
expérientielle ». Pour développer un marketing expérientiel, il faut travailler conjointement
sur cinq facettes de l’offre.
11
(Cf. Figure 4 p.88 : la roue expérientielle)
L’approche empirique : l’immersion
De nombreuses recherches utilisent la dimension polysensorielle pour comprendre la
réponse affective du consommateur. Les émotions sont la base du vécu du consommateur
(Addis et Holbrook, 2001) et ce vécu est un outil d’analyse de l’expérience.
D’autres chercheurs estiment que pour toucher affectivement le consommateur il est
nécessaire que celui-ci soit immergé dans l’expérience de consommation.
Pour une meilleure analyse, il ne faut pas limiter la recherche à l’expérience dans le point de
vente mais aussi prendre en compte l’avant consommation, soit le processus de décision
d’achat, et l’après-consommation, soit la perception de la marque.
Pour que le consommateur soit immergé, il apparaît important qu’il s’approprie l’espace de
vente. Le consommateur doit être au cœur de la création d’expérience (Firat et Venkatesh,
1995 ; Penazola et Gilly, 1999), il devient en effet acteur dans cette production : co-
producteur. L’entreprise n’intervient que pour le guider dans son expérience. Le
consommateur doit être guidé dans l’expérience. Cette démarche d’appropriation a beaucoup
été étudiée dans le domaine du point de vente et des services, mais très peu dans le domaine
du produit.
L’expérience de consommation est très vite devenue la base d’une « économie
d’expérience » (Pine et Gilmore, 1999), elle s’est ensuite développée comme une discipline
du marketing : le marketing expérientiel (Schmitt, 1999). Et depuis 2005, cette discipline
apparaît comme un concept clé de la théorie de la culture du consommateur (Arnould et
Thompson, 2005).
Tous les auteurs s’accordent à dire que la consommation doit être réenchantée, traitée comme
une expérience globale et prendre en compte à la fois les ressorts rationnels et les ressorts
émotionnels des consommateurs.
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B. Définition :
Le besoin de recherche d’expérience de consommation est le fait d’une société où les
individus sont en permanence à la recherche d’une activité, rien faire rime avec ennui et non
repos. Les individus ont systématiquement besoin de faire quelque chose d’intéressant afin de
combattre l’ennui. Bauman (1999, p. 124) remarque à ce propos : « alors que les philosophes,
les poètes et les moralistes du passé se demandaient si l’on travaille pour vivre ou si l’on vit
pour travailler, le dilemme qui préoccupe nos contemporains se formule le plus souvent ainsi :
doit-on consommer pour vivre ou vivre pour consommer ? ».
Comme nous avons pu le voir dans la revue littéraire qui précède, à ces débuts l’étude
du comportement du consommateur était essentiellement basée sur les théories behavioristes
ou cognitivistes et refusait de prendre en compte l’expérience de consommation comme
variable d’influence du comportement. Cependant avec la crise du paradigme et la refonte du
marketing, les méthodologies postmodernes sont montées en puissance. C’est ainsi qu’on a pu
observer, dans un contexte social et émotionnel, l’émergence de l’expérience du
consommateur dans la recherche de son comportement.
L’approche expérientielle, en plus de la valeur fonctionnelle, s’attache aux aspects
symboliques, esthétiques et hédonistes de la consommation qui participent à la recherche de
plaisir, de sensations ou d’émotions. Les expériences contiennent donc des valeurs cognitives,
sensorielles, comportementales et relationnelles. Cette approche expérientielle est souvent
mise en concurrence avec le modèle cognitif alors qu’elle lui est complémentaire.
Certains soulignent que, dans un monde occidental parfaitement sûr en raison du
progrès économique, technologique et social, les consommateur veulent par tous les moyens
sortir de l’ennui. Ils veulent être amusés et stimulés émotionnellement et d’une façon créative.
Puisque certaines décisions sont impulsives et non-rationnelles, le marketing expérientiel
permet aux consommateurs d’accepter cet état de fait grâce à la manière dont les entreprises
encadrent les expériences.
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Selon Caru et Cova (2006) : « le marketing expérientiel tend à proposer aux
consommateurs des immersions dans des expériences extraordinaires plutôt que des achats de
simples produits ou services. Le consommateur connaissant déjà les diverses fonctions des
produits, il est donc à la recherche de symboles, d’images et de vécu ».
« C’est la création d’expériences qui permet d’engager le consommateur dans une
relation positive, riche en sens et en sensations, avec une marque » (Mercator, 8ème édition, p.
984).
Le marketing expérientiel se définit donc comme une discipline du marketing dont le
but est de faire vivre des expériences aux consommateurs pour les sortir de leur quotidien. Il
se traduit par la création ou le récit d’une histoire et la thématisation de l’offre en laissant
toute liberté à l’individu de se faire sa propre expérience. En effet, l’individu devient co-
producteur de l’expérience. Cette caractéristique, dont nous développerons les idées, est
essentielle pour que le consommateur soit immergé dans l’expérience.
C. Caractéristiques :
Avantages concurrentiels :
- Fort élément de différenciation
- Forte valeur ajoutée à l’offre
- Outil de fidélisation
Les cinq dimensions du marketing expérientiel :
Selon Caru et Cova (2006), le marketing expérientiel se caractérise par cinq dimensions :
- Les spécificités de l’acteur :
Le marketing d’expérience doit englober un certain nombre d’activités et ne pas uniquement
se concentrer sur la satisfaction du consommateur avant l’acte d’achat.
Le consommateur n’est pas que consommateur. Il agit à l’intérieur de situations, le
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consommateur est à la recherche de sens. La consommation ne se limite pas à l’achat (Caru et
Cova, 2006 ; Vézina, 1999).
- Le processus de génération de l’expérience :
Le marketing expérientiel doit englober la totalité du processus de consommation, qui comme
décrit auparavant, se compose de quatre phases (anticipation, achat, expérience de
consommation et expérience de souvenir). Il doit donc être présent avant, pendant et après
l’acte de consommation.
- Son champ d’application principal :
A la base il était surtout présent dans le domaine des loisirs et de la restauration (Disneyland,
Planet Hollywood, Hard Rock Café …). Dorénavant il s’étend à d’autres domaines
(vêtements : Arbercrombie & Fitch, alimentaire : Grande épicerie du Bon Marché…).
- L’étendue de son impact :
Pour certains, il s’agit de réenchanter le quotidien dans la distribution (Filser, 2002), pour
d’autres il s’agit d’offrir du divertissement et un plaisir par un aménagement poly sensoriel
des points de vente (Rieunier, 2006), ou donner un autre sens à la vie des consommateurs en
quête d’identité par le fait d’être immergés dans une expérience originale.
- Sa validation sociale :
Il a été clairement vu que le marketing expérientiel avait son utilité dans la société actuelle.
Stratégie d’offre :
Comme nous l’avons vu dans de nombreuses recherches, il faut faire attention de ne
pas focaliser le marketing expérientiel dans le seul lieu commercial mais de l’étendre avant et
après l’acte de consommation. L’erreur d’un bon nombre d’entreprises est de ne s’intéresser
qu’au contexte social du consommateur dans le point de vente.
Afin de ne pas lasser le consommateur, très sollicité, il apparaît comme primordial de le
placer au cœur de la création d’expérience et d’éviter absolument de lui imposer une
expérience toute faite. Ainsi il s’appropriera mieux l’expérience dont il gardera ainsi un
meilleur souvenir.
Le marketing expérientiel est voué à disparaître s’il n’intègre pas le fait que le consommateur
a besoin de liberté et qu’il est donc nécessaire de l’intégrer dans le processus de création
d’expérience. Il ne doit surtout pas s’arrêter à la création d’expériences extraordinaires,
inoubliables dans le lieu commercial mais s’élargir à l’avant et l’après consommation.
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« Pour cela le marketer doit intégrer tois réflexions :
- L’expérience du consommateur dépasse le seul cadre du marché pour se déployer
avant et après l’acte marchand et dans des contextes non marchands,
- L’expérience du consommateur n’est pas programmable ; l’entreprise peut l’aider à
accéder à l’expérience, mais il est libre de s’approprier ou non ce qui est présenté par
l’entreprise,
- Le réenchantement de la consommation passe au moins autant par la revalorisation des
expériences les plus ordinaires et les plus simples que par une course à la démesure et
au spectaculaire. » (Caru et Cova, Revue Française de Gestion, 2006, 162, p 111).
Caru et Cova (2003) ont étudié les trois opérations d’appropriation de l’expérience générale
de consommation qui mène à l’immersion du consommateur :
- « La nidification » : l’individu recrée un chez soi avec une partie de l’expérience qui
lui est familière, familière grâce à son apprentissage, et qui lui permettra d’avoir une
bonne image de soi-même et un meilleur comportement. En effet, pendant cette phase,
l’individu recherche et identifie les points d’ancrage pour agir sur ses perceptions
physiques et mentales.
- « L’exploration » : avec le nid qu’il s’est créé, l’individu va étendre sa connaissance et
son territoire en repérant de nouveaux produits. Durant cette phase, il observe et décrit
afin de découvrir et évaluer le lieu ou le produit.
- « Le marquage » : l’individu va marquer l’expérience avec son propre sens. A ce
moment, il transforme ses impressions pour donner un sens à ce qu’il fait.
En 1976 Neisser (Caru et Cova, 2003) prétendait que le processus d’immersion était
circulaire, le consommateur passerait donc successivement par ces opérations avant d’être
immergé dans l’expérience. Or, Caru et Cova (2003) contestant cette théorie, ont démontré
que les trois opérations d’immersion étaient bien présentes mais qu’il n’y avait pas de logique
d’ordre, ni de sens. Ces auteurs ont abouti à ces résultats suite à une étude menée pendant
deux concerts Discovery à l’auditorium de Milan. Le principe de ce type de concert est de
familiariser l’auditoire à la musique classique en décomposant une symphonie avec les
morceaux les plus significatifs puis, dans une deuxième partie, de jouer cette symphonie en
entier.
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Il ressort de cette étude que l’immersion est alors facilitée lorsqu’il y a phase
d’introspection (Caru et Cova, 2003) et que cette immersion ne se fait pas en une seule fois.
En effet ce sont des petites séquences d’appropriation qui mènent à l’immersion de l’individu.
(cf. figure 5 p.89 : les séquences d’appropriation dans l’expérience).
Cependant, en l’occurrence, les résultats doivent être interprétés avec prudence compte
tenu du choix des personnes, de la salle, du concert et du type de musique. On peut conclure
que l’individu, lors d’une expérience de consommation, va être successivement face à des
moments forts auxquels il accède par des opérations de nidification, exploration et marquage
et d’autres moments moins forts lorsqu’il va s’approprier l’expérience. L’immersion est
d’autant plus facile que le consommateur connaissait l’expérience. En effet, lorsqu’un
individu connaît le chanteur dans un concert, il est immergé beaucoup plus rapidement que
ceux qui ne le connaissent pas. Les auteurs ouvrent leur recherche aux futurs travaux en
indiquant l’importance de prendre en compte les éléments subjectifs (rituels) et
l’environnement social qui jouent un rôle dans le processus d’immersion du consommateur.
En effet le modèle d’induction émotionnel est trop restreint.
La création d’atmosphère par le biais d’éléments sensoriels, d’aménagement de l’espace de
vente et la mise en scène ne suffisent plus pour l’immersion du consommateur, il est
nécessaire pour l’entreprise d’accompagner le consommateur durant l’expérience de
consommation
2. Concept du marketing sensoriel :
Afin de présenter le concept du marketing sensoriel, nous verrons la littérature
existante dans ce domaine, puis nous donnerons une définition de ce concept. Dans un dernier
point, nous présenterons les caractéristiques de celui-ci.
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A. Littérature en la matière
La notion d’atmosphère :
C’est en 1973, dans le Journal of Marketing, que Kotler lance l’idée d’atmosphère
comme outil marketing. L’atmosphère est la combinaison d’odeurs, de couleurs, de musique,
de flux et de personnes. Pour Kotler, Il s’agit de stimuler le consommateur par des facteurs
d’ambiance afin d’étudier ses réactions. Cette idée, très critiquée à l’époque par les
spécialistes des comportements d’achat, est jugée trop béhavioriste, les modèles « stimulus-
réponse » n’étant pas acceptés dans la psychologie environnementale.
Les préoccupations de l’époque s’orientent davantage vers la mesure des attitudes, vers les
cartes perceptuelles et le traitement cognitif de l’information (Rieunier, 2006).
La stimulation par les sens comme axe de l’expérience de
consommation :
« Réveiller les instincts du consommateur, mettre ses cinq sens en éveil et lui faire
vivre des expériences sensorielles fortes, voilà quelques-uns des enjeux qui s’imposent plus
que jamais aux marketers en ce début de troisième millénaire. » (Hetzel, 2002). En effet, pour
Hetzel, la simulation de tous les sens des individus est un axe fort du réenchantement des
espaces quotidiens. Cette tendance est tellement marquée qu’elle donne lieu à une forme
particulièrement spécialisée du marketing expérientiel : le marketing sensoriel. Son
fondement repose sur l’idée que la valorisation d’un ou plusieurs sens permet de renforcer
l’attrait des consommateurs pour un produit ou un service, et par conséquent entraîner son
achat (Hetzel, 2002).
Pour comprendre la réponse affective du consommateur, il faut prendre en compte la
dimension polysensorielle. De nombreuses recherches vont en ce sens : les émotions comme
base du vécu consommateur (Addis et Holbrook, 2001), la stimulation des cinq sens
(Rieunier, 2002), la théâtralisation du point de vente (Rémy, 2006). Cependant il faut faire
18
attention à la surévaluation des stimuli sensoriels dans le « modèle d’induction émotionnelle »
(Bonnin, 2002 ; Ladwein, 2002, 2003)
La recherche en comportement du consommateur :
Bien que critiquée à l’époque, les recherches ont tout de même débuté en 1974 avec
Mehrabian et Russel. Pour ces auteurs les réponses à un environnement où le consommateur
est confronté à une atmosphère sensorielle engendrent des comportements d’approche et
d’évitement modérés par des réactions émotionnelles. Ces réponses sont étudiées grâce à trois
dimension : plaisir, stimulation et domination (l’échelle PAD)
- Le plaisir : état positif qui traduit le degré de bien être et de satisfaction d'un individu.
- La stimulation : dimension physiologique qui est caractérisé par une activité physique
ou une vivacité d’esprit. Cette dimension a deux extrémités qui sont le sommeil et la
surexcitation.
- La domination : sensation de pouvoir, de contrôle ou d'influence d’un individu.
Par la suite plusieurs chercheurs ont contribué à enrichir ce modèle (Bitner, 1992 ;
Greenland et Goldrick, 1994). Il a notamment permis a Bitner (1992) de proposer un cadre
conceptuel complet (cf. figure 6, p.90 : le cadre conceptuel de Bitner).
Ce cadre présente les réactions des clients et des employés face aux différentes dimensions de
l’environnement. Ces deux types d’individus répondent de manière cognitive, émotionnelle et
physiologique à un environnement sensoriel. Ces différentes réponses influencent les clients
et les employés et affectent les interactions entre eux.
Le sensoriel et le point de vente :
Les nombreuses recherches effectuées jusqu’au début du siècle dans le domaine du
sensoriel afin de déterminer comment les stimuli d’atmosphère influençaient le comportement
du consommateur se limitaient principalement à l’observation d’un seul stimulus.
Hors l’homme dans son comportement est influencé par une interaction de stimuli. D’autres
études menées ne permettaient pas la comparaison des stimuli d’une recherche à l’autre.
19
Daucé et Rieunier (2002) se sont inspirés du modèle de Bitner pour proposer leur
cadre conceptuel (cf. Figure 7, p.91 : cadre conceptuel de l’influence de l’atmosphère sur le
comportement du client en magasin). Ce cadre ne prend néanmoins ni en compte les réactions
du personnel, ni les réponses physiologiques des clients. En effet, Daucé et Rieunier précisent
alors que le modèle de Bitner, bien que de nombreux chercheurs s’en soit inspirés, n’a pas été
validé dans sa totalité. Aucune recherche n’a été effectuée sur les réponses physiologiques des
clients. Les états émotionnels sont influencés par les stimuli sensoriels mais ils n’ont pas été
étudiés comme étant des variables modératrices. Les recherches ont été menées avec des
méthodes trop béhavioristes utilisant uniquement le quantitatif. Alors que le qualitatif
permettrait de mieux comprendre le comportement des consommateurs. C’est ce que souligne
Vernette en 2004. En effet, il met l’accent sur l’importance des études qualitatives dans la
recherche en comportement du consommateur et la recherche du sens de l’acte d’achat.
Afin de comprendre le sens de l’acte d’achat des consommateurs, cet auteur souligne
l’importance de comprendre « l’imaginaire, les représentations, les appartenances et les
identités multiples des consommateurs » et l’influence des leaders d’opinion.
Ainsi les entretiens phénoménologiques ou herméneutiques devraient être privilégiés au
détriment des focus groupe et entretiens semi directifs pour mieux comprendre le sens de
l’achat. Les approches introspectives, ethnographiques et « netnographiques », voire
éthologiques pour mieux comprendre à quel point les consommateurs sont immergés dans
l’expérience de consommation ou étudier les relations entre individus d’une même tribu.
Il soulève aussi le problème de la mesure des études.
En 2004, Lemoine fait remarquer que le marketing sensoriel n’a plus les mêmes objectifs
qu’avant. Aujourd’hui il s’inscrit dans une démarche relationnelle. Les objectifs sont de créer
un lien entre l’individu et l’entreprise alors qu’avant il s’agissait de maximiser le chiffre
d’affaires de l’enseigne.
20
Lichtlé et Plichon (2005) ont étudié la diversité des états affectifs générés par
l’atmosphère sensorielle d’un point de vente. Les études académiques montrent que
l’atmosphère joue un rôle indéniable dans le comportement du consommateur et sa
satisfaction, mais aucune d’entre elles n’a utilisé un outil de mesure adapté pour recenser les
différents états affectifs ressentis par un individu dans un point de vente. En effet, d’un point
de vue opérationnel et académique, il a été constaté, par le biais de magasins amiraux
(Rieunier, 2006), les bénéfices de l’atmosphère sensorielle en point de vente grâce à
l’évolution de la fréquentation, du taux de transformation, du panier moyen et par l’avis des
employés. Cependant, en aucun cas, le client n’a été interrogé. Ces auteurs soulignent aussi le
problème de l’appropriation par les entreprises des ces résultats de recherches.
B. Définition :
Kotler (1973), premier auteur à avoir introduit la notion d’atmosphère, la définit
comme : « l'effort engagé pour concevoir des environnements d'achat destinés à produire chez
l'acheteur des effets émotionnels spécifiques qui augmentent alors sa probabilité d'achat ».
Selon Filser, le marketing sensoriel se définit comme « un ensemble de variables
d’action contrôlées par le producteur et/ou le distributeur pour créer autour du produit ou du
service une atmosphère multi sensorielle spécifique, soit à travers la communication en sa
faveur, soit au travers de l’environnement du produit au point de vente ».
« Le Marketing Sensoriel est une déclinaison du marketing qui vise à stimuler les
achats et à conforter le lien entre la marque et ses clients grâce à la sollicitation des 5 sens
dans le cadre des actions menées sur le produit, la distribution et la communication »
(Rieunier et Daucé, 2006)
Ainsi le marketing sensoriel est la combinaison de techniques marketing visant à créer
une atmosphère, par l’utilisation d’un ou plusieurs sens, autour d’un produit, d’un service ou
d’un lieu de vente.
21
La vue, le toucher et le goût (dans les produits alimentaires) font évidemment depuis
longtemps partie du marketing produit. Le marketing sensoriel est surtout apparu avec
l’utilisation de sens tels que l’odorat et l’ouïe.
C. Caractéristiques
Un nouveau consommateur :
Le sensoriel a fait son apparition dans le domaine alimentaire dans les années 50. Il
s’agissait pour les entreprises de mettre en valeur leurs produits afin de se différencier de la
concurrence et de renforcer les caractéristiques des produits. Ainsi les senteurs ne servaient
plus à masquer les odeurs désagréables du produit mais à le faire vendre. C’est ainsi que
Procter & Gamble sortit en 1966 son premier liquide vaisselle parfumé au citron pour
renforcer les caractéristiques du produit (l’idée de son pouvoir dégraissant). On constate donc
une congruence entre odeurs et positionnement du produit. Les entreprises sont donc
devenues désireuses de rendre la consommation plus hédonique afin de mieux satisfaire un
client devenu de plus en plus exigeant et en perpétuel recherche d’expériences. Certaines
entreprises ont aussi cherché à satisfaire la nostalgie de leur clientèle. Nature et Découverte
l’illustre bien avec ses parfums d’ambiance : « mémoire d’un instant », « petit goûter
d’automne », « l’école buissonnière » ou son logo olfactif : l’odeur de cèdre diffusée à
l’entrée du magasin.
Pour les auteurs qui ont contribué à développer cette nouvelle voie de recherche, ce
nouveau consommateur n'est pas uniquement un destructeur de biens mais, également, un
producteur de sens (Filser, 2002) qui vit des expériences positives ou négatives à travers le
processus de consommation (Hetzel, 2002). On peut même parler de co-production
d'expérience (Benavent et Evrard, 2002). A travers ses expériences, le consommateur ne fait
pas seulement appel aux valeurs utilitaires et cognitives, mais à son imaginaire, à ses sens, à
des valeurs hédonistes, ludiques, esthétiques, de spiritualité, voire au sacré (Holbrook, 1982).
Dans ce contexte, les travaux les plus récents considèrent la fréquentation des magasins en
tant que comportement autonome, et pas uniquement motivée par la recherche d'un produit ou
d'un service (Filser, 2002).
22
Un outil de différenciation :
Véritable outil de différenciation qui permet de stimuler le consommateur et
d’influencer son état émotionnel (affect) dans un contexte concurrentiel de plus en plus rude
(standardisation des produits : attributs tangibles et fonctionnels).
On note l’importance du cognitif, de l’affectif et du comportement du consommateur. Les
sens interagissent entre eux (Filser, 2003) et stimulent ce consommateur dont le
comportement est alors affecté. L’atmosphère du point de vente répond à un besoin
expérientiel (différent du besoin fonctionnel).
Le rôle des cinq sens :
Les cinq sens jouent un rôle tout au long du processus de consommation : pendant l’achat,
pendant la préparation puis après la consommation. Ils sont en interaction permanente avec
d’autres attributs du produit (packaging, marque, ergonomie …) et vont permettre son
évaluation par le consommateur. Il est évident que les sens interagissent entre eux et
modifient les perceptions du consommateur à l’égard du produit.
Le marketing sensoriel qui s’est beaucoup développé ces dernières années, pris dans sa
globalité, permet de faire vivre une expérience de consommation grâce à la stimulation des
cinq sens. Il peut ainsi donner un sens à la consommation, sens de signification, on parle alors
de sensualisme, et débouche sur la mise en éveil de la fibre sémiologique du consommateur
(Hetzel, 2004).
Pour Lichtlé et Plichon (2005), l’affect du consommateur influence autant les mécanismes
cognitifs que le niveau de satisfaction du client. Donc, une entreprise peut augmenter son
niveau de satisfaction sans pour autant changer ou faire évoluer son offre.
Ils influencent aussi la perception client du point de vente, de l’assortiment et influence le
comportement du client en magasin (temps passé, perception de ce temps, recherche de
l’information, échanges avec le personnel, intention d’achat …) (Babin et Attaway, 2000).
D’où la nécessité de disposer d’un outil de mesure efficace pour être en mesure de mettre en
place la meilleure combinaison atmosphérique. Comme il a été soulevé précédemment, les
outils de mesure dans ce domaine ne sont pas encore au point et il est très difficile d’évaluer
les états émotionnels des consommateurs.
23
Comme nous avons pu le voir dans cette partie, le consommateur a évolué et se
comporte différemment, ce qui a amené le marketing à se refondre.
Ainsi, sont nés les disciplines du marketing expérientiel et sa variante le marketing
sensoriel. Dans la deuxième partie, nous aborderons les fondements du marketing sensoriel et
montrerons comment il influence ce nouveau consommateur.
24
2 ème PARTIE
L’influence sensorielle sur le consommateur
Aujourd’hui, les entreprises disposent d’un cadre sur lequel elles peuvent agir pour
gérer une expérience et en créer de nouvelles. Elles peuvent facilement jouer sur « l’habillage
expérientiel » de l’offre. La mise en scène de cette offre se fait en jouant sur plusieurs
variables tels le décor, l’intrigue, le récit. Ces variables permettent alors de faire interagir de
manière ludique les produits et les consommateurs dans le cadre de rituels d’usage ou de
communauté. Dans la société actuelle de consommation de masse, le marketing expérientiel
peut être un bon élément de différenciation et de création de valeurs pour l’entreprise.
Ritzer propose à la fois une analyse du besoin d’expérience chez le consommateur et
une analyse de la production de cette expérience par les entreprises. Selon lui, l’offre se
concentre sur la performance fonctionnelle et mesurable des biens et des services en omettant
un caractère surprenant pour le consommateur. La consommation est désenchantée, les
institutions doivent rechercher les moyens de créer ce réenchantement. La perspective
postmoderne est donc le réenchantement de la consommation pour que l’acte d’achat soit
enrichi, au-delà de son rôle uniquement fonctionnel, notamment par la théâtralisation du point
de vente. Cette théâtralisation signifie que la valeur de l’expérience ne réside plus seulement
dans les caractéristiques du bien, mais dans sa mise en scène et la valeur que le consommateur
lui donne au travers de son interprétation. On peut prendre comme exemple de ce type
d’application la démarche suivie par la grande distribution pour transformer les hypermarchés
en lieux de vie (ex : le West Edmonton Mall au Canada, le magasin Auchan de Val d’Europe
avec son espace maternité).
Il existe une infinité de moyens d’atteindre le consommateur. Les plus utilisés
aujourd’hui sont la stimulation des cinq sens, la surprise, la création d’un lien et l’utilisation
de ce à quoi renvoie la marque.
25
Le fondement du marketing sensoriel repose sur la valorisation d’un ou plusieurs sens
qui permettrait aux entreprises d’augmenter leurs ventes tout en optimisant l’attrait et l’intérêt
des consommateurs pour leur produit ou leur service. La diffusion d’odeurs agréables, une
musique entraînante, des couleurs appropriées sont autant de facteurs à considérer dans le
cadre de la vente. Ils permettent également de renforcer l’identité et la différenciation d’un
produit ou d’un service, de l’améliorer et de favoriser son image auprès du grand public. En
stimulant le grand public, on crée une relation plus personnelle avec le consommateur.
Nous allons donc aborder dans cette partie le thème de la théâtralisation de l’offre
grâce à une bonne combinaison des sens. Nous recenserons ensuite les différentes réactions
du consommateur face aux stimuli sensoriels et tenterons de répondre à la question de l’avenir
du marketing sensoriel.
1. Thématiser l’offre :
La recherche en marketing sensoriel s’est essentiellement développée autour de la
création d’une ambiance ou atmosphère dans un point de vente. Les derniers travaux sont
ceux de Rieunier et al. (2006). Ils nous ont permis de faire le point de la manière la plus
judicieuse de développer une stratégie en marketing sensoriel. Pour une question de pratique,
nous recenserons tour à tour les objectifs et composantes des différents sens. Cependant, il
paraît logique de les étudier dans leur globalité afin d’obtenir de meilleures performances.
A. Vue :
La vue jour un rôle essentiel dans l’acte d’achat. C’est le premier sens utilisé par le
consommateur pour se donner une idée de la qualité d’un produit. Ainsi le choix d’une
couleur ou d’une forme va être déterminant et provoquera chez le consommateur des réactions
cognitives, comportementales et émotionnelles qui influenceront sa perception du produit et
par conséquent sa préférence pour celui-ci (Grunert et al., 2001 ; Jayson et al., 2001).
Par exemple, lors du lancement de Perrier Fluo, Perrier souhaitait toucher une cible de jeunes
26
adultes, ce qui s’est traduit par l’utilisation de codes couleurs forts, comme le rose acidulé, le
bleu glacier ou le jaune safran.
« 80% des informations qui nous parviennent sont visuelles » (Rieunier et Roullet, 2006,
p.134), d’où l’importance de bien gérer ce facteur d’ambiance. Or, il existe très peu d’études
sur ce sujet, très certainement à cause de la difficulté de mesure et d’interprétation des
résultats. La couleur se définit par trois dimensions : teinte, luminosité et saturation.
Composantes de l’atmosphère visuelle :
- Couleurs.
- Lumières.
- Architecture.
- Merchandising et signalétique
- Communication et PLV
- Propreté.
Objectifs :
- Affectifs :
Les couleurs influencent les émotions. Une émotion est caractérisée par deux dimensions : sa
valence, c’est-à-dire l’agréable versus le désagréable, et son activation, qui peut être peu
intense ou très intense. L’activation a deux composantes : l’une positive, on l’appelle
l’activation énergétique, et l’autre négative, c’est l’activation tensorielle. L’activation dépend
de la couleur. Ainsi de grandes longueurs d’ondes (couleurs chaudes, telles que le violet ou le
rouge) excitent d’avantage que les courtes longueurs d’onde (couleurs froides, tel que le bleu).
A cela s’ajoute la chaleur de la couleur qui vient influer non pas sur l’énergie mais sur le
stress de l’individu. C’est pourquoi la restauration rapide, type Subway ou Mac Donald’s,
utilise des couleurs chaudes et intenses, afin d’accélérer le taux de rotation de la clientèle.
Lorsque l’on parle d’affect on parle aussi de préférence. Il faut bien tenir compte des
convergences et différences de couleurs dans le monde. La préférence est liée à l’âge, au sexe,
à la personnalité et à son apprentissage.
- Cognitifs :
27
La couleur a une influence sur la perception du temps passé en magasin et elle est liée au
niveau d’activation de l’environnement. Dans un environnement aux teintes chaudes, la
perception du temps est réduite (Rieunier et Roullet, 2006). Ainsi une couleur chaude attire
mais amène moins de satisfaction. Par conséquent, il est souvent conseillé d’utiliser des
couleurs chaudes à l’extérieur du magasin pour attirer la clientèle et d’employer des couleurs
froides ou chaudes à l’intérieur suivant l’objectif de comportement voulu par l’enseigne. La
vue a aussi une influence sur l’évaluation du produit, ainsi, en présence de couleurs froides
l’objet est évalué comme plus cher (Bellizi et Hite, 1992). Les couleurs ont aussi la vertu de
changer la perception de l’espace. Ainsi les couleurs pastel donnent l’impression d’un espace
plus vaste.
Il faut aussi faire très attention aux associations symboliques que les couleurs suscitent.
Certaines couleurs sont appréciées et signifient quelque chose dans un pays, et dans d’autres
elles n’évoquent rien.
- Comportementaux :
Les couleurs influent aussi sur le comportement en point de vente. En effet, les couleurs
chaudes favorisent les achats d’impulsion et augmentent le taux de rotation des clients (ce
sont des couleurs activantes) alors que les couleurs froides favorisent les achats réfléchis et
augmentent le temps passé des clients en point de vente (couleurs plus relaxantes). Une
lumière forte contribue à des comportements d’approche (Areni et Kim, 1994 ; Summers et
Hebert, 2001), en effet les clients prendraient en main et passeraient plus de temps en rayon
lorsque la lumière est forte ou du moins lorsque l’assortiment est bien éclairé dans une
ambiance intimiste.
Toutes les études dans le domaine ont été menées sur la couleur, mais aucune ne prend
en compte la saturation ou la teinte de la couleur. Or, selon certains auteurs, ce serait ces
composantes de la couleur qui influeraient le plus sur l’activation (Valdez et Mehrabian,
1994; Lichtlé, 2002).
En termes d’innovation, ces dernières années, on peut citer l’emploi d’écrans plasma
diffusant de la publicité en continu dans les espaces de vente. Ainsi dans un bon nombre de
points de vente vestimentaires, on peut visionner les défilés de la marque (Etam, Morgan, …)
Décathlon a mis en place un espace vidéo où le client peut voir des séquences sportives
entrecoupées de spots promotionnels.
Etant donné le niveau de saturation d’informations visuelles, ce type de communication
28
présente de nombreux avantages, surtout qu’il a été prouvé que le mouvement ou l’impression
de mouvement a une attractivité plus forte. Ls clients s’arrêtent plus facilement devant une
vitrine avec un écran car l’œil est attiré par ce qui bouge. A New York, sur la cinquième
avenue, en 2006, un magasin avait mis de réels mannequins dans les vitrines pour attirer l’œil
des passants et les inciter à entrer dans le magasin.
A noter qu’il y a une congruence entre la vue et l’odorat : « les couleurs ont une
odeur ». En effet, l’aspect visuel du produit va modifier la perception de l’odeur du produit.
Plusieurs études l’ont démontré (Gilbert, Martin et Kemp, 1996). Il en est de même pour le
goût.
B. Odorat :
Il n’est pas nouveau d’avoir recours à une ambiance olfactive. Ce sont les moyens mis à la
disposition des entreprises qui sont récents. En effet, avec le développement de la parfumerie
et des nouvelles technologies, les odeurs sont devenues un outil marketing puissant pour agir
sur le consommateur.
Composantes de l’atmosphère olfactives :
- Senteurs d’ambiance utilisées par le magasin (bougies, encens, diffuseurs
d’odeurs).
- Odeurs liées à l’environnement du magasin (produits, personnes, rue, centre
commercial, restaurants).
Objectifs :
- Affectifs :
Les émotions sont indissociables du comportement. Elles permettent à l’individu d’évaluer le
produit et de se préparer physiologiquement et psychologiquement à agir (Rieunier et Daucé,
2006).
29
D’un point de vue physiologique, il est impossible de tirer des conclusions sur les effets
stimulant ou relaxant d’une odeur, par contre de nombreuses mesures verbales ont été
établies. Le fait que ça sente bon ne suffit pas, il est nécessaire d’avoir une congruence avec le
positionnement du magasin.
- Cognitifs :
L’ambiance olfactive permet d’obtenir une meilleure évaluation du produit. L’étude de Laird,
en 1932 (Rieunier et Daucé, 2006), la première dans le domaine, va en ce sens. Elle est
ensuite confirmée en 1940 par une étude faite par l’Université Colgate de Hamilton sur des
bas en nylon mais aussi véridique lorsque le produit est moins plaisants (Spangenberg,
Crowley et Henderson, 1996). Plus il y a congruence et plus l’évaluation est positive et la
mémorisation importante (Morrin et Ratneshwar, 2000).
- Comportementaux :
o Fuite/approche : la fuite étant provoquée par une odeur désagréable, et l’approche par une
odeur agréable. Cependant l’approche ne peut être de même intensité que la fuite.
o Temps passé en magasin et perception de ce temps : une étude menée par Rieunier et
Daucé (2006) pour les magasins Caroll a montré que les clients passaient plus de temps et
percevaient ce temps comme moins long lorsqu’ils étaient en présence de certaines
senteurs. Cette étude confirme les précédents travaux (Spangenberg, Crowley et
Henderson, 1996 ; Daucé, 2000).
o Achats d’impulsion : favorisé par une meilleure évaluation du produit. Il n’y a cependant
pas eu de recherche sur le domaine.
A cela vient s’ajouter le profil du client, qui selon qu’il est hédoniste ou utilitaire sera plus ou
moins sensible aux facteurs d’ambiance.
Les centres commerciaux s’intéressent de plus près à l’odorat depuis quelques années.
Les distributeurs ont compris que le parfum diffusé sensibilise le consommateur et l’incite à
rester plus longtemps dans le magasin et à apprécier davantage les produits qui y sont vendus.
Il s’agit d’une technique peu coûteuse et qui améliore sensiblement la perception d’un point
de vente. Certains Leclerc diffusent à certaines périodes de l’air iodé au rayon poissonnerie et
des senteurs de fruits et légumes. On peut également citer aussi Nature et Découvertes qui a
basé ses concepts sur les fondements du marketing sensoriel et intègre les facteurs olfactifs
pour que les senteurs procurent un sentiment de bien-être. En effet il a été démontré que la
diffusion d’une odeur agréable avait un impact positif sur la perception d’un point de vente
(Chebat et Michon, 2003).
30
Des études scientifiques ont montré que nous étions tous dépendants des odeurs
(Maille, 2001), et que la perception et la mémorisation sont spécifiques… (Rieunier, p.97).
C. Ouïe :
D’un point de vue technique, il est possible de gérer une ambiance sonore depuis le
début des années 20. À l’origine les sociétés musicales, comme la société Muzak, proposaient
leurs services pour accroître la productivité du personnel. C’est en 1927, que l’ambiance
sonore fait sa première apparition dans l’univers commercial avec l’enseigne Monoprix.
Aujourd’hui il existe un bon nombre de sociétés spécialistes dans le domaine : Mood Media,
AEI Music Network, Canal Music, Midis, … (Liste plus détaillée : Rieunier p. 56).
Composantes de l’atmosphère sonore :
- Musique d’ambiance utilisée par le magasin (radio, CDs, compilations, …).
- Bruit du magasin (produits, machines, consommateurs).
Objectifs :
L’ambiance sonore permet à l’entreprise d’atteindre plusieurs objectifs, cognitifs, affectifs et
comportementaux qui ne sont bien évidemment pas tous atteignables à la fois :
- Affectifs :
La musique doit évidemment plaire aux individus qui l’écoutent, par conséquent elle doit être
adaptée aux goûts des clients. Elle doit être de nature « enjouée » pour rendre la
consommation gaie.
- Cognitifs :
La musique peut :
o Indiquer la cible du magasin : âge, sexe, et/ou catégorie socioprofessionnelle.
o Montrer l’univers du magasin et/ou son origine.
o Donner une ambiance de fête.
o Attirer le client sur une catégorie de produit.
31
- Comportementaux
La musique doit inciter les achats d’impulsion. Elle a aussi pour but de ralentir ou accélérer la
visite en magasin.
(Rieunier et Gallopel-Morvan, 2006).
La musique d’ambiance dans un magasin permet de stimuler le consommateur. Tous
les éléments sonores contribuent à l’identité d’un produit ou d’un lieu et créent un lien
harmonique entre ceux-ci et le client. On s’aperçoit aujourd’hui que les ambiances sonores se
personnalisent dans les points de vente afin de mieux correspondre aux goûts musicaux de la
clientèle. On retrouve ainsi de la musique hip hop dans les magasins type Foot Lockers
destinés à une clientèle plutôt jeune, une tendance jazz chez Celio correspondant plutôt à une
cible de jeunes actifs. Ainsi la musique est un moyen simple et peu coûteux d’augmenter les
ventes et de fidéliser la clientèle.
D. Toucher :
Il existe que très peu d’études sur le toucher. La recherche en marketing s’y est peu
intéressée alors que le point de vente suscite de nombreuses réactions tactiles. C’est « le sens
le plus performant en ce qui concerne la perception de la matière et revêt, d’une autre part,
une dimension hédonique non négligeables » (Rieunier, Maille et Siekierski, 2006, p.172),
d’ou son importance.
Nous avons trois types de sensations tactiles :
- Sensations cutanées : liées au contact avec les produits, les portes, meubles, personnel
et autres clients …
- Sensations thermiques : liées aux variations de température dans le point de vente.
- Sensations « kinesthésiques » : liées au déplacement dans le magasin.
On dit que le toucher peut être « actif » (volontaire) ou « passif » (involontaire).
Le pouvoir du toucher n’est plus à prouver. Le contact direct avec le produit procure une
sensation de plaisir, apaisante, rassurante.
32
Composantes de l’atmosphère tactile :
- Matières (assortiment de produits, sols, mobilier …).
- Personnes
- Température, humidité, air.
Objectifs :
- Cognitifs:
Par le toucher, le client acquiert des informations sur l’objet. On l’appelle le toucher
« instrumental », il donne des informations sur la forme et la matière de l’objet et amène à
l’évaluer.
- Affectifs :
Le toucher peut avoir pour objectif de faire plaisir à la personne. On l’appelle alors le toucher
« autotélique ». Il procure alors un sentiment de satisfaction ou d’insatisfaction. Selon le
sentiment alors ressenti, le client va abréger ou prolonger le toucher.
- Comportementaux :
Désir ou non d’achat du produit. On dit souvent que 80% des produits pris en main vont dans
le panier du consommateur.
La manipulation d’un produit influence positivement les réponses cognitives,
affectives et comportementales du client. Il peut y avoir méfiance à l’égard du produit
lorsqu’il y a interdiction de toucher mais aussi frustration de la part de l’individu, c’est le cas
des consommateurs hédoniques. Le toucher interpersonnel a aussi son importance dans
l’ambiance du point de vente. Ainsi il a été montré que le toucher interpersonnel
client/employé avait une influence positive sur les réponses cognitives, affectives et
comportementales ce qui n’est pas le cas du toucher client/client qui lui peut même avoir une
influence négative (signe d’agression ou violation de l’espace personnel). L’influence globale
a aussi son importance, il est donc important de soigner la température et l’aménagement de
l’espace.
33
Les facteurs tactiles ont une influence sur les réactions comportementales, affectives,
cognitives du consommateur qui sont déterminants dans l’acte d’achat. Lors de recherche,
nous avons pu remarquer que le toucher est en mesure de renseigner le consommateur sur les
qualités et les fonctions d’un produit. D’autre part, le consommateur est très sensible à la
matière des produits.
C’est pourquoi Renault a élaboré le premier référentiel tactile « sensotact » qui permet
d’identifier et de quantifier les sensations du toucher afin de mieux répondre aux attentes des
consommateurs. De nombreux leaders européens, soucieux de la perception sensorielle de
leurs produits tels que Smoby, Braun, Décathlon ou Reynold, l’utilisent déjà. Enfin, dans
l’univers du prêt-à-porter, Prada a introduit dans ses poches de pantalon des petites pièces de
tissus veloutés qui donnent une sensation de confort et de douceur.
Le marketing tactile peut aussi transmettre une promesse au moment de l’utilisation. C’est le
cas de Dim qui a mis en place une gamme de collants enrichis en produits cosmétiques aux
vertus hydratantes et amincissantes.
E. Goût :
Le goût est un sens qui peut être sollicité dans le cadre des produits alimentaires et
donc concerne les qualités intrinsèques du produit. C’est pour cette raison que les industriels
d’aujourd’hui tentent de mieux comprendre les mécanismes du goût et essaient de détecter les
saveurs qui plaisent. L’objectif est de rassurer le consommateur sur les qualités du produit,
donner une dimension de plaisir, d’imaginer de nouvelles saveurs et de se différencier par
rapport à la concurrence.
Charal à su créer une image de qualité en présentant ses viandes avec une campagne
publicitaire basée sur la tendreté et le goût. Les fabricants de glaces et de sorbets regorgent
d’imagination pour créer de nouvelles saveurs. Nestlé avec sa marque « la laitière » a
récemment sorti les parfums « pomme tatin façon caramélisée », ou « tarte citron
meringuée ». On retrouve les mêmes genres de saveurs dans les variétés de yaourts. Dans le
domaine des cosmétiques, le goût est également un élément essentiel. L’Oréal a sorti un
nouveau gloss « Glam Rhine Sorbet » aux saveurs fruitées.
34
Composantes :
- Dégustations à discrétion des clients sur le point de vente.
- Restauration et café présents dans le point de vente.
Comme nous avons pu le constater dans l’énumération des différents sens, le choix
d’une stratégie d’atmosphère répond à un certain nombre d’objectifs que l’on a pu classifier
dans trois groupes bien distincts : objectifs cognitifs, affectifs et comportementaux. Dans la
partie suivante, nous allons donc recenser les différentes réponses générées par un
environnement multi-sensoriel.
2. Réactions clients :
Comme nous avons pu le constater lors du développement des différents sens, la
stimulation sensorielle suscite des réponses cognitives, affectives et comportementales chez le
consommateur. Nous allons donc les étudier et présenter ensuite les variables modératrices.
A. Réponses cognitives :
Les variables d’atmosphère renforcent l’image des produits et des points de vente. Les
entreprises en sont conscientes. Les attributs d’un stimuli influenceraient les attributs de
l’enseigne et aurait un pouvoir d’évocation.
C’est notamment dans le domaine de la musique d’ambiance que la réaction cognitive
a été démontrée. En effet, la musique de variétés dans un magasin de vêtements donne une
impression de bas de gamme à l’enseigne (vs. musique classique vs.musique new age ; Yalch
et Spangenberg, 1993). La musique classique amène une image spirituelle, sophistiquée,
féminine et sensuelle à une cafétéria et les clients sont prêt à payer plus cher, une image bas
de gamme lorsqu’elle est easy listening, et de tranquillité lorsqu’il n’y a pas de musique
(North et Hargreaves, 1998).
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Mais la réaction cognitive a aussi été démontrée avec les stimuli visuels et olfactifs. Un
professeur de la Colgate university a montré, lors d’une enquête, que les femmes trouvaient
les bas en nylon plus doux et plus résistants lorsqu’ils était parfumés (étude menée avec trois
bas identiques : deux d’entre eux étaient parfumés avec des senteurs différentes et le dernier
n’était pas parfumé).
Des recherches ultérieures et plus récentes ont permis de confirmer cette théorie. Les produits
sont perçus comme étant de meilleure qualité et mieux évalués par le client lorsqu’ils ont des
odeurs agréables (Spangenberg, Crowley et Henderson, 1996).
Il s’agit pour les enseignes de donner le positionnement voulu aux clients. C’est
surtout utile dans le domaine de la distribution pour les points de vente qui n’ont pas accès à
la publicité.
L’inférence :
Le consommateur évalue le produit par ses qualités extrinsèques (« inférence ») et
l’environnement d’achat (Keaveney et Hunt, 1992) lorsqu’il ne peut évaluer le produit avec
ses qualités intrinsèques ou qu’il ne peut se référer à une expérience passée avec le produit ou
l’enseigne (Pinson, 1986 ; Zeithaml, 1988).
La réaction d'inférence influencée par les stimuli d’atmosphère est largement utilisée sur les
cinq sens dans le domaine de la distribution. Par exemple, l’enseigne Celio dont la volonté est
de donner un positionnement américain a ses produits ne diffuse pas de musique française
dans ses points de vente. Elle diffuse uniquement de la musique anglo-saxonne. Le Bon
marché, positionnement haut de gamme, diffuse en grande majorité de la musique classique
via sa propre radio. Il utilise aussi d’autres stimuli pour se conférer ce positionnement
luxueux : aménagement de l’espace, couleurs, lumières, ameublement, merchandising, …
Nature & Découverte, sans le vouloir, par la diffusion d’odeurs de cèdre à l’entrée de ces
points de vente et perceptible depuis le trottoir s’est créé une identité olfactive, un logo
olfactif, qui dorénavant, lui est systématiquement attribué par les consommateurs. C’est le cas
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aussi d’Evian, en l’occurrence volontaire, qui s’est crée une identité sonore avec l’utilisation
d’une musique propre dans ses spots publicitaires : I Will rock You.
En ce qui concerne les sensations tactiles, on peut citer l’exemple de l’enseigne
Princesse Tam Tam qui offre à sa clientèle des cabines d’essayage grand luxe et ultra
confortables. Les cabines, généralement de couleur parme, sont en satin matelassé. Le Bon
marché, quant à lui, a tapissé de moquette son espace de lingerie afin d’offrir une image de
douceur à sa clientèle féminine.
Les sensations tactiles peuvent également aider à acquérir le positionnement souhaité : le tissu
évoque l'intimité, la pierre, la solidité, le bois, la chaleur, le fer et la technicité.
Du point de vue gustatif, c’est la présence d’espaces de restauration qui est utilisée pour la
réaction d’inférence : Lafayette gourmet, le restaurant Colette.
L’évocation :
L’atmosphère a un fort pouvoir d’évocation car le consommateur a tendance à associer
à un produit des stimuli d’atmosphère dont il se rappellera dans le futur. Lorsqu’ il est de
nouveau confronté à cette atmosphère, le consommateur se rappelle son expérience passée.
« Les sensations de l'individu sont en général mémorisées avec l'objet qui les a provoquées
puis réactivées lors d'une nouvelle exposition au même stimulus » (Daucé et Rieunier, 2002).
Des études ont montré que les variables atmosphériques influençaient le choix de
produits. Ainsi dans un supermarché, la diffusion de musique Tahitienne favoriserait la vente
des produits tahitiens. En effet, North, Hargreaves et McKendrick (1999) ont démontré que
les clients achetaient du vin en fonction de l’origine géographique de la musique diffusée. Il y
a alors congruence. Le choix serait donc influencé. Une autre étude a montré que la diffusion
d’un stop rayon olfactif avait permis d’augmenter les ventes d’Hollywood Chewing Gum de
10 à 25%. (Daucé et Rieunier, 2002). L’évocation est donc souvent utilisée dans les
supermarchés lors des événements à thèmes.
Pour leur part, les boulangeries utilisent depuis bien longtemps la diffusion d’odeurs de
viennoiserie à l’extérieur de leur magasin pour attirer les clients.
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Inférence et évocation sont bien évidemment des variables dépendantes l’une de
l’autre.
B. Affectives :
Sous le terme affect, se regroupent différentes notions : les émotions, les humeurs, les
sentiments, les pulsions… Pour Hetzel (2002) « la prise en compte des états émotionnels de
l’individu permettrait de mieux expliquer certains aspects du comportement que les seules
composantes cognitives et l’attitude ». La dimension affective a pris de l’importance chez
l’individu ces dernières années et agit sur sa motivation d’achat.
Le consommateur ne prend plus seulement en considération des facteurs purement rationnels
ou économiques, il se laisse guider par une irrationalité ludique et émotionnelle. L’être
humain est d’ailleurs parfaitement capable de faire exister en même temps la raison et la
passion, le rationnel et l’irrationnel, la logique et l’émotion. Il est ainsi à la recherche de tout
ce qui pourra faire appel à cette dimension et le surprendre, lui procurer des émotions. Il n’est
pas sans raison l’engouement récent des individus pour les activités sportives à sensations
fortes.
Outils de mesure :
- L’échelle de PAD :
Des études en psychologie environnementale mettent l’accent sur l’influence de
l’environnement sur les états affectifs, mesurés par le biais de trois dimensions : plaisir,
activation, domination ; ont une influence sur le comportement : approche et évitement
(Russel et Mehrabian, 1976).
o Plaisir :
L’atmosphère sensorielle peut influencer l’humeur du consommateur. La diffusion de
musique d’ambiance plaisant au consommateur a une influence positive sur son humeur
(Gorn et al. 1993 ; Lemoine, 2004). C’est aussi le cas des senteurs et de la lumière (Lemoine,
2004), …
Intermarché, par exemple, qui gère sa propre radio, prête beaucoup attention aux goûts
musicaux de ses consommateurs et ne diffuse pas d’informations trop catastrophiques lors de
ses flashs info afin de ne pas influencer négativement les individus présents en magasin.
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o Stimulation :
Les individus réagissent physiologiquement aux variables d’atmosphère. L’individu
peut alors transpirer, voir son rythme cardiaque augmenter ou bien ses muscles se tendre ou se
détendre. Compte tenu de la difficulté de mesures de ces variables, il n’existe que peu
d’études sur le sujet. Les études qui ont été menées par des chercheurs en marketing sont des
réactions verbales suite à la visite de consommateurs dans un point de vente. Ainsi, les
individus se détendent dans un environnement où la musique leur plaît (Lemoine, 2002) ou
lorsqu’il n’y en a pas. Ils sont plus stimulés par des points de vente où les murs sont peints en
rouge (Bellizi, Crowley et Hasty, 1983). Ils se sentent plus dynamiques et moins énervés en
présence d’un point de vente avec une luminosité agréable (Lemoine, 2004).
L’influence des odeurs n’a pas été éclairée (Maille 2001) bien que certains auteurs
aient réalisé un inventaire des odeurs.
o Domination :
Les consommateurs se sentent libre durant l’acte de consommation, ils ont
l’impression de dominer et d’être le seul maître de leur choix.
- L’échelle de Lichtlé et Plichon :
Il existe plusieurs outils de mesure, mais aucun ne semble adapté pour réellement
mesurer et recenser les émotions ressenties par les consommateurs confrontés à une
atmosphère poly sensorielle. Ce sont les mesures physiologiques, mesures de l’expression
affective et les mesures de l’expérience subjective. Cette dernière a été utilisée par de
nombreux chercheurs. Le problème c’est qu’elle est difficilement adaptable aux domaines
autres que ceux dans lesquels les études ont été développées mais aussi difficile à appliquer
dans le domaine du comportement du consommateur. Ainsi, Lichtlé et Plichon (2005) ont
recensé les limites de cette mesure et se sont servi de l’échelle de PAD et du cadre conceptuel
de Bitner (1992) pour développer leur propre outil de mesure.
Selon eux :
o Les instruments classiques ne sont pas connus comme valides pour évaluer
les états affectifs du consommateur. Les réactions affectives dépendent du
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contexte.
o L’intensité et le contenu des états affectifs est différent selon la situation
analysée.
o Des mesures peuvent amener des confusions lorsque le choix des
oppositions n’est pas net. L’échelle de PAD, par exemple, oppose l’ennui à
la détente.
o La majorité des échelles ne tiennent pas compte de la possibilité de présence
d’états affectifs négatifs et positifs simultanément.
o Les échelles sont toutes d’origine anglo-saxonne et il n’apparaît pas
forcément légitime de les appliquer au contexte français. La dimension
activation a été la dimension la plus difficile à adapter, elle n’était d’ailleurs
pas forcément fiable et valide dans un certains nombre de recherches. Ces
instruments de mesure ont posé problème lors de leur utilisation dans de
nombreux travaux de recherche.
Ainsi pour pallier à ces différentes limites, Lichtlé et Plichon proposent un nouvel
instrument de mesure issu du contexte français. Leur étude a permis de créer une échelle à six
dimensions. La dimensionnalité et la fiabilité de l’outil de mesure ont pu être vérifiés
(analyses en composantes principales, test de sphéricité, test KMO, rotation Oblimin, test de
Kaiser).
Les six dimensions :
o Dimension « plénitude » : il s’agit d’un état de bien être dénué de toute
tension.
o Dimension « sentiment d’évasion » : l’individu se trouve en dehors de la
réalité, il plane.
o Dimension « plaisir » : on la retrouve dans l’échelle de PAD.
o Dimension « nervosité » : également présente dans l’échelle de PAD en tant
qu’activation négative.
o Dimension « détente » : présente dans l’échelle de PAD en tant
qu’activation positive. Mais contrairement aux auteurs du PAD la détente et
la nervosité sont deux dimensions différentes et non opposées.
o Dimension « sentiment de liberté » : état qui traduit les sentiments de
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manipulation.
On retrouve ainsi dans cette échelle des dimensions présentes dans l’échelle de Mehrabian et
Russel (1976) mais celle de Lichtlé et Plichon semble plus complète et moins contradictoire.
Les auteurs ont d’ailleurs démontré qu’il y avait des corrélations entre la majorité des
dimensions de l’échelle : bien être et nervosité, bien être et plaisir, bien être et liberté.
Mais aussi des corrélations faibles entre nervosité et détente, ce sont donc bien deux
dimensions distinctes. Contrairement aux travaux précédents, cette étude montre que la
détente et la nervosité ne sont pas des dimensions orthogonales.
Cette étude montre que la structure d’une échelle à 3 dimensions est trop limitée dans le cadre
de la mesure des états affectifs des consommateurs. Elle permettrait donc une analyse plus
fine et donc apporterait des résultats plus cohérents et satisfaisants, contrairement aux échelles
précédemment présentées.
Cet outil nouveau et plus complet, dont les auteurs ont montré la cohérence, permettra de
mieux analyser la satisfaction de la clientèle mais aussi les variables cognitives ainsi que le
comportement du consommateur en point de vente.
Variables modératrices :
Des vérifications empiriques ont montré par la suite que les états affectifs étaient
influencés par l’environnement physique et l’environnement social dans une atmosphère
sensorielle. Sachant que les facteurs sociaux ne pourront jamais être parfaitement maîtrisés
par le distributeur, il devient tout de même important de tenir compte de l’importance de cette
influence. Elle est considérée comme influençant le plus les réactions affectives et donc le
comportement du consommateur au sein du point de vente (Plichon, 1999). C’est pourquoi les
distributeurs doivent accorder une forte importance à l’approbation par le personnel de la
stratégie sensorielle adoptée, les former et soigner leur apparence.
C. Comportementales :
Comportement physique :
Une bonne gestion des variables de l’atmosphère influencerait physiquement le
consommateur et donc son comportement au sein du point de vente.
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En effet, un consommateur resterait plus longtemps dans un point de vente lorsqu’il
est soumis à de la musique (Yalch et Spangenberg, 1993 ; Rieunier, 2000 ; Gueguen, Jacob et
Legoherel, 2002) ou à la diffusion d’odeurs agréables (Dauce, 2000). Les individus seraient
attirés par des points de vente aux couleurs chaudes (Bellizi, Crowleyet Hasty, 1983),
prendraient en main des produits lorsque la luminosité est forte (Areni et Kim, 1994 ;
Summers et Hebert, 2001). Ainsi les variables d’atmosphère peuvent à la fois agir sur la
décision de visite ou non d’un magasin, le temps passé à l’intérieur, la circulation dans le
point de vente et la recherche d’informations ou de prise en main des produits. La plupart de
ces études ont été menées sur la présence versus absence d’une ou plusieurs variables
atmosphériques.
Achat :
Les variables atmosphériques seraient susceptibles d’influencer l’acte d’achat. Il faut
noter que l’utilisation d’une variable n’a pas forcément la même influence d’un point de vente
à l’autre.
La musique classique ferait augmenter le panier moyen (plus d’acceptabilité du prix de la part
du client) dans une cave à vin, mais empêcherait l’achat dans un supermarché (Daucé et
Rieunier, 2002).
Ainsi il a pu être observé que les clients dépensaient plus lorsqu’ils étaient dans un point de
vente avec une musique plaisante (Herrington, 1993 ; Yalch et Spangenberg, 1993 ; Siberil,
1994) et connue (Dahmane Mouelhi et Touzani, 2003), une bonne luminosité (Lemoine,
2004), de bonnes odeurs (Hirsh, 1995).
Dans le domaine de la restauration, les individus consomment plus et des produits plus chers
avec une musique lente car ils sont ainsi plus détendus (Milliman, 1986 ; Caldwell et Hibbert, 2002). Cependant les études menées n’ont pas été testées au préalable sur le symbole des différents
stimuli utilisés.
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D. Eléments à prendre en compte :
Aujourd’hui, les enseignes à l’ouverture d’un point de vente présentent aux clients un
concept abouti où l’objectif est de faire vivre une expérience de consommation par le biais
d’une atmosphère poly-sensorielle bien définie. Comme il l’a été dans l’application
opérationnelle des enseignes, la théorie s’est bien longtemps focalisée sur l’étude d’une seule
variable atmosphérique à la fois. Or, l’homme, lui, perçoit un tout, on dit que sa perception est
holistique. D’où la nécessité d’étudier les interactions entre variables atmosphériques. De plus
un certains nombres d’éléments viennent modérer les effets précédemment cités et peuvent
parfois même perturber le processus de consommation. Nous allons donc recenser dans cette
partie, les différents éléments à prendre en compte.
Les différences individuelles :
Les individus étant inégaux face à la perception sensorielle, il est important de prendre
en compte les différences individuelles. Elles ne sont pas nécessairement physiques. Elles
peuvent aussi être liées aux caractéristiques socio-démographiques ou au style de vie. Une
personne âgée ne détecte pas de la même manière les odeurs, les sons ou les objets. Les femmes sont plus sensibles aux odeurs que les hommes.
L’agrément joue aussi un rôle selon les caractéristiques sociodémographiques et
psychographiques des individus. Les goûts musicaux dépendraient du niveau d’éducation, de
l’âge et du sexe de l’individu.
Enfin, la personnalité, le niveau de stimulation optimale et la sensibilité à l’environnement
jouent aussi un rôle dans la perception des sens et le comportement de l’individu.
Les différences situationnelles :
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A la dimension physique et sociale, généralement bien maîtrisée par le distributeur,
vient s’ajouter le rôle, le temps et les états antérieurs de l’individu. Ce sont des variables
modératrices importantes à prendre en compte par les enseignes. Le consommateur achète,
par exemple, plus en présence de musique classique avec un tempo lent pendant les périodes
creuses alors que c’est tout le contraire en période de pointe (Sibéril, 1994).
3. Effet de mode ou stratégie à long terme ?
Face à un consommateur en perpétuelle évolution, souvent imprévisible, et à la
multiplicité des innovations dans le domaine du marketing, il semble pertinent et légitime de
s’interroger sur la pérennité et la place du marketing expérientiel et plus particulièrement du
sensoriel. Est-ce un concept durable, sur lequel la stratégie des entreprises peut s’appuyer à
long terme, ou, au contraire, est-ce un phénomène de mode, issu d’une tendance de
consommation passagère ? On comprend facilement comment la réponse à cette question peut
conditionner les futurs choix stratégiques et opérationnels, et leurs niveaux d’investissement,
financiers comme humains.
Aujourd’hui de nombreuses enseignes utilisent le marketing sensoriel dans leur
stratégie : Andaska, Citadium, l'Estaminet, Oliviers and Co, l'Occitane… Nous allons dans
cette partie développer la stratégie employée par deux acteurs du marché dans deux domaines
bien différents et présenter les évolutions de la discipline.
A. Exemples de réussite
- Nature et Découvertes :
Dans ce domaine, l’enseigne Nature et Découverte fait figure de pionnier et d’exemple en
matière de longévité. Françoise Vernet, directrice marketing-communication, explique que la
réussite du concept tient à la sollicitation simultanée des cinq sens en même temps.
Comme partout, le premier sens sollicité est la vue. Elle est travaillée avec peu de
communication visuelle. Selon l’enseigne, les clients ne s’y attardent pas et cela alourdirait
l’aménagement de l’espace. Elle est stimulée par les couleurs, la lumière et l’utilisation de
matériaux naturels (bois et pierre).
La musique d’ambiance diffusée permet ensuite au client de se plonger au cœur de la
nature : bruit d’eau qui coule, chants d’oiseaux, sons de la forêt … Le son peut également
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provenir des certains objets en vente (cloches, appeaux…).
Le toucher est également sollicité puisque les produits sont mis à la disposition des
clients. Ceux-ci peuvent manipuler les objets, se familiariser avec leurs formes, leurs textures.
Ce qui rend leur appropriation beaucoup plus facile et rapide.
Le goût intervient lors de la dégustation gratuite de produits vendus dans le magasin et
pendant les semaines à thèmes. La volonté de l’enseigne a été de ne pas développer un espace
de restauration dans ses points de vente mais de proposer un espace dégustation des produits
vendus dans le magasin en accord avec la saison et les thèmes proposés en magasin.
Enfin, l’odorat a une place privilégiée avec la diffusion d’odeurs de cèdre, rappelant
bien évidemment la nature, qui se dégage du magasin et qui provoque chez près de la moitié
de personnes interrogées l’envie d’y entrer. Par ailleurs, sans le vouloir l’enseigne s’est créé
un logo olfactif.
Le marketing sensoriel est donc l’un des piliers de l’offre de Nature et Découvertes.
Le succès de l’enseigne est dû notamment à l’écoute de ses clients par le biais d’études
qualitatives consommateur afin de constamment améliorer l’offre sensorielle. « 10 ans
d’évolution de l’offre sensorielle en restant à l’écoute du consommateur » (Rieunier, 2004).
Des études ont démontré que les clients venaient se ressourcer dans le magasin car cela leur
permettait un retour à la nature. D’autres clients se disaient attirés par les odeurs et les bruits
du magasin et entraient donc, les deux sens les plus sollicités étant l’ouïe et l’odorat.
- Abercrombie & Fitch :
Créé en 1892 et sujet à de nombreuses crises, l’enseigne a finalement développé dans les
années 90 un concept avant-gardiste. Limited Brands a acheté la marque et la relancé avec un
concept basé sur la séduction et la sensualité tout en conservant le point de vente d’origine
(authenticité).
Lemoine et Badot (2008) ont recensé les leviers de réussite de l’enseigne :
o Ritualisation du parcours client :
Magasin en centre-ville à peine visible, pas de vitrine, il s’agit de donner le loisir de
chercher.
Mannequins à moitié nus en guise de vendeurs, le personnel est proche de la clientèle.
À l’entrée, possibilité de se faire prendre en photo avec un des mannequins, forte
odeur de parfum et musique techno.
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Luminosité faible et musique techno pour recréer une ambiance boîte de nuit.
Vêtements parfumés pour véhiculer l’odeur jusque chez soi.
Sac avec photos des mannequins pour marquer les esprits.
Point de vente tout en bois pour créer un espace « authentique ».