Cours 3 L’égalité des sexes : une dynamique inachevée
Jan 24, 2016
Cours 3 L’égalité des sexes : une dynamique inachevée
Plan 1. Genre, rapports sociaux de sexe : Eléments de
définition 2. Du silence au foisonnement des études sur le
sexe et le genre 3 Déplacement du regard sociologique des
femmes et du conflit famille/travail vers les avantages des hommes, dans la famille, sur le marché du travail (politiques de l’emploi et du chômage) et dans l’entreprise (recrutements, filières de mobilités, salaires …)
3. Un bilan contrasté de la dynamique d’égalité : Des années 1960 à 2010 : un demi-siècle d’avancées décisives; des inégalités tenaces voire des reculs depuis les années 1980.
4. Un exemple : les ingénieurs
Le genre : histoire et définition d’un concept
Le genre, traduction de « gender », importé des Etats-Unis.
Un des premiers à l’utiliser, dans les années 1950, est le psychiatre- psychanalyste Robert Jesse Stoller qui introduit le concept « d’identité de genre » à propos de patients transsexuels qui revendiquent une identité sexuée différente de celle qui leur a été assignée à la naissance
L’opposition entre sexe biologique et sexe psychosocial est développée par la sociologue britannique Ann Oakley dans un ouvrage publié en 1972 Sex, Gender and Society
Le genre dans les sciences sociales françaises
En France, les sociologues du travail féministes (Danièle Kergoat, 1978; Le sexe du travail, collectif, 1984) ont introduit le concept de « rapports sociaux de sexe » et de division sexuelle du travail. Elles mettent l’accent sur les fondements matériels de la domination masculine : celle-ci est liée à l’assignation prioritaire des femmes à la sphère domestique et des hommes à la sphère professionnelle
L’usage du terme « genre » s’est généralisé à la fin des années 1990, défini comme « la construction sociale et culturelle de la différence des sexes » (Michèle Perrot, 1995)
S’est répandu en relation avec le développement des « études de genre » (réseaux, revues, enseignements…), mais aussi de la législation européenne et française pour les droits des femmes
Le programme théorique du genre (Laure Bereni, Sébastien Chauvin, Alexandre Jaunait, Anne Revillard, Manuel des gender studies Bruxelles, De Boeck, 2012, 1ère éd. 2008)
Le genre n’est pas une variable ni une catégorie dichotomique immuable. Il ne se confond pas avec le sexe de l’Etat Civil, ni avec le genre grammatical (masculin, féminin ou neutre)
L’usage au singulier du mot « genre » désigne un processus, un système de pouvoir, qui construit des différences et des hiérarchies entre les catégories d’hommes et de femmes.
La visée des travaux qui ont recours au genre est de déconstruire les conceptions qui fondent les identités, les rôles professionnels et sociaux des hommes et des femmes sur leur « nature » ou leur destin anatomique et légitiment la domination des hommes sur les femmes par leurs différences biologiques ou psychologiques.
Le genre est relationnel : on ne peut comprendre une catégorie (femmes ou hommes) que dans sa relation à l’autre
Du silence au foisonnement des études sur le sexe ou le genre
Les femmes invisibles : le deuxième sexe est largement absent des travaux des pères fondateurs de la sociologie du travail des années 1950-60 (Friedmann, Naville, Touraine). La figure emblématique est celle de l’ouvrier de la grande industrie. Le monde des employés de bureau (Michel Crozier) est peuplé d’êtres asexués.
Travail, famille, discriminations de la part des employeurs
Madeleine Guilbert (1966), sociologue du travail, est la première a faire sa thèse sur Les fonctions des femmes dans l’industrie : séparation des tâches selon le sexe et déni de qualification pour les femmes. Les hommes ont des qualifications, les femmes des « qualités » : patience, minutie, dextérité sont considérées comme « naturelles », proches de leur rôle de femme au foyer.
La découverte du travail domestique : le privé est politique, les inactives ne sont pas des oisives (Dephy, 1970)
L’articulation famille/travail, sexe et classe sociale : Kergoat (1978, 1982) à propos des ouvrières et le Sexe du travail (1984). La division inégalitaire des tâches dans la famille fonde les inégalités professionnelles
Evolutions des questionnements en sociologie du travail
L’analyse des relations conflictuelles entre l’activité professionnelle des femmes et la famille se déplace vers la vie privée des hommes et l’avantage procuré, dans leur carrière, par une épouse assurant le soutien émotionnel et matériel.
Les explications du phénomène du plafond de verre sont moins recherchées du côté des femmes elles-mêmes et de leur socialisation que du côté du marché du travail, des organisations, de l’histoire des professions et des implicites de la culture professionnelle
A l’école : les inégalités de classe occupent le devant de la scène, les inégalités de sexe font de la figuration
Les années 60-70 sont dominées par les théories de la reproduction des inégalités sociales par l’école et par une vision misérabiliste des scolarités des filles : Dans les Héritiers (1964), Bourdieu et Passeron, centrent leur analyse sur les étudiants en Lettres, discipline emblématique de la reproduction du capital culturel. Le fait qu’il s’agisse surtout d’étudiantes est pour eux secondaire.
Les années 80 voient percer quelques travaux tentant d’articuler mieux sexe et classe mais le débat sur les différences de sexe à l’école ne se développe dans toute son ampleur que dans les années 1990 avec les deux livres bien diffusés de Marie Duru-Bellat L’école des filles (1990) et de Christian Baudelot et Roger Establet (1991) Allez les filles!
Un demi-siècle d’avancées décisives de l’égalité
La levée des interdits juridiques Les succès scolaires des filles Les femmes au cœur des évolutions de
l’emploi Féminisation des professions
supérieures Diminution du volume de travail
domestique effectué par les femmes et généralisation du couple à deux actifs
L’émancipation civile et civique des femmes : quelques repères historiques
1944 Droit de vote et d’éligibilité accordé aux femmes 1946 Principe de l’égalité des droits entre hommes et
femmes dans le Préambule de la Constitution 1965 La femme mariée n’est plus considérée comme une
mineure. Réforme des régimes matrimoniaux 1966 La femme peut exercer une activité professionnelle
sans l’autorisation de son mari 1967 Loi Neuwirth sur la contraception 1970 La puissance paternelle est remplacée par l’autorité
parentale, suppression de la notion de chef de famille 1974 Création d’un secrétariat d’Etat à la condition
féminine 1975 Loi sur le divorce et la dépénalisation de l’adultère 1975 : Loi Veil dépénalise l’avortement 1981 Création d’un Ministère des droits des femmes 2000, 2007 : Lois sur la parité sur les listes électorales
Lois sur l’égalité scolaire et professionnelle
1924 : Identité des programmes d’études secondaires pour les filles et pour les garçons
1946 : Les femmes obtiennent le droit de se présenter aux examens de la magistrature.
1948 : Accès des femmes au notariat 1966 : Mixité de droit de toutes les formations
professionnelles et techniques 1972 : Loi sur le principe « à travail égal, salaire égal » 1972 : Ouverture de L’Ecole polytechnique. Anne Chopinet est
reçue 1ère. 1973 : Accès des filles à HEC 1973 : Ouverture du concours de commissaire de police 1975 : Interdiction de discriminer en fonction du sexe dans
l’emploi 1983 : Loi sur l’égalité professionnelle. Double signature
obligatoire sur les déclarations d’impôts. 1986 : Fusion des ’ENS d’Ulm et de Sèvres 2001 : Obligation pour les entreprises de négocier les plans
d’égalité
Lois sur la conciliation vie familiale/vie professionnelle
1909 : Loi sur le droit des femmes à retrouver leur emploi après l’accouchement
1913 : Congé payé de maternité de 4 semaines 1930 : Assurance maternité de 12 semaines pour la femme
salariée et prise en charge médicale de la conjointe 1932 : Généralisation des allocations familiales 1966 : Interdiction de licenciement d’une femme enceinte 1977 : Création du congé parental d’éducation 1985 : Création de l’Allocation Parentale d’Education (APE) pour
le3e enfant de moins de 3 ans 1993 : APE ouverte dès le 2e enfant ; création de l’AGED
(Allocation de garde de l’enfant à domicile) 2002 : Congé paternel de 15 jours rémunérés pour la naissance
d’un enfant (ou adoption) 2003 : Loi sur la garde alternée après séparation des parents 2004 : l’APE devient Complément de Libre Droit d’Activité (CLCA),
ouvre le congé dès le premier enfant pour une durée de six mois.
Succès scolaire des filles : une inversion historique des inégalités sexuées
En matière de scolarisation, le XIXe siècle est celui d’un enseignement spécifique et dévalorisé des filles par rapport à celui des garçons. Le XXe siècle consacre leurs avancées (Baudelot et Establet, 1991).
L’évolution de l’accès au baccalauréat est emblématique de cette inversion historique des inégalités sexuées à l’école
Graphique 1. Part des bacheliers selon la génération et le sexe
0
10
20
30
40
50
60
Avant 1929 29-38 39-48 49-53 54-58 59-63 64-73
Génération
% d
e b
ach
elie
rs
Filles
Garçons
Une meilleure réussite toujours d’actualité
En 2008, on dénombre 65% de bacheliers dans une génération,
70% chez les filles, 56% chez les garçons Le taux de réussite au baccalauréat est supérieur
pour les filles dans toutes les sections, y compris scientifiques : 82% contre 77%
A l’université, les étudiantes dépassent en nombre l’ensemble des étudiants en 1981, ceux de 3e cycle en 1999.
En 2010 elles représentent 44% des élèves de classes préparatoires, le tiers des promotions de l’ENA, la majorité des élèves de l’Institut National d’Agronomie, de l’Ecole Nationale de la Magistrature et de l’ENSAE
Les femmes au cœur des évolutions de l’emploi (1960-2010)
La progression de l’éducation des femmes a accompagné les grandes évolutions de l’emploi de ces cinquante dernières années :
croissance de la population active resserrée sur les 25-49 ans Salarisation : 75% à 91% (92% des femmes, 84% des
hommes). Tertiarisation : 75% des actifs de l’Europe des 15 en 2010,
66% des H, 87% des femmes. Progression des catégories qualifiées, diminution des ouvriers
et ouvrières mais progression des emplois non qualifiés dans les services, très féminisés.
Forte progression du chômage (2,5 à 10% en Europe) Développement des emplois atypiques et de la précarité
(intérim surtout pour les hommes, temps partiel pour les femmes, contrats à durée déterminée pour les deux sexes) (15% en France en 2006) : 37% de femmes à temps partiel en Europe en 2010, 30% en France
Progression de l’activité des mères
Les femmes de 25 à 49 ans interrompent moins leur activité lors des maternités. Effet de rattrapage dans tous les pays d’Europe : Italie, Espagne, Pays-Bas, Irlande.
Le 3e enfant : activité des mères toujours plus faible mais la plupart ont interrompu dès la 1ère naissance
Il s’agit d’un changement profond du rapport à l’emploi des femmes.
Taux de féminisation des Catégories socio-professionnelles de 1954 à 2007 (INSEE, Recensements)
1954 1962 1975 1982 1990 1999 2007
Agriculteurs 41,5 38,4 33,7 37,1 36,9 34 29,1
Artisans, commerçants
37,2 35,3 32,7 33,6 31,8 30,1 27,7
Cadres, prof. intellectuelles sup
13,3 16,3 21,8 24,8 30,6 34,4 37,9
Professions intermédiaires
36,7 33,9 37,6 40,3 42 46,1 51,5
Employés 52,8 66,4 71 72,4 76,1 76 76,2
Ouvriers 22,7 19,6 20,6 20,7 19,1 19,6 18,8
Ensemble 34,8 34,4 37,4 40,7 42,4 44,7 47
La bourgeoise laborieuse : 3 vagues d’entrée des femmes dans les professions de prestige
Première vague, dans les années 1880-1900 : enseignantes de lycée, médecins et avocates.
Années 1920 : professions d’encadrement dans la fonction publique, dans des espaces et fonctions d’assistance légitimes pour des femmes - inspectrices de Maternelles et d’écoles de filles du primaire, assistantes sociales…. Ouverture d’HECJF et de l’EPF (Ecole polytechnique féminine)
La troisième vague, amorcée à la fin des années 1960, est celle de la véritable mixité. Les derniers verrous dans l’accès aux professions, liés à l’usage des armes et à l’exercice de l’autorité au plus haut niveau, dans les grandes entreprises et dans l’Etat, sautent avec l’ouverture des concours aux écoles des Mines, des Ponts (1969), de Polytechnique (1972), d’HEC (1973), de commissaires de police (1974).
Evolutions de la famille : vers une plus grande démocratie conjugale
Recul du mariage au profit de l’union libre
Recul de l’âge au premier enfant Resserrement de la taille de la famille
autour de 2 enfants Augmentation des divorces, le plus
souvent à l’initiative des femmes Le couple à deux actifs est devenu la
norme
Travail domestique : l’impossible parité ?
Inertie du non partage du travail domestique toujours assuré à 80% par les femmes, d’après les enquêtes sur les emplois du temps de l’INSEE réalisées depuis les années 1950.
Mais baisse considérable du temps de travail domestique global réalisé par les femmes : Diminution constante de la part des femmes au foyer à partir des années 1960. Ces femmes et mères qui travaillent, prennent leurs repas de midi à l’extérieur, s’équipent en machines diverses – réfrigérateur, lave-vaisselles, micro-ondes - et autres produits industrialisés – conserves, surgelés, couches jetables... Des tâches, longtemps centrales dans la construction de l’identité des jeunes filles, telle la couture, connaissent un déclin drastique
Augmentation du temps de travail professionnel des femmes mais dans des proportions moindres que les hommes, donc :
Leur charge totale de travail a diminué de 11h par jour vers 1950 à 8h1/2 en 1998 (Chenu A., 2002, « La charge de travail professionnel et domestique des femmes : cinquante ans d’évolution », Données sociales, INSEE.).
Progression similaire à celle repérée pour les hommes, de la participation à la vie associative, la fréquentation des spectacles, la promenade, la pratique des jeux, de la musique ou du sport.
Des inégalités tenaces : la domination masculine résiste
Des orientations scolaires et professionnelles moins rentables
Sur-chômage, sous emploi, temps partiel, inégalités de salaires
Une plus forte concentration des femmes dans des métiers moins valorisés : le cas des métiers du care
Plafond de verre Coût de la transgression (pour les femmes
dans des mondes professionnels virils)
Les 5 groupes professionnels qui occupent plus de la moitié des femmes actives
Part dans l’emploi
des femmes
% de femmes
Employés administratifs d'entreprises (secrétaires) 16,3 82,2
Employés fonction publique (catégorie C) 14,3 88,1
Personnels de service aux particuliers (femmes de ménage)
12,6 86,2
Employés de commerce (vendeuses, caissières) 6,8 75,6
Infirmières, assistantes sociales 6,8 74,3
Total des 5 professions 56,8 80,4
Toutes professions 100 45,6
Les 8 professions qui occupent la moitié des hommes
Part dans l’emploi des
hommes
% d’H
Ouvrier qualifié de type artisanal (mécaniciens autos, maçons, bouchers)
10,8 90
Ouvrier qualifié de type industriel (mécanique, chimie…) 10,0 84
Ouvrier non qualifié de type industriel 6,9 63
Techniciens 6,1 87
Ingénieurs et cadres techniques 4,8 86
Cadres administratifs et commerciaux d’entreprises 4,5 65
Chauffeurs 4,4 95
Artisans 4,2 76
Total des 8 professions les plus occupées par les hommes 51,6 24
Total général 45,6
Les ingénieurs : une féminisation lente, une intégration réussie mais un plafond de verre résistant (C. Marry, Les femmes ingénieurs, une révolution respectueuse, Belin, 2004)
Des pionnières aux jeunes cadres d’aujourd’hui : les avancées vers l’égalité
plafond de verre ou ciel de plomb : l’accroissement des écarts au fil de la carrière
La fin d’un monopole masculin
L’histoire des femmes ingénieurs est celle d’une longue exclusion suivie d’une entrée lente mais continue, amorcée au début des années 1970.
Des études et métiers toujours majoritairement occupés par les hommes : en 2008, on compte 25% de filles diplômées d’une école d’ingénieur et 17% de femmes parmi les ingénieurs et cadres techniques en activité.
Des variations selon les disciplines (Agronomie, chimie versus mécanique, électronique)
Une progression inégale : les plus « grandes » écoles résistent
12% des femmes sortent des plus « grandes » écoles contre 28% des hommes (ingénieurs de plus de 35 ans en 2002, Pochic, 2005, p. 83)
La part des filles reçues à l’X, Centrale, les Mines, les Ponts dans les années 2000 oscille entre 12% et 18%.
Une exception : l’Agro (68%)
Interprétations Poids des stéréotypes : « grosses machines »
(mécanique), la « cuisine » (chimie) ou le « hacker » Des espaces de qualification historiquement plus ou
moins ouverts aux femmes : le laboratoire (liens avec la santé, l’environnement), le bureau d’études et la ferme versus l’atelier de mécanique ou le chantier
Types de recrutement : prépas intégrées (INSA) et voies parallèles (ENSI) versus classes prépas
Des projets de carrière : intérêt du métier versus la progression hiérarchique et salariale
Des évolutions de l’organisation du travail défavorables : exemple de l’informatique, monde délaissé par les femmes du fait de l’extériorisation des services des grandes entreprises vers les SSII (Helène Stevens, 2007), aux conditions de travail plus difficiles
Les écarts de salaires entre hommes et femmes croissent avec l’âge
Le plafond de verreMoins de directrices et de PDG(plus de 45 ans en 2008) (source : CNISF)
Interprétations La situation familiale explique surtout les
carrières des hommes : leur carrière, salaires et horaires croissent avec le nombre d’enfants (à âge et diplômes contrôlés)
Ce sont les horaires de travail très élevés qui expliquent le mieux le succès professionnel
Le modèle du « male breadwinner » reste dominant parmi les THP (très haut potentiel) des grandes entreprises : hommes plus « conformes » et disponibles. Les hommes en couples « égalitaires » font des carrières moins rapides.
L’escalier inversé : les pères qui gagnent (35-44 ans)(Gadea, Marry, Travail, Genre et sociétés, n°3, 2000)
Position hiérarchique : directeur, PDG (CNISF 93)
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
50
hc0e hm0e hm1e hm2e hm3e hm4e+ fc0e fm0e fm1e fm2e fm3e fm4e+
Un fort investissement temporel (enquête CNISF)
Pratiquent des heures sup H F
Jamais ou rarement 16 16
Ponctuellement 15 26
Régulièrement 5 à 10h/semaine
35 40
Régulièrement + de 10 heures
34 18
Le temps de travail, un élément central de l’identité des cadres
Plus de huit ingénieurs des deux sexes sur dix font des heures supplémentaires. Ne pas compter son temps est un élément central de l’identité des cadres
La proportion d’hommes qui ne font jamais d’heures supplémentaires est identique à celle des femmes : 16 %.
Ces dernières font moins souvent que les hommes un grand nombre d’heures supplémentaires de façon régulière. Elles ont un rapport plus distancié à la disponibilité totale, rejointes par des hommes (jeunes) qui revendiquent une vie hors travail.
Santé, vieillissement, suicides : les femmes avantagées ?
Plus grande longévité des femmes (Espérance de vie de 84,5 ans pour les femmes, de 78 ans pour les hommes)
Trois fois moins de suicides de femmes
Explications : socialisation familiale et professionnelle sexuée
Du côté des hommes
On apprend aux hommes à ne pas manifester leurs émotions, notamment leur peur, à manifester en revanche leur colère et agressivité, à extérioriser leur violence dans leurs comportements – violence envers eux-mêmes par une prise de risques délibérés - sports dangereux, vitesse excessive, abus d’alcool et de drogues, suicide… et envers les autres - transgression de la loi, violences sexuelles…
Accidents et maladies professionnelles mortelles dans les métiers d’hommes (Mines, bâtiment, police, armée)
cf. Anne-Sophie Cousteaux et Jean-Louis Pan Ke Shon, RFS, 2008/1, vol. 49, p. 53-92, Le mal être a-t-il un genre ? Suicide, risque suicidaire, dépression et dépendance alcoolique)
Violences des hommes Les hommes représentent 85% des
personnes mises en cause dans les diverses infractions et vols entre 1950 et 1992 en France, ils sont impliqués dans la quasi-totalité des violences sexuelles, dans 84% des brutalités physiques et dans 93% des tentatives de meurtre (Jaspard et équipe ENVEFF, 2001). Aux Etats-Unis 94% des détenus et 90% des meurtriers sont des hommes
Du côté des femmes On apprend aux femmes à exprimer leurs
sentiments, l’attention aux autres, a considérer que la réussite passe par celle de la vie familiale (vie en couple, maternité…); on leur apprend à contenir leur colère, leur agressivité.
Celle-ci s’exprime à travers la somatisation, la dépression, des tentatives de suicide;
Les femmes qui tuent leur conjoint le font pour se protéger de sa violence ou protéger leurs enfants (Mercader Patricia, Houel Annick, Sobota Helga (2004), « Asymétrie des comportements dans le crime dit passionnel », Sociétés Contemporaines, n° 55, p. 91-111.
Vieillir : une chance ? Déchéance : Les femmes, plus que les
hommes sont atteintes de maladies chroniques et invalidantes
Pauvreté : 20% d’écarts de salaires entre actifs et actives, 38% pour les retraité-e-s
Des vieilles dames indignes ? Lagrave Rose-Marie (2009), « Ré-enchanter la vieillesse », Mouvements, dossier « La tyrannie de l’âge », n° 59, p. 113-122.
Solitude affective et sexuelle
« Le mâle n’est pas une proie, on ne réclame de lui ni fraîcheur, ni douceur, ni grâce mais la force et l’intelligence du sujet conquérant. Les cheveux blancs, les rides ne contredisent pas cet idéal viril. » (De Beauvoir, La Vieillesse, 1970, Paris, Gallimard)
« Le vieillissement masculin, redouté lui aussi, n’est pas lié à la perte de beauté physique, mais à la perte de pouvoir lié à la retraite et/ou à un véritable déclin physique. Il survient donc bien plus tard » (Ilana Löwy, L’emprise du genre, La Dispute, 2006).
Repères bibliographiques (ouvrages et articles de synthèse)
Bereni Laure, Chauvin Sébastien, Jaunait Alexandre, et Revillard Anne, Introduction aux Gender Studies : Manuel des études sur le genre, Bruxelles, De Boeck, Collection « Ouvertures politiques », 2012, 1ère édition en 2008
Blöss Thierry (dir.), 2001, La dialectique des rapports hommes-femmes, Paris, PUF. Ferrand Michèle (2004), Féminin Masculin, Editions La Découverte, Coll. Repères
Laufer Jacqueline, Marry C., Maruani Margaret (dir.), 2001, Masculin-féminin : questions pour les sciences de l’homme, Paris, PUF.
Löwy Ilana (2006), L’emprise du genre, Paris, La Dispute Löwy Ilana, Marry Catherine (2007), Pour en finir avec la
domination masculine, Les Empêcheurs de penser en rond/Seuil
Le Mancq Fanny, Marry C. (2011), « La dynamique inachevée de l’égalité entre les sexes », in Galland O., Lemel Y. (dir.), La société française, un bilan sociologique des évolutions depuis l’après-guerre, A. Colin, p. 69-94.
Maruani Margaret (dir.), 2005, Femmes, genre et société : l’état des savoirs, Paris, La Découverte
Bibliographie sur l’école Baudelot Christian., Establet Roger, 1991, Allez les
filles ! Paris, Seuil (réed. en 1992 dans la collection Points Actuels, n° A128.
Duru-Bellat Marie, 2004, (1ère édition en 1990), L’école des filles. Quelle formation pour quels rôles sociaux ? Paris, l’Harmattan
Marry Catherine, 2000, « Filles et garçons à l’école » in L’école : l’état des savoirs, sous la direction d’Agnès Van Zanten, Paris, La Découverte
Mosconi Nicole, 1994, Femmes et savoir. La société, l’école et la division de savoirs, Paris, l’Harmattan.
Rogers Rebecca (dir.), 2004, La mixité dans l’éducation. Enjeux passés et présents, ENS éditions.
Bibliographie Emploi, travail, professions, plafond de verre
Achin Cath., Leveque Sandrine (2006), Femmes en politique, Paris, La Découverte, Coll. Repères
Isabelle, Godechot Olivier, NaudierDelphine (2009), « Un plafond à caissons : Les femmes à l’EHESS », Sociologie du travail, Vol. 51, n°2, p. 253-274.
Buscatto Marie, Marry C., 2009, « Le plafond de verre dans tous ses éclats. La féminisation des professions supérieures au XXe siècle », Introduction au numéro spécial de Sociologie du travail n°2, vol. 51, p. 170-182.
Kergoat Danièle, 1982, Les ouvrières, éd. Le Sycomore Le sexe du travail, coll., 1984, Grenoble, PUG Marry C. (2006), « Variations sur le sexe des métiers » in Catherine
Vidal (dir.) Féminin-masculin. Mythes et idéologies, Belin, p. 83-93. Maruani M., 2011 (1ère édition en 2000), Travail et emploi des
femmes, Paris, La Découverte, Repères Schweitzer Sylvie (2002), Les femmes ont toujours travaillé, Paris,
Odile Jacob. Singly de F., 1987, Fortune et infortune de la femme mariée, Presses
Universitaires de France, Paris (5ème éd., 2002).
Bibliographie sur cadres et ingénieurs Gadea Charles, Marry Catherine, 2000, Les pères
qui gagnent. descendance et réussite professionnelle chez les ingénieurs », Travail, Genre et Sociétés, n° 3, mars 2000, p. 109-135.
Guillaume Cécile, Pochic Sophie (2007), « La fabrication organisationnelle des dirigeants. Un regard sur le plafond de verre, Travail genre et sociétés, n° 17, Dossier « genre et organisations », p. 79-103.
Laufer Jacqueline, 1982, La féminité neutralisée ? Les femmes cadres dans l’entreprise, Paris, Flammarion.
Marry C., 2004, Les femmes ingénieurs, une révolution respectueuse
Stevens Hélène, 2007, « Destins professionnels des femmes ingénieurs. Des retournements inattendus », Sociologie du travail, 49 (4), 443-463