COMMISSION EUROPEENNE Bruxelles, le 23.7.2014 C(2014) 5078 final Dans la version publique de cette décision, des informations ont été supprimées conformément aux articles 24 et 25 du règlement du Conseil (CE) n° 659/1999 concernant la non- divulgation des informations couvertes par le secret professionnel. Les omissions sont donc indiquées par […]. VERSION PUBLIQUE Ce document est publié uniquement pour information. DÉCISION DE LA COMMISSION du 23.7.2014 CONCERNANT L'AIDE D'ETAT SA.33961 (2012/C) (ex 2012/NN) mise à exécution par la France en faveur de la chambre de commerce et d’industrie de Nîmes – Uzès – Le Vigan, de Veolia Transport Aéroport de Nîmes, de Ryanair et d'Airport Marketing Services (Le texte en langue française est le seul faisant foi) (Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)
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COMMISSION EUROPEENNE - European Commissionec.europa.eu/competition/state_aid/cases/244514/244514_1738731_… · 2. Cadre factuel 2.1 Caractéristiques de l'aéroport et fréquentation
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COMMISSION EUROPEENNE
Bruxelles, le 23.7.2014
C(2014) 5078 final
Dans la version publique de cette décision, des
informations ont été supprimées conformément
aux articles 24 et 25 du règlement du Conseil
(CE) n° 659/1999 concernant la non-
divulgation des informations couvertes par le
secret professionnel. Les omissions sont donc
indiquées par […].
VERSION PUBLIQUE
Ce document est publié uniquement pour
information.
DÉCISION DE LA COMMISSION
du 23.7.2014
CONCERNANT L'AIDE D'ETAT
SA.33961 (2012/C) (ex 2012/NN)
mise à exécution par la France
en faveur de la chambre de commerce
et d’industrie de Nîmes – Uzès – Le Vigan,
de Veolia Transport Aéroport de Nîmes, de Ryanair
et d'Airport Marketing Services
(Le texte en langue française est le seul faisant foi)
(Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)
2
DÉCISION DE LA COMMISSION
du 23.7.2014
CONCERNANT LA MESURE / LE RÉGIME D’AIDES / L’AIDE D’ETAT
SA.33961 (2012/C) (ex 2012/NN)
mise à exécution par la France
en faveur de la chambre de commerce
et d’industrie de Nîmes – Uzès – Le Vigan,
de Veolia Transport Aéroport de Nîmes, de Ryanair Limited
et d'Airport Marketing Services Limited.
(Le texte en langue française est le seul faisant foi)
(Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)
LA COMMISSION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 108,
paragraphe 2, premier alinéa,1
vu l’accord sur l’Espace économique européen, et notamment son article 62, paragraphe 1,
point a),
vu le règlement (CEE) n° 2408/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, concernant l'accès des
transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires,2
après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément auxdits articles3
et vu ces observations,
considérant ce qui suit:
1 À compter du 1er décembre 2009, les articles 87 et 88 du traité CE sont devenus respectivement les
articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne («TFUE»). Dans les deux cas,
les dispositions sont, en substance, identiques. Aux fins de la présente décision, les références faites aux
articles 107 et 108 du TFUE s'entendent, s'il y a lieu, comme faites respectivement aux articles 87 et 88
du traité CE. Le TFUE a également introduit certaines modifications de terminologie, telles que le
remplacement de «Communauté» par «Union», de «marché commun par «marché intérieur» et de
«Tribunal de première instance» par «Tribunal». La terminologie du TFUE est utilisée dans la présente
décision. 2 JO L 240 du 24.08.1992, p. 8.
3 JO C 241 du 10.08.2012, p. 11.
3
1. Procédure
(1) Par courrier du 26 janvier 2010, la Commission a été saisie d'une plainte au sujet
d'avantages que la compagnie aérienne Ryanair Limited ("Ryanair") recevrait dans un
ensemble d'aéroports régionaux et locaux français. Concernant l'aéroport de Nîmes,
cette plainte fait également Etat d’apports financiers dont les gestionnaires successifs
de cet aéroport, la chambre de commerce et d’industrie de Nîmes – Uzès - Le Vigan
("la CCI") et Veolia Transport Aéroport de Nîmes ("VTAN"), auraient été
bénéficiaires.
(2) Par courrier du 16 mars 2010, la Commission a envoyé à la France une version non-
confidentielle de la plainte, et a également invité la France à apporter des clarifications
quant aux mesures en question. La France a apporté des éléments de réponse par
lettres des 31 mai et 7 juin 2010.
(3) Par courrier du 2 novembre 2011, le plaignant a envoyé des informations
complémentaires à l'appui de sa plainte. La Commission a transmis ces éléments et
demandé des informations complémentaires à la France par lettre du 5 décembre 2011.
La France a sollicité le 22 décembre 2011 un délai de réponse supplémentaire, délai
que la Commission a accepté par lettre du 4 janvier 2012. La France a présenté ses
observations et réponses par courrier du 27 février 2012.
(4) Par lettre datée du 26 avril 2012, la Commission a communiqué à la France sa décision
d'ouvrir la procédure (la « décision d'ouverture ») au titre de l'article 108, paragraphe 2
du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) sur les aides éventuelles
octroyées au profit de la CCI, de VTAN et de Ryanair.
(5) Par lettres des 29 mai et 28 juin 2012 la France a sollicité deux délais supplémentaires
pour répondre aux demandes de renseignements complémentaires formulées dans la
décision d'ouverture. La France a transmis, le 31 juillet 2012, ses observations ainsi
que des informations et documents demandés par la Commission dans la décision
d'ouverture.
(6) La décision de la Commission a été publiée au Journal officiel de l'Union
Européenne4 le 10 août 2012. La Commission a invité les parties intéressées à
présenter leurs observations sur les mesures en cause dans un délai d'un mois à
compter de la date de publication.
(7) La Commission a reçu des observations des parties intéressées. Le 24 septembre 2012,
la CCI, VTAN et le Syndicat Mixte pour l'aménagement et le développement de
l'aéroport de Nîmes - Alès - Camargue - Cévennes ("SMAN") ont conjointement
présenté des observations. Airport Marketing Services Limited ("AMS") a présenté ses
observations le 3 octobre 2012. De même, Ryanair a présenté une série d'observations
le 3 octobre 2012. De plus, le 20 juillet 2012, le 10 avril 2013, le 20 décembre 2013, le
31 janvier 2014 et le 7 février 2014, Ryanair a présenté d'observations générales et
communes à toutes les affaires d'aides d'Etat instruites par la Commission et la
concernant
(8) Par lettres des 24 juin 2012, 3 mai 2013 et 9 janvier 2014, la Commission a
communiqué à la France les observations formulées par les parties intéressées. La
Commission a donné à la France la possibilité de commenter ces observations. La
France a répondu à ces lettres par courriers datés des 13 juillet 2012, 16 novembre
4 JOUE C 241, du 20.08.2012, p.11.
4
2012, 3 mai 2013 et 3 février 2014. Dans sa lettre du 13 juillet 2012, elle a indiqué à la
Commission que les observations reçues n'appelaient pas de commentaires de sa part
sous réserve de ceux qui avaient déjà été transmis concernant l'aéroport de Marseille.
De plus, la France a informé la Commission qu'elle ne souhaitait pas transmettre de
commentaires en réponse aux observations des tiers.
(9) La Commission a demandé des renseignements complémentaires à la France par
courrier du 18 octobre 2012. La France a répondu le 3 décembre 2012.
(10) La Commission a de nouveau demandé des renseignements complémentaires à la
France par lettre du 23 décembre 2013. La France a sollicité un délai supplémentaire
par courrier du 24 décembre 2013. La Commission l’a accordé par lettre du 6 janvier
2014. La France a demandé un nouveau délai supplémentaire par lettre du 5 février
2014. La Commission l’a accordé par lettre du 11 février 2014. La France a présenté
des réponses partielles par courrier du 19 février 2014. Au vu des renseignements
manquants, la Commission a adressé un rappel à la France par lettre du 19 mars 2014.
La France a répondu par courrier du 10 avril 2014.
(11) La Commission a de nouveau demandé des renseignements complémentaires par lettre
du 20 mars 2014. La France a répondu par courrier du 25 avril 2014. Au vu des
renseignements manquants, la Commission a adressé un rappel à la France par lettre
du 13 mai 2014. La France a répondu par courrier du 26 mai 2014. Finalement, la
Commission a demandé des renseignements complémentaires par lettre du 23 juin
2014. La France a répondu par courrier du 1er
juillet 2014.
(12) La Commission a communiqué par lettres à la France et aux tiers intéressés ayant déjà
communiqué des observations son intention d'apprécier la compatibilité des mesures
d'aides en question avec le marché intérieur sur le fondement des dispositions des
"lignes directrices de l'UE sur les aides d'Etat aux aéroports et aux compagnies
aériennes"5 (" les nouvelles lignes directrices"). La Commission a invité les
destinataires de ces courriers à faire part de leurs observations éventuelles à ce sujet.
Par ailleurs, le 15 avril 2014, un avis a été publié au Journal officiel de l'Union
européenne,6 invitant la France et les tiers intéressés à présenter à leurs observations à
ce sujet.
(13) Air France a présenté ses observations à ce sujet le 25 avril 2014. Ryanair a fait de
même le 27 mars 2014 et VTAN le 23 avril 2014. En outre, l'organisation non
gouvernementale Transport & Environment, a présenté ses observations le 12 mai
2014. Ces différentes observations ont été communiquées à la France, qui n'a pas
souhaité transmettre de commentaires à leur propos.
2. Cadre factuel
2.1 Caractéristiques de l'aéroport et fréquentation
(14) L'aéroport de Nîmes-Garons (ci-après l'"aéroport de Nîmes") est situé à 12 km au sud
de Nîmes, chef-lieu du département du Gard, dans la région Languedoc-Roussillon, en
France. Cet aéroport est ouvert au trafic national et international commercial.
L'aéroport de Nîmes est situé à environ 60km des aéroports de Montpellier et
d'Avignon, à 90km de l'aéroport de Marseille-Provence, et à 120km de l'aéroport de
Béziers-Cap d'Agde.
(15) La piste principale, de 2040 m x 45 m, est, selon la France, en mesure d'accueillir des
aéronefs de code C (A319, A320, A321, B737-800) sans restriction pour des étapes
5 Communication de la Commission – Lignes directrices sur les aides d'Etat aux aéroports et aux
compagnies aériennes, JO C 99 du 4.4.2014, p. 3. 6 JO C 113 du 15.4.2014, p. 30.
2.2 Exploitants et propriétaires successifs de l’aéroport
(21) L'exploitation de la zone civile de l'aéroport avait été initialement concédée à la CCI
par arrêté du 15 mars 1965 (" l’arrêté de 1965 ") sous forme d'une concession
d'outillage public prévue pour une durée de 60 ans à dater du 1er
janvier suivant
l’octroi de la concession, soit jusqu’au 1er
janvier 2026. La concession a été complétée
par un arrêté portant autorisation d'occupation temporaire ("AOT") d'environ 6 ha de
terrains supplémentaires, accordée le 12 novembre 1986.7 L’Etat a mis fin à la
concession le 31 janvier 2006.8
(22) A l’arrêté de 1965 est annexé un cahier des charges fixant les conditions dans
lesquelles la CCI doit assurer l’établissement, l’aménagement, l’entretien et
l’exploitation des ouvrages, bâtiments, installations et matériels. Conformément à
l'AOT, les biens constituant l'équipement de l'aérodrome appartenaient à l'Etat.
Néanmoins, les modifications qui devaient être apportées aux ouvrages et installations
étaient à la charge de la CCI. La CCI devait payer une redevance domaniale annuelle
de 2 000 francs (environ 300 euros). L’AOT précise en outre que l’aéroport est
7 Arrêté d’autorisation d'occupation temporaire du 12 novembre 1986.
8 Arrêté interministériel en date du 31 janvier 2006.
6
« affecté à la Marine Nationale (Aéronavale) en qualité d’affectataire principal et à la
[CCI] en qualité d’affectataire secondaire ».
(23) La CCI fait partie du réseau des chambres de commerce et d’industrie. En France, les
chambres de commerce et d'industrie sont des établissements publics à caractère
administratif. De manière générale, une chambre de commerce et d'industrie
représente les intérêts généraux du commerce, de l’industrie et des services de leur
circonscription. Les missions et prérogatives des chambres de commerce et d'industrie
sont fixées par la loi et elles sont soumises à la tutelle administrative et financière de
l'Etat, par l'intermédiaire du ministre des finances et de l'équipement et de celui de la
planification et de l'administration du territoire, agissant chacun dans leur domaine de
compétence. Selon l’article R 712-2 du code de commerce, « La tutelle des chambres
de commerce et d'industrie de Région et des chambres de commerce et d'industrie
territoriales est assurée par le préfet de région, assisté par le responsable régional des
finances publiques ». L'autorité de tutelle doit à ce titre être destinataire de certaines
catégories de délibération importantes fixées par la réglementation (concernant par
exemple le budget, le recours à l’emprunt, l’octroi de garanties à des tiers, les cessions,
prises ou extensions de participation financière dans des sociétés civiles ou
commerciales etc.). Ces actes ne peuvent être exécutés que s'ils ont été adressés à
l'autorité de tutelle, qui a la faculté de s’y opposer. Les chambres de commerce et
d'industrie ont à leur tête une assemblée élue parmi les représentants des entreprises de
leur circonscription.
(24) La CCI disposait d'une comptabilité séparée pour la gestion de la zone civile de
l’aéroport et l'activité d'exploitation de celle-ci a été imputée à un compte séparé tout
au long de cette période. Afin de distinguer les activités du service général de la CCI
de l’activité de gestion aéroportuaire, la partie de la CCI exploitant la zone civile de
l'aéroport de Nîmes sera dénommée la « CCI-aéroport » dans la présente décision.
(25) Depuis le 1er
février 2006, la responsabilité de l'aménagement, de l'entretien, de
l'exploitation et du développement de la zone civile de l'aérodrome a été confiée au
SMAN par une convention du 31 janvier 2006. Aux termes de cette convention, la
zone civile de l'aéroport est mise à disposition du SMAN, l'Etat conservant la propriété
des biens.
(26) Le SMAN est un établissement public9 créé par arrêté du Préfet du Gard du 9
décembre 2005. Il regroupe10
le Conseil Général du Gard ("le CGG"), la Communauté
d'Agglomération de Nîmes Métropole (la "CANM"), et la Communauté
d'Agglomération d'Alès Cévennes (la "CAAC"). Il est compétent pour l'aménagement,
l'entretien et la gestion, notamment l'exploitation et le développement, des
infrastructures aéroportuaires civiles.11
(27) Entre le 1er
février 2006 et le 31 décembre 2006, le SMAN a confié, de manière
transitoire, l'exploitation de l'aéroport à la CCI par une délégation de service public.12
A ce titre, le SMAN a défini les modalités d'aménagement, de developpement,
d'entretien et de gestion de l'aérodrome. Il a aussi assuré en coordination avec la CCI-
aéroport les décisions et les financements nécessaires au développment de l'aérodrome 9 Les autorités françaises précisent que la forme juridique du syndicat mixte, prévue par les articles L-
5721-1 et suivants et R 5721-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales, permet
notamment à des collectivités territoriales et à d’autres organismes publics de se regrouper pour
exploiter des services publics présentant de l’intérêt pour chacun d’entre eux. 10
Le SMAN est administré par un Comité syndical constitué de délégués représentants les membres
adhérents. Le CGG y est représenté par 5 délégués, la CANM par 7 délégués et la CAAC par 3
délégués. 11
Arrêté de création du SMAN du 9 décembre 2005. 12
Convention de délégation de service public du 31 janvier 2006.
7
suivant les modalités fixées par son arrêté de création et par la convention de
délégation de service public conclue avec la CCI-aéroport. Pour sa part, la CCI-
aéroport devait assurer les modifications à apporter du fait des travaux qu'elle
enreprenait, même si ces modifications affectaient des ouvrages ou des installations
situés hors de l'emprise de la zone civile. A la lumière de la convention de délégation,
il n'était pas prévu que la CCI doive verser des redevances en échange de l'usage des
infrastructures.
(28) A l'issue d'une procédure d'appel d'offres ayant vu s'affronter deux offres concurrentes,
le SMAN a ensuite choisi de sous-traiter, dans le cadre d'une convention de délégation
de service public (la "CDSP") prenant effet le 1er
janvier 2007, l'exploitation de
l'aérodrome à la société Veolia Transport. Celle-ci a créé une filiale à 100%, Veolia
Transport Aéroport de Nîmes, qui s'est substituée à sa société-mère pour l'exécution de
la CDSP. La CDSP avait pour objet de confier à titre exclusif au délégataire, à ses
risques et périls, l'exploitation, l'entretien et la maintenance de la zone civile de
l'aéroport, de ses terrains, ouvrages, bâtiments, infrastructures, matériels, réseaux ainsi
que le développement du trafic et le développement des services pour l'accueil des
avions civils en lien avec le trafic passager et le trafic fret, pour les entraînements
d'avions civils et pour l'activité des entreprises installées sur le site. Initialement d'une
durée de 5 ans, le contrat de délégation de Veolia Transport a été prolongé jusqu'au 31
décembre 2012.13
(29) Le SMAN a lancé une nouvelle procédure de délégation de service public et une
nouvelle convention d'exploitation a été signée le 14 décembre 2012 entre le SMAN et
le groupe canadien SNC-Lavalin. Le nouveau délégataire exploite l'aéroport depuis le
1er
janvier 2013.
(30) Après la décision de fermeture de la base aéronautique militaire, l'aéroport a fait l'objet
d'un transfert de gestion à titre gratuit au profit du SMAN, à compter du 1er
juillet
201114
pour une durée de 50 ans. Le SMAN est donc le gestionnaire domanial et
l'autorité concédante pour l'exploitation de l'aéroport, dont l'Etat reste le propriétaire.
3. Description des mesures
3.1 Mesures faisant l’objet de la procédure formelle d’examen
(31) Les mesures faisant l'objet de la procédure formelle d’examen concernent différents
accords conclus par les gestionnaires successifs de l’aéroport avec Ryanair,
directement et par l'intermédiaire de sa filiale AMS, au cours de cette même période
ainsi que des apports financiers de différentes entités et autorités publiques aux
exploitants de l'aéroport de 2000 jusqu'à l’ouverture de la procédure formelle
d’examen.
3.2 Soutiens financiers aux exploitants de l'aéroport
3.2.1 Financement des coûts liés aux missions considérées comme régaliennes au sein
de l’aéroport de Nîmes - Système national de financement des missions
régaliennes dans les aéroports français
(32) Diverses missions exercées par les gestionnaires successifs de l’aéroport de Nîmes,
relevant de la sécurité du trafic aérien, de la sûreté ou de la protection de
l’environnement, ont été prises en charge financièrement par les pouvoirs publics entre
13
Délibération du Comité Syndical du 30 juin 2011. 14
Arrêté de transfert de gestion du Ministre de la Défense du 30 juin 2011. Une convention du 30 juin
2011 conclue entre l'Etat et le SMAN fixe par ailleurs la liste des biens mis à disposition du SMAN et le
détail des biens ayant fait l'objet d'autorisations d'occupation temporaires assorties ou non de droits réels
au profit de tiers.
8
2000 et 2012. Ces financements font partie du champ de la procédure formelle
d’examen.
(33) La France a fait à leur sujet référence au système général de financement des missions
régaliennes dans les aéroports français, établi par la législation nationale et présenté
aux considérants 36 et suivants.
(34) Ce système repose sur un prélèvement fiscal, la taxe d’aéroport, ainsi que sur un
dispositif complémentaire. L’historique et les modalités de ces dispositifs ainsi que le
champ des missions qu’ils financent sont décrits aux considérants 37 et suivants.
(35) En 1998, l’arrêt rendu par le Conseil d'Etat dans l’affaire SCARA15
a indiqué que les
missions de sûreté et de sécurité au sein des aéroports étaient des missions régaliennes
de la responsabilité de l'Etat et pour cette raison ne pouvaient être mises à la charge
des usagers des aéroports par le biais de redevances. A la suite de cet arrêt, la loi n°98-
1171 du 18 décembre 1998 relative à l’organisation de certains services de transport
aérien et l’article 136 de la loi n°98-1266 du 30 décembre 1998 (loi de finances pour
1999)16
ont mis en place la taxe d’aéroport, à compter du 1er
juillet 1999. Il s’agit
d’une taxe affectée, en ce sens que son produit ne peut être utilisé que pour financer
certaines dépenses, en l’occurrence les coûts des missions que la France considère
comme régaliennes au sein des aéroports. Les dispositions précitées ont également mis
en place un dispositif complémentaire de financement de ces missions. Le champ des
missions couvertes par ces dispositifs, les modalités de la taxe d’aéroport et les
modalités du dispositif complémentaire sont présentés successivement ci-après.
(36) La législation française, précisée par la réglementation, définit précisément les
missions éligibles au financement par la taxe d’aéroport. Il s’agit du sauvetage et de la
lutte contre l’incendie des aéronefs, de la prévention du péril animalier,17
de
l’inspection filtrage des bagages de soute, de l’inspection filtrage des passagers et des
bagages de cabine, du contrôle des accès communs à la zone réservée,18
de mesures de
contrôles environnementaux19
ainsi que du contrôle automatisé aux frontières par
identification biométrique. La référence au contrôle automatisé aux frontières par
identification biométrique a été introduite dans la législation en 2008. Pour le reste, le
périmètre des missions éligibles au financement par la taxe d’aéroport est resté
inchangé depuis la mise en place de ce dispositif, et correspond aux missions visées
par l’arrêt SCARA. Divers textes réglementaires, nationaux et européens, précisent les
obligations des exploitants d’aéroports relatives à l’exécution de ces missions. Par
exemple, en ce qui concerne le sauvetage et la lutte contre l’incendie des aéronefs, la
réglementation détermine précisément les moyens humains et matériels à mettre en
place en fonction des caractéristiques de l’aéroport.
(37) Pour un aéroport donné, la taxe d’aéroport est due par toute compagnie aérienne
utilisant l’aéroport. Elle est assise sur le nombre de passagers et la masse de fret et de
courrier embarqués par la compagnie. Le tarif de la taxe d’aéroport par passager ou
tonne de fret ou de courrier est fixé annuellement, aéroport par aéroport, en fonction
15
Arrêt du Conseil d’Etat du 20 mai 1998 « Syndicat des Compagnies aériennes autonomes »
(« SCARA »). 16
Désormais codifié à l’article 1609 quater vicies du Code général des impôts. 17
Le péril animalier inclut notamment le péril aviaire, qui se manifeste par des collisions entre aéronefs et
volatils de nature à menacer la sécurité des personnes et des biens à bord des aéronefs. 18
L’exécution de cette mission peut par exemple comprendre la mise en place et l’entretien de clôtures
délimitant la zone publique et la zone réservée ou encore la mise en place de système de surveillance
vidéo aux abords de la zone réservée. 19
Cette mission comprend notamment des mesures du bruit, le cas échéant corrélé avec les trajectoires des
aéronefs, ainsi que des contrôles de la qualité de l’air et de l’eau dans l’environnement des aéroports.
9
des coûts prévisionnels engendrés par l’exécution des missions financées par le
dispositif.
(38) Les exploitants d’aéroports établissent chaque année une déclaration annuelle de coûts
et de trafic. Cette déclaration présente, pour l’année précédente, les niveaux de trafic et
les coûts des missions de sécurité et de sûreté20
constatés ainsi que les montants reçus
au titre de la taxe d’aéroport et du dispositif complémentaire pour financer ces
missions. Elles contiennent par ailleurs des prévisions de trafic, de coûts et de recettes
liées aux missions de sécurité et de sûreté pour l’année en cours et les deux années
suivantes. La déclaration fait l’objet de vérifications de la part des autorités
administratives, lesquelles peuvent notamment effectuer des contrôles sur site. Le tarif
de la taxe est ensuite fixé sur cette base par un arrêté interministériel.
(39) Dans la mesure où les calculs du tarif de la taxe se font sur la base de données
prévisionnelles de coûts et de trafic, un mécanisme d’ajustement a posteriori a été mis
en place, afin d’assurer que le produit de la taxe d’aéroport, augmenté le cas échéant
des financements accordés au titre du dispositif complémentaire décrit au considérant
40, ne dépasse pas les coûts réellement supportés au titre des missions concernées. Les
coûts en question comprennent les coûts de fonctionnement et de personnel engendrés
par l’exécution de des missions de sûreté et de sécurité, les dotations aux
amortissements correspondant aux investissements réalisés au titre de ces missions,
ainsi que la part des frais généraux liée à ces missions.21
Les exploitants doivent tenir
un compte pluriannuel des recettes provenant de la taxe d’aéroport et du dispositif
complémentaire, ainsi que des coûts engendrés par les missions concernées. Dès qu’un
solde positif est constaté, il est reporté dans les comptes cumulés des années
précédentes, dont il peut résulter un solde positif ou négatif. Ce solde est pris en
compte dans la fixation du tarif de la taxe pour l’année suivante. Par ailleurs tout solde
positif est affecté de frais financiers à la charge de l’exploitant.
(40) Dès sa création, le dispositif de financement par la taxe d'aéroport a dû être complété
par un dispositif complémentaire. En effet, les coûts de sûreté et de sécurité ne sont
pas proportionnels au trafic aérien, contrairement aux recettes de la taxe d'aéroport.
Dans ce contexte, il était apparu que dans les aéroports à faible trafic, il aurait fallu
fixer le tarif de la taxe d’aéroport à un niveau élevé et jugé difficilement supportable
par les usagers, afin d’équilibrer les coûts de sûreté et de sécurité. Pour ces aéroports,
il a donc été prévu de pouvoir fixer la taxe d’aéroport à un niveau inférieur au niveau
requis pour couvrir les coûts et de recourir à un dispositif de financement
complémentaire pour financer, autant que de besoin, les missions éligibles au
financement par la taxe d’aéroport.
(41) Différents dispositifs complémentaires se sont succédés. Dans un premier temps, les
autorités françaises ont eu recours à un fonds d’affectation spéciale, le fonds
d'intervention pour les aéroports et le transport aérien ("FIATA"), institué
parallèlement à la taxe d'aéroport, et comme elle, par la loi n°98-1266 du 30 décembre
1998 précitée. Ce fonds, alimenté par une quote-part de la taxe de l'aviation civile, a
succédé au fonds de péréquation des transports aériens ("FPTA") initialement réservé
au financement des liaisons d'aménagement du territoire. Le champ des missions
financées par le FIATA a repris celui qui avait été déterminé pour le FPTA et a été
élargi aux missions couvertes par la taxe d’aéroport, afin de venir en complément de
20
Missions éligibles au financement par la taxe d’aéroport, telles que décrites ci-dessus 21
Les frais généraux sont principalement liés aux fonctions support telles que la gestion des ressources
humaines, les affaires financières, le contrôle financier, les achats, les systèmes informatiques non
dédiés, la direction juridique, les services généraux, la direction générale, les fonctions comptables et le
contrôle de gestion.
10
cette dernière pour les petits aéroports. Concrètement, les missions du FIATA étaient
pour l’essentiel réparties en deux « sections » distinctes : une section « aéroports »
pour la couverture complémentaire des missions de sûreté et de sécurité dans les petits
aéroports et une section « transport aérien » pour les subventions aux liaisons
d'aménagement du territoire. Les décisions de versement des subventions du FIATA
pour le financement complémentaire des missions de sûreté et de sécurité étaient
prises après avis d'un comité de gestion de la section « aéroports » du FIATA.
(42) En 2005, le FIATA a été supprimé et le financement correspondant a été repris
directement par le budget de l'Etat pendant deux ans selon les mêmes principes de
fonctionnement, impliquant notamment l’avis d'un comité de gestion. A compter de
2008, l'Etat a remplacé ce dispositif par une majoration de la taxe d'aéroport, ayant
pour effet de fixer la taxe à un niveau supérieur à ce qui est nécessaire pour couvrir les
coûts des missions de sûreté et de sécurité pour certains aéroports. Le surplus ainsi
engendré est redistribué aux plus petits aéroports afin de compléter le produit de la
taxe d’aéroport qui y est prélevée.
(43) Comme indiqué précédemment, les déclarations annuelles des exploitants
aéroportuaires, qui font l’objet de vérifications de la part des autorités administratives,
indiquent les coûts prévisionnels et constatés ainsi que les recettes prévisionnelles et
constatées, provenant tant de la taxe d’aéroport que du dispositif complémentaire. De
la même manière, les comptes annuels tenus par les exploitants, sur le fondement
desquels est calculé le solde des coûts et des recettes réels, qui, s’il est positif, entraîne
un ajustement de la taxe à la baisse et l’affectation de frais financiers à la charge des
exploitants, intègre à la fois le produit de la taxe d’aéroport et les financements reçus
au titre du dispositif complémentaire. Le mécanisme de déclaration, de contrôle et
d’ajustement a posteriori destiné à prévenir le versement de ressources publiques
supérieures aux coûts réellement supportés s’applique donc tant à la taxe d’aéroport
qu’au dispositif complémentaire.
(44) Ce système national s’applique à l’aéroport de Nîmes. Toutefois, lorsque la base
aéronavale était en activité, les missions entrant dans le champ du dispositif décrit aux
considérants précédents étaient en partie exécutées par l’exploitant de cette base. Les
coûts supportés en conséquence faisaient l’objet d’une refacturation seulement
partielle à l’exploitant civil selon les modalités prévues dans la Convention définissant
la répartition des charges d’investissement et de fonctionnement des installations et
services à usage commun entre l’exploitant civil et l’exploitant militaire. Cette
refacturation partielle tenait compte du fait que l’essentiel de l’activité de la
plateforme était militaire. La part des coûts mis à la charge de l’exploitant civil faisait
ensuite l’objet d’une compensation en application du système de financement des
missions régaliennes décrit dans cette section
(45) Suite à la fermeture de la base aéronavale au 1er
juillet 2011, VTAN a repris
l’exécution de l’ensemble des missions de sûreté et de sécurité de la plateforme mis à
la charge des exploitants d’aéroports civils par la législation française, les coûts
afférents faisant l’objet d’une compensation au titre du système évoqué ci-dessus.
(46) Par ailleurs, dans la décision d’ouverture, la Commission a relevé que l’aéroport de
Nîmes ayant été jusqu'en juillet 2011 un aérodrome principalement militaire, certains
investissements relatifs aux infrastructures communes, notamment de piste, avaient été
réalisés sous maîtrise d’ouvrage du ministère de la Défense.
3.2.2 Soutiens financiers à la CCI-aéroport
(47) La CCI-aéroport a assuré l'exploitation de l'aéroport de Nîmes jusqu'au 31 décembre
2006.
11
3.2.2.1 Cadre contractuel
(48) L'Autorisation d'occupation temporaire de 198622
prévoyait le paiement par la CCI
d'une redevance de 2000 francs par an à l'Etat, propriétaire de l'infrastructure. Outre
cette stipulation, aucun autre transfert financier au profit de la CCI-aéroport n'est
prévu dans ce cadre contractuel, qui est resté en vigueur jusqu'au 1er
février 2006.
(49) Depuis le 1er
février 2006, l'Etat a mis à la disposition du SMAN les infrastructures
aéroportuaires de la zone civile, et lui a conféré la compétence d'organiser l'activité
civile de l'aéroport, sous réserve des prérogatives du Ministère de la Défense. La
convention conclue le 31 janvier 2006 entre l'Etat et le SMAN stipule que le SMAN,
ou le tiers exploitant qu'il désigne, exécute et finance l'aménagement des aires de
mouvements, l'affectation des postes de stationnement, et les aires de stockage de
matériel de la zone civile.23
(50) Dans ce contexte, une convention de délégation de service public a été conclue entre le
SMAN et la CCI, aux fins de déléguer à cette dernière la gestion opérationnelle24
de
l'aéroport entre le 1er
février et le 31 décembre 2006, le temps qu'une procédure
d'appel d'offres puisse être lancée pour la sélection d’un nouvel exploitant. L'article 6
de cette convention stipule que les charges de fonctionnement de l'aéroport sont
financées par la CCI, tandis que les dépenses d'investissement sont financées par le
SMAN. Pour couvrir les charges de fonctionnement de l'aéroport, il était prévu que
l'exploitant puisse avoir recours à des contributions d'autres personnes publiques
intéressées.25
Une redevance domaniale annuelle d'un euro devait être versée au
SMAN par la CCI.26
3.2.2.2 Investissements sur la zone aéroportuaire civile
(51) Les autorités françaises ont présenté l'ensemble des investissements effectués sur la
zone aéroportuaire civile par la CCI-aéroport au cours de la période 1970-2006, dont
le montant total sur cette période s'élève à 19 447 268 d’euros. Ces investissements ont
porté sur l'agrandissement du terminal de passagers. Les modifications ont notamment
concerné le hall public, la zone d’enregistrement, la salle d'embarquement, la zone
d’arrivé des voyageurs et la zone réservée aux administrations.27
Leur objet était
d'adapter la plateforme aéroportuaire pour accueillir de 600 000 à 800 000 passagers
par an. Ces travaux ont été entièrement supportés financièrement par la CCI-aéroport,
qui a recouru à l’autofinancement et à l’emprunt.
(52) La France a souligné par ailleurs qu’au cours de la période d’exploitation par la CCI,
jusqu’au 1er février 2006, l’ensemble de la plateforme aéroportuaire, à l’exception du
terminal passagers, était affecté aux activités militaires de la base. La piste et la tour de
contrôle par exemple, avaient été construites et étaient utilisées pour l’aviation
militaire. Ces infrastructures existantes ont ensuite été utilisées à des fins d’aviation
commerciale, mais de façon accessoire à l’activité militaire. Le Ministère de la défense
a réalisé des investissements au niveau de ces infrastructures. Toutefois, ces
investissements n’avaient pour finalité le développement ou le maintien des activités
commerciales de l’aéroport mais ceux des activités militaires et à ce titre, n’avaient
pas à être réalisés ou pris en charge par l’exploitant civil. La CCI-aéroport, en
revanche, versait à l’exploitant militaire une contribution correspondant à sa quote-
part des coûts liés aux infrastructures communes (principalement la piste et la tour de 22
Article 31 du contrat de concession de 1965. 23
Convention de délégation Etat- SMAN du 1er
février 2006, article 8. 24
Préambule de la convention de délégation Etat – SMAN du 1er
février 2006. 25
Convention de délégation Etat – SMAN du 1er
février 2006, article 27. 26
Convention de délégation Etat – SMAN du 1er
février 2006, article 29. 27
Observations de la France sur la décision d'ouverture, p. 8 et 13.
12
contrôle) et aux services communs rendus (principalement la navigation aérienne et les
services de protection et de lutte contre les incendies).28
3.2.2.3 Subventions d’exploitation
(53) Les principales données comptables et commerciales de la CCI-aéroport pour la
période 1999-2005 sont synthétisées dans le tableau 2 figurant au présent considérant.
Tableau 2 : Chiffres-clés de la CCI-aéroport (k€)29
(462) Ce tableau montre qu’un opérateur en économie de marché se serait attendu à des flux
incrémentaux annuels négatifs jusqu’à l’expiration du contrat de 2000 tel que modifié
par les échanges de courriers de fin 2001 - début 2002. Par conséquent, la transaction
constituée par les échanges de courriers de fin 2001 – début 2002 a conféré un
avantage économique à Ryanair.
7.1.1.2.5.4.1.3 Echanges de courriers de 2004
(463) Les termes de la convention du 11 avril 2000 ont été à nouveau modifiés, mais cette
fois-ci pour une période plus limitée, par les échanges de courriers et courriers
électroniques des 10 et 16 mars 2004 (« les échanges de courriers de 2004 »).
(464) Il ressort de ces échanges de courriers et des explications fournies par la France à leur
sujet, que ces échanges ont conduit à modifier la convention du 11 avril 2000 en
augmentant les paiements marketing de […] euros par passager départ au cours de la
période allant du 29 avril au 31 octobre 2004 (« la saison d’été 2004 ») à condition que
Ryanair ajoute une fréquence journalière supplémentaire sur sa liaison vers Londres au
cours de cette période.
(465) Selon la France, cette deuxième fréquence supplémentaire correspond à 185 vols
supplémentaires possibles au cours de la saison d’été 2004, ce qui sur la base d’un
avion configuré à 148 passagers et d’un coefficient de remplissage de 75% pouvait
92
conduire à un trafic supplémentaire évalué à 41 070 passagers. L’hypothèse d’un
facteur de charge de 75% proposée par la France paraît raisonnable puisque les
échanges de courriers de 2004 ne prévoyaient pas d’actions de marketing
supplémentaires, de la part de Ryanair ou de la CCI, propres à augmenter notablement
le trafic par rapport au trafic réalisé auparavant.
(466) Ce trafic supplémentaire correspondant à la deuxième fréquence de la saison d’été
2004 est le seul trafic incrémental lié aux échanges de courriers de 2004. La
Commission a donc intégré ce trafic incrémental dans son analyse, ainsi que les
recettes incrémentales et coûts d’exploitation incrémentaux qui y sont associés, selon
les principes présentés ci-dessus. S’agissant des coûts marketing incrémentaux, la
Commission a intégré dans son analyse l’augmentation ponctuelle prévue pour la
saison d’été 2004 pour l’ensemble des passagers (et non seulement ceux correspondant
à la fréquence supplémentaire). Le tableau 8 figurant au présent considérant présente
les résultats de cette analyse.
Tableau 8: bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante des
échanges de courriers de 2004
2004
nombre de passagers total arrivée et départ [0-50 000]
nombre de rotations par an [150-200]
redevance atterrissage […]
redevance passagers […]
produits assistance en escale -
total recettes aéronautiques […]
recettes extra aéronautiques […]
total recettes […]
coûts de fonctionnement (personnel, achats divers…) […]
coûts marketing […]
total coûts […]
flux incrémentaux (recettes moins coûts) - [100 000-150 000]
(467) Ce tableau montre qu’un opérateur en économie de marché se serait attendu à un flux
incrémental négatif en 2004. Par conséquent, la transaction constituée par les échanges
de courriers de 2004 a conféré un avantage économique à Ryanair.
93
7.1.1.2.5.4.1.4 Contrats de 2005
(468) Par le contrat de services aéroportuaires du 10 octobre 2005 et le contrat de services
marketing conclu le même jour (« les contrats de 2005 »), Ryanair s’est engagée à
exploiter :
- une liaison vers Londres à raison d’une fréquence quotidienne, à laquelle devait
s’ajouter une fréquence quotidienne au cours de la saison d’été 2005, pendant six
mois ;
- une liaison vers Liverpool à raison de quatre fréquences hebdomadaires ;
- à partir de fin mars 2006, une troisième liaison, dont le lancement devait être
annoncé avant la fin de l’année 2005, représentant au moins [0-50 000] passagers
au départ par an ;
- à partir de fin avril 2006, une quatrième liaison, dont le lancement devait être
annoncé avant la fin de l’année 2005, représentant au moins [0-50 000] passagers
au départ par an.
(469) Ces contrats ont remplacé la convention du 11 avril 2000, ainsi résiliée avant son
terme initial, en instituant des conditions contractuelles totalement différentes. Le
préambule du contrat de services aéroportuaires de 2005 indique que Ryanair, après
avoir mené une « exploitation expérimentale prudente »135
d’une liaison quotidienne
vers Londres, envisage d’établir une activité permanente à Nîmes et d’augmenter le
nombre de liaisons au départ de cet aéroport « à condition que les conditions
techniques et financières proposées par [la CCI] soient acceptables, de façon à
rendre l’exploitation des liaisons viables ».136
(gras ajouté).
(470) Ce passage suggère que si la CCI n’avait pas accepté les termes des contrats de 2005,
Ryanair l’aurait menacée de cesser toutes ses activités au départ de l'aéroport de
Nîmes, au motif que l’exploitation de la liaison vers Londres n’était pas
économiquement viable. Un opérateur en économie de marché prudent aurait sans
doute pris cette menace au sérieux, et ce d’autant plus que la convention d’avril 2000
ne contenait pas d’engagement clair et irrévocable de la part de Ryanair d’exploiter la
liaison vers Londres pendant les dix ans prévus par la convention. Ainsi, un opérateur
en économie de marché prudent agissant à la place de la CCI aurait vraisemblablement
estimé que s’il ne concluait pas les contrats en question, Ryanair cesserait toutes ses
activités au départ de l'aéroport de Nîmes.
(471) Le trafic incrémental lié aux contrats de 2005 correspond donc au trafic attendu sur
l’ensemble des liaisons et fréquences mentionnées dans ces contrats. Pour chacune de
ces liaisons et pour les raisons développées ci-dessus, au vu notamment des prestations
marketing offertes par Ryanair, un facteur de charge de 85% a été retenu. Comme les
fréquences des troisième et quatrième liaisons n’étaient pas connues lors de la
conclusion des contrats, la Commission les a déterminées au prorata des nombres
minimaux de passagers auxquels Ryanair s’est engagée dans les contrats de 2005137
,
135
Traduction libre du texte anglais (« a prudent experimental operation »). 136
Traduction libre du texte anglais (« provided that both technical and financial conditions proposed by
FNI were acceptable, so as to make the operation of the routes viable. »). FNI est le code IATA
désignant l’aéroport de Nîmes. 137
Pour la quatrième liaison, le nombre minimum de passagers spécifié dans le contrat ([0-50 000]
passagers au départ) est identique à celui prévu pour la liaison vers Liverpool. Une fréquence identique
à celle de la liaison vers Liverpool (quatre fréquences hebdomadaires) est donc retenue pour la
quatrième liaison. En ce qui concerne la troisième liaison, pour laquelle un minimum de [0-50 000]
passagers au départ était spécifié dans le contrat, le même raisonnement conduit à retenir l’hypothèse de
trois fréquences hebdomadaires.
94
aux fins de reconstruire les hypothèses sur lesquelles se serait fondé un opérateur en
économie de marché prudent.
(472) La Commission a donc intégré ce trafic incrémental dans son analyse, ainsi que les
recettes et coûts incrémentaux qui y sont associés, selon les principes présentés ci-
dessus. Elle a également intégré le coût représenté par les « incitations » financières
prévues à l’article 8 du contrat de services aéroportuaires du 10 octobre 2005, à savoir
un paiement de la CCI à Ryanair correspondant à […] euros par passager au départ et
[…] euros par rotation.
Tableau 9 : bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante des
contrats de 10 octobre de 2005
2005 2006 2007 2008 2009
nombre de passagers total arrivée et départ
[200
000-250
000]
[250
000-300
000]
[250 000-
300 000]
[300 000-
350 000]
[300 000-
350 000]
nombre de rotations par an
[750-
800]
[800-
850] [850-900] [900-950] [900-950]
redevance atterrissage […] […] […] […] […]
redevance passagers […] […] […] […] […]
produits assistance en escale […] […] […] […] […]
total recettes aéronautiques […] […] […] […] […]
recettes extra aéronautiques […] […] […] […] […]
total recettes […] […] […] […] […]
coûts de fonctionnement (personnel, achats
divers…) […] […] […] […] […]
coûts marketing […] […] […] […] […]
incitations financières […] […] […] […] […]
total coûts […] […] […] […] […]
flux incrémentaux (recettes moins coûts)
-[150 000-
200 000]
-[250
000-300
000]
-[200 000-
250 000]
-[100 000-
150 000]
-[50 000-
100 000]
(473) Ce tableau montre qu’un opérateur en économie de marché se serait attendu à des flux
incrémentaux annuels négatifs jusqu’à l’expiration des contrats de 2005. Par
conséquent, la transaction constituée par les contrats de 2005 a conféré un avantage
économique à Ryanair / AMS.
95
7.1.1.2.5.4.1.5 Avenant du 30 janvier 2006
(474) Il résulte de la lecture de l’avenant du 30 janvier 2006 et des explications de la France
que cet avenant n’a fait que confirmer le maintien en vigueur des contrats de 2005 (qui
ne devaient expirer que fin 2009) jusqu’à ce que la CCI cesse d’exploiter l’aéroport de
Nîmes. Cet avenant n’a donc pas conféré d’avantage supplémentaire à Ryanair / AMS
par rapport à celui qui résulte des contrats de 2005. L’avenant du 30 janvier 2006 ne
constitue donc pas une aide d’Etat.
7.1.1.2.5.4.1.6 Avenant du 17 octobre 2006
(475) Il résulte de la lecture de l’avenant du 17 octobre 2006 et des explications de la France
que cet avenant a réduit le volume des prestations marketing fournies pour l’année
2006 en raison de l’impossibilité pour la CCI de fournir les supports de marketing qui
devaient figurer sur le site de Ryanair, et de la suspension de la fourniture des
prestations de marketing pendant près d’un semestre. Cette situation est due au fait que
la CCI n’a pas été en mesure de fournir les textes qui devaient être repris sur le site de
Ryanair. Ces prestations de marketing ont donc pris du retard et ont été réalisées dans
le courant du second semestre 2006 ce qui a entraîné une révision à la baisse du
montant des prestations pour l’année 2006.
(476) Dans la mesure où le retard en question est imputable à la CCI et où celle-ci a
néanmoins obtenu d’AMS une réduction des paiements marketing résultant de leur
contrat de 2005, la CCI s’est comportée à cette occasion comme un opérateur en
économie de marché prudent. L’avenant du 17 octobre 2006 n’a donc pas conféré
d’avantage économique à Ryanair et ne constitue donc pas une aide d’Etat.
7.1.1.2.5.4.1.7 Contrats du 2 janvier 2007
(477) Le contrat de services aéroportuaires du 2 janvier 2007 et le contrat de services
marketing conclu le même jour (« les contrats du 2 janvier 2007 »), sont les premiers
que VTAN a conclus avec Ryanair / AMS. En l’absence de ces contrats, Ryanair
aurait été libre de cesser toutes ses activités à Nîmes. Le trafic incrémental lié aux
contrats du 2 janvier 2007 correspond donc au trafic attendu sur l’ensemble des
liaisons et fréquences mentionnées dans ces contrats, à savoir, pour la période allant
du 2 janvier au 31 octobre 2007 :
- une liaison vers Londres à raison d’une fréquence quotidienne ;
- une liaison vers Liverpool à raison de quatre fréquences hebdomadaires ;
- une liaison vers Charleroi à raison de quatre fréquences hebdomadaires ;
- une liaison vers East Midlands à raison de trois fréquences hebdomadaires.
(478) En utilisant, pour les raisons évoquées précédemment, un facteur de charge de 85%, la
Commission a intégré ce trafic incrémental dans son analyse ainsi que les recettes et
coûts incrémentaux qui y sont associés, selon les principes présentés ci-dessus. Elle a
également intégré le coût représenté par les « incitations » financières prévues à
l’article 8 du contrat de services aéroportuaires du 2 janvier 2007, à savoir un
paiement de VTAN à Ryanair par passager au départ qui augmente par paliers avec le
nombre de passagers.
96
Tableau 10 : bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante des
contrats du 2 janvier 2007
2007
nombre de passagers total arrivée et départ [250 000-300 000]
nombre de rotations par an [750-800]
redevance atterrissage […]
redevance passagers […]
produits assistance en escale […]
total recettes aéronautiques […]
recettes extra aéronautiques […]
total recettes […]
coûts de fonctionnement (personnel, achats divers…) […]
coûts marketing […]
incitations financières […]
total coûts […]
flux incrémentaux (recettes moins coûts) - [700 000-750 000]
(479) Le tableau 10 figurant au considérant précédent montre qu’un opérateur en économie
de marché se serait attendu à un flux incrémental négatif de […] euros sur la période
allant du 2 janvier au 31 octobre 2007. Par conséquent, la transaction constituée par les
contrats du 2 janvier 2007 a conféré un avantage économique à Ryanair / AMS.
7.1.1.2.5.4.1.8 Avenant du 1er août 2007
(480) L’avenant du 1er
août 2007 au contrat de services marketing du 2 janvier 2007
(« l’avenant du 1er
août 2007 ») prévoit le versement d’une contribution marketing
supplémentaire de VTAN à AMS d’un montant de […] euros pour la période comprise
entre le 1er
septembre 2007 et le 28 février 2008. Selon la France, « Cet avenant
conditionnait le maintien de la liaison Ryanair vers Charleroi pour la saison hiver
2007-2008. Il était particulièrement important pour VTAN de maintenir cette liaison
dans la mesure où (i) Ryanair était son principal opérateur/client et (ii) la concession
de l’aéroport de Nîmes était la première à avoir été attribuée au groupe Veolia. Le
montant de la contribution supplémentaire de […] EUR a été « imposé » par Ryanair
à VTAN, qui compte tenu de sa position d’entrant sur le marché ne se trouvait pas en
position de force pour négocier cette contribution à la baisse. »
97
(481) Il résulte de ces explications qu’un opérateur en économie de marché gérant l’aéroport
de Nîmes se serait attendu à ce que, sans la conclusion de cet avenant, Ryanair
supprime ses quatre fréquences hebdomadaires vers Charleroi au cours de la saison
d’hiver 2007-2008. Cette hypothèse aurait été d’autant plus plausible que les contrats
du 2 janvier 2007 arrivaient à échéance le 31 octobre 2007 et qu’il n’y avait donc
aucune garantie pour VTAN que Ryanair exploite sa liaison vers Charleroi au-delà de
cette date.
(482) Le trafic incrémental lié à l’avenant du 1er
août 2007 correspond donc au trafic
correspondant à ces quatre fréquences hebdomadaires au cours de la période en
question, qui auraient été « perdues » dans la situation contrefactuelle. En utilisant,
pour les raisons évoquées précédemment, un facteur de charge de 85%, la Commission
a intégré ce trafic incrémental dans son analyse ainsi que les recettes et coûts
incrémentaux qui y sont associés, selon les principes présentés ci-dessus. Elle a
également intégré le coût représenté par les « incitations » financières prévues à
l’article 8 du contrat de services aéroportuaires du 2 janvier 2007, à savoir un
paiement de VTAN à Ryanair par passager au départ qui augmente par paliers avec le
nombre de passagers.
Tableau 11 : bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante de
l’avenant du 1er
août 2007
saison d'hiver 2007-2008
nombre de passagers total arrivée et départ [0-50 000]
nombre de rotations par an [100-150]
redevance atterrissage […]
redevance passagers […]
produits assistance en escale […]
total recettes aéronautiques […]
recettes extra aéronautiques […]
total recettes […]
coûts de fonctionnement (personnel, achats divers…) […]
coûts marketing […]
incitations financières […]
total coûts […]
flux incrémentaux (recettes moins coûts) -[150 000-200 000]
98
(483) Le tableau 11 figurant au considérant précédent montre qu’un opérateur en économie
de marché se serait attendu à un flux incrémental négatif de -[150 000-200 000] euros
au cours de la saison d’hiver 2007-2008. Par conséquent, l’avenant du 1er
août 2007 a
conféré un avantage économique à Ryanair / AMS.
7.1.1.2.5.4.1.9 Contrats du 1er novembre 2007
(484) Le contrat de services aéroportuaires et le contrat de services marketing conclus pour
un an le 1er
novembre 2007 (« les contrats du 1er
novembre 2007») ont succéde aux
contrats du 2 janvier 2007, venus à expiration. En l’absence de ces contrats, Ryanair
aurait pu cesser toutes ses activités à Nîmes. Ainsi, le trafic incrémental lié à ces
contrats correspond à l’ensemble des liaisons et fréquences mentionnées dans ces
contrats, à savoir :
- une liaison vers Londres à raison d’une fréquence quotidienne au cours de la
saison d’été et de quatre fréquences hebdomadaires au cours de la saison d’hiver ;
- une liaison vers Liverpool à raison de quatre fréquences hebdomadaires au cours
de la saison d’été et de deux fréquences hebdomadaires au cours de la saison
d’hiver ;
- une liaison vers Charleroi à raison de quatre fréquences hebdomadaires toute
l’année;138
- une liaison vers East Midlands à raison de deux fréquences hebdomadaires au
cours de la saison d’été.
(485) En utilisant, pour les raisons évoquées précédemment, un facteur de charge de 85%, la
Commission a intégré ce trafic incrémental dans son analyse ainsi que les recettes et
coûts incrémentaux qui y sont associés, selon les principes présentés ci-dessus. Elle a
également intégré le coût représenté par les « incitations » financières précitées
prévues à l’article 8 du contrat de services aéroportuaires du 1er
novembre 2007, à
savoir un paiement de VTAN à Ryanair par passager au départ qui augmente par
paliers avec le nombre de passagers.
Tableau 12: bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante des
contrats du 1er
novembre 2007
hiver 2007-
2008 été 2008
nombre de passagers total arrivée et départ
[50 000-100
000]
[100 000-
150 000]
nombre de rotations par an [250-300] [400-450]
redevance atterrissage […] […]
redevance passagers […] […]
138
S’agissant de la liaison de Charleroi, il faut noter que même si, dans le cadre de l’avenant du 1er
août
2007, VTAN a consenti des paiements marketing supplémentaires de […] euros en contrepartie de la
poursuite de l’exploitation de cette liaison au cours de la saison d’hiver 2007-2008, il apparaît au vu des
éléments du dossier que Ryanair ne s’est pas formellement engagée auprès de VTAN à poursuivre
l’exploitation de la liaison en août 2007. Ainsi, en novembre 2007, Ryanair était libre d’interrompre
cette activité.
99
produits assistance en escale […] […]
total recettes aéronautiques […] […]
recettes extra aéronautiques […] […]
total recettes […] […]
coûts de fonctionnement (personnel, achats divers…) […] […]
coûts marketing […] […]
incitations financières […] […]
total coûts […] […]
flux incrémentaux (recettes moins coûts)
-[700 000-
750 000]
-[800 000-
850 000]
(486) Le tableau 12 figurant au considérant précédent montre qu’un opérateur en économie
de marché se serait attendu à des flux incrémentaux négatifs. Par conséquent, les
contrats du 1er
novembre 2007 ont conféré un avantage économique à Ryanair / AMS.
7.1.1.2.5.4.1.10 Contrats du 27 août 2008
(487) Le contrat de services aéroportuaires et le contrat de services marketing, conclus pour
un an le 27 août 2008 et applicables à partir du 1er
novembre 2008 (« les contrats du
27 août 2008») ont pris la suite des contrats du 1er
novembre 2007, venus à expiration.
En l’absence de ces contrats, Ryanair aurait pu cesser toutes ses activités à Nîmes.
Ainsi, le trafic incrémental liés à ces contrats correspond à l’ensemble des liaisons et
fréquences mentionnés dans ces contrats, à savoir :
- une liaison vers Londres à raison d’une fréquence quotidienne au cours de la
saison d’été et de quatre fréquences hebdomadaires au cours de la saison d’hiver ;
- une liaison vers Charleroi à raison de quatre fréquences hebdomadaires toute
l’année.
(488) En utilisant, pour les raisons évoquées précédemment, un facteur de charge de 85%, la
Commission a intégré ce trafic incrémental dans son analyse ainsi que les recettes et
coûts incrémentaux qui y sont associés, selon les principes présentés ci-dessus. Elle a
également intégré le coût représenté par les « incitations » financières prévues à
l’article 8 du contrat de services aéroportuaires du 27 août 2008, à savoir un paiement
de VTAN à Ryanair par passager au départ qui augmente par paliers avec le nombre
de passagers.
100
Tableau 13 : bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante des
contrats du 27 août 2008
hiver 2008-
2009 été 2009
nombre de passagers total arrivée et départ
[50 000-100
000]
[50 000-100
000]
nombre de rotations par an [200-250] [250-300]
redevance atterrissage […] […]
redevance passagers […] […]
produits assistance en escale […] […]
total recettes aéronautiques […] […]
recettes extra aéronautiques […] […]
total recettes […] […]
coûts de fonctionnement (personnel, achats divers…) […] […]
coûts marketing […] […]
incitations financières […] […]
total coûts […] […]
flux incrémentaux (recettes moins coûts)
-[450 000-500
000]
-[500 000-550
000]
(489) Le tableau 13 figurant au considérant précédent montre qu’un opérateur en économie
de marché se serait attendu à des flux incrémentaux négatifs. Par conséquent, les
contrats du 27 août 2008 ont conféré un avantage économique à Ryanair / AMS.
7.1.1.2.5.4.1.11 Contrats du 25 août 2009
(490) Le 25 août 2009, VTAN a conclu avec Ryanair et AMS deux contrats (« les contrats
du 25 août 2009»), sous forme d’avenants prolongeant jusqu’au 31 décembre 2011
l’application des contrats du 27 août 2008, venus à expiration le 1er
novembre 2009.
En l’absence des contrats du 25 août 2009, Ryanair aurait pu cesser toutes ses activités
à Nîmes. Ainsi, le trafic incrémental liés à ces contrats correspond à l’ensemble des
liaisons et fréquences mentionnés dans les contrats du 27 août 2008.
(491) En utilisant, pour les raisons évoquées précédemment, un facteur de charge de 85%, la
Commission a intégré ce trafic incrémental dans son analyse ainsi que les recettes et
coûts incrémentaux qui y sont associés, selon les principes présentés ci-dessus. Elle a
101
également intégré le coût représenté par les « incitations » financières précitées
prévues à l’article 8 du contrat de services aéroportuaires du 27 août 2008.
Tableau 14: bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante des
contrats du 25 août 2009
hiver 2009-
2010 été 2010
hiver 2010-
2011 été 2011
hiver 2011-
2012
(jusqu'au
31/12/11)
nombre de passagers total
arrivée et départ
[50 000-100
000]
[50 000-100
000]
[50 000-100
000]
[50 000-100
000] [0-50 000]
nombre de rotations par an [200-250] [250-300] [200-250] [250-300] [50-100]
redevance atterrissage […] […] […] […] […]
redevance passagers […] […] […] […] […]
produits assistance en escale […] […] […] […] […]
total recettes aéronautiques […] […] […] […] […]
recettes extra aéronautiques […] […] […] […] […]
total recettes […] […] […] […] […]
coûts de fonctionnement
(personnel, achats divers…) […] […] […] […] […]
coûts marketing […] […] […] […] […]
incitations financières […] […] […] […] […]
total coûts […] […] […] […] […]
flux incrémentaux (recettes
moins coûts)
-[450 000-
500 000]
-[500 000-
550 000]
-[450 000-
500 000]
-[450 000-
500 000]
-[150 000-
200 000]
(492) Le tableau 14 figurant au considérant précédent montre qu’un opérateur en économie
de marché se serait attendu à des flux incrémentaux négatifs. Par conséquent, les
contrats du 25 août 2009 ont conféré un avantage économique à Ryanair / AMS.
7.1.1.2.5.4.1.12 Avenant du 18 août 2010
(493) L’avenant du 18 août 2010 au contrat de services marketing du 27 août 2008
(« l’avenant du 18 août 2010 ») a consisté en une augmentation ponctuelle de [20 000-
50 000] euros des paiements marketing de VTAN par rapport aux termes du contrat de
services marketing du 27 août 2008, prolongé par l’avenant du 25 août 2009. Cette
augmentation n’était conditionnée à aucun engagement de Ryanair en matière
102
d’ouverture de nouvelles liaisons, d’augmentation de fréquences, de non fermeture de
liaisons ou de non réduction de fréquences.
(494) Selon la France, « l’avenant du 18 août 2010 concerne des modifications ponctuelles
(paiement supplémentaire pour des prestations marketing ponctuelles) et de montant
très mineur qui ne sont pas de nature à modifier les liaisons et les fréquences prévues
dans le contrat initial (contrat du 27 août 2008) ou le trafic attendu (…). Sa signature
s’inscrit dans le contexte du maintien de bonnes relations commerciales entre le
gestionnaire d’aéroport et Ryanair, là encore très importantes pour VTAN dans la
mesure où (i) Ryanair était son principal opérateur/client et (ii) la concession de
l’aéroport de Nîmes était la première à avoir été attribuée au groupe Veolia.
L’avenant peut ainsi être assimilé à un geste commercial qui ne bouleverse pas
l’économie générale de la concession. »
(495) Les prestations marketing ponctuelles prévues dans cet avenant n’étaient pas de nature
à augmenter le trafic sur les liaisons concernées. La France n’a d’ailleurs pas fait
valoir un tel argument, se contentant de décrire cet avenant comme un « geste
commercial » de la part de VTAN. L’augmentation des paiements marketing a donc
représenté un coût incrémental net pour VTAN, sans qu’aucune recette incrémentale
ne puisse être attendue en contrepartie. Il représente donc un flux incrémental net
négatif de [-50 000-0] euros pour l’année 2010. Ainsi, l’avenant du 18 août 2010 a
conféré un avantage économique à Ryanair / AMS.
Tableau 15 : bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante de
l’avenant du 18 août 2010
2010 2011
nombre de passagers total arrivée et départ
nombre de rotations par an
redevance atterrissage
redevance passagers
produits assistance en escale
total recettes aéronautiques
recettes extra aéronautiques
autres (produits financiers)
total recettes - -
coûts de fonctionnement (personnel, achats
divers…)
coûts marketing [0-50 000]
incitations financières
total coûts [0-50 000] -
103
flux incrémentaux (recettes moins coûts) -[0-50 000] -
7.1.1.2.5.4.1.13 Avenant du 30 novembre 2010
(496) L’avenant du 30 novembre 2010 au contrat de services marketing du 27 août 2008
(« l’avenant du 30 novembre 2010 ») a consisté en une augmentation ponctuelle de 50
000 euros des paiements marketing de VTAN par rapport aux termes du contrat de
services marketing du 27 août 2008, prolongé par l’avenant du 25 août 2009. De la
lecture de l’avenant du 30 novembre 2010, des échanges de courriers électroniques
entre Ryanair et VTAN ayant donné lieu à cet avenant, ainsi que des explications
fournies par la France, il ressort que Ryanair avait conditionné l’exploitation de trois
fréquences hebdomadaires au lieu de deux sur la liaison Nîmes-Liverpool au cours de
la saison d’été 2011 au paiement marketing supplémentaire de [35 000-65 000] euros.
Un courrier électronique d’un représentant de Ryanair à un représentant de VTAN
datée du 29 novembre 2010 indique notamment : « Oui, la […] fréquence sera là à
[…], et en échange vous allez nous donner les […]».139
(497) Le trafic incrémental lié à l’avenant du 30 novembre 2010 correspond donc à une
fréquence hebdomadaire seulement. En utilisant, pour les raisons évoquées
précédemment, un facteur de charge de 85%, la Commission a intégré ce trafic
incrémental dans son analyse ainsi que les recettes et coûts incrémentaux qui y sont
associés, selon les principes présentés ci-dessus.
Tableau 16 : bilan de la reconstruction de l’analyse de rentabilité ex ante de
l’avenant du 30 novembre 2010
été 2011
nombre de passagers total arrivée et départ [0-50 000]
nombre de rotations [0-50]
redevance atterrissage […]
redevance passagers […]
produits assistance en escale […]
total recettes aéronautiques […]
recettes extra aéronautiques […]
total recettes […]
coûts de fonctionnement (personnel, achats divers…) […]
coûts marketing […]
total coûts […]
139
Traduction libre du texte anglais (« Yes the […] frequencies will be there for […] and in return you
will give us […]»).
104
flux incrémentaux (recettes moins coûts) -[0-50 000]
(498) Le tableau 16 figurant au considérant précédent montre qu’un opérateur en économie
de marché se serait attendu à un flux incrémental négatif de -[0-50 000] euros. Par
conséquent, l’avenant du 30 novembre 2010 a conféré un avantage économique à
Ryanair / AMS.
7.1.1.3 Distorsions de concurrence et affectation des échanges entre Etats membres
(499) Lorsqu’une aide financière accordée par un Etat membre renforce la position
d'entreprises par rapport à d'autres entreprises concurrentes dans les échanges
intracommunautaires, ces derniers doivent être considérés comme influencés par
l'aide. Selon une jurisprudence constante140
, pour qu'une mesure fausse la concurrence,
il suffit que le destinataire de l'aide soit en concurrence avec d'autres entreprises sur
des marchés ouverts à la concurrence.
(500) Depuis l’entrée en vigueur du troisième volet de libéralisation du transport aérien le
1er janvier 1993,141
rien n’empêche les transporteurs aériens de l'Union d’exploiter des
vols sur les liaisons intra-Union et de bénéficier de l’autorisation de cabotage illimitée
(501) Les avantages reçus par Ryanair / AMS au travers des différents contrats faisant
l’objet du présent examen, et pour lesquels l’existence d’un tel avantage a été établie
ci-dessus, ont donc renforcé leur position par rapport à tous les autres transporteurs
aériens communautaires, en concurrence effective ou potentielle avec Ryanair sur les
liaisons où celle-ci est présente. Ainsi, ils ont faussé ou menacé de fausser la
concurrence et affecté les échanges intra-communautaires.
7.1.1.4 Conclusion sur la présence d’aides d’Etat en faveur de Ryanair/AMS
(502) Les contrats suivants remplissent les conditions cumulatives énoncées à l’article 107,
paragraphe 1, du TFUE et constituent des aides d’Etat en faveur de Ryanair / AMS :
- les courriers de fin 2001 – début 2002 et mars 2004 qui ont modifié
substantiellement le contenu du contrat conclu par la CCI avec Ryanair le 11 avril
2000;
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 10 octobre 2005
conclus par la CCI avec Ryanair/AMS ;
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 2 janvier 2007
conclus par VTAN avec Ryanair/AMS;
- l’avenant du 1er
août 2007 au contrat de services marketing di du 2 janvier 2007 ;
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 1er
novembre
2007 conclus par VTAN avec Ryanair/AMS.
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 27 août 2008
conclus par VTAN avec Ryanair/AMS;
- les avenants modificatifs aux contrats du 27 août 2008 datés des 25 août 2009,18
août 2010 et 30 novembre 2010.
140
Arrêt dans l'affaire T-214/95, Het Vlaamse Gewest (Région flamande) contre Commission des
Communautés européennes, Rec. 1998, p. II-717. 141
Règlements du Conseil (CEE) n° 2407/92, n° 2408/92 et n° 2409/92, JO L 240 du 24.8.1992.
105
(503) Les autres contrats faisant l’objet du présent examen ne constituent pas des aides
d’Etat.
7.1.2 Caractère illégal des aides d’Etat
(504) Les aides d’Etat identifiées ci-dessus ayant été mises en œuvre sans être autorisées par
la Commission, elles constituent des aides illégales.
7.1.3 Compatibilité avec le marché intérieur
(505) Les aides en question constituent des aides au fonctionnement. Or, de telles aides ne
peuvent être déclarées compatibles que dans des circonstances exceptionnelles et
dûment justifiées.
(506) De plus, il résulte de la jurisprudence de la Cour,142
qu’il revenait à la France
d'indiquer sur quelle base légale les aides en cause pouvaient être considérées comme
compatibles avec le marché intérieur, et de démontrer que les conditions de
compatibilité étaient réunies. La Commission a donc invité la France dans la décision
d'ouverture et dans une demande de renseignements complémentaires à indiquer de
potentielles bases légales de compatibilité, ainsi qu'à établir si les conditions de
compatibilité applicables étaient remplies, notamment au cas où les aides en question
devaient être considérées comme des aides au démarrage à l’ouverture de nouvelles
liaisons. Toutefois la France n'a jamais soutenu que les mesures examinées
constituaient des aides au démarrage compatibles avec le marché intérieur, et n’a
jamais proposé d’autres bases de compatibilité possible, ni de raisonnement qui aurait
permis de déclarer ces aides compatibles avec le marché intérieur. De surcroît, aucun
tiers intéressé n'a tenté de démontrer la compatibilité de ces mesures avec le marché
intérieur.
(507) La Commission estime néanmoins utile d'examiner dans quelle mesure ces aides
pourraient être déclarées compatibles au titre de leur contribution éventuelle à
l’ouverture de nouvelles liaisons ou de nouvelles fréquences. Il convient, cependant,
de souligner que cet examen revêt un caractère surabondant, car en l'absence
d'éléments démontrant la compatibilité des aides fournies par l'Etat membre ou les
tiers intéressés, les aides devraient être déclarées incompatibles.
(508) Les nouvelles lignes directrices indiquent, à l’égard de telles aides : « En ce qui
concerne les aides au démarrage octroyées à des compagnies aériennes, la
Commission appliquera les principes énoncés dans les présentes lignes directrices à
toutes les aides au démarrage notifiées sur lesquelles elle devra statuer à compter du
4 avril 2014, même si les mesures ont été notifiées avant cette date. Conformément à
sa communication sur la détermination des règles applicables à l’appréciation des
aides d’État illégales, la Commission appliquera aux aides illégales au démarrage
octroyées à des compagnies aériennes les règles en vigueur à la date de leur octroi.
En conséquence, elle n’appliquera pas les principes énoncés dans les présentes lignes
directrices aux aides illégales au démarrage octroyées à des compagnies aériennes
avant le 4 avril 2014 ».143
(509) Les lignes directrices de 2005 stipulent que « la Commission examinera la
compatibilité de toute aide au financement des infrastructures aéroportuaires ou
d'aide au démarrage octroyée sans son autorisation et donc en violation de l'article
88, paragraphe 3, du traité sur la base des présentes lignes directrices si l'aide a
commencé d'être octroyée après leur publication au Journal officiel de l'Union
142
Voir l'arrêt dans l'affaire C-364/90, Italie/Commission, Rec. 1993, p. I-02097, point 20. 143
Nouvelles lignes directrices, paragraphe 174.
106
européenne. Dans les autres cas, elle fera l'examen sur la base des règles applicables
au moment du début de l'octroi de l'aide ».144
(510) La Commission rappelle que les aides en question ont été octroyées en partie pour
stimuler le démarrage de nouvelles liaisons aériennes ou augmenter la fréquence sur
des liaisons existantes ou encore pour le maintien de liaisons qui auraient pu autrement
être arrêtées. Il s'agit donc d'aides au fonctionnement qui visent la promotion du trafic
aérien au départ d’un aéroport régional. A ce propos, il faut rappeler que les aides au
fonctionnement sont rarement susceptibles d'être déclarées compatibles avec le marché
commun dans la mesure elles faussent habituellement les conditions de concurrence
dans les secteurs où elles sont octroyées.
7.1.3.1 Mesures antérieures à l’entrée en vigueur des lignes directrices de
2005
(511) Certaines des mesures en cause ont été octroyées avant la publication des lignes
directrices de 2005, le 9 décembre 2005.145
En ce qui concerne la compatibilité des
aides octroyées avant cette date, le point 85 des lignes directrices de 2005, ainsi que le
point 173 des nouvelles lignes directrices renvoient aux règles applicables au moment
où l'aide a été octroyée.
(512) Avant l'adoption des lignes directrices de 2005, la Commission avait adopté les lignes
Directrices de 1994.146
Cependant ces lignes directrices ne se penchaient pas
spécifiquement sur la problématique des aides au fonctionnement visant la promotion
du trafic aérien au départ des aéroports régionaux. En effet, cette problématique est
apparue graduellement avec le phénomène de la congestion progressive de certains
grands aéroports européens et le développement de l'activité des opérateurs à bas
coûts, qui en 1994 n'étaient pas encore une réalité. La Commission estime en
conséquence que les lignes directrices de 1994 sont également inapplicables au cas
d'espèce. La Commission doit donc en principe évaluer la compatibilité des aides en
question directement sur la base de l'article 107, paragraphe 3, sous c), du TFUE.
(513) A ce propos il convient de remarquer que l'appréciation de la Commission vis-à-vis de
ce type d'aides d'Etat s'est affinée au fil du temps, tout en gardant certain points
inchangés. Ceux-ci découlent des principes généraux régissant la compatibilité des
aides conformément à la disposition susmentionnée du traité.
(514) Ainsi dans la décision concernant l'aéroport de Manchester de juin 1999,147
la
Commission avait considéré comme compatibles avec les règles régissant les aides
d'Etat des réductions de charge aéroportuaires octroyés de manière non
discriminatoires et limitées dans le temps en tant que mesures visant la promotion de
nouvelles routes.
(515) Ensuite, dans la décision de février 2004 relative à l’aéroport de Charleroi,148
la
Commission avait expliqué que "Les aides opérationnelles destinées à aider au
lancement de nouvelles lignes aériennes ou au renforcement de certaines fréquences
peuvent être un outil nécessaire au développement de petits aéroports régionaux.
144
Paragraphe 85 des lignes directrices de 2005. 145
Voir section 3.2.2.1. 146
Lignes directrices de la Commission relatives à l'application des articles 92 et 93 du traité CE et de
l'article 61 de l'accord EEE aux aides d'État dans le secteur de l'aviation (JO C 350 du 10.12.1994, p. 5). 147
Décision dans l'affaire NN 109/98, Royaume-Uni, Manchester Airport. 148
Décision 2004/393/CE «Les avantages consentis par la Région wallonne et Brussels South Charleroi
Airport à la compagnie aérienne Ryanair lors de son installation à Charleroi ». JO L 137 du 30.4.2004
p. 280. Cette décision a été annulée par l'arrêt du 17 décembre 2008 dans l’affaire T-196/04, Ryanair
Ltd/Commission (arrêt «Charleroi»), Recueil 2008, p. II-3643, elle témoigne néanmoins l'évolution de
l'appréciation de la Commission sur les aides en question.
107
Celles-ci peuvent effectivement convaincre les entreprises intéressées de prendre le
risque d'investir dans de nouvelles routes. Toutefois, afin de déclarer de telles aides
compatibles sur la base de l'article 87, paragraphe 3, point c), du traité, il convient de
déterminer si ces aides sont nécessaires et proportionnées par rapport à l'objectif
recherché et si elles n'affectent pas les échanges dans une mesure contraire à l'intérêt
commun".149
La Commission avait alors identifié certain conditions à remplir pour
pouvoir déclarer compatibles ces aides au fonctionnement, à savoir, notamment :
- l'aide doit contribuer à l'objectif d'intérêt communautaire de développer un
aéroport régional au moyen d'une augmentation nette du trafic sur des nouvelles
routes;150
- l'aide doit être nécessaire au sens où elle ne vise pas une route déjà exploitée par la
même compagnie, une autre ou une route similaire;151
- l'aide doit avoir un effet incitatif au sens où elle doit contribuer à développer une
activité qui, après une certain période, est susceptible de devenir rentable, ce qui
implique que la durée de l'aide soit limitée;152
- l'aide doit être proportionnelle c'est-à-dire que le montant doit être lié au
développement net du trafic;153
- l'aide doit avoir été octroyée de manière transparente et non discriminatoire et ne
doit pas être cumulée avec d'autres types d’aides.
(516) Les lignes directrices de 2005 et les nouvelles lignes directrices ont décliné ces
principes de compatibilité de manière précise, mais il n’en reste pas moins que les
aides au fonctionnement octroyées aux compagnies aériennes peuvent être déclarées
compatibles par la Commission pour autant qu'elle contribuent au développement
d'aéroports de taille modeste au moyen d'une augmentation nette du trafic sur des
nouvelles routes, que l'aide soit nécessaire dans le sens qu'elle ne concerne pas une
route déjà exploitée par la même ou une autre compagnie ou une route similaire,154
qu'elle soit limitée dans le temps et que la liaison pour laquelle l'aide est octroyée soit
susceptible de devenir rentable,155
que le montant soit lié au développement net du
trafic et que l'aide soit octroyée de manière transparente et non discriminatoire, et
qu'elle ne soit pas cumulée avec d'autre types aides.156
(517) Par ailleurs, au point 301 de la décision d'ouverture la Commission avait indiqué
qu'elle se proposait d’examiner la compatibilité de ces aides à la lumière de l'article
107 paragraphe 3 sous c) du TFUE ni aucun tiers intéressé ni la France, se sont
opposés à cette approche.
(518) En conclusion, la Commission estime que, dans le cas d'espèce, il convient d'examiner
la compatibilité des mesures suivantes à la lumière des principes généraux
susmentionnés:
149
Décision Charleroi paragraphe 279. 150
Voir paragraphes 283-297. 151
Voir paragraphes 288-309. 152
Voir paragraphes 311-317. 153
Voir paragraphes 318-325. 154
Voir paragraphes 71-75, et paragraphes 79 (b) et (c) des lignes directrices de 2005, et paragraphes 139,
140, 141, 151 des nouvelles lignes directrices. 155
Voir paragraphes 79 (b), (d) et (i) des lignes directrices de 2005, et paragraphe 147 des nouvelles lignes
directrices. 156
Voir paragraphes 79 (g), (h) et 80 des lignes directrices de 2005, et paragraphes 150, 152 et 153 des
nouvelles lignes directrices.
108
- les échanges de courriers de fin 2001 - début 2002 et mars 2004 qui ont modifié
substantiellement le contenu du contrat conclu par la CCI avec Ryanair le 11 avril
2000;
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 10 octobre 2005
conclus par la CCI avec Ryanair/AMS.157
(519) La Commission donc va procéder à l'étude de la compatibilité de ces mesures à la
lumière des critères susmentionnés.
(520) Contribution au développement d'aéroport de taille modeste au moyen d'une
augmentation nette du trafic sur des nouvelles routes: comme expliqué
précédemment, les échanges de courrier de fin 2001 - début 2002 d’une part et les
échanges de courriers de 2004 d’autre part sont liés à l’exploitation ponctuelle d’une
fréquence supplémentaire vers Londres au cours d’une saison estivale. Ils ont donc
donné lieu à une augmentation du trafic au départ de l'aéroport de Nîmes.
(521) Le contrat de services aéroportuaires et le contrat de services marketing conclus
respectivement avec Ryanair et avec AMS le 10 octobre 2005, et entrés en vigueur à
compter du 1er janvier 2005, sont quant à eux liés à l’ouverture de trois nouvelles
liaisons, mais aussi du maintien de la liaison existante vers Londres. Ces contrats ont
donc contribué à une augmentation nette du trafic au départ de l'aéroport de Nîmes,
tout en ayant pour objectif, par ailleurs, de contribuer au maintien de la liaison
existante vers Londres.
(522) Les mesures ne concernent pas une route déjà exploitée par la même ou une autre
compagnie ou une route similaire: les échanges de courriers de fin 2001 – début 2002
et les échanges de courriers de 2004 portaient sur une liaison déjà exploitée, à savoir
Londres-Nîmes. Toutefois, ils visaient à permettre, de manière ponctuelle, l’ouverture
d’une deuxième fréquence sur cette même liaison. Les contrats de 2005 quant à eux,
ne concernaient pas uniquement l’ouverture de nouvelles liaisons, mais le maintien de
la liaison préexistante vers Londres. Ils ne remplissent donc pas le critère en vertu
duquel la mesure ne doit pas concerner une route déjà exploitée ou une route similaire.
(523) Les mesures sont limitées dans le temps et concernent des routes susceptibles de
devenir profitables: les échanges de courriers de fin 2001 - début 2002, d’une part, et
les échanges de courriers de 2004, d’autre part, visaient à permettre l’exploitation
ponctuelle d’une deuxième fréquence vers Londres, respectivement au cours de la
saison d’été 2002 et de la saison d’été 2004. Il ne ressort pas des éléments du dossier
que l’exploitation d’une deuxième fréquence quotidienne vers Londres en période
estivale était, fin 2001 - début 2002 ou en 2004, susceptible de devenir profitable sans
aide. En effet, il apparaît que les aides en question ont été accordées pour que cette
deuxième fréquence soit exploitée de manière ponctuelle au cours d’une seule saison,
et non dans une perspective de maintien au cours des saisons estivales suivantes. Ni
les échanges de courriers de fin 2001 - début 2002 ni les échanges de courriers de
2004 ne remplissent donc le critère en vertu duquel l’aide doit être accordée pour des
liaisons susceptibles de devenir profitables.
(524) En outre, la Commission note que malgré l’invitation que cette dernière lui a adressée
en ce sens, la France n’a fourni aucune étude de viabilité relative aux différentes
liaisons et fréquences faisant l’objet des échanges de courriers de fin 2001-début 2002,
des échanges de courriers de 2004 et des contrats de 2005, que Ryanair aurait remise
en vue de justifier le bienfondé de l’octroi des aides en question. Ainsi, sur le
fondement des éléments du dossier, il apparaît que du point de vue des autorités ayant
157
Ces contrats prévoient une application rétroactive au 1er
janvier 2005.
109
accordé les aides en question, il n’existait aucune perspective claire que ces liaisons et
fréquences puissent devenir viables sans aide à un horizon plus ou moins proche. Il
convient de noter de plus que les contrats de 2005 portaient sur différentes liaisons
dont certaines n’étaient pas même encore identifiées au moment de la conclusion des
contrats, ce qui confirme que les autorités concernées ne disposaient d’aucun élément
de nature à les assurer de la viabilité de ces liaisons et fréquences. La Commission
souligne par ailleurs que les études présentées par les autorités françaises sur les
retombées économiques de l'existence des liaisons aériennes opérées par Ryanair
analysent les caractéristiques de la clientèle Ryanair et les impacts qu'elle peut avoir
sur le développement de la région, mais n'incluent pas de projections sur la viabilité
future de ces liaisons ou d’autres liaisons susceptibles d’être exploitées par Ryanair
dans le futur. Au contraire, l'analyse des contrats conclus avec Ryanair démontre que
les aides octroyées à Ryanair pour ces liaisons ont dû être augmentées au fil du temps
même après la résiliation des contrats conclus entre 2001 et 2005, précisément pour
assurer qu'elles soient assez rentables pour Ryanair pour que celle-ci les maintienne.
(525) Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que les échanges de courriers
de fin 2001 - début 2002, les échanges de courriers de 2004 et les contrats de 2005 ne
remplissent pas le critère en vertu duquel les mesures doivent être limitées dans le
temps et concerner des routes susceptibles de devenir profitables.
(526) Le montant des mesures est lié au développement net du trafic: les montants d’aide
résultant des échanges de courriers de fin 2001 - début 2002 sont liés au
développement du trafic puisque ces mesures visaient à permettre l’exploitation d’une
deuxième fréquence quotidienne vers Londres. En revanche, ce n’est pas le cas du
contrat 2005 qui portait à la fois sur l’ouverture de nouvelles liaisons et le maintien de
la liaison préexistante vers Londres.
(527) Les mesures ont été octroyées de manière transparente et non discriminatoire, et elles
n'ont pas été cumulées avec d'autres aides: selon la France, interrogée par la
Commission au sujet du respect de ce critère, la CCI souhaite souligner qu'elle a fait
des efforts considérables pour attirer d'autres compagnies aériennes que Ryanair aux
mêmes conditions. La CCI aurait commencé dès 1997 à chercher des compagnies
aériennes pour pallier la chute de trafic provoquée par l'arrivée du TGV. Selon la CCI,
les compagnies régulières n'étaient pas intéressées et elle a ainsi été conduite à
négocier avec des compagnies low cost.
(528) Selon la France, la CCI souligne que ses premiers contacts avec Ryanair ont été pris en
1997, pour aboutir à l'ouverture d'une première ligne, Nîmes-Londres Stansted en juin
2000. Après l'arrivée du TGV à Nîmes mi-2001, et après la fermeture de la ligne Paris-
Nîmes opérée par Air France, la CCI aurait cherché à maintenir cette ligne et a établi
des contacts avec Air Littoral, qui aurait repris le service jusqu'en juillet 2003.
(529) La CCI a par ailleurs rencontré en 2001 et les années suivantes les compagnies
easyJet, Buzz, Volare, My Travel et FlyBe mais malgré la présence incitative de
Ryanair sur la plateforme, aucun de ces compagnies n'a finalement désirer s'y établir.
Selon la France, la CCI souligne que les discussions ont été conduites sur les mêmes
bases que celles réalisées avec Ryanair et que ces conditions étaient proposées à toutes
les compagnies susceptibles d'être intéressées.
(530) Il ressort de ces explications et des autres éléments du dossier que les aides résultant
des échanges de courriers de fin 2001-début 2002, des échanges de courriers de 2004
et des contrats de 2005 ont été négociées bilatéralement, sans transparence, et sans
processus garantissant l’absence de discrimination, tel qu’un appel d’offres public. Ces
aides ne remplissent donc pas le critère de transparence et de non-discrimination.
110
(531) A la lumière de ce qui précède, la Commission considère que les aides d’Etat résultant
des courriers de février 2002 et mars 2004 qui ont modifié substantiellement le
contenu de l'accord conclu par la CCI avec Ryanair le 11 avril 2000 et des contrats de
services aéroportuaires et de services marketing du 10 octobre 2005 conclus par la
CCI avec Ryanair/AMS, sont incompatibles avec le marché intérieur.
7.1.3.2 Mesures postérieures à l’entrée en vigueur des lignes directrices de
2005
(532) Ryanair considère que les lignes directrices de 2005 ne fournissent pas un cadre de
référence fiable pour l'évaluation des aides d'Etat présumées à Ryanair.158
Cependant,
dans la mesures où ces lignes directrices fournissent le cadre de référence qui a été
appliqué de leur entrée en vigueur jusqu’à l’adoption des nouvelles lignes directrices,
la Commission estime que c’est bien ce cadre qu’il convient d’appliquer aux mesures
en cause. En effet la Commission est tenue de respecter les lignes directrices qu'elle
adopte, sauf si elles sont contraires au Traité, ce que ni la France ni Ryanair n'ont ni
soutenu ni démontré.
(533) Les lignes directrices de 2005 précisent que les aides au fonctionnement octroyées aux
compagnies aériennes (comme les aides au démarrage de nouvelles liaisons) ne
peuvent être déclarées compatibles avec le marché intérieur qu'à titre exceptionnel et
dans des conditions strictes, dans les régions d'Europe défavorisées, à savoir les
régions bénéficiant de la dérogation de l'article 107, paragraphe 3, point a), du TFUE,
les régions ultrapériphériques et les régions à faible densité de population.159
L'aéroport de Nîmes n'étant pas situé dans une région de ce type, cette dérogation ne
lui est pas applicable.
(534) L'aéroport de Nîmes relève de la catégorie D (petit aéroport régional) au sens des
lignes directrices de 2005.160
En effet, les aéroports de petite taille ne disposent pas
souvent des volumes de passagers nécessaires pour atteindre la taille critique et le seuil
de rentabilité. En conséquence, la Commission observe que les compagnies aériennes
ne sont pas toujours prêtes, sans incitations à cette fin, à prendre le risque d'ouvrir des
routes au départ des aéroports inconnus et non testés.
(535) C'est pourquoi, selon les lignes directrices de 2005, la Commission accepte que des
aides publiques soient versées temporairement aux compagnies aériennes sous
certaines conditions, si cela les incite à créer de nouvelles routes ou de nouvelles
fréquences au départ d'aéroports régionaux et d'attirer les volumes de passagers qui
leur permettront à terme d'atteindre à terme le seuil de rentabilité. La Commission
veille à ce que de telles aides n'avantagent pas des aéroports de grande taille déjà
largement ouverts au trafic international et à la concurrence.161
(536) Les conditions de compatibilité spécifiques se trouvent au point 79 des lignes
directrices de 2005.
(537) La Commission estime qu’il convient d'examiner la compatibilité des aides d’Etat
suivantes à la lumière des lignes directrices de 2005:
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 2 janvier 2007
conclus par VTAN avec Ryanair/AMS;
- les avenants aux contrats du 2 janvier 2007 du 1er août 2007 ;
158
Observations de Ryanair sur la décision d’ouverture. 159
Lignes directrices de 2005, paragraphe 27. 160
Lignes directrices de 2005, paragraphe 15. 161
Lignes directrices de 2005, paragraphes. 71 et 74.
111
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 1er novembre
2007 conclus par VTAN avec Ryanair/AMS ;
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 27 août 2008
conclus par VTAN avec Ryanair/AMS ;
- les avenants modificatifs aux contrats du 27 août 2008 du 25 août 2009, du 18 août
2010 et du 30 novembre 2010.
(538) La Commission ne considère pas que les mesures octroyées pouvant être déclarées
compatibles avec le traité. En effet, la Commission estime que plusieurs conditions de
compatibilité ne sont pas satisfaites et notamment:
(539) Viabilité à terme et dégressivité dans le temps (critère d), absence d'un plan d'affaires
(critère i) et durée et intensité de la mesure (critère f):162
aucune des différentes
mesures en cause n’a été conçue, dans sa structure, pour garantir un montant d’aide
dégressif et limité à un certain pourcentage des coûts éligibles, lesquels ne sont pas
mentionnés dans les contrats en question ou, à la connaissance de la Commission, dans
tout autre document dont VTAN ou le SMAN auraient pu disposer au moment où les
contrats ont été conclus. Le critère relatif à la dégressivité et à l’intensité maximale
n’est donc satisfait par aucune des mesures.
(540) En outre, la France a indiqué que Ryanair n’avait pas remis à VTAN de « plan
d’affaires démontrant la viabilité, pendant une période substantielle de la ligne après
l’extinction des incitations financières / paiements marketing »163
. Compte tenu de ce
fait et en l’absence de tout autre élément en faveur de la thèse inverse, la Commission
conclut que les aides en question n’ont pas été accordées pour des liaisons susceptibles
de devenir viable sans aide. D’ailleurs, la succession des mesures d’aide en faveur des
liaisons vers Londres (depuis fin 2001 - début 2002), Liverpool (depuis 2005),
Charleroi et East Midlands (depuis 2006) suggère que Ryanair n’exploiterait pas ces
liaisons si elles cessaient d’être ainsi subventionnées.
(541) Compte tenu de ce qui précède, la Commission conclut que les conditions
susmentionnées ne sont remplies par aucune des mesures en cause.
(542) Relation avec des nouvelles liaisons ou rotations (fréquences) supplémentaires sur des
liaisons existantes (critère c): la Commission constate que les contrats en cause n’ont
pas été uniquement conclus en vue de l’ouverture de nouvelles liaisons ou fréquences
supplémentaires.
(543) Ainsi, les contrats du 2 janvier 2007 ne prévoient pas d’ouverture de liaisons ou de
nouvelles fréquences sur les liaisons existantes par rapport à ce que prévoyaient les
contrats de 2005.
(544) Concernant l’avenant du 1er août 2007, la France a confirmé qu’il conditionnait le
maintien de la liaison Ryanair vers Charleroi pour la saison d’hiver 2007-2008. Il
n’était donc pas lié à l’ouverture d’une nouvelle liaison ou à de nouvelles fréquences.
(545) Les contrats du 1er
novembre 2007 ne prévoyaient pas non plus d’ouvertures de
liaisons mais des fréquences égales ou inférieures à ce qui était prévu dans les contrats
du 2 janvier 2007, suivant les saisons, sauf pour la liaison vers Londres, pour laquelle,
une fréquence quotidienne supplémentaire a été instituée pour la saison estivale. De
même, les contrats du 27 août 2008 ne portaient que sur deux liaisons parmi les quatre
couvertes par les précédents contrats (Londres et Charleroi), avec des fréquences 162
L'aide dégressive peut être accordée pour une durée maximale de trois ans. Le montant de l'aide ne peut
dépasser, chaque année, 50 % du montant des coûts éligibles de cette année, et sur la durée de l'aide,
une moyenne de 30 % des coûts éligibles. 163
Lettre de la France du 25 avril 2014, paragraphe 103.
112
identiques à ce qui était prévu dans les contrats du 1er
novembre 2007. Les
amendements de 2009, qui constituaient une simple prolongation de ces contrats, n’ont
pas non plus donné lieu à des ouvertures de liaisons ou fréquences supplémentaires.
(546) En ce qui concerne l'avenant nº1 du 18 août 2010, la France a confirmé que le montant
très mineur de la prestation n'était pas de nature à modifier les liaisons et les
fréquences prévues dans le contrat initial ou le trafic attendu. Selon la France, sa
signature s'inscrit dans le contexte du maintien de bonnes relations commerciales entre
le gestionnaire d'aéroport et Ryanair et peut être assimilé à une geste commercial qui
ne bouleverse pas l'économie générale de la concession.164
(547) Au sujet de l'avenant nº2 du 30 novembre 2010, la France a confirmé que ce contrat a
été conclu "sous la pression exercée par Ryanair sur VTAN concernant la liaison vers
Liverpool".165
La France a fourni un échange d'emails entre Ryanair et VTAN en date
des 23 et 29 novembre 2010 qui démontrent que Ryanair avait menacé d'annuler deux
fréquences sur cette liaison (passant de quatre à deux fréquences) et conditionné le
maintien de ces fréquences pour l'été 2011 (période allant de mars 2011 à octobre
2011) à l'achat de prestations marketing supplémentaires pour aider à promouvoir cette
liaison pour un montant de [35 000-65 000] euros. En l'absence de l'augmentation
ponctuelle de la contribution, Ryanair aurait pu cesser d'exploiter la liaison vers
Liverpool. Cet avenant n’était donc pas lié à l’ouverture de nouvelles liaisons ou à des
fréquences supplémentaires, mais uniquement à la sauvegarde d’une liaison existante.
(548) Ainsi, aucune des mesures en cause n’a été accordée en vue de l’ouverture de
nouvelles liaisons ou de fréquences supplémentaires sur des liaisons existantes.
(549) Compensation des coûts additionnels au démarrage (critère e):166
la Commission
considère que, pour chacune des mesures en cause, ce critère n'a pas été satisfait. En
effet, les montants versés par les Exploitants ne sont pas conçus comme des montants
destinés à représenter une fraction des coûts additionnels de démarrage, lesquels, à la
connaissance de la Commission, n’ont jamais fait l’objet d’estimations fournies aux
Exploitants par Ryanair / AMS. Il en résulte d’ailleurs que la condition relative aux
intensités d’aide maximales ne peut être respectée.
(550) Lien avec le développement de la ligne (critère g):167
l’ "incentive scheme" prévu dans
les contrats signés avec Ryanair à partir du 10 octobre 2005 n'est pas lié au
développement des liaisons mais aux niveaux de trafic atteints par Ryanair en termes
de nombre de passagers. Par exemple, le contrat de services aéroportuaires du 1er
janvier 2007 porte sur quatre liaisons, au départ de l'aéroport de Nîmes, Londres,
Liverpool, Charleroi et East Midlands. Cependant, l'incentive scheme prévoit des
rabais octroyés en fonction du nombre de passagers partants168
sans que la destination
concrète du passager ne soit précisée.169
L'analyse des autres contrats sur ce point
serait analogue à celle-ci. De manière plus générale, comme il a été démontré
précédemment, aucun des contrats en question n’a été conclu exclusivement en vue de
l’ouverture de nouvelles liaisons ou de nouvelles fréquences. Les montants d’aide qui
en résultent ne sont donc pas liés avec le développement de certaines liaisons. Ainsi, la
Commission considère que ce critère n’est rempli par aucune des mesures en question. 164
Lettre de la France du 20 mars 2014. 165
Lettre de la France du 20 mars 2014, p.8. 166
Le montant de l'aide doit être strictement lié aux coûts additionnels de démarrage qui sont liés au
lancement de la nouvelle route ou fréquence et que l'opérateur n'aurait pas à supporter à un rythme de
croisière. 167
Le versement de l'aide doit être lié au développement effectif du nombre de passagers transportés. 168
Article 8 du contrat de services aéroportuaires du 1er
janvier 2007. 169
Les seules destinations en tenant compte le nombre de passagers sont celles à destination de Charleroi et
East Midlands (Article 8.2. du contrat de services aéroportuaires du 1er
janvier 2007).
113
(551) Attribution non discriminatoire (critère h): Selon la France, « VTAN précise qu’elle
n’a pas fait publiquement connaître avant la conclusion des différents contrats son
intention d’accorder des incitations financières et/ou de payer des prestations
marketing à Ryanair. Toutefois, VTAN avait fait les mêmes propositions à toutes les
compagnies aériennes et dès lors permis à toutes les compagnies aériennes intéressées
de proposer leurs services comme l’a fait Ryanair. »170
Ainsi, la condition de non-
discrimination, telle qu’elle est prévue dans les lignes directrices de 2005, n’a été
satisfaite par aucune des mesures en cause. En effet, des propositions faites de gré à
gré à certaines compagnies choisies à la discrétion de l’exploitant de l’aéroport sont
insuffisantes pour que cette condition soit remplie.
(552) Au regard de l'ensemble des éléments susmentionnés, la Commission considère
qu’aucune des aides illégales octroyées à Ryanair/AMS au travers des contrats faisant
l’objet du présent examen ne remplit tous les critères prévus par les lignes directrices
de 2005. Ainsi, les aides résultant des mesures suivantes sont incompatibles avec le
marché intérieur:
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 2 janvier 2007
conclus par VTAN avec Ryanair/AMS;
- les avenants aux contrats du 2 janvier 2007 du 1er août 2007 ;
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 1er novembre
2007 conclus par VTAN avec Ryanair/AMS ;
- les contrats de services aéroportuaires et de services marketing du 27 août 2008
conclus par VTAN avec Ryanair/AMS ;
- les avenants modificatifs aux contrats du 27 août 2008, du 25 août 2009, du 18
août 2010 et du 30 novembre 2010.
7.2 Appréciation des apports financiers à la CCI-aéroport et à VTAN
(553) La Commission va analyser dans cette partie les différentes mesures de soutien
financier octroyées à la CCI-aéroport et à VTAN, décrites dans la section 3.2.
7.2.1 Présence d’aides d’Etat au sens de l’article 107, paragraphe 1, du TFUE
(554) Aux termes de l’article 107 paragraphe 1, du TFUE, sont incompatibles avec le traité,
dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides octroyées
par les Etats ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit qui
faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en faveur de certaines entreprises
ou de certaines productions.
(555) La qualification d’une mesure en tant qu’aide d’Etat suppose donc que les conditions
cumulatives suivantes soient remplies, à savoir que :
- le bénéficiaire soit une entreprise au sens de l'article 107, paragraphe 1, du TFUE,
ce qui suppose qu’il exerce une activité économique,
- la mesure en question soit octroyée au moyen de ressources d’Etat et soit
imputable à l'Etat,
- la mesure confère un avantage sélectif à son ou ses bénéficiaires,
- la mesure en cause fausse ou menace de fausser la concurrence, et soit susceptible
d’affecter les échanges entre Etats membres.
170
Lettre de la France du 25 avril 2014, paragraphe 102.
114
(556) Afin de déterminer si les subventions susmentionnées constituent des aides d'Etat, il
convient d'abord vérifier si leurs bénéficiaires successifs, à savoir la CCI-aéroport et
VTAN, constituaient des entreprises, c’est-à-dire, exerçaient des activités
économiques au moment où ces mesures ont été octroyées. En lien avec cette question,
la Commission analysera ensuite les subventions reçues par la CCI-aéroport et VTAN
en application du système national de financement des missions régaliennes dans les
aéroports français, décrit aux considérants 32 et suivants. Enfin, la Commission
examinera la mesure dans laquelle l’exploitation de l’aéroport de Nîmes a pu ou non
constituer un service d’intérêt économique général au cours de la période considérée.
Après avoir effectué ces trois analyses préliminaires et en utilisant leurs résultats, la
Commission évaluera chacune des mesures faisant l’objet du présent examen afin de
déterminer si elle constitue une aide d’Etat.
7.2.1.1 Notions d'entreprise et d'activité économique
(557) Comme la Commission l’a expliqué dans les nouvelles lignes directrices,171
à compter
de la date de l'arrêt «Aéroports de Paris» (12 décembre 2000), l’exploitation et la
construction d’infrastructures aéroportuaires doivent être considérées comme relevant
du champ d’application du contrôle des aides d’Etat. Inversement, avant cet arrêt, du
fait de l'incertitude qui existait avant cet arrêt, les pouvoirs publics pouvaient
légitimement considérer que le financement des infrastructures aéroportuaires ne
constituait pas une aide d'Etat, et que, partant, une telle mesure ne devait pas être
notifiée à la Commission. Il s’ensuit que la Commission ne peut à présent contester,
sur la base des règles en matière d’aides d'Etat, les mesures de financement octroyées
avant le 12 décembre 2000.
(558) Par ailleurs, comme également indiqué dans les nouvelles lignes directrices,172
toutes
les activités d’un aéroport ne sont pas nécessairement de nature économique. Les
activités relevant en principe de la responsabilité de l’Etat dans l’exercice de ses
prérogatives officielles de puissance publique ne sont pas de nature économique et
n'entrent pas, en général, dans le champ d’application des règles relatives aux aides
d’Etat.
(559) S’agissant de la CCI-aéroport, les mesures faisant l'objet de la décision d’ouverture
sont des subventions reçues en application du système national de financement des
missions régaliennes dans les aéroports français (« les subventions relatives aux
missions régaliennes »), différents subventions d’exploitation ponctuelles reçues de
différents collectivités publiques et du service général de la CCI entre 2000 et 2006,
des avances remboursables consenties à la CCI-aéroport par le service général de la
CCI entre 2002 et 2006 (« les avances remboursables »), et la non-facturation
supposée de frais généraux supportés par le se spécifiés dans les nouvelles lignes
directrices quant à la compatibilité des aides au fonctionnement octroyées au service
général de la CCI en lien avec l’exploitation de l’aéroport durant période 2000-2006.
(560) Il ressort des explications fournies par la France, résumées aux considérants 55 à 57
qu’à l’exception de certaines subventions relevant du FIATA, qui font partie des
subventions relatives aux missions régaliennes et seront examinées dans la suite,
seules les subventions de 250 000 euros, 600 000 euros et 500 000 euros reçues en
2005 et la subvention de 200 000 euros reçue du service général de la CCI en 2006
(« les subvention d’exploitation ponctuelles ») ont servi à financer l’activité
économique de l’aéroport. En effet, ces subventions étaient destinées à couvrir le
déficit d’exploitation dû au déséquilibre entre les coûts d’exploitation et les recettes
171
Nouvelles lignes directrices, paragraphes 28 et 29. 172
Nouvelles lignes directrices, paragraphes 34 et 35.
115
provenant de la mise à disposition des infrastructures aéroportuaires aux passagers et
aux compagnies aériennes. Dans la mesure où ces subventions ont été octroyées après
le 12 décembre 2000 et ont servi à financer l’activité économique de l’aéroport, elles
sont, au regard des notions d’entreprise et d’activité économique, susceptibles de
relever du champ d’application des règles en matière d’aides d’Etat. Il en va de même
pour les avances remboursables, octroyées elles aussi après le 12 décembre 2000 et
destinées à assurer l’équilibre du compte d’exploitation de l’aéroport.
(561) Quant à la non-facturation supposée de frais généraux supportés par le service général
de la CCI en lien avec l’exploitation de l’aéroport durant la période 2000-2006, il
s’agissait d’une supposition émise par la Commission dans la décision d’ouverture.
Toutefois, comme indiqué au considérant 59, la France a fourni des éléments montrant
qu’en réalité, le service général de la CCI refacturait à la CCI-aéroport la part de ses
frais généraux imputable à l’activité de l’aéroport sur le fondement d’une clef de
répartition des coûts objective. Ce comportement est conforme à celui d’un opérateur
en économie de marché guidé par des perspectives de rentabilité dans ses relations
avec une filiale ou une division recourant à ses services généraux. Par conséquent,
l’hypothèse émise dans la décision d’ouverture quant à la non-facturation supposée de
certains frais généraux du service général de la CCI s’avère erronée sur le plan factuel,
et le système de facturation des frais généraux appliqué par la CCI ne comporte pas
d’avantage en faveur de la CCI-aéroport. Il n’y a donc pas lieu de traiter plus avant de
cette « mesure » dans la présente décision. De la même façon, les renseignements
fournis par la France au sujet des investissements réalisés au sein de l’aéroport de
Nîmes lorsque celui-ci était géré par la CCI, dont il est question au considérant 51,
montrent que la CCI-aéroport a seule supporté la charge des investissements dont la
réalisation et le financement lui incombaient. Il n’y a donc pas de subventions
d’investissements en faveur de la CCI-aéroport à examiner dans la présente évaluation.
(562) En ce qui concerne les mesures en faveur de VTAN, il s’agit principalement de la
contribution forfaitaire, telle qu’établie par la CDSP et modifiée par la suite. Cette
contribution forfaitaire était destinée à couvrir le déficit d’exploitation dû au
déséquilibre entre les coûts d’exploitation et les recettes provenant de la mise à
disposition des infrastructures aéroportuaires aux passagers et aux compagnies
aériennes, en tenant compte des coûts des quelques investissements mis à la charge de
VTAN par la CDSP et ses avenants. Dans la mesure où la contribution forfaitaire a été
instaurée et modifiée après le 12 décembre 2000 et a servi à financer l’activité
économique de l’aéroport, elle relève du champ d’application des règles en matière
d’aides d’Etat
(563) Les autres mesures en faveur de VTAN faisant l’objet de la procédure formelle
d’examen consistent en une contribution publique spécifique versée au titre de l’année
2011 pour tenir compte des nouvelles charges d’exploitation incombant à VTAN à la
suite de la fermeture de la BAN (« la contribution publique spécifique ») et des
subventions d'équipement au titre des années 2011 et 2012 (« les subventions
d’équipement »). Ces différentes mesures, octroyées après le 12 décembre 2000, ont
servi au moins pour partie à financer l’exploitation de l’aéroport (y compris son
activité commerciale de mise à disposition des infrastructures aéroportuaires) ainsi que
des investissements inhérents à l’activité commerciale de l’aéroport. Ces mesures sont
donc, au regard des notions d’entreprise et d’activité économique, susceptibles de
relever du champ d’application des règles en matière d’aides d’Etat.
(564) Ainsi, dans la suite, la Commission examinera les subventions relatives aux missions
régaliennes, ainsi que :
116
- pour la période d’exploitation par la CCI, les subventions d’exploitation
ponctuelles et les avances remboursables ;
- pour la période d’exploitation par VTAN, la contribution forfaitaire, la
contribution publique spécifique et les subventions d’équipement.
7.2.1.2 Subventions relatives aux missions régaliennes
(565) Comme l’a rappelé la Commission dans les nouvelles lignes directrices, la Cour de
justice a indiqué que les activités relevant en principe de la responsabilité de l’Etat
dans l’exercice de ses prérogatives officielles de puissance publique ne sont pas de
nature économique et n'entrent pas, en général, dans le champ d’application des règles
en matière d'aides d’Etat.173
Selon les nouvelles lignes directrices,174
des activités
telles que le contrôle aérien, la police, les douanes, la lutte contre les incendies des
aéronefs, les mesures destinées à protéger l’aviation civile contre les actes
d’intervention illicite et les investissements dans les infrastructures et les équipements
nécessaires à ces activités sont considérées, en règle générale, comme ne présentant
pas un caractère économique.
(566) Par ailleurs, les nouvelles lignes directrices précisent que pour ne pas constituer une
aide d’Etat, le financement public d’activités de nature non économique doit rester
strictement limité à la compensation des coûts engendrés par celles-ci et ne doit pas
conduire à une discrimination indue entre les aéroports. Les lignes directrices précisent
au sujet de cette deuxième condition que s'il est normal, en vertu d'un ordre juridique
donné, que des aéroports civils aient à supporter certains coûts inhérents à leur
exploitation, au contraire d’autres aéroports civils, ces derniers pourraient bénéficier
d'un avantage, que ces coûts soient ou non liés à une activité considérée en général
comme ne revêtant pas un caractère économique.175
(567) Les activités financées par le système général de financement des missions régaliennes
dans les aéroports français, décrit aux considérants 32 et suivants, relèvent de la
protection de l’aviation civile contre les actes d’intervention illicite,176
des missions de
police,177
du sauvetage et de la lutte contre l’incendie des aéronefs,178
de la sécurité du
trafic aérien,179
ainsi que de la protection de l’environnement humain et naturel.180
Ces
activités peuvent légitimement être considérées comme relevant de la responsabilité de
l’Etat dans l’exercice de ses prérogatives officielles de puissance publique. Par
conséquent, la France peut légitimement considérer ces missions comme de nature
« régalienne », autrement dit non économique, au regard du droit des aides d’Etat. Elle
peut donc aussi prévoir un financement public pour compenser les coûts supportés par
les gestionnaires d’aéroports pour l’exécution de ces missions dans la mesure où celle-
ci est mise à leur charge par la législation nationale, et pourvu que ce financement ne
donne lieu ni à surcompensation ni à discrimination entre les aéroports.
(568) Or, il résulte de la description figurant aux considérants 32 et suivants que le système
prévu par la législation française repose sur des mécanismes stricts de contrôle des
173
Arrêt dans l’affaire C-118/85, Commission/Italie, points 7 et 8, et arrêt dans l'affaire C-30/87,
Bodson/Pompes funèbres des régions libérées, Rec. 1988, p. I-2479, point 18. 174
Nouvelles lignes directrices, paragraphe 35. 175
Nouvelles lignes directrices, paragraphes 36 et 37. 176
L’inspection filtrage des bagages de soute, l’inspection filtrage des passagers et des bagages de cabine
et le contrôle des accès communs à la zone réservée font partie de de cette catégorie. 177
Le contrôle automatisé aux frontières par identification biométrique fait partie de cette catégorie. 178
Comme indiqué ci-dessus, ces trois catégories sont explicitement citées dans les nouvelles lignes
directrices comme exemples d’activités non économiques. 179
La prévention du péril animalier fait partie de cette catégorie. 180
Les mesures de contrôles environnementaux relèvent de cette catégorie.
117
coûts, à la fois ex ante et ex post, assurant que les gestionnaires d’aéroports ne
reçoivent au travers de la taxe d’aéroport et du dispositif complémentaire que les
montants strictement nécessaires à la couverture des coûts.
(569) De plus, ce système s’applique à tous les aéroports civils français, tant en ce qui
concerne le champ des missions donnant lieu à compensation que les dispositifs de
financement. La condition relative à l’absence de discrimination est ainsi remplie. En
effet, si la législation française confie aux gestionnaires d’aéroports l’exécution de
missions régaliennes, elle ne met pas le financement de ces missions à leur charge,
mais à celle de l’Etat. Ainsi, la compensation des coûts afférant à ces missions par des
fonds publics ne conduit pas à alléger des coûts que devraient normalement supporter
les gestionnaires d’aéroports en vertu de l’ordre juridique français.
(570) Ce système national s’est appliqué à l’aéroport de Nîmes depuis 2000. Ainsi, les
financements reçus en application de ce système ne constituent pas des aides d’Etat en
faveur de la CCI-aéroport ou de VTAN. Cette conclusion s’applique entre autres aux
subventions que la CCI-aéroport a reçues du FIATA et qui sont évoquées au
considérant 55.
7.2.1.3 Ressources d’Etat et imputabilité à l’Etat
(571) Les différentes mesures restant à examiner ont été octroyées par des collectivités
territoriales (le CGG, la CAAC et la CANM), le SMAN (qui constitue un groupement
de collectivités locales) et la CCI.
(572) Les ressources des collectivités locales sont des ressources d’Etat au sens de l'article
107 paragraphe 1 du TFUE.181
Par ailleurs, le comportement de telles collectivités
tombe, au même titre que les mesures prises par le pouvoir central, dans le champ
d'application de cet article si les conditions de cette disposition sont remplies182
. Ainsi,
les décisions des collectivités territoriales telles que le CGG, la CAAC et la CANM
doivent être considérées comme imputables à l’Etat (au sens large) au sens de la
jurisprudence sur les aides d’Etat.
(573) Cette conclusion vaut par extension par un groupement de collectivités locales telles
que le SMAN. De plus, comme indiqué dans la section 2.2, le budget du SMAN est
abondé par des contributions des collectivités territoriales qui le constituent. En effet,
les ressources du SMAN comprennent notamment: (i) les contributions des membres,
(ii) les subventions, (iii) les produits des dons et des legs, (iv) les produits des
emprunts, (v) les produits des redevances des gestionnaires et Exploitants et (vi) plus
généralement, tous les produits directs et indirects liés à l'exercice de la compétence
définie par les statuts du SMAN. De plus, le SMAN est administré par un comité
syndical constitué uniquement de délégués représentant les collectivités territoriales
qui en sont membres. Ainsi, les ressources du SMAN sont des ressources d’Etat et
toutes ses décisions sont « imputables à l’Etat » au sens de la jurisprudence sur les
aides d’Etat.
(574) S’agissant des mesures octroyées par le service général de la CCI à la CCI-aéroport,
comme il a été établi précédemment dans la section Ressources d’Etat et
imputabilité7.1.1.1, la CCI est une autorité publique dont toutes les ressources doivent
être considérées comme des ressources d’Etat et dont toutes les décisions sont
« imputables à l’Etat » au sens de la jurisprudence sur les aides d’Etat.
181
Arrêt du Tribunal du 12 mai 2011 dans les affaires jointes T-267/08 et T-279/08, Région Nord-Pas-de-
Calais, non encore publié, point 108. 182
Arrêt du Tribunal du 6 mars 2002 dans les affaires jointes T-127/99, T-129/99, T-140/99, Rec. [2002],
II-1330, point 142.
118
(575) Ainsi, toutes les mesures faisant l’objet du présent examen sont « imputables à l’Etat »
et financées au moyen de ressources d’Etat.
7.2.1.4 Avantage économique sélectif
(576) Afin d’apprécier si une mesure étatique octroie un avantage à une entreprise aux
termes de l'article 107(1), il convient de déterminer si l’entreprise en cause bénéficie
d'un avantage économique qui lui évite de supporter des coûts qui auraient
normalement dû grever ses ressources financières propres ou si elle bénéficie d'un
avantage dont elle n'aurait pas bénéficié dans les conditions normales du marché183
ou
encore si la mesure en question peut être considérée comme une compensation de
service public remplissant les conditions de l’arrêt Altmark.
7.2.1.4.1 Notion de service d’intérêt économique général et application de l’arrêt
Altmark
7.2.1.4.1.1 Application de la notion de service d’intérêt économique général
(577) Il convient de s’interroger sur le point de savoir si les différentes mesures restant à
examiner peuvent être considérées comme des compensations de service public,
octroyées en vue de l’exploitation d’un authentique service d’intérêt économique
général (« SIEG »).
(578) Il convient de rappeler à cet égard que l’arrêt rendu dans l’affaire Altmark, la Cour de
justice a décidé que les compensations de service public ne constituaient pas des aides
d’Etat au sens de l’article 107, paragraphe 1du TFUE pour autant que quatre
conditions cumulatives soient remplies. Premièrement, l’entreprise bénéficiaire doit
réellement avoir la charge d’obligations de service public et ces obligations doivent
être clairement définies. Deuxièmement, les paramètres sur la base desquels est
calculée la compensation doivent être préalablement établis, de façon objective et
transparente. Troisièmement, la compensation ne doit pas dépasser ce qui est
nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des
obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un
bénéfice raisonnable. Enfin, quatrièmement, lorsque le choix de l’entreprise chargée
de l’exécution d’obligations de service public, dans un cas concret, n’est pas effectué
dans le cadre d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat
capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la
compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts
qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée des moyens
nécessaires, aurait encourus. Aux fins l'application de ces conditions, le premier point
à examiner est l’existence d’un authentique SIEG.
(579) La France, rejointe en cela par les Exploitants, estime que la gestion de l’aéroport de
Nîmes dans son ensemble, au vu de sa dimension et de son rôle local, devrait être
considérée comme un SIEG. Selon la France: « Même à considérer que le Languedoc
Roussillon n'est pas une région isolée et que son accessibilité n'est pas conditionnée
par les liaisons aériennes de l'aéroport de Nîmes, ce qui est contestable comme
démontré au point 2 ci-dessous, il n'en demeure pas moins, au vu de tout ce qui
précède, que la gestion de l'aéroport de Nîmes est assortie d'une série d'obligations de
service public et que la Commission n'a pas démontré qu'un opérateur privé en
économie de marché serait prêt à assumer de telles obligations dans la même mesure
ou dans les mêmes conditions, en l'absence de compensation de service public. Il
importe peu à cet égard que l'aéroport soit situé dans une région isolée. Les lignes
directrices de la Commission et une jurisprudence constante reconnaissent la marge
183
Arrêt dans l'affaire C-301/87, France/Commission, Rec. 1990, p. I-307, point 41.
119
de discrétion des Etats membres dans la définition des obligations de service public.
Le critère déterminant pour établir l'existence d'un SIEG est celui de savoir si un
opérateur considérant son propre intérêt commercial assumerait dans la même
mesure ou dans les mêmes conditions le service en question ».184
(580) Ce raisonnement est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation. En effet, aux fins
d’analyser la mesure dans laquelle la gestion d’un aéroport est un SIEG, il est
important de se pencher sur le besoin d’intérêt général auquel répond cette activité. A
cet égard, la taille de l’aéroport n’est pas non plus un critère pertinent.
(581) Comme la Commission l’a déjà indiqué dans sa pratique décisionnelle : « Le
développement économique n’est […] pas suffisant pour justifier qu’un service soit
qualifié de [SIEG]. Une telle qualification doit être motivée par des raisons de service
public allant au-delà de l’intérêt général de développer des activités
économiques. ».185
Le Traité contient déjà une clause spécifique de compatibilité pour
les aides visant le développement d'activités économiques (l'article 107, paragraphe 3,
point c)), tandis que selon la jurisprudence de la Cour, les SIEG sont des services qui
présentent des caractères spécifiques par rapport à ceux des autres activités de la vie
économique186
et les entreprises chargées d'un SIEG sont chargées d'une «mission
particulière».187
En règle générale, une «mission de service public particulière»
implique la prestation d'un service qu'un opérateur, s'il considérait son propre intérêt
commercial, n'assumerait pas ou n'assumerait pas dans la même mesure ou dans les
mêmes conditions.188
Les États membres ou l'Union peuvent soumettre ce type de
services à des obligations spécifiques en vertu d'un critère d'intérêt général.
(582) La Commission a indiqué par ailleurs dans les nouvelles lignes directrices: « En ce qui
concerne les aéroports, la Commission considère qu'il est possible, dans des cas
dûment justifiés, de considérer la gestion d'un aéroport dans son ensemble comme
constituant un SIEG. […] la Commission considère que tel ne peut être le cas que si
une partie de la zone potentiellement desservie par cet aéroport serait, sans celui-ci,
isolée du reste de l’Union dans une mesure qui serait préjudiciable à son
développement social et économique. Une telle appréciation doit tenir dûment compte
de l’existence d’autres modes de transport, et plus particulièrement de services
ferroviaires à grande vitesse ou de liaisons maritimes par transbordeurs ». 189
(583) Ainsi, la contribution de l’aéroport de Nîmes au dynamisme économique local, sur
laquelle la France a principalement mis l’accent à l’appui de sa thèse relative à
l’existence d’un authentique SIEG, n’est pas en soi un facteur pertinent tant qu’elle est
considérée indépendamment de la contribution de cet aéroport à l’accessibilité de la
région. Il n’est pas contesté qu’en améliorant l’accessibilité d’une région, en
particulier lorsqu’il rompt son isolement, un aéroport puisse avoir des répercussions
positives sur le développement économique local. Toutefois, le simple fait que la
présence et l’activité d’un aéroport soient génératrices d’emplois directs et indirects et
184
Observations de la France sur la décision d'ouverture. 185
Voir la décision N 381/04 intitulée «France, Projet de réseau de télécommunications haut débit des
Pyrénées-Atlantiques» (DORSAL), JO C 162 du 2.7.2005, p. 5, paragraphe 53. 186
Voir l'arrêt dans l'affaire C-179/90, Merci convenzionali porto di Genova , Rec. 1991, p.I-5889, point
27; arrêt dans l'affaire C-242/95, GT-Link A/S, Rec. 1997, p.I-4449, point 53 et arrêt dans l'affaire C-
266/96, Corsica Ferries France SA, Rec. 1998, p.I-3949, point 45. 187
Voir, notamment l’arrêt dans l’affaire C-127/73 BRT/SABAM, C-127/73, Rec. 1974, p.I-51. 188
Voir Communication de la Commission relative à l'application des règles de l'Union européenne en
matière d'aides d'Etat aux compensations octroyées pour la prestation de services d'intérêt économique
général, JOUE C 8 du 11.01.2012, p4. , paragraphes 46 et 47. 189
Nouvelles lignes directrices, paragraphe 72.
120
stimulent l’activité d’entreprises locales ne saurait être considéré comme un critère
pertinent aux fins d’établir l’existence d’un authentique SIEG.
(584) En ce qui concerne la contribution de l’aéroport de Nîmes à l’accessibilité de la
région, la France a reconnu, en particulier, que l’aéroport de Montpellier était situé à
63 kilomètres seulement de celui de Nîmes, ce qui représente un temps de parcours de
seulement 49 minutes par la route. Elle a également reconnu que Nîmes était desservie
par le train à grande vitesse (TGV) depuis 2001. Cette ville est ainsi reliée, par
exemple, à Paris et Lyon par des services ferroviaires fréquents, avec des temps de
trajet respectifs d’environ 3 heures et 1 heures 30. La France a omis de tenir compte de
cette desserte ferroviaire dans ses arguments relatifs à l’existence d’un SIEG.
S’agissant du réseau routier, la ville de Nîmes est située à proximité immédiate des
autoroutes A9 et A54, qui la relient directement aux grandes métropoles du quart sud-
est de la France, notamment Lyon, Marseille et Montpellier. A la lumière de ces
éléments, il ne peut être soutenu qu’une partie de la zone potentiellement desservie par
l’aéroport de Nîmes serait, sans celui-ci, isolée du reste de l’Union dans une mesure
préjudiciable à son développement économique et social.
(585) Au sujet de l’aéroport de Montpellier, la France a indiqué : « si les éléments ci-dessus
tendent à le situer dans la même zone de chalandise que l’aéroport de Nîmes en raison
du temps de trajet inférieur à 60 minutes qui les sépare et du coût du trajet aller-
retour n’excédant pas 20€, il convient toutefois de souligner que les liaisons Ryanair
de l’aéroport de Montpellier, aujourd’hui au nombre de quatre, répondent à une
demande touristique qui est située plutôt à l’ouest qu’à l’est de l’aéroport (la liaison
avec Hahn en est un exemple alors même que Ryanair a supprimé ses liaisons avec
l’Allemagne depuis Marseille) et que l’aéroport de Nîmes couvre une zone de
chalandise différenciée pour partie de celle de l’aéroport de Montpellier (notamment
les Cévennes, l’Uzège, et le Nord-Est du Gard/Sud de l’Ardèche, dans la vallée du
Rhône). Il dispose ainsi d’une zone de chalandise propre. Il convient encore de relever
que 51% des passagers low-cost se rendent à moins de 50 km de leur aéroport ».
(586) La France a ainsi reconnu qu’il existait des éléments tendant à situer l’aéroport de
Nîmes dans la même zone de chalandise que celui de Montpellier. Dans ces
conditions, il ne peut être soutenu que la présence de l’aéroport de Nîmes est de nature
à prévenir un isolement qui pourrait causer un préjudice au développement
économique et social d’une partie de la zone desservie par cet aéroport, et ce d’autant
plus que, comme il a été indiqué ci-dessus, Nîmes est desservie par le TGV. La France
n’a d’ailleurs fourni aucun élément de nature à apprécier l’ampleur d’un tel préjudice
hypothétique. Le fait que les zones de chalandise des aéroports de Nîmes et de
Montpellier ne se recoupent pas exactement n’est pas un argument suffisant. En effet,
les zones de chalandise de deux aéroports distincts, aussi proches soient-ils, ne
coïncident jamais exactement. Enfin, le fait que 51% des passagers low-cost se rendent
à moins de 50 km de leur aéroport ne prouve pas que sans l’aéroport de Nîmes, les
voyageurs souhaitant rejoindre la zone de chalandise de cet aéroport ou en partir ne
seraient pas prêts, dans une large mesure, à utiliser des vols ayant l’aéroport de
Montpellier comme point de départ ou d’arrivée.
(587) La France a par ailleurs soutenu la thèse selon laquelle la mission de développement
du trafic aérien, confiée à VTAN au travers de la CDSP, « peut être considérée comme
une obligation de service public au sens de la jurisprudence Altmark. » Selon la
France, cette mission concerne le « développement économique et touristique du
territoire », lequel requerrait, selon la France, « (i) l’accroissement des flux de
passagers, générateur de recettes et d’emplois pour l’économie régionale […] et (ii)
le développement de la zone d’activités située au droit de l’aéroport. » Au sujet de
121
cette zone d’activité, la France cite plusieurs entreprises qui y sont implantées et
indique que « Sur ce pôle industriel, VTAN a pour mission de développer des activités
en liens avec l’aéronautique et de renforcer l’activité industrielle ou commerciale,
créatrice d’emplois pour le territoire ». 190
(588) Cet argumentaire ne peut pas être accepté puisque comme rappelé ci-dessous, la
simple contribution d’une activité au développement économique local n’est pas en soi
suffisante pour justifier que cette activité soit qualifiée de SIEG. De plus, le
développement commercial d'un aéroport par l'établissement de nouvelles liaisons
aériennes ou l'expansion des activités non-aéronautiques ne sauraient en tant que tel
répondre au critère d'intérêt général justifiant la qualification de SIEG. En particulier,
la Commission considère que la compensation par les autorités publiques des coûts
nets occasionnés par la fourniture d'un SIEG ne doit pas affecter les incitants
économiques d'un gestionnaire d'aéroport à nouer des relations commerciales avec des
compagnies aériennes.
(589) Ainsi, au vu de tout ce qui précède, à la lumière des arguments présentés par la France
et compte tenu notamment de la proximité de l’aéroport de Montpellier et de la
desserte TGV dont bénéficie Nîmes, la Commission estime que la France a commis
une erreur manifeste d’appréciation en prétendant que la gestion de l’aéroport de
Nîmes était, dans son ensemble, un SIEG. En particulier, l’activité du gestionnaire de
l’aéroport de Nîmes consistant à accueillir des vols commerciaux de transport de
voyageurs dans cet aéroport ne saurait être considérée comme un authentique SIEG. Il
en résulte que dans la mesure où les différentes mesures de soutien financier faisant
l’objet du présent examen visaient à financer l’exploitation de l’activité de l’aéroport
dans son ensemble, elles ne peuvent être considérées comme des compensations
financières octroyées en vue de la gestion d’un authentique SIEG. Ainsi, elles ne
remplissent pas les conditions cumulatives de l’arrêt Altmark.
(590) Par ailleurs, à supposer que la gestion de l’aéroport de Nîmes ait pu valablement, en
tout ou partie, être qualifiée de SIEG, les mesures en cause n’en rempliraient pas pour
autant les conditions cumulatives de l’arrêt Altmark. En effet, elles ne remplissent pas
les première, deuxième et quatrième conditions de cet arrêt, comme il sera démontré
ci-après à la lumière de la communication relative à l'application des règles en matière
d'aides d'Etat aux compensations octroyées pour la prestation de SIEG191
(ci-après « la
Communication SIEG »). La Commission considère que dans le cas de l'aéroport de
Nîmes, il est opportun de procéder à l'analyse de ces conditions de l’arrêt Altmark en
distinguant les entités ayant effectivement exercé cette activité économique au cours
de la période 2000-2012.
7.2.1.4.1.2 Obligations de service public clairement définies à la charge de
l’entreprise (première condition)
(591) Dans la mesure où la France a commis une erreur manifeste d’appréciation en
qualifiant la gestion de l’aéroport dans son ensemble de SIEG, et que les mesures
faisant l’objet du présent examen ont servi à financer l’exploitation de l’aéroport dans
son ensemble, la première condition de l’arrêt Altmark n’est pas remplie.
(592) De plus, selon la Communication SIEG,192
pour que la première condition de l’arrêt
Altmark soit satisfaite, la mission de service public doit être confiée au moyen d'un ou
190
Observations de la France sur la décision d'ouverture. 191
Communication de la Commission du 20.12.2011 relative à l'application des règles de l'Union
européenne en matière d'aides d'Etat aux compensations octroyées pour la prestation de services
d'intérêt économique général, (JO C 8 du 11.01.2012, p4). 192
JO C 8, 11.1.2012, p. 4, point 52.
122
plusieurs actes qui, selon la législation des États membres, peuvent prendre la forme
d'actes législatifs ou réglementaires, ou encore de contrats. De plus, l'acte ou la série
d'actes doivent préciser au minimum le contenu et la durée des obligations de service
public, l'entreprise et, s'il y a lieu, le territoire concerné, la nature de tout droit exclusif
ou spécial octroyé à l'entreprise par l'autorité en cause, les paramètres de calcul, de
contrôle et de révision de la compensation et les modalités de récupération des
éventuelles surcompensations ainsi que les moyens d'éviter ces dernières. Les seuls
actes produits par la France qui pourraient éventuellement remplir cette fonction sont
l’arrêté de 1965, l’AOT, la Convention de concession, la CDSP et leurs avenants
successifs, dans la mesure où ils imposent à la CCI diverses obligations en matière
d’exploitation (y compris sur des points tels que les horaires d’ouverture ou l’égalité
de traitement des usagers), d’entretien, de maintenance et d’aménagement, pour une
durée précise. Toutefois, mis à part la CDSP et ses avenants, qui ne s’appliquant qu’à
VTAN, aucun de ces actes ne fixe les modalités de calcul et de révision d’un
quelconque mécanisme de compensation financière. Ainsi, les actes ayant confié des
obligations à la CCI-aéroport ne répondent pas aux exigences de la première condition
de l’arrêt Almark, même indépendamment du fait que les obligations imposées à la
CCI-aéroport ne relèvent pas d’un authentique SIEG.
7.2.1.4.1.3 Paramètres de la compensation établis préalablement, de façon objective
et transparente (deuxième condition)
7.2.1.4.1.3.1 Période d’exploitation par la CCI-aéroport (2000-2006)
(593) Les subventions ponctuelles et les avances remboursables reçues par la CCI-aéroport
sont toutes des mesures ponctuelles, octroyées au fil de l’eau pour financer le déficit
d’exploitation de l’aéroport. Elles ne résultent donc pas de paramètres de calcul qui
auraient été définis préalablement.
(594) Il convient de noter que les missions de la CCI-aéroport pour la période allant de 2000
jusqu'en février 2006 sont spécifiées dans l’arrêté de 1965 et le cahier des charges qui
lui est annexé ainsi que dans l'AOT de 1986. Or, ces actes ne prévoient pas de
mécanisme de compensation financière en faveur de la CCI sur le fondement de
paramètres établis préalablement, de façon objective et transparente.
(595) De même, la Convention de concession, qui définit les obligations de la CCI-aéroport
pour la période allant de février à décembre 2006 ne prévoit pas davantage de
mécanisme de compensation financière au bénéfice de l'exploitant.
(596) Ainsi, les mesures de soutien financier octroyées à la CCI-aéroport ne remplissent pas
la deuxième condition de l’arrêt Altmark.
7.2.1.4.1.3.2 Période d’exploitation par VTAN (2007-2012)
(597) Les compensations versées à VTAN par le SMAN ont été octroyées en vertu de la
CDSP et de ses annexes, qui précisent les obligations des deux parties dans le cadre de
la mission d'exploitation et définissent les modalités de calcul de la contribution
forfaitaire payée à VTAN par le SMAN.
(598) Toutefois, les modalités de calcul de cette contribution ont été modifiées a posteriori,
par quatre avenants. En particulier, l'avenant n°3 à la CDSP prévoit l'octroi par le
SMAN à VTAN d'une subvention de [100 000-300 000] euros pour l'année 2009 et,
surtout, introduit une nouvelle rédaction de la clause 27-4 de la CDSP, qui stipule à
compter de cette date que « la contribution forfaitaire peut être majorée du montant de
subventions perçues par l'Autorité délégante de la part d'autres collectivités ».
L’avenant n°3 a ainsi introduit de nouveaux paramètres de calcul, qui ne sont pas
objectifs, car sans rapport avec les coûts et recettes de VTAN.
123
(599) Ainsi, la contribution forfaitaire ne remplit pas la deuxième condition de l’arrêt
Altmark. La contribution publique spécifique et les subventions d’équipement,
évoquées au considérant 565 ne satisfont pas non plus ce critère, dans la mesure où il
s’agit de soutiens financiers ponctuels qui n’étaient pas prévus à l’origine.
7.2.1.4.1.4 Modalités de sélection du prestataire de services (quatrième condition)
7.2.1.4.1.4.1 Période d’exploitation par la CCI-aéroport (2000-2006)
(600) La CCI n’a pas été choisie pour gérer l’aéroport à l'issue d’une procédure d’appel
d’offres et la Commission ne dispose d’aucun élément indiquant que les montants des
mesures de soutien financier dont elle a bénéficié aient pu être déterminés sur la base
d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement
équipée des moyens nécessaires, aurait encourus.
(601) Ainsi, les mesures de soutien financier octroyées à la CCI-aéroport ne remplissent pas
la quatrième condition de l’arrêt Altmark.
7.2.1.4.1.4.2 Période d’exploitation par VTAN (2007-2012)
(602) Veolia Transport a été sélectionnée à l'issue d'une procédure de passation négociée,
précédée d'un avis d'appel public à la concurrence publié au Journal officiel de
l’Union européenne. Au sens du droit de l'Union, les autorités françaises ont donc eu
recours à une procédure négociée avec publication.193
(603) La Commission estime généralement qu'une procédure négociée avec publication ne
saurait être réputée satisfaire à la quatrième condition de l'arrêt Altmark que dans des
cas exceptionnels.194
Elle relève à cet égard qu'une fois remises les offres des deux
candidats ayant répondu à l’appel d’offres, le SMAN a engagé des négociations avec
chacun d’eux.195
Il y a notamment eu, entre Veolia Transport et le SMAN, des
contacts destinés à préciser voire modifier certains aspects importants de l’offre de
Veolia Transport. En effet, la France a par exemple indiqué que Veolia Transport avait
effectué des propositions complémentaires à son offre initiale le 20 septembre 2006 au
vu des éléments du courrier du SMAN en date du 6 septembre 2006. De plus, Veolia
Transport a présenté en date du 4 octobre 2006 une série de précisions modifiant des
éléments essentiels de son offre, telles que (i) l'introduction d’un « scénario de repli »
conduisant à une modification de la contribution forfaitaire en cas de réduction de
l’activité de l’aéroport, (ii) le changement des formules prévues pour l'actualisation de
l'économie de la délégation ou encore (iii) la modification des engagements pris par
rapport aux frais de personnel.196
(604) De plus, selon la délibération portant attribution du marché,197
à l'issue de la
procédure, le SMAN a considéré que l'offre de la société Veolia Transport était la plus
avantageuse au regard des critères fixés par le règlement de la consultation,
notamment: (i) la politique de développement commercial, (ii) la maîtrise financière,
(iii) la sûreté et (iv) l'engagement qualité.198
Or, les critères en question laissaient au
SMAN une large marge dans le choix du prestataire, ces critères étant formulés de
façon très générale et allant au-delà de la qualité du service rendu et du coût pour la
collectivité. C’est notamment le cas du critère intitulé « politique de développement
193
Article 30 de la directive 2004/18/CE. 194
Communication susvisée, point 65. 195
Lettre de la France du 19 février 2014. 196
Document de 4 octobre 2006 de Veolia Transport: Précisions concernant notre offre selon les demandes
du Syndicat Mixte au 29/09/06. 197
Délibération du 30 novembre 2006. 198
Rapport de synthèse de l'analyse des offres en vue de l'attribution de la délégation de service public pour
la gestion de la zone civile de l'Aéroport de Nîmes-Garons de 23 novembre 2006.
124
commercial » qui ne peut pas être assimilé d'une quelconque manière à un critère de
qualité pour un SIEG.
(605) Pour toutes ces raisons, la procédure suivie par le SMAN n’était pas de nature à
assurer que soit retenu « le candidat capable de fournir ces services au moindre coût
pour la collectivité ». Par ailleurs, aucune indication ne montre que les prévisions de
coûts établis par VTAN, et sur le fondement desquelles a été établie la contribution
forfaitaire, correspondaient aux coûts qu'une entreprise moyenne, bien gérée et
adéquatement équipée aurait encourus pour gérer l’aéroport. Il apparaît à cet égard que
VTAN s’est principalement fondée sur les données d’exploitation de la CCI-aéroport
pour établir ses prévisions. Or, il n’existe pas d’élément de nature à attester que la
CCI-aéroport se soit comportée comme une entreprise moyenne, bien gérée et
adéquatement équipée.
(606) Ainsi, les mesures de soutien financier octroyées à VTAN ne remplissent pas la
quatrième condition de l’arrêt Altmark.
(607) Comme démontré précédemment, aucune des mesures en question ne remplit les
conditions cumulatives de l’arrêt Altmark. Il reste donc à vérifier si les différentes
mesures en cause étaient de nature à éviter à la CCI-aéroport ou à VTAN de supporter
des coûts qui auraient normalement dû grever leurs ressources financières propres ou
si elles correspondent aux conditions normales du marché.
7.2.1.4.2 Analyse de l’existence d’un avantage économique – Mesures de nature à
éviter des coûts que la CCI-aéroport et VTAN auraient normalement dû
supporter
7.2.1.4.2.1 Période d’exploitation par la CCI-aéroport (2000-2006)
(608) Les « subventions ponctuelles » d’un montant total de 1,35 millions d’euros reçues en
2005 de la part de la CAAC, de la CANM et du CGG sont des subventions à fonds
perdus octroyées sans aucune perspective de retour sur investissement pour les
collectivités concernées. Il en va de même de la subvention de 200 000 euros accordée
à la CCI-aéroport par le service général de la CCI en 2006. Cette subvention à fonds
perdus a en effet été accordée pour financer le déficit d’exploitation auquel la CCI-
aéroport a fait face pendant la dernière année de la période au cours de laquelle elle a
géré l’aéroport, et par conséquent sans aucune perspective de rentabilité pour le
service général de la CCI.
(609) S’agissant des avances remboursables, il convient tout d’abord de noter qu’elles
équivalentes à des prêts à taux nul octroyés par le service général de la CCI à la CCI-
aéroport. Selon la France, « La circonstance que les avances étaient mises à
disposition sans application d’un taux d’intérêt n’est par ailleurs pas suffisante pour
que la Commission conclue à l’existence d’une aide d’Etat. En effet, conformément à
la jurisprudence du Tribunal de l’Union européenne, il faut admettre que des prêteurs,
en raison de leur qualité préalable d’actionnaires, acceptent d’octroyer des prêts sans
taux d’intérêt ou encore des garanties non rémunérées par des primes. De la même
manière convient-il d’admettre qu’il était normal pour la CCI, en tant que
concessionnaire de l’aéroport, de mettre des ressources suffisantes à disposition de
son service aéroport pour permettre à ce dernier d’assurer la continuité de
l’exploitation de l’aéroport de Nîmes.»199
(notes de bas de page omises). Un tel
argument ne pourrait être pertinent que si en octroyant ces avances pour permettre la
poursuite du fonctionnement de l’aéroport de Nîmes, la CCI pouvait s’attendre à ce
que celui-ci génère à plus ou moins long terme une rentabilité qui permette à la CCI
199
Lettre de la France du 27 juillet 2012.
125
non seulement de se faire rembourser ces avances, mais de surcroît, de recevoir un
« retour sur investissement » rémunérant les capitaux engagés, au travers d’éventuels
bénéfices réalisés par l’aéroport.
(610) La Commission a donc interrogé la France au sujet des bénéfices que la CCI pouvait
attendre de l’octroi de ces avances remboursables. Or, dans sa réponse200
, la France
n’a fait état d’aucun bénéfice hypothétique attendu de l’octroi de ces subventions. Elle
s’est contentée de faire référence au cahier des charges de la concession, annexé à
l’arrêté de 1965, et selon lequel, en fin de concession, l’Etat s’engageait à rembourser
à la CCI le solde des avances consenties à son service aéroportuaire. Dans sa réponse,
la France ne mentionne pas de perspective de « retour » lié aux avances remboursables
en dehors de l’assurance de ce remboursement par l’Etat en fin de concession.
(611) A l’évidence, au moment où elle a octroyé les différentes avances remboursables, la
CCI ne pouvait s’attendre à ce que l’exploitation de l’aéroport devienne rentable et
permette à la CCI-aéroport de rembourser les avances consenties tout en dégageant
une marge bénéficiaire propre à rémunérer les capitaux engagés par le service général
de la CCI. En effet, les avances remboursables ont été octroyées à partir de 2002. A
cette époque, Air France avait déjà quitté l’aéroport de Nîmes et la ville était déjà
desservie par le TGV. Par ailleurs, comme le montre le tableau 2, le résultat de
l’aéroport, négatif depuis 1999, s’était régulièrement dégradé depuis cette date,
passant de – 269 000 euros à – 796 000 euros. Il a continué à empirer par la suite, les
pertes atteignant 2,4 millions d’euros en 2003 (année où Air Littoral a mis fin à ses
services vers Paris), avant de diminuer jusqu’à 643 000 euros en 2005. Enfin, comme
il a été démontré dans l’analyse des contrats entre la CCI-aéroport et Ryanair / AMS,
la CCI-aéroport avait déjà, en 2002, commencé à conclure avec Ryanair des contrats
propres à dégrader la rentabilité de l’aéroport, ce qu’elle a fait jusqu’en 2005 inclus.
Finalement, en l'absence des subventions ponctuelles, les résultats de la CCI-aéroport
auraient été encore plus mauvais excluant ainsi toute perspective de rémunération des
capitaux investis.
(612) Au vu de tous ces facteurs, la CCI ne pouvait estimer probable que les capitaux qu’elle
avait engagés au travers des avances consenties à la CCI-aéroport puissent être
rémunérés de quelque façon que ce soit, à plus ou moins brève échéance. La CCI
pouvait même légitimement nourrir de sérieux doutes quant à l’éventualité que la CCI-
aéroport soit un jour en mesure de rembourser la CCI. Des avances remboursables de
montants très conséquents ont d’ailleurs dû être accordées chaque année à partir de
2002 et jusqu’en 2006, pour un montant total d’environ 7 millions d’euros, qui est
venu s’ajouter à un solde positif d’avances remboursables de 2,7 millions d’euros à la
fin de l’année 2001.
(613) A cet égard, la France a précisé qu’aucune échéance précise n’était prévue pour le
remboursement des avances par la CCI-aéroport et que ces avances étaient
déterminées chaque année de manière à équilibrer le budget de la CCI-aéroport.
(614) Par ailleurs, s’il était prévu que l’Etat rembourse le solde des avances remboursables
en fin de concession, il n’était pas prévu qu’il verse un quelconque taux d’intérêt
rémunérant correctement le crédit octroyé par la CCI à son service aéroportuaire.
(615) Compte tenu de tout ce qui précède, il apparaît que la CCI ne s’est pas comportée vis-
à-vis de son service aéroport comme un opérateur en économie de marché guidé par
des perspectives de rentabilité.
200
Lettre de la France du 26 mai 2014.
126
(616) En conclusion, les subventions ponctuelles et les avances remboursables ont chacune
conféré un avantage économique à la CCI-aéroport. En outre, dans la mesure où ces
avantages ont chacun été octroyés à une seule entreprise, ils sont sélectifs.
7.2.1.4.2.2 Période d’exploitation par VTAN (2007-2012)
(617) Aux termes de la CDSP, le SMAN s’est engagé à verser une contribution forfaitaire à
VTAN sur toute la durée de la délégation de service public, d’un montant de [1,2-1,5]
million d’euros dans le « scénario de référence » et de [1,0-1,3] million d’euros dans le
« scénario de repli ». VTAN s’est quant à elle engagée à verser une redevance
domaniale annuelle fixée à un euro pour l’occupation des terrains, ouvrages et
installations. Dans la mesure où cette convention représente un coût net significatif
pour le SMAN, qui ne pouvait espérer aucune rentabilité financière tangible des
montants engagés au titre de cette convention, elle ne correspond pas à des conditions
de marché normales et confère un avantage économique à VTAN.
(618) L’avenant n°1 à la CDSP a consisté à augmenter la contribution forfaitaire de [20 000-
50 000] euros sans aucune perspective de rentabilité pour le SMAN, et ce afin de
compenser la perte d’une recette que VTAN pouvait escompter au moment de devenir
l’exploitant de l’aéroport, mais à laquelle elle a dû renoncer par la suite. L’avenant
n°1, à l’image de la CDSP elle-même, représente un coût net pour le SMAN sans
perspective de retour, et ne correspond pas à des conditions de marché normales. Il a
donc conféré un avantage économique à VTAN.
(619) Le même raisonnement s’applique à l’avenant n°3 qui a de nouveau augmenté le
montant de la contribution forfaitaire sans perspective de rentabilité pour le SMAN et
a donc conféré un avantage économique à VTAN.
(620) En revanche, il en va différemment de l’avenant n°2. Celui-ci prévoyait que VTAN
renouvelle le groupe froid de l’aérogare et que le SMAN l’indemnise à hauteur de la
valeur non amortie de l'équipement en fin de délégation. Or, avant la conclusion de
l’avenant n°2, il résultait de l’article 25.2 de la CDSP, que les investissements
nécessaires étaient tous à la charge du SMAN, à l’exception d’une liste limitative
d’investissements, restreinte, mise à la charge de VTAN par l’article 25.1 de la CDSP.
Ainsi, sans l’avenant n°2, c’est le SMAN, et non VTAN qui aurait dû financer le
renouvellement du groupe froid, devenu hors d’usage. Ainsi, l’avenant n°2 n’a pas
conduit à réduire des coûts qui auraient normalement dû grever les ressources
financières de VTAN. Au contraire, il a représenté une solution financièrement
avantageuse pour le SMAN, qui devait prendre en charge l’investissement en question,
mais qui grâce à l’avenant n°2 n’a pas eu à engager les sommes nécessaires, ne devant
financer que la valeur non amortie du bien en fin de délégation. L’avenant n°2 n’a
donc conféré aucun avantage économique à VTAN et n’est donc pas une aide d’Etat.
(621) De même, l’avenant n°4 a mis la charge de VTAN des investissements dont la
réalisation ne lui incombait pas aux termes de la CDSP, en prévoyant des
« subventions d’équipements » pour les financer. Il était prévu que les subventions
d’équipement soient réajustées en fin de délégation afin de mettre en adéquation les
versements avec les dépenses effectivement réalisées par VTAN. Sans l’avenant n°4,
les coûts d’investissement correspondants, rendus nécessaires par la fermeture de la
BAN, auraient dû être supportés par le SMAN. Les subventions d’équipement n’ont
donc pas conduit à réduire des coûts qui auraient normalement dû grever les
ressources financières de VTAN.
(622) En revanche, du point de vue du SMAN, il était économiquement rationnel de
demander à VTAN, dans la mesure où elle exploitait l’aéroport, de réaliser les
investissements nécessaires, identifiés par des groupes de travail réunissant différentes
127
parties prenantes, en lui octroyant une compensation financière limitée aux coûts
supportés, grâce au mécanisme de réajustement en fin de délégation. D’un point de
vue opérationnel, il était en effet efficace de passer par l’exploitant de l’aéroport pour
réaliser ces investissements. Les subventions d’équipement n’ont donc pas conféré
d’avantage économique à VTAN et ne sont pas des aides d’Etat.
(623) Quant à la contribution publique spécifique, également instituée par l’avenant n°4, elle
est, tout comme la contribution forfaitaire établie par la CDSP dans sa version initiale,
une subvention octroyée par le SMAN sans perspective de rentabilité. Elle ne
correspond pas à des conditions de marché normales. Elle a donc conféré un avantage
économique à VTAN.
(624) En conclusion, la contribution forfaitaire, telle qu’instituée par la CDSP dans sa
version initiale et augmentée par les avenants n°1 et n°3 a conféré un avantage
économique à VTAN. En outre, dans la mesure où ces avantages ont été octroyés à
une seule entreprise, ils sont sélectifs. Il en va de même de la contribution publique
spécifique. En revanche, ni l’avenant n°2 ni les subventions d’équipement n’ont
conféré d’avantage économique à VTAN. Ces mesures ne constituent donc pas des
aides d’Etat.
7.2.1.5 Affectation des échanges intra-Union et de la concurrence
(625) L'aéroport de Nîmes est notamment en concurrence avec les autres plates-formes
aéroportuaires et notamment celles desservant en tout ou partie la même zone de
chalandise, comme celles de Montpellier et d’Avignon. Une aide octroyée à
l'exploitant de l'aéroport de Nîmes (la CCI-aéroport ou VTAN) risque donc de fausser
la concurrence. A ce titre, la Commission observe que l’aéroport de Montpellier se
trouve à seulement 63 km de l'aéroport de Nîmes. Le marché des prestations
aéroportuaires et le marché du transport aérien étant des marchés ouverts à la
concurrence intra-Union, l'aide risque aussi d'affecter les échanges entre les Etats
membres.
(626) De manière plus générale, il convient de noter que les gestionnaires d’aéroports de
l’Union sont en concurrence les uns avec les autres pour attirer des compagnies
aériennes. En effet, les compagnies aériennes déterminent les liaisons qu’elles
exploitent et les fréquences correspondantes en fonction de différents critères. Ces
critères comprennent la clientèle potentielle qu’elles peuvent espérer sur ces liaisons
mais également les caractéristiques des aéroports situés aux extrémités de ces liaisons.
(627) Les compagnies aériennes examinent notamment des critères tels que la nature des
services aéroportuaires fournis, la population ou l’activité économique autour de
l’aéroport, la congestion, l’existence d’un accès par voie terrestre, ou encore le niveau
des redevances et les conditions commerciales générales d’utilisation des
infrastructures aéroportuaires et des services. Le niveau des redevances est un élément
significatif dans la mesure où des fonds publics alloués à un aéroport pourraient être
utilisés afin de maintenir les charges aéroportuaires à un niveau artificiellement bas
pour attirer des compagnies aériennes et, partant, avoir un effet de distorsion important
sur la concurrence.201
(628) Par conséquent, les compagnies aériennes allouent leurs ressources, notamment en
matière d’appareils et d’équipage, entre différentes liaisons en prenant en compte,
entre autres, les services offerts par les gestionnaires d’aéroports et le prix facturés par
ceux-ci pour ces prestations.
201
Nouvelles lignes directrices, paragraphe 43.
128
(629) Il ressort de ces éléments que les différentes mesures qui ont été prises en faveur de la
CCI-aéroport et de VTAN et font l’objet du présent examen sont susceptibles, pour
autant qu’elles aient conféré un avantage économique à l’une de ces deux entreprises,
d'avoir renforcé les positions respectives de ces deux entreprises par rapport aux autres
gestionnaires d’aéroports européens. Par conséquent, ces mesures sont susceptibles
d’avoir faussé la concurrence et affecté les échanges entre Etats membres.
7.2.1.6 Conclusion sur la présence d’aides d’Etat
(630) Les subventions relatives aux missions régaliennes ne constituent pas des aides d’Etat.
Les subventions d’exploitation ponctuelles et les avances remboursables reçues par la
CCI-aéroport constituent des aides d’Etat en faveur de cette dernière. La contribution
forfaitaire, telle qu’instituée par la CDSP dans sa version initiale et augmentée par les
avenants n°1 et n°3 constitue une aide d’Etat en faveur de VTAN, de même que la
contribution publique spécifique. L’avenant n°2 et les subventions d’équipement ne
sont pas des aides d’Etat.
7.2.2 Illégalité des aides
(631) Les subventions d’exploitation ponctuelles, les avances remboursables, la contribution
forfaitaire et ses différentes modifications, ainsi que la contribution publique
spécifique ont été mises en œuvre sans être notifiées.
(632) La décision de la Commission du 28 novembre 2005 relative à l’application de
l’article 106, paragraphe 2, du TFUE aux aides d’Etat sous forme de compensations de
service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services
d’intérêt économique général (« la décision SIEG de 2005 ») prévoit les conditions
dans lesquelles certaines aides octroyées comme compensations de service public
peuvent être exemptées de l’obligation de notification instituée par l’article 108,
paragraphe 3 du TFUE. Selon la France, les mesures octroyées en faveur de la CCI-
aéroport ou de VTAN après le 19 décembre 2005 satisfont à ces conditions.
(633) La Commission considère que tel n’est pas le cas. En effet, premièrement, la gestion
de l’aéroport de Nîmes ne peut être considérée dans son ensemble comme un
authentique SIEG, comme il a été démontré précédemment. Par conséquent, comme
les différentes mesures susmentionnées ont été octroyées pour financer l’exploitation
de l’aéroport dans son ensemble, elles ne remplissent pas les critères prévus par la
décision SIEG de 2005.
(634) Deuxièmement, comme indiqué précédemment, même à supposer que l’exploitation
de l’aéroport puisse dans sa totalité être qualifiée de SIEG, aucune des mesures en
question n’en constituerait pour autant l’application d’un mécanisme de compensation
dont les paramètres auraient été établis à l’avance, de manière objective et
transparente. En effet, comme indiqué précédemment, les mesures en cause ne
remplissent pas la deuxième condition de l’arrêt Altmark. Ainsi, ces mesures ne
satisfont pas les conditions établies à l’article 4, paragraphes d) et e) de la décision
SIEG de 2005, selon lequel le ou les actes confiant la gestion d’un service d’intérêt
économique général doivent mentionner la description du mécanisme de compensation
et les paramètres de calcul, de contrôle et de révision de la compensation ainsi que les
modalités de remboursement des éventuelles surcompensations et les moyens d’éviter
celles-ci. C’est la deuxième raison pour laquelle les mesures susmentionnées n’ont pu,
en vertu de la décision SIEG de 2005 bénéficier d’une exemption de l’obligation de
notification établie par l’article 108, paragraphe 3 du TFUE.
(635) Au vu de ce qui précède, les subventions d’exploitation ponctuelles, les avances
remboursables, la contribution forfaitaire, telle qu’instituée par la CDSP dans sa
129
version initiale et augmentée par les avenants n°1 et n°3, ainsi que la contribution
publique spécifique constituent des aides illégales.
7.2.3 Compatibilité avec le marché intérieur
(636) Comme il a été démontré précédemment, la France a commis une erreur manifeste
d’appréciation en prétendant que la gestion de l’aéroport de Nîmes était, dans son
ensemble, un SIEG. En particulier, l’activité du gestionnaire de l’aéroport de Nîmes
consistant à accueillir des vols commerciaux de transport de voyageurs dans cet
aéroport ne saurait être considérée comme un authentique SIEG. Ces conclusions
s’appliquent à la fois à la période d’exploitation par la CCI-aéroport et à la période
d’exploitation par VTAN. Dans la mesure où les différentes mesures de soutien
financier faisant l’objet du présent examen visaient à financer l’exploitation de
l’activité de l’aéroport dans son ensemble, elles ne peuvent être considérées comme
des compensations financières octroyées en vue de la gestion d’un authentique SIEG.
(637) De plus, comme il a été démontré précédemment quand bien même l’exploitation de
l’aéroport de Nîmes aurait pu être valablement, en tout ou partie, qualifiée de SIEG,
aucune des mesures de soutien financier faisant l’objet du présent examen ne
procéderait d’un mécanisme de compensation financière dont les paramètres auraient
été établis à l’avance, de manière objective et transparente, et assorti de modalités de
contrôle et de révision de la compensation ainsi que de modalités de remboursement
des éventuelles surcompensations et des moyens d’éviter celles-ci. Ainsi, les mesures
en cause ne satisfont pas les conditions cumulatives établies par l’Encadrement de
l'Union européenne applicable aux aides d'État sous forme de compensations de
service public, qui serait applicable au cas d’espèce ratione temporis.202
De plus, pour
ces mêmes raisons et ainsi qu’il a été établi aux considérants 633 à 635, les mesures en
question ne satisfont pas non plus les conditions cumulatives établies par la Décision
SIEG de 2005. Par conséquent, ces mesures ne peuvent être déclarées compatibles
avec le marché intérieur sur le fondement de l’article 106, paragraphe 2 du TFUE.
(638) La Commission va maintenant analyser les mesures faisant l’objet du présent examen
à l’aune des différents critères de l’article 107, paragraphe 3, point c) du TFUE.
(639) Les différentes aides d’Etat identifiées dans la présente évaluation sont toutes des
aides au fonctionnement, dans la mesure où elles ont eu pour effet de financer
l’exploitation de l’aéroport de Nîmes, et non des investissements spécifiques réalisés
au sein de cet aéroport. Ces aides au fonctionnement ont toutes été octroyées
illégalement avant le 4 avril 2014, date d’entrée en vigueur des nouvelles lignes
directrices, dans lesquelles la Commission a déclaré qu’elle appliquerait les principes
énoncés dans lesdites lignes directrices à toutes les affaires en cours portant sur des
aides au fonctionnement accordées à des aéroports, même si ces aides ont été
octroyées avant le 4 avril 2014.203
(640) Selon les nouvelles lignes directrices, les aides au fonctionnement octroyées à des
aéroports avant le 4 avril 2014 peuvent être déclarées compatibles pour la totalité des
coûts d'exploitation qui ne sont pas couverts si une série de conditions est remplie.204
Ces conditions peuvent se résumer ainsi:
- l’aide contribue à un objectif d’intérêt commun bien défini (amélioration de la
mobilité des citoyens et de la connectivité des régions, lutte contre la congestion
202
Communication de la Commission l’Encadrement de l'Union européenne applicable aux aides d'État
sous forme de compensations de service public (2011), JO C 8, 11.1.2012, p. 15, point 16. d) et e) et
point 69. 203
Nouvelles lignes directrices, paragraphe 172. 204
Nouvelles Lignes Directrices, paragraphe 137.
130
du trafic aérien sur les principales plates-formes aéroportuaires de l'Union,
développement régional) ;
- l’intervention de l’Etat est nécessaire ;
- l’aide est un instrument d’intervention approprié ;
- l’aide a un effet d’incitation en ce sens qu’en son absence, le niveau d'activité
économique de l'aéroport concerné serait sensiblement réduit ;
- l’aide est proportionnée, en ce sens qu’elle est limitée au minimum nécessaire pour
que l'activité visée puisse être mise en œuvre ;
- les distorsions de concurrence causées par l’aide et ses effets sur les échanges
doivent être prises en compte dans l’analyse.
(641) La Commission va appliquer ces critères aux aides en question.
7.2.3.1 Contribution à un objectif d’intérêt commun bien défini
(642) Dans la mesure où ces aides ont financé le déficit d’exploitation de l’aéroport de
Nîmes, elles ont permis son maintien en activité. Comme l’a souligné la France,
l’activité de cet aéroport a un impact positif sur le développement économique du
département du Gard, en particulier dans le secteur du tourisme. Or, le développement
économique local est reconnu, selon les nouvelles lignes directrices, comme un
objectif d’intérêt commun qui pouvait justifier l’octroi d’aides au fonctionnement en
faveur d’un aéroport avant le 4 avril 2014, si certaines conditions sont remplies.
(643) S’agissant du secteur de tourisme, il est indéniable que l’aéroport de Nîmes dessert
une région touristique, et que les vols réguliers offerts par Ryanair à destination de cet
aéroport depuis 2000 ont amené d’importants afflux de touristes dans la région de
Nîmes. A titre d’exemple, l’étude de 2006 précitée sur les retombées économiques de
l’aéroport de Nîmes205
précise que pour la seule année 2006, les touristes amenés à
l’aéroport de Nîmes ont injecté cent millions d’euros de dépenses courantes dans
l’économie locale206
dont 21 millions dépensées dans l’hébergement, 26 millions dans
la restauration, 20 millions dans les autres achats alimentaires, 9 millions dans le
transport (hors transport aérien), 4 millions dans les visites et 6 millions dans les
souvenirs. L’impact économique induit (c’est-à-dire l’effet sur le reste de l’économie
locale) des activités de l’aéroport y est par ailleurs estimé à 2,38 milliards d’euros en
tenant compte de l’effet des investissements.
(644) Par ailleurs, cette étude de 2006 indique que 2200 emplois étaient directement liés à
l’activité aéroportuaire207
. Ainsi, jusqu’à la fermeture de la BAN en juillet 2011, celle-
ci se traduisait par l'accueil de nombreuses familles sur le territoire de Nîmes (plus de
800 enfants de militaires scolarisés dans le Gard).
(645) La présence de la BAN et de l'activité aéronautique civile ont également permis le
développement d’un pôle industriel aéronautique sur le site aéroportuaire. Ce pôle
regroupe des activités telles que :
- GHSC (Groupement d’Hélicoptères de la Sécurité Civile), à la fois centre de
commandement des 22 bases permanentes et opérationnelles de la sécurité civile
réparties sur tout le territoire métropolitain et dans les départements d’outre-mer,
centre de maintenance de la flotte d’hélicoptère du ministère de l’intérieur et centre
205
Annexe 11.0.5 à la lettre de la France du 27 février 2012. 206
Hors investissements, tels que par exemple les achats immobiliers. 207
1400 emplois sur la BAN et 800 emplois, créés par 20 entreprises présentes sur le site aéroportuaire.
131
d’instruction du personnel et de formation continue des pilotes (effectif sur la zone
: 140 personnes) ;
- Sabena Technics (groupe TAT) : Société de services en maintenance aéronautique
civile et militaire (effectif sur la zone : 336 personnes) ;
- AVDEF : Aviation Défense Service (groupe EADS), active dans le transport
public et les évacuations sanitaires à la demande, le travail aérien au profit des
armées et la lutte contre les feux de forêts (effectif sur la zone : 51 personnes) ;
- Airways Formation : école de pilotage, dotée d’une filière transport aérien
regroupant toutes les formations préparant aux entrées en compagnie aérienne, et
d’une filière instructeurs préparant à toutes les qualifications d’instructeur prévues
par la réglementation (effectif sur la zone : 11 personnes).
(646) Au total, selon la France, le pôle industriel générait 680 emplois civils en 2012,
auxquels s’ajoutent plus de 3 000 emplois induits générés par l’activité de la
plateforme.
(647) La France indique de plus qu’afin de compenser le départ de la BAN, il a été décidé de
créer une zone d’activités économiques de plus de 140 ha au droit de l’aéroport
Nîmes, au cœur d’un espace économique de plus de 500 ha. 85 ha seraient disponibles
pour accueillir, autour des activités de maintenance et services aéronautiques, un parc
d’activités cluster sur la gestion des risques d’une part et l’écoconstruction d’autre
part. Ce parc, contigu au pôle d’activités de l’aéroport de Nîmes, serait le premier pôle
d’activité de la deuxième agglomération du Languedoc-Roussillon et l’un de ses
principaux pôles régionaux. Il accueillerait 100 entreprises représentant 2000 emplois.
(648) L’aide en question a donc apporté une contribution significative au développement
économique local.
(649) Toutefois, selon les nouvelles lignes directrices, lorsqu’un aéroport est situé dans la
même zone d’attraction qu’un autre aéroport disposant de capacités inutilisées, le plan
d’exploitation doit indiquer, sur la base de prévisions valables du trafic de passagers et
de fret, l'incidence probable sur le trafic de l’autre aéroport situé dans cette zone
d’attraction208
. Il ressort des observations formulés par la France à cet égard que la
CCI-aéroport et VTAN s’attendaient à ce que le trafic de Nîmes n’ait pas d’impact
notable sur le trafic observé dans les aéroports de Marseille, Avignon et Montpellier.
En particulier, la CCI estimait que ces trois aéroports n’étaient pas situés dans la zone
de chalandise de Nîmes. Il peut donc être conclu que l’incidence probable du trafic de
Nîmes sur les aéroports voisins a été prise en considération.
(650) Même si la Commission ne partage pas l’avis des Exploitants quant à la présence de
zones de chalandises distinctes, elle considère que l'impact des aides en question sur
les aéroports voisins n'était pas d'une ampleur propre à contrebalancer a contribution
de l’aide à l'objectif d'intérêt commun en cause, ou à compromettre de manière
substantielle les conditions de fonctionnement des aéroports voisins.
7.2.3.2 Nécessité de l’intervention de l’Etat et caractère approprié de l’aide
en tant qu’instrument d’intervention
(651) Les aides versées sous forme d’avances remboursables et de subventions
d’exploitation étaient nécessaires afin d’assurer l’équilibre économique de
l’exploitation de l’aéroport de Nîmes, et par conséquent son maintien en
fonctionnement.
208
Nouvelles lignes directrices, paragraphes 114 et 131.
132
(652) Par ailleurs, selon les nouvelles lignes directrices, « De ce fait, dans les conditions
actuelles du marché, les aéroports plus petits peuvent éprouver des difficultés à
assurer le financement de leurs activités en l’absence de capitaux publics ».209
Les
nouvelles lignes directrices précisent par ailleurs que les aéroports accueillant jusqu’à
700 000 passagers par an sont susceptibles de ne pas pouvoir supporter une part
importante de leurs coûts d'exploitation. Or, l’aéroport de Nîmes fait partie des petits
aéroports, dans la mesure où son trafic n’a pas dépassé 320 000 passagers au cours de
la période 1999-2011.
(653) Ainsi, l’intervention de l’Etat pour assurer l’équilibre économique de l’aéroport de
Nîmes, et par conséquent son maintien en fonctionnement, au cours de la période
2000-2011 était nécessaire.
(654) Selon les nouvelles lignes directrices, il convient d’examiner si d’autres instruments
d'intervention ou d'aides que ceux utilisés auraient pu être mis en œuvre et auraient
entraîné moins de distorsions de concurrence.210
Comme il a déjà été indiqué,
l’aéroport a enregistré un déficit d’exploitation très important chaque année au cours
de la période 2002-2011. Pour le maintenir en activité, il était donc difficile, dans ce
contexte, d’envisager d’autres instruments que des subventions d’exploitation à fonds
perdus, tels que les subventions d’exploitation ponctuelles, la contribution forfaitaire
et la contribution publique spécifique, ainsi que des avances remboursables sans
échéance de remboursement précise et sans taux d’intérêt.
7.2.3.3 Effet d’incitation et proportionnalité des aides
(655) Selon les nouvelles lignes directrices, il convient de vérifier si en l’absence des aides
au fonctionnement, le niveau d’activité économique de l’aéroport aurait été
sensiblement réduit et si par ailleurs, les aides ont été limitées au minimum nécessaire
pour que l'activité visée puisse être mise en œuvre.211
(656) Comme expliqué précédemment, l'arrivée du TGV mais aussi le départ d’Air France
en 2001, suivi deux ans plus tard de celui d’Air Littoral, ont provoqué une chute
drastique du nombre de vols à l'aéroport de Nîmes. Conjugués aux conditions des
contrats conclus avec Ryanair / AMS à partir de 2002, ces facteurs ont également
provoqué une dégradation importante de la situation financière de l’aéroport. Ainsi, en
l'absence des mesures de soutien destinées à financer le déficit d’exploitation de celui-
ci, son activité aurait été fortement réduite, voire arrêtée.
(657) Par ailleurs, comme expliqué ci-dessous, les montants d’aide ont été réduits au
minimum nécessaire.
7.2.3.3.1 Période d’exploitation par la CCI-aéroport (2000-2006)
(658) Les différentes aides au fonctionnement octroyées à la CCI-aéroport ont été limitées
aux montants nécessaires pour assurer l’équilibre financier de l’exploitation, sans aller
au-delà. Dans la mesure où sans ces aides, la CCI-aéroport aurait enregistré un déficit
d’exploitation important chaque année, l’activité de l’aéroport aurait dû être
considérablement réduite pour assurer un équilibre financier, voire totalement arrêtée.
Les aides ont eu, par conséquent, un effet incitatif au sens du paragraphe 124 des
nouvelles lignes directrices.
(659) Ainsi, s’agissant des subventions d’exploitation ponctuelles reçues en 2005, la France
a expliqué que le budget 2005 de la CCI avait été établi sur le fondement de prévisions
de recettes et de coûts tenant compte des prévisions de trafic, et que compte tenu du
209
Nouvelles lignes directrices, paragraphe 117. 210
Nouvelles lignes directrices, paragraphe 120. 211
Nouvelles lignes directrices, paragraphes 124 et 125.
133
programme aéroportuaire, les prévisions de 2005 montraient un besoin de financement
de [1-3] millions d’euros. Ce besoin correspondait à la différence entre les dépenses
prévues ([4-6] millions d’euros) et les recettes prévues ([2-4] millions d’euros).
(660) Or, les subventions d’exploitation ponctuelles reçues par la CCI-aéroport en 2005 ne
représentaient qu’un montant total de 1,35 millions d’euros, très inférieur au besoin de
financement de [1-3] millions d’euros. La différence, d’environ [600 000-800 000]
euros a été supportée par la CCI, pour partie sous forme d’avances remboursables.
(661) De la même manière, la subvention d’exploitation ponctuelle de 200 000 euros reçue
du service général de la CCI en 2006 ne représentait qu’une partie du déficit
d’exploitation. La délibération de l’Assemblée générale de la CCI du 14 décembre
2005 montre en effet que cette subvention d’exploitation ponctuelle résultait d’un
accord entre le SMAN et la CCI, au terme duquel cette dernière s’était engagée à
supporter une partie seulement du déficit d’exploitation de l’aéroport, limitée à 200
000 euros212
, le reste étant pris en charge par le SMAN, nouveau propriétaire.
(662) S’agissant des avances remboursables octroyées par le service général de la CCI, elles
résultaient de l’obligation de présenter un budget équilibré pour l’aéroport, laquelle
était imposée à la CCI par le contrat de concession. Le montant des avances était
défini chaque année au moment de l’élaboration du budget, de manière à équilibrer
celui-ci. L’élaboration des budgets des aéroports gérés par les chambres de commerce
et d’industrie est encadrée par des procédures strictes de nature à assurer que les
contributions publiques destinées à équilibrer le budget soient limitées au minimum
nécessaire.
(663) Ainsi, la circulaire n° 111 du 30 mars 1992 fixant les règles budgétaires comptables et
financières applicables aux chambres de commerce et d’industrie prévoit une
procédure précise régissant notamment la manière dont le service général d’une
chambre de commerce et d’industrie détermine le budget affecté à la gestion d’un
aéroport. Cette circulaire prévoit notamment que la chambre de commerce et
d’industrie détermine, pour l’élaboration du budget, (i) l’état des opérations de
fonctionnement ; (ii) l’état de la capacité d’autofinancement ; et (iii) l’état des
opérations en capital. En outre de nombreux documents doivent obligatoirement être
annexés à la proposition de budget dont l’approbation est requise (tableau des
prestations et contributions interservices, tableau des effectifs et masses salariales,
etc.). L’objectif de cette procédure consiste en particulier à garantir que le budget soit
équilibré sans surcompensation.
(664) Par conséquent, les montants des avances remboursables n’ont pas excédé ce qui était
nécessaire pour financer le déficit d’exploitation de la CCI-aéroport, compte tenu des
subventions d’exploitation ponctuelles.
(665) Ainsi, les différentes aides au fonctionnement reçues par la CCI-aéroport ont eu un
effet d’incitation et étaient limitées au minimum.
7.2.3.3.2 Période d’exploitation par VTAN (2007-2011)
(666) Les différentes aides au fonctionnement octroyées à VTAN, représentant des montants
importants, étaient elles aussi nécessaires pour assurer l’équilibre financier de
l’exploitation. Sans ces aides, l’exploitation aurait été largement déficitaire, et
l’activité de l’aéroport aurait dû être significativement réduite, voire totalement
arrêtée.
212
Annexe n°2014-II-32 à la lettre de la France du 25 avril 2014.
134
(667) La contribution forfaitaire telle que prévue à l’origine a été définie sur le fondement
d’un budget prévisionnel établi par Veolia Transport. Selon ce budget, dans le
« scénario de référence », la contribution forfaitaire de [1,2-1,5] millions d’euros
devait permettre à VTAN de réaliser des marges nettes [de 0-5% en moyenne] sur
toute la durée de la délégation de service public. D’autre part, Veolia Transport a
conçu à l’invitation du SMAN un « scénario de repli » correspondant à une baisse
d’activité, dans lequel la contribution forfaitaire serait abaissée à [1,0-1,3] million
d’euros. Dans ce scénario, VTAN prévoyait des marges nettes [de 0-5% en moyenne]
sur toute la durée de la délégation de service public.213
(668) Au vu de ces éléments, les marges nettes escomptées par Veolia Transport
apparaissent raisonnables, et le scénario de repli a été conçu pour que ces marges
n’augmentent pas de façon exagérée en cas de baisse de l’activité.
(669) La contribution forfaitaire a ainsi été conçue initialement pour être limitée au
minimum nécessaire pour assurer à VTAN l’équilibre financier de l’exploitation ainsi
qu’un bénéfice raisonnable. Ses modifications ultérieures ont suivi cette logique.
Ainsi, l’augmentation de la contribution forfaitaire par l’avenant n°1 correspondait à la
perte imprévisible d’une recette qui avait été initialement prise en compte par Veolia
Transport dans ses estimations préalables, tandis que l’augmentation résultant de
l’avenant n°3 correspondait à des dépenses de marketing supplémentaires engagées
par VTAN et non prévues au départ.
(670) De surcroît, les comptes de résultat de VTAN observés a posteriori montrent que la
contribution forfaitaire n’a pas dépassé le minimum nécessaire, dans la mesure où elle
n’a pas conduit VTAN à enregistrer des bénéfices excessifs. En effet, d’après le
tableau 6 de la décision d’ouverture, la marge nette de VTAN a même été négative sur
toute la période 2007-2010.
(671) La contribution publique spécifique mise en place par l’avenant n°4 à la CDSP était
quant à elle calculée sur le fondement d’un budget prévisionnel reflétant les nouvelles
charges d’exploitation de VTAN, consécutives à la fermeture de la BAN, et il était de
plus prévu que son montant soit réajusté a posteriori en fonction du compte
d’exploitation réalisé, de manière à éviter les versements excessifs.
(672) Ainsi, les différentes aides au fonctionnement reçues par VTAN ont eu un effet
d’incitation et ont été limitées au minimum.
7.2.3.4 Appréciation des distorsions de concurrence et des effets sur les
échanges
(673) Selon les nouvelles lignes directrices, pour apprécier la compatibilité des aides au
fonctionnement octroyées avant le 4 avril 2014, la Commission tient compte des
distorsions de concurrence et des effets sur les échanges.214
(674) Les aides octroyées à un aéroport de l’Union peuvent potentiellement avoir un effet
négatif sur tous les autres aéroports de l’Union. En effet, tous les aéroports de l’Union
sont en concurrence les uns avec les autres pour attirer les compagnies aériennes, dans
le cadre du marché intérieur du transport aérien intra-Union. Lorsqu’il s’agit d’aides
au fonctionnement permettant à l’aéroport de demeurer économiquement viable,
l’intensité de cet effet général sur les autres aéroports dépend du volume d’activité de
l’aéroport aidé, qui peut s’exprimer en particulier en nombre de passagers, de liaisons
et de fréquences.
213
Annexe n°2014-1-1 à la lettre de la France du 19 février 2014. 214
Nouvelles lignes directrices, paragraphes 131 et 137.
135
(675) Il convient de noter à cet égard qu’au cours de la période considérée (2002-2011),
l’aéroport de Nîmes est resté un aéroport de taille modeste. Son trafic a culminé à 320
000 passagers en 2001, et il est resté, les autres années, compris entre 130 000 et 300
000 passagers par an. Au cours de cette même période, les services réguliers offerts au
départ de cet aéroport se sont résumés à la liaison vers Paris d’Air Littoral, exploitée
jusqu’en 2003 seulement, ainsi qu’aux quelques liaisons exploitées par Ryanair (au
maximum quatre en même temps), à raison d’une fréquence par jour ou de fréquences
infra-quotidiennes, sauf éventuellement l’été, où deux fréquences quotidiennes ont pu
être offertes pour certaines liaisons, selon les années. Le volume d’activité de
l’aéroport de Nîmes est donc resté modeste. L’effet général des aides octroyées à cet
aéroport sur tous les autres aéroports a donc été relativement circonscrit.
(676) Cependant, les effets d’une aide au fonctionnement accordée à un aéroport donné sur
un autre aéroport sont d’autant plus intenses que les deux aéroports sont proches. En
particulier, lorsque l’un d’eux se trouve dans la zone de chalandise de l’autre, ils sont
en concurrence particulièrement intense pour attirer les compagnies aériennes qui
souhaitent desservir la région où ils se trouvent. De plus, lorsqu’il existe des liaisons
au départ de chacun de ces deux aéroports vers la même ville de destination, les deux
aéroports sont en concurrence pour attirer les passagers, qui souhaitent se rendre vers
cette ville de destination, et qui ont pour ce trajet, le choix entre les deux aéroports.
(677) L’aéroport d’Avignon est situé à 68 km de l’aéroport de Nîmes, mais ses contraintes
de piste ne lui permettent d’accueillir que des vols privés et d’affaires. Il n’est donc
pas en concurrence avec l’aéroport de Nîmes pour accueillir des vols réguliers. Quant
à l’aéroport de Marseille, il est situé à 115 km, ce qui représente 1h15 de route. Il est
donc trop éloigné pour subir un impact excessif des aides en question. Comme indiqué
précédemment, l’aéroport de Montpellier est situé à seulement 63 km de l’aéroport de
Nîmes, ce qui représente un temps de parcours de 49 minutes par la route. Dans la
mesure où la Commission considère qu’une distance inférieure à 100 km et un temps
de parcours inférieur à une heure sont les critères qui permettent de définir, en
première approximation, la zone de chalandise d’un aéroport, l’aéroport de
Montpellier est situé a priori dans la zone de chalandise de celui de Nîmes. De plus,
certaines liaisons exploitées au départ de Montpellier ont la même agglomération de
destination que certaines liaisons au départ de l'aéroport de Nîmes. C’est notamment le
cas de liaisons vers Bruxelles et Londres, offertes au départ des deux aéroports.
(678) A cet égard, la France, considère que la zone de chalandise d'un aéroport se définit à
partir de deux critères étant : (i) la durée du trajet; et (ii) dans les aéroports où le trafic
low-cost est dominant comme celui de Nîmes, le coût du trajet. Ainsi, la France
considère que la zone de chalandise d'un aéroport régional serait limitée aux aéroports
qui peuvent être rejoints en voiture en 60 minutes au plus.215
Selon la France,
« S’agissant enfin de l’aéroport de Montpellier, si les éléments ci-dessus tendent à le
situer dans la même zone de chalandise que l’aéroport de Nîmes en raison du temps
de trajet inférieur à 60 minutes qui les sépare et du coût du trajet aller-retour
n’excédant pas 20€, il convient toutefois de souligner que les liaisons Ryanair de
l’aéroport de Montpellier, aujourd’hui au nombre de quatre, répondent à une
demande touristique qui est située plutôt à l’ouest qu’à l’est de l’aéroport (la liaison
avec Hahn en est un exemple alors même que Ryanair a supprimé ses liaisons avec
l’Allemagne depuis Marseille) et que l’aéroport de Nîmes couvre une zone de
chalandise différenciée pour partie de celle de l’aéroport de Montpellier (notamment
les Cévennes, l’Uzège, et le Nord-Est du Gard/Sud de l’Ardèche, dans la vallée du
215
Observations de la France sur la décision d'ouverture, p.35.
136
Rhône). Il dispose ainsi d’une zone de chalandise propre. Il convient encore de relever
que 51% des passagers low-cost se rendent à moins de 50 km de leur aéroport. »
(679) Ces éléments sont en effet de nature à atténuer l’impact sur l’aéroport de Montpellier
des aides au fonctionnement reçues par l’aéroport de Nîmes. S’y ajoute le fait que
l’aéroport de Montpellier a eu, sur toute la période, un trafic nettement supérieur à
celui de l’aéroport de Nîmes. En effet, le trafic y a fluctué entre 1,2 million et 1,6
million de passagers par an. L’aide reçue par l’aéroport de Nîmes, environ six fois plus
petit, n’a pu avoir, au maximum, qu’un impact limité sur l’aéroport de Montpellier.
Enfin, le temps de parcours entre les deux aéroports, inférieur à une heure mais
quasiment égal à 50 minutes, est également un facteur propre à atténuer l’impact des
aides en question sur l’aéroport de Montpellier.
(680) Ainsi, les les aides au fonctionnement en question ont eu un impact limité sur les
aéroports voisins de celui de Nîmes.
(681) En prenant en compte tous ces éléments positifs et négatifs produits par les aides en
question de manière globale, la Commission estime que ces aides n’ont pas affecté les
échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun.
(682) Au vu des éléments présentés ci-dessus concernant l’impact des aides en cause sur la
concurrence et les échanges et compte tenu de la contribution importante de ces aides
au développement économique de la zone dans laquelle se trouve l’aéroport de Nîmes,
notamment en raison de leur impact bénéfique sur le tourisme local et le pôle
d’activité présent sur le site aéroportuaire, la Commission considère que les aides en
cause n’ont pas affecté la concurrence et les échanges dans une mesure contraire à
l’intérêt commun.
7.2.3.5 Conclusion sur la compatibilité des aides en faveur de la CCI-
aéroport et de VTAN
(683) Au vu de ce qui précède, les subventions d’exploitation ponctuelles, les avances
remboursables, la contribution forfaitaire, telle qu’instituée par la CDSP dans sa
version initiale et augmentée par les avenants n°1 et n°3, ainsi que la contribution
publique spécifique constituent des aides compatibles avec le marché intérieur au sens
de l'article 107, paragraphe 3, point c), du TFUE.
(684) Cette conclusion se fonde sur les critères spécifiques prévus dans les nouvelles lignes
directrices pour évaluer la compatibilité des aides au fonctionnement accordées en
faveur des aéroports avant le 4 avril 2014. Elle est sans aucun préjudice de toute
appréciation d’éventuelles futures aides en faveur de l’aéroport de Nîmes que la
Commission pourrait être amenée à effectuer à l’avenir sur le fondement règles
prévues par les nouvelles lignes directrices pour les aides octroyées après le 4 avril
2014.
8. Récupération
(685) La Commission a constaté que Ryanair / AMS avait bénéficié d’aides illégales et
incompatibles avec le marché intérieur. Selon la jurisprudence constante de la Cour de
Justice, dès lors que la Commission établit qu’une aide est incompatible avec le
marché intérieur, la Commission est compétente pour obliger l’Etat membre concerné
à supprimer ou à modifier ladite aide.216
Selon l’article 14 du règlement (CE) n°
659/1999 du 22 mars 1999 portant modalités d’application de l’article 93 du traité
CE217
« En cas de décision négative concernant une aide illégale, la Commission
décide que l'Etat membre concerné prend toutes les mesures nécessaires pour
216
Arrêt rendu dans l’affaire C-70/72 Commission contre l’Allemagne (EBHT 1973, p. 00813, point 13). 217
JO L 83, 27.3.1999, p. 1.
137
récupérer l'aide auprès de son bénéficiaire (ci-après dénommée «décision de
récupération»). La Commission n'exige pas la récupération de l'aide si, ce faisant, elle
allait à l'encontre d'un principe général de droit communautaire ».
(686) Selon la jurisprudence constante de la Cour, s’agissant des aides illégales qualifiées
par la Commission comme incompatibles avec le marché intérieur, l’objectif de
l’obligation imposée à l’Etat est de rétablir la situation antérieure.218
A cet égard, la
Cour considère que l’objectif est atteint lorsque les bénéficiaires ont remboursé les
montants octroyés illégalement à titre d’aide en perdant ainsi l’avantage dont ils
bénéficiaient à l’égard des concurrents. De cette manière, la situation antérieure au
versement de l’aide est rétablie.219
(687) En l'espèce, il apparaît qu’aucun principe général du droit de l'Union n’irait à
l’encontre de la récupération des aides illégales identifiées dans le cadre de la présente
décision. En particulier, ni la France ni les tiers intéressés n’ont fourni d’arguments en
ce sens.
(688) La France doit donc prendre toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès de
Ryanair/AMS les aides octroyées illégalement au travers des contrats en cause.
(689) En ce qui concerne les montants d’aide résultant des contrats conclus avec la CCI, ils
doivent être remboursés à cette dernière. Les montants d’aide résultant des contrats
conclus avec VTAN doivent quant à eux être remboursés au SMAN puisque comme il
a été démontré précédemment, c’est du SMAN que proviennent, via les subventions
d’exploitation versée à VTAN, les ressources d’Etat ayant servi à financer les
avantages résultants des contrats en question.
(690) Les montants d’aide à récupérer pour chaque contrat doivent être déterminés comme
suit. Chaque transaction examinée (le cas échéant constituée d’un contrat de services
aéroportuaires et d’un contrat de services marketing) doit être considérée comme ayant
donné lieu à des montants d’aide calculés pour chaque année durant laquelle les
contrats constituant la transaction se sont appliqués, ou pour chaque période pour
laquelle les flux incrémentaux prévisionnels ont été calculés.220
Chacun de ces
montants est calculé à partir de la partie négative du flux incrémental (recettes moins
218
Arrêt rendu dans les affaires jointes No C-278/92, C-279/92 et C- 280/92 le Royaume de l’Espagne
contre la Commission des Communauté européennes (EBHT 1994, I-4103, point 75). 219
Arrêt C-75/97 rendu dans l’affaire Royaume de Belgique contre la Commission des Communauté
européennes (EBHT 1999, I-03671 o. points 64-65). 220
Comme expliqué dans l’analyse de l’existence d’un avantage économique dans les différents contrats,
l’aide résulte de flux bidirectionnels entre l’exploitant de l’aéroport et Ryanair ou Ryanair/AMS. Ces
flux ont des fréquences différentes, et pour certains, sont des flux continus ou ont des fréquences de
paiement qui ne peuvent pas être précisément prévues lors de la conclusion des contrats. Il en va ainsi
du paiement des redevances aéroportuaires. Or, pour analyser l’existence d’un avantage économique, ce
sont les flux incrémentaux prévisionnels qui comptent. Il ressort du plan d’affaires VTAN et des
propositions de reconstruction de plans d’affaires incrémentaux communiquées par la France que la
pratique d’un opérateur en économie de marché raisonnable aurait consisté, en règle générale, à établir
les flux incrémentaux prévisionnels liés aux différents contrats sur une base annuelle. Il est donc
logique que les montants d’aide résultant des différents contrats soient établis eux aussi, en règle
générale, sur une base annuelle. En effet, ces montants d’aide correspondent aux sommes que lors de la
négociation des différents contrats, un opérateur en économie de marché aurait demandé à
Ryanair/AMS de lui payer chaque année en sus des redevances aéroportuaires et redevances de services
d’assistance en escale, toutes choses égales par ailleurs (notamment les paiements marketing), afin de
rendre le contrat rentable. Cependant, pour certains contrats, il s’est avéré plus logique de calculer les
flux incrémentaux prévisionnels par saison IATA (hiver / été) ou pour d’autres périodes que des années
civiles, en liaison de certaines spécificités de ces contrats, telles que par exemple, des variations de
fréquences au cours des saisons estivales. C’est pourquoi pour certains contrats, les montants sont
calculés sur une base annuelle, alors que pour d’autres, ils sont calculés pour des périodes autres que les
années civiles complètes.
138
coûts) prévisible au moment de la conclusion de la transaction, et figurant dans les
tableaux 7 à 16. En effet, ces montants correspondent aux sommes qu’il aurait fallu
prévoir de déduire du montant des prestations marketing (ou qu’il aurait fallu prévoir
d’ajouter aux redevances aéroportuaires et redevances d’assistance en escale facturées
aux compagnies aériennes) pour que la valeur actualisée nette du contrat soit positive,
autrement dit que celui-ci soit conforme au principe de l’opérateur en économie de
marché.
(691) Afin de tenir compte de l’avantage effectif reçu par Ryanair/AMS en application des
contrats, les montants évoqués au considérant précédent pourront être ajustés, à
l’appui de preuves fournies par la France, en fonction (i) de la différence entre, d’une
part, les paiements réels, tels que constatés ex post, qui ont été effectués par Ryanair
au titre de la redevance atterrissage, de la redevance passagers et des services
d’assistance en escale en application du contrat de services aéroportuaires221
, et d’autre
part les flux prévisionnels (ex ante) correspondant à ces postes de recettes et
mentionnés dans les tableaux 7 à 16, (ii) de la différence entre, d’une part, les
paiements marketing réels, tels que constatés ex post, qui ont été effectués en faveur
de Ryanair ou AMS en application du contrat de services marketing et d’autre part les
coûts marketing prévisionnels (ex ante) correspondants tels que mentionnés dans les
tableaux 7 à 16.
(692) De plus, la Commission considère que l’avantage effectif reçu par Ryanair/AMS est
limité à la durée effective du contrat concerné. En effet, après la résiliation de chaque
contrat, Ryanair/AMS n'a pas reçu de versements au titre de ces contrats et n’a pas
bénéficié de l’accès à l’infrastructure aéroportuaire et aux services d’assistance en
escale en application de ces contrats. Par conséquent, les montants d’aide calculés
comme indiqué ci-dessus et liés à un contrat donné sont réduits à zéro pour les
périodes au cours desquelles le contrat a effectivement cessé de s’appliquer
(notamment pour cause de résiliation anticipée d’un commun accord entre les parties).
(693) Par conséquent, le montant d'aide à récupérer de Ryanair/AMS pour certains contrats
qui ne sont pas arrivés à échéance doit être ramené à zéro pour la période allant de la
date d’expiration effective du contrat jusqu’à la date d’expiration prévue lors de la
conclusion du contrat.
(694) Le tableau 17 ci-dessous présente les informations pertinentes sur les montants à partir
desquels sont calculés les montants à récupérer. Ces montants sont composés des
parties négatives des flux incrémentaux (recettes moins coûts) établis dans le cadre de
l’application du principe de l’opérateur en économie de marché, avec des réductions
pour les contrats de Ryanair/AMS pour les années où ils ne sont pas arrivés à
échéance.
221
En prenant en compte le cas échéant les éventuelles « incitations financières » prévues dans les contrats
de services aéroportuaires, et consistant à rembourser à Ryanair une partie des paiements effectués par
celle-ci au titre de ces contrats lorsque certaines cibles de trafic sont atteintes.
139
Tableau 17: Informations sur les montants à récupérer222
Montants indicatifs
(euros)
Période au cours de laquelle le montant d'aide a été reçu
2002 2003 2004
2004
(saison
d'été)
2005 2006
2007
(janvier à
octobre)
2007-2008
(saison
d'hiver)
2008
(saison
d'été)
2008-2009
(saison
d'hiver)
2009
(saison
d'été)
2009-2010
(saison
d'hiver)
2010
2010
(saison
d'été)
2010-
2011
(saison
d'hiver)
2011
(saison
d'été)
2011
(saison
d'hiver
jusqu'au
31/12)
période CCI :
échanges de
courriers de fin 2001-début 2002
[0-50
000]
[0-50
000]
[0-50
000]
échanges de
courriers de 2004
[100 000-
150 000]
contrats de 2005
[150
000-200
000]
[250
000-300
000]
période VTAN
contrats du 2 janvier
2007
[700 000-
750 000]
avenant du 1er août
2007
[150 000-
200 000]
contrats du 1er
novembre 2007
[700 000-
750 000]
[800
000-850
000]
contrats du 27 août
[450 000- [500 000-
222
Dans ce tableau, lorsqu’il est fait référence à une année sans plus de précision (par exemple, « 2002 »), il s’agit de l’année civile complète. S'agissant du calcul des intérêts de
récupération, l'octroi de l'aide est considéré comme ayant lieu le dernier jour de chacune des périodes mentionnées dans les différentes colonnes. Voir considérant 699.
140
2008 500 000] 550 000]
contrats du 25 août 2009
[450 000-
500 000]
[500
000-550
000]
[450
000-500
000]
[450
000-500
000]
[150 000-
200 000]
avenant du 18 août
2010
[0-50
000]
avenant du 30
novembre 2010
[0-50
000]
total
[0-50
000]
[0-50
000]
[0-50
000]
[100 000-
150 000]
[150
000-200
000]
[250
000-300
000]
[700 000-
750 000]
[850 000-
900 000]
[800
000-850
000]
[450 000-
500 000]
[500 000-
550 000]
[450 000-
500 000]
[0-50
000]
[500
000-550
000]
[450
000-500
000]
[500
000-550
000]
[150 000-
200 000]
141
(695) Comme expliqué dans la section 7.1.1.2.3, la Commission considère que Ryanair et
AMS constituent une seule entité économique, et que les contrats de services
marketing et contrats de services aéroportuaires conclus simultanément doivent être
considérés comme formant une seule et unique transaction entre cette entité et, selon
les cas, la CCI ou VTAN. Par conséquent, la Commission considère que Ryanair et
AMS sont solidairement responsables pour l'intégralité du remboursement des aides
perçues au travers des contrats conclus de 2005 à 2010, pour un montant indicatif de
[5 000 000-7 000 000] euros en capital. S’agissant des contrats conclus avant 2005,
dans la mesure où ils l’ont été par la CCI avec la seule compagnie Ryanair, cette
dernière est seule responsable du remboursement des aides qui découlent de ces
contrats, pour un montant indicatif de [150 000-300 000] euros en capital.
(696) Les autorités françaises doivent récupérer les montants précités dans un délai de 4
mois à compter de la date de notification de la présente décision.
(697) A cet égard, les autorités françaises doivent en outre ajouter au montant des aides à
récupérer, le montant des intérêts de récupération, calculés à compter de la date à
laquelle les aides en cause ont été mises à la disposition de l'entreprise, à savoir à
chaque date effective du versement des aides et ce jusqu'à leur récupération
effective,223
conformément au chapitre V du règlement (CE) n° 794/2004.224
Étant
donné qu'en l'espèce, les flux qui composent ces aides sont complexes et se produisent
à plusieurs dates pendant l'année, voire continument pour certaines catégories de
recettes, la Commission estime qu'il est acceptable pour le calcul des intérêts de
récupération de considérer que le moment du paiement des montants d’aides
concernés se situe le dernier jour de la période pour laquelle le montant a été calculé
(par exemple, le 31 décembre si la période en question est une année civile, ou encore
le 31 octobre si la période en question s’étend du 1er
janvier au 31 octobre d’une année
donnée). A cet égard, en choisissant le dernier jour de la période considérée, la
Commission prend l'approche la plus favorable pour les bénéficiaires.
(698) Conformément à la jurisprudence de la Cour de Justice, dans le cas où un Etat membre
se heurte à des difficultés imprévisibles ou à des circonstances qui n’avaient pas été
envisagées par la Commission, ces problèmes peuvent être portés à la connaissance de
la Commission, ainsi que des propositions portant sur les amendements adéquats, afin
que la Commission les évalue. Dans ce cas, la Commission et l’Etat membre
coopèrent de bonne fois en vue de trouver une solution à ces difficultés, en respectant
intégralement les dispositions225
du TFUE.
(699) La Commission demande ainsi à la France de lui soumettre toute difficulté à laquelle
elle serait confrontée dans l’exécution de la présente décision,
A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article 1
1. Les mesures suivantes, qui contiennent des aides d'État octroyées illégalement par la
France en faveur de Ryanair en violation de l'article 108, paragraphe 3, du traité sur le
fonctionnement de l'Union européenne, sont incompatibles avec le marché intérieur: