Jan 07, 2016
Relativite et cosmologie II
Notes de cours du Professeur Mikhal Shaposhnikov
Claude Becker & Yannis Burnier
2008
Ecole Polytechnique Federale de LausanneFaculte des Sciences de Base, Section de PhysiqueInstitut de Theorie des Phenome`nes Physiques
Laboratoire de Physique des Particules et de Cosmologie
Table des matie`res
Table des matie`res i
1 Actions en relativite generale 11.1 Notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.2 Actions pour la matie`re . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.3 Action de Einstein-Hilbert . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51.4 Tenseur energie-impulsion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
2 Evolution de lUnivers 112.1 Espace homoge`ne et isotrope . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112.2 Equations de Friedmann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152.3 Differentes solutions des equations de Friedmann . . . . . . . . . . . 182.4 Eq. de Friedmann en mecanique Newtonienne . . . . . . . . . . . . 202.5 Propagation de la lumie`re . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202.6 Horizons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 252.7 Densite critique de lUnivers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 262.8 Le futur de lUnivers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
3 Theorie du Big Bang 313.1 Univers domine par la radiation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 323.2 Univers domine par la matie`re . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 333.3 Univers domine par la const. cosmologique . . . . . . . . . . . . . . 333.4 Evolution de lUnivers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
4 Thermodynamique dans lUnivers 354.1 Equilibre thermique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 354.2 Gaz de bosons et de fermions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 374.3 Application a` lUnivers primordial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 394.4 Photons dans lUnivers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 414.5 Neutrinos dans lUnivers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 434.6 Histoire thermodynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
5 Fond de rayonnement cosmique (CMB) 475.1 Mesures du CMB . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 475.2 Anisotropies du CMB . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
i
ii TABLE DES MATIE`RES
6 Nucleosynthe`se 556.1 Physique nucleaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 556.2 Nucleosynthe`se par etape . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 566.3 Resultats de la nucleosynthe`se . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
7 Matie`re sombre 617.1 Mise en evidence de la matie`re sombre . . . . . . . . . . . . . . . . 617.2 Candidats a` la matie`re sombre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 657.3 Modifications de la gravite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
8 Proble`mes du mode`le standard 698.1 Le proble`me des horizons . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 698.2 Le proble`me de la courbure spatiale . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
9 Inflation 739.1 Mode`le inflationnaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 739.2 Inflation chaotique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 759.3 Predictions observationnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78
10 Formation des structures 8110.1 Instabilites de Jeans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8110.2 Caracteristiques de la matie`re sombre . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
11 Baryogene`se 8911.1 Les trois crite`res de Sakharov . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8911.2 Exemple de mode`le pour expliquer la baryogene`se . . . . . . . . . . 90
A Exercices 93
B Formulaire 103
Bibliographie 105
Chapitre 1
Actions en relativite generale
Dans ce chapitre, nous allons ecrire les actions des champs scalaire et vectorielde manie`re invariante sous diffeomorphismes. Nous allons ensuite introduire lac-tion du champ gravitationnel lui-meme. Commencons par introduire les notationsutilisees dans ce cours.
1.1 Notations
Nous utilisons generalement les unites naturelles, ou` c = ~ = kB = 1. Lintervalle de longueur est note ds2 = gdx
dx avec g = g. Les indices grecs (, , . . . ) prennent les valeurs 0, 1, 2, 3, tandis que les indiceslatins (i, j, . . . ) couvrent les valeurs 1, 2, 3.
La signature de la metrique est (+1,1,1,1). Les transformations de coordonnees
x x = f(x0, x1, x2, x3)
agissent sur les vecteurs contravariants selon
A A = x
xA
et sur les vecteurs covariants selon
A A =x
xA .
Le tenseur g est defini comme linverse de la metrique, gg = .
Les indices sont montes ou descendus avec la metrique g selon
A = gA , A = gA .
Lespace plat est represente par la metrique de Minkowski = diag(1,1,1,1).
1
2 CHAPITRE 1. ACTIONS EN RELATIVITE GENERALE
Lelement de volume invariant sous transformations de coordonnees est :
dV =g dx0dx1dx2dx3
avec g = det(g). La derivee covariante agit sur les tenseurs selon :
DT = T
; =
T x
+ T +
T
T .
Le symbole de Christoffel est defini a` partir de la metrique :
=1
2g
(gx
+gx
gx
). (1.1)
Le tenseur de courbure de Riemann est donne par
R =x
x+
, (1.2)
le tenseur de Ricci par R = R et la courbure scalaire par R = g
R.Il est possible de calculer directement le tenseur de Ricci avec :
R =x
x+
. (1.3)
1.2 Actions pour la matie`re
Nous allons deriver laction pour la matie`re dans un espace courbe, sans pourautant ecrire laction de la gravite elle-meme. Laction S doit satisfaire les crite`ressuivants :
Pour lespace de Minkowski :
1. Invariance sous transformation de Lorentz.
2. Localite, cest-a`-dire S =d4xL , ou` L ne depend que des champs et de
leurs derivees au point x.
3. Contient au plus des derivees premie`res par rapport au temps, de manie`rea` ne pas avoir de derivees plus que secondes par rapport au temps dans lesequations du mouvement.
Pour lespace courbe on demande de plus que laction soit invariante sous lestransformations generales des coordonnees.
1. Invariance sous les transformations generales de coordonnees
x x(x0, x1, x2, x3).
2. Localite S =dVL .
1.2. ACTIONS POUR LA MATIE`RE 3
3. Derivees premie`res au plus L = L [, ].
La premie`re etape consiste a` trouver lelement dintegration dV .Dans lespace plat, lelement de volume
dV = d4x = dx0dx1dx2dx3
est invariant sous transformations de Lorentz (). En effet, les transformations deLorentz ayant determinant 1, on a
d4x d4x = det()d4x = d4x.
Pour lespace courbe, on exige que lelement de volume dV soit invariant parrapport aux transformations generales de coordonnees. Au voisinage dun pointx0, on peut toujours ramener la metrique g a` la metrique de Minkowski parun changement de coordonnees
x y(x0, x1, x2, x3).
Localement, on a donc dV = d4y. En inversant la transformation de coordonnees,y x(y0, . . . , y3), on peut reecrire lelement de volume en fonction des coor-donnees initiales x,
dV = d4y = Jd4x,
ou` J = det(y
x) est le Jacobien de la transformation de coordonnees. Comme
dx = x
ydy, et
g =x
yx
y,
on peut ecrire le Jacobien J a` laide de la metrique :
det(g) =1
J2det() = 1
J2.
Nous avons donc
J2 = 1det(g)
= det(g) = g,
ce qui nous permet decrire lelement de volume invariant :
dV =g d4x. (1.4)
Reste maintenant a` generaliser les densites Lagrangiennes.
Champ scalaire reel
Dans le cas de lespace de Minkowski, on a
S =
d4xL
4 CHAPITRE 1. ACTIONS EN RELATIVITE GENERALE
avec
L =1
2 1
2m22. (1.5)
Pour la generalisation a` lespace courbe, on constate que = .
Dans un espace courbe, la metrique plate est remplacee par g , et donc
S =
d4x
g[1
2g 1
2m22
]. (1.6)
Notons que pour le cas dun champ scalaire D = , donc les derivees nontpas besoin detre transformees en derivees covariantes.
Champ vectoriel
Dans lespace de Minkowski, on a
S =
d4x
[14F F +
1
2m2AA
], (1.7)
avecF = A A.
Pour un espace courbe, on generalise cette action de la manie`re suivante :
S =
d4x
g[14ggFF +
1
2m2gAA
]. (1.8)
Comme pour le cas scalaire, comme F est antisymetrique, la derivee na pasbesoin detre remplacee par une derivee covariante (F = AA = DADA).
Particule classique
Rappelons encore que laction de particules classiques de masse m est donneepar
S = m
ds. (1.9)
Les champs spinoriels ne seront pas traites dans ce cours. La mise de leur actionsous forme covariante est plus compliquee, et necessite dutiliser le formalisme destetrades.
Equations du mouvement
Les equations du mouvement sont derivees comme usuellement, en variant parrapport aux champs. Pour le champ scalaire par exemple, on a :
S =
d4x
g [gm2]=
d4x
[ (gg)gm2] .
1.3. ACTION DE EINSTEIN-HILBERT 5
Les equations du mouvement sont donc
1g(gg)+m2 = 0
que lon peut encore ecrire comme
;; +m2 = 0, (1.10)
puisque
DA =
1g(gA) . (1.11)
Noter que cette relation nest valable que pour une 4-divergence.Pour les champs vectoriels, on a :
S =
d4x
g [ggFA + gAAm2]=
d4x
g[
1g(gg
gF)+m2gA
]A.
Les equations du mouvement sont donc
1g(gF )+m2A = 0,
ouF ; +m
2A = 0. (1.12)
Comme re`gle generale, les derivees ordinaires sont transformees en derivees cova-riantes.
1.3 Action de Einstein-Hilbert
Nous allons maintenant deriver laction pour le champ gravitationnel. Lactiondoit satisfaire les conditions suivantes :
1. Invariance sous les transformations generales de coordonnees.
2. Localite.
3. Au plus des derivees secondes par rapport au temps dans les equations dumouvement.
La seule action consistante avec les conditions (1) a` (3) est laction de Einstein-Hilbert :
Sg = 116G
d4x
g(R + 2), (1.13)
ou` R est la courbure scalaire et une constante, appelee constante cosmologique,qui peut en principe etre ajoutee. Le point (3) necessite detre discute. En effet,les symboles de Christoffels contiennent des derivees premie`res par rapport au
6 CHAPITRE 1. ACTIONS EN RELATIVITE GENERALE
temps, R contient des derivees secondes, donc potentiellement les equations dumouvement pourraient contenir des derivees tierces. Ce nest pas le cas, puisquelaction est lineaire en R.
Notez encore la dimensionalite de G. La courbure R etant de dimension GeV2,laction sans dimension, lelement dintegration d4x de dimension GeV4, G estdonc de dimension GeV2. On notera ainsi G = M2P l avecMP l = 1.221019[GeV] =2.18 108[kg] la masse de Planck.
Les equations dEinstein proviennent de la variation de laction par rapport a`la metrique. Laction totale est donnee par :
S = Sg + Sm (1.14)
ou` Sm est la contribution de la matie`re. Calculons maintenant la variation de cetteaction (on laisse tomber la constante cosmologique, dont la variation est facile) :
S = Sg + Sm = Sm 116G
d4x((
g)R +gR)
= Sm 116G
d4x[(
g)R +g(gR + gR)]
Il faut premie`rement calculer la variation du determinant de la metrique :
g = det g = exp(Tr(ln(g))).
Sa variation donneg = g(Tr(ln g)),
et en supposant que la metrique est diagonalisable :
g = ggg .
On peut maintenant calculer :
(g) = 1
2gg =
1
2
ggg = 12
ggg .
Notez que pour la dernie`re egalite, on a utilise la relation :
gg + gg
= (gg) = 0.
On obtient ainsi :
S = Sm 116G
d4x{gg(R 1
2gR) + g
gR}. (1.15)
De manie`re generale, la variation de laction de la matie`re peut etre ecrite comme
Sm =1
2
d4x
gTg , (1.16)
1.3. ACTION DE EINSTEIN-HILBERT 7
avec T un tenseur symetrique dont la forme precise depend de laction de lamatie`re consideree. Ce tenseur est appele le tenseur energie-impulsion et sera dis-cute dans la prochaine section. On peut voir que le premier terme de la variationde la metrique et essentiellement le cote gauche des equations dEinstein. En effet,si le second terme de Sg tombe, on a :
R 12gR = 8GT (1.17)
Interessons-nous donc au second terme de cette variation, soitd4x
ggR (1.18)
Rappelons tout dabord lexpression du tenseur de Ricci
R = + , (1.19)
de meme que celle du symbole de Christoffel
=1
2g(g + g + g).
La variation du tenseur de Ricci est alors donnee par
R = + + . (1.20)
En utilisant la definition de la derivee covariante
DA = A A,on a ainsi
D =
+
,
etD
=
+
. (1.21)
Les equations (1.19-1.21) nous permettent de prouver lidentite de Palatini
R = D D. (1.22)
Ainsi lequation (1.18), en se rappelant que Dg = 0 devient
ggR =gD(g)
gD(g).En utilisant la relation (1.11), on obtient finalement pour la variation du tenseurde Ricci ggR = (
gg) (gg).
En definissant le 4-vecteur V = g g, on obtientggR = (
gV ).
8 CHAPITRE 1. ACTIONS EN RELATIVITE GENERALE
On effectue alors lintegrale de (1.18) sur un volume 4-dimensionnel . En seservant du theore`me de Gauss, on peut alors ramener cette integrale a` une integralesur le bord de . d est alors une element infinitesimal dune hypersurface 3-dimensionnelle :
d4xggR =
d4x(gV )
dgV . (1.23)
Cependant cette integrale est nulle puisque les variations sannulent sur le bord.
En resume, on a prouve que la variation de laction (1.13) nous redonne bienles equations dEinstein (on reintroduit ici la constante cosmologique pour lacompletude).
R 12gR g = 8GT (1.24)
1.4 Tenseur energie-impulsion
Nous avons, pour le moment, represente la matie`re a` laide du tenseur energie-impulsion. Nous allons maintenant expliciter le tenseur energie-impulsion dans lescas les plus courants.
Champ scalaire reel
Rappelons laction du champ scalaire :
S =
d4x
g[1
2g 1
2m22
].
En utilisant la relation (g) = 1
2
ggg , la variation de laction duchamp scalaire par rapport a` la metrique vaut
S =
d4xL
(12
ggg)+
d4x
g12g
=1
2
d4x
g [ gL ] g,
et donc le tenseur energie-impulsion
T = gL (1.25)est identique a` celui de lespace plat.
Champ vectoriel
Dans le cas du champ vectoriel, laction est
S =
d4x
g[14ggFF +
1
2m2gAA
]
1.4. TENSEUR ENERGIE-IMPULSION 9
et sa variation par rapport a` la metrique
S =
d4x
g[12gL g
12ggFF +
m2
2gAA
]
=1
2
d4x
g [gFF +m2AA gL ] g.Le tenseur energie-impulsion est donc
T = gFF +m2AA gL . (1.26)
Pour lespace plat et dans le cas non massif (m = 0) on retrouve bien le tenseurenergie-impulsion de lelectrodynamique, par exemple
T00 =1
2(E2 +B2). (1.27)
Fluide ideal
Pour la cosmologie, le tenseur energie impulsion le plus utilise est celui du fluideideal, cest-a`-dire sans viscosite. Dans ce cas
T = (+ p)uu pg , (1.28)
ou` u est la quadrivitesse du fluide, sa densite denergie et p sa pression.Dans le cas de matie`re non-relativiste, ui 0, et seulement T00 = est non-
nul. Cette approximation est excellente pour la matie`re presente actuellement dansnotre Univers.
Dans le cas ultra-relativiste, p = /3, cest-a`-dire T00 = et Tii = pgij =
3gij.
10 CHAPITRE 1. ACTIONS EN RELATIVITE GENERALE
Chapitre 2
Evolution de lUnivers
2.1 Espace homoge`ne et isotrope Metrique de
Robertson-Walker
En cosmologie et en astrophysique apparaissent differentes echelles. Donnonsquelques ordres de grandeur :
Rayon de la terre 6, 4 108cmRayon du soleil 7 1010cm
Distance terre-soleil 1, 5 1013cm = 1UA
Une unite courante est le parsec, defini comme etant la distance a` laquelle ladistance terre-soleil est vue comme sous un angle de 1 arcsec, i.e.
pc =1UA
1arcsec 3, 26 ly 3 1018cm.
terre
etoile
soleil
1pc
1UA
1
Notre galaxie a une largeur de lordre de 30 kpc et une epaisseur de lordrede 10 kpc. Notre syste`me solaire se trouve a` environ 8 kpc du centre de la voielactee. La galaxie la plus proche, Androme`de, est distante denviron 770 kpc. Lesamas de galaxies (e.g. Virgo, Coma), qui comportent typiquement entre 103 et104 galaxies, ont une taille de lordre de 10 Mpc. La taille de lUnivers visible estenviron 5 103 Mpc.
11
12 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
Notre Univers est homoge`ne et isotrope a` grande echelle (i.e. pour des echellesplus grandes que lechelle des amas de galaxies). Homoge`ne signifie quil nexistepas de point prefere dans lespace. Isotrope signifie quil nexiste pas de direc-tion preferee. Pour montrer que lUnivers est isotrope, on peut observer le cieldans differentes directions et compter le nombre de galaxies pour voir sil est plusou moins le meme dans chaque direction. Une autre preuve pour lisotropie delUnivers vient du fond de rayonnement cosmique (CMB Cosmic MicrowaveBackground) quon discutera plus en detail dans ce cours. Montrer que lUniversest homoge`ne save`re plus difficile, vu quon ne peut pas letudier dun autre pointde lespace. Pour etudier lhomogeneite on essaie de mesurer les distances entre lesgalaxies et de reconstruire une image 3D de notre Univers.
On aimerait maintenant comprendre comment decrire mathematiquement unespace homoge`ne et isotrope. Essayons donc de trouver quelles sont les metriquesqui decrivent un espace homoge`ne et isotrope. Pour repondre a` cette question,oublions pour linstant le temps et concentrons-nous sur la partie spatiale de lametrique :
ds2 = ijdxidxj , avec signature() = (+,+,+).
La metrique ij determine comple`tement la geometrie de lespace courbe etentre autre le tenseur de courbure de Riemann Rijkl. Rappellons les proprietes desymetrie du tenseur de Riemann
Rijkl = Rjikl,Rijkl = Rijlk,Rijkl = Rklij.
On va utiliser ces proprietes et exiger quil nexiste pas de point ou de directionprefere pour determiner la structure de Rijkl dans un espace homoge`ne et isotrope.
Choisissons un syste`me de coordonnees localement plat autour dun point x,i.e. ij = ij et
ijk = 0. Alors, par les proprietes de symetrie et pour avoir un
espace sans direction preferee, on aura :
Rijkl = [ikjl iljk] ,ou` est une constante. Pour un syste`me de coordonnees quelconque on obtient :
Rijkl = [ikjl iljk] . (2.1)Par contraction des indices on trouve successivement le tenseur de Ricci et lacourbure scalaire :
Rij = 2ij,
R = 6.
On distingue 3 types despace :
> 0 : courbure constante positive, = 0 : espace plat, < 0 : courbure constante negative.
2.1. ESPACE HOMOGE`NE ET ISOTROPE 13
Cas = 0
On peut choisir les coordonnees cartesiennes : ij = ij . Donc
dl2 = dx2 + dy2 + dz2. (2.2)
Cas > 0
En trois dimensions, on connat un exemple dun espace homoge`ne et isotropea` courbure constante positive : la 3-sphe`re S3 definie par lequation
4i=1 x
2i = a
2,ou` a est le rayon de la sphe`re. Lelement de distance est le meme quen espace platquadri-dimensionel, a` savoir :
dl2 = dx21 + dx22 + dx
23 + dx
24.
Toutefois sur la 3-sphe`re on peut exprimer dx4 en fonction des autres coordonnees,
x1dx1 + x2dx2 + x3dx3 + x4dx4 = 0,
dou`
dl2 = dx21 + dx22 + dx
23 +
(x1dx1 + x2dx2 + x3dx3)2
a2 x21 + x22 + x23.
On aimerait encore ecrire la metrique sous une forme simplifiee. Introduisons descoordonnees spheriques (r, , ) definies par :
x1 = r sin cos,x2 = r sin sin,x3 = r cos .
On trouve alors que
dx21 + dx22 + dx
23 = dr
2 + r2[d2 + sin2 d2
],
etx1dx1 + x2dx2 + x3dx3 = rdr.
Lelement de longueur est donne par
dl2 = dr2 + r2[d2 + sin2 d2
]+
r2dr2
a2 r2
=a2
a2 r2dr2 + r2
[d2 + sin2 d2
].
Posons encore d2 := d2 + sin2 d2 et r := ra,
dl2 = a2[
dr2
1 r2 + r2d2
]. (2.3)
Le domaine de definition des variables est
0 r 1,0 ,0 < 2.
Remarquons encore que la courbure scalaire est donnee par 1a2> 0.
14 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
Cas < 0
On sattend a` ce que le resultat soit identique a` celui de la sphe`re, mais ou` ona remplace a2 7 a2 pour avoir une courbure scalaire negative. Ainsi
dl2 =a2
a2 r2dr2 + r2d2
= a2[
dr2
1 + r2+ r2d2
]. (2.4)
Le domaine de definition des variables est donne par
0 r ,0 ,0 < 2.
On peut resumer les trois cas precedents dans la formule generale
dl2 = a2[
dr2
1 kr2 + r2d2
], (2.5)
ou`
k =
+1 , Univers ferme,0 , espace plat,
1 , Univers ouvert.
Notons quavec une redefinition des coordonneees, on peut toujours se ramenera` k = 1, 0, 1. Ces trois valuers de k correspondent aux differentes geometriespossibles. La terminologie dun Univers ferme ou ouvert se refe`re a` la finitude ouinfinitude du volume de lUnivers.
Finalement on doit rajouter la composante temporelle. Si lespace est homoge`neet isotrope, le parame`tre dechelle a peut au plus dependre du temps. Ainsi
ds2 = dt2 a(t)2[
dr2
1 kr2 + r2d2
]. (2.6)
Cette metrique est appellee metrique de Robertson-Walker(RW). Ci-dessus nousdonnons les composantes non-nulles des symboles de Christoffel et du tenseurde Ricci, ainsi que la courbure scalaire. Ces expressions seront demontrees en
2.2. EQUATIONS DE FRIEDMANN 15
exercices.
0ij =a
agij,
i0j =a
aij ,
ijk =1
2gil [kglj + jglk lgjk] ,
R00 = 3 aa,
Rij = [a
a+ 2
a2
a2+ 2
k
a2
]gij ,
R = 6[a
a+a2
a2+
k
a2
].
2.2 Equations de Friedmann
Nous allons maintenant deriver les equations regissant lUnivers lorsque celui-ciest decrit par la metrique de Robertson-Walker. Pour ce faire nous utilisons lesequations dEinstein en prenant comme matie`re un fluide parfait qui decrira notreUnivers homoge`ne et isotrope. Le tenseur denergie-impulsion dun fluide parfaitest :
T = (p+ )uu p g ,ou` p est la pression, la densite denergie et u le quadri-vecteur vitesse. Si lefluide est au repos u = {1,~0}, alors T00 = et Tij = p gij.
En injectant ceci dans les equations dEinstein
R 12gR g = 8GT ,
on trouve pour la composante = = 0 :
3 aa 1
2(6)
[a
a+a2
a2+
k
a2
] = 8G,
ce qui nous donne la premie`re equation de Friedmann
a2
a2+
k
a2
3=
8G
3.
Pour la composante ij on trouve
[a
a+ 2
a2
a2+ 2
k
a2
]gij 1
2(6)
[a
a+a2
a2+
k
a2
]gij gij = 8G(p)gij,
ce qui nous donne la deuxie`me equation de Friedmann
2a
a+a2
a2+
k
a2 = 8Gp.
16 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
Toutes les autres composantes des equations dEinstein sont identiquement nulles.Voici en resume les equations regissant lUnivers homoge`ne et isotrope decrit parla metrique de Robertson-Walker, que lon appelle communement equations deFriedmann
a2
a2+
k
a2
3=
8G
3, (2.7)
2a
a+a2
a2+
k
a2 = 8Gp. (2.8)
(2.9)
Conservation du tenseur denergie-impulsion
Par ailleurs, on aura la conservation du tenseur denergie-impulsion :
T = T + T + T = 0. (2.10)
Un calcul explicite de la composante = 0 donne :
T 0 = T 0 + T 0 + 0T = 0T 00 + 0T 00 + 0ijT ij
= + 3a
a+ aaijp
1
a2ij = + 3
a
a(+ p) ,
dou`
+ 3a
a(+ p) = 0, (2.11)
ce qui peut etre mis sous la forme suivante :
t
[a3
]+ p
ta3 = 0,
i.e.dE + p dV = 0. (2.12)
Ceci nest rien dautre que la premie`re loi de thermodynamique. Remarquons en-core quon aurait aussi pu obtenir cette relation a` partir des equations de Fried-mann. En fait, en notant la premie`re et deuxie`me equation de Friedmann par (F1)et (F2) respectivement, on a
t(F1) + 3
a
a(F1) a
a(F2) = T = 0.
Forme equivalente des equations de Friedmann
Introduisons les notations suivantes :
:=
8G, tot := + ,
p := 8G
, ptot := p+ p.
2.2. EQUATIONS DE FRIEDMANN 17
Ce sont la densite et la pression associees a` la constante cosmologique ainsi que ladensite et pression totale provenant de la matie`re et de la constante cosmologique.Avec ces notations, les equations de Friedmann peuvent etre reecrites de la manie`resuivante :
a2
a2+
k
a2=
8G
3tot,
2a
a+a2
a2+
k
a2= 8Gptot.
On peut eliminer k en prenant la difference de ces deux equations :
a
a= 4G
3(tot + 3ptot) . (2.13)
En tout on a derive quatre equations : deux equations de Friedmann, une equationprovenant de la conservation de lenergie-impulsion et lequation quon vient dob-tenir. Parmis ces equations, il ny a que deux qui sont lineairement independantes.Selon la nature du proble`me il peut etre plus utile de travailler avec une equationplutot quavec une autre.
Parame`tre de deceleration
On definit le parame`tre de deceleration q par
q(t) := aaH2
= aaa2, (2.14)
quon peut exprimer en fonction des parame`tres de densite observables :
q(t) = aaH2
=4G
3
tot + 3ptot8G3tot ka2
. (2.15)
Dans le cas dun Univers plat k = 0, on obtient
q(t) = tot + 3ptot2tot
En explicitant les differentes contributions a` lenergie et a` la pression
tot = mat + rad + , ptot = prad + p,
on peut ecrire
q(t) =mat2
+1 + 3w
2, (2.16)
ou` on a introduit w =p
et les fractions critiques . Le premier terme du membrede droite est toujours positif, mais le second peut etre negatif si 1+3w < 0. Doncsi w < 1/3 et si le deuxie`me terme est assez grand, le parame`tre de decelerationpeut prendre une valeur negative. Il decrit alors un Univers en expansion acceleree,et on lappelle alors parfois parame`tre dacceleration. Les observations de Superno-vae de type Ia sont en faveur dun w < 13 et notre Univers se trouve actuellementen expansion acceleree.
18 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
2.3 Differentes solutions des equations de Fried-
mann
Univers statique sans constante cosmologique : a = 0, = 0
Dans ce cas les equations de Friedmann se reduisent a`
k
a2=
8G
3,
k
a2= 8Gp.
Comme lUnivers nest pas vide, on a > 0, et la premie`re equation implique alorsque k > 0. Mais pour k = 1, la deuxie`me equation impliquerait que la pressionserait negative p < 0, ce qui na pas de sens. En doit donc conclure quil nexistepas de solution consistente pour un Univers statique sans constante cosmologique.
Historiquement, Einstein avait deja` realise ce proble`me. Comme il croyait enlexistence dun Univers statique, il decida en 1917 de rajouter une constante cos-mologique non-nulle aux equations. En 1929, quand Hubble mettais en evidencelexpansion de lUnivers, Einstein revenait sur lintroduction de la constante cos-mologique, la qualifiant de plus grande betise de sa vie. Des observations recentessugge`rent quil existe neanmoins une constante cosmologique non-nulle, mais tre`spetite. A lheure actuelle on ne sait pas expliquer pourquoi elle est si faible ; cestle proble`me de la constante cosmologique.
Univers statique avec constante cosmologique : a = 0, 6= 0Les equations de Friedmann secrivent
k
a2
3=
8G
3,
k
a2 = 8Gp.
Si les vitesses des etoiles sont faibles, on peut supposer que p 0. La deuxie`meequation implique alors
k
a2= ,
ce qui, injecte dans la premie`re equation, nous donne
= 4G. (2.17)
Comme > 0 on doit aussi avoir > 0 et donc k > 0. Pour k = 1 on trouve poura :
a =1=
14G
. (2.18)
Cette relation entre la densite et la taille de lUnivers fut deja` derivee par Einsteinen 1917. Ce mode`le statique dEinstein a malheureusement un proble`me concep-tuel : si on suppose = 0, alors comme 6= 0, lespace vide lui-meme engendreraiune force de gravitation.
2.3. DIFFERENTES SOLUTIONS DES EQUATIONS DE FRIEDMANN 19
Univers vide statique : a = 0, = p = 0
Les equations de Friedmann se reduisent a` :
k
a2
3= 0,
k
a2 = 0.
On est alors confronte au paradoxe suivant : si = 0, alors k = 0 et un Univers platest donc solution. Mais on sait que dans ce cas il nexiste pas de solution statique.Pour avoir une solution statique il faut choisir 6= 0, donc k 6= 0 mais alors lespaceplat nest plus une solution. Ce paradoxe fut resolu en 1922 quand AlexanderFriedmann proposait un mode`le dans lequel lUnivers nest plus statique.
Univers non-statique : a 6= 0Considerons, pour simplifier, un Univers plat sans constante cosmologique :
= k = 0. Les equations de Friedmann sont alors
a2
a2=
8G
3,
2a
a+a2
a2= 8Gp 0.
Multiplions la deuxie`me equation par aa
2 aa+a
a= 0 d
dt(2 ln a+ ln a) = 0
ln (a2a) = const a2a = const ada = const dt a3/2 = const t.
Dou`
a(t) = a0
(t
t0
)2/3. (2.19)
On voit que a augmente en fonction du temps lUnivers est en expansion. Onpeut ensuite injecter cette solution dans la premie`re equation de Friedmann :
(2
3
1
t
)2=
8G
3,
= 49
3
8G
1
t2.
Dou`
(t) =1
6G
1
t2. (2.20)
En particulier, connaissant la densite , on peut determiner lage de lUnivers.Constatons aussi que pour t 0, la densite diverge (Big Bang).
20 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
2.4 Equations de Friedmann en mecanique New-
tonienne
Il save`re que lon peut deriver lessentiel des equations de Friedmann deja` enmecanique Newtonienne et sans avoir recours a` la relativite generale. Consideronsle cas suivant
k = 0 , espace plat,
= 0 , le vide ne produit pas de force gravitationnelle,
p = 0 , mouvement non-relativiste (p ).Considerons une sphe`re de rayon variable a(t) remplie dun gaz de particules sansinteraction distribuees de facon homoge`ne et isotrope. Dune part on peut ecrirela conservation de lenergie totale a` linterieur de cette sphe`re :
d
dt
(4
3a3
)= 0.
En developpant on retrouve une des equations de Friedmann :
+ 3a
a = 0.
Dautre part on peut ecrire la loi de Newton pour une particule de gaz de massem situee sur la sphe`re :
ma = G 43a3 m 1
a2.
Ce qui impliquea
a= 4G
3.
On a retrouve lautre equation de Friedmann dans le cas particulier ptot = 0 ettot = . Pour trouver le terme +3ptot dans cette equation il faut utiliser la relativitegenerale.
2.5 Propagation de la lumie`re dans lUnivers
Decalage vers le rouge
On aimerait etudier la propagation de la lumie`re dans un Univers decrit par lesequations de Friedmann. Le moyen direct serait detudier les equations de Maxwelldans lespace courbe de Robertson-Walker. Mais il y a en fait un moyen plus facilequi est de faire usage dun syste`me de coordonnees particulier, appelle coordonneesconformes. On reecrit la metrique de Robertson-Walker comme suit
ds2 = dt2 + a2(t)dl2
= a2(t)
[dt2
a2(t)+ dl2
].
2.5. PROPAGATION DE LA LUMIE`RE 21
On introduit le temps conforme definit par
d :=dt
a(t), (2.21)
donc
0 = t0
dt1
a(t).
La metrique secrit alors
ds2 = a2()[d2 + dl2
] a2()gdxdx . (2.22)La metrique g ainsi definie est independante du temps. On peut maintenantetudier les equations de Maxwell dans ce syste`me de coordonnees. Nous allonspartir de laction de lelectromagnetisme dans un espace courbe :
SEM =
d4x
|g|[14ggFF
].
Pour le syste`me de coordonnees de temps conforme on a
|g| =
[a2()]4
|g| = a4()
|g|,
et
g =1
a2()g .
Dou`
SEM = 14
d4x a4()
|g| 1
a2()g 1
a2()g FF,
ou encore
SEM = 14
d4x
|g|g gFF. (2.23)
Comme g est statique, cette action ne depend pas explicitement du temps. Deplus, si on conside`re des petites distances (r 1), on peut supposer que lespaceest pratiquement plat (k = 0) et utiliser pour g la metrique de Minkowski :
ds2 a2()dxdx .
Dans ce cas, les solutions des equations de Maxwell sont simplement des ondesplanes
A ei+ikx, (2.24)ou` , k = const et x, , , k sont sans dimension.
Ayant trouve la solution des equations de Maxwell, on doit encore linterpreterphysiquement. Rappelons quon a utilise les coordonnees suivantes
ds2 = a2()[d2 dx2] .
22 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
Un observateur de cette onde electromagnetique utilisera simplement la metriquede Minkowski
ds2 = dt2 dx2.On obtient ainsi la relation
a2()dx2 = dx2.
Ainsi lobservateur va en fait observer une onde plane donnee par
A ei+ikx
a() .
Cet observateur va donc mesurer comme longeur donde
=2a(t)
k. (2.25)
On conclut que a(t). Dans un Univers en expansion, le facteur dechelle a(t)crot, et donc aussi la longeur donde de la lumie`re observee. On peut illustrercette augmentation de la longeur donde en simaginant de dessiner une onde surun ballon et de le gonfler ; la longueur donde va augmenter avec le rayon du ballon.
Fig. 2.1 Augmentation de la longueur donde a` cause de lexpansion de lUnivers
Considerons une source lumineuse (e.g. etoile) emettant de la lumie`re de lon-gueur donde 0 a` une distance de la terre. Calculons la longeur donde quonoberserverait sur la terre. Soit t le temps de reception du signal sur terre et soitt0 t c le temps demission du signal lumineux (cette relation nest quapproxi-mative car lUnivers est en expansion). Comme a on a
0
=a(t0)
a(t) (t) = 0 a(t)
a(t c).
Comme cest petit, on peut developper en serie
(t) 0 a(t)a(t)(1 a
ac) 0
(1 +
a
a
c
).
2.5. PROPAGATION DE LA LUMIE`RE 23
On appelle decalage vers le rouge (redshift), note z, le rapport
z := 00
. (2.26)
Dou` finalement (avec c = 1)
z =a
a = H, (2.27)
ou` H := aaest appele constante de Hubble, meme si elle nest pas vraiment une
constante vu quelle depend du temps. On note par H0 la constante de Hubble a`notre epoque, donc H0 = H(t0). La relation entre le decalage vers le rouge et laconstante de Hubble est communement appellee la loi de Hubble. Elle montre que,dans un Univers en expansion, les longueurs dondes sont deplacees vers le rouge.En 1929, Edwin Hubble a observe en premier cette relation lineaire entre la distance et le decalage vers le rouge z. Cetait une premie`re indication experimentale pourlexpansion de lUnivers. Ci-apre`s se trouvent deux diagrammes de Hubble. Ilsmontrent la vitesse de la source en fonction de sa distance. Surtout le diagrammerecent de 2005 met bien en evidence une dependence lineaire. Actuellement, lesmesures du parame`tre de Hubble donnent :
H0 = 71 4 km/sMpc
. (2.28)
Fig. 2.2 Diagramme publie par EdwinHubble dans son article de 1929 [1]. Fig. 2.3 Diagramme de Hubble (pour
les supernovae) de 2005 [2].
24 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
On peut constater dans le diagramme de Hubble de 1929 que lunite pour lavitesse est fausse (km au lieu de km/s). En plus, la valeur pour la constante H0determinee par Hubble lui-meme etait fausse dun facteur 10.
Experimentalement il est relativement aise de mesurer le decalage vers le rougedes etoiles. Pour cela il suffit de mesurer le deplacement des lignes spectrales dansle spectre de la lumie`re recue. La mesure des distances par contre est plus delicate.Lidee est de deduire la distance de lobjet a` partir de sa luminosite. Mais pourcela il faut faire usage de ce quon appelle des chandelles standards, qui est unobjet astrophysique a` luminosite connue. Il est alors facile de relier la luminositede ces chandelles standards et la luminosite observee sur terre a` leur distance.
Il existe une interpretation equivalente de la loi de Hubble a` laide de leffetDoppler. On conside`re que lobservateur est au repos, mais que la source seloignede lui a` une vitesse v. Alors, par effet Doppler, la longueur donde observee seradifferente de celle emise, plus particulie`rement on aura :
z =
1 + v
1 v 1vc v = = a
a,
i.e.~ = H~.
Cette relation motive aussi le choix dunites pour la constante de Hubble :
[H ] =[]
[]=
km/s
Mpc. (2.29)
On a vu que lhomogeneite et lisotropie de lUnivers impliquent la loi deHubble. Etudions si la reciproque est vraie aussi. Il est clair que la loi de Hubbleimplique que lUnivers est isotrope, vu que H ne depend pas de la direction dob-servation. Il save`re que la loi de Hubble implique aussi que lUnivers est homoge`ne.En effet, on a
~vA = H~rA,
~vB = H~rB,~rA
~rB
~rAB
~vA
~vB
A
BO
mais aussi pour la vitesse du point B par rapport au point A
~vB
)A
= H~rAB,
~vB
)A
= ~vB ~vA = H(~rB ~rA).
Les deux dernie`res relations etant egales, on conclut quil y a homogeneite.
2.6. HORIZONS 25
2.6 Horizons
LUnivers ayant un age fini, la lumie`re dans lUnivers na pu parcourir quunedistance finie. Il sen suit que tre`s probablement nous ne pouvons observer quunepartie de notre Univers. De plus, si lexpansion de lUnivers est trop grande, cettepartie visible deviens de plus en plus petite, vu que la lumie`re des regions les pluslointaines ne peut plus nous atteindre. Pour discuter ces phenome`nes nous allonsmaintenant introduire la notion dhorizon.
Horizon deve`nement
Le premier horizon que nous introduisons est lhorizon deve`nement (eventhorizon). Il correspond au rayon de la region de lUnivers dans le passe qui peutnous influencer causalement. Tout evenement en-dehors de cet horizon ne peut pasnous influencer vu que seuls les signaux dans notre horizon devenement peuventnous atteindre.
Nous voulons calculer la distance quun photon peut parcourir sil est emis a`linstant t. Supposons que le mouvement du photon se situe dans un plan et posonsen consequence dans la metrique de Robertson-Walker ds2 = 0, d = d = 0, cequi donne :
dt
a=
dr1 kr2 .
La distance en coordonnees comobiles est alors donnee par
De(t) =
t0t
dt
a(t).
Pour passer a` une distance physique il suffit de multiplier la distance exprimee encoordonnees comobiles par le facteur dechelle :
de(t) = a(t)
t0t
dt
a(t).
Remarquons encore que toutes ces formules nont de sens que si les integralesconvergent. Si tel nest pas le cas, on dit que lhorizon en question nexiste pas.
Horizon de particule
Le second horizon est appele horizon de particule (particle horizon). Il sagitde connatre letendue de la region a` laquelle nous sommes causalement relies a`linstant t0. En coordonnes comobiles nous aurons
Dp(t0) =
t0tmin
dt
a(t),
et donc la distance physique est
dp(t0) = a(t0)
t0tmin
dt
a(t).
26 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
t
t
t0
x
Fig. 2.4 Horizon devenement
t
t0
tminx
Fig. 2.5 Horizon de particule
2.7 Densite critique de lUnivers
Jusqua` present notre etude sest limitee au cas particulier = 0, p = 0, k = 0.Afin de pouvoir faire une etude plus generale, commencons par reecrire une desequations de Friedmann :
H2 +k
a2=
8G
3tot
kH2a2
=8Gtot3H2
1 tot cc
,
ou` on a introduit la densite critique definie par
c :=3H2
8G. (2.30)
La densite critique peut etre deduite de la constante de Hubble :
c 1, 88 h2 1029 gcm3
,
ou` on a ecrit la constante de Hubble de la manie`re suivante
H = 100 h km/sMpc
.
De plus, lequation de Friedmann implique
sign(k) = sign(tot c), (2.31)
ainsi
tot > c k = 1 Univers ferme,tot = c k = 0 Univers plat,tot < c k = 1 Univers ouvert.
2.8. LE FUTUR DE LUNIVERS 27
La densite critique nest pas forcement constante et peut dependre du temps. Maisdapre`s (2.31) le signe de tot c est independant du temps. Les observationsrecentes sugge`rent que
tot c (2 3)%,notre Univers est donc extre`mement proche dun Univers plat.
Il est utile dintroduire encore une autre notation ; les abondances , aussiappellees les fractions critiques :
mat :=matc
, :=c, k := k
2
a20H20
. (2.32)
Dans ces notations, lequation de Friedmann prend une forme particulie`rementsimple
mat + + k = 1. (2.33)
2.8 Le futur de lUnivers
On a vu que notre Univers se trouve dans un etat dexpansion. Mais que peut-on dire sur le futur de lUnivers ? Considerons la situation = 0, p = 0. Lavaleur de k netant pas fixee, prenons la forme des equations de Friedmann qui estindependante de k :
a
a= 4G
3,
et multiplions par aa
aa =1
2
d
dt
(a2)= 4G
3aa. (2.34)
On aimerait reecrire aa comme derivee totale par rapport au temps. Pour cela,constatons deja` quon a trivialement
d
dt
(a2
)= a2 + 2aa. (2.35)
Or la conservation de lenergie implique
d
dt
(a3
)= a3 + 3a2a = 0, (2.36)
i.e.a2 = 3aa.
doncd
dt
(a2
)= 3aa + 2aa = aa. (2.37)
On peut a` present reecrire lequation (2.34) comme derivee totale et lintegrer parrapport au temps :
1
2
d
dt
(a2)=
4G
3
d
dt
(a2
)
28 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
ddt
(1
2a2 4G
3a2
)= 0
12a2 4G
3a2 = const
t=t0=1
2a20
4G
30a
20.
De plus
a3 = const = 0a30 a2 =
0a30
a
H0 =a0a0
a20 = H20a20,
ce qui, injecte dans lequation davant, donne
a2 = 8G3
0a30
a+H20a
20
4G
30a
20
a2 = 8G3
0a30
a 4G
3a20 (0 c,0) .
Lequation a` resoudre est donc :
a2 8G3
0a30
a= 4G
3a20 (0 c,0) = const, (2.38)
qui est clairement de la forme Ecin+U = Etot = const. La solution exacte de cetteequation est donnee par :
t =
da8G3
0a30a 4G
3a20 (0 c,0)
. (2.39)
Essayons de comprendre qualitativement les solutions en utilisant lanalogieavec la mecanique classique.
a0 a
U
0
1a
Fig. 2.6 Le potentiel en fonction de a.
2.8. LE FUTUR DE LUNIVERS 29
Il faut distinguer les cas suivants :i) 0 = c,0, i.e. Etot = 0 :Dans ce cas la solution est simple et on la deja` trouvee avant : a t2/3, expansion infinie.
ii) 0 > c,0, i.e. Etot < 0 :amax =
2a000c,0 ,
a0 amax a
U
0
a0
amax
a
tt00
collapse de lUnivers.iii) 0 < c,0, i.e. Etot > 0 : expansion infinie.
a0 a
U
0
a0
a
tt00
En conclusion, le futur de lUnivers depend de son contenu. Sil y a beaucoup dematie`re, lUnivers va seffondrer (Big Crunch), autrement il y aura une expansioninfinie. Les observations astronomiques actuelles favorisent une expansion infiniede lUnivers.
30 CHAPITRE 2. EVOLUTION DE LUNIVERS
Chapitre 3
Theorie du Big Bang
On a vu precedemment que dans le cas k = = p = 0 la densite diverge pourt 0. Il save`re que dans le cas plus general ou` k 6= 0, 6= 0 on retrouve le memecomportement quand t 0, et donc aussi des singularites. Plus precisement, lecomportement asympotique du facteur dechelle et de la densite de matie`re est
a t2/3, 1t2, quand t 0. (3.1)
Pour le demontrer, on injecte lAnsatz
a t aa
t,a
a ( 1)
t2, (3.2)
avec reel dans les equations de Friedmann
a2
a2+
k
a2
3=
8G
3,
2a
a+a2
a2+
k
a2 = 8Gp.
On peut alors voir que
2a
a+a2
a2 1
t2,
k
a2 1
t2,
t0,
donc pour autant que 2 < 2, i.e. < 1, on pourra negliger les termes ka2
et dans la limite t 0. Si p 0 on est ramene au cas k = = 0 et on retrouvedonc le comportement asympotique a t2/3, t2. En conclusion on a donc = 2/3
!< 1, ce qui justifie notre hypothe`se dignorer les termes proportionels a` k
et dans les equations de Friedmann.
31
32 CHAPITRE 3. THEORIE DU BIG BANG
On peut constater que le passe de lUnivers (pour t 0) ne depend pas desvaleurs de k ou , alors quon a vu que le futur en depend. Donnons encore quelqueschiffres pour illustrer la variation de la densite :
t = t0 : 1029 gcm3
,
t 20min : 1 gcm3
,
donc pour t 20min lUnivers avait environ la densite de leau.On vient de montrer que la densite diverge pour t 0. Cette singularite
nous empeche de comprendre quest-ce qui se passe dans lUnivers a` linstant t =0. George Gamow a developpe en 1948 lidee selon laquelle notre Univers seraitne dans une explosion promordiale, le Big Bang. De lhypothe`se du Big Bang,Gamow a pu tirer plusieurs prediction physiques comme lexistance dun fondde rayonnement cosmique ainsi que les abondances dans lUnivers des elementslegers (Li7, D, He3, He4). Par la suite, ces predictionts ont ete mises en evidenceexperimentalement.
3.1 Univers domine par la radiation
On aimerait maintenant decrire notre Univers peu apre`s le Big Bang. On vientde demontrer que la densite devient de plus en plus grande pour des temps petits,ce qui veut dire que les particules presentes dans lUnivers deviennent de plus enplus proches. Mais par le principe dincertitude de Heisenberg, ceci implique queleurs impulsions deviennent de plus en plus grandes. Pour t 0, les vitesses departicules seront de lordre de la vitesse de la lumie`re. On dira que ces particulessont ultra-relativistes.
Peu apre`s le Big Bang, notre Univers etait donc rempli dun gaz de particulesrelativistes. On montre que lequation detat dun tel gaz relativiste est donnee par
p =
3. (3.3)
Considerons un Univers rempli dun gaz relativiste, avec k = = 0. On dira quuntel Univers est dominee par la radiation. Avec lAnsatz a t les equations deFriedmann se reduisent a` :
2
t2=
8G
3,
2( 1)t2
+2
t2= 8G
3,
dou` lequation pour
42 2 = 0 = 12
!< 1.
3.2. UNIVERS DOMINE PAR LA MATIE`RE 33
En conclusion, pour un Univers domine par la radiation :
a = a0
(t
t0
)1/2, (3.4)
=3
32Gt2. (3.5)
Comme < 1, le resultat reste aussi vrai pour k 6= 0, 6= 0. Par ailleurs, encombinant ces deux relations, on trouve que a4. On peut comprendre ceresultat intuitivement de la manie`re suivante : lexpansion de lUnivers dilue ladensite dun facteur a3, mais comme la radiation subit de plus un decalage versle rouge, il y aura un autre facteur a1, qui fait que la variation de la densite est a4.
3.2 Univers domine par la matie`re
Rappelons, pour des raisons de completude, les resultats obtenus dans le cha-pitre precedent (voir p.19) pour un Univers domine par la matie`re k = = p = 0 :
a = a0
(t
t0
)2/3, (3.6)
=1
6Gt2. (3.7)
3.3 Univers domine par la const. cosmologique
Considerons les equations de Friedmann pour k = = p = 0 en presence duneconstante cosmologique non-nulle 6= 0 :
a2
a2
3= 0,
2a
a+a2
a2 = 0.
De la premie`re equation on deduit quil existe une solution pour autant que > 0donnee par
a = a0 e
3t. (3.8)
Le facteur dechelle augmente donc exponentiellement.
34 CHAPITRE 3. THEORIE DU BIG BANG
3.4 Evolution de lUnivers
LUnivers est passe, lors de son evolution, a` travers differents regimes :
dom. radiation 7 dom. matie`re 7 dom. constantecosmologique
p = 3
p = 0 ptot =
a = a0
(tt0
)1/2a = a0
(tt0
)2/3a = a0 e
3t
= 332Gt2
= 16Gt2
= const a4 a3
H = 12t
H = 23t
H =
3=
8G3
Chapitre 4
Thermodynamique dans lUnivers
Dans ce chapitre nous reverrons et appliquerons les methodes de thermodyna-mique a` lUnivers. Nous etudierons specialement les gaz de particules fermioniquesou bosoniques. Nous discuterons de lhistoire thermodynamique de lUnivers et duproble`me du decouplage des espe`ces.
4.1 Equilibre thermique
Au debut de lUnivers, mais aussi en grande partie a` notre epoque, lUniversest constitue de gaz de particules. Bien que lhydroge`ne est actuellement le gaz leplus rencontre dans lUnivers, la discussion de ce chapitre sera plus generale. Eneffet, si on inverse le temps et quon revient au debut de lUnivers, la temperatureaugmente. A un certain point, les atomes perdent leurs electrons et forment unplasma. A encore plus haute temperature, les noyaux datomes fusionnent pourdonner un plasma de quarks et de gluons. Si la temperature augmente encore, ungrand nombre de particules, telles que des quarks ou leptons lourds, peuvent-etrecreees.
Bien sur il nest pas possible de considerer chaque particule separement, etnous utiliserons la condition dequilibre thermique qui permet une simplificationenorme des proble`mes. Dans ce cas, toutes les observables peuvent etre calculees a`partir dun petit nombre de parame`tres ; comme la temperature T , et les potentielschimiques .
Nous sommes toutefois confrontes au proble`me suivant ; un gaz present danslUnivers en expansion change de volume et il nest pas clair sil va rester a`lequilibre thermique. En labsence dinteractions, les particules vont simplementcontinuer a` se deplacer a` vitesse constante. Dans ce cas, le gaz peut perdre lequilibrethermique.
Heureusement, les interactions permettent de reorganiser les vitesses des par-ticules, de manie`re a` ce quelles se retrouvent dans une distribution dequilibre. Ilnous faut maintenant caracteriser lefficacite des interactions. Statistiquement, le
35
36 CHAPITRE 4. THERMODYNAMIQUE DANS LUNIVERS
temps moyen entre deux interactions est donne par
=1
nv(4.1)
ou` est la section efficace, n est la densite de particules et v leur vitesse. Lacondition pour arriver a` lequilibre thermique est dattendre un temps t . Dunautre point de vue, on peut dire que la distance parcourue entre deux interactions,le libre parcours moyen , est donnee par = v = 1
n.
Lorsque lUnivers est en expansion, il faut que la variation de volume soit moinsrapide que le rythme des interactions pour que les conditions dequilibre thermiquesoit respectees :
texpansion =
(R
R
)1=
1
H ,
ou encoreH 1.
Si cette condition est satisfaite alors lUnivers est approximativement en equilibrethermique (la deviation est dordre H).
Rappels de physique statistique
Letat dun syste`me est decrit par la matrice densite
=1
Zexp
(HT
+ iNi
), (4.2)
ou` H est le Hamiltonien, T la temperature et i les potentiels chimiques associesaux nombres conserves Ni. Les Ni peuvent etre par exemple les nombres baryo-
niques, leptoniques. La fonction de partition, Z = tr exp( H
T+ iNi
)permet de
normaliser letat pour que tr = 1. En physique quantique H, , N sont desoperateurs satisfaisant les relations de commutations [Ni, H] = 0, [Ni, Nj ] = 0 etla trace seffectue sur lespace de Fock. Celui-ci peut etre represente par la basedes nombres doccupation |n1, n2, . . . , nk, . . ., avec nk = 0, 1 pour les fermions etnk = 0, 1, 2, . . . pour les bosons. Dans cette base, la trace dun operateur A estdonnee par
tr[A] =
n1,n2,...
n1, n2, . . . |A|n1, n2, . . ..
Toutes les grandeurs thermodynamiques peuvent etre definies par rapport a` lamatrice densite, par exemple le nombre de particules nk, la densite denergie Eet lentropie s sont donnees par
nk = tr[Nk], (4.3)
E = tr[H], (4.4)
s = tr[ ln ]. (4.5)
4.2. GAZ DE BOSONS ET DE FERMIONS 37
4.2 Gaz de bosons et de fermions
Si on sinteresse aux proprietes thermodynamiques dun gaz de particules, lanature exacte des particules formant le gaz nest pas importante. Des particules dechamp scalaire se comporteront de la meme manie`re que des particules provenantdun champ vectoriel. La seule information a` etre conservee est la statistique, lesbosons se distinguent des fermions.
Densite, pression et energie interne
A lequilibre, les impulsions dun gaz de fermions respectivement de bosons,respectent les distributions de Fermi-Dirac et de Bose-Einstein :
nBk = trB[nk] =1
e(Ek)/T 1 ,
nFk = trF [nk] =1
e(Ek)/T + 1.
Ces distributions nous permettent de calculer lenergie interne, et la densite ;
nB,F =g
(2)3
nB,F (k)d3k, (4.6)
B,F =g
(2)3
Ekn
B,F (k)d3k, (4.7)
avec g le nombre de degres de liberte de chaque particule (g = 2 pour les photons,g = 3 pour un boson massif, g = 1 pour le champ de Higgs et g = 4 pour unfermion de Dirac) et Ek =
k2 +m2.
Nous pouvons aussi calculer la pression :
pB,F =g
(2)3
2k1
k1Ek
nB,F (k)d3k.
En effet, le moment echange lors dune collision contre le plan (xz) par exempleest 2k1 = 2k cos et le nombre de collisions n(k)
k1E.
Notez que dans le cas de particules sans masses, p = 3, ceci provient de la
partie angulaire des integrales :
p =
k2 dk
(2)3n(k)2k
d(cos ) cos2
d =
4
3
k3 dk
(2)3n(k) =
1
3.
Les integrales precedentes (4.6, 4.7) peuvent etre calculees analytiquementdans la limite ultra-relativiste, cest-a`-dire lorsque : T m, T || et Ek =k2 +m2 k. On utilise les formules suivantes pour effectuer les integrales
(s > 0, a > 0) : 0
xs1
eax 1dx =1
as(s)(s),
0
xs1
eax + 1dx =
1
as(s)(1 21s)(s),
38 CHAPITRE 4. THERMODYNAMIQUE DANS LUNIVERS
avec la fonction zeta de Riemann et pour les entiers naturels n, [n + 1] = n!.Dans le cas des bosons, on trouve
nB =g
(2)3
4k2dk
ek/T 1 =g
2(3)T 3, (4.8)
B =g
(2)3
4k3dk
ek/T 1 =2g
30T 4, (4.9)
pB =g
(2)3
1
3
4k2dk
ek/T 1 =
3=2g
90T 4, (4.10)
avec (3) = 1, 202. Pour les fermions, on obtient :
nF =3
4nB ; F =
7
8B ; pF =
7
8pB. (4.11)
On peut egalement traiter le cas non-relativiste, cest-a`-dire lorsque T m. Onarrive aux resultats importants suivants :
n =g
(2)32
(mT )32e
mT ,
= mn,
p = nT .
Il est a` noter que dans ce cas, il ny a pas de difference entre les fermions et lesbosons. La pression est negligeable, et lenergie simplement egale a` la masse de laparticule multipliee par sa densite.
Entropie
Lentropie joue egalement un role important dans la comprehension de lUni-vers. On peut donner une formule equivalente a` celle donnee pour la densitedenergie pour la densite dentropie.
En principe, lentropie est donnee par la matrice densite selon
s = tr[ log ]
On peut montrer que les densites dentropie des espe`ces relativistes sont :
sB =22
45gbT
3,
sF =72
180gfT
3.
Conservation de lentropie
Lentropie totale S est conservee dans lapproximation adiabatique. En effet,supposons que lentropie depende du facteur dechelle a(t), S = S(a). Dans ce cas
4.3. APPLICATION A` LUNIVERS PRIMORDIAL 39
on peut effectuer un developpement limite de lentropie par rapport aux puissancesde a,
dS
dt= A +B
da
dt+ C
(da
dt
)2+ . . .
Dans le cas ou` dadt= 0 il ny a pas devolution temporelle, et on doit avoir dS
dt= 0.
Cette constation implique A = 0. Par ailleurs lentropie augmente toujours dSdt> 0,
pour nimporte quelle evolution de lUnivers. Comme dadt
peut etre negatif, alorsB = 0. Nous obtenons
dS
dt= C
(da
dt
)2+ . . . ,
et donc dSda
= C dadt 0 dans lapproximation adiabatique.
La conservation de lentropie est un outil tre`s utile pour construire des quantitesconservees lors dune evolution (suffisemment lente) de lUnivers.
4.3 Application a` lUnivers primordial
Dans lUnivers primordial, a` une temperature donnee, certaines espe`ces peuventetre relativistes (m T ), alors que dautres, plus massives ne le sont pas. Compa-rons les densites denergie dans ces deux cas ; dans le cas non-relativiste, si T ,elle diminue exponentiellement, et donc, a` lequilibre, le nombre de particules non-relativistes est negligeable par rapport au nombre de particules relativistes.
En assemblant les differentes densites denergie des bosons (4.9) et des fermions(4.11) relativistes, la densite denergie de lUnivers primordial sera la suivante :
(T ) =2
30g(T )T
4
avec
g(T ) =Nbi=1
gi
(T biT
)4+
7
8
Nfi=1
gi
(T fiT
)4.
Dans ces formules, on sest contente des espe`ces relativistes, puisque la den-site denergie des espe`ces non-relativistes est exponentiellement petite. g corres-pond au nombre efficace de degres de libertes. A lequilibre thermique toutes lestemperatures sont egales (T b1 = T
b2 = = T bNb = T f1 = = T ). Il est toutefois
possible quune espe`ce interagissant trop faiblement (les neutrinos par exemple)quitte lequilibre thermique, et de ce fait ait une temperature differente des autreespe`ces.
Pour lentropie, on peut aussi ecrire une formule regroupant les espe`ces :
s(T ) =22
45gsT
3.
Notez qua` lequilibre, gs = g, mais hors equilibre thermique, gs contient le cubedes temperatures des espe`ces au lieu de leur quatrie`me puissance.
40 CHAPITRE 4. THERMODYNAMIQUE DANS LUNIVERS
Le calcul de la densite denergie donne la possibilite de calculer la vitesse dex-pansion de lUnivers primordial. Ainsi en labsence de courbure ou de constantecosmologique, la densite denergie
(T ) =2
30g(t)T
4
permet de calculer le taux dexpansion de lUnivers
H2 =8G
3(T ).
En notant G = 1/M2Pl, on obtient :
H(T ) = 1.66g(T )
T 2
MPl. (4.12)
Calcul de g dans le Mode`le Standard
Le Mode`le Standard contient les particules suivantes : Les quarks : 6 quarks : u, d, s, c, b, t 6 antiquarks Chaque quark posse`de deux etats de spin et 3 couleurs differentes.Ainsi gquark = 6 2 2 3 = 72.
Les leptons : 3 leptons charges : e, ,
3 anti-leptons charges Les leptons charges posse`dent 2 etats de spin differents 3 neutrinos : e, , 3 anti-neutrinos Les neutrinos (si on les suppose non-massifs) ne posse`dent quun etatdhelicite.
Nous avons donc gleptons = 3 2 2 + 3 2 = 18. Bosons de jauge : Le photon est de spin 1, mais comme il est sans masse, il ne posse`de quedeux etats dhelicite.
Les bosons electrofaibles W, Z0, massifs, de spin 1, posse`dent trois etatsde spin.
Les 8 gluons, mediateurs de la force forte, de spin 1 et de masse nulleposse`dent deux etats dhelicite.
Champ scalaire : Le boson de Higgs a un spin 0 et est massif.On calcule egalement gjauge+Higgs = 1 + 2 + 3 3 + 8 2 = 28.
Les fermions ont donc gf = 18 + 72 = 90 et les bosons : gb = 28. En considerantque toutes les particules sont a` lequilibre thermique Tb = Tf = T , on a :
g = gb +7
8gf = 106.75.
4.4. PHOTONS DANS LUNIVERS 41
4.4 Photons dans lUnivers
Lorsque la temperature de lUnivers est assez basse, les elecrons et les pro-tons libres se combinent pour former de lhydroge`ne. Cest ce quon appelle la re-combinaison. Lors de la formation dun atome dhydroge`ne, un photon contenantlenergie de liaison est emis. Lorsque la plupart des electrons et des protons sontcombines, les atomes neutres interagissant que faiblement avec les photons, lUni-vers devient transparent, et les photons emis se propagent sans plus interagir,cest le moment du decouplage des photons.
Ce fond de rayonnement cosmique (CMB) est encore visible aujourdhui etcontient des quantites dinformations sur lUnivers primordial. Cest en fait laphoto la plus ancienne de lUnivers. Lexistence du CMB est une consequencede la theorie du Big-Bang. Il fut predit par Gamow en 1948, et observe par hasarden 1965 par Penzias et Wilson.
Equation de Saha
A lepoque de la recombinaison, lUnivers contient principalement des protons,des electrons, des photons et des atomes dhydroge`nes en equilibre thermique.Lequilibre thermique est maintenu par la reaction
pe H.
Les densites thermiques de ces particules sont :
np =
(mpT
2
)3/2gpe
mppT ,
nH =
(mHT
2
)3/2gHe
mHHT , (4.13)
ne =
(meT
2
)3/2gee
meeT .
A lequilibre, les potentiels chimiques sont egaux des deux cotes de lequation dela reaction p + e = H (rappelons que le potentiel chimique du photon est nul).On a donc :
npnenH
=gegpgH
(meT
2
)3/2e
mp+memHT ,
puisque mp mH . Dautre part, en remarquant que la difference entre la massede latome dhydroge`ne et la masse de ses constituants est justement lenergiedionisation I = mp +me mH = 13.6 eV = 1.58 105 K, on obtient la formuledequilibre de Saha :
npnenH
=
(meT
2
)3/2eI/T . (4.14)
42 CHAPITRE 4. THERMODYNAMIQUE DANS LUNIVERS
Recombinaison
En utilisant la neutralite du plasma, ne = np, on trouve
np = ne = n1/2H
(meT
2
)3/4e
I2T . (4.15)
On voit que si T I, les densites de protons et delectrons sont exponentiellementsupprimees, il ne reste, a` basse temperature, que des atomes dhydroge`nes. Ondefinit arbitrairement le moment de recombinaison lorsque 90% des protons et deselectrons ont ete combines en atomes dhydroge`ne. A laide de la formule (4.15)on peut calculer que le redshift de la recombinaison est de z 1300.
Dans notre Univers, par rapport aux photons, le nombre de baryons nB, oucelui datomes dhydroge`ne, est nB
n= 6 1010 = . Cest a` dire quun tre`s petit
nombre de baryons nont pas ete annihiles par les anti-baryons correspondants, etforment la matie`re dont nous sommes constitues. Leur nombre precis ne peut etrecalcule theoriquement et doit etre mesure. La raison de ce surnombre de particulesde matie`re est toujours une question ouverte.
De cette donnee experimentale, on obtient le nombre datomes dhydroge`nesnH nBn n = n.
Decouplage des photons
Les atomes dhydroge`nes etant neutres, leurs interactions avec la lumie`re sontbeaucoup plus faible que celle entre les protons initiaux et la lumie`re. A un momentdonne, la lumie`re se propage dans lunivers sans plus interagir avec la matie`rebaryonique, cest le decouplage des photons.
Linteraction entre les photons et les atomes dhydroge`nes est tre`s faible, nousla negligerons ici. Il reste les electrons et les protons libres, ceux-ci ont une sectionefficace =
83r2 ou` r est le rayon de la particule consideree. Pour lelectron,
on a re =me
et pour le proton rp =mp, ce qui induit p e. Nous pouvons
donc aussi negliger les interactions des photons avec les protons, la section efficaceetant tre`s petite.
Observons donc les interactions des photons avec les electrons. Le rythme desinteractions est
= enev 82
3m2e1/2
[(3)
22T 3
]1/2(meT
2
)3/4e
I2T .
Le decouplage a lieu lorsque H = 1.66g1/2 T 2MPl , cest-a`-dire lorsque
eI2T B
T 9/4
m5/4e
=T 2
M0,
avec M0 =MPl
1.66g1/2
et B = 832(2)3/4
(2(3)2
)1/2. En notant x = I
2T, on obtient
x1/4ex = B121/4m
5/4e
I1/4M0= 1.24 1012
4.5. NEUTRINOS DANS LUNIVERS 43
dou` x = 26.6, est finalement, le decouplage des photon a` lieu a` une temperaturede T = I
2x= 0.25 eV = 3000K.
Discussion
La recombinaison a lieu a` une temperature de T = 3600K. En dessous de3000K, les photons ninteragissent plus avec le plasma, ils decouplent. Lage delUnivers a` cette epoque est de
t =M0T 2
= 2.7 1013 s 106 ans,
et son decalage vers le rouge de z = 1100.La derivation effectuee ici nest bien sur pas exacte, nous avons suppose que
linteraction entre les photons et les atomes dhydroge`ne H est nulle, et dautrepart, nous avons neglige la presence des etats excites de latome dhydroge`ne.Toutefois, le resultat save`re etonnamment precis.
Notez encore que la temperature de la recombinaison est tre`s proche de latemperature de transition ou` lUnivers domine par le rayonnement devient dominepar la matie`re. En effet, en terme de decalage vers le rouge, le moment degalitezeq entre les densites de matie`re et de rayonnement a lieu avant la recombinaisonzrec et le decouplage zdec. Pour comparaison, les valeurs precises sont :
zeq 3200, zrec 1300, zdec 1100. (4.16)
4.5 Neutrinos dans lUnivers
Les neutrinos interagissent tre`s faiblement. Ils ont probablement une tre`s petitemasse de lordre du dixie`me ou du centie`me delectron-Volt. Nous verrons plus tardque la cosmologie nous permet de mettre une borne superieure pour leur masse. Ilsagit meme actuellement de la borne la plus contraignante.
Il existe trois types de neutrinos ; e, , . Ils ont un nombre leptonique egala` 1 (leurs antiparticules -1). De plus comme le nombre de particules de chaquefamille de leptons est conserve separement, on donne aussi les nombres leptoniqueselectronique (e 1, 0, 0), muonique (e 0, 1, 0) ettauonique (e 0, 0, 1). Ils posse`dent tous un spin 1/2 mais nontquun seul degre de liberte. En effet il nexiste que des neutrinos gauches, cest a`dire que le spin est de direction opposee a` limpulsion, de meme il nexiste que desanti-neutrinos droits.
Decouplage des neutrinos
En supposant que les neutrinos sont sans masse, ou que leur masse est suffi-samment petite, quelle est la temperature du gaz de neutrino emis au moment duBig-Bang ?
44 CHAPITRE 4. THERMODYNAMIQUE DANS LUNIVERS
Pour repondre a` cette question, on doit considerer les interactions des neutrinosavec les autres particules presentes dans lUnivers. Il save`re que les interactionsdominantes sont les suivantes :
Courants charges : les neutrinos interagissent avec des electrons ou des muonsen echangeant un boson W, par exemple + W ee. Notez quela masse du W est mW = 80.4 GeV.
Courants neutres : linteraction se fait par lintermediaire du boson Z demasse mZ = 91.2 GeV, par exemple Z0 e+e.
La section efficace est = G2FE2 ou` E est lenergie et ou` GF =
g2
42M2W
= 1.17 105GeV2 la constante de couplage de Fermi.
En egalant le rythme des interactions a` celui de lexpansion de lUnivers H ,
= nv G2FT 2T 3 = H = T 2/M0,
on trouve la temperature de decouplage des neutrinos,
T 1(M0G2F )
1/3= 2 MeV.
A cette temperature, seuls les electrons, les positrons et les photons sont en-core relativistes (me < T
mautres), on a donc un melange a` lequilibre dee, , e, , .
Temperature des neutrinos
Lorsque la temperature decrot encore, les electrons et anti-electrons sanni-hilent, mais les neutrinos, ninteragissant pas, ne recoivent pas leur part delenergie dannihilation et quittent ainsi lequilibre thermique. A T me il nereste que , e, , mais les temperatures des differentes espe`ces ne sont pasidentiques.
En utilisant la conservation de lentropie pendant lannihilation des electrons,on trouve pour les photons et les electrons
[2 +7
84]T 3ina
3in = 2T
3 a
3out,
et pour les neutrinosT 3ina
3in = T
3 a
3out.
De ces relations, on peut tirer la temperature des neutrinos :
T 3 = T3
[2 + 47
8
2
]1,
T =
(4
11
)1/3T. (4.17)
A notre epoque, la temperature des neutrinos est donc T 2K.
4.6. HISTOIRE THERMODYNAMIQUE 45
Limites cosmologiques sur la masses des neutrinos
Les neutrinos etant presents en grand nombre dans notre Univers, il peuventinfluencer son evolution. Lampleur de cette influence depend de leur masse. Ainsi,lobservation de notre Univers peut nous procurer directement des informationssur les masses des neutrinos.
Nous netudierons ici quun crite`re grossier, mais deja` interessant pour la phy-sique des particules. Nous allons imposer que la masse formee par tous les neutrinosnexce`de pas la densite critique de lUnivers. La densite critique etant
c =3H2
8G= 1.88 1029h2 [g/cm3] = 104h2 [eV/cm3],
il faut que la somme des masses des neutrinos multipliee par leurs densite nexce`depas ce nombre :
mn < 104h2 [eV/cm3].
La densite de neutrinos etant n 234(3)2T 3 = 112 cm3, on trouve
m < 100h
2 [eV],
cest a` dire pour h = 0.72, m < 52 [eV]. (4.18)
Notez quon suppose ici que les neutrinos ne se desinte`grent pas, ou tre`s lentementpar rapport a` lage de lUnivers.
En comparaison, les limites provenant de la physique des particules,
me < 2 eV, m < 0.17 MeV, m < 18.2 MeV,
sont moins restrictives.Actuellement, des considerations cosmologiques plus precises permettent de
contraindre la somme des masses des neutrinos a`
m < 0.7 eV.
4.6 Resume : Histoire thermodynamique simplifiee
de lUnivers
Nous allons tenter de decrire levolution thermodynamique de lUnivers. Biensur nos connaissances de la physique des hautes energies se limite a` environ 200GeV ( energie maximale du LEP). Dautre part, la physique des hautes temperaturesest passablement differente de la physique des hautes energies, et la premie`reest deduite theoriquement de nos connaissances sur la seconde, sans verificationsexperimentales (excepte le Big-Bang, qui constitue notre unique experience).
T GeV : g(T ) = 106.75, phase symetrique de la theorie electrofaible.
46 CHAPITRE 4. THERMODYNAMIQUE DANS LUNIVERS
T environ 120 GeV : transition de phase ou cross-over electrofaible, les par-ticules obtiennent leur masses. A partir de la`, les quarks t et t sannihilent,g(T ) = 96.25.
T < 80 GeV : annihilation de W, Z0, H0, g(T ) = 86.25. T < 4 GeV : bb annihilation, g(T ) = 75.75. T < 1 GeV : + annihilation, g(T ) = 61.75. T 150 MeV : epoque de la QCD, les quarks perdent leur liberte asympto-tique et sont confines. Les quarks forment des etats lies de 3 quarks (baryons)ou dun quark et de son anti-quark (mesons). Les plus legers qui sont rela-tivistes, les pions, ainsi que les autres particules lege`res (muons, electrons etles neutrinos) donnent, apre`s le confinement des quarks, g(T ) = 17.25.
T < 100 MeV : les pions , 0 et les muons sannihilent. Ne restent quee, les et les , donc g(T ) = 10.75.
T 1 MeV decouplage des neutrinos. Ceux-ci ninteragissent plus suffisam-ment et quittent letat dequilibre thermique.
T < 500 keV : les paires electrons-positron deviennent des photons, g(T ) =3.36.
Chapitre 5
Fond de rayonnement cosmique(CMB)
Apre`s le Big Bang, notre Univers se refroidit et setend. Au cours de cetteevolution differentes particules sortent de lequilibre thermique. En particulier latheorie du Big Bang predit que vers 3000 K les photons decouplent et forment lefond de rayonnement cosmique. Ces photons fossils ont ete observes par accidentpar Arno Penzias et Robert Wilson en 1964 (prix Nobel, 1978). De nos jours leCMB constitue une source precieuse dinformations sur notre Univers.
5.1 Mesures du CMB
Jusquaux annees 90, on observait le CMB a` laide dantennes terrestres oude ballons quon laissait monter dans latmosphe`re (e.g. Boomerang). En 1990le satellite COBE (COsmic Background Explorer) fut mis en orbite et donna lespremie`res images du CMB vu de lespace. Il avait une resolution angulaire denviron7. Le satellite WMAP (Wilkinson Microwave Anisotropy Probe) lance en 2001a une resolution de 0.23 et PLANCK (lancement prevu pour 2008) aura uneresolution de 5.
Fig. 5.1 Comparaison de la resolution des mesures de COBE et WMAP [4].
47
48 CHAPITRE 5. FOND DE RAYONNEMENT COSMIQUE (CMB)
Si lUnivers etait parfaitement homoge`ne et isotrope, on observerait le CMBavec la meme intensite dans toutes les directions. Des mesures tre`s precises ontmontre que le CMB presente des anisotropies. Dabord on observe une anisotropiedipolaire : le CMB semble decale vers le rouge dans une direction et decale vers lebleu dans lautre (voir figure 5.2). Cette anisotropie dipolaire provient de la vitessede la terre relative au fond de rayonnement cosmique. Si on soustrait cette contri-bution, il reste, parmis les veritables anisotropies du CMB, encore une anisotropieprovenant de la radiation emise par notre galaxie (voir figure 5.3).
Fig. 5.2 Anisotropie dipolaire [4]. Fig. 5.3 Anisotropie de la galaxie (prin-cipalement la bande rouge au milieu [4].)
Remarquons que sur les figures du CMB on a lhabitude de representer la sphe`receleste par projection de Mollweide qui conserve les surfaces. Le centre de notregalaxie se trouve au centre de lovale, et lequateur galactique correspond a` uneligne horizontale au milieu. Par ailleurs, de lanisotropie dipolaire on peut deduireque notre terre a une vitesse par rapport au CMB denviron 370 km/s dans ladirection de la constellation de la vierge.
Une fois les anisotropies dipolaire et galactique retranchees, on obtient uneimage des anisotropies du CMB qui sont de lordre T/T 105.
Fig. 5.4 Anisotropies du CMB mesurees par WMAP (2005) [3].
5.2. ANISOTROPIES DU CMB 49
A part les anisotropies on peut aussi mesurer le spectre du CMB. Commeles photons etaient en equilibre thermique lors du decouplage, la theorie preditle spectre dun corps noir. Dans ce cas lintensite en fonction de la frequence estdonnee par
I =4~3
exp(
2~kBT
) 1
.
Il save`re que le CMB est le plus parfait corps noir jamais observe ; jusqua` aujour-dhui aucune deviation du spectre dun corps noir na pu etre mise en evidence.
Fig. 5.5 Spectre du CMB compare a` la prediction theorique pour un corps noirparfait [4].
La radiation de corps noir a la propriete de ne dependre que dun seul parame`trequi est la temperature. Pour le CMB on trouve
T = 2.725 0.001 K.
5.2 Anisotropies du CMB
Le mode`le standard de la cosmologie est base sur lhypothe`se que lUniversest homoge`ne et isotrope. Ceci est en effet une tre`s bonne approximation. Maisen realite on observe aussi des deviations de cette homogeneite. Il est important
50 CHAPITRE 5. FOND DE RAYONNEMENT COSMIQUE (CMB)
de mesurer ces anisotropies tre`s precisement pour essayer den extraire un maxi-mum dinformation sur la cosmologie. En particulier, on verra que ces anisotropiespeuvent etre reliees a` la formation de structure dans lUnivers.
Les satellites COBE et WMAP ont mesure les anisotropies du CMB en me-surant sa temperature dans toutes les directions. Pour avoir une mesure precisedes fluctuations de temperature, on ne mesure pas seulement la temperature ab-solue, mais on mesure la difference de temperature entre deux directions. On entire la variation de la temperature dans une certaine direction angulaire (, ) parrapport a` la temperature moyenne. On decompose ensuite cette variation sur lesharmoniques spheriques :
T (, )
T=l,m
almYlm(, ).
On rappelle que les harmoniques spheriques Ylm(, ) sont definies comme les fonc-tions propres du moment angulaire au carre et de sa projection sur laxe z :
L2Ylm(, ) = l(l + 1)Ylm(, ),
LzYlm(, ) = mYlm(, ),
et satisfont les relations dorthogonalite 20
d
0
sin d Ylm(, ) Ylm(, ) = llmm ,
m,l
Ylm(, )Ylm(
, ) = ( )( ).
La fonction de correlation peut secrire T (, )T
T (, )T
=l,m
l,m
almalmYlm(, )Y lm(, ),
ou` . denote la moyenne densemble. Si on fait lhypothe`se dun Univers isotrope,almalm est independant de m :
almalm = cl llmm ,ou` cl est une constante qui ne depend pas de m. Ainsi T (, )
T
T (, )T
=l,m
clYlm(, )Ylm(
, ).
Si on note langle entre les deux directions (, ) et (, ), on peut introduireles polynomes de Legendre Pl, relies aux harmoniques spheriques par la relation
Pl() =4
2l + 1
lm=l
Ylm(, )Ylm(
, ),
5.2. ANISOTROPIES DU CMB 51
pour reecrire la fonction de correlation comme suit
Fcorr := T (, )
T
T (, )T
=l
2l + 1
4Pl()cl.
On conclut donc que la fonction de correlation ne depend pas des deux directions,mais que de langle entre elles ; ce a` quoi on sattend dans un Univers isotrope.En utilisant lorthogonalite des polynomes de Legendre, 1
1Pl()Pl()d cos() =
2
2l + 1ll,
on peut determiner cl :
cl = 2
11Pl()Fcorr()d cos().
Cette formule permet de calculer cl a` partir des mesures de Fcorr(). Physiquement
cl correspond a` lamplitude du multipole l. On a lhabitude de representerl(l+1)2
clen fonction de l ; cest ce quon appelle le spectre en puissance.
Fig. 5.6 Spectre en puissance mesure par WMAP [3].
On voit quun premier maximum se situe a` l 220. Sa position peut etreexpliquee par la formation des structures dans lUnivers. Notons encore que lemultipole l represente les anisotropies dangle
2l;
52 CHAPITRE 5. FOND DE RAYONNEMENT COSMIQUE (CMB)
plus l est petit, plus langle est grand et correspond donc a` des grandes distances.On a pour l 200, un angle denviron 1.
Pour analyser les anisotropies du CMB, on a introduit la moyenne sur len-semble statistique. Cest-a`-dire quil faudrait prendre la moyenne sur differentsUnivers ! Les correlations ne dependant que de langle , on peut considerer dansnotre Univers toutes les paires de points separes par un angle . La moyennedensemble sur plusieurs Univers se rame`ne alors a` la moyenne arithmetique surces paires de points. Lerreur quon fait avec cette methode, appellee la variancecosmique, est importante pour les petits multipoles. La region bleue sur la figure5.6 represente lamplitude des fluctuations statistiques par rapport a` la moyennedensemble.
De plus, vu les grandes erreurs statistiques sur les cl, dans la figure 5.6 on amoyenne sur plusieurs valeurs de l pour obtenir une meilleure precision. Ci-dessouson represente les donnes brutes pour tous les multipoles.
Fig. 5.7 Spectre en puissance mesure par WMAP avec les points de mesure etla courbe obtenue en moyennant sur plusieurs multipoles [5].
Les fluctuations de temperature du CMB sont reliees a` la formation de struc-tures entre le temps degalite (temps ou` mat = rad) et le decouplage des photons.Le type de structures formees depend du contenu de lUnivers et il est possible derelier les cl aux b,m,k,. Ainsi la mesure experimentale de cl nous fournitaussi des informations sur les abondances. Inversement on peut dessiner le spectreen puissance predit par les mode`les theoriques en fonction des differents parame`tresb,m,k, (voir figures 5.8).
5.2. ANISOTROPIES DU CMB 53
Fig. 5.8 Simulation numerique du spectre en puissance en fonction des abon-dances de baryons, de matie`re, de courbure et de constante cosmologique [6].
En conclusion, comme le CMB nous permet dobserver lUnivers tre`s jeune, ilest un element cle en cosmologie. Il constitue la premie`re image que nous avonsde lUnivers. Lexistence du fond de rayonnement cosmique est non seulement unargument en faveur de la theorie de Big Bang, mais son observation nous fournitaussi une multitude dautres informations sur notre Univers.
54 CHAPITRE 5. FOND DE RAYONNEMENT COSMIQUE (CMB)
Chapitre 6
Nucleosynthe`se
Nous venons detudier la recombinaison, cest-a`-dire la fomation datomes parla liaison des noyaux atomiques et des electrons. Ces processus se sont passesenviron 380000 ans apre`s le debut de lUnivers. Nous allons remonter encore dansle temps, augmenter la temperature et etudier la formation des noyaux atomiques.A environ 200 MeV, le plasma de quarks et de gluons commence a` former desprotons et des neutrons, cest la transition de phase de linteraction forte. Latemperature est encore trop elevee pour former des noyaux. LUnivers est doncconstitue de p, n, e, , , . Cest autour de 1-4 MeV que les noyaux ce forment.En dessous du MeV, le contenu atomique de lUnivers est presque comple`tementdetermine : nous avons H, 2H, 3H, 3He, 4He, 7Li, e, , , .
Les etoiles continuent la nucleosynthe`se, mais leur influence sur les quantites esttre`s faible. Notez que les etoiles sont quand-meme importantes pour nous, puisquele Big-Bang na pas cree datomes lourds (i.e. plus lourds que 7Li.)
6.1 Physique nucleaire
Lorsque des protons et des neutrons se lient pour former un noyau, une grandequantite denergie de liaison B est emise. Elle peut etre calculee par la differencedes masses du noyau AZX et de ses constituants (Z protons et A Z neutrons),
BA = Zmp + (A Z)mn mX > 0.Nous donnons dans le tableau suivant quelques valeurs, ou` lon voit que lenergiede liaison par nucleon la plus importante (pour les atomes legers ayant A < 12)est pour le noyau de 4He.
B B/A g2H 2.22 MeV 1.1 MeV 33H 6.92 MeV 2.3 MeV 23He 7.72 MeV 2.57 MeV 24He 28.3 MeV 7.07 MeV 112C 92.2 MeV 7.6 MeV 1
55
56 CHAPITRE 6. NUCLEOSYNTHE`SE
Fig. 6.1 Energie de liaison par nucleon pour differents noyaux [7].
Notez que la valeur optimale est pour le fer 58Fe (voir fig. 6.1). Supposons que lareaction synthetisant un atome AZX,
AX Zp+ (A Z)n,soit a` lequilibre. On deduit que les potentiels chimiques satisfont
A = Zp + (A Z)n.De plus, la densite de lelement X satisfait lequation de Saha :
nXnZp n
AZn
exp(B/T ).
A lequilibre chimique, lelement ayant la plus grande energie de liaison devraitetre le plus abondant, cest-a`-dire que lUnivers devrait contenir principalementdu fer. On constate vite que ce nest pas le cas, cest-a`-dire que la dynamique estimportante et que lequilibre nest pas atteint.
6.2 Nucleosynthe`se par etape
En partant dune temperature de plus de 10 MeV, on va suivre les differentesetapes de la formation de noyaux.
T 10 MeVA une temperature de 10 MeV, lage de lUnivers est de t = 102s. A ce
moment aucun noyau ne peut se former, les protons et les neutrons sont libres et
6.2. NUCLEOSYNTHE`SE PAR ETAPE 57
leur nombre approximativement egal. Bien que lenergie soit inferieure a` lenergiede liaison (7.1 MeV par nucleon pour 4He), les noyaux ne peuvent pas encore seformer. Les densites des nucleons (2H, 3H, . . . ) sont comple`tement negligeables.
Le point important a` ce moment, est levolution du rapport entre le nombrede protons et le nombre de neutrons. Ce rapport est determine par les reactionselectro-faibles
n e p e,
n e+ p e,
qui sont en equilibre thermique jusqua` T = 0.73 MeV. A cette temperature,le rapport entre le nombre de protons et le nombre de neutrons sera fixe. Notezque, comme pour les neutrinos, les interactions entre les neutrons et le bain ther-mique sont regies par linteraction faible. Toutefois les temperatures de decouplagedes neutrinos et des neutrons sont legerement differente. En effet, les vitesses, lesdensites mais aussi la section efficace sont differentes.
T 0.73 MeV : decouplage des neutronsLage de lUnivers est dune seconde. Si le nombre de neutrons est egal au
nombre de protons a` haute temperature, ce nest plus le cas ici. Introduisons lesconcentrations relatives
Xn =Nn
Nn +Np,
Xp =Np
Nn +Np.
Le neutron est un peu plus lourd que le proton, la difference de masse est :
Q = 1.293 MeV.
Le concentration dequilibre pour les neutrons est donc :
Xeqn 1
1 + exp(Q/T ). (6.1)
A la temperature de decouplage, on a approximativement
Xn =1
7, Xp =
6
7.
Le neutron ayant un temps de vie grand par rapport a` lage de lUnivers a` cemoment, peu de neutrons auront le temps de ce desintegrer (la demi-vie du neutronetant de 15 minutes), il finiront pratiquement tous dans les noyaux.
58 CHAPITRE 6. NUCLEOSYNTHE`SE
Synthe`se des elements legers
Lage de lUnivers est de une a` trois minutes et la temperature de 0.3 a` 0.1MeV. Seul un petit nombre de neutrons ont le temps de se desintegrer. Les reactionspermettant la creation des noyaux legers sont les suivantes :
p+ n 2H+ ,2H+ 2H 3H+ p,2H+ 2H 3He + n,2H+ 2H 4He + ,
3He + 2H 4He + p,3H+ 2H 4He + n . . .
Ces reactions sont trop lentes pour etre a` lequilibre thermique. En effet les concen-trations de 2H, 3H, 3He, 4He sont trop petites, et dautre part, la repulsion electro-magnetique entre les noyaux rend la section efficace petite.
Comme lisotope 4He maximise lenergie de liaison par nombre de nucleon (sion observe que les elements legers, les elements plus lourds nayant pas le tempsde se former), en premie`re approximation on peut dire que tous les neutrons vontfinir dans les noyaux de 4He. Toutefois, comme le nombre de neutrons est inferieurau nombre de protons, une grande partie des protons resteront seuls, incapable detrouver des neutrons pour former des noyaux plus lourds. Si on note la fraction de4He x4 =
4n(4He)nn+np
, comme il faut deux neutrons pour former un atome de 4He, la
densite de neutrons nous permet de former
x4 =2nn
nn + np=
2
7 0.25.
Ce chiffre correspond approximativement aux observations, ce qui constitue uneconfirmation experimentale de la theorie du Big Bang.
6.3 Resultats de la nucleosynthe`se
Lors de la nucleosynthe`se, une infime fraction de 7Li est creee. Tous les autreselements sont produits dans les etoiles. Les quantites observees actuellement dhy-droge`ne (90%) et dhelium (10%) proviennent presque exclusivement du Big Bang.Lactivite cumulee des etoiles na presque pas fait evoluer ces proportions.
Pour des valeurs plus precises il faut un attirail theorique et calculatoire bienplus elabore. Mais les resultats ainsi obtenus sont en parfait accord avec les va-leurs experimentales, ce qui est une des grandes reussites du mode`le standard decosmologie. Levolution graphique de ces differentes proportions est montree dansla figure 6.2. Le resultat precis de la baryogene`se dependant des abondances, lesquantites des differents elements legers produits permettent aussi de fixer la quan-tite absolue de matie`re baryonique (voir fig. 6.3).
6.3. RESULTATS DE LA NUCLEOSYNTHE`SE 59
Fig. 6.2 Evolution de la proportion des differents elements legers durant lespremie`