Jean-Marie Yante BOIS VOSGIENS AU PÉAGE DE NANCY ( 1476-1500)1 A la fin du moyen âge, les multiples usages du bois, notamment dans la construction et des secteurs industriels en essor (extraction minière et affinage des métaux)2, stimulent et rentabilisent l’exploitation commerciale des forêts vosgien- nes. A l’instar du Rhin3, de la Meuse4, du Rhône et de l’Isère savoyards5, ou encore de l’Yonne6, les rivières prenant leur source dans le massif constituent autant de voies naturelles pour le transport de ce matériau7. Du côté lorrain, le rôle de la haute Moselle demeure mal connu. Vers 1120/30, des trains de bois passent déjà au 1 Nous adressons nos plus vifs remerciements à Monsieur Hubert Collin, conservateur général du Patrimoine, directeur des Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, à Nancy, pour l’aide précieuse apportée lors de la préparation de cette étude. 2 Deux cas d’approvisionnement en bois d’une grande métropole: J.-P. Sosson, Les travaux publics de la ville de Bruges. XIVe-XVe siècles. Les matériaux. Les hommes (Collection Histoire Pro Civitate, série in-8°, n° 48), Bruxelles 1977, p. 102-112; Ph. BRAUNSTEIN, De la montagne à Venise: les réseaux du bois au XVe siècle, in: Mélanges de l’École française de Rome 100/2 (1988), p. 761-799. 3 W. Jappe Alberts, Der Rheinzoll Lobith im spâten Mittelalter (Rheinisches Archiv, t. 112), Bonn 1981, p. 44. 4 M.-L. Fanchamps, Transport et commerce du bois sur la Meuse au Moyen Age, in: Le Moyen Age 72 (1966), p. 59-81 ; ID., Le commerce sur la Meuse moyenne dans la seconde moitié du XVe siècle et dans la première moitié du XVIe d’après des comptes de tonlieux, in: Histoire économique de la Belgique. Traitement des sources et état des questions. Actes du Colloque de Bruxelles. 17-19 nov. 1971 (Iæ-IVe sections), Bruxelles 1972, p. 292-293 et tableaux statistiques en annexe; M. Suttor, La navigation sur la Meuse moyenne des origines à 1650 (Centre belge d’histoire rurale. Publication n° 86), Liège-Louvain 1986, p. 117-119. 5 P. Duparc, Un péage savoyard sur la route du Mont-Cenis aux XIIIe et XIVe siècles, Montmélian, in: Bulletin philologique et historique (jusqu’à 1610) du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1960, t. 1, p. 154 et 156. 6 M. Deveze, La vie de la forêt française au XVIe siècle, t. 2 (École pratique des Hautes Études. Vie section. Centre de recherches historiques. Les hommes et la terre, t. 6), Paris 1961, p. 34-39. 7 Le flottage est attesté de bonne heure en Gaule. A l’époque gallo-romaine, un constructeur de radeaux de flottage est mentionné à Lyon; des corporations de rcitiaires, en fait de flotteurs, sont connues à Saint-Jean-de-la-Porte (Savoie) et à Genève (A. Grenier, Manuel d’archéologie gallo-romaine, t. 2, Paris 1934, p. 543-544). 185 Jean-Marie Yante BOIS VOSGIENS AU PÉAGE DE NANCY ( 1476-1500) 1 A la fin du moyen âge, les multiples usages du bois, notamment dans la construction et des secteurs industriels en essor (extraction minière et affinage des métaux) 2 , stimulent et rentabilisent l’exploitation commerciale des forêts vosgien- nes. A l’instar du Rhin 3 , de la Meuse 4 , du Rhône et de l’Isère savoyards 5 , ou encore de l’Yonne 6 , les rivières prenant leur source dans le massif constituent autant de voies naturelles pour le transport de ce matériau 7 . Du côté lorrain, le rôle de la haute Moselle demeure mal connu. Vers 1120/30, des trains de bois passent déjà au 1 Nous adressons nos plus vifs remerciements à Monsieur Hubert Collin, conservateur général du Patrimoine, directeur des Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, à Nancy, pour l’aide précieuse apportée lors de la préparation de cette étude. 2 Deux cas d’approvisionnement en bois d’une grande métropole: J.-P. Sosson, Les travaux publics de la ville de Bruges. XIV e-XVe siècles. Les matériaux. Les hommes (Collection Histoire Pro Civitate, série in-8°, n° 48), Bruxelles 1977, p. 102-112; Ph. BRAUNSTEIN, De la montagne à Venise: les réseaux du bois au XVe siècle, in: Mélanges de l’École française de Rome 100/2 (1988), p. 761-799. 3 W. Jappe Alberts, Der Rheinzoll Lobith im spâten Mittelalter (Rheinisches Archiv, t. 112), Bonn 1981, p. 44. 4 M.-L. Fanchamps, Transport et commerce du bois sur la Meuse au Moyen Age, in: Le Moyen Age 72 (1966), p. 59-81 ; ID., Le commerce sur la Meuse moyenne dans la seconde moitié du XV e siècle et dans la première moitié du XVI e d’après des comptes de tonlieux, in: Histoire économique de la Belgique. Traitement des sources et état des questions. Actes du Colloque de Bruxelles. 17-19 nov. 1971 (I æ-IVe sections), Bruxelles 1972, p. 292-293 et tableaux statistiques en annexe; M. Suttor, La navigation sur la Meuse moyenne des origines à 1650 (Centre belge d’histoire rurale. Publication n° 86), Liège-Louvain 1986, p. 117-119. 5 P. Duparc, Un péage savoyard sur la route du Mont-Cenis aux XIII e et XIV e siècles, Montmélian, in: Bulletin philologique et historique (jusqu’à 1610) du Comité des travaux historiques et scientifiques, 1960, t. 1, p. 154 et 156. 6 M. Deveze, La vie de la forêt française au XVI e siècle, t. 2 (École pratique des Hautes Études. Vie section. Centre de recherches historiques. Les hommes et la terre, t. 6), Paris 1961, p. 34-39. 7 Le flottage est attesté de bonne heure en Gaule. A l’époque gallo-romaine, un constructeur de radeaux de flottage est mentionné à Lyon; des corporations de rcitiaires, en fait de flotteurs, sont connues à Saint-Jean-de-la-Porte (Savoie) et à Genève (A. Grenier, Manuel d’archéologie gallo-romaine, t. 2, Paris 1934, p. 543-544). 185
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Bois vosgiens au péage de Nancy (1476-1500) · BOIS VOSGIENS AU PÉAGE DE NANCY ( 1476-1500)1 A la fin du moyen âge, les multiples usages du bois, ... Raon-f Étape, au point de
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Jean-Marie Yante
BOIS VOSGIENS AU PÉAGE DE NANCY ( 1476-1500)1
A la fin du moyen âge, les multiples usages du bois, notamment dans laconstruction et des secteurs industriels en essor (extraction minière et affinage desmétaux)2, stimulent et rentabilisent l’exploitation commerciale des forêts vosgien-nes. A l’instar du Rhin3, de la Meuse4, du Rhône et de l’Isère savoyards5, ou encorede l’Yonne6, les rivières prenant leur source dans le massif constituent autant devoies naturelles pour le transport de ce matériau7. Du côté lorrain, le rôle de lahaute Moselle demeure mal connu. Vers 1120/30, des trains de bois passent déjà au
1 Nous adressons nos plus vifs remerciements à Monsieur Hubert Collin, conservateur général duPatrimoine, directeur des Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, à Nancy, pour l’aideprécieuse apportée lors de la préparation de cette étude.
2 Deux cas d’approvisionnement en bois d’une grande métropole: J.-P. Sosson, Les travaux publics dela ville de Bruges. XIVe-XVe siècles. Les matériaux. Les hommes (Collection Histoire Pro Civitate,série in-8°, n° 48), Bruxelles 1977, p. 102-112; Ph. BRAUNSTEIN, De la montagne à Venise: lesréseaux du bois au XVe siècle, in: Mélanges de l’École française de Rome 100/2 (1988),p. 761-799.
3 W. Jappe Alberts, Der Rheinzoll Lobith im spâten Mittelalter (Rheinisches Archiv, t. 112), Bonn1981, p. 44.
4 M.-L. Fanchamps, Transport et commerce du bois sur la Meuse au Moyen Age, in: Le Moyen Age72 (1966), p. 59-81 ; ID., Le commerce sur la Meuse moyenne dans la seconde moitié du XVe siècle etdans la première moitié du XVIe d’après des comptes de tonlieux, in: Histoire économique de laBelgique. Traitement des sources et état des questions. Actes du Colloque de Bruxelles. 17-19 nov.1971 (Iæ-IVe sections), Bruxelles 1972, p. 292-293 et tableaux statistiques en annexe; M. Suttor, Lanavigation sur la Meuse moyenne des origines à 1650 (Centre belge d’histoire rurale. Publicationn° 86), Liège-Louvain 1986, p. 117-119.
5 P. Duparc, Un péage savoyard sur la route du Mont-Cenis aux XIIIe et XIVe siècles, Montmélian, in:Bulletin philologique et historique (jusqu’à 1610) du Comité des travaux historiques et scientifiques,1960, t. 1, p. 154 et 156.
6 M. Deveze, La vie de la forêt française au XVIe siècle, t. 2 (École pratique des Hautes Études. Viesection. Centre de recherches historiques. Les hommes et la terre, t. 6), Paris 1961, p. 34-39.
7 Le flottage est attesté de bonne heure en Gaule. A l’époque gallo-romaine, un constructeur de radeauxde flottage est mentionné à Lyon; des corporations de rcitiaires, en fait de flotteurs, sont connues àSaint-Jean-de-la-Porte (Savoie) et à Genève (A. Grenier, Manuel d’archéologie gallo-romaine, t. 2,Paris 1934, p. 543-544).
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Jean-Marie Yante
BOIS VOSGIENS AU PÉAGE DE NANCY ( 1476-1500) 1
A la fin du moyen âge, les multiples usages du bois, notamment dans laconstruction et des secteurs industriels en essor (extraction minière et affinage desmétaux)2 , stimulent et rentabilisent l’exploitation commerciale des forêts vosgien-nes. A l’instar du Rhin3
, de la Meuse4 , du Rhône et de l’Isère savoyards5, ou encore
de l’Yonne6, les rivières prenant leur source dans le massif constituent autant de
voies naturelles pour le transport de ce matériau7 . Du côté lorrain, le rôle de lahaute Moselle demeure mal connu. Vers 1120/30, des trains de bois passent déjà au
1 Nous adressons nos plus vifs remerciements à Monsieur Hubert Collin, conservateur général duPatrimoine, directeur des Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, à Nancy, pour l’aideprécieuse apportée lors de la préparation de cette étude.
2 Deux cas d’approvisionnement en bois d’une grande métropole: J.-P. Sosson, Les travaux publics dela ville de Bruges. XIVe-XVe siècles. Les matériaux. Les hommes (Collection Histoire Pro Civitate,série in-8°, n° 48), Bruxelles 1977, p. 102-112; Ph. BRAUNSTEIN, De la montagne à Venise: lesréseaux du bois au XVe siècle, in: Mélanges de l’École française de Rome 100/2 (1988),p. 761-799.
3 W. Jappe Alberts, Der Rheinzoll Lobith im spâten Mittelalter (Rheinisches Archiv, t. 112), Bonn1981, p. 44.
4 M.-L. Fanchamps, Transport et commerce du bois sur la Meuse au Moyen Age, in: Le Moyen Age72 (1966), p. 59-81 ; ID., Le commerce sur la Meuse moyenne dans la seconde moitié du XVe siècle etdans la première moitié du XVIe d’après des comptes de tonlieux, in: Histoire économique de laBelgique. Traitement des sources et état des questions. Actes du Colloque de Bruxelles. 17-19 nov.1971 (Iæ-IVe sections), Bruxelles 1972, p. 292-293 et tableaux statistiques en annexe; M. Suttor, Lanavigation sur la Meuse moyenne des origines à 1650 (Centre belge d’histoire rurale. Publicationn° 86), Liège-Louvain 1986, p. 117-119.
5 P. Duparc, Un péage savoyard sur la route du Mont-Cenis aux XIIIe et XIVe siècles, Montmélian, in:Bulletin philologique et historique (jusqu’à 1610) du Comité des travaux historiques et scientifiques,1960, t. 1, p. 154 et 156.
6 M. Deveze, La vie de la forêt française au XVIe siècle, t. 2 (École pratique des Hautes Études. Viesection. Centre de recherches historiques. Les hommes et la terre, t. 6), Paris 1961, p. 34-39.
7 Le flottage est attesté de bonne heure en Gaule. A l’époque gallo-romaine, un constructeur de radeauxde flottage est mentionné à Lyon; des corporations de rcitiaires, en fait de flotteurs, sont connues à
Saint-Jean-de-la-Porte (Savoie) et à Genève (A. Grenier, Manuel d’archéologie gallo-romaine, t. 2,Paris 1934, p. 543-544).
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large de Toul8. En décembre 1479, les autorités lorraines invitent le receveur dupéage de Nancy à percevoir les droits sur les planches qui, depuis environ trois ans,transitent par Gondreville, en aval de Toul9. Après un temps de repli, le flottage yconnaîtrait-il un nouvel essor? Au début du XIVe siècle, cette activité semble bienimplantée sur la Meurthe et ses affluents. Un accord est passé en 1302, pour quatreans, entre le duc Ferry III de Lorraine, le comte de Salm et l’abbé de Senonesconcernant le transport du mairien (bois de construction) descendant du val deSenones et de celui de Celles-sur-Plaine, A la fin du siècle, les Raonnais saisissentle duc Jean Ier d’une plainte contre les receveurs de Deneuvre et Ménil, en aval deleur ville, appliquant des taux plus élevés que par le passé10. Au plus tard au débutdu XVIe siècle, le flottage se pratique également sur la Sarre11. Enfin, sur le versantalsacien, un capitaliste strasbourgeois et le sire de Landsberg s’associent en 1476pour exploiter ce droit sur la Bruche12
Des travaux récents ont mis en exergue, pour l’époque moderne et jusqu’àl’extrême fin du XIXe siècle, la part importante prise par les habitants deRaon-f Étape, au point de rencontre du massif vosgien et de la Meurthe lorraine,dans la préparation des trains de bois et leur acheminement par la voie fluviale13.Pour une époque antérieure, la mise en œuvre des comptes du péage lorrain deNancy, dont la série débute en 1476 et se poursuit sans véritable césure jusqu’aux
8 J. Schneider, Les routes dans la Lorraine médiévale, in: Bulletin de la Société lorraine des étudeslocales pour l’enseignement public, nouv. série, n° 7, oct.-déc. 1958, p. 2. L’utilisation du sapincomme motif décoratif sur des poteries sigillées de l’officine de Haute-Yutz, près de Thionville (vers180/200 après J.-C.), pourrait être un indice du flottage contemporain de résineux sur la Moselle. Cf.G. Stiller et G. Ancel, Thionville et sa rivière: la Moselle (Région de Thionville. Etudeshistoriques, fasc. 21), Metz 1964, p. 13 et 19.
9 O. Schweyer, Un péage lorrain: Nancy (1479-1480), mémoire de maîtrise, Centre universitaire deVincennes 1971, p. 9. Pour le début de l’époque moderne, voir G. Cabourdin, Terre et hommes enLorraine (1550-1635). Toulois et comté de Vaudémont, t. 1 (Annales de l’Est. Mémoires n° 55),Nancy 1977, p. 71.
10 Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, à Nancy (ci-après A.D.M.M.), B 488 (layette 11 ) et644 (layette 30); M. Schneider, Raon-l’Étape des origines au XVIIIe siècle. Histoire de troiscommunautés du duché de Lorraine (Raon-l’Étape, Laneuveville, Vézeval), Raon-l’Étape 1990,p, 78.
11 A. Tille, Zur Geschichte der Saarflösserei und Saarschiffahrt, Sarrebruck 1907; H. HieGel, Lachâtellenie et la ville de Sarreguemines de 1335 à 1630 (Annales de l’Est. Mémoires n° 3), Paris 1934,p. 459; H. et Ch. HIEGEL, Le bailliage d’Allemagne de 1600 à 1632. II: Agriculture. Industrie.Commerce, Sarreguemines 1968, p. 192-195 et 249-250 (exportations de bois); H.-W. Herrmann,Die Saarburger Zollregister von 1581, 1589 und 1614. Ein Beitrag zur Wirtschafts- und Verkehrsge¬schichte der Saargegend, in: Kurtrierisches Jahrbuch 22 (1982), p. 81 et 106; M. Matheus, Trier amEnde des Mittelalters. Studien zur Sozial-, Wirtschafts- und Verfassungsgeschichte der Stadt Triervom 14. bis 16. Jahrhundert (Trierer Historische Forschungen, t. 5), Trêves 1984, p. 48.
12 F. Rapp, Routes et voies de communication à travers les Vosges du XIIe au début du XVIe siècle, in:Les pays de l’Entre-Deux au Moyen Age: Questions d’histoire des territoires d’Empire entre Meuse,Rhône et Rhin. Actes du 113e Congrès national des Sociétés savantes (Strasbourg, 1988). Sectiond’histoire médiévale et de philologie, Paris 1990, p. 204.
13 M. Schneider (voir note 10), spécialement p. 76-80; O. Guatelli, Raon-l’Étape, Le flottage du boiset les «oualous» (1830-1899), Raon-l’Étape 1991. A propos de la navigation sur la basse Meurthe:J.-L. Fray, Nancy-le-Duc. Essor d’une résidence princière dans les deux derniers siècles du MoyenAge, Nancy 1986, p. 77-78.
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large de Toul 8 . En décembre 1479, les autorités lorraines invitent le receveur dupéage de Nancy à percevoir les droits sur les planches qui, depuis environ trois ans,transitent par Gondreville, en aval de Toul9 . Après un temps de repli, le flottage yconnaîtrait-il un nouvel essor? Au début du XIVe siècle, cette activité semble bienimplantée sur la Meurthe et ses affluents. Un accord est passé en 1302, pour quatreans, entre le duc Ferry III de Lorraine, le comte de Salm et l’abbé de Senonesconcernant le transport du mairien (bois de construction) descendant du val deSenones et de celui de Celles-sur-Plaine, A la fin du siècle, les Raonnais saisissentle duc Jean Ier d’une plainte contre les receveurs de Deneuvre et Ménil, en aval deleur ville, appliquant des taux plus élevés que par le passé 10
. Au plus tard au débutdu XVIe siècle, le flottage se pratique également sur la Sarre 11 . Enfin, sur le versantalsacien, un capitaliste strasbourgeois et le sire de Landsberg s’associent en 1476pour exploiter ce droit sur la Bruche 12
Des travaux récents ont mis en exergue, pour l’époque moderne et jusqu’àl’extrême fin du XIXe siècle, la part importante prise par les habitants deRaon-fÉtape, au point de rencontre du massif vosgien et de la Meurthe lorraine,dans la préparation des trains de bois et leur acheminement par la voie fluviale 13 .
Pour une époque antérieure, la mise en œuvre des comptes du péage lorrain deNancy, dont la série débute en 1476 et se poursuit sans véritable césure jusqu’aux
8 J. Schneider, Les routes dans la Lorraine médiévale, in: Bulletin de la Société lorraine des étudeslocales pour l’enseignement public, nouv. série, n° 7, oct.-déc. 1958, p. 2. L’utilisation du sapincomme motif décoratif sur des poteries sigillées de l’officine de Haute-Yutz, près de Thionville (vers180/200 après J.-C.), pourrait être un indice du flottage contemporain de résineux sur la Moselle. Cf.G. Stiller et G. Ancel, Thionville et sa rivière: la Moselle (Région de Thionville. Etudeshistoriques, fasc. 21), Metz 1964, p. 13 et 19.
9 O. Schweyer, Un péage lorrain: Nancy (1479-1480), mémoire de maîtrise, Centre universitaire deVincennes 1971, p. 9. Pour le début de l’époque moderne, voir G. Cabourdin, Terre et hommes enLorraine (1550-1635). Toulois et comté de Vaudémont, t. 1 (Annales de l’Est. Mémoires n° 55),Nancy 1977, p. 71.
10 Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, à Nancy (ci-après A.D.M.M.), B 488 (layette 11 ) et644 (layette 30); M. Schneider, Raon-l’Étape des origines au XVIIIe siècle. Histoire de troiscommunautés du duché de Lorraine (Raon-l’Étape, Laneuveville, Vézeval), Raon-l’Étape 1990,p, 78.
11 A. Tille, Zur Geschichte der Saarflösserei und Saarschiffahrt, Sarrebruck 1907; H. HieGel, Lachâtellenie et la ville de Sarreguemines de 1335 à 1630 (Annales de l’Est. Mémoires n° 3), Paris 1934,
p. 459; H. et Ch. HIEGEL, Le bailliage d’Allemagne de 1600 à 1632. II: Agriculture. Industrie.Commerce, Sarreguemines 1968, p. 192-195 et 249-250 (exportations de bois); H.-W. Herrmann,Die Saarburger Zollregister von 1581, 1589 und 1614. Ein Beitrag zur Wirtschafts- und Verkehrsge¬schichte der Saargegend, in: Kurtrierisches Jahrbuch 22 (1982), p. 81 et 106; M. Matheus, Trier amEnde des Mittelalters. Studien zur Sozial-, Wirtschafts- und Verfassungsgeschichte der Stadt Triervom 14. bis 16. Jahrhundert (Trierer Historische Forschungen, t. 5), Trêves 1984, p. 48.
12 F. Rapp, Routes et voies de communication à travers les Vosges du XIIe au début du XVIe siècle, in:Les pays de l’Entre-Deux au Moyen Age: Questions d’histoire des territoires d’Empire entre Meuse,Rhône et Rhin. Actes du 113e Congrès national des Sociétés savantes (Strasbourg, 1988). Sectiond’histoire médiévale et de philologie, Paris 1990, p. 204.
13 M. Schneider (voir note 10), spécialement p. 76-80; O. Guatelli, Raon-l’Étape, Le flottage du boiset les «oualous» (1830-1899), Raon-l’Étape 1991. A propos de la navigation sur la basse Meurthe:J.-L. Fray, Nancy-le-Duc. Essor d’une résidence princière dans les deux derniers siècles du MoyenAge, Nancy 1986, p. 77-78.
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environs de 154014, permet d’apprécier le volume du trafic à quelque 60 kilomètresen aval du principal port de jetage, de dégager quelques tendances, de cerner lesrôles respectifs des Raonnais et autres voileurs15. Présentement limitées aux années1476 à 150016, ces investigations ne peuvent être dissociées de celles menées pourle trafic mosellan au poste lorrain de Sierck, en aval de Metz17.
Les techniques de confection des trains de bois ont vraisemblablement peu évoluéentre le bas moyen âge et le XIXe siècle qui voit l’apogée du flottage, promu aurang de véritable service public, avant de connaître après 1871 un déclin rapide etinexorable. Sur les ports, où sont amenés mairien et planches sciées, les flotteurspréparent les éléments constitutifs des voiles. Ils superposent 7, 8 ou 10 planches demêmes dimensions, les serrent avec des harts (liens formés de jeunes pousses dehêtre, de chêne ou de sapin tordues à chaud), rapprochent l’une contre l’autre cespiles de planches (tronces) et les accouplent au moyen de traverses. Ces unités deflottage, appelées bossets (bossels au XVe siècle)18, sont reliées bout à bout par desharts et constituent un train ou une flotte. Le même procédé prévaut pourl’assemblage du mairien en bossets19.
Plutôt que de flottes ou trains, les comptes nancéiens parlent de corroyés2021.Ils’agit,des termes mêmes du tarif du péage, de huict plainches de hault, VIII de loing etVIII de travers, soit 512 planches en 8 bossets21. La corroyé est théoriquement
14 A ce jour, deux comptes seulement, couvrant les mois de septembre 1479 à décembre 1480, ont faitl’objet d’une étude systématique: O. Schweyer (voir note 9).
15 Désignation régionale des flotteurs: G. Baumont, Une industrie disparue: le flottage, in: Bulletin dela Société philomatique vosgienne 62 (1958), p. 52.Aux XVe et XVIe siècles, des bois vosgiens sont également acheminés par voie terrestre (M.Schneider (voir note 10), p. 69 et 77).
16 Documents mis en œuvre: A.D.M.M., série B, nos 7549 (année 1476), 7551 (1479 partim), 7552(1480), 7553 (1481), 7555 (1483), 7558 (1489), 7559 (1488), 7560 (1491), 7561 (1492), 7562 (1493),7563 (1494), 7565 (1495), 7566 (1496), 7567 (1497), 7568 (1498), 7569 (1499) et 7570 (1500).Compte tenu de leur très mauvais état de conservation, les comptes des exercices 1478 (B 7550), 1482(B 7554), 1484 (B 7556) et 1485 (B 7557) ne se prêtent pas à un traitement statistique et, à ce stade dela recherche, n’ont pas été exploités.
17 J.-M. Yante, Le péage lorrain de Sierck-sur-Moselle. 1424-1549. Analyse et édition des comptes,thèse de l’École pratique des Hautes Études (IVe section), Paris 1989.
18 En wallon liégeois, un train de bois flotté se dit bossêye ou boss'lêye (J. Haust, Dictionnaire liégeois,Liège 1933, p. 95 et 228).
19 Guerard, Notice sur les irrigations et le flottage dans l’arrondissement de Saint-Dié, Paris 1866(extrait des Annales des Ponts et Chaussées), cité par O. GUATELLI (voir note 13), p. 25-26. Voir aussidans cet ouvrage (p. 25) un schéma d’assemblage d’un train de planches sur la Sarre (d’après R.Descombes, Le flottage des bois sur la Sarre, Édition des Syndicats d’initiative de Lutzelbourg et deSaint-Louis 1979).A propos du flottage à bûches perdues ou bolée, non imposé au péage de Nancy: M. SCHNEIDER (voirnote 10), p. 79; O. Guatelli (voir note 13), p. 48.
20 Sur le mot conroi, conroy, corroi. .. dans le sens de suite, train: F. Godefroy, Dictionnaire del’ancienne langue française, t. 2, 1883, p. 248.
21 Un acte de 1389, dans lequel interviennent le duc Jean Ier de Lorraine et Henry, seigneur de Blâmont,stipule que la flotte de planches contiendra 6 bousselz (A.D.M.M., B 644, layette 30; M. Schneider(voir note 10), p. 78).
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environs de 1540 14, permet d’apprécier le volume du trafic à quelque 60 kilomètres
en aval du principal port de jetage, de dégager quelques tendances, de cerner lesrôles respectifs des Raonnais et autres voileurs 15 . Présentement limitées aux années1476 à 1500 16
, ces investigations ne peuvent être dissociées de celles menées pourle trafic mosellan au poste lorrain de Sierck, en aval de Metz 17 .
Les techniques de confection des trains de bois ont vraisemblablement peu évoluéentre le bas moyen âge et le XIXe siècle qui voit l’apogée du flottage, promu aurang de véritable service public, avant de connaître après 1871 un déclin rapide etinexorable. Sur les ports, où sont amenés mairien et planches sciées, les flotteurspréparent les éléments constitutifs des voiles. Ils superposent 7, 8 ou 10 planches demêmes dimensions, les serrent avec des harts (liens formés de jeunes pousses dehêtre, de chêne ou de sapin tordues à chaud), rapprochent l’une contre l’autre cespiles de planches ( tronces ) et les accouplent au moyen de traverses. Ces unités deflottage, appelées bossets (bossels au XVe siècle) 18 , sont reliées bout à bout par desharts et constituent un train ou une flotte. Le même procédé prévaut pourl’assemblage du mairien en bossets 19 .
Plutôt que de flottes ou trains, les comptes nancéiens parlent de corroyés20
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. Il s’agit,des termes mêmes du tarif du péage, de huict plainches de hault, VIII de loing etVIII de travers, soit 512 planches en 8 bossets21 . La corroyé est théoriquement
14 A ce jour, deux comptes seulement, couvrant les mois de septembre 1479 à décembre 1480, ont faitl’objet d’une étude systématique: O. Schweyer (voir note 9).
15 Désignation régionale des flotteurs: G. Baumont, Une industrie disparue: le flottage, in: Bulletin dela Société philomatique vosgienne 62 (1958), p. 52.Aux XVe et XVIe siècles, des bois vosgiens sont également acheminés par voie terrestre (M.Schneider (voir note 10), p. 69 et 77).
16 Documents mis en œuvre: A.D.M.M., série B, nos 7549 (année 1476), 7551 (1479 partim ), 7552(1480), 7553 (1481), 7555 (1483), 7558 (1489), 7559 (1488), 7560 (1491), 7561 (1492), 7562 (1493),7563 (1494), 7565 (1495), 7566 (1496), 7567 (1497), 7568 (1498), 7569 (1499) et 7570 (1500).Compte tenu de leur très mauvais état de conservation, les comptes des exercices 1478 (B 7550), 1482(B 7554), 1484 (B 7556) et 1485 (B 7557) ne se prêtent pas à un traitement statistique et, à ce stade dela recherche, n’ont pas été exploités.
17 J.-M. Yante, Le péage lorrain de Sierck-sur-Moselle. 1424-1549. Analyse et édition des comptes,thèse de l’École pratique des Hautes Études (IVe section), Paris 1989.
18 En wallon liégeois, un train de bois flotté se dit bossêye ou boss'lêye (J. Haust, Dictionnaire liégeois,Liège 1933, p. 95 et 228).
19 Guerard, Notice sur les irrigations et le flottage dans l’arrondissement de Saint-Dié, Paris 1866(extrait des Annales des Ponts et Chaussées), cité par O. GUATELLI (voir note 13), p. 25-26. Voir aussidans cet ouvrage (p. 25) un schéma d’assemblage d’un train de planches sur la Sarre (d’après R.Descombes, Le flottage des bois sur la Sarre, Édition des Syndicats d’initiative de Lutzelbourg et deSaint-Louis 1979).A propos du flottage à bûches perdues ou bolée, non imposé au péage de Nancy: M. SCHNEIDER (voirnote 10), p. 79; O. Guatelli (voir note 13), p. 48.
20 Sur le mot conroi, conroy, corroi. .. dans le sens de suite, train: F. Godefroy, Dictionnaire del’ancienne langue française, t. 2, 1883, p. 248.
21 Un acte de 1389, dans lequel interviennent le duc Jean Ier de Lorraine et Henry, seigneur de Blâmont,stipule que la flotte de planches contiendra 6 bousselz (A.D.M.M., B 644, layette 30; M. Schneider(voir note 10), p. 78).
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redevable de 22 gros (monnaie de Lorraine)22 mais, la composition des trains ayantévolué depuis la codification des droits, le receveur exige un supplément -fréquemment de 11 gros - pour 457 corroyés plus grandes que d'ancienneté (sur untotal de 667). Pour 4 d’entre elles, il est précisé en 1494 qu’elles sont plus grandesde deux planches sur chaque petit bosseP-3. Quant au mairien, il est tarifé à 3 grospar bosset. Quoique l’espèce ne soit jamais précisée, on peut admettre que le sapin,largement répandu dans le massif vosgien et seul mentionné dans les comptessierckois, occupe de loin la première place.
L’importance du trafic dépend tout à la fois de l’ampleur des coupes dans le massifvosgien, de la demande en aval et des conditions météorologiques fort variablesd’année en année: minimum de 11 impositions en 149224, maximum de 33 en 1489(Tableau I). L’activité fluctue aussi selon les saisons: le froid et les glaces arrêtentplus ou moins durablement le flottage en hiver, celui-ci reprend au printemps avecla fonte des neiges mais peut alors être entravé ou interrompu par de hautes eaux, lasécheresse estivale risque de faire échouer les trains25. Avec un total de 317impositions en 17 exercices - moins de 20 par an -, l’échantillon se prête mal à untraitement statistique.
Au cours de 134 mois de flottage, 5 seulement comptabilisent plus de 5 passages(maxima de 8 en mai 1489 et juin 1493). La faible amplitude du trafic est facteur debiaisage. Quelques tendances néanmoins se dégagent. L’animation culmine en mars(48 taxations au total, soit 15,1 %). Avril (9,8 %), mai (10,7 %) et juin (10,4 %)prolongent ce temps relativement fort. Ces quatre mois interviennent ensemble àconcurrence de 46 %. Le creux estival est nettement marqué: 3,2 % en juillet, 5,4 %en août. A 11 reprises, aucun bois n’est imposé au cours du premier mois; 8 fois, aucours du second. Les voiles demeurent rares en septembre et octobre. Si le traficrécupère quelque peu en novembre (14,2%), le constat s’assortit d’exceptions:aucune flotte en 1476 (pour des raisons politico-militaires), 1479, 1480, 1488 et1499. Un nouveau recul s’enregistre en décembre (8,5 %), prélude aux piètresscores de janvier (4,1 %) et février (5,4 %)26. A respectivement 8 et 7 reprises,aucun passage de bois n’est consigné au cours de ces deux mois.
Il s’en faut que les profils annuels correspondent à ces données moyennes. Aucunexercice n’accuse une activité ininterrompue: maxima de 10 mois en 1481, 1489,
22 Édition du tarif en vigueur en 1479/80: O. SCHWEYER (voir note 9), annexe III.A Raon-l’Étape, pour les voiles qui se chargent, on exige au XVIe siècle 2 gros par 100 planches (M.Schneider (voir note 10), p. 67). A propos des multiples péages établis sur la Meurthe entre Raon etNancy: ibidem, p. 79.
23 Quelques taxations mentionnent le nombre approximatif de planches par corroyé (sans supplément dedroit): en 1489, 650 planches pour deux corroyés (à deux reprises), 1100 planches pour deux autres,1400 pour trois autres; en 1495, deux corroyés totalisent 1600 planches; trois autres, 2200.
24 On ne tient pas compte ici de l’exercice 1476 totalisant 4 passages dont aucun, du fait des guerresburgondo-lorraines, postérieur au 8 juin.
25 O. GUATELLI (voir note 13), p. 30-31. Dans le massif ardennais, pour la qualité du bois et sa bonneflottabilité, l’abattage se faisait en l’absence de sève, c’est-à-dire entre fin octobre et fin janvier (L.Marquet, Le flottage du bois, in: Enquêtes du Musée de la Vie wallonne 13 (1978), p. 171).
26 Sur la Meuse moyenne, les trains de bois ne passent presque jamais en hiver, particulièrement enjanvier. Ils descendent essentiellement au printemps et en été (M.-L. FANCHAMPS, Le commerce (voirnote 4), p. 292).
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redevable de 22 gros (monnaie de Lorraine)22 mais, la composition des trains ayantévolué depuis la codification des droits, le receveur exige un supplément -fréquemment de 11 gros - pour 457 corroyés plus grandes que d'ancienneté (sur untotal de 667). Pour 4 d’entre elles, il est précisé en 1494 qu’elles sont plus grandesde deux planches sur chaque petit bosseP-3
. Quant au mairien, il est tarifé à 3 grospar bosset. Quoique l’espèce ne soit jamais précisée, on peut admettre que le sapin,largement répandu dans le massif vosgien et seul mentionné dans les comptessierckois, occupe de loin la première place.
L’importance du trafic dépend tout à la fois de l’ampleur des coupes dans le massifvosgien, de la demande en aval et des conditions météorologiques fort variablesd’année en année: minimum de 11 impositions en 149224 , maximum de 33 en 1489(Tableau I). L’activité fluctue aussi selon les saisons: le froid et les glaces arrêtentplus ou moins durablement le flottage en hiver, celui-ci reprend au printemps avecla fonte des neiges mais peut alors être entravé ou interrompu par de hautes eaux, lasécheresse estivale risque de faire échouer les trains25 . Avec un total de 317impositions en 17 exercices - moins de 20 par an -, l’échantillon se prête mal à untraitement statistique.
Au cours de 134 mois de flottage, 5 seulement comptabilisent plus de 5 passages(maxima de 8 en mai 1489 et juin 1493). La faible amplitude du trafic est facteur debiaisage. Quelques tendances néanmoins se dégagent. L’animation culmine en mars(48 taxations au total, soit 15,1 %). Avril (9,8 %), mai (10,7 %) et juin (10,4 %)prolongent ce temps relativement fort. Ces quatre mois interviennent ensemble àconcurrence de 46 %. Le creux estival est nettement marqué: 3,2 % en juillet, 5,4 %en août. A 11 reprises, aucun bois n’est imposé au cours du premier mois; 8 fois, aucours du second. Les voiles demeurent rares en septembre et octobre. Si le traficrécupère quelque peu en novembre (14,2%), le constat s’assortit d’exceptions:aucune flotte en 1476 (pour des raisons politico-militaires), 1479, 1480, 1488 et1499. Un nouveau recul s’enregistre en décembre (8,5 %), prélude aux piètresscores de janvier (4,1 %) et février (5,4 %)26 . A respectivement 8 et 7 reprises,aucun passage de bois n’est consigné au cours de ces deux mois.
Il s’en faut que les profils annuels correspondent à ces données moyennes. Aucunexercice n’accuse une activité ininterrompue: maxima de 10 mois en 1481, 1489,
22 Édition du tarif en vigueur en 1479/80: O. SCHWEYER (voir note 9), annexe III.A Raon-l’Étape, pour les voiles qui se chargent, on exige au XVIe siècle 2 gros par 100 planches (M.Schneider (voir note 10), p. 67). A propos des multiples péages établis sur la Meurthe entre Raon etNancy: ibidem, p. 79.
23 Quelques taxations mentionnent le nombre approximatif de planches par corroyé (sans supplément dedroit): en 1489, 650 planches pour deux corroyés (à deux reprises), 1100 planches pour deux autres,1400 pour trois autres; en 1495, deux corroyés totalisent 1600 planches; trois autres, 2200.
24 On ne tient pas compte ici de l’exercice 1476 totalisant 4 passages dont aucun, du fait des guerresburgondo-lorraines, postérieur au 8 juin.
25 O. GUATELLI (voir note 13), p. 30-31. Dans le massif ardennais, pour la qualité du bois et sa bonneflottabilité, l’abattage se faisait en l’absence de sève, c’est-à-dire entre fin octobre et fin janvier (L.Marquet, Le flottage du bois, in: Enquêtes du Musée de la Vie wallonne 13 (1978), p. 171).
26 Sur la Meuse moyenne, les trains de bois ne passent presque jamais en hiver, particulièrement enjanvier. Ils descendent essentiellement au printemps et en été (M.-L. FANCHAMPS, Le commerce (voirnote 4), p. 292).
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1491, 1494 et 1495, minima de 6 mois en 1499 et 4 mois seulement en 1476 (dufait de la conjoncture politique), aucune imposition au cours des quatre moisconnus de 1479. Les périodes de chômage estival s’avèrent pareillement delongueur variable: près de 5 mois en 1483 et 1499, un mois et demi en 1480 et1495, en moyenne de deux à trois mois.
Les comptes du péage spécifient la nature des articles taxés: corroyé de planches,bosset de planches ou de mairien, voiture27 ou pièce de mairien. Plusieurs fois,mention est faite du nombre de planches imposées (Tableau II). Sur base de 512unités pour une corroyé à Vancienne, en majorant cette quantité de 50 % pour lescorroyés acquittant un supplément de droit, on peut estimer entre 450 et 500 000 lenombre de planches transitant par Nancy au cours des 17 exercices étudiés. S’yajoutent 116 bossets, 131 1/2 voitures et 22 pièces de mairien.
A 128 reprises, les trains de bois servent de support à d’autres articles decommerce: 104 chargements de vin (dont 39 de provenance alsacienne spécifiée),27 passages de meules de maréchal sortant des carrières de grès vosgien28.
La grande majorité des flotteurs sont originaires de Raon-l’Étape. La localitébénéficie d’une position avantageuse au contact de deux milieux géographiques: lesVosges gréseuses et le plateau lorrain. En amont, au fond d’étroites vallées, coulentde petites rivières à faible débit, affluents de la Meurthe: la Fave, le Taintroué, laPlaine, le Rabodeau, la Ravines et la Valdange. En aval, la Meurthe lorraine, pluslarge et plus profonde, permet le flottage de trains plus lourds. Aussi, jusqu’àl’extrême fin du XIXe siècle, les voiles sont-elles transbordées et reconstituées àRaon29. Entre 1476 et 1500, 189 impositions sont expressément enregistrées aunom de Raonnais. Par recoupement, 14 voire 16 passages s’inscrivent encore à leuractif. Quand on ajoute 31 taxations d’habitants de Laneuveville, sur la rive gauchede la Meurthe en face de Raon, on atteint un total de 236 inscriptions. A unedizaine de kilomètres en aval, Baccarat intervient également pour une part nonnégligeable dans le trafic (49 impositions). Azerailles est mentionné à une reprise;Saint-Nicolas-de-Port, haut lieu du commerce lorrain, deux fois seulement. La partmédiocre du bois dans les échanges portois a été relevée par Odette Kammerer-Schweyer qui, pour le XVIe siècle, souligne toutefois le rôle de quelques grandsmarchands locaux (Chavenel, Dieu et Go) et a repéré des opérations d’envergure30.Les autres localités d’origine sont riveraines ou proches d’affluents de la Meurthe:Celles (12 taxations) et Vexaincourt (1) sur la Plaine, Badonviller (5) et Ogéviller(1) dans le bassin de la Vezouse, Rambervillers (1) sur la Mortagne. S’y ajoute unimposé de La Bourgonce au nord-ouest de Saint-Dié.
27 Disposés en leur long, douze ou quinze de front, deux ou trois estons posez l’un sur l’autre, les troncsforment une voiture [qui] peut comprendre 30 à 45 sapins (Voyage de Philippe de Hurges à Liège et àMaastricht en 1615, édit. H. MiCHELANT, Liège 1872, p. 127-128, cité par M. Suttor (voir note 4),p. 120).
28 Sur les planches ou le mairien trouvent également place du millet, des tonneaux, un coffre avec desmeubles, des saurets et des fardeaux (?). Ce mode de transport des meules est encore attesté au milieudu XIXe siècle (O. Guatelli (voir note 13), p. 54).
29 Ibidem, p. 53.30 O. Kammerer-Schweyer, La Lorraine des marchands à Saint-Nicolas-de-Port (du 14e au 16e siècle)
(Recueil de documents sur l’histoire de Lorraine, t. 26), Saint-Nicolas-de-Port 1985, p. 90.
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1491, 1494 et 1495, minima de 6 mois en 1499 et 4 mois seulement en 1476 (dufait de la conjoncture politique), aucune imposition au cours des quatre moisconnus de 1479. Les périodes de chômage estival s’avèrent pareillement delongueur variable: près de 5 mois en 1483 et 1499, un mois et demi en 1480 et1495, en moyenne de deux à trois mois.
Les comptes du péage spécifient la nature des articles taxés: corroyé de planches,bosset de planches ou de mairien, voiture27 ou pièce de mairien. Plusieurs fois,mention est faite du nombre de planches imposées (Tableau II). Sur base de 512unités pour une corroyé à Vancienne, en majorant cette quantité de 50 % pour lescorroyés acquittant un supplément de droit, on peut estimer entre 450 et 500 000 lenombre de planches transitant par Nancy au cours des 17 exercices étudiés. S’yajoutent 116 bossets, 131 1/2 voitures et 22 pièces de mairien.
A 128 reprises, les trains de bois servent de support à d’autres articles decommerce: 104 chargements de vin (dont 39 de provenance alsacienne spécifiée),27 passages de meules de maréchal sortant des carrières de grès vosgien28 .
La grande majorité des flotteurs sont originaires de Raon-l’Étape. La localitébénéficie d’une position avantageuse au contact de deux milieux géographiques: lesVosges gréseuses et le plateau lorrain. En amont, au fond d’étroites vallées, coulentde petites rivières à faible débit, affluents de la Meurthe: la Fave, le Taintroué, laPlaine, le Rabodeau, la Ravines et la Valdange. En aval, la Meurthe lorraine, pluslarge et plus profonde, permet le flottage de trains plus lourds. Aussi, jusqu’àl’extrême fin du XIXe siècle, les voiles sont-elles transbordées et reconstituées àRaon29 . Entre 1476 et 1500, 189 impositions sont expressément enregistrées aunom de Raonnais. Par recoupement, 14 voire 16 passages s’inscrivent encore à leuractif. Quand on ajoute 31 taxations d’habitants de Laneuveville, sur la rive gauchede la Meurthe en face de Raon, on atteint un total de 236 inscriptions. A unedizaine de kilomètres en aval, Baccarat intervient également pour une part nonnégligeable dans le trafic (49 impositions). Azerailles est mentionné à une reprise;Saint-Nicolas-de-Port, haut lieu du commerce lorrain, deux fois seulement. La partmédiocre du bois dans les échanges portois a été relevée par Odette Kammerer-Schweyer qui, pour le XVIe siècle, souligne toutefois le rôle de quelques grandsmarchands locaux (Chavenel, Dieu et Go) et a repéré des opérations d’envergure30 .
Les autres localités d’origine sont riveraines ou proches d’affluents de la Meurthe:Celles (12 taxations) et Vexaincourt (1) sur la Plaine, Badonviller (5) et Ogéviller(1) dans le bassin de la Vezouse, Rambervillers (1) sur la Mortagne. S’y ajoute unimposé de La Bourgonce au nord-ouest de Saint-Dié.
27 Disposés en leur long, douze ou quinze de front, deux ou trois estons posez l’un sur l’autre, les troncsforment une voiture [qui] peut comprendre 30 à 45 sapins (Voyage de Philippe de Hurges à Liège et àMaastricht en 1615, édit. H. MiCHELANT, Liège 1872, p. 127-128, cité par M. Suttor (voir note 4),p. 120).
28 Sur les planches ou le mairien trouvent également place du millet, des tonneaux, un coffre avec desmeubles, des saurets et des fardeaux (?). Ce mode de transport des meules est encore attesté au milieudu XIXe siècle (O. Guatelli (voir note 13), p. 54).
29 Ibidem, p. 53.30 O. Kammerer-Schweyer, La Lorraine des marchands à Saint-Nicolas-de-Port (du 14e au 16e siècle)(Recueil de documents sur l’histoire de Lorraine, t. 26), Saint-Nicolas-de-Port 1985, p. 90.
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Quelques flotteurs réapparaissent de compte en compte (Tableau III). Totalisant 50passages entre 1476 et 1498 (15 exercices), intervenant à 6 reprises en 1480 et1489, Hermant de Raon domine ce petit groupe. Il ne s’agit toutefois pas d’unentrepreneur autonome mais, certainement jusqu’en 1483, du valet de Jehan Canot(ou Jehan de Raon). A en croire les écritures comptables, 4 passages associent leRaonnais et un autre voileur. Didier prevost de Celles en 1480, un compagnon nonprécisé en 1492, Cugnin de Baccarat à deux reprises en 1493. La part prise par legrant Claude de Raon, acquittant 35 fois le droit entre 1489 et 1500, culmine avec 7passages en 1497 (maximum absolu pour une même personne). Deux de sescollègues, le maire Girart de Laneuveville (ou de Raon) et Henry de Baccarat,dépassent également la barre des 30 impositions. Les membres de la familleFolleware de Raon (ou de Laneuveville), leurs concitoyens Jehan Thiriet - 13 foispar l'intermédiaire d’un valet - et Warnier sont mentionnés à une vingtaine dereprises. Pour cerner au mieux le dynamisme de ces transporteurs, il faudrait établirleur éventuelle participation au commerce d’autres articles. Ceci requerrait l’étudesystématique des comptes du péage et de toutes les sources disponibles. Ainsi lafamille Cachot (ou Cachet) de Raon, qui déclare des trains de bois à 10 reprises,occupe-t-elle une place toute particulière dans le milieu local des affaires. A la findu XVe siècle, Jean Bagadour dit Cachet, le plus important marchand de la place,est fort actif dans le négoce des vins, intervient occasionnellement dans celui desdraps et est créancier du duc de Lorraine31.
La destination des planches et du mairien est généralement tue. Tout au plusconnaît-on quelques ventes à Nancy et le passage en franchise, en février et juin1495, de bois destinés aux édifices ducaux à Pont-à-Mousson32. A Frouard, lestrains rejoignent la vallée mosellane en direction de Metz, Thionville, Sierck,Trêves . . . Aux dires des chroniques messines, les premiers seraient passés danscette ville en novembre 149833. Les comptes du péage lorrain de Sierck, consignanten octobre 1425 l’imposition de deux flottes dirigées par un Messin, infirment lepropos34. La Moselle ne deviendrait toutefois une véritable «route du bois» quedans le dernier quart du XVe siècle. Au cours des exercices 1474/75, 1481, 1483,1484, 1486 et 1494, 55 800 planches sont taxées au bureau de Sierck. 10 850unités, en 8 convois, sont inscrites au nom de flotteurs de Bergartten, alias
31 M. SCHNEIDER (voir note 10), p. 76; M. Maguin, La vigne et le vin en Lorraine. L’exemple de laLorraine médiane à la fin du Moyen Age, Nancy 1982, p. 255-258; O. SCHWEYER (voir note 9),p. 51.
32 Pour ces bâtiments, des Raonnais livrent également des planches de sapin en 1497 (M. Schneider(voir note 10), p. 78).
33 Aussi en celluy temps, fut passé et consenti par messeigneurs de la cité que les wallours meneroientleurs planches et sappins parmy la cité en paiant certaine somme d’argent qui estoit accordée. Etencommençont à passer, le dix neufviesme jour de novembre (J.-F. HUGUENIN, Les Chroniques de laville de Metz, Metz 1838, p. 627). Cf. aussi F. de Chanteau, Essai sur l’industrie et le commerce àMetz du quatorzième au seizième siècle, Bourg 1897, p. 35-36.
34 J.-M. Yante (voir note 17), t. 1, p. 77. Dès le milieu du XVe siècle, la municipalité tréviroise effectuedes achats de planches à Metz ou auprès de marchands messins (M. Matheus (voir note 11), p.45).
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Quelques flotteurs réapparaissent de compte en compte (Tableau III). Totalisant 50passages entre 1476 et 1498 (15 exercices), intervenant à 6 reprises en 1480 et1489, Hermant de Raon domine ce petit groupe. Il ne s’agit toutefois pas d’unentrepreneur autonome mais, certainement jusqu’en 1483, du valet de Jehan Canot(ou Jehan de Raon). A en croire les écritures comptables, 4 passages associent leRaonnais et un autre voileur. Didier prevost de Celles en 1480, un compagnon nonprécisé en 1492, Cugnin de Baccarat à deux reprises en 1493. La part prise par legrant Claude de Raon, acquittant 35 fois le droit entre 1489 et 1500, culmine avec 7passages en 1497 (maximum absolu pour une même personne). Deux de sescollègues, le maire Girart de Laneuveville (ou de Raon) et Henry de Baccarat,dépassent également la barre des 30 impositions. Les membres de la familleFolleware de Raon (ou de Laneuveville), leurs concitoyens Jehan Thiriet - 13 foispar l'intermédiaire d’un valet - et Warnier sont mentionnés à une vingtaine dereprises. Pour cerner au mieux le dynamisme de ces transporteurs, il faudrait établirleur éventuelle participation au commerce d’autres articles. Ceci requerrait l’étudesystématique des comptes du péage et de toutes les sources disponibles. Ainsi lafamille Cachot (ou Cachet) de Raon, qui déclare des trains de bois à 10 reprises,occupe-t-elle une place toute particulière dans le milieu local des affaires. A la findu XVe siècle, Jean Bagadour dit Cachet, le plus important marchand de la place,est fort actif dans le négoce des vins, intervient occasionnellement dans celui desdraps et est créancier du duc de Lorraine31 .
La destination des planches et du mairien est généralement tue. Tout au plusconnaît-on quelques ventes à Nancy et le passage en franchise, en février et juin1495, de bois destinés aux édifices ducaux à Pont-à-Mousson32 . A Frouard, lestrains rejoignent la vallée mosellane en direction de Metz, Thionville, Sierck,Trêves . . . Aux dires des chroniques messines, les premiers seraient passés danscette ville en novembre 1498 33 . Les comptes du péage lorrain de Sierck, consignanten octobre 1425 l’imposition de deux flottes dirigées par un Messin, infirment lepropos34 . La Moselle ne deviendrait toutefois une véritable «route du bois» quedans le dernier quart du XVe siècle. Au cours des exercices 1474/75, 1481, 1483,1484, 1486 et 1494, 55 800 planches sont taxées au bureau de Sierck. 10 850unités, en 8 convois, sont inscrites au nom de flotteurs de Bergartten, alias
31 M. SCHNEIDER (voir note 10), p. 76; M. Maguin, La vigne et le vin en Lorraine. L’exemple de laLorraine médiane à la fin du Moyen Age, Nancy 1982, p. 255-258; O. SCHWEYER (voir note 9),p. 51.
32 Pour ces bâtiments, des Raonnais livrent également des planches de sapin en 1497 (M. Schneider(voir note 10), p. 78).
33 Aussi en celluy temps, fut passé et consenti par messeigneurs de la cité que les wallours meneroientleurs planches et sappins parmy la cité en paiant certaine somme d’argent qui estoit accordée. Etencommençont à passer, le dix neufviesme jour de novembre (J.-F. HUGUENIN, Les Chroniques de laville de Metz, Metz 1838, p. 627). Cf. aussi F. de Chanteau, Essai sur l’industrie et le commerce àMetz du quatorzième au seizième siècle, Bourg 1897, p. 35-36.
34 J.-M. Yante (voir note 17), t. 1, p. 77. Dès le milieu du XVe siècle, la municipalité tréviroise effectuedes achats de planches à Metz ou auprès de marchands messins (M. Matheus (voir note 11), p.45).
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Beauregard, forteresse ducale dominant Raon-1’Étape35. Dix autres impositions sontacquittées par des habitants de Raon. S’agit-il de la localité susmentionnée, deRaon-sur-Plaine ou de Raon-les-Leau, ces deux dernières sur un affluent de laMeurthe descendant du Donon, ou encore de Raon-aux-Bois au nord-ouest deRemiremont, à 5 kilomètres de la Moselle?36 Si la plupart des voileurs viennentprobablement des régions de la haute Meurthe, il s’en faut qu’ils conservent lemonopole ou un quasi-monopole au large de Sierck: des Messins interviennent à 24reprises et déclarent 23 550 planches; un Thionvillois, deux Trévirois et un individude Bernkastel, en aval de la cité archiépiscopale, prennent part également au trafic.Au stade actuel des recherches, on ignore où les Vosgiens - certains d’entre eux àtout le moins - passent le relais.
Pour trois exercices (1481, 1483 et 1494), on dispose des comptes des péages deNancy et de Sierck, distants d’une centaine de kilomètres. Aucun Raonnais ouflotteur de la haute Meurthe ne passe au second poste en 1481; un seul y estmentionné en 1483: taxation le 16 septembre de 1750 planches menées par Peter deBergartten. Absent du registre nancéien - aucune voile n’y est consignée entre le 12mai et le 4 octobre -, celui-ci aurait-il bénéficié d’un régime de franchise? En 1494,neuf convois dirigés par des Raonnais transitent par Sierck (Tableau IV). D’aucunsy acquittent le droit huit à quinze jours après leur passage dans la capitale: Warnierde Raon (8 et 19 janvier), Henry de Baccarat ou son mandant Jeha(i)n Thiriet (28février et 15 mars), ce dernier lui-même (9 et 16 juin). Pour les six autresimpositions, la concordance ne peut être rigoureusement établie. Il est probable quecertains trains sont déclarés tantôt au nom de leur propriétaire, tantôt à celui dupatron-flotteur, tantôt encore à celui d’un de ses préposés. La pratique attestée del’association - pour la commercialisation et / ou le transport - est également sourcede confusions.
En attendant que soient mis en œuvre les comptes nancéiens des premièresdécennies du XVIe siècle, les documents sierckois livrent un précieux indice del’importance prise à cette époque par l’exportation des bois vosgiens. Couvrant unpeu plus de neuf ans entre 1520 et 154937, les cahiers consignent 165 taxationstotalisant quelque 300 000 planches. Dans l’état actuel des connaissances, leschiffres culminent en 1549 (48 600 unités). Des flotteurs de Bergartten acquittentdes droits pour 168 450 planches. Si on y ajoute les impositions payées par deshabitants de Raon, on atteint 222 650. A côté des Vosgiens, les autres transporteurs,originaires de Metz (12 900 planches), Thionville (2 800), Trêves (11690),Coblence (11 150), Andernach sur le Rhin (16 000). . ., font piètre figure38.
35 P. Marichal, Dictionnaire topographique du département des Vosges, Paris 1941, p. 35. Sur cechâteau, dont la propriété exclusive est reconnue au duc de Lorraine en 1279: M. SCHNEIDER (voirnote 10), p. 40, 42 et 49-51.
36 Le passage de 1 700 planches par Nicolay de Remiremont, en 1486, convie à ne pas rejeter la dernièrehypothèse. Par ailleurs, l’homonymie d’individus de Bergartten et de Raon ne constitue pas unélément décisif.
37 Années 1520, 1524, 1525, 1530, 1534 (partim), 1535, 1537, 1545, 1547, 1549 et fragment non daté(entre 1531 et 1533).
38 J.-M. Yante (voir note 17), t. 1, p. 120-122 et 165.
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Beauregard, forteresse ducale dominant Raon-1’Étape35 . Dix autres impositions sontacquittées par des habitants de Raon. S’agit-il de la localité susmentionnée, deRaon-sur-Plaine ou de Raon-les-Leau, ces deux dernières sur un affluent de laMeurthe descendant du Donon, ou encore de Raon-aux-Bois au nord-ouest deRemiremont, à 5 kilomètres de la Moselle?36 Si la plupart des voileurs viennentprobablement des régions de la haute Meurthe, il s’en faut qu’ils conservent lemonopole ou un quasi-monopole au large de Sierck: des Messins interviennent à 24reprises et déclarent 23 550 planches; un Thionvillois, deux Trévirois et un individude Bernkastel, en aval de la cité archiépiscopale, prennent part également au trafic.Au stade actuel des recherches, on ignore où les Vosgiens - certains d’entre eux àtout le moins - passent le relais.
Pour trois exercices (1481, 1483 et 1494), on dispose des comptes des péages deNancy et de Sierck, distants d’une centaine de kilomètres. Aucun Raonnais ouflotteur de la haute Meurthe ne passe au second poste en 1481; un seul y estmentionné en 1483: taxation le 16 septembre de 1750 planches menées par Peter deBergartten. Absent du registre nancéien - aucune voile n’y est consignée entre le 12mai et le 4 octobre -, celui-ci aurait-il bénéficié d’un régime de franchise? En 1494,neuf convois dirigés par des Raonnais transitent par Sierck (Tableau IV). D’aucunsy acquittent le droit huit à quinze jours après leur passage dans la capitale: Warnierde Raon (8 et 19 janvier), Henry de Baccarat ou son mandant Jeha(i)n Thiriet (28février et 15 mars), ce dernier lui-même (9 et 16 juin). Pour les six autresimpositions, la concordance ne peut être rigoureusement établie. Il est probable quecertains trains sont déclarés tantôt au nom de leur propriétaire, tantôt à celui dupatron-flotteur, tantôt encore à celui d’un de ses préposés. La pratique attestée del’association - pour la commercialisation et / ou le transport - est également sourcede confusions.
En attendant que soient mis en œuvre les comptes nancéiens des premièresdécennies du XVIe siècle, les documents sierckois livrent un précieux indice del’importance prise à cette époque par l’exportation des bois vosgiens. Couvrant unpeu plus de neuf ans entre 1520 et 154937 , les cahiers consignent 165 taxationstotalisant quelque 300 000 planches. Dans l’état actuel des connaissances, leschiffres culminent en 1549 (48 600 unités). Des flotteurs de Bergartten acquittentdes droits pour 168 450 planches. Si on y ajoute les impositions payées par deshabitants de Raon, on atteint 222 650. A côté des Vosgiens, les autres transporteurs,originaires de Metz (12 900 planches), Thionville (2 800), Trêves (11690),Coblence (11 150), Andernach sur le Rhin (16 000). . ., font piètre figure38 .
35 P. Marichal, Dictionnaire topographique du département des Vosges, Paris 1941, p. 35. Sur cechâteau, dont la propriété exclusive est reconnue au duc de Lorraine en 1279: M. SCHNEIDER (voirnote 10), p. 40, 42 et 49-51.
36 Le passage de 1 700 planches par Nicolay de Remiremont, en 1486, convie à ne pas rejeter la dernièrehypothèse. Par ailleurs, l’homonymie d’individus de Bergartten et de Raon ne constitue pas unélément décisif.
37 Années 1520, 1524, 1525, 1530, 1534 (partim ), 1535, 1537, 1545, 1547, 1549 et fragment non daté(entre 1531 et 1533).
38 J.-M. Yante (voir note 17), t. 1, p. 120-122 et 165.
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Quand, en riposte à Y entrée et issue foraine lorraine ou Fredault, les autoritésluxembourgeoises instaurent un contre-impôt sur les denrées et marchandises enprovenance ou à destination des duchés de Lorraine et de Bar, du comté deVaudémont et du marquisat de Pont-à-Mousson, plus de 120 000 planches de sapin,en 70 flottes, sont taxées à Thionville entre mai 1561 et septembre 1571, Avec 28inscriptions, les voileurs de Bergartten (Beauregard) arrivent en tête, devançantnettement ceux de Remiremont (14 impositions), Sierck (9) et Rettel (5)39.
39 J.-M. Yante, Réactions luxembourgeoises à la politique douanière de Nicolas de Vaudémont etCharles III de Lorraine, in: Annales de l’Est, 5e série, 36 (1984), p. 206 et 208,
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Quand, en riposte à Yentrée et issue foraine lorraine ou Fredault, les autoritésluxembourgeoises instaurent un contre-impôt sur les denrées et marchandises enprovenance ou à destination des duchés de Lorraine et de Bar, du comté deVaudémont et du marquisat de Pont-à-Mousson, plus de 120 000 planches de sapin,en 70 flottes, sont taxées à Thionville entre mai 1561 et septembre 1571, Avec 28inscriptions, les voileurs de Bergartten (Beauregard) arrivent en tête, devançantnettement ceux de Remiremont (14 impositions), Sierck (9) et Rettel (5)39 .
39 J.-M. Yante, Réactions luxembourgeoises à la politique douanière de Nicolas de Vaudémont etCharles III de Lorraine, in: Annales de l’Est, 5e série, 36 (1984), p. 206 et 208,
8.1 Warnier de Raon 2 c.+¡9.1 Wemier de Raon 1100 pl.28.11 Jehan de Badonviller5 3 c.+28.11 Henry de Baccarat6 1 c.; 1 c.+5.III Cugnin de Baccarat 3 c.+9.III Henry de Baccarat 2 c.+
14.III le grant Claude de Raon 3 c.+15.III Jehain Canot de Raon 3000 pl.15.III Jehain Thiriet de Raon 2300 pl.21.III Claude, maire de Vexaincourt 3 c.+5.IV Nicolas de Raon 800 pl.
18.IV Herman de Raon 3 c.+18.IV Jehan Thiriet de Raon 3 c.+23.IV Jehain Canot de Raon 2500 pl.5.V Henry de Baccarat 4 c.5.V Claude de Raon 2 c.
16.V Jehain Thiriet de Raon 1800 pl.27.V Jehain Thiriet [de Raon] 2 c.;l v.m.2.VI Cugnin de Baccarat 4 c.+2.VI Henry de Raon 1000 pl.9.VI le maire Girart [de Raon7] 1 v.m.9.VI le grant Claude de Raon 3 c.+;l b.m.9.VI Jehain Thiriet de Raon 2 c.+;l b.m.
16.VI Jehain Thiriet [de Raon] 1200 pl.22.VI Henry de Raon 3 c.+3.VII Jehain Thiriet de Raon 900 pl.
25. VII Henry de Baccarat 2 c.+4.X Harman de Raon 2 c.;l v.m.6.X Henry de Baccarat 4Vi c.
12.XI Harmant de Raon 3 c.;lv.m.12.XI Henry de Baccarat 2 c.12.XI Claude de Raon 1 c.;l v.m.25.XI le maire Girart de Laneuveville 2 c.9.XII Henry, serviteur de Jehan Thiriet 1 c.;2 v.m.
de Raon
1 B 75633 B 93603 b. : bosset (planches ou mairien)
c. : corroyé de planches
c.+ : corroyé de planches (avec supplément de droit)m. : mairien
v, : voiture
4 pl : planches5 pour Jehan Cachot de Raon6 pour Jehan Thiriet de Raon7 ou de Laneuveville
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TABLEAU IV
PASSAGES DE BOIS A NANCY ET SIERCK EN 1494
date NANCY 1 SIERCK2
imposé quantité 3 imposé quantité4
8.1 Warnier de Raon 2 c.+
¡9.1 Wemier de Raon 1100 pl.28.11 Jehan de Badonviller5 3 c.+
28.11 Henry de Baccarat6 1 c.; 1 c.+
5.III Cugnin de Baccarat 3 c.+9.III Henry de Baccarat 2 c.+
14.III le grant Claude de Raon 3 c.+
15.III Jehain Canot de Raon 3000 pl.15.III Jehain Thiriet de Raon 2300 pl.21.III Claude, maire de Vexaincourt 3 c.+
5.IV Nicolas de Raon 800 pl.18.IV Herman de Raon 3 c.+18.IV Jehan Thiriet de Raon 3 c.+
23.IV Jehain Canot de Raon 2500 pl.5.V Henry de Baccarat 4 c.5.V Claude de Raon 2 c.16.V Jehain Thiriet de Raon 1800 pl.27.V Jehain Thiriet [de Raon] 2 c.;l v.m.2.VI Cugnin de Baccarat 4 c.+2.VI Henry de Raon 1000 pl.9.VI le maire Girart [de Raon 7 ] 1 v.m.9.VI le grant Claude de Raon 3 c.+;l b.m.9.VI Jehain Thiriet de Raon 2 c.+;l b.m.16.VI Jehain Thiriet [de Raon] 1200 pl.22.VI Henry de Raon 3 c.+
3.VII Jehain Thiriet de Raon 900 pl.25.VII Henry de Baccarat 2 c.+
4.X Harman de Raon 2 c.;l v.m.6.X Henry de Baccarat 4Vi c.12.XI Harmant de Raon 3 c.;lv.m.12.XI Henry de Baccarat 2 c.12.XI Claude de Raon 1 c.;l v.m.25.XI le maire Girart de Laneuveville 2 c.9.XII Henry, serviteur de Jehan Thiriet 1 c.;2 v.m.
de Raon
1 B 75633 B 93603 b. : bosset (planches ou mairien)
c. : corroyé de planchesc.+ : corroyé de planches (avec supplément de droit)m. : mairienv, : voiture
4 pl : planches5 pour Jehan Cachot de Raon6 pour Jehan Thiriet de Raon7 ou de Laneuveville
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Carte: Origine des imposés au péage de Nancy[Erratum: sur l’échelle de la carte, lire «0 5 10... km» au lieu de «0 10 20... km»]
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Carte: Origine des imposés au péage de Nancy[Erratum: sur l’échelle de la carte, lire «0 5 10... km» au lieu de «0 10 20... km»]