République algérienne démocratique et populaire Ministère de l’Enseignement supérieur et la Recherche scientifique Université Mohamed Seddik Ben Yahia - Jijel Faculté des lettres et des langues Département des lettres et langue française N°-d’ordre : N°-de série : Mémoire élaboré en vue de l’obtention du diplôme de MASTER Spécialité : Sciences du langage Sujet ; Présenté par : Sous la direction de : MEZZANE Ratiba BOUKRA Mourad Membres du jury : Président : AYAD Abderrahmane Rapporteur : BOUKRA Mourad Examinateur : BOUACHE Nasredine Année universitaire : 2019/2020 Analyse sémiologique des graffitis en milieu urbain Cas des graffitis de Banksy
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République algérienne démocratique et populaire
Ministère de l’Enseignement supérieur et la Recherche scientifique
Université Mohamed Seddik Ben Yahia - Jijel
Faculté des lettres et des langues
Département des lettres et langue française
N°-d’ordre :
N°-de série :
Mémoire élaboré en vue de l’obtention du diplôme de MASTER
Spécialité : Sciences du langage
Sujet ;
Présenté par : Sous la direction de :
MEZZANE Ratiba BOUKRA Mourad
Membres du jury :
Président : AYAD Abderrahmane
Rapporteur : BOUKRA Mourad
Examinateur : BOUACHE Nasredine
Année universitaire : 2019/2020
Analyse sémiologique des graffitis en milieu urbain
Cas des graffitis de Banksy
République algérienne démocratique et populaire
Ministère de l’Enseignement supérieur et la Recherche scientifique
Université Mohamed Seddik Ben Yahia - Jijel
Faculté des lettres et des langues
Département des lettres et langue française
N°-d’ordre :
N°-de série :
Mémoire élaboré en vue de l’obtention du diplôme de MASTER
Spécialité : Sciences du langage
Sujet ;
Présenté par : Sous la direction de :
MEZZANE Ratiba BOUKRA Mourad
Membres du jury :
Président : AYAD Abderrahmane
Rapporteur : BOUKRA Mourad
Examinateur : BOUACHE Nasredine
Année universitaire : 2019/2020
Analyse sémiologique des graffitis en milieu urbain
Cas des graffitis de Banksy
Remerciements
« Le plus grand merci s’adresse à Dieu »
Je tiens à exprimer toutes mes reconnaissances à mon directeur de mémoire,
Monsieur BOUKRA Mourad pour son encadrement, son orientation et ses
conseils.
Mes remerciements vont également aux membres du jury, qui ont accepté et qui
vont évaluer la qualité de mon modeste travail.
Dans l’impossibilité de citer tous les noms, mes sincères remerciements vont à
tous ceux et celles, qui de près ou de loin, ont permis par leurs conseils et leurs
compétences la réalisation de ce mémoire.
De tous mon cœur, MERCI
Dédicace
A tous les membres de ma famille, petits et grands…
Résumé :
Etant un moyen de communication et d’expression culturel, est le graffiti devenu un
phénomène universel et incontestable qui s’affiche aujourd’hui sur une grande partie des murs
des espaces urbains. Il occupe désormais une place à part entière dans l’art contemporain à
travers une explosion de créativité et de nouvelles idées qu’on appelle le street art
qu’exposent des artistes de monde entier dans les rues.
La présente étude propose d’accomplir une analyse sémiologique de quelques graffitis
réalisés par le célèbre street artiste britannique Banksy. Cette analyse est basée sur la méthode
de Roland Barthes qui repose sur la dénotation et la connotation, ainsi sur une grille d’analyse
adoptée selon les composants de chaque graffiti, afin de pouvoir décrypter sa signification
cachée.
Mots clés : graffiti, communication, espace urbain, street art, Banksy, sémiologie,
dénotation, connotation, signification.
الملخص :
و التي فیھا نقاشوالتعبیر الثقافي، أصبحت الكتابة على الجدران ظاھرة عالمیة لا للتواصل كوسیلة
في الفن المعاصر ة مكانة كامل باتت تشغلجزء كبیر من جدران المساحات الحضریة. تظھر الیوم على
فنانون من جمیع أنحاء والتي یعرضھا ،فن الشارع یھاسمنالأفكار الجدیدة التي فجار الإبداع وان من خلال
الشوارع. في العالم
التي رسمھا فنان الشارع الكتابات الحائطیة لبعض بالتحلیل السیمیائي القیام تقترح الدراسة الحالیة
مفھوم الدلالة التي تعتمد على رولان بارت""على طریقة یستند . ھذا التحلیل"بانكسي"البریطاني الشھیر
جل لأ كتابة حائطیة، وھذاوفقا لمكونات كل تم اعتمادھا ، وكذلك على شبكة تحلیل و الدلالة الاصطلاحیة
التمكن من فك معناھا الخفي.
الكتابة الحائطیة، التواصل، الحیز الحضري، فن الشارع، بانكسي، التحلیل مفتاحیة:الكلمات ال
etc.), des personnages célèbres ou des personnes âgées. (Michela, 2020)
Chapitre I Du graffiti au street art
26
4. Graffiti, un nouveau vecteur de communication
La communication est la base de la société. Elle est à l’origine des différentes relations
entre les individus. En effet, le graffiti fait partie des moyens d’expression utilisé dans un
espace urbain. Par l’intermédiaire de ses peintures et dessins réalisés dans les murs, les
graffeurs veulent toujours véhiculer une pensée, dénoncer une situation et faire passer des
messages, souvent obscurés et codés, au large public.
Selon le graffeur français Hope, le graffiti est « un outil de communication avant-
gardiste, puisque c’est un médium qui nous permet de communiquer avec les gens et de leur
raconter des histoires ». (Cité par Puech,op. cit., p. 48). Le graffiti serait donc une sorte de
manifestation humaine, c’est un vecteur de communication informelle au sein de la société.
5. Graffiti, une pratique contre-culturelle
La contre-culture est un terme qui prend son véritable essor au cours des années 60, plus
précisément, aux États-Unis et au Royaume-Uni, puis s’est répandu dans la plus grande partie
du monde occidentale. En effet, ce terme a été utilisé par le sociologue Théodore Rozsak dans
son ouvrage The Making of a Counter-Culture à la fin des années 60, période d’une révolte
globale contre les autorités. (Maud SZTERN, 2013/2014, p. 6). Cette appellation a d’abord
été associée aux mouvements d’oppositions culturelles (le surréalisme, les arts de la rue, la
musique contestataire, le mouvement hippie…), puis se diversifié au début des années 70.
De manière générale, la contre-culture c’est, comme la culture, un ensemble de
manifestations culturelles, de valeurs ou de normes qui s’opposent à la culture dominante ou
la rejette. A ce propos, Kheira Belhadj-Ziane présente le mouvement graffiti comme « une
contre-culture populaire, urbaine et juvénile ». (Cité par Nicolas,op. cit., p. 258). Sa vision
s’oppose à celle du Pierre Bourdieu, selon laquelle cette culture « serait un dérivé impur de la
culture savante, et qu’elle ne serait donc qu’une réinterprétation de ce qui existe déjà. En
d’autres termes, il s’agirait de penser que le peuple n’a pas de culture propre du fait de son
incapacité à créer, que le peuple ne dispose pas d’esprit critique si bien qu’il est obligé de
suivre les normes imposées par les dominants ».(Ibid.)
De ce fait, on peut dire que le graffiti reste une pratique issue de la contre-culture de par
son histoire, les valeurs qu’elles véhiculent et de son regard sur la société.
Chapitre I Du graffiti au street art
27
Conclusion
Ce premier chapitre nous a permis de comprendre la genèse du graffiti et du street art,
leurs différents styles et la diversité de leurs techniques. Il nous a aussi éclairés sur le statut de
cet art, pris entre le monde de la rue et celui des galeries d’art.
Chapitre II
Autour de la sémiologie de
l’image
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
29
Introduction
Le traitement de l’image est une discipline qui ne date pas d’hier. Il suscite un vif
intérêt de plusieurs chercheurs qui se sont livrés à l’exploration des différentes théorisations
témoignant de la complexité de la notion d’« image ».
En effet, on se doit de savoir que pour analyser et interpréter l’image, la sémiologie est
d’un grand secours. Cette science récente, qui trouve ses origines dans les recherches
structuralistes, aborde la question de l’image sous l’angle de la signification. Ceci dit que,
pour entamer une recherche qui sera consacrée à la sémiologie de l’image, nous devons
circonscrire en premier lieu la discipline en question en abordant les notions théoriques qui
s’y rapportent. Dans ce sillage, nous aborderons l’apport des trois figures emblématiques de
ce mouvement, qui sont Ferdinand De Saussure, Roland Barthes et Charles Sandres Peirce.
I. Sémiologie/ Sémiotique
1. Essai de définition
Le terme « sémiologie » a des origines très anciennes. Il est construit à partir du mot
grec (séméion) qui signifie signe. Il était question d’une discipline médicale que l’on trouve
dès l’Antiquité grecque, et qui s’intéresse à l’étude des symptômes des différentes maladies.
Dans ce sens, ce terme peut être défini, en première approche, comme la doctrine ou la
science des signes (séméion « signe » et logos « science »).
En sciences humaines, la sémiologie est une discipline récente qui a vu le jour à partir
des travaux du logicien Charles Sandre Peirce en Amérique et du linguiste Ferdinand De
Saussure en Europe aux débuts du XXe siècle. Elle fait suite à une appellation déjà proposée
par le philosophe LOCKE John qui lui donne le sens de « connaissance des signes ».
Au sens saussurien du terme, la sémiologie est « la science qui étudie la vie des signes
au sein de la vie sociale ; elle formerait une partie de la psychologie sociale, et par conséquent
de la psychologie générale ». (1916, p. 33) Par ailleurs, Peirce affirme que la sémiotique
n'est qu'un autre nom de la logique, c’est-à-dire « la doctrine quasi nécessaire ou formelle
des signes» (Abadi, p. 5)
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
30
Selon le Dictionnaire de linguistique, la sémiologie « est la science des grandes unités
signifiantes du discours : on note qu'une telle définition de la sémiologie la rapproche de la
sémiotique, étude des pratiques signifiantes prenant pour domaine le texte » (1994, p. 426)
De ce fait, les dictionnaires et les encyclopédies évoquent les deux traditions
(sémiotique/sémiologie) comme s’ils étaient synonymes. Cependant, Martine Joly dans son
ouvrage « Introduction à l’analyse de l’image » estime que les deux termes ne sont pas tout à
fait synonymes. Elle précise que le premier terme canonique, d’origine américaine, désigne la
sémiotique comme philosophie des langages. Alors que le deuxième, d’origine européenne est
compris comme l’étude de langages particuliers (image, gestuelle, etc.) (1993, p. 22)
De là, on déduit que la sémiologie s’est développée dans le cadre de la théorie
structuraliste. Elle tend à se construire comme une science de la signification qui vise à
comprendre le processus de production du sens. A contrario, la sémiotique, dont sa seule
tâche est la forme, est une technique de recherche qui tend à décrire le fonctionnement de la
communication et de la signification. Elle s’est développée dans le cadre de la théorie
pragmatique dont Peirce est l’un des fondateurs.
2. Les niveaux des études sémiologiques
Umberto Eco a fait la distinction entre les aspects de la sémiotique qui peuvent être
envisagés selon trois niveaux :
La sémiotique générale, vise à construire et structurer un objet théorique, et à
développer un modèle purement formel. Ce niveau est de nature philosophique et concerne
généralement la théorie de connaissance.
Les sémiotiques spécifiques, sont d’ordre grammatical, c’est-à-dire qu’elles englobent la
syntaxe, la sémantique et la pragmatique ; elles sont chargées d’étudier des systèmes de signes
particuliers tels que ceux de l’image ou du cinéma. (Joly, 2011, p. 26)
La sémiotique appliquée, « est une méthode d’analyse dont la rigueur se fonde sur
l’utilisation des outils sémiotiques et ce qu’ils supposent de consensus socio-culturel
s’opposant aux interprétations non justifiées, « impressionnistes », ou trop aléatoires. » (Ibid.)
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
31
3. Pères fondateurs et théories principales de la sémiologie
3.1 Ferdinand De Saussure
Après la publication de son ouvrage Cours de la Linguistique Générale en 1916, le
genevois F. De Saussure (1875-1913) est considéré comme le père fondateur de la
linguistique moderne et le précurseur européen de la sémiologie. Il prétend également que la
sémiologie devrait avoir pour objet d'étude "la vie des signes au sein de la vie sociale". A
partir de cette conception, la linguistique serait une partie de la science générale qui étudie
tous les systèmes de signes.
De Saussure envisage le langage comme un
système de signe, lequel est défini de façon
précise comme étant une entité à deux faces
indissociables (une réalité biface). Il s’agit
précisément d’un signifié qui désignera le
concept que l’on associait de façon arbitraire et
conventionnelle à un signifiant qui est la face
matérielle. Cette association relevant d’un
processus psychique est représenté, selon
l’acception saussurienne, sous la forme bien
connue Sé/Sa.
3.2 Charles Sandres Peirce : (1839-1914) (logicien et sémiologue américain) Il est
considéré comme l’un des deux pères de la sémiologie moderne.
Selon Peirce, le signe est constitué par une relation triadique de ses composants. Il est
«quelque chose qui tient lieu pour quelqu’un de quelque chose sous quelque rapport ou à
quelque titre » (1978, p. 215). Pour lui « […] il considérait le signe comme un objet, une
entité à trois termes, un représentamen, un objet et un interprétant » (Cité par Joly, 1993, p.
26). Dans cette définition, Peirce met en évidence la relation qu’entretiennent les trois pôles
de signe : représentamen, objet et interprétant (c'est-à-dire un référent au sens strict, fixé, sans
lequel le signe n'existerait pas).
Concept
------------------------
Image acoustique
Figure 7 : Le signe d’après le schéma de F. de Saussure
(1916)
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
32
En effet, ses travaux amènent à établir une typologie de signe à trois pôles. On peut les
schématiser comme suit :
La classification élaborée par Peirce est utile pour connaitre le fonctionnement de
l’image perçue comme signe. Cependant, cette classification ne dépende pas de la relation de
signifiant avec le signifié, mais plutôt avec le référent.
3.3 Roland Barthes : (1915 -1980), (critique littéraire et sémiologue français)
Roland Barthes inversera la proposition saussurienne, à propos du lien entre la
linguistique et la sémiologie évoqué par Saussure, pour annoncer que « la linguistique n’est
pas une partie, même privilégiée, de la science générale des signes, c’est la sémiologie qui est
une partie de la linguistique »(Elément de sémiologie, 1989, p. 81). Sa sémiologie s’intéresse,
en effet, à tous types de signes tout en soulignant l’importance de la langue. Pour lui, « tout
système sémiologique se mêle de langage » (Barthes, op. cit)
En effet, le « savoir lire de l’image » est construit à partir de ses innombrables travaux
de recherche, et par conséquent l’ont amené plus tard à aborder un domaine de recherche
particulier, à savoir la sémiologie de l’image dans son article « Rhétorique de l’image » paru
dans la revue Communications en 1964. De plus, son apport primordial s’attelle
Symbole
C’est une
représentation qui
porte le sens.
Il entretient avec ce
qu’il représente une
relation
conventionnelle.
Indice Icone
C’est indicateur
d’une chose
manifestée, c’est-à-
dire qu’il entretient
une relation de
cause à effet avec
ce qu’il représente.
Il est défini comme
un signe qui a un
rapport d’analogie
entre le signifiant et
le référent.
Il entretient une
relation à similitude
avec ce qu’il
représente.
Figure 8 : Typologie du signe selon Peirce.
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
33
principalement à la sémiologie de la signification qui s’intéresse à l’objet en tant que
signifiant.
4. Les deux courants de la sémiologie
Le développement de la sémiologie a connu l’émergence de deux courants
sémiologiques : la sémiologie de la communication et la sémiologie de la signification
4.1 La sémiologie de la signification
Comme nous l’avons mentionné précédemment, R. Barthes est l’un des précurseurs de
la sémiologie de la signification. Ses travaux l’ont amené à s’intéresser à tous les systèmes de
signes, notamment les pratiques socio-historiques (littérature, mythe, religion, photographie,
image, etc.). Elle se rapporte généralement à l’univers de l’interprétation et du sens. En effet,
les partisans de ce courant voient que tout code est pourvu de sens et peut être analysé et
interprété. La sémiologie peut donc interpréter des phénomènes de société, des systèmes de
signes et la valeur symbolique de certains faits sociaux.
4.2 La sémiologie de la communication
Par opposition au premier courant sémiologique, la sémiologie de la communication,
qui s’est développée particulièrement dans les travaux de G.Mounin, L.J.Preito et E.Buysses,
s’intéresse uniquement au monde des signes. Ses sémioticiens limitent leurs champs
d’investigations aux phénomènes qui relèvent de la communication, et définissent la
sémiologie comme étant « l’étude des procédés de communication, i.e. des moyens utilisés
pour influencer autrui et reconnus comme tels par celui qu’on veut influencer » (Buyssens.E,
1970. Cité in Adjaout). Pour eux, il ne relève de la sémiologie que la communication produite
intentionnellement à la lumière des signaux conventionnels, produits et émis volontairement
par un émetteur et reçus par un récepteur. Ils stipulent donc, que la communication fait partie
de la sémiologie et qu’elle ne peut être considérée que comme l’objectif recherché par la
sémiologie.
En fait, on peut dire que ce courant n’étudie que des systèmes de signes explicites et
univoques, tels que : le code Morse, le code de la route, drapeau, etc.
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
34
A la lumière de tout ce qui précède, nous pouvons constater clairement que la
sémiologie a trait à la communication et de ce fait se focalise sur deux types de
communications.
4.2.1 Communication linguistique
C’est l’échange verbal entre un émetteur qui produit un message destiné à un récepteur
dont il sollicite l’écoute et/ou une réponse explicite ou implicite (ce qu’on appelle le
feedback). Ce message doit être clair et déchiffrable. Cette situation peut s’illustrer par le
schéma de communication imaginé par Roman Jakobson (1960), qui a conçu un modèle qui
permet de comprendre les facteurs intervenant dans chaque situation de communication.
Figure 9 : Schéma de communication selon Roman Jakobson. Source : http://adonis.lalib.fr/E9782370541628.pdf
Référent
à quoi renvoie le message, est connu de tous
Emetteur
qui ?
Récepteur
à qui ?
Message
dit quoi ?
Canal
support de transmission du message
Code
écrit, voix, geste…
Feed-back
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
35
4.2.2 Communication non-linguistique
Elle désigne toute communication ou échange n’ayant pas recourt à la parole, celle qui
ne dépend pas sur les mots et qui constitue un langage universel, tels que : les expressions
faciales (mimiques), les gestes, la danse, la musique, l’image… De mêmes que d’autres
signaux comme le choix vestimentaires, la coiffure, etc. Ajoutons aussi, qu’elle correspond
même aux postures du corps que l’on adopte : c’est le langage corporel comme le clin d’œil.
En effet, TAHAR Amor (2006), dans sa thèse doctorale, souligne que la communication
non-linguistique repose sur des systèmes non-linguistiques classés par G.Mounin et
E.Buyssens selon trois normes :
Norme d'indication systématisée où les signes sont fixés et continus.
Norme d'indication non systématisée dont les signes ne sont pas fixés, ni
continus.
Norme d'indication dont le lien entre la signification et sa forme est
fondamental.
En définitive, nous pouvons dire que la sémiologie étudie tous les systèmes de
communication non-linguistiques, ainsi que tous les systèmes de signes non-linguistiques.
II. Sémiologie de l’image/ Sémiologie visuelle
D’emblée, nous tenons à souligner que la question de la signification des images est
prise en charge par la sémiologie de l’image. Cette discipline, qui a pour objet l’image, a
connu son émergence à la suite du travail entrepris par le sémiologue français Roland Barthes
et qui ont été par la suite complétés par d’autres auteurs. En effet, dans son célèbre article
intitulé « Rhétorique de l’image » paru dans la revue Communications en 1964, R. Barthes a
posé les jalons de la sémiologie de l’image en analysant la fameuse publicité pour les pâtes
Panzani. Ce dernier justifie le choix de son corpus en disant que « Si l'image contient des
signes, on est donc certain qu'en publicité, ces signes sont pleins, formés en vue de la
meilleure lecture : l’image publicitaire est franche ou du moins emphatique » (Rhétorique de
l'image, 1964). Ainsi, l’image offre un cadre théorique intéressant qui peut permettre de
trouver des réponses à une question souvent citée par Barthes : « comment le sens vient –il à
l’image? ».
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
36
De sa part, A. Hénault définie la sémiologie de l’image comme « une activité de
formation qui favorise l’observation des qualités visuelles et celle des significations latentes
[…] Elle se donne pour tâche d’expliquer, voire de dévoiler les sens des images qu’elle
étudie, grâce aux recoupements qu’elle opère dans tous les champs du savoir. » (2008, p. 12)
D’un autre côté, les travaux entrepris dans le cadre de la sémiologie de l’image sont
souvent identifiés dans un courant de la sémiologie portant l’appellation de « sémiologie
visuelle ». Cette dernière est définie comme « une branche de la sémiotique. Elle étudie
des objets de signification se manifestant sur le canal visuel, et au premier rang de ceux-ci,
l'image, ou, en termes plus techniques, l'icône visuelle.» (Sémiotique, s. d.) Elle s’est
institutionnalisée en 1990 avec la création de l’Association international de sémiotique
visuelle (AISV) à Blois, et qui, jusqu’en 1992, s’est appelée Association International de
Sémiologie de l’image (AISIM).
Pour le groupe de recherche nommé « groupe μ ou groupe mu »2, le projet d’une
sémiotique visuelle s’est toujours inscrit dans un projet de large envergure, celui d’une
rhétorique générale, translinguistique. Dans une telle rhétorique, le groupe μ estime « qu’un
des majeurs défis de la sémiotique est de rendre compte du fait que dans le cas de la photo, de
la peinture, du dessin, il s’agit à chaque fois d’effets de sens dépendant de différentes
substances de l’expression et de différentes manières de mettre en relation des qualités du
support avec des gestualités de l’apport » (2010, p. 2)
Toutefois, A. Hénault a largement fait la distinction entre la sémiologie de l’image et la
sémiotique visuelle en précisant que cette dernière « est une activité de recherche qui dispose
d’une théorie d’ensemble rigoureusement délimitée et de procédures explicites et
contraignantes, pour élaborer des calculs de sens extrêmement précis et formels. La seule
visée de la sémiotique est la forme (du contenu ou de l’expression) parce que seule la forme
est susceptible d’une description objective, démontrable et donc calculable, sans recours à
l’intuition ou à l’intime conviction » (Hénault, op. cit, p. 12)
2Le groupe μ/ Mu est un groupe de recherche collectif formé à Liège, qui s’est fait connaître par trois ouvrages majeurs, Rhétorique générale (1970), Rhétorique de la poésie (1977) et Traité du signe visuel. Pour une rhétorique de l’image (1992).
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
37
1. L’image en sémiologie visuelle
L’image est considérée comme le premier des langages humains ; celle-ci est présente
sous des formes diverses : dessin, peinture, photographie, film. Cette diversité obéit à des
règles communes qui sont celles du langage visuel3. (Bertrand, Brémond, & Desaintghislain,
2012, p. 78)
Sur le plan historique, le mot « image » renvoie à « une modification linguistique de la
forme imagine, empruntée au latin imaginéin accusatif d’imago image ce qui ressemble, ce
qui est de la représentation ». (Dictionnaire historique de la langue française, 1993, pp. 996-
997).
Aussi, dans le dictionnaire raisonné de la théorie du langage « Sémiotique », l’image est
définie comme suit : « En sémiotique visuelle, l’image est considérée comme une unité de
manifestation autosuffisante, comme tout de signification, susceptible d’être soumis à
l’analyse. A partir de cette constatation commune, deux attitudes distinctes se dégagent. Alors
que la sémiologie de l’image, se référant à la théorie de communication, la considère
généralement comme un message constitué de signes iconiques ». (Greimas & Joseph, 1993,
p. 181)
De sa part, M. G. Dondero (membre du groupe μ) a montré que « l’image n’a pas besoin
du langage verbal comme traducteur, étant donné qu’elle possède son propre métalangage qui
lui permet de se rendre analysable avec ses propres moyens iconiques et plastiques »
(Dondero, op. cit, p. 2)
2. Le modèle d’analyse binaire de R. Barthes
La méthodologie d’analyse et d’interprétation de l’image publicitaire que R. Barthes
repose sur le modèle dit « binaire » qui distingue deux niveaux de sens, à savoir la dénotation
et la connotation. Ces deux notions fondamentales vont servir de point d’appui à notre
analyse:
3 : Langage visuel est constitué d’unités visuelles qui se composent de plusieurs éléments graphiques (forme, texture, volume, couleur…)
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
38
2.1 Dénotation : (le sens dénoté) est le sens premier du mot. C’est le sens objectif du mot,
tel qu’il est donné par le dictionnaire ou l’encyclopédie. Autrement dit, c’est l’« état adamique
de l’image », comme l’explique Barthes. (Rhétorique de l'image, 1964, p. 46). Les
significations dénotées sont pratiquement comprises par tous les utilisateurs de la langue.
2.2 Connotation : (le sens connoté) est le sens second du mot. C’est le sens variable,
subjectif et suggéré. Ce sens dépend de l’individu et/ou du contexte. Barthes défini cette
notion dans son livre l’Obvie et l’Obtus comme « l’imposition d’un sens second au message
photographique proprement dit, s’élabore aux différents niveaux de production de la
photographie ». (1982, p. 13) Autrement dit, c’est l’ensemble des significations secondaires
ou implicites qui viennent s’ajouter au sens premier.
Pour bien illustrer ces deux notions, nous prenons comme exemple le nom blanc :
Le nom blanc
Au niveau dénotatif : il désigne la couleur comme celle des os pour tout le monde. Au niveau connotatif : la signification de cette couleur varie selon le contexte géographique ; dans le monde occidental, le blanc est assimilé à la pureté, à la paix, l’innocence... En Asie, il est la couleur du deuil.
3. Fonctions assurées par le message linguistique : ancrage et de relais
Roland Barthes avait aussi signalé l’existence de deux fonctions principales que le
message linguistique assure par rapport au message iconique auquel il peut être adjoint. Dans
cette même perspective, M. Joly affirme que « Plastique et iconique entretiennent une relation
de circularité dont l’analyse est indispensable pour comprendre le processus de signification
du message visuel et en décrypter les subtilités. Toutefois, l’iconique et le plastique
n’interagissent pas seulement entre eux, mais aussi avec le linguistique dont la présence dans
les messages visuels est, nous l’avons vu, quasi permanente. Ce sont les mécanismes de cette
interaction que nous allons à présent évoquer.» (2011, p. 151)
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
39
La première fonction, appelée fonction d’ancrage, consiste à clarifier le sens de l’image
selon l’intention de son créateur. Autrement dit, le texte tend à diminuer la polysémie de
l’image.
Il évoque aussi une fonction de relais en précisant qu’elle est moins présente dans
l’image fixe mais utilisée surtout dans les dessins humoristiques ou les bandes dessinées. A ce
propos, Barthes souligne que « […] plus rare (du moins en ce qui concerne l’image fixe) ; on
la trouve souvent surtout dans les dessins humoristiques et les bandes dessinées. Ici, la parole
(le plus souvent un morceau de dialogue) et l’image sont dans un rapport de
complémentaire» (Ibid.) En effet, Cette fonction consiste à dire que le message linguistique
permet de rajouter au message iconique des significations que ce dernier ne peut pas, ou
difficilement, transmettre. Dans le cas de la publicité, le texte et l’image sont dans une
relation de complémentarité.
4. Les différents types de signes chez R. Barthes
En effet, Barthes adopte une méthode qui met l’accent sur les signifiés et ses signifiants
afin de dégager les différents signes qui composent l’image en vue de construire et
d’identifier une signification globalisante de tous les signes. Il met en relief trois types de
signes : linguistique, iconique et plastique
En ce qui concerne le signe linguistique, c’est-à-dire le texte qui accompagne l’image,
il réduit sa polysémie en l’orientant vers un sens limité. A ce propos, Barthes confirme qu’« il
constitue une sorte d’eau qui empêche les sens connotés de proliférer soit vers des régions
trop individuelles, soit vers des valeurs dysphoniques » (Ibid.)
Le signe iconique, pour sa part, est l’élément figuratif qui concerne les objets et les
personnages composants l’image. Il est définit, selon Peirce, comme suit : « Le signe est
iconique quand il peut représenter son objet principalement par sa similarité ». (Ecrit sur le
signe, 1978, p. 72) De cette définition, nous pouvons conclure que le signe iconique entretient
une relation de ressemblance et de similitude avec l’objet qu’il représente.
Quant aux signes plastiques, ils sont les caractéristiques matérielles substantielles de
l’image. Ils constituent généralement un niveau de signification qui agit sur les autres signes
iconiques et linguistiques pour former un sens global de l’image. De ce fait, ils sont
considérés comme étant une variation de signe iconique.
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
40
Pour illustrer ces différents aspects, nous proposons comme exemple ce graffiti tiré de
notre corpus (Figure 22):
Signe linguistique (There is always hope)
Signe plastique (la couleur rouge)
Signe iconique (La petite fille)
4.1 L’apport du Groupe μ aux signes visuels
Dans son mémoire de Magister, N. Bouache (2007, p. 30) souligne que R. Barthes ne
reconnait à l’image que deux types de signes : signe linguistique et signe iconique. Le signe
plastique, quant à lui, reste hors de la théorie Barthésienne même s’il le prend en
considération dans l’analyse qu’il en fait (les couleurs).
Ajouté à ce que Roland Barthes a avancé sur les types de signes, le groupe μ depuis les
années 80, propose de considérer le signe plastique comme un signe plein, et non seulement
une variation de signe iconique. Dans cette optique, dans son ouvrage Traité du signe visuel,
publié en 1992, le Groupe met en valeur trois composants plastiques du message visuel :
4.1.1 La forme
Désigne l’aspect général d’un objet (le cercle, le carré… et aussi les points les surfaces,
les lignes…). Selon Martine Joly, il faut s’efforcer d’oublier ce que les formes représentant et
les regarder pour elles-mêmes, pour pouvoir comprendre l’interprétation qu’elles induisent.
(Joly, op. cit, p. 75)
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
41
4.1.2 La texture
Selon le groupe μ, la texture d’une image se définit comme « une qualité de surface,
comme la couleur, qui se définit par la qualité de ses éléments (nature, dimension) et la
qualité de leur répétition » (Ibid. p. 76)
4.1.3 La couleur
Constitue un outil d’information la plus utilisée dans les applications d’analyse d’image.
En outre, « on distingue souvent entre le vocabulaire des couleurs, leur symbolisme et leurs
effets psychologiques. Du point de vue de leur vocabulaire, on reconnaît la différence entre
certaines couleurs dites chaudes, appelées aussi couleurs « solaires » comme le rouge, le
jaune, l’ocre, et des couleurs froides dites couleurs célestes ou aquatiques comme le bleu, le
vert. Sur le plan symbolique, les couleurs sont parlantes et leurs significations sont différentes
d’une société à l’autre. Par associations implicites ou explicites, on leur attribue des valeurs
qui ont le plus souvent des relations avec leur usage symbolique ».(Bouache, 2007, p. 31)
En effet, l’étude du groupe μ est focalisée sur la distinction entre les signes iconiques et
les signes plastiques et la relation icono-plastique. Le dit Groupe envisage une relation de
complémentarité et de similitude entre ces deux types de signes. Dans cette optique, le
Groupe μ considère « toute image visuelle iconique où deux entités disjointes peuvent être
perçues comme entretenant une relation de similitude » (Granjon, 2016)
Toujours d’après N. Bouache, Martine Joly, se saisissant de l’idée proposée par les
chercheurs du Groupe μ, y distingue les signes plastiques non spécifiques4des signes
plastiques spécifiques5.
4.1.3.1 Les couleurs et leurs significations
Chaque couleur a une signification particulière et peut s’interpréter d’une manière
différente selon les cultures, les contextes, les périodes historiques et les circonstances. Dans
le tableau ci-dessous, nous proposons une classification des couleurs et leurs significations à
travers le monde :
4 Les signes plastiques non spécifiques aux images sont les couleurs, l’éclairage, la texture, les lignes, les formes. 5 Les signes plastiques spécifiques sont, par exemple, le cadre, le cadrage, la pose du modèle.
Tableau 1 : Les couleurs et leurs significations. Source : https://www.code-couleur.com/signification/
Chapitre II Autour de la sémiologie de l’image
43
Conclusion :
Au terme de ce chapitre, dans lequel nous avons abordé les notions de base de la
sémiologie ainsi que la sémiologie de l’image, nous pouvons dire que l’image peut être perçue
comme un signe qui englobe plusieurs types de signes (iconiques, plastiques et linguistiques).
Nous pensons que ce chapitre nous aidera à entamer l’analyse sémiotique de notre
corpus.
Chapitre III
Description et analyse du
corpus
Chapitre III Description et analyse du corpus
45
Introduction :
Comme nous l’avons déjà mentionné dans l’introduction générale, notre étude s’inscrit
dans la perspective de la sémiologie de l’image. Dans ce chapitre, nous tenterons l’analyse de
quelques graffitis du street artiste Banksy en guise de réponse à notre problématique.
1. Méthodologie et description du corpus :
1.1 Présentation du corpus :
Notre corpus est composé de 12 graffitis de Banksy collectés de son site Instagram
(https://www.instagram.com/banksy/?hl=fr), ainsi du site web américain Pinterest
(https://www.pinterest.com/) qui fonctionne comme une galerie. Ces deux sites nous ont
permis de trouver facilement les photographies de l’artiste en question.
Le choix de ces graffitis n’a pas été fait au hasard. Nous avons opté pour l’analyse des
graffitis les plus récents pour rester dans l’actualité. Ceci nous permettra non seulement de
satisfaire notre curiosité personnelle mais aussi d’informer un large public sur les
significations véhiculées à travers ces nouveaux graffitis. Pour cela, les graffitis, seront
classés selon l’ordre chronologique, des plus récents aux moins récents.
1.1.1 Présentation des graffitis :
Notre corpus est présenté dans le tableau suivant :
N° du graffiti
Le titre du graffiti
La traduction du
titre
La date
Le lieu
N°1
Game Changer
Changer la donne
Mai 2020
L’hôpital de Southampton en Angleterre.
N°2
Le Brexit Le Brexit 2017 Douvres en Angleterre.
N°3
Slave Labor
Le travail des esclaves
2012
Londres.
N°4
If graffiti changed anything – It would be illegal
Si le graffiti changeait quelque chose, il serait illégal.
2011
Fitzrovia à London.
Chapitre III Description et analyse du corpus
46
N°5
No future
Pas d’avenir
2010
La ville de Bevois Valley à Southampton en Angleterre.
N°6
Follow your dreams – Cancelled
Suivez vos rêves- Annulé
2010
Boston aux Etats-Unis
N°7
Beach boys
Garçons de la plage
Juillet 2005
Sur le mur qui sépare Palestine et le territoire occupé par les sionistes.
N°8 Window on West Bank (1) et (2)
Fenêtre sur West Bank
N°9
N°10
The Armored Dove of Peace
La colombe blindée de la paix
N°11
Girl Frisking Soldier Fille fouillant un soldat
N°12
There is always hope Il y’a toujours de l’espoir
2012
Londres.
Tableau 2 : Présentation des graffitis
1.2 Grille et démarche d’analyse
Pour mener à bien notre analyse, nous nous sommes basés sur le modèle sémiologique
proposé par Roland Barthes qui s’appuie particulièrement sur les deux niveaux
d’interprétation, à savoir le niveau dénotatif et le niveau connotatif.
Dans cette optique, nous avons donc établi une analyse basée principalement sur des
paramètres liés directement aux concepts proposés précédemment, issus du modèle
Barthésien.
De façon plus concrète, dans son ensemble notre démarche d’analyse prendra en
considération des paramètres fondamentaux, régulièrement mobilisés dans de telles
circonstances6. Toutefois, nous tenons à préciser que ces paramètres ne seront pas développés
de façon compartimentée mais plutôt de façon imbriquée. Cette procédure trouve sa
justification dans le fait que la signification du message visuel ne peut être appréhendée que
6Trois de ces paramètres ont été pris en considération notamment dans le mémoire de Master de L. Bouhroum et A. Hamadou, L’analyse sémiologique de l’argent de l’Etat Algérien. Cas des billets et pièces de monnaie de 1970 à 2019, soutenu durant l’année universitaire 2020, Université de Jijel.
Chapitre III Description et analyse du corpus
47
de façon globale, vu que les éléments composants l’image (plastique et iconique) sont, comme
le souligne M. Joly, dans une interaction circulaire déterminante, et à laquelle s’ajoute aussi
une relation avec le linguistique. A ce sujet M. Joly souligne qu’« Il est évident que
l’interaction mise en place entre les éléments plastiques et les éléments iconiques de l’image
est déterminante dans la production de la signification globale du message visuel. Cette
interaction est circulaire et passe du plastique à l’iconique, ou inversement, de manière telle
que nos attentes, elles-mêmes déterminées par le contrat communicationnel (on est dans la
publicité, ou dans « l’art », ou dans « l’information », etc.), sont confortées ou, au contraire,
surprises. Toutes sortes de variations peuvent intervenir d’un pôle à l’autre, mais c’est au
spectateur qu’il revient de relativiser son interprétation à partir de ces données. » (Joly, 2011,
p. 146)
De ce fait, nous allons partir de quatre paramètres pour arriver à une interprétation
convenable de chaque graffiti :
1. Présentation et description visuelle du graffiti
Avant toute chose, il est important de bien identifier le graffiti, et trouver les
informations relatives à l’image avant de commencer la description (le titre, le lieu et la date
de création, technique employée…)
Dans un second temps, nous allons étudier la dénotation du graffiti ; c’est recenser et
décrire visuellement les différents éléments qui le composent en détail sans interprétation
(énumérer les objets, les symboles, les couleurs, décrire les personnages, leur attitude…). Ce
paramètre descriptif ou cette analyse formelle de l’image nous permettra de répondre aux
questions suivantes souvent mobilisées dans l’analyse d’une quelconque image : Qu’est-ce
qui est représenté sur l’image ? (les personnages, symboles, paysage…) Quel est le sujet, la
thématique principale ? (le thème : religieux, historique, politique…).
Tout au long de cette description objective, nous utilisons un vocabulaire varié afin de
présenter les différents éléments :
- Il s’agit de…
- On observe/ on voit/ on remarque…
- Au premier plan/ au second plan…
- On peut identifier…
Chapitre III Description et analyse du corpus
48
2. Analyse technique du graffiti
Dans ce paramètre, nous allons analyser chaque élément dénoté afin de pouvoir dégager
la connotation du graffiti, c’est-à-dire le sens que véhicule chacun de ces éléments. Pour cela,
les éléments composant le graffiti seront classés dans un tableau où ils seront présentés et
identifiés par rapport aux sens qu’ils évoquent en dénotation et en connotation :
GRILLE D’ANALYSE
LE N° DE
GRAFFITI
SIGNIFIANT
SIGNIFIE DE DENOTATION
SIGNIFIE DE
CONNOTATION
SIGNE
ICONIQUE
Il s’agit des éléments qui composent le graffiti (les objets, les personnages, les symboles, les animaux, les couleurs, les textes…)
C’est La description objective des différents signes : iconiques, plastiques et linguistiques investis dans chaque graffiti. Afin d’identifier les significations dénotées de chaque graffiti, nous utilisons le dictionnaire Larousse en ligne (https://www.larousse.fr/), ainsi que le tableau de significations des couleurs présent ci-devant.
Dégager toutes les significations implicites qui peuvent être inférées de l’interprétation des graffiti étudiés.
SIGNE
PLASTIQUE
SIGNE
LINGUISTIQUE
Tableau 3 : Grille d’analyse
3. Contextualisation du graffiti
Le troisième paramètre tend à placer le graffiti dans son cadre spatio-temporel en
mettant en ligne de compte son contexte de création (contexte historique, politique,
économique et culturel mais aussi la période de sa réalisation, année : de guerre de crise
économique…). En effet, « Une image, c’est la représentation visuelle d’un événement, d’une
opinion, ou une vision personnelle sur un sujet. L’interprétation de l’auteur est toujours liée à
son époque, au contexte politique, économique, culturel d’une période. Sa ou ses fonction(s)
est parfois de convaincre, de critiquer, ou de représenter un événement ou une personne. »
Chapitre III Description et analyse du corpus
49
(www.lemonde.fr). Il est nécessaire, donc, que nous nous intéressions aux éléments extérieurs
au graffiti (connaitre l’histoire derrière le graffiti, son contexte artistique et technique,
connaitre l’histoire ou la motivation personnelle de graffeur).
Ce paramètre nécessite de la culture. Il est intéressant pour bien saisir le sens connoté,
parce que c’est en plaçant le graffiti dans son contexte que l’on comprend mieux sa fonction
et le message qu’il veut faire passer.
4. Interprétation du graffiti
Le quatrième paramètre correspond à un travail d’interprétation qui vise principalement
à chercher les significations possibles des éléments dégagés de l’analyse formelle réalisée au
préalable. Cette dernière nous permet de livrer des hypothèses interprétatives appuyées sur
une description précise, sur nos connaissances, ainsi le contexte de création. Ce dernier
paramètre est subjectif et introspectif ; il s’agit précisément « de définir la façon dont l’image
fonctionne dans son contexte et de dire ce que [l’on pense] de cette image, en exerçant [notre]
esprit critique.» (www.lemonde.fr). Gérée de la sorte, cette analyse nous permettra
d’identifier, d’une manière systématique, les différents sens et significations des signes
iconiques, plastiques et linguistiques.
Dans cette optique, nous mettons aussi en considération le fait que la signification et
l’interprétation du signe composant l’image varient d’une société à l’autre et dépendent du
récepteur qui l’interprète selon sa culture et ses convictions.
Chapitre III Description et analyse du corpus
50
2. Analyse des données :
Graffiti N° 1
Figure 10 : Game Changer, Banksy, 2020, Angleterre (Southampton)
Le graffiti « slave labour » qui veut dire « travail d’esclave », est un pochoir en noir et
blanc qui a été réalisé en 2012, sur un mur du nord de la capitale britannique Londres
(Royaume-Uni). En effet, La réalisation de cette œuvre a coïncidé avec les préparatifs des
jeux olympiques (mai 2012) à Londres, et du jubilé de diamant de la reine Elisabeth II7, où
7C’est un évènement international se déroulant en 2012 pour marquer les soixante années de la reine Elisabeth II sur le trône du Royaume-Uni.
Chapitre III Description et analyse du corpus
55
une révolution industrielle a eu lieu pour commercialiser les produits nécessaires pour les
deux festivités, à savoir l’industrie textile (surtout celle des drapeaux). (Cocquet, 2013) Ainsi,
l’une des raisons de la création de l’œuvre est due également à la découverte en 2010 d’un
enfant de 7 ans, travaillant dans un atelier en Inde pour fabriquer des produits vendus par les
magasins Poundland en Grande-Bretagne.
Il s’agit d’un enfant, en bas à droite, aux pieds nus agenouillé et penché sur une machine
à coudre, en train de fabriquer une banderole aux couleurs du drapeau du Royaume-Uni
britannique. Ces drapeaux, malgré qu’ils semblent sortir de la machine, ils restent hors du
dessin. L’enfant sous rappelé porte une casquette ainsi que des vêtements déchirés et abîmés.
Il a l’air triste et épuisé, ce qui donne l’idée sur la difficulté et la dureté du travail qu’il exerce,
et qui ne va pas avec son jeune âge. Ainsi, son habillement incarne la pauvreté et la situation
dans laquelle il vit.
En ce qui concerne la dimension plastique, ce graffiti est peint en noir et blanc, alors
que les drapeaux sont colorés. Cela contribue à la création d’un contraste entre ces éléments.
Il s’agit autrement d’un contraste du clair-obscur. A ce sens, le critique d’art français
Théodore Duret, dans sa critique d’avant-garde (1998) a précisé : « chaque nuance ou teinte
distincte devient un ton tranché, une note particulière de palette ; il ne procède pas du clair au
sombre, de l’ombre à la lumière, mais d’un ton qui fait le clair, à un autre qui fait l’ombre, et
ainsi s’explique la singularité native de son procédé de peinture » (Duret, 1998, p. 40).
L’ensemble des signes iconiques dans ce graffiti sont classifiés dans le tableau suivant :
Graffiti N° 3
Signifiant
Signifié dénotatif
Signifié connotatif
Signe
iconique
Un garçon
Enfant mâle, par opposition à la fille.
Innocence, enfance douloureuse.
Une machine à
coudre
Instrument d’usage industriel, qui exécute mécaniquement les points de couture.
Travail, industrie textile.
Signe plastique
Noir
La plus sombre des couleurs.
Tristesse, obscurité.
Blanc
D’une couleur comme celle des os.
Pureté, innocence.
Chapitre III Description et analyse du corpus
56
Tableau 6 : Analyse technique du graffiti n° 3
A partir de l’ensemble des signes, on peut interpréter ce graffiti de Banksy comme un
coup d’œil sarcastique. Il dénonce clairement le travail illégal des enfants dans les pays sous-
développés. Il a comparé ce travail à celui des esclaves, c’est la raison pour laquelle il a choisi
le nom « slave labour » qui signifie « travail d’esclave » pour l’œuvre.
Graffiti N°4
Figure 13 :If graffiti changed anything – It would be illegal, Banksy, 2011, London (Fitzrovia) Source : https://www.pinterest.com/pin/536280268122460281/
Ce graffiti, intitulé « If graffiti changed anything – It would be illegal », est effectué au
pochoir en 2011 à London.
Par le biais de la dénotation, ce graffiti représente à droite un rat peint en noir avec des
pattes, l’une de ses pattes est tachée de rouge. Il est debout et regard une phrase écrite en
anglais au-dessus de lui disant « Si le graffiti changeait quelque chose, il serait illégal », qui
occupe une grande place dans cette image. Elle est peinte sur un fond blanc en très gros
caractères à raison de deux mots par ligne, avec une peinture rouge qui coule vers le bas. Juste
à côté du rat, on trouve une trace rouge de l’une de ses pattes sur le mur, cela nous indique
que c’est lui qui signe cette écriture.
Chapitre III Description et analyse du corpus
57
Le tableau ci-dessous montre une éventuelle interprétation du signe iconique,
linguistique et plastique composants ce graffiti :
Graffiti N°4
Signifiant
Signifié dénotatif
Signifié connotatif
Signe iconique
Rat
Un animal terrestre.
Un graffeur, un street artiste
Signe plastique
Rouge
Couleur semblable à celle du sang
L’interdiction, le danger
Signe linguistique
If graffiti changed anything – It would be
Expression anglaise qui veut dire « Si le graffiti changeait quelque chose, il serait illégal »
L’illégalité de graffer sur les murs. Punition et sanction par la loi.
Tableau 7 : Analyse technique du graffiti n° 4
En effet, Banksy explique, dans son livre « Banksy, wall and peace », qu’il peint les rats
dans ces graffiti parce qu’ils sont mal-aimés, chassés et existent sans permission. Tout comme
les graffeurs qu’exercent leur art sans permission. (www.graffmag2012.e-monsite.com) Nous
pouvons comprendre, donc, que les graffeurs sont en quelque sorte comme les rats qui devenu
un symbole célèbre des street artistes. Ces derniers partagent avec les rats le côté
d’interdiction ; comme eux, ils sont terrés et cachés jusqu’à la prochaine sortie pour inscrire
des messages sur les biens publics (métros, trains, murs…).
On notera par ailleurs que cette image joue sur le message linguistique « If graffiti
changed anything – It would be illegal » qui, en français, pourrait se traduire par « Si le
graffiti changeait quelque chose, il serait illégal ». Il attire beaucoup d’attention dans le visuel
grâce à sa position (centré au milieu de l’image), à sa dimension (il s’étend pratiquement sur
toute la longueur de l’image), et aussi par l’utilisation de la couleur rouge. En effet, ce
message nous envoie vers le même signifié, celui de l’interdiction. Il constitue un ancrage au
graffiti dans le sens où il est la traduction écrite de l’image.
A la lecture de ce graffiti, nous pouvons dire que Banksy veut nous montrer que le
graffiti révèle des messages qui peuvent changer quelque chose. Il souligne son pouvoir et
critique son illégalité par les autorités de certains pays.
Depuis 2002, les Juifs sionistes construisent une barrière de séparation de long 700 km
en Cisjordanie près de la ligne verte9. Cette dernière prend la forme d’un mur de béton qui
peut aller jusqu’à 9 m de haut. Selon les Juifs sionistes, ce mur est construit pour des raisons
purement sécuritaires, un moyen comme un autre pour lutter contre les attentats. En réalité, ce
mur, qualifié de « mur de séparation raciste » ou « mur d’apartheid », se situe dans un projet
d’expansion du territoire israélien et vise à annexer une partie de la Cisjordanie dans le
territoire occupé par les Juifs. Quant à l’ONU, elle a adopté en 2004 une résolution, comme
celle de la Cour Internationale de Justice, condamnant la construction du mur. Les opposants
à ce dernier le surnomment « mur de la honte ».
Nous illustrons le plan de partage ainsi le tracé de la ligne verte dans la carte
géographique ci-dessous. (Figure 16)
Ce mur est devenu à la fois un terrain d’expression politico-artistique et une source
d’inspiration pour les artistes, notamment Banksy qui a fondé en juillet 2005 le projet de
Santa’s Ghetto dans lequel il a réalisé clandestinement neuf peintures en territoire palestinien.
En effet, Banksy n’a jamais caché son engagement en faveur de la cause palestinienne. Il
"essaye de diffuser la voix des Palestiniens dans le monde à travers l'art et crée un nouveau
modèle de résistance grâce à cet art", comme le félicite M. Salsaa.(www.lorientlejour.com) Il
transforme cette barrière à une toile artistique géante.
8« Plan de partage de la Palestine » – plan de l'ONU de 1947. 9 La « ligne verte », c'est la frontière qui a séparé la partie de la Palestine occupée par les juifs de la Cisjordanie.
Chapitre III Description et analyse du corpus
63
Figure 16 : Carte du plan de partage de la Palestine Source:https://www.lesclesdumoyenorient.com/Retour-cartographique-sur-le-conflit-israelo-
arabe-1-2-des-premices-du-conflit.html
Dans cette section, nous avons sélectionné pour notre analyse cinq graffitis :
Beach boys.
Windows on West Bank (1)
Windows on West Bank (2)
The armored dove of peace
Girls frisking soldier
Zone internationale
Ligne verte
Chapitre III Description et analyse du corpus
64
Graffiti N° 7
Figure 17: Beach boys, Banksy, juillet 2005, Palestine(murprès de Bethléem)
Figure 19 : Window on West Bank(2), Banksy, 2005, Palestine
Source : https://www.pinterest.fr/pin/109493834
664739633/?nic_v2=1a5SQZsTk
Les deux graffitis associant la fresque et le trompe-l’œil appartiennent à la série
Window on West Bank. Cette appellation pour les deux fresques signifie « Fenêtre sur West
Bank ». Elles portent alors le même nom. En effet, ces œuvres donnent l’illusion d’une
ouverture vers un paysage paradisiaque :
La première c’est une œuvre figurative représentant un salon où se trouve deux
fauteuils, entre lesquels existe une table avec une fleur en pote. Au milieu se trouve une
fenêtre avec un rideau blanc. Cette fenêtre est séparée par des barreaux qui ressemblent à ceux
d’une prison. En arrière-plan du dessin, une image d’un paysage montagneux. En ce qui
concerne les couleurs, le salon (premier plan) est dessiné en noir et blanc, tandis que le
paysage (deuxième plan) est coloré et bien détaillé.
L’autre fresque est dans le même esprit : un soldat vêtu en uniforme militaire, en train
de tirer un rideau, cela donne l’impression qu’il ouvre le mur. A son côté droit, on voit une
lampe de poche attachée à son uniforme. Ce détail pose une interrogation sur la nature de
l’arme que doit porter le soldat. Autrement dit, le soldat ne devrait pas porter la lampe de
poche, mais plutôt un pistolet ou un fusil. En derrière plan de la peinture, on y trouve l’image
Chapitre III Description et analyse du corpus
67
d’un paysage représentant une mer avec des arbres au bord. Comme celle de la première
fresque, la seule touche colorée est le paysage, qui vient de créer un contraste avec le soldat
en noir.
Nous proposons le tableau ci-dessous qui résumera l’ensemble des signes iconiques et
plastiques composant les deux œuvres :
Graffiti N°8
Signifiant
Signifié dénotatif Signifié connotatif
Signe
iconique
Un fauteuil Siège à dossier et à bras,
pour une personne. Confort, luxe, pouvoir.
Une table
Meuble sur pied(s)
comportant une surface
plane.
Repas, partage, plaisir,
sociabilité.
Un pote de
fleurs
Récipient dans lequel on
cultive les plants.
La fleur en pote est le symbole
de l’enfermement, elle est
encerclée comme le mur qui
entoure et isole Gaza.
Une fenêtre
Ouverture dans un mur pour
laisser pénétrer l’air et la
lumière.
Frontière, ouverture sur le
monde.
Un rideau Pièce d’étoffe destinée à
tamiser la lumière. Cache.
Un paysage Tableau représentant la
nature. La beauté, la vie, imagination.
Signe
plastique
Noir La plus sombre des
couleurs. La mort, la tristesse, l’obscurité.
Blanc D’une couleur comme celle
des os. La pureté, la paix, la richesse.
Chapitre III Description et analyse du corpus
68
Bleu De la couleur du ciel en
plein jour. Le rêve, la liberté, le calme
Vert Couleur semblant à celle des
feuilles ou des herbes. La nature, la fraicheur.
Graffiti N°9
Un soldat
Homme qui sert dans une
armée.
Guerre, force.
Signe
iconique
Un uniforme
militaire
Tenue militaire ayant une
couleur unifiée. Discipline.
Une lampe de
poche
Appareil électrique portable
produisant de la lumière.
La lumière, la révélation, le
savoir dévoilé.
Tableau 11 : Analyse technique du graffiti n° 8 et 9
Du point de vue connotatif, les deux œuvres peuvent être interprétées comme une
invitation à « trouer » et « percer » le mur de séparation pour découvrir le magnifique
paysage qui se cache derrière.
A travers ces deux graffitis qui portent le même message, Banksy veut interpeller le
passant à s’interroger sur la réalité de ce mur en créant des effets de contrastes entre réalité et
représentation artistique (réalité amère vécue par les Palestiniens / irréalisme de l’image,
l’utilisation des couleurs/ la teinte du noir et blanc).
Chapitre III Description et analyse du corpus
69
Graffiti N° 10
Figure 20 : The Armored Dove of Peace, Banksy, 2005, Palestine (Cisjordanie) Source : https://www.pinterest.fr/pin/139541288433280570/?nic_v2=1a5SQZsTk
Ce graffiti est intitulé « The Armored Dove of Peace », peint au pochoir sur un mur en
Cisjordanie. Ce mur représente l’endroit où plus que 40 personnes furent tuées lors de la
première Intifada, également surnommée « guerre des pierres ». Elle désigne le mouvement
de protestation populaire palestinienne contre l’armée israélienne, qui a duré de 1987 à 1991.
(www.lesclesdumoyenorient.com)
Ce graffiti représente une colombe blanche en vol avec des ailes larges en position de
bras ouvert. Elle tient dans son bec un rameau d’olivier vert et porte un gilet pare-balle.
Malgré qu’elle soit vêtue d’une tenue militaire, elle ne semble pas pouvoir s’échapper au
viseur de sniper qui pointille sa cible sur sa poitrine. Ce qui nous laisse penser qu’il voulait
l’atteindre. Par ailleurs, nous pouvons voir très clairement que ce mur est criblé de réels
impacts de balles dus à la première Intifada.
L’ensemble des éléments iconiques et plastiques sont classés dans le tableau suivant :
Chapitre III Description et analyse du corpus
70
Graffiti N°
10
Signifiant
Signifié dénotatif
Signifié connotatif
Signe iconique
Colombe Pigeon. La colombe avec un rameau d’olivier dans son bec symbolise la pureté et la paix.
Rameau d’olivier
Petite branche d’arbre (olivier)
Gilet pare-balle
Gilet de protection contre le tir d’armes.
Le danger qui entoure la colombe.
Viseur de Sniper
Système de visée utilisée par un tireur d’élite.
La guerre, le danger, la mort.
Signe plastique
Blanc
Couleur comme celle des os.
La liberté, la paix.
Rouge
Couleur semblable à celle du sang.
Le danger, le sang.
Vert
La couleur qui représente le mieux la nature.
La fraicheur, la nature.
Tableau 12 : Analyse technique du graffiti n° 10
En ce qui concerne les couleurs apparentes dans ce graffiti, elles sont réservées à la
branche d’olivier verte qui symbolise la nature et la fraîcheur. Et la cible rouge, qui évoque ici
une signification négative, celle du danger et du sang. En effet, ces deux couleurs
complémentaires forment un contraste maximum malgré qu’elles s’opposent
symboliquement.
Au niveau de la connotation, cette figure invoque un message de paix associé à la
colombe, en référence à l’histoire biblique de Noé et l’Arche. En effet, à la fin du Déluge,
Noé envoie une colombe pour voir si les eaux se sont retirées de la Terre. Quand celle-ci
revient, elle porte dans son bec un rameau d’olivier indiquant que le niveau d’eau avait bien
baissé. C’est en cela que cet oiseau devient sacré et personnifie généralement la paix, le retour
du bonheur ou encore la liberté dû de sa blancheur. De nos jours, la signification de la
colombe en tant qu’emblème universel de la paix, revient à Picasso qui la reprit dans sa
célèbre toile « Guernica » en 1937, pour incarner le pacifisme et dénoncer la violence de la
guerre. (www.chosesasavoir.com)
A travers cette peinture, Banksy veut nous montrer que la paix est bien fragile dans ce
territoire. C’est la raison pour laquelle il habille la colombe d’un gilet pare-balle afin qu’elle
Chapitre III Description et analyse du corpus
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puisse survivre à la guerre. En effet, la présence de la tenue militaire place ce symbole de paix
dans un état de guerre et de danger et le met entre la vie et la mort.