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Sminaire de recherche en iconographie Analyse d'un
tableauCarolina Gauna, mai 2012
Les AmbassadeursHuile sur panneau de bois 209-207 cm National
Gallery, Londres
de Hans Holbein Le Jeune (Augsburg 1497- Londres 1543)
Le peintreHans Holbein, fils de Hans l'Ancien reut sa premire
formation de son pre et probablement de Hans Burkmair. La prcocit
de son talent favorise son indpendance et l'introduit dans les
cercles humanistes. Il s'installe Ble en 1616, o il mne une activit
intense comme portraitiste et produit galement des uvres
religieuses et des dcorations murales.
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En 1526 , sans doute sous les conseils drasme, qui le recommande
Thomas More, Holbein fuit la Rforme et s'exile pour deux ans
Londres, o sa renomme de portraitiste s'tend rapidement. Il revient
Ble, pour la quitter dfinitivement en 1531. Il trouve Londres des
protecteurs de la ligue hansatique, rseau de marchandes de l'Europe
du nord. En 1536 il est nomm peintre-valet d'Henri VIII et devint
rapidement le portraitiste officiel de la cour d'Angleterre. Il
meurt de la peste qui ravage Londres en 1543. Holbein est ouvert
toutes les influences, de Grnewald Leonardo, de Metsys aux peintres
anglais. Il sait les intgrer en un langage original qui se prsente
comme une synthse internationale unique de la peinture du dbut du
XVIe s. Son art se fonde sur la solution de deux problmes, qui
furent dj ceux de son pre : le dessin, porteur de l'exactitude
expressive, et la composition, btie sur une tude extrmement
attentive de la perspective, dans laquelle les structures de
l'espace varient constamment pour parvenir dans les derniers
portraits une sorte d'quilibre entre le ralisme et l'abstraction,
entre la tradition gothique et la Renaissance humaniste. Au contact
d'rasme et de More, Holbein imprgne son art des ides humanistes
formules dans le doute rationaliste qui baigne ses peintures
religieuses et dans la recherche inquite et constante d'une
signification profonde de l'tre, derrire l'apparence du
portrait.
Le contexte politique et religieux de l'anne 1533Le paysage
politique europen de l'poque est domin par quatre figures majeures,
les rois de France, Franois Ier et d'Angleterre, Henri VIII,
l'Empereur romain germanique, Charles Quint et le pape Clment VII.
En octobre 1532, Francois Ier rencontre Henry VIII pour tenter
d'obtenir son soutien contre l'Empire. Henri VIII, quant lui,
souhaite que Franois Ier use de son influence sur le pape Clement
VII pour rsoudre la question de son divorce avec Catherine
d'Aragon, la tante de Charles Quint. Les rencontres sont
chaleureuses. Des cardinaux franais mnent alors des ngociations
secrtes avec le pape pour soutenir la position d'Henri VIII. La
dcision de publication par le pape des bulles ncessaires la
nomination de Thomas Cranmer comme archevque de Cantorbry semble
indiquer que les cardinaux ont fait avancer le dossier d'Henri VIII
auprs de Clment VII. Le 25 janvier 1533, Henri pouse en secret Anne
Boleyn. Puis les vnements se prcipitent, le 23 mai, Thomas Cranmer,
maintenant archevque de Cantorbry, se substitue au pape et annule
le mariage d'Henri VIII avec Catherine d'Aragon. Le 1er juin, Anne
Boleyn est couronne l'abbaye de Westminster. Finalement, tout cela
entranera, le 23 mars 1534, l'excommunication d'Henri VIII par
Clement VII et le schisme de l'glise anglicane avec Rome. Durant la
mme priode la France connat aussi un certain trouble face aux thses
luthriennes.
Les personnagesJean de Dinteville (1504-1557), bailli de Troyes
et seigneur de Polisy tait ambassadeur. Georges de Selve
(1506-1541), tait lui aussi diplomate. Il fut ambassadeur en
Angleterre en 1533, auprs de la Rpublique de Venise de 1534 1535,
du Saint -Sige Rome en 1536, puis Vienne, auprs de l'Empereur
romain-germanique et en Espagne. Le tableau prsente ces deux hommes
accomplis, dans la force de l'ge, qui tiennent entre leurs mains
l'essentiel de la diplomatie franaise du moment, et qui se font
reprsenter avec toutes les marques du pouvoir, mais aussi du savoir
de l'poque, travers un riche programme iconographique. Destin au
chteau de Dinteville Polisy, il immortalise la prise de fonction
d'un ambassadeur franais frachement nomm la cour d'Angleterre, et
correspond en cela la fonction des portrait de cour et privs, tels
que Holbein les a largement pratiqus tout au long de sa carrire,
notamment en Angleterre, auprs d'une clientle privilgie constitue
des courtisans d'Henri VIII, des riches propritaires fonciers
anglais, et marchands membres de la Ligue Hansatique.
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L'originalit de l'uvre tient dans le choix, non d'une
reprsentation de son unique commanditaire, mais dans celui d'un
portrait double, suggrant l'quivalence et la complmentarit, et
l'amiti des deux personnages : d'un ct, le miles, le soldat, avec
ses attributs guerriers que sont la dague qu'il tient de la main
gauche, l'pe ceinte au ct gauche, et l'insigne de l'ordre de St
Michel sur la poitrine ; de l'autre le clericus, l'rudit, en
contrepoint religieux et plus austre. L'ambassadeur de robe courte,
dtenteur du pouvoir politique, rpond l'ambassadeur de robe longue,
dtenteur du pouvoir religieux. La composition quilibre, en trois
tiers verticaux souligns par le pavage au sol, la position en
miroir des coudes droit et gauche de Dinteville et de Selve de part
et d'autre de l'tagre, ainsi que leurs regards fixant le
spectateur, qui se positionne naturellement entre les deux hommes
pour pouvoir les observer, rendent vidente la symtrie du tableau et
suggrent la force des liens qui unissent les deux amis. Le tableau
clbre les retrouvailles entre deux amis, linstant fix sur la toile.
Le cadran solaire cylindrique, prcise d'ailleurs la date de la
rencontre, le 11 avril 1533, alors que l'horloge polydrique en
donne l'heure, avec une hsitation nanmoins entre le ct qui fait
face au spectateur, indiquant 9 h 30 et les deux autres cts,
indiquant 10 h 30. Le tableau dvoile galement leurs ges respectifs
: 29 pour l'un et 25 ans pour l'autre. Lorsque Jean de Dinteville
est envoy en Angleterre en fvrier 1533, les espoirs d'alliance
entre la France et l'Angleterre sont au plus haut. Sa prsence
Londres, et celle de son frre, Franois, l'vque d'Auxerre,
ambassadeur de France auprs du Sige apostolique, montrent le rle
central qu'il joue dans les ngociations entre Franois Ier, Henri
VIII et le pape. Georges de Selve, de son ct, a pass l'essentiel de
son sacerdoce travailler la rconciliation au sein de l'glise. Il
fut notamment trs critique l'gard de la corruption dans les rangs
des catholiques, qu'il jugeait responsable du dveloppement du
luthranisme. Ces positions peuvent clairer la prsence du livre de
cantiques luthriens, ouvert droite de l'tagre infrieure, mais aussi
du crucifix, dissimul derrire la riche tenture verte, dans l'angle
suprieur gauche du tableau, renvoyant l'ide d'un Dieu cach,
inaccessible par la seule raison humaine (selon la vision de Saint
Paul, dont Georges de Selve tait un fervent admirateur).
Le tableauLes deux hommes, qui regardent le spectateur, sont
accouds un meuble comportant deux tagres et sur lequel sont disposs
plusieurs objets qui se rattachent au Quadrivium, les quatre
sciences mathmatiques parmi les Sept arts libraux, soient
l'arithmtique, la gomtrie, la musique et l'astronomie. Sur l'tagre
suprieure, on voit une sphre cleste, des objets de mesure du temps
et un livre, disposs sur un tapis rouge aux motifs gomtriques
complexes. Sur l'tagre infrieure, un globe terrestre, deux livres,
un luth et quatre fltes runies dans un tui. L'arrire plan est occup
par un rideau de velours vert dont un repli rvle, peine, dans le
coin haut gauche un crucifix. Le sol montre un pavage compos de
cercles et de carrs o se dtache une forme difficilement lisible,
mais qui saute aux yeux tant elle semble hors de l'espace de la
peinture et qu'on a souvent nomm l'os de seiche. Jean de Dinteville
est richement habill d'un manteau de fourrure, il porte la main une
dague dans un tui, o son ge, 29 ans, est grav, un bret sur la tte
sur lequel est accroche une broche comportant la reprsentation d'un
crne. Du noir de ses vtements tranche le rouge des ses manches et
de sa poitrine o pend une chane dore une mdaille dcore d'un ange,
la preuve de son appartenance l'ordre de SaintMichel. Georges de
Selve est, lui, tout vtu de noir, envelopp dans un manteau de
fourrure. Il porte une paire de gants dans la main droite et sa tte
porte une coiffe. De Selve passe l'essentiel de son sacerdoce
travailler la rconciliation au sein de l'glise. La peinture semble
donc immortaliser la prise de fonction d'un ambassadeur franais
frachement nomm la cour d'Angleterre et la visite que lui fait
cette occasion son ami.
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Ce premier regard jet sur la peinture, une uvre quasiment carre,
de plus de deux mtres de ct, amne deux rflexions : les deux hommes,
sujets du tableau, n'en occupent pas le centre, ils sont dports sur
les bords, encadrant comme un crin un ensemble d'objets qui
semblent htroclites au premier abord. A leurs pieds se trouve un
objet trange qui semble ne pas faire partie de la peinture, et qui
en occupe en tout cas le premier plan, comme si Holbein avait
utilis ce portrait pour mettre en valeur, en avant, autre chose que
les personnages qui donnent leur nom l'uvre, et dont l'un,
Dinteville, est le commanditaire. La peinture semble donc foisonner
de symboles, d'indications caches, de rfrences, toutes choses
normales dans la peinture de la Renaissance. Caractriser un
diplomate et un homme d'glise par un amoncellement d'instruments de
mesure peut nous paratre aujourd'hui un procd quelque peu trange.
Pourtant, ces hommes cultivs cherchaient les lois mathmatiques et
physiques rgissant le fonctionnement du monde. A la Renaissance,
les mathmatiques devinrent l'une des disciplines les plus
importantes. Elles avaient t ngliges durant le Moyen Age, la
reprsentation religieuse du monde primait alors sur les sciences.
La prsence des mathmatiques et plus prcisment de la gomtrie dans ce
tableau tmoigne galement d'un changement de statut du peintre la
fin de la Renaissance. Rappelons nous que jusqu' la fin du XVIme
sicle, les artistes ne sont considrs que pour leur activit manuelle
: ils taient considrs comme des artisans, avec par consquence une
position social infrieure. Par ailleurs, l'organisation du savoir
et de l'enseignement se dcoupait comme suit :
Arts mcaniques architecture sculpture orfvrerie peinture
Arts librales Trivium Quadrivium grammaire rhtorique logique
astronomie gomtrie arithmtique musique
Les Ambassadeurs symbolise la puissance laque et ecclsiastique
appuye sur l'rudition et l'humanisme, sur les savoirs rationnels
produits de l'activit intellectuelle. Le peintre se hisse la
hauteur de ses modles prouvant qu'il connat les codes sociaux et
les critres de la connaissance. Il n'est pas un simple artisan, il
est aussi un rudit arm de ruses de la raison. Holbein est
contemporain de Leonardo pour qui la pintura cosa mentale . Dans
son Trait de la peinture il dclare : Il n'y a rien dans
l'astronomie qui ne soit en fonction des lignes visuelles et de la
perspective, fille de la peinture ; car c'est le peintre qui, pour
les besoins de son art, a cr la perspective . Pour sa part, Alberti
crit en Della pittura (1436) ...Rien ne me plat davantage que
l'investigation mathmatique et les dmonstrations, surtout lorsque
je peux en tirer d'utiles applications en faisant driver des
mathmatiques les principes de la perspective picturale et des
singulires propositions sur la disposition des masses. Piero della
Francesca crit l'un des premiers ouvrages de son temps traiter des
mathmatiques de la perspective, La perspective en peinture. Ses
concepts sont incorpors aux recherches de Luca Pacioli dans De
divina proportione (1509). Drer affirme que la gomtrie est le
vritable pilier de toute peinture . Il sjourna en Italie durant
l'automne 1506 et se rend chez Pacioli afin d'tre initi aux mystres
de la perspective secrte Il ralisa diffrentes exprimentations
optiques, tudia la nature avec assiduit et inventa un instrument
pour dessiner les proportions. Une gravure nous montre ce
dispositif avec le peintre en action. Le modle qu'il dessine est un
luth qui ressemble troitement celui reprsent par Holbein dans Les
Ambassadeurs. Ce tableau a t amplement tudi par des historiens
d'art, de la gopolitique ou des sciences, jusqu'au psychanalystes,
notamment par Lacan.
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L'tagre suprieureLa sphre cleste
Sur cette tagre suprieure, on trouve disposs sur un tapis divers
instruments astronomiques ou de mesure du temps. George de Selve
pose son coude sur un livre dont la tranche comporte la mention :
TATIS SV 25 ce qui correspond l'ge de Georges de Selve qui a 25 ans
en ce printemps 1533. gauche prs de Dinteville, on voit une sphre
cleste qui montre les constellations avec les tracs des tres
mythologiques correspondants. On discerne la constellation du Cygne
qui est note GALACIA. Le globe n'est pas rgl pour reprsenter le
ciel la latitude de 51 30' qui est celle de Londres o se trouvent
les deux hommes mais pour une latitude comprise entre 42 et 43 plus
caractristique de l'Espagne - une partie de l'empire de Charles
Quint ou de l'Italie o rside le pape. On notera cependant qu'il
s'agit d'une valeur trs proche de la latitude de Rome (41 52') et
qu'elle rappelle les diffrends politiques et religieux entre la
cour anglaise et le Vatican. On a fait remarquer aussi sa grande
ressemblance avec celui construit en 1533 par l'astronome de
Nuremberg Johannes Schner et qui est aujourd'hui au Muse de la
Science de Londres.
Les cadrans solaires
le mme cadran dans le tableau de Kratzer
L'tagre suprieure comporte plusieurs cadrans solaires qui sont
visibles dans une autre uvre de Holbein, le portrait de Nicholas
Kratzer, peint en 1528, cinq ans auparavant. Un second cadran de
papier apparat en arrire plan. Les cadrans taient utiliss pour
mesurer la hauteur du soleil par rapport lhorizon ce qui permettait
de calculer lheure. Pour se faire un plomb fix fil donne la
verticale en visant le soleil le fil se place devant les
graduations du cadran ce qui permet de calculer la position du
soleil. On voit lensemble de ces dtails sur le premier instrument,
en revanche en prtant plus attention au second on saperoit que ce
dernier est mal assembl ou alors mal reprsent par le peintre ce qui
rend son utilisation impossible.
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Le dtail nous montre en effet quil ny a pas erreur de la part du
peintre mais cest volontairement quil reprsente ce cadrant mont
lenvers. Ainsi lun est correctement mont et permet la mesure,
lautre mont lenvers, semblant juste ne donnera jamais la juste
mesure.
Les cadrans polydriques
exemplaire fabriqu par Kratzer
On remarque nouveau en prtant attention que les indications de
temps inscrites sur les diffrentes faces des polydres ne concordent
pas. Sur lune des faces on peut lire 9.30 sur les deux autres
10.30. On saperoit galement que la lattitude du gnomon ne ce situe
pas dans le nord l ou se trouve Londres mais indique un latitude
proche de lAfrique du Nord. Ces erreurs nous rapprochent de la
corde casse du luth, des erreurs prcdente nous indiquant le thme du
tableau la relation entre les limites humaines des sciences et de
la nature finie de la nature humaine. Le muse dhistoire des
sciences possde des cadrans polydriques dont la fabrication est
attribu Nicolas Kratzer.
Le cadran cylindrique
A linstar des autres instruments de mesure du temps ce cadran
solaire cylindrique est reprsent dans le portrait de Nicolas
Kratzer. Ce cadran nous permet de voir ou de dduire que nous sommes
entre le 11 avril et le 15 aot. La date du 11 avril correspond en
cette anne 1533 au vendredi saint. Ce qui nous relie aux autres
dtails tel que la rdemption du Christ reprsente par le demi
crucifix ainsi que le livre des chants luthrien.
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Le torquetum
dessin d'Apian
Prs du coude de Georges de Selve se trouve un torquetum. C'est
un instrument de mesure dcrit pour la premire foi par Ptolme. Il
servait dterminer la position des corps clestes et donnait le temps
avec une certaine prcision. Cet appareil est une construction
complexe qui avait besoin dtre ajuste la latitude et laltitude du
jour. Il fut redcouvert au XIII me sicle et pendant les XV et XVI
me il vit une multitude de variations dans sa fabrication, mais peu
nous sont rests. Certain dentre eux furent conus et fabriqus par
Apian de Nuremberg lun des matres de la matire et furent publis
dans son Astronomicum Caesareum en 1540.
L'tagre infrieureUn luth dont l'une des cordes est casse, un
livre d'hymnes luthriens et un groupe de fltes sont les objets
prsents sur cette tagre, qu'il concernent la gographie, les
mathmatiques ou la musique, sont plus orients vers la pratique de
ces arts ou techniques que vers leur thorie. Le globe
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le globe de Schner, dit de Nuremberg
Bas sur celui que Johannes Schner produisit Nuremberg en 1523,
il indique un certain nombre de notations gopolitiques comme la
ligne de partage du monde entre Espagnols et Portugais tablie par
le pape Alexandre VI par le trait de Tordesillas de 1494. La
circumnavigation de Magellan y est trace. On y aperoit aussi le
Nouveau Monde, en particulier la cte brsilienne. Holbein a fait
cependant quelques variations par rapport l'original en
particulier, il crit Pritannia en lieu et place de Britannia, la
Bretagne, peut-tre un rappel une de ces touches de dsordre qui
maillent la peinture et qui symbolisent le trouble du monde. Il
indique sur la carte de France, l'emplacement de Policy,
aujourd'hui Polisy, mais la faute est peuttre intentionnelle, dans
l'Aube, le domaine seigneurial de Dinteville o le tableau est
destin tre install.
Le livre d'arithmtique
dtail de la page du livre d'Apian
L'exemplaire reprsent est le livre d'arithmtique de Peter Apian,
mathmaticien et astronome l'universit d'Ingolstadt en Allemagne,
Eyn newe unnd wohlgrndte underweysung aller Kauffmanss Rechnung in
dreyen bchern (Un livre nouveau et fiable pour apprendre le calcul
et destin aux marchands, 1527). Le livre fut crit dans un langage
vernaculaire et utilisa les nouvelles technologies pour sa
diffusion. Il est maintenu ouvert par
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une querre. La symbolique associe au livre d'Apian est
probablement de deux ordres. Tout d'abord, livre l'usage des
marchands et consacr la pratique de leur mtier, il marque
l'importance de l'mergence de la bourgeoisie dans cette priode.
Holbein fera d'ailleurs des portraits de riches marchands. Il
manifeste aussi dans cette pratique marchande l'apparition de
nouveaux outils mis disposition d'un plus grand nombre par la
technique rvolutionnaire l'poque de l'imprimerie. Le livre rappelle
aussi que Georges de Selve descend d'une famille de marchands
limousins qui a fait sa fortune au cours du XV e sicle et qui a
ainsi permis l'un des siens d'occuper la position d'vque. La page
lisible commence par le mot Dividirt, double sens de division
mathmatique mais aussi de division ou dysharmonie, tant dans
l'glise que dans le domaine politique, ce qui apparat, en
conjonction avec d'autres lments de la composition, comme une des
clefs du tableau. En effet, les crits de Georges de Selve se font
l'cho de ses inquitudes devant la division dont souffre l'glise, la
Rforme luthrienne, mais aussi la cration de l'glise anglicane, dans
le pays-mme o est peint le tableau. Il est a not que le livre est
ouvert une page ou l'on peut lire le mot "division" choix relatif
aux divisions politiques et religieuses de cette poque et faisant
galement rfrence au crit de Georges de Selve concernant ces
disharmonies religieuses.
Le luth
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Drer, dispositif de traage en perspective
Alciati, frontispice
L'tagre infrieure comporte dans sa partie droite trois objets
relis la musique, une des quatre disciplines du Quadrivium : un
luth, un livre de psaumes et plusieurs fltes rassembles dans un tui
qui rvle un emplacement vide. On a remarqu que ce luth ressemble
trangement celui de la gravure Underweysung der Messung d'Albrecht
Drer (1525) o celui-ci montre un dispositif de traage des objets en
perspective. On peut y voir la reconnaissance de la dette d'Holbein
la science de la perspective, un apport majeur de la Renaissance la
peinture, qui permet au peintre de raliser des tableaux au ralisme
si confondant. La corde casse est une allusion au luth illustrant
le frontispice du trait D'Andrea Alciati : Emblematum Liber publi
en 1531. La corde casse symbolise peut-tre, comme le vide dans
l'tui fltes, la priode de troubles que connat cette poque l'glise,
une harmonie perdue.
Le livre de chants
Le livre reprsent est le Geistlich Gesangbuhli de Johannnes
Walther, un livre d'hymnes sacrs dont la premire dition date de
1524. Comme pour le livre d'arithmtique, Holbein a choisi de
prsenter le livre ouvert deux pages particulires qui ne sont
cependant pas conscutives dans le vritable ouvrage. La page de
gauche montre la traduction du premier verset de l'hymne Veni
sancte Spiritus de Luther : Kom heiliger geyst herregot/erfll mit
deiner gnaden gut/deiner gleubgen hertz, mut und sin/ dein brnstig
lib entznd in ihn/ O herr durch deines liechtes glast/zu dem
glauben versamlet hast/ das volck aller welt zungen/des sey dir Her
zu lob gesungen. Le verso montre l'introduction la Version abrge
des Dix Commandements du mme Luther : Mensch wiltu
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leben seliglich/ und bei Gott bleiben ewiglich/ Soltu halten die
Zehen Gebot/ Die uns gebeut unser Gott. Il est fort probable que le
choix de ce livre et la juxtaposition de ces deux pages soient
intentionnels. Il s'agit du thme central de la thologie luthrienne
: l'opposition entre la Loi (reprsente par les commandements) et la
Grce (symbolise par l'hymne). Cette thmatique semble avoir t proche
des positions de Georges de Selve. La loi selon les mots de Mose
dirige la vie externe de l'homme, proclame son abjection avant le
courroux de Dieu. La loi fait apparatre la conscience du pch. Si il
y a dsobissance, l'homme devient la proie de la mort et du diable.
En revanche la bonne parole (la parole du Christ) s'adresse la vie
intrieure de l'homme lui promettant droiture et salut. Holbein
exploitera ce thme dans deux autres uvres au moins : un panneau se
trouvant actuellement la National Gallery of Scotland et sur la
page titre de la bible de Coverdale publi en 1535. A l'arrire plan,
on devine un compas pointe sche (en anglais divider) qui fait cho
la division du livre d'arithmtique et aux divisions suggres par les
autres objets symboliques.
Le crucifix
Le crucifix, moiti cach, dans une position intermdiaire entre ce
qui est devant le rideau (le monde des hommes) et ce qui est cach
leur regard (l'inconnu derrire la tenture), symbolise la position
du Christ intermdiaire entre l'ici-bas et l'au-del. Certains ont
d'ailleurs vu dans ce tableau l'impossible reprsentation de
Dieu.
Le pavage
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Chapelle Sistine
Salle de la signature
Uraniburg
Le pavage qui se trouve sous les pieds des ambassadeurs a t
identifi comme inspir, avec une importante simplification, par deux
pavages vritables qui partagent une certaine ressemblance. Le
premier se trouve l'abbaye de Westminster, le second la Chapelle
Sistine, dans ce cas une place symbolique, exactement sous la
cration d'Adam, le don de la vie par Dieu aux hommes. Parmi tous
les lments qui composent le tableau, ce pavage est celui dont la
raison symbolique est la moins sre. Mme si la signification prcise
de ce pavage reste largement mystrieuse, il est trs certainement la
reprsentation du macrocosme : un schma de l'univers, le cercle
central symbolisant dieu et les quatre cercles priphriques les
quatre lments - le feu, la terre, l'eau et l'air - . On retrouve la
mme schmatisation symbolique de l'univers aussi bien sur le plafond
de Raphal pour la chambre de la Signature (Stanza della Segnatura)
que dans le plan de Tycho Brah pour son observatoire
d'Uraniborg.
L'anamorphose
L'trange figure qui se trouve au premier plan, et parfois appel
l'os de seiche, a longtemps intrigu les analystes du tableau. Il
s'agit d'un crne fortement dform par une anamorphose. On notera que
ce type d'images dformes tait la mode dans l'Angleterre des Tudors.
(la National Portrait Gallery de Londres possde d'ailleurs un
portrait d'douard VI d'Angleterre par William Scrots qui utilise
aussi une dformation par anamorphose que l'on corrige en regardant
la surface du tableau au travers d'un trou dans son cadre).
L'association entre le crne et le crucifix voque la passion du
Christ, le Golgotha ( le mot hbreu pour crne ) et le calvaire (
calvaria tant le mot latin avec la mme signification). On trouve
d'ailleurs frquemment dans les reprsentations de la crucifixion, un
crne au pied de la croix, sur lequel coule parfois le sang du
Christ qui
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lave ainsi, par son sacrifice, le pch originel. La prsence de ce
crne est le sujet principal de cette peinture, une vanit. La
reprsentation en premier plan du crne explique lessentielle
finitude de lhomme et de la limitation de sa connaissance. A limage
des traditionnelles vanits le crne est la pour nous rappeler la
finitude de lhomme sujet au temps et la mort. Le choix de la
reprsentation anamorphique renforce cette ide. Ici Holbein semble
oppos la vision humaine la connaissance de Dieu. La vision humaine
est ncessairement limite par le temps et lespace, alors que Dieu a
connaissance de toute chose en tout lieu et en tout temps. Ainsi la
reprsentation anamorphique du crne nous indique que voir lun (le
crne) dforme lautre (les objets). En plaant ce crne au centre du
pavage, sur le sol Holbein nous signifie combien notre mortalit
obscurcie la vrai vision de Dieu. En regardant dans le dtail on
saperoit que Dinteville pose son pied droit au centre de lun des
cercles du pavage suggrant que cet homme est aussi le centre, mais
un centre relatif et non le centre absolu. En revanche et par
contraste le pied de De Selve cach par sa robe na pas une position
trs dtermin par rapport au sol Lambigut de ce positionnement de De
Selve est sans aucun doute sa fonction de clerc et dmissaire, qui
le place entre les sphres temporelles et spirituelles.
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La composition : Une tentative ( personnelle...) de lecture
rhtoriqueExordio Thme principal : VANITAS VANITATUM, ET OMNIA
VANITAS Thme secondaire : Le thme de la diplomatie comme prtexte,
les personnages comme prtexte et mtonymie de la division (du
pouvoir, du monde, de l'glise). Les sciences comme moyen pour
interprter le monde en premier plan, la religion en arrire plan
Narratio Argumentatio Disgressio Confirmatio Peroratio reprsente
par l'anamorphose : vanit, tout n'est que vanit les sciences, la
modernit, la division du monde, justifies par les objets des
tagres, par le rapport entre eux, par les nombreuses citations
externes et internes les divers objets casss, linverse ou inutiles
la prsence du crucifix ( trs cach!) en arrire plan / l'omniprsence
de l'anamorphose la position des personnages dans le pav-allgorie
du macrocosme- microcosme
Dans la tentative d'une approche rhtorique, je pense qu'un lien
se tisse entre les lments, ce qui pourrait tre interprt comme une
sorte d'assimilation visuelle du contrepoint : Dux- comes :
l'exposition du sujet et contre-sujet et ses diffrents rappels
l'intrieur du tableau comme deux aspects en permanente
contre-position : le pouvoirs laque et ecclsiastique/ la science et
la religion/ la thorie et la pratique/ la mesure et l'insaisissable
les imitations en canon d'un mme sujet : crne anamorphose-broche,
emplacements en symtrie des personnages, composition gomtrique en
symtrie le stretto qui amne la conclusion : si l'on tire des
prolongations de lignes de tous les objets symboliques du tableau,
quelles que soient leurs positions de dpart, elles convergent sur
la figure de l'anamorphose final
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Quelques rfrences pour continuer ouvrir les tiroirs de ce
tableau
DOCTRINE DES ANALOGIES ET CORRESPONDANCES La doctrine des
analogies et correspondances remonte aux sumriens, vers 2800 av.
J.-C. Elle est prsente dans tous les sotrismes, soutient que le
Tout est Un, que ses divers niveaux (rgnes, mondes) sont des
ensembles quivalents dont les lments se rpondent terme terme, de
sorte que un lment d'un ensemble reprsente symboliquement et
influence sympathiquement l'lment d'un autre ensemble, par exemple,
le Soleil dans le rgne minral et le lion dans le rgne
animal"Dictionnaire de l'sotrisme, Payot, 1983
Dans la Grce ancienne Orphe parle de "lien puissant", de "chane
d'or" entre les choses. Au XVIIme sicle Kepler regardait sa thorie
des polydres embots comme sa plus grande dcouverte : dans un trait
intitul Mysterium Cosmographicum (1596), il remarque que lUnivers
(tel qu'on le connaissait au XVII) compte autant de plantes que de
polydres rguliers. Il note en outre que l'on peut intercaler assez
exactement les cinq solides de Platon entre les orbes des six
plantes connues lpoque, c'est--dire que les proportions des orbes
plantaires sont exactement rgles par des rapports gomtriques
remarquables.
ARCANA ARTIS La mort correspond gnralement - au niveau opratoire
la couleur noire qui prenaient les ingrdients, la nigredo. C'est la
rduction des substances la materia prima, la massa confusa,
corrspondant au niveau cosmologique la situation primordiale, au
Chaos. La mort reprsente la rgression dans l'amorphe, la
rintgration au Chaos. Que la Nuit cosmique ait t assimile la Mort (
= les tnbres ) en mme temps qu' la rgression ad uterum : c'est ce
qui ressort tant de l'histoire des religions que des textes
alchimiques. Les alchimistes occidentaux ont intgr leur symbolisme
la thologie chrtienne : la mort de la matire tait sanctifie par la
mort du Christ qui en assurait aussi la rdemption. Il faut
souligner l'importance que les alchimistes accordent aux expriences
terribles et sinistres de noirceur , de mort spirituelle, de
descente aux Enfers : outre qu'elles sont continuellement attestes
dans les textes, on les dchiffre dans l'art et l'iconographie
d'inspiration alchimique, o ces sortes d'expriences sont traduites
par le symbolisme saturnien, par la mlancholie , la contemplation
des crnes, etc. La figure de Chronos-Saturne symbolise le Grand
Destructeur qui est le Temps, donc aussi bien la mort que la
nouvelle naissance.Mircea Eliade, Forgerons et alchimistes
Flammarion Paris, 1956
LE THEATRUM MUNDI Le Theatrum Mundi est une notion baroque dont
se sont inspirs nombre d'auteurs de France, d'Italie et d'Espagne
du sicle d'or qui dbute au XVIme sicle dans la pninsule ibrique :
Les tres jouent tous un rle, consciemment ou malgr eux, sur la
grande scne du monde et sont des pantins dont les ficelles sont
tires par le grand horloger, le dmiurge de l'uvre qu'est la ralit
ou la fiction tels "le Crateur", figure double de Dieu et de
l'auteur. Il faut y voir une lecture du monde travers le thtre et
la mise en scne. Le comdien et le personnage incarn par celui-ci
refltent l'image mme du spectateur leurr qui est dj un acteur de
l'univers. Le procd de mise en abyme a pu servir cette ide centrale
de la tragi-comdie qui donne voir pas moins de trois
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ralits enchsses les unes dans les autres. En consquence de quoi,
le comdien est observ par un spectateur lui-mme dvisag par un autre
tmoin et ainsi de suite. Cette mtaphore trouve son origine chez les
penseurs grecs de l'antiquit. Ainsi, dans ses Entretiens, pictte
introduit la notion de rle jouer pour l'homme dans le monde, rle
que l'homme ne doit pas outrepasser et qui constitue pour lui comme
un devoir envers les dieux (on y retrouve galement la mtaphore du
masque thtral). On retrouve cette allgorie baroque jusque dans les
grandes tragi-comdies du XVIIme sicle.
NICOLAS DE CUES (1401-1464) Le contraste entre la vision humaine
et la vision de Dieu est inspir par le texte de Nicolas de Cues :
le Trialogus de possest. Lil, le matre qui peut atteindre chaque
chose sans tourner : Lorsque notre il tourne lui mme autour de
lobjet cest parce que notre angle de vision est limit. Mais langle
de votre il, O Dieu, nest pas limit, mais infini, Derrire linfini
sphre de votre vision apparat la sphre infinie de votre perfection.
Ainsi tu vois comme un dans le mme temps toute choses en dessous et
au dessus. De mme Nicolas de Cues observe : La prcise quidistance
entre les choses ne peut se trouver sauf dans le cas de Dieu, car
Dieu seul est infinie galit. Ainsi il est centre du monde , aussi
centre de la terre, de toutes les sphres et de toutes chose du
monde. De docta ignorantia II.11 En plaant le crne au centre du
pavage, sur le sol Holbein nous signifie combien notre mortalit
obscurcie la vrai vision de Dieu. En regardant dans le dtail on
saperoit que Dinteville pose son pied droit au centre de lun des
cercles du pavage suggrant que cet homme est aussi le centre, mais
un centre relatif et non le centre absolu. Lactivit humaine
consiste en la rvlation de chaque chose cache derrire soit dans son
propre champs circulaire, et de faire que chaque chose viennent
virtuellement en avant du centre Nicolas de Cues De conjecturis II
XIII. Dans son dialogue Idiota de Mente De Cues compare lesprit
humain un compas de la vie (circinus vivus) qui peut prendre mesure
de chaque chose. La corde casse est une allusion au luth illustrant
le frontispice du trait D'Andrea Alciati : Emblematum Liber publi
en 1531. Alcciati crit : Il est extrmement difficile pour l'tudiant
de mettre l'unisson autant de cordes, si une corde ne peut tre
accorde ou est casse, la grce du coquillage n'est plus et la
meilleure des musiques n'est que faiblesse Ce qui nous rappelle
Nicolas de Cues qui dans son De concordantia catholica crivait :
Par dessus tout le Roi sera un joueur de lut, qui sait comprendre?
Qui prserve l'harmonie? et qui jamais n'accordera une corde trop
haut ou trop bas, pour ne pas la brise et trouver ainsi trouver
l'accord parfait et prserver l'harmonie des sons. Nicholas of Cusa,
Opera, III f. 75v, Saturnet la Melancolie. R. Klibansky, E.
Panofsky, and F. Saxl
CHARLES DE BOVELLE (1479 - 1566) Du Macrocosme au Microcosme
Dans lesprit de la Renaissance, il multiplie les analogies et les
correspondances aussi compliques quinattendues, notamment entre
macrocosme et microcosme, mais ne s'intresse gure aux dcouvertes et
aux progrs techniques de son temps. Utilisant l'arithmosophie pour
constituer une chelle verticale de lunivers (l'ange, l'homme,
l'animal, la plante, le minral et la matire soumis Dieu), Bovelle
pense quil est compos dun nombre indfini d'individus qui sont
chacun leur faon un miroir vivant du tout. Le macrocosme ne prend
donc conscience de lui-mme que dans les microcosmes en lesquels il
se reflte. Au sein de cette harmonie prtablie, lhomme reflte
lunivers en tant que dernier n de la Cration. Il est en
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quelque sorte lme du monde. ce titre, Dieu a cr lunivers pour en
faire la demeure de lhomme. Si sa mission dans le temps est de
mesurer le sublunaire , sa mission eschatologique est de permettre
la rintgration du monde en Dieu par lentremise de la rsurrection
des corps. De l'Ars Oppositorum la Via negativa Le but de Bovelle
est, semble-t-il de fournir une justification mtaphysique la
doctrine de la cration ex nihilo en dmontrant, si possible que Dieu
n'a cr le monde que sur le fond d'un rien initial. Le nant tant
l'oppos de l'tre, c'est bien du nant et non de lui-mme que Dieu a
tir le monde. Mais, si le monde rvle l'existence de Dieu, celle-ci
nous chappe pourtant compltement. L'univers nous apprend
l'existence d'un crateur mais ne nous dit pas ce qu'il est. D'o la
justification de la thologie ngative de Denys qui donne l'ide de
nant sa place lgitime. Puisqu'il n'y a pas de nant sans tre,
l'existence de Dieu doit tre admise bien qu'elle soit vidente par
elle-mme. La thologie ngative qui pose en Dieu un infini simple,
inconcevable et inexprimable est donc plus certaine que la thologie
positive et ses analogies incertaines et douteuses entre Dieu et
les choses.
ROBERT FLUDD (1574 - 1637) L'unit de Dieu se manifeste dans le
monde visible des lments par la polarit repos - mouvement , comme
les deux .. du compas. Les deux sont unies pas l'axe de l'amour et
la justice Vituesquie Cosmi II, Francfort 1621
LACAN Un singulier objet, pareil un os de seiche, flotte
au-dessus du sol : cest lanamorphose dun crne qui se redresse
lorsquon se place tout prs, au-dessus, en regardant vers la gauche.
Un sens cach et une solennit psent lourdement sur toute la scne.
Car le secret de ce tableau, dont je vous ai rappel les rsonances,
les parents avec les vanitas, de ce tableau fascinant de prsenter,
entre les deux personnages pars et fixes, tout ce qui rappelle,
dans la perspective de lpoque, la vanit des arts et des sciences, -
le secret de ce tableau est donn au moment o, nous loignant
lgrement de lui, peu peu, vers la gauche, puis nous retournant,
nous voyons ce que signifie lobjet flottant magique. Il nous reflte
notre propre nant, dans la figure de la tte de mort. Usage donc de
la dimension gomtrale de la vision pour captiver le sujet, rapport
vident au dsir qui, pourtant, reste nigmatique. Jacques Lacan, Le
sminaire, livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la
psychanalyse, Seuil
COULEURS ET SYMBOLIQUE Considr comme une couleur mdiane, le vert
est considr comme apaisant. Bien que terne, il a une histoire
tumultueuse. En effet le vert est techniquement une couleur
instable, difficile fabriquer et matriser. Ce n'est qu' partir du
XVIIe sicle qu'il perdra ce caractre turbulent, alors qu'il tait
considr jusqu'alors comme une couleur excentrique en Europe, except
en Allemagne. Mme en photographie, le vert tait la premire couleur
se ternir et s'estomper. Le vert est alors symboliquement la
couleur de instabilit reprsentant ce qui bouge, change varie. Les
jongleurs et les bouffons s'habillent en vert. Le vert a galement
un ct ngatif, avec la reprsentations de dmons, de dragons,
d'esprits. Couleurs et alchimie : dans le grand processus de
transmutation de la matire, les couleurs se succdent dans cette
ordre ; noir-jaune-rouge-blanc ( la putrfaction, la combustion, le
feu, les cendres/l'eau lunaire)
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Couleurs et points cardinaux : John Dee, clbre mathmaticien,
astronome, astrologue, gographe et occultiste britannique, a
consacr une grande partie de sa vie ltude de l'alchimie, de la
divination et de la philosophie hermtique. Il transcrit la vision
anglique d'un Palais o la porte Est est blanche, la porte Sud
rouge, la porte Nord noire, la porte Ouest verte (Mysteriorum
Pragensium Confirmatio, 1585 Prague). Couleurs et plantes : Depuis
les Msopotamiens et le Quadripartitum Hermetis, chaque plante a sa
couleur. Soleil : jaune, or ; Lune : blanche, argent ; Mars :
rouge, rouille ; Mercure : multiple/orange, mercure ; Vnus : verte,
cuivre ; Jupiter : bleu, tain ; Saturne : noir, plomb. Couleurs et
Kabbale : Dans la kabbale, le Zohar assigne une couleur spcifique
chacune des Sephiroth : le blanc Hokhmah (Sagesse) ; le rouge Binah
(Intelligence) ; le vert Tiphereth (Harmonie) et le noir Malkhuth
(Royaume). Ce systme de couleurs est mis en parallle avec celui des
quatre Mondes qui se voient galement attribuer une couleur. Le
monde dAtziluth (manation) est blanc ; le monde de Briah (cration)
rouge ; le monde de Yetsirah (formation) vert et le monde dAssyah
(fabrication) noir.
L'EUROPE ET L'ORIENT DANS LE TABLEAU On a souvent cru que la
motivation premire du tableau tait la crise religieuse la rupture
imminente d'Henry VIII avec Rome. Mais Dinteville et Selve taient
aussi Londres pour conclure une nouvelle alliance politique entre
Henry VIII, Franois II et le sultan Soliman le Magnifique, l'autre
grand force dans la politique de puissance europenne de l'poque. Le
somptueux tapis qui, dans le tableau de Holbein, couvre l'tagre
suprieure de la desserte est turc par son motif et par sa facture :
il souligne que les Ottomans et leurs territoires orientaux
faisaient partie, eux aussi, du paysage culturel, commercial et
politique de la Renaissance. Si Selve et Alfortville tentaient
d'amener Henry VIII dans une alliance avec Franois II et Soliman,
c'tait par peur de lascension de l'autre grande puissance :
l'empire Habsbourg de Charles Quint. Compares lui, L'Angleterre et
la France taient des acteurs ambitieux mais mineurs : le globe
terrestre sur le tableau le prcise. Il montre les empires europens
qui commencent se partager le monde rcemment dcouvert. Le globe de
Holbein reproduit la ligne de dmarcation tablie par les empires
espagnol et portugais en 1494, au lendemain de la dcouverte de
l'Amrique par Colomb en 1492. Avec l'accord du pape, ils s'taient
divis le globe en le scindant au beau milieu. Le Portugal
revendiquait toutes les terres non dcouvertes l'est de
l'Atlantique, l'Espagne toutes celles restant l'ouest de cet ocan.
Ce partage tait intervenu en rponse un diffrend sur des territoires
en Extrme-Orient. L'Espagne et le Portugal se disputait la
possession des les lointaines mais fort lucratives qui produisaient
les pices : les Moluques, en Indonsie. Des nombreux objets du
tableau de Holbein sont d'origine orientale, de la soie et du
velours que portent ses modles aux tissus et motifs qui dcorent la
pice. Ce tableau est une reprsentation triomphale du pouvoir de
l'Europe du Nord, mais aussi un splendide talage du dsir et de
l'acquisition des produits de luxe orientaux qui atteignaient
l'Europe par la route de la soie et les bazars d'Asie centrale et
d'Extrme-Orient. La plupart des objets exposs sur les tagres ont t
invents par des astronomes arabes et juifs du Moyen ge, puis
introduits en Occident quand les navigateurs europens ont eu besoin
de techniques avances pour leurs voyages au long cours.Jerry
Brotton , Le Bazar Renaissance , LLL, Lonrai, 2011
*****
Carolina Gauna
Genve, mai 2012
19
Bibliographie
Arnold Hauser Heinrich Wlfflin Umberto Eco R. et R. Hagen Robert
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Cologne, 2005 Le Bazar Renaissance Les liens qui librent, France,
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nell'arte Logart Press, Rome,2006 Forgerons et alchimistes
Flammarion Paris, 1956 Alquimia y mistica Taschen, Cologne, 2006
Simboli e allegorie Electa, Milan, 2004 Lanalyse du tableau Les
Ambassadeurs de Holbein le jeune: les nigmes des objets de
gnomonique au hasard de mes lectures Le Gnomoniste, XVII- 2, juin
2010
Encyclopdie Larousse Les Ambassadeus www.accordphilo.com
www.canal-educatif.fr Wikipedia La peinture pense, Les ambassadeurs
Hans Holbein le Jeune, 1533 Holbein : sciences et ambassadeurs Les
Ambassadeurs Theatrum Mundi La constellation du cygne Apian