Top Banner
le journal de l’art contemporain, juin - octobre 2006 dijon bourgogne france europe ... HORSD’OEUVRE n ° 18 www.interface-art.com idéo tu retiens les ravages du temps, nstrument du voyeur qui observe autrement, ans la ville tu vas partout au gré du vent n quête d’insolite et de chambardement. n dit que grâce à toi l’on voit différemment. V I D E O Couverture : © Christophe Langenbach, Antenne noire, 2006 © Michel Rose, Vidéo, 2006
8

18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

May 25, 2020

Download

Documents

dariahiddleston
Welcome message from author
This document is posted to help you gain knowledge. Please leave a comment to let me know what you think about it! Share it to your friends and learn new things together.
Transcript
Page 1: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

le journal de l’art contemporain, juin - octobre 2006dijon ➤ bourgogne ➤ france ➤ europe ➤ ...

HO

RSD

’OEU

VRE

n°18

ww

w.in

terf

ace

-art

.com

idéo tu retiens les ravages du temps,

nstrument du voyeur qui observe autrement,

ans la ville tu vas partout au gré du vent

n quête d’insolite et de chambardement.

n dit que grâce à toi l’on voit différemment.

V

I

D

E

O

Couv

ertu

re :

© C

hris

tophe

Lang

enbach

, A

nten

ne n

oire

, 2006

© M

iche

l Ros

e, V

idéo

, 2006

Page 2: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

2

Une immense projection vidéo triptyque immerge le spectateur au cœur de l’univers urbainet mouvementé de New York. Drumroll de Steve McQueen défie les lois de la gravité enrévélant les rues de Manhattan sens dessus dessous, dans un mouvement circulaire et untournoiement incessants. Sur la projection de droite, des voitures roulent et se retournent sanscesse, tandis que l’image de gauche montre les pas presque dansants de passants, àl’endroit puis à l’envers, dans un mouvement centrifuge et régulier. La projection centrale estune rotation verticale, dévoilant tour à tour le ciel new-yorkais, quelques buildings puis lachaussée dans l’obscurité totale. De temps à autre, on aperçoit une chemise rose, celle deSteve McQueen, exécutant sa performance. Dans la cacophonie de la ville, parmi lesklaxons de voitures, les sirènes stridentes de la police, le brouhaha de la foule et lesroulements de moteurs, une voix masculine retentit : « sorry, watch out ! ». C’est celle del’artiste tentant de fendre la foule tout en faisant rouler un baril d’essence contenant troiscaméras : deux sur les côtés, à l’horizontale et une au milieu, à la verticale. Le reflet de SteveMcQueen poussant son baril apparaît de façon furtive dans les vitrines de magasins.La triple projection révèle le processus même de sa réalisation. Le spectateur prend peu àpeu conscience de la concomitance des trois images. Le son diffusé coïncide avec chacuned’elles. La rotation simultanée des projections , à vitesse égale, dévoile le système detournage très rudimentaire. La présence de l’artiste, soulignée par des apparitions physiquesbrèves et par le son de sa voix, renforce la notion d’auteur. Sa présence est une signatureet permet de cerner la nature de l’œuvre, entre performance, film expérimental et film de cinéma.Différents paramètres soulignent les références cinématographiques : l’absence denarration, le son réel in situ, la caméra portable - en l’occurrence mobile - et l’absenced’acteurs au profit de non acteurs (les passants), renvoient aux dogmes du « cinéma vérité »des années 60, initié par Jean Rouch. Le grouillement continu de l’espace urbain,l’esthétique de la vitesse, rappellent également la célébration de la modernité industriellepar Marinetti dans le Manifeste futuriste (1909). Le cinéaste Dziga Vertov seraparticulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Camérade 1929. Tourné dans la ville d’Odessa, le film célèbre le monde moderne, industriel eturbain. Pour Vertov, la caméra, « œil mécanique » 1 est une prolongation de l’œil humain,instrument imparfait. Elle permet de découvrir une réalité autre, et dévoile « une nouvelleconception du monde » 2, à l’opposé d’une réalité objective. De la même façon, SteveMcQueen multiplie les points de vue sur la ville, perturbant et renouvelant sa perception.Cette démultiplication visuelle déstabilise le spectateur dont les repères spatiaux sontbrouillés. L’aliénation de la ville révèle une réalité nouvelle.Un autre point commun entre le film de Vertov et celui de McQueen est leur musicalité. Filmmuet, L’Homme à la Caméra est pourtant construit selon un rythme très marqué. Le montagesaccadé et la composition des images en mouvement s’assimilent à une constructionmusicale. Drumroll est la première vidéo sonore de McQueen. Elle superpose les bruits dela ville, la voix de l’artiste et le vacarme du baril. Le vidéaste décrit l’expérience sonore desa performance: « Je me sentais presque comme un musicien. Tout ce que j’avais à faire,c’était de continuer à faire rouler le baril d’essence comme on bat la mesure. Le chaos desallers et venues des gens dans la rue, les déplacements des voitures et des camions étaientde l’ordre de l’improvisation ». 3

Drumroll explore les limites de la vidéo, entre performance musicale et chorégraphique, dontles protagonistes sont les acteurs de l’environnement urbain. Film expérimental, quasiabstrait lors des accélérations rotatives, il est marqué par le minimalisme de son langagefilmique révélant son processus deréalisation. Ce nouveau regardkaléidoscopique sur le paysage urbain vajusqu’à la saturation des points de vue. Laprésentation de la ville en rotation continuemet à l’épreuve le spectateur jusqu’àl’ivresse tandis que l’artiste nous fait ladémonstration littérale de « tourner » unfilm !

Adeline Blanchard

1. In : manifeste de Dziga Vertov, Ciné-Œil, 1923.2. Idem.3. « I felt almost like a musician. All I had to do is to keepthis oil drum roll almost like keeping a beat. The chaosthat was recorded of people, cars, trucks, etc. was almostlike improvisation », in : Steve McQueen, « SteveMcQueen in conversation with Gerald Matt », catalogued’exposition, Kunsthalle Vienne, 2001, p.16.

Steve McQueenDrumroll

Chiara Piritosphère privée / sphère urbaine Chiara Pirito est née en 1977 à Turin. Elle vit et travaille dans cette ville. Aprèsavoir étudié à l’université de Lettres et Philosophie de Turin, elle a obtenu, en2000, le diplôme de l’Ecole Nationale de la Photographie d’Arles. Son travail, vidéos et photographies, est centré sur l’exploration des limites entrepluralité et unicité des êtres humains. Elle filme la confrontation de personnagesanonymes à une même situation de la vie quotidienne liée à la thématique del’attente, de la transition (attente précise comme dans Within images, 2003 lorsqueles candidates d’un modeste concours de beauté s’apprêtent à entrer sur scènemais aussi l’attente diffuse, aléatoire telle celle vécue par des passants dans la ruealors qu’ils s’acheminent vers leur destination dans Declinazione, 2002). Les deux vidéos Exposure Athens (2003) et Exposure Maceio (2001) développentce thème dans un contexte bien particulier : des personnes patientent dans unevoiture à l’arrêt (un taxi dans la première, la voiture personnelle dans la seconde)quelque part en ville. Dans la première vidéo, Exposure Athens, le cadrage estresserré sur la vitre arrière droite du taxi ce qui permet de visualiser le visagedu/des passager(s). L’univers urbain n’est perceptible qu’à travers le type devéhicule filmé : un taxi de couleur jaune. Dans Exposure Maceio, l’avant et l’arrièrede la voiture sont visibles ainsi que l’environnement immédiat (on aperçoit la rue,des passants, une vitrine de magasin…). La ville n’est plus seulement suggéréepar un élément emblématique (le taxi) mais réellement présente. La bande sonorede ces deux œuvres propose une retranscription des sonorités réellement perçueslors de déplacements routiers citadins (bruits plus ou moins mécaniques,répétitifs, sons de portières claquées, bribes de conversation…) proche de ce quenous éprouvons durant la somnolence : l’identification des sons se dilue, unedéformation et un éloignement s’opèrent. Cet effet insiste sur l’altération de lavigilance ressentie par toute personne confrontée à une situation d’attente tout enrenforçant la mise à distance de l’espace urbain que chaque passagerexpérimente à travers son enfermement dans la voiture. La simple présence d’uneclôture délimitée par la carrosserie génère un microcosme qui, tout enappartenant au macrocosme (la ville), s’isole de celui-ci. Chiara Pirito attire icinotre attention sur les notions de frontières, limites, groupes humains : àl’intérieur de la voiture, les règles comportementales ne sont plus les mêmes qu’àl’extérieur. Si l’intérieur d’un taxi, semblablement à la rue, demeure un espace public, lenombre d’occupants est particulièrement limité et sa fonction implique, pour lepassager, une véritable passivité. Cette inactivité, la station assise, la quasi-solitude et la petitesse des lieux favorisent un relâchement proche de celui quis’établit dans la sphère privée. Malgré la présence de la vitre qui maintient uneliaison avec le macrocosme urbain, le passager du taxi s’abandonne à sa« gestualité privée » 1 ainsi que le remarque l’artiste. La vidéo Exposure Athensn’expose pas uniquement une série de portraits volés car chaque personnagerepère, à un moment donné, l’artiste qui le filme : ressurgit alors soudainement la« personnalité publique » du passager qui, la plupart du temps, réagit avecinquiétude face à cette caméra. Dans Exposure Maceio, il ne s’agit plus d’un taxi mais du véhicule personnel : l’undes passagers ou l’unique occupant conduit. Chiara Pirito ne cadre plussimplement la vitre arrière droite de l’automobile mais l’ensemble de son côtédroit (nous pouvons donc visualiser ce qui se passe à l’arrière et à l’avant). Cecadrage affirme la notion d’ « habitacle » qui était certes développée dans laprécédente vidéo mais atténuée par une présentation partielle. Le parallèle entrecet « habitacle » et l’habitat, le domicile se manifeste avec évidence :immobilisation du véhicule, association des vitres à des fenêtres, dualité intérieur-extérieur mais aussi et surtout familiarité des échanges entre les passagers. Leurcomportement (détente, rires, amusement, relâchement, complicité…) parfoismême leur ressemblance physique nous indique qu’ils appartiennent à une mêmesphère privée. On devine des relations amicales, amoureuses et familiales. Notonsau passage qu’un chien, l’animal domestique par excellence, fait son apparitiondans l’une des voitures filmées. La dichotomie microcosme privé/macrocosmeurbain prend ici toute sa valeur, d’autant plus que les deux univers coexistent : la« voiture-cocon » est entourée par la sphère urbaine (rue, passants, autresvéhicules, vitrine de magasin…). Les passants – membres immédiats de la zoneurbaine – se distinguent d’ailleurs des passagers de la voiture – membres indirectsde la zone urbaine – par leur attitude : ils sont debout et marchent.Chiara Pirito brouille les pistes. Passants comme passagers appartiennent àl’espace urbain mais à des degrés divers, les seconds résidant en premier lieudans leur voiture. La rupture espace privé/espace public demeure perméable :ces deux milieux s’interpénètrent par l’intermédiaire des vitres. À l’intérieur duvéhicule, si la pluralité des êtres s’affirme à travers la multitude des particularitésgestuelles, des expressions, les différences d’âge, de sexe, de types physiques,l’attitude générale de chaque personnage soumis à cette même situation d’attente(relâchement, gestes autocentrés, rêveries…) traduit l’unicité du comportementhumain. Le procédé de création implique également une ambiguïté : le fait defilmer les gens dans leur voiture tout en restant visible mais sans le signaler ainsique la sobriété du montage (un groupe de passagers par séquence avec un

cadrage similaire pour l’ensemble)livrent un résultat qui s’inscrit « à mi-chemin entre télésurveillance etreportage ». 2

Dans ces vidéos, la ville ne semanifeste donc pas uniquement entant que sujet (milieu à la fois distinctet générateur d’espace privé) maisaussi à travers le choix du vocabulaireplastique qui s’apparente à celui desvidéos de télésurveillanceexclusivement produite dans et par laville.

Cécile Desbaudard

1. Chiara Pirito, Mulhouse 003 Les écoles d’arten France, catalogue d’exposition, Mulhouse, 9 au22 juin 2003, p. 372. Rubrique calendrier à propos de l’exposition Unan après à Vesoul 19/09/03-11/10/03, ArtPress n° 297, septembre 2003

Steve McQueen : Drumroll, 1998projections vidéos simultanées, 3 x 22 min.

Courtesy Galerie Marian Goodman Paris/New York

Chiara Pirito : Within Image, 2003, installation vidéo (son Enrico Ascoli)#2 peinture & vidéo : Dijon, appartement/galerie Interface, 06/05 - 11/06/06

Page 3: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

New York, Las Vegas et plus récemment Los Angeles sont au cœur des investigations deSarah Morris. À travers ces mégapoles américaines, elle poursuit ses observations sur lemonde urbain et sa culture. Ces Character Sketches l’ont fait connaître dans les années 90.L’artiste s’inspire de faits divers parus dans la presse (New York Times, New York Post…).Curieuse de l’impact des signes médiatiques, elle soustrait un mot récurrent de l’actualité etle reproduit en gros caractères sur un fond monochrome. Détourné et isolé de son contexte,celui-ci s’intègre au champ pictural. Son impact optique interpelle. Information et forme seretrouvent associées dans un pictogramme qui « …s’adapte et change selon le point de vuede celui qui regarde… », devenant un « …texte ouvert qu’on peut investir à volonté. » 1

À partir de 1997 dans Midtown, Sarah Morris va s’intéresser à l’image en mouvement. Elleréalise un court métrage, tourné en 16 mm. Sans fil narratif, différents points de vue de NewYork, illustrés par une musique rythmée et un montage dynamique, se succèdent à l’écran.Pour elle, « Le film se base sur [s]a manière de vivre au jour le jour, en circulant à traversdes situations et en construisant un chemin à partir de fragments visuels… Il ne s’agit pasd’une description de la surface des choses, mais d’une mise à nue de leur structure. » 2

Nocturnes, les premières images présentent des formes abstraites géométriques, sortes devitraux, constitués par les grilles lumineuses et colorées des façades vitrifiées des immeublesnew-yorkais. La perspective en diagonale, sur ces gratte-ciels, présente également dans cestableaux, nous rappelle le générique de Saul Bass de North by Northwest d’A. Hitchcock.Dans Midtown, ces visions partielles d’édifices entrecoupent différentes séquences où sesuccèdent, à l’écran, des plans larges sur la circulation de la foule dans la rue, descaptations en plans serrés d’un individu : un homme assis à côté d’une fontaine, un autretraversant la 43 ème Rue avec un porte-documents en fumant une cigarette ou encore unefemme en attente sur le trottoir. Le cadrage serré sur ses jambes chaussées de hauts talonsnous évoque la série High Heels de 1996. Cette surcharge d’instants morcelés de la viequotidienne, fractions d’impressions et de comportements humains de cette réalité new-yorkaise, s’associe dans l’imaginaire du spectateur à un « langage iconique » connu etdiffusé par le cinéma et la télévision. Conditionné dans sa relation référencée à la réalitépar la communication visuelle, celui-ci a déjà reçu et fait l’expérience fictive de New York.Il sait déchiffrer, utiliser et comment se comporter dans cette ville. « C’est cette notion

d’information pré-digérée » 3 que Sarah Morris tente d’explorer ici. L’architecture deManhattan représente un autre acteur de cette fiction. Animées, ces différentes surfacescolorées deviennent une composition de lignes et de formes épurées, perturbées parfois parle reflet d’une autre construction ou d’un autre élément de ce paysage urbain (ciel, foule,panneau publicitaire...). La transparence des vitres amène peu à peu le regard de la caméravers l’intérieur des bâtiments. Différents mouvements de circulation d’hommes et de femmesinscrits dans un espace intérieur et extérieur, se croisent à l’image. L’interférence de cesdéplacements anonymes, génère un rythme et un jeu de lignes mobiles. Ces tentativesd’abstraction du réel dénudent la modernité urbaine new-yorkaise. Au cœur de sa structure,Sarah Morris recadre et compile une vision fragmentée de cet univers. Elle tente dedisséquer l’identité fondatrice de cette ville tout en interrogeant la relation des individus avecl’environnement architectural. L’année suivante, Sarah Morris poursuit son exploration et dissection des grandesmétropoles américaines. Dans AM/PM, elle prend pour décor Las Vegas et s’intéresse plusparticulièrement au rapport visuel entre la publicité et l’architecture. Hôtel, fast-food,clignotement des panneaux publicitaires sont les protagonistes de cet univers du rêve factice,du jeu et du plaisir. Puis se sera Los Angeles (Trailer), 2004, filmé en 35 mm, comme unesorte de clip avec une bande sonore composée par Liam Gillick, qui présente les coulissesd’Hollywood et de ses stars. À travers la caméra, Sarah Morris explore les fondements de la forme identitaire de ces citésaméricaines. Par son expérience sensible et contemporaine de ces différents espacesurbains, elle réussit à capter les signes qui émanent de leurs architectures, de leurspopulations et de leurs archétypes populaires. La réception de ces informations et de cesimpressions visuelles lui permet de produire et de constituer une iconographie propre àchacune d’entre elle.

Marlène Gossmann

1. Propos de Sarah Morris, Michael Bracewell, Sarah Morris : Modern Worlds, Dijon, le Consortium, 1999, n.p.2. Propos de Sarah Morris, ibidem.3. Propos de Sarah Morris, ibidem.

Rangez vos cartes postales, éteignez la télé, fermezvotre dictionnaire du cinéma américain, la réalité quenous présente Mike Davis n’a rien d’éblouissant ; elle adéfinitivement attaqué le vernis glamour que l’industriecinématographique s’était attachée à appliquer, coucheaprès couche, sur Los Angeles. Au-delà de BladeRunner, Los Angeles et l’imagination du désastre 1 estun essai sociologique, urbanistique, économique etpolitique qui dresse le bilan de ce qui ressemble detoute évidence à la faillite d’un système. Analysant laville californienne (qui tient lieu de laboratoire social eturbanistique) l’ouvrage de Mike Davis dresse le portraitde l’Amérique contemporaine et présage ce quepourrait être l’évolution des sociétés occidentales.Désenchantement programmé. Dans le film de Ridley Scott Blade Runner 2, LosAngeles est devenue une mégapole apocalyptiquesoumise aux pluies acides et dans laquelle, sur fond depaysage technologique, l’hyperviolence règne enmaître. Vision négative d’un futur décharné, le filmfigure ce qui semblerait être le stade terminal de laville, celui à partir duquel rien d’autre n’est pluspossible que le chaos. Mais pour Mike Davis cela n’estque fiction, du moins en partie, et si cette contre-utopie annonce une inéluctable dérive, elle restemarquée d’un fantasme moderniste qui n’a finalementque peu de rapport avec la triste réalité qui recouvreaujourd’hui la ville de sa misère sauvage. Pour lui,« Blade Runner n’est pas tant le futur d’une ville que lefantôme des rêveries du passé. », et son ouvrage tendà prouver que la cité des anges est déjà entrée dansun futur définitivement plus trivial et inquiétant.Dans les années 20, le sociologue Ernest W. Burgessproposait une étude de la ville nord américaine etétablissait un diagramme archétypal représentant sahiérarchie spatiale (en prenant en compte la répartitiondes classes sociales, les origines, les typesd’habitats…), reprenant ce schéma de référence MikeDavis se propose de l’actualiser en y ajoutant le« nouveau » facteur surdéterminant de l’urbanisationangelienne : la peur. Les émeutes de 1965 et de 1992(ajoutées à la récession économique, à la baisseconsidérable du nombre d’emplois ouvriers, auxréductions de budgets alloués à l’aide social et àl’emploi public…) ont immanquablement participé à laredéfinition de la carte de la ville ; elles ont « froissé etrestructuré l’espace urbain » (l’auteur parle de« tectonique des émeutes »), elles ont provoqué uneobsession inconsidérée pour lasécurité personnelle et une volontéaffirmée d’isolation sociale. Alors LosAngeles a chuté. Les exemples ne manquent pas,l’argumentaire de Mike Davis s’appuiesur des événements factuels, desétudes de terrains… Ainsi la fuite en1965 des propriétaires fonciers du

cœur de la ville (prévenu par le L.A.P.D. 3 de l’imminenced’une « inondation » noire) vers un centre d’affairesécurisé (le bien nommé Bunker Hill) tient lieu depréambule à cette transformation urbaine. « Lesconnexions piétonnes traditionnelles entre Bunker Hillet le vieux centre ont été abolies, et la circulation à piedse fait désormais au-dessus de la rue sur des« pedways » surélevés 4 dont l’accès est contrôlé parles systèmes de sécurités de gratte-ciels individuels ».La privatisation de l’espace public s’accroîtdangereusement depuis 1992 et comme l’écrit MikeDavis pour les entreprises privées ou pour lespolitiques, aujourd’hui « Reconstruire L.A. veut direconsolider le bunker ». Le signe le plus manifeste de cette consolidation estsans doute la systématisation de l’ingérence policièredans le développement des projets d’urbanisme.Depuis les dernières émeutes, le L.A.P.D. soutient unprogramme de réduction en intervenant dans leprocessus de zonage. Dans des zones identifiéescomme sensibles, il met son veto sur les permis deconstruire ou les licences légales de toutes activitéscommerciales qu’il juge enclines à « attirer le crime ».Des « districts d’aggravations » ont été crées, deszones sans armes, d’autres sans drogues, à l’intérieurdesquelles les sanctions sont alourdies en casd’infractions. La liberté de circulation est mise à maldans certains quartiers, « En préalable à leur libertésurveillée, on distribue désormais aux prostituées unecarte partagée en secteurs, dont certaines partiesd’Hollywood, de South Central et de la San FernandoValley, où elles peuvent être arrêtées pour le simple faitde marcher dans la rue. » L’exclusion et lamarginalisation sont au cœur du système urbanistiqueet politique de Los Angeles. Pour préserver le calmesocial l’isolement semble être devenu l’ultime solution,ainsi ce que l’on nomme officiellement les « zones derepos » qui sont en fait des districts à l’intérieurdesquels on tente de maintenir les sans-abri pour qu’ilsévitent les « zones d’exclusion » (des quartiers aisés)avec leur très sérieuse ordonnance… « anti-camping » ! 5

La liste est longue, le développement argumenté :stigmatisation des populations noire et latino,programme de surveillance du voisinage, ghettoïsationde certains quartiers, développement de banlieuesvétustes à l’architecture jetable, de banlieues dorées…le contrôle social se confond à l’expérience urbaine. Eten même temps que la ville se délite, elle se déréalise.

Car pour faire face à cette déliquescence, Los Angelesest entrée dans une phase de simulation dans laquellel’idéalisation tente de remplacer la réalité. Pourpréserver le fantasme social, on a crée des bullestouristiques, reconstitué des quartiers historiquesdans des parcs d’attractions à l’extérieur de la ville.CityWalk reprend « les traits caractéristiquesd’Hollywood, d’Olvera Street et de Mid-Wildshiresynthétisés sous forme de « petits morceauxprémachés » destinés à être consommés par lestouristes et les résidents qui « n’ont que faire del’excitation produite par le sifflement des balles (…)dans le pays du tiers-monde » que Los Angeles estdevenu. ». Plus qu’une reconstitution CityWalk estprésentée par ces concepteurs (MCA) comme une« révolution de l’urbanisation », un exercicemonumental d’hygiène sociologique.La réalité décrite par Mike Davis dans son ouvragesemble tout droit sortie d’un roman de S-F (on penseévidemment à 1984 d’Orwell, Super-Cannes deBallard…). Mais elle trouve un écho plus probant dansl’actualité française (et c’est sans doute ce qui a incitéAllia à rééditer ce livre) : émeutes de banlieues,discrimination, refus de construction de logementssociaux par certaines municipalités, interdiction decirculer à plus de trois pour les mineurs, la finprogrammée de la mixité sociale et le replicommunautaire, explosion des systèmes devidéosurveillance et des sociétés de sécurités privées,pénalisation du « racolage passif », de la « mendicitéagressive »… Serions-nous alors à l’aube d’unetransformation socio-urbanistique à l’échelle de cellequ’a connu Los Angeles ? Le modèle social françaissaura sans doute nous préserver de telles dérives enpréférant l’intégration à la désintégration… N’est-ce pas ?

Guillaume Mansart

1. Au-delà de Blade Runner, Los Angeles et l’imagination du désastre,Editions Allia, Paris, 2006. Parution originale dans Ecology of fear,Metropolitan Books, Henry Holt and Company, New York, 1998,Beyond Blade Runner constitue le chapitre 7 de cet ouvrage.2. Blade Runner (1982), tiré du roman de Philip K. Dick Est-ce que lesandroïdes rêvent de moutons électriques ?3. Los Angeles Police Department.4. Pedways est la contraction de pedestrian ways, c’est-à-dire, voiespiétonnes.5. « Ainsi que l’ont observé des militants des droits civiques, lastratégie de district de contrôle social pénalise des individus pour leursimple appartenance à un groupe et ce, même en l’absence d’actescriminels. »

3

Mike DavisAu-delà de Blade Runner, Los Angeles et l’imagination du désastre

Sarah Morris : Midtown, 1998Vidéo – coll. Frac BourgogneSarah Morris ou une iconographie du réel

Fabrice Gygi : Palissades, 2000, métal galvanisé, grillage16 x (220 x 300 x 80 cm) – coll. Frac BourgognePhoto : André Morin, Paris

Page 4: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

© jordi colom

er - édition interface, dijon - 2006

Page 5: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans
Page 6: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

En 1967, le cinéaste Jacques Tati,observateur pointu de son temps dépeignaitdans un de ses derniers films, Play Time, laville, ses façades d’immeubles en grille et savie en angle droit : costards obscurs,intérieurs aseptisés interchangeables,parquets lisses et vitres transparentes,affiches touristiques arborant un décorplanétaire identique, celui de la modernité…Le film totalement incompris à sa sortiedétient en lui les germes d’un débat socio-politique très actuel et qui imprègnenettement les sujets de l’art contemporain. Eneffet, car si la révolte de Jacques Tati n’a pasencore de nom dans les années 60, celle deJordi Colomer, artiste catalan né en 1962,sculpteur et récemment vidéaste s’exprime dansun titre aux couleurs de la vague « anti-mondialisation » : Anarchitekton ! …En 2002, Jordi Colomer, filme le combatd’un homme qui semble le dernier rescapéd’une manifestation. Parcourant en solitaireBarcelone, Bucarest, Brazil, Osaka, ilbrandit une maquette bricolée en cartonreprenant grossièrement l’esthétique des édifices devantlesquels il passe. Curieux trophée qui n’a rien d’une flammeolympique ni d’un slogan véhément de propagande.L’action de cet homme semble plutôt dérisoire ; le rythmesaccadé et le manque de fluidité des mouvements nousdonnent à voir un personnage comme issu des premièresexpérimentations cinématographiques, l’absence de soncontribue à cet effet de film burlesque muet. Jordi Colomerqui a suivi au cours de sa formation en architecture unenseignement encore bercé par les illusions humanistesmodernistes, interroge dans ses vidéos le rapport del’homme à son environnement. Le protagonisted’Anarchitekton ressemble étrangement aux quelquesindividus rebelles qui ponctuent les films de Tati. Loin desmilitants acharnés, les résistants de Tati le sont sansprétention, sans discours, presque malgré eux ; rebellesparce qu’inadaptés, trop grands trop petits, non conformesaux mesures de l’esthétique design qui régissentl’environnement moderne. Simo, héroïne d’une despremières vidéos de Colomer pourrait appartenir à cettefamille de personnages. Dans un de ces immeubles où lesappartements sont conçus tous sur le même modèle, vitSimo, une naine, qui se réfugie dans une consommationmalade et absurde ; une collection démesurée de boîtes àchaussures et un appétit vorace pour la confiture qu’elleengloutit par poignées. Dans une société qui a la manie descanons et des systèmes de proportions, Simo incarne une

menine contemporaine perdue dans l’enceinte d’un palaisaseptisé, conçu sur des dimensions qui ne sont pas lessiennes, elle est désespérément en quête de goût et desaveur. Jordi Colomer, dans ce portrait sensible de Simo,pointe à nouveau l’exclusion violente de l’altérité issue de lavolonté même de l’architecture moderne d’uniformiserl’espace pour réduire les inégalités entre les hommes. Lavidéo parle de l’espace urbain mais comme à sonaccoutumée elle se range du côté de l’humain et de l’intime,mettant en scène une confrontation déchirante du collectif etde l’individuel, du social et de l’intimiste. Baudelaireévoquait la « désespérante fragilité de la ville », JordiColomer mesure ici la fragile résistance de l’humain et dusensible dans l’espace urbain que Simo se voit contrainte defuir pour survivre, sautant violemment par la fenêtre . Le duelse révèle en effet dangereux et cruel, tel que le montre LesVilles. Dans cette œuvre, l’artiste expose deux scènessemblables présentées en face à face où sur chacune d’elleune jeune femme parcourt péniblement la façade extérieured’un immeuble. Tandis que l’une parvient à se hisser jusqu’aubalcon, l’autre lâche prise et s’effondre au sol parmi les crisde la circulation. La quête effrénée d’un intérieur préservé del’espace collectif fait emprunter aux personnages de JordiColomer des postures bien peu commodes.La vision critique de la ville moderne par les artistes n’estpas un thème nouveau certes, songeons à la villetentaculaire de Fritz Lang, aux vues documentaires de

Stieglitz entre fascination et effroi mais JordiColomer l’aborde sous un angle de vueoriginal. L’expérience de la ville est vécuecomme une lutte entre le corps et l’espace.L’artiste prête à ses personnages le visage dehéros contemporains qu’il soumet à desépreuves semblables à celles imposées àSisyphe et aux Danaïdes. Absurdité et non-sens de la vie, le thème est éternel maisredouble de sens dans une société quiaffiche la consommation sans fin commemodèle de vie. Le mythe paraît revivre dansl’univers de Jordi Colomer, il le réactualiseen y insérant des images communesempruntées au cinéma, aux séries télévisées.Jordi Colomer semble nous livrer denouveaux contes, de nouvelles fables commeune réintroduction de contenu et de poésiedans un monde dénué de sens. Simo neressemble-t-elle pas étrangement à Boucled’Or ? De même dans Le Dortoir, JordiColomer filme le lendemain d’une grandefête à l’intérieur d’une tour de banlieue, leprogramme s’annonce dans la veine du

documentaire social, or, il n’en est rien. Partout sespersonnages, ses décors et sa lumière ont une teintefantastique. La caméra de Jordi Colomer nous fait visiterchacune des pièces, dans un mouvement rapide mais quibientôt nous fait prendre conscience que les objets amasséssur le sol, disques et mégots, sont faux faisant partie d’undécor grossièrement dissimulé. Les personnages assoupis surdes montagnes de matelas font songer à l’histoire de laprincesse au petit pois. L’œuvre de Jordi Colomer aquelques sonorités baroques, elle nous dévoile un véritablethéâtre de l’existence humaine, une sorte de vanitécontemporaine. L’artiste nous fait participer à la scène enprolongeant le décor factice de la vidéo dans l’espace decontemplation du spectateur. Jordi Colomer fait éclater ànotre vue notre condition, il nous révèle le vernis de notrequotidien et la face cartonnée de nos vies. Le trompe-l’œilne cherche définitivement plus à tromper, la farce et lemasque de la comédie humaine sont mis à bas. A nous dechercher une fin à cette tragique histoire….

Géraldine Griffon

Bibliographie : - Antich, Xavier, Colomer, Jordi. Espais obrats. Barcelone: Diputacio deBarcelone, 2003.- Alvarez Reyez, Juan Antonio, Colomer, Jordi. Ciudades sin nombre.Madrid: Comunidad de Madrid, 1998.- Jordi Colomer: algunas estrellas. Nice: Villa Arson, 2003.- Chalumeau, Jean-Luc. La ville dans l’art. Ed. du Cercle d’Art, 2000.

6

Jordi Colomer : Anarchitekton (Barcelone, Brasilia, Bucarest, Osaka), 2002-2004 Installation vidéos - coll. Frac Bourgogne

Phi Lee Lam à la recherche d’une vision authentiqueÀ l’ère de l’appréhension des paysages et de notre environnement immédiat par le biaisde technologies privilégiant la vitesse (TGV, avion, tramway…) et les informations entemps réel (système GPS pour guider les automobiles…), la cinéaste Phi Lee Lam chercheà établir un rapport à son environnement immédiat (urbain ou naturel) par le biais de sonpropre corps : par des gestes simples liés à la manipulation de la caméra en fonction desmouvements de son corps dans l’espace environnant, en fonction de ses émotions, de sesintuitions et même dans une certaine mesure de l’inconscient.À la recherche d’un « mouvement authentique, d’une vision authentique 1 », Phi Lee Lamtente d’être au plus proche de la relation de son corps et de son esprit avec l’espaceenvironnant à l’instant même où elle est en train de filmer. Cette pratique expérimentale de l’acte de filmer est comparable à une formed’improvisation 2. Les films conçus par Phi Lee Lam à l’aide de sa caméra portative super8 sont à la fois la trace et l’incarnation du mouvement. Ce sont avant tout des momentsvécus, fruits d’une improvisation lors de promenades avec ses amis, d’expériencepartagée au cœur de la ville.La marche se trouve alors être souvent un moyen de se confronter au monde, à desperceptions changeantes de l’espace, un prétexte pour expérimenter d’autres façons d’êtreconscient de l’environnement immédiat. Ceci n’est pas sans évoquer la figure du flâneur, qui apparaît à la fin du 19 ème siècle avecl’évolution urbaine des villes pour disparaître dans les années 1930. Le flâneur, évoquépar Walter Benjamin à propos de Baudelaire 3, ou incarné par Robert Walser 4, conçoit laville comme un paysage, un espace à découvrir, à parcourir au quotidien : « Emancipéde tout attachement à un quartier particulier, faubourg ou ancien village récemmentannexé, celui-ci jouit de la liberté que procurent l’anonymat des foules et l’immensité de laville. Le flâneur s’attarde aux devantures, se réjouit de petits riens, détourne ses pas versce qui au loin attire son attention. Sa marche s’assimile à une sorte de broderie,d’improvisation musicale, à une création permanente dont la production serait un flotd’images, d’impressions, de sentiments. » 5

Les déambulations de Phi Lee Lam évoquent quelque peu cette figure du flâneur héritée du19 ème siècle et prennent pour cadre des espaces urbains souvent inutilisés, des espacesprovisoirement laissés pour compte, en retrait des activités urbaines : jardins publics oulieux désaffectés. Ses promenades se prolongent par ailleurs hors de la ville : en forêt, enbord de mer, sur les routes abandonnées de la province de Brescia en Italie (« stradeautonome » projet en cours mené par la commissaire d’exposition indépendante Katia

Anguelova). L’apparition fugitive de ceux qui l’accompagnent, le pied d’un danseur, laprésence de deux corps enlacés, donnent alors l’échelle de l’espace environnant.Certains films des années 2002-2004, notamment Dunes (2004, super 8) nous livrentainsi la trace de promenades qui sont avant tout des flâneries intérieures, dans la mesureoù le processus mis en place par l’artiste lorsqu’elle filme s’élabore par le biais d’uneexpérience physique et mentale fondée sur l’improvisation et faisant intervenir les notionsde prise en compte du hasard, de l’accident, de la spontanéité, de l’intuition et del’intervention volontaire. En cela la démarche de Phi Lee Lam se distingue de la figure du piéton ou du nomadeurbain telle que l’a définie Thierry Davila pour les réalisations d’artistes contemporainscomme Francis Alys, Gabriel Orozco ou Stalker (6), pour se rapprocher de celle dupromeneur méditatif, telle que peut l’incarner Richard Long 7.A l’ère des écrans géants et des projections spectaculaires, Phi Lee Lam privilégie les lieuxprivés, les audiences restreintes et les temps de projection courts pour créer une ambianceintimiste, la possibilité d’un échange direct entre elle et le public. Placée au cœur desspectateurs avec son appareil de projection portatif, l’artiste réintroduit la dimensionperformative de son travail cinématographique, en intervenant sur la vitesse de projection,sur la taille de l’image, bougeant elle-même dans l’espace, proposant ainsi à chaquespectateur de se mouvoir à son tour… L’image projetée se déploie et se déplace au seinde l’espace d’exposition, jouant avec ses dimensions, passant du plafond, aux murs, ausol, se reflétant éventuellement sur le corps du spectateur, évacuant l’orientationtraditionnellement frontale et plane d’une projection cinématographique.La question de la relation du corps à l’espace est ainsi au cœur même du processus deprojection, révélant le dispositif au spectateur, incitant chacun à adopter une attitude(corporelle) active. Chaque nouvelle projection est ainsi un moment unique à vivre, àpartager. Cette démarche s’inscrit dans la lignée de l’expanded cinema des années 60-70,un phénomène hétérogène qui peut être caractérisé brièvement par la tentative d’uneextension des limites spatiales de l’espace de projection (expanded screen) ainsi qu’unecritique de l’occularcentrism (cette primauté accordée au visuel) 8.Chaque film est montré tel quel et ne fait pas l’objet d’un montage après coup. Lemontage intervient seulement lors de l’agencement de chaque film l’un après l’autre envue d’une projection publique. Bien que n’ayant pas pour objet de représenter une fiction,chaque film peut en soi constituer l’amorce d’une narration, une narration discontinue,fragmentaire, fondée sur la rupture et la juxtaposition d’évènements divers. Par la

Jordi Colomer : Simo et autres histoires

Page 7: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

Movingpossibilité d’une communauté à venir. Selon lui, la seule manière de recouvrerl’expérience serait de faire surgir un moyen qui n’a d’autres finalités que lui-même :de réinventer le geste. « Ce qui caractérise le geste, c’est qu’il ne soit plus question en lui ni de produire nid’agir mais d’assumer et de supporter. » 2 Voilà ce que Francis Alÿs créé par cettemarche, la réévaluation de la causalité processus / objet. Il redonne un sensnouveau au processus. Devenu potentialité constituante, il n’est plus astreint àproduire un objet final (l’œuvre) mais à modeler du temps et de l’espace et redonnerde l’expérience.Au fil de ses marches aux quatre coins du monde, le geste de Francis Alÿs estdevenu plus collectif, sa marche a forci sous le poids de la multitude. S’exilant unmoment de Mexico sa ville paradigmatique, l’artiste arrive en 2002 sur les terresdu Pérou et découvre les dunes de sables de Ventanilla non loin de Lima. Devant laprécarité économique du pays à l’époque, l’artiste a voulu « proposer un « beaugeste », une réponse « épique », à la fois futile et héroïque, absurde et urgente. » 3

qu’il apporta le 11 Avril 2002 sous le nom de When faith moves mountains. 4

Alÿs invita alors cinq cents volontaires à venir, munis chacun d’une pelle, sur l’unedes plus hautes dunes de sable de Ventanilla, pour former une ligne humaine longuede près de 1600 m couronnant le flan de la montagne. Ce « peigne humain » eutpour mission unique de pousser le sable lors d’une ascension collective. Au termede cette marche fédératrice, ces hommes et ces femmes ont ainsi déplacé de 4inchs (soit 10 cm) la montagne de sa position d’origine. Si le déplacement se révèle être infinitésimal pour la montagne 5, le geste collectifdont il découle est en revanche chargé d’une grande puissance symbolique.« L’action est réalisée avec la coordination des gens entre eux. La relation entre lesindividus qui se tiennent proches les uns des autres établit et maintient une ligne. Cetteligne est une des formes fondamentales de représentation de la communauté.» 6

Dans cette œuvre (tout comme dans la précédente), le geste initié par Francis Alÿsn’est pas un acte statique ou une action auto-référente, mais un geste en « route »à même de produire une expérience. Elle s’engendre dans l’effectivité du geste, seforme dans une correspondance simultanée. La marche n’est que la forme de cegeste mouvant qui impose sa force par l’irrationnel et l’absurde qu’il porte. Il troueà mesure qu’il dérive, grave les esprits à mesure qu’il se répand dans le temps del’événement et l’espace des dunes ou de la ville. L’œuvre a lieu le long de cettemontagne de sable engendrée par ces cinq cents volontaires unis, née le long deces rues marquées par ce bloc de glace. Les images qu’il en reste 7 deviennent alorsla trace de la mouvance du geste, résultat de cette traînée qui perdure commeautant d’histoire en marche aux multiples implications. « Où est le travail artistique ? voilà une question aux multiples réponses 8 » remarqueSusan Buck Moss face à ces événements et à la pléthore des propositions del’artiste. Mais ce dernier insiste : « Le film ne prétend pas remplacer l’événementlui-même, il suggère simplement à travers les images en mouvement l’essence duprojet, garde l’esprit de ce jour. C’est un produit au même titre qu’un autre (cartepostale, script, livres, images…). 9 »En écho à cette phrase du Christ qui veut que la foi puisse (littéralement) déplacer desmontagnes, Alÿs la transforme, sur les terres d’un Pérou malade, en allégorie sociale,en effort collectif 10 fabuleux, portant avec lui l’espoir d’un nouvel ordre social.Lorsque Cuauhtémoc Medina souligne à Lima : « La foi est un moyen par lequelchacun renonce au présent pour croire à la promesse d’un futur abstrait » 11 n’est-ce pas là toute la force du travail d’Alÿs, cette possibilité de croire en un futurabstrait qu’il transforme en un mythe urbain.De ce geste persiste alors l’histoire de ces femmes et ces hommes déplaçant unemontagne au Pérou, dont il incombe à présent de transmettre telle, une fablecontemporaine. À présent, dira l’un des participants au lendemain de cette marcheextraordinaire, nous allons peindre le ciel, boire l’Atlantique et faire fondre l’Antarctique.

Mélanie Perrier

1. Parfois faire quelque chose ne mène à rien.2. Giorgio Agamben, Moyens sans fin, Notes sur la politique. Ed. Rivages, Paris, 1995, p. 683. Francis Alÿs, Thousands words, Francis Alÿs talks about When Faith Moves Mountains, Art Forum, n°40,Summer 2002, p. 1474. Mise en place en collaboration avec Rafael Ortega et Cuauhtémoc Medina 5. Quoiqu’il faudrait attendre plusieurs milliers années, pour que le vent conduise à pareil résultat.6. Francis Alÿs, Shoulder to shoulder, a conversation between Geraldo Mosquera, Francis Alÿs, RafaelOrtega and Cuauhtemoc Medina, In When Faith moves mountains, Turner Edicion, Madrid, 2005, p. 1027. Pour « When faith moves mountains » subsiste une installation vidéo composée de trois écrans vidéos,une bande sonore et une table qui documente selon un point de vue singulier la performance originale.L’installation nous propose l’action répétée au fil des différents angles des caméras sur fond sonore de cespelles poussant le sol, et de ces volontaires poussant le sable.8. Susan Buck-Moss « Lines of Entry » in When Faith moves mountains, Turner Edicion, Madrid, 2005, p. 1379. Francis Alÿs, Answer to « Lines of Entry » of Susan Buck-Moss, in When Faith moves mountains, TurnerEdicion, Madrid, 2005, p. 14310. Nous pourrions à ce titre la rapprocher de l’intervention de Santiago Sierra 3000 trous de 180 x 70x 70 cm de 2002. Sur un terrain situé sur la colline d’où l’on peut voir la mer, l’océan Atlantique, le détroitde Gibraltar et la côte africaine, l’artiste a engagé et rémunéré environ vingt immigrés africains pour creuserdes trous aux dimensions d’un cercueil. L’action a duré plusieurs jours.11. Cuauhtémoc Medina, in Thousand Words : Francis Alÿs talks about When Faith moves Mountains, ArtForum, Summer 2002, p. 152

Des marches de Richard Long aux ballades d’André Cadere, en passant par lesdérives de Francis Alÿs, la performance a démontré depuis plus de vingt ans qu’ellepouvait s’extraire de sa pure endurance ou de l’épreuve corporelle et prendre leschemins de micro évènements où la marche se fait figure et les attitudes deviennentformes. À l’instar de ce qu’Allan Kaprow, dès 1958, appelait de ses vœux, cetteévolution ouvre vers un art mettant en avant « le sens de l’ordinaire » au creux del’expérience vécue et de la quotidienneté.Comme bon nombre de pratiques d’interventions contemporaines, les déplacementsde Francis Alÿs s’ancrent au creux d’un geste qui fait de la marche le théâtre d’unehistoire en cours. Parmi les déplacements parfois infimes de cet artiste belge vivant à Mexico, nousreviendrons sur deux d’entre eux, particulièrement symptomatiques de l’économie miseen place dans son travail : « Paradox of praxis » réalisé à Mexico en 1997 et plusrécemment « When faith moves mountains » réalisé à Lima en 2002. Paradox of Praxis(1997) est en effet caractéristique des coulées allégoriques initiées par l’artiste.Lors d’une chaude journée à Mexico City en 1997, un piéton - Francis Alÿs- entreprendde pousser un énorme bloc de glace le long d’un parcours dans la ville. À la faveur dufrottement au sol combiné à la chaleur ambiante de la ville, cette marche longue depresque 12 h conduira progressivement à la disparition de la glace. En fin de journée,ce parcours s’achèvera par une flaque d’eau abandonnée dans les ruelles de la ville.« Sometimes making something leads to nothing » 1 Telle est la légende qui nous estlaissée par la vidéo de cette marche laborieuse. Tel est le paradoxe de cette pratiquequi ne mène à rien, qui ne donne naissance à aucun objet. Mais une fois délesté d’une logique matérialiste, ce parcours nous conduit alors surd’autres terres, là où le geste entrepris par la marche laisse derrière lui un impactsymbolique fort. Car si cette longue marche paraît n’avoir aucune finalité en soi,c’est précisément pour nous dévoiler le geste comme un moyen sans fin.Ce geste de la marche soutiendrait alors l’idée d’un moyen libéré de toute relation àune fin, d’une médialité pure qui n’est plus astreinte ni à être à soi-même sa proprefin (comme l’agir) ni à être au service d’autre chose qu’elle-même (comme l’est lefaire). Ce geste s’exposerait comme tel, entendu sous l’acception de GiorgioAgamben qui réquisitionne cette notion de geste, seul à même de reconstruire la

7

Francis Alÿs : Moving gesture

répétition d’un même geste, l’accélération ou le ralenti d’une séquence, un gros planinattendu ou un arrêt prolongé sur un détail, Phi Lee Lam provoque l’imaginaire sansjamais imposer un sens précis, laissant la subjectivité de chaque spectateur s’emparer dufilm et construire sa propre histoire. La dimension poétique de son travail prend ainsi sasource dans les libres associations d’images et de sens, les alternances de séquencesabstraites et figuratives, mais se trouve relayée aussi par la possible disparition des films. Chaque bobine n’existe qu’en un seul exemplaire. Chaque film porte ainsi la trace desdétériorations occasionnées lors des projections précédentes, évoquant ainsi un desaspects de l’œuvre de Nam June Paik, Zen for film (1964). Le caractère fragile et délicatdes manipulations de la pellicule ressenti par le public lors des projections participe dudésir de faire partager cette prise de risque, cette possibilité d’une perte. Chaque nouvelleprojection peut alors être perçue comme un écho discret et adouci des préoccupationsd’Annabel Nicolson dont les performances cinématographiques comme Reel time (1973)mettaient en lumière la fragilité du médium, aboutissant même à sa destruction réelle.La démarche de Phi Lee Lam, visant à dynamiser l’acte même de filmer par rapport àl’espace environnant et à spatialiser le temps de la projection, renouvelle ainsi la pratiquedu film et le mode de la projection au profit d’un cinéma poétique, authentique.

Albane Duvillier

Phi Lee Lam, cinéaste indépendante basée à New York, est née en 1978 à Singapour. C’est dans ce pays où lacensure règne encore qu’elle a suivi des études techniques de cinéma avant de les poursuivre aux Etats-Unis auPurchase College dans l’état de New York, dont elle fut diplômée en 2004. 1. Entretien avec Phi Lee Lam, avril 20052. dans la lignée des recherches cinématographiques expérimentales américaines des années 50 (Maya Deren),des recherches de la scène new-yorkaise des années 60, du Judson Dance Theater (Yvonne Rainer, Robert Morris,ou encore Trisha Brown et Rauschenberg) et du groupe Anarchitecture mené par Matta-Clark dès 1973.3. Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l’apogée du capitalisme, Payot, Paris, 1979.Walter Benjamin, Paris, capitale du 19 ème siècle. Le livre des passages, Cerf, Paris, 1989.Aragon, Aurélien4. Robert Walser, la promenade, Gallimard, Paris, 2001.5. Marc Desportes, paysages en mouvement, Gallimard, 2005.6. Thierry Davila, Marcher, créer. Déplacements, flâneries, dérives dans l’art du 20ème siècle, éditions du Regard,Paris, 2002.7. Graham Beal, « Richard Long. The simplicity of walking, the simplicity of stones. » in cat. A quiet revolution,Bristish sculpture since 1965, Thames & Hudson, New York, 1987.8. Liz Kotz, « discipling expanded cinema », in X-screen, film installations and actions in the 1960s and 1970s,Museum Moderner Kunst Siftung Ludwig Wien, Walter König, Cologne, 2004.

Francis Alÿs : When faith moves mountains, 11/04/02, Lima (Perou) - En collaboration avec Cuauhtémoc Medina et Rafael Ortega

Phi Lee Lam : extrait du film Dunes, 2004, super8

Page 8: 18dijon HORSD’OEUVRE€¦ · Le cinéaste Dziga Vertov sera particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra de 1929. Tourné dans

Cimaise & PortiqueAux Moulins Albigeois 41 rue Porta - 81000 Albitél. 05 63 47 14 23ouvert tous les jours de 13 h à 19 hsauf mar.et jours fériés➤ « Anatopies » B. Broisat, L. Pernel, S. Reyes, S. Taillefer : 17/06 - 29/10/06

Théâtre Granit1 Faubourg de Montbéliard90000 Belforttél. 03 84 58 67 50ouvert mar. au sam. de 14 h à 18 het le dim. de 15 h à 18 h➤ « Un été 2006 » Gilles Picouet : 30/06 - 20/08/06

Ecole d'art Gérard Jacot(org. 10neuf)2 avenue de l'Espérance90000 BelfortTél : 03 84 36 62 10ouvert de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 hdu mar. au sam.➤ « La vie n’est pas Rose » F. Clavère, J-F. Sonnet, B. Swaim : 30/09 - 25/11/06

Emmetrop / Le TranspaletteFriche l'Antre-Peaux26 route de la Chapelle18000 Bourgestél. 02 48 50 38 61ouvert de 14 h à 18 h du mar. au sam. ➤ « Blue » Ingrid luche : du 17/10 - 25/11/06➤ « Prenons du bon temps » B. Audebert, P. Bamford, S. Bontemps,A. Breynaert, O. Dupont, G. Gross,E. Parchemin : 10/11-25/11/06

La Passerelle 41, rue Charles Berthelot 29200 Bresttél. 02 98 43 34 95ouvert le mar. 14 h à 20 h / du mer. au sam. de 14 h à 18 h 30➤ « Sol Système » M. Antezzo, O. Babin, G. Barbier, V. Barre, A. Dobler, R. Ganahl, D. Gonzalez-Forester, P. Joseph, D. Marcel, N. Moulin, G. Motti, S. Nikolaev, B. Peinado, M. Tschiember, P. Vadi, X. Veilhan& D. Artaud et V. Yassef : jusqu’au 15/10/06➤ « Presque réel…» S. Absuwan,T. Mahawat, K. Na Chiengmai, M. Shaoanasai, A. Weerasethakul,E. Florenty : 23/09 - 31/10/06

Frac Basse-Normandie9 rue Vaubenard - 14000 Caenouvert tous les jours de 14 h à 18 hsauf les jours fériés➤ « Une proposition de MathieuMercier » J-L Moulène, M. Adams,Diller + Scofidio, R. Opalka, B. Owens, A. Muntadas, H-P. Feldmann/V. Joumard/B. Peinado, B. Piffaretti, H. Reip, A. Séchas, F. Hybert, T. Rehberger : jusqu’au 17/09

Frac des Pays de la LoireLa Fleuriaye - 44470 Carquefoudu 1/07 au 31/08 ouvert du lun. auvend. de 13 h à 18 h et sam. dim. de15 h à 19 h à partir du 01/09 ouvert du mer. auvend. de 13 h à 18 h et sam. dim. de15 h à 19 h➤ « Electric trees and telephonebooth conversations » Martin Boyce : 09/07 - 08/10/06➤ « Other people’s time » AndrewMiller : 09/07 - 08/10/06

Hotel de Viviès(org. Cimaise & Portique)35 rue Chambre de l’Edit 81100 Castrestél. 05 63 59 30 20ouvert tous les jours, sauf le lundi et lesjours fériés de 14h à 19h➤ « Anatopies » Jordi Colomer : 17/06 - 29/10/06

Les silos7/9 av Foch, 52000 Chaumonttél. 03 25 03 86 82ouvert du mar. au ven. de 14 h à 18 hsam. de 10 h à 13 h➤ « Millimages : Fait main » Collectiond'affiches de la Ville de Chaumont :jusqu’au 02/09/06

Chapelle du GenêteilRue du Général Lemonnier53200 Château-Gontiertél. 02 43 07 88 96ouvert de 14 h à 19 h du mer. au dim.➤ « June » : Ann Veronica Janssens :24/06 - 17/08/06➤ « Michel Dans » : 16/09 - 12/11/06

Centre de Culture du paysNivernais Morvan(org parc Saint Léger)Abbaye de Corbignyrue de l’abbaye58800 Corbignytél. 03 86 20 02 53ouvert du mar. au sam. de 10 h à 18 h.➤ « Omvang Omgang » Krijn de Koning : jusqu’au 30/09/06

Centre d’art contemporain Synagogue de Delme33, rue Poincaré57590 Delmetél. 03 87 01 35 61ouvert du mer. au sam. de 14 h à 18h, dim. de 11 h à 18 h ➤ Jeppe Hein : 01/07 - 17/09/06

Frac Bourgogne49 rue de Longvic21000 Dijontél. 03 80 67 18 18ouvert du lun. au sam. de 14 h à 18 h➤ Katrin Sigurdardottir : 17/06 - 28/10/06

Galerie Interface12 rue Chancelier de l’Hospital21000 Dijontél. 03 80 67 13 86ouvert de 15 h à 19 hle mer., ven. et sam. et sur rdv➤ « peinture & vidéo #3 » Eduardo Srur / Ida Tursic & WilfriedMille : jusqu’au 29/07/06➤ « Séjour » Christelle Familiari : 16/09 - 28/10/06➤ « Art & Graphisme » : ../11 - ../12/06

Galerie Barnoud27 rue Berlier - 21000 Dijontél. 03 80 66 23 26ouvert de 15 h à 19 hle mer., ven. et sam. et sur rdv➤ « New works and some specialoffers » : Miguel Rothschild 09/06 - 15/07/06➤ Groupe BP : 07/09 - ../10/06

Bibliothèque Universitaire Droit -Lettres (org. Atheneum)4, avenue Alain Savary - 21000 Dijontél. 03 80 39 52 20ouvert de 9 h à 20 h du lun. au ven. et le samedi de 9h à 12h.➤ « Les locutions ordinaires » David Poullard, Guillaume Rannou,Florence Inoué : 04/10 - 22/12/2006

CAUE de Côte d’Or(org. Frac Bourgogne)24 rue de la Préfecture - 21000 Dijon Tél. 03 80 30 02 38 ouvert du lun. au ven. de 9 h à 12 h et de 14 h à 17 h➤ « Œuvres de la collection » E. Bossut, J. Dupuy, G. Friedmann,Man Ray : 03/05 - 25/08/06

CRAC - Château du Tremblay89520 Fontenoy-en-Puisayetél. 03 86 44 02 18.ouvert tous les jours sauf le lun. de 11 h à 19 h➤ « Labyrinthes et spirales » M. de Gémeaux, M.-C. Goussé, L’Atlas, F. de Ranchin, M-H. Richard, B. Rousselot, R. Perray, D. ReidNakamarra, G. Tjampu Tjapaltjarri, N. Napangati, D. Nungurrayi : jusqu’au 31/10/06

Abbaye Royale de Fontevraud(org. Frac Pays de la Loire)tel. 02 41 51 73 52ouvert du mar. au dim. de 14 h à 18 h➤ « un chant d’amours » R. Baquié, T. Drahos, P. Dufour, F. Hajamadi, L. Jammes, N. Kemps, H. Klingelhöller,J.-F. Lecourt, J. Muñoz, P. Tosani, H. Visch : 23/06 - 01/10/06

MAMCO10, rue des Vieux Grenadiers1205 Genève - Suissetél. 00 41 22 320 61 22 ouvert de 12 h à 18 h, du mar. au ven.,de 11 h à 18 h les sam. et dim. ➤ « Conjonctions. Mille et troisplateaux, 6ème épisode » L. Tuymans, S. Bächli, P. Cognée, L. Faulon, D. Huebler, A. Jaar, J-M. Meunier, A. Molinero et D. Savary : jusqu’au 17/09/06➤ « Conclusions. Mille et trois plateaux,7ème et dernier épisode » John M.Armleder : 17/10/06 - 14/01/07

Domaine Départemental de la Garenne Lemot (org. Frac pays de la Loire)Villa Lemot44190 Getignetel. 02 40 54 75 85ouvert tous les jours de 11 h à 18 h ➤ « Chambre avec vues » C. Dehove,D. Gonzalez-Foerster, R. Green, N. Hirakawa, U. Koch, C. Lévêque, B.Plantive, R. Signer : 23/05 - 29/10/06

Atelier Cantoisel32, rue Montant-au-Palais, 89300 Joignytél. 03 86 62 08 65ouvert du mer. au dim. de 14 h 30 à 18 h 30➤ « Le poids des choses » J. Hilliard,V. Joumard, B. Lavier, M. Mercier, S.Stokvis, L. Weiner : jusqu’au 02/10/06

Frac LimousinLes Coopérateurs Impasse des Charentes 87100 Limoges tél. 05 55 77 08 98ouvert du mar. au ven. de 10 h à 18 het le sam. de 14 h à 18 h fermé ledimanche, lundi et jours fériés ➤ « Nouvelles fabriques d'images etde sons Collection / Prospection » :07/07 - 28/10/06

Esox LuciusChez Patrice Ferrari - Les Sertines 71110 Ligny en Brionnais tél. 03 85 25 86 56 ouvert les mer., ven., sam., dim.de 14 h 30 à 20 h➤ « Eldorado » Harald Fernagu :02/07 - 06/08/06

Le magasinSite Bouchayer-Viallet55 Cours Berriat38028 Grenoble cedex 1tél. 04 76 21 95 84ouvert du mar. au dim. de 14 h à 19 h ➤ « Changement de climat » Michael Craig-Martin :jusqu’au 03/09/06➤ « Review » Vidéos et films de lacollection Pierre Huber : jusqu’au03/09/06➤ « Replay » la sphère punk :jusqu’au 03/09/06 ➤ Kader Attia : 15/10/06 - 07/01/07➤ Jonathan Meese : 15/10/06 - 07/01/07

g r e n o b l e

l i g n y e n B r i o n n a i s

l i m o g e s

j o i g n y

g e t i g n e

g e n è v e

f o n t e v r a u d

f o n t e n o y - e n - p u i s a y e

d i j o n

d e l m e

c o r b i g n y

c h â t e a u - g o n t i e r

c h a u m o n t

c a s t r e s

c a r q u e f o u

c a e n

b r e s t

b o u r g e s

b e l f o r t

a l b i

Si vous souhaitez que vos manifestations soient annoncées dans l’agenda du prochain numéro, une participation de 30 Euros minimum est demandée.

Musée des Ursulines20 Rue des Ursulines71000 Mâcontél. 03 85 39 90 38 ouvert de 10 à 12 h et de 14 h à 18 hsauf lun., dim. matin ➤ « La collection des Ronot,amateurs d’art au 19 ème Siècle » :jusqu’au 03/09/06➤ « Instantané, les fouillesd’archéologie préventive deSennecey-lès-Macon » : jusqu’au 31/12/06

Musée Lamartine41 rue Sigorgne71000 Macontél. 03 85 39 90 38ouvert de 10 à 12 h et de 14 h à 18 hsauf lun., dim. matin ➤ « Lamartine et l’abolition del’esclavage » : jusqu’au 03/09/06➤ « La collection des Ronot,amateurs d’art au 19e siècle » :jusqu’au 03/09/06➤ « Le sentiment de la nature chezAlphonse de Lamartine » : jusqu’au 31/12/06

Frac Lorraine - 49 Nord 6 Est1bis rue des Trinitaires57000 Metztél. 03 87 74 20 02ouvert du mer. au dim. de 12 h à 19 hsauf jeudi de 14 h à 21 h➤ Lida Abdul, Tania Bruguera :15/09 - 05/11/06

Faux Mouvement4 Rue du Change57041 Metztél. 03 87 37 38 29ouvert de 13 h 30 à 18 h 30 du lun. au sam. et sur rdv➤ « En - jeux » L. Bourgeat, R. Buchanan, C. Closky, E. Drot-Gorse,J.-J. Dumont , A. Györfi, L. Hart & J. Alma, J. Hubaut, J. Julien, S. Lallemand, P. Nardin, L. Perbos, U. Tzaïg :11/07 - 08/11/06

Domaine Olivier de Serres(org. Art 3)Le Pradel07170 Mirabel tél. 04 75 36 76 56➤ Suzanne Bürner, Marisa MariaLehrmann : 15/09 - 15/10/06

Le 10neuf19 avenue des alliés25200 Montbéliardtel. 03 81 94 43 58ouvert du mar. au sam. de 10 h à 12 h,14 h à 18 h et dim de 15 h à 18 h➤ « Zone de production -naissance d'une automobile »Dominique Dehais : jusqu’au27/08/06➤ « Un peu plus que le monde » J-L. Bari, D. Béguet, L. Bourgeat, M.Guillet, J. Prévieux : 09/09 - 12/11/06

Musée Beurnier-Rossel(org. le 10neuf)Place Saint Martin25200 Montbéliardtél.03 81 99 23 82 ouvert du mer. au lun. de 10 h à 12 het de 14 h à 18 h ➤ Lilian Bourgeat : 09/09-12/11/06

Frac Languedoc-Roussillon4 Rue Rambaud34000 Montpelliertél. 04 99 74 20 35ouvert du mar. au sam. de 14 h à 18 h➤ « Chauffe, Marcel ! »une manifestation organisée par leFrac Languedoc-Roussillon19 expositions présentées àMontpellier et dans la région17/06 - 29/10/06programme détaillé des expositionssur www.fraclr.org

Art BFC8, impasse du Chateau21610 Montigny-sur-Vingeannetél. 03 80 75 92 83ouvert les mer., sam, dim. de 14 h 30 à 19 h➤ « Un week end Art rien faire »A. Massaioli, S. Tubiana, B. Puthomme, C. Demonfaucon, G. Faugeras, E. Simonin : 16/09 - 08/10/06

m o n t i g n y

m o n t p e l l i e r

m o n b e l i a r d

m i r a b e l

m e t z

m â c o n

Galerie Art Attitude Hervé Bize17-19 Rue Gambetta54000 Nancyouvert du mar. au sam.de 14 h à 18 h et sur rdvtél. 03 83 30 17 31➤ « Carottage » Michel DectorMichel Dupuy : jusqu’au 13 juilletpuis ouverture sur rendez vous enaoût➤ « Œuvres récentes » Peter Rösel :21/09- 25/11/06

Centre d’Art ContemporainParc Saint-Léger - Avenue Conti58320 Pougues-les-Eauxtél. 03 86 90 96 60ouvert du mar. au dim. de 14 h à 19 h➤ « Looping » Claude Léveque :08/07- 01/10/06ouvert du mar. au dim. de 14 h à 19 h➤ « Femmeuses » : 21/10 - 22/12/063 journées de performances au Centred’art les 20, 21 et 22/10/06

Frac Champagne-Ardenne1, Place Museux51100 Reimstél. 03 26 05 78 32ouvert du mar. au dim. 14 h à 18 hfermé en aout.➤ « états seconds » Celeste BoursierMougenot : jusqu’au 15/12/06➤ « De pièces en pièces/Chroniques desœuvres nomades » : 15/11 - 14/01/07

Espace Croisé - Centre d’artGrand Place59059 Roubaixtél. 03 20 66 46 93ouvert du mar. au sam. de 14 h à 18 h➤ Pushpamala N : 14/10/06 - 13/01/07

Frac Alsace1, Espace Gilbert Estève67600 Sélestattél. 03 88 58 87 55ouvert du mer. au sam. de 14 h à 18 hle dim. de 11 h à 18 h➤ Monica Studer & Christoph VanDen Berg : 24/05 - 27/08/06➤ « Lieux communs, attitudessingulières » : Collection V : 13/10 - 22/12/06➤ « Parterrre du midi, détail »Bertrant Lavier : toute l’année

Centre d’art de l’Yonneles communs du Chateau de TanlayPlace du Général de Gaulle89430 Tanlaytél. 03 86 75 76 33ouvert tous les jours de 11 h à 18 h 30➤ « La peinture, en principe » J. Ber, D. Gauthier, J-L. Gerbaud, S. Hantai, P. Pantin, B. Piffaretti, C. Teisseire, C. Viallat : jusqu’au 29/09/06➤ « Une partie de la campagne »Philippe Bazin : jusqu’au 29/09/06

t a n l a y

s é l e s t a t

r o u b a i x

r e i m s

p o u g u e s - l e s - e a u x

n a n c y

INTERFACE - HORSD’OEUVRE12 RUE CHANCELIER DE L’HOSPITAL21000 DIJON - tél/fax : 03 80 67 13 86

➤ JORDI COLOMER / HORSD’ŒUVRE N°18Anarchitekton Barcelona, 2006600 x 420 mmImpression Offset 2 coul.sur Couché 250 GrTirage : 140 exemplairesnumérotés et signéspar l’artistePrix : 20 Euros(+ 3 Euros de frais d’envoi)

➤ VALÈRE COSTESPolymères, 200523 x 17 mm, fr. / angl.48 pages, ill. coul.coéd. Ensa-dijon, Interface, Frac Franche-Comté, Le Granit (Belfort)Tirage : 1 000 exemplairesPrix : 15 Euros(+ 2 Euros de frais d’envoi)É

ditio

ns

Bon de commande

HORSD’ŒUVRE n° 18édité par l’associationINTERFACE12 rue Chancelier de l’HospitalF - 21000 Dijont. / f. : +33 (0)3 80 67 13 [email protected]

Comité de rédaction :

Laurence Cyrot, CécileDesbaudard, Valérie Dupont,Astrid Gagnard, MarlèneGossmann, Guillaume Mansart,Nadège Marreau, Michel Rose,Marie-France Vo

Conception graphique :

Frédéric Buisson

Coordination, contacts Agenda :

Nadège Marreau

Ont participé à ce numéro :

Adeline Blanchard, CécileDesbaudard, Albane Duvillier,Marlène Gossmann, GéraldineGriffon, Guillaume Mansart,Mélanie Perrier, Michel Rose

Couverture :

CHRISTOPHE LANGENBACHANTENNE NOIRE, 2006photographie© C.Langenbach

Double page intérieure :

JORDI COLOMERANARCHITEKTON BARCELONA, 2006© J.Colomer (avec Idroj Sanicne.Maravills Productions)

Publié avec le soutien de laDirection régionale des affairesculturelles de Bourgogne, duConseil régional de Bourgogne,de la Ville de Dijon et del’ensemble des structuresannoncées dans l’agenda

Impression : ICO DijonTirage 5 000 exemplaires

Abbaye Notre-Dame de Quincy(org. Centre d’art de l’Yonne)Abbaye de Quincy89430 Commisseytél. 03 86 72 85 31ouvert tous les jours sauf mardi de 10 à 12 h et de 14 h à 19 h➤ « Irène et autres contes » Denis Pondruel : jusqu’au 18/10/06

Le creux de l’enferVallée des usines63300 Thierstél. 03 34 73 80 26 56ouvert tous les jours de 14 h à 19 h➤ « Concrétion » ThomasHirschhorn : jusqu’au 24/09/06➤ Muntadas : 15/10 - 31/12/06

CAC - Passages9 rue Jeanne d’Arc10000 Troyesouvert de 14 h à 18 hsauf dim. et jours fériéstél. 03 25 73 28 27➤ Ghislaine Vappereau : 13/09 - 03/11/06➤ « Passages /Souterrain »Nadine Monnin : 13/09 - 03/11/06

Art 38 Rue Sabaterie26000 Valencetél. 04 75 55 31 24ouvert du mer. au sam. de 14 h à 19 het sur rendez-vous➤ Kristina Solomoukha : 10/06 - 12/06

L’Office - ENSA de Dijon3, Rue Michelet21000 Dijontél. 03 80 30 21 27

paru (cat.) :➤ Aude Robert DVD (coéd.Centrecommercial de la Toison d'Or, l'Office -ensA de Dijon)➤ Grégoire Faugéras (coéd.Centrecommercial de la Toison d'Or, l'Office -ensA de Dijon)➤ Tatiana Trouvé (coéd. Cneai,l'Office - ensA de Dijon)➤ Valère Costes (Cat. & DVD (coéd.Interface, Frac Franche-comté, Le Granit- scènenationale, Belfort, l'Office - ensA de Dijon)➤ Loïc Raguénès (coéd. FracLanguedoc-Roussillon, Casino Luxembourg- Forum d'art contemporain - l'Office -ensA de Dijon)➤ Céline Emorine (coéd. atheneumcentre culturel de l'université debourgogne, l'Office - ensA de Dijon)➤ Luc Adami DVD (Coéd. Ville deDijon, l'Office - ensA de Dijon

à paraître (cat.) :➤ Hélène Magne & ClémenceAncelin DVD (Coéd. Ville de Dijon,l'Office - ensA de Dijon)➤ Anders Werdelin (coéd.Centrecommercial de la Toison d'Or, l'Office - ensAde Dijon)➤ Nathalie Ruiz ( l'Office - ensA de Dijon)➤ Takemura Kentaro (coéd.atheneum, l'Office - ensA de Dijon)

p u b l i c a t i o n s

v a l e n c e

t r o y e s

t h i e r s

© C

laud

ine

Colli

lieux

HO

RSD

'OEU

VRE.

Nanc

y. A

vril

2005