Chapitre II : Formulation de faible réactivitécsidoc.insa-lyon.fr/these/2004/adami/10_chapitre_2.pdfChapitre II : Formulation de faible réactivité 69 II.B.2. Etudes préliminaires
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Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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Chapitre II :
Formulation de faible réactivité
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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II.A. Introduction
Ce chapitre est consacré aux caractérisations cinétique et rhéologique
d'une formulation dont les temps de réaction sont de l'ordre de l'heure en
condition isotherme, afin de mettre au point notre protocole expérimental et
le valider ensuite avec des formulations représentatives de celles utilisées en
industrie.
Dans un premier temps, afin de sélectionner une formulation standard
sur laquelle centrer notre étude, nous avons effectué deux tests, qui nous
ont également permis d'établir des lois et des abaques du comportement
cinétique et rhéologique de nos formulations.
La deuxième partie de ce chapitre est centrée sur la modélisation de la
cinétique chimique du système. Le taux d'avancement ou la vitesse de
réaction sont étudiés en fonction du temps, de la température, et de la
composition du système réactif. En effet, les modèles ou les lois de
comportement cinétique alimenteront la base de données d'un logiciel de
simulation, c'est pourquoi nous devons être capables de prévoir la vitesse de
conversion (proportionnelle au terme source dans l'équation de la chaleur).
La troisième étape de l'étude consiste à étudier et modéliser la cinétique
rhéologique du système. Ainsi, une loi de comportement rhéocinétique peut
être établie. Elle décrit l'évolution de la viscosité avec le degré de conversion,
la température, et la composition du système réactif. La gélification et la
vitrification seront également étudiées. En effet, les temps correspondants à
ces deux phénomènes sont des paramètres clefs pour la maîtrise du cycle de
transformation. Ils caractérisent respectivement la fin de l'injection et le
démoulage de la pièce.
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II.B. Résultats et Discussion
Comme nous l'avons expliqué en introduction, nous avons commencé
notre étude par une formulation relativement lente par rapport à celles
utilisées dans l'industrie, afin de pouvoir mettre au point notre méthodologie
expérimentale et de la valider ensuite sur une formulation caractéristique du
procédé RTM.
II.B.1. Description de la formulation étudiée
Le système réactif utilisé est constitué :
- d’une résine UP, destinée à l'injection à basse température dans des
moules en matériaux composites. Le domaine de température choisi pour
l'étude est compris entre 25°C et 45°C. La composition du prépolymère
polyester est donnée en fraction molaire :
éthylène glycol : 0,33 - propylène glycol : 0,72
anhydride maléique : 0,33 - anhydride orthophtalique : 0,67
Elle est donc faiblement insaturée, et le rapport d'insaturation est égal à 4,8,
la résine contenant 47% en masse de styrène.
- d’un catalyseur : 2-éthylhexanoate de cobalt (II) à 6% dans un ester
aliphatique, nommé sel de cobalt. Celui-ci accélère par réaction
d’oxydoréduction la décomposition du peroxyde, qui amorce la réaction de
polymérisation. La quantité utilisée est comprise entre 0,1 et 0,4 g pour 100
g de résine.
- d’un amorceur : peroxyde de méthyléthylcétone (Luperox K1 -
Atofina). La quantité utilisée est comprise entre 1 et 2 g pour 100g de résine.
Les résines sont préalablement stabilisées et ne nécessitent pas l'ajout
d'inhibiteur.
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II.B.2. Etudes préliminaires
Ces deux études nous ont permis d'établir la fenêtre de moulabilité de
la formulation étudiée, et en particulier l'influence de la concentration des
différents constituants du système catalytique sur la réaction de réticulation.
Elles nous ont également permis d'établir des abaques et des lois de
comportement phénoménologiques décrivant le comportement de la résine
choisie, et de sélectionner une formulation standard sur laquelle centrer
notre étude.
II.B.2.a. Test de réactivité industriel
Ce test de réactivité industriel est basé sur une norme utilisée au Centre de
Production Cray Valley de Drocourt : une quantité de 50 g de mélange réactif
est introduit dans un bécher de 100 mL, placé dans un bain thermorégulé à
25°C (x et y étant fixes pour assurer une bonne reproductibilité). Un
thermocouple est placé au centre du récipient et permet de relever la
température en fonction du temps.
Cette procédure permet de connaître le temps nécessaire pour atteindre la
température de 36°C, que la norme assimile au temps de gel ou temps limite
de fin d'injection. Le temps pour atteindre le maximum d'exothermie est
considéré comme le temps de fin de réaction et donc de démoulage de la
pièce.
Ces temps caractéristiques sont utilisés par le fournisseur de résine pour
adapter la catalyse au procédé de mise en œuvre (temps de "gel" ou de fin de
réaction plus courts, diminution de l'exothermie de la réaction …).
La figure II.1 représente le type de "thermogrammes" résultants. Ceux-ci ont
été obtenus avec des formulations contenant 1,2 pcr de peroxyde (1,2 g de
peroxyde pour 100 g de résine) et en faisant varier la concentration en sel de
cobalt entre 0,05 et 0,5 pcr.
On peut remarquer que plus la quantité en sel de cobalt est élevée, plus les
temps relevés à 36°C et au maximum d'exothermie sont courts.
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Figure II.1 : thermogrammes pour différentes concentrations en sel de cobalt.
Ces résultats ont permis d'établir des abaques montrant le comportement de
mélanges à base de la résine et des quantités d'accélérateur et d'amorceur
variables. La figure II.2 montre l'influence de la concentration en peroxyde
sur les temps relevés à 36°C et au maximum d'exothermie.
Figure II.2 : influence de la concentration en peroxyde sur les temps à 36°C et
du maximum d'exothermie (taux de cobalt à 0,12 pcr).
On peut remarquer que ces temps évoluent de façon quasiment linéaire et
avec une pente négative dans la gamme de concentrations de peroxyde
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étudiée. Il n'y a pas une grosse influence de la concentration en peroxyde sur
ces temps caractéristiques. On peut noter également que ces formulations ne
pourront définitivement pas être utilisées pour le moulage par transfert de
résine (RTM), les temps de réactions pour ces domaines de concentrations
étant beaucoup trop longs pour être économiquement viables.
II.B.2.b. Rhéologie en régime permanent
La viscosité initiale et en cours de réaction du système réactif est un
paramètre clef lors du procédé RTM. Afin de connaître l'évolution de la
viscosité avant le gel en fonction du temps de réaction, nous avons utilisé un
rhéomètre couette Rheomat 115 commercialisé par Rheometrics.
II.B.2.b.1. Technique
La formulation étudiée est placée entre deux cylindres coaxiaux
verticaux. Le cylindre extérieur est fixe tandis que le cylindre intérieur est
animé d'un mouvement de rotation qui peut être à vitesse de rotation
constante Ω imposée (on mesure alors la contrainte τ) ou bien à contrainte τ
imposée, et on mesure alors la vitesse de rotation Ω. La contrainte τ à
laquelle est soumis le cylindre intérieur lorsqu'il tourne à la vitesse Ω est
proportionnelle à la viscosité η et à la vitesse de rotation Ω via un coefficient
prenant en compte les caractéristiques géométriques de l'appareil (rayons et
longueur des deux cylindres, effets d'extrémités).
II.B.2.b.2. Résultats et discussion
La réticulation du système réactif a été suivie à température ambiante, pour
différentes concentrations du système catalytique. Le temps t0 correspond au
temps où le peroxyde est introduit, car la réaction commence dès ce
moment. Il existe différents critères de gel. Le plus simple est de déterminer
le temps de gel par la tangente à la viscosité lorsque celle-ci diverge (figure
II.3).
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Nous avons ainsi obtenu les temps de gel pour différentes formulations dans
un large domaine de concentrations.
Ces temps évoluent généralement en suivant des lois de type puissance en
fonction de la concentration en amorceur ou en accélérateur.
On peut alors déterminer une loi de comportement rhéologique empirique de
la résine pour différentes concentrations de la forme :
t gel = Cste . [Co]a . [Peroxyde]b
où après identification des paramètres :
Cste = 60,1 a = - 0,4 et b = - 1,2
Figure II.3 : évolution de la viscosité avec le temps de réaction et détermination
du temps de gel.
La figure II.4 compare l’évolution du temps de gel en fonction de la
concentration en accélérateur et la loi de comportement rhéologique
déterminée précédemment, et on voit la très bonne concordance entre les
deux.
La figure II.5 compare l’évolution du temps de gel en fonction de la
concentration en amorceur et la loi de comportement rhéologique déterminée
précédemment, et on voit également la très bonne concordance entre les
deux.
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Figure II.4 : comparaison des temps de gel expérimentaux avec la loi de
comportement rhéologique à 25°C pour un taux en peroxyde de 1,2 pcr.
Figure II.5 : comparaison des temps de gel expérimentaux avec la loi de
comportement rhéologique à 25°C pour un taux en cobalt de 0,12 pcr.
Lors du test précédent (test de réactivité), nous avions vu que l'effet de la
concentration en peroxyde était de type linéaire sur les temps à 36°C. La
dépendance du temps de gel envers la concentration peut également être
exprimée selon une loi linéaire. En effet, la détermination de l'évolution du
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temps de gel s'est faite sur quatre points expérimentaux, ce qui occasionne
une incertitude sur la valeur de la puissance.
Malgré tout, les temps à 36°C sont toujours beaucoup plus petits que les
temps de gel. Dans le domaine de concentration de notre étude, les temps de
gel sont entre 5 et 10 fois supérieurs aux temps à 36°C. Cela montre que
l'assimilation du temps de gel au temps à 36°C est abusive. Si les cadences
de production sont déterminées selon ce test et que ces résultats sont
identiques pour des formulations industrielles, les résultats prouvent qu'une
étude sensiblement plus approfondie permettrait des gains de productivité
non négligeables. Néanmoins, le temps à 36°C étant toujours largement en
dessous du temps de gel, les utilisateurs se placent loin de la gélification
pour éviter tout problème lors de l'injection.
Ces études préliminaires nous ont permis d'établir la formulation optimale
en relation avec Cray Valley. En effet, les résultats montrent qu'une
formulation contenant 1,2 g de peroxyde et 0,12 g de sel de cobalt pour 100
g de résine est faiblement dépendante des différences de concentrations du
système catalytique.
En outre, elles ont également permis de mettre en œuvre des méthodologies
expérimentales pour la caractérisation rapide de systèmes réactifs à base de
polyester insaturé et d'établir des abaques et des lois empiriques du
comportement rhéologique de nos formulations.
La suite de l'étude est consacrée à l'étude cinétique approfondie de la
formulation standard sélectionnée.
II.B.3. Etudes cinétiques
Comme nous l'avons dit dans le premier chapitre, la cinétique chimique des
résines polyester insaturé a été étudiée à de nombreuses reprises dans le
passé. Dans la très grande majorité des travaux, la DSC (couplée ou non à la
spectroscopie moyen infrarouge) a été utilisée pour mettre au point les
modèles empiriques ou mécanistiques.
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II.B.3.a. Analyse par DSC
La calorimétrie différentielle à balayage se base sur la mesure du flux de
chaleur dégagé par les réactions chimiques. La réponse est donc une
réponse globale et ne permet donc pas une analyse quantitative et séparée
des réactions mises en jeu :
UP – UP : réaction entre deux insaturations UP.
S – S : réaction entre deux insaturations styrèniques.
UP – S : réaction entre une insaturation UP et une insaturation
styrènique.
Les cinétiques chimiques ont été mesurées à l'aide de la DSC7 de Perkin
Elmer. L'enthalpie totale des systèmes réactifs est obtenue dans des
conditions classiques d'analyse DSC (montée en température de 10°C/min,
balayage d'argon, plage de 0°C à 200°C, et isothermes dans la gamme de
température étudiée). La quantité de produit utilisée pour les expériences est
d'environ 10 mg. Température et enthalpie sont calibrées à partir d'étalons
de températures de fusion connues.
L'utilisation de capsules ouvertes ou de capsules fermées provoque une
perte de masse durant la réaction de l'ordre de 30%. Cette perte a été
attribuée à l'évaporation du styrène. C'est pourquoi nous avons choisi de
travailler avec des capsules scellées moyenne pression (de l'ordre de 3 atm),
afin d'éviter toute évaporation du styrène pendant l'expérience.
La mesure de la masse des échantillons avant et après passage en DSC nous
a assurée du bien fondé de cette action.
Nous avons rencontré deux problèmes durant cette campagne d'essai,
quelles que soient les températures ou les concentrations du système
catalytique :
(a) les thermogrammes obtenus en isotherme (figure II.6) ou en montée
de température (figure II.7) sont constitués de plusieurs pics exothermiques.
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Dans ce contexte, la modélisation de la cinétique de polymérisation devient
difficile. En effet, il n'existe pas de modèle phénoménologique permettant de
décrire ce phénomène.
Les différentes expériences ont montré que ces pics sont de nature
chimique (pas d’évaporation de styrène, de fusion, de cristallisation, ou de
déformation de la capsule, qui induirait une perturbation de la mesure du
flux de chaleur ; disparition de l’un des pics lorsqu’un élément du système
catalytique n’est pas présent).
Figure II.6 : thermogramme obtenu en isotherme à T = 50°C
Figure II.7 : thermogramme lors d'une montée en température (10°C/min)
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(b) les expériences, pour une même formulation ne sont pas du tout
reproductibles : Les figures II.8 et II.9 représentent les thermogrammes
obtenus pour une même formulation, dans les mêmes conditions
expérimentales.
Figure II.8 : thermogramme obtenu en isotherme à T = 31°C.
Figure II.9 : thermogramme obtenu en isotherme à T = 31°C.
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Quelle que soit la température de réaction, les constituants du système
catalytique et leur quantité, la chaleur de réaction garde sensiblement la
même valeur : 250-260 J/g. Par contre, les temps des pics exothermiques et
leurs hauteurs pour une même expérience (même formulation, même
protocole expérimental) sont très différents.
On voit que pour deux isothermes à 31°C, les temps pour le premier pic
sont de 125 et 200 min respectivement tandis que pour le second, 300 et
440 min respectivement !
Afin d'améliorer la reproductibilité de nos expériences et surtout comprendre
le phénomène responsable de ce problème, nous avons mis en place
différentes stratégies :
Il faut noter, que nos formulations contiennent 0,12 g de sel de cobalt
et 1,2 g de peroxyde pour 100 g de résine. En prélevant 10 mg pour l'essai
DSC, le risque d'avoir une très forte inhomogénéité de concentration au sein
de l'échantillon est élevé.
L'application d'un protocole expérimental strict (exactement le même temps,
à la seconde près et les mêmes conditions d'agitation) a permis d'avoir des
thermogrammes reproductibles en tailles relatives mais pas du tout sur les
temps (figures II.10 et II.11).
Figure II.10 : thermogramme obtenu en isotherme à T = 45°C.
∆H = 256,3 J/g
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Figure II.11 : thermogramme obtenu en isotherme à T = 45°C.
S.Bentadjine (78) a montré qu’il existait une interaction chimique
possible entre les amines et les oxydes métalliques présents à la surface de
l’aluminium ou du titane. Les ions "métalliques" diffusent dans le monomère
suite à l'attaque chimique par la diamine des oxydes plus ou moins hydratés
des surfaces métalliques.
Nos formulations ne contiennent pas d'amines, mais il est possible qu'une
interaction existe entre les oxydes métalliques et le sel de cobalt et/ou le
peroxyde. L’hétérogénéité des signaux DSC provient peut-être d’une catalyse
plus ou moins accrue de la réaction par ces composants réactifs. D’après
l’auteur, l’or peut être utilisé comme métal inerte, car les interactions sont
faibles ou quasiment nulles entre les réactifs chimiques et ce type de
substrat.
Nous avons donc procédé aux essais DSC, en utilisant des capsules scellées
moyenne pression dorées. Les résultats de cette étude n’ont pas été tout à
fait concluants, car les thermogrammes obtenus étaient aussi différents que
ceux montrés précédemment. Ils se différencient également par les temps
correspondant aux deux pics exothermiques.
∆H = 251,3 J/g
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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La stratégie suivante a été de travailler sous atmosphère modifiée
(argon ou azote) au moment de la préparation des échantillons. En effet,
l’oxygène de l’air peut inhiber la réaction de polymérisation. Les résultats ont
été concluants car nous avons obtenu une reproductibilité parfaite pour
deux expériences identiques (figure II.12).
Figure II.12 : thermogrammes obtenus pour des isothermes à T = 45°C.
Il est donc prouvé que l'oxygène de l'air est responsable de l'inhibition
de la réaction de polymérisation. En plus, nos échantillons DSC présentent
un rapport surface/épaisseur très élevé, ils sont donc très sensibles à cette
pollution. L'analyse de la réaction par spectroscopie moyen infrarouge n'a
également pas été concluante, pour les mêmes raisons que précédemment
(rapport surface/épaisseur très élevé, faible masse des échantillons, gradient
de concentration lors du prélèvement…).
C'est pourquoi nous nous sommes orientés vers une méthode capable
d'analyser des échantillons "macroscopiques" identiques à ceux utilisés dans
les conditions industrielles. La spectroscopie proche infrarouge permet de
travailler sur de plus grandes épaisseurs, de plus grande quantité, en moule
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fermé et donc de s’affranchir de la pollution par l’air et d'une éventuelle
hétérogénéité de concentration d’amorceur ou de catalyseur en solution.
II.B.3.b. Analyse par spectroscopie proche-infrarouge (PIR)
Le mode de génération des bandes PIR simplifie considérablement les
spectres par rapport au moyen infrarouge. De plus, l’absorptivité molaire est
typiquement de l’ordre de 10-2 dm3/mol pour le PIR contre 10 pour le MIR.
De ce fait, des échantillons épais (jusqu’à 5 mm) peuvent être analysés en
transmission en PIR contre quelques microns pour le MIR. Enfin, le verre est
transparent dans cette région ce qui permet d’analyser un échantillon
directement entre deux plaques de verre, plus maniables et moins fragiles
que les pastilles de KBr.
Nous avons utilisé pour cette étude le spectrophotomètre PIR-TF (proche
infrarouge à transformée de Fourier) Equinoxe 55 commercialisé par Bruker.
Il est constitué des éléments suivants :
- une source (lampe de tungstène),
- un détecteur InGaAs refroidi par effet Peltier,
- un compartiment échantillon et un compartiment fibres optiques.
Un moule en aluminium (6 x 6 x 0,3 cm) est équipé d'un système de
canaux chauffés et thermostatés par un bain d'eau. L'acquisition des
spectres a lieu directement dans le compartiment échantillon du
spectrophotomètre en transmission directe à travers les fenêtres de verre
adaptées sur le moule.
La figure II.13 représente deux spectres relatifs aux temps initial et final. Ils
montrent les pics caractéristiques des fonctions réactives et leur évolution.
On peut noter la présence de deux pics particulièrement intéressants, qui
disparaissent au cours du temps aux nombres d'onde déjà observés dans la
littérature pour les réactifs et produits. On peut donc espérer la possibilité
d'un suivi in-situ efficace par transmission.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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6140 cm-1
4790 cm-1
Figure II.13 : spectres initial et final lors de la réaction de polymérisation.
II.B.3.b.1. Attribution des pics caractéristiques
Avant de passer à l'analyse des spectres, nous avons étudié les
constituants de la résine de base (deux glycols, deux anhydrides, et le
styrène) et la résine "masse" (sans solvant). Nos résultats ont été analysés à
la lumière des études faites par Grunden (7) sur les résines polyesters. Dans
ce cas, le pic situé autour de 6140 cm-1 a été attribué aux insaturations
styrèniques.
La figure II.14 montre les spectres des constituants de la résine, la résine
"masse" et la résine elle-même autour de 6140 cm-1.
Il apparaît clairement que seul le styrène absorbe à ce nombre d'onde,
confirmant les travaux de Grunden. Nous utiliserons donc la diminution du
pic situé à 6140 cm-1 pour quantifier le taux de conversion du styrène.
Le pic situé à 4790 cm-1 correspond aux insaturations situées sur le
prépolymère polyester en accord avec les travaux de Grunden. Il existe
d'autres pics caractéristiques des fonctions chimiques qui nous intéressent
(4500, 4700 cm-1…), mais ceux que nous avons choisis sont relativement
isolés, ce qui permet une analyse rapide, sans déconvolution nécessaire
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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comme c'est le cas pour les autres pics. Afin d'appliquer le loi de Beer-
Lambert, nous devons connaître l'évolution de ces pics en fonction du temps.
Figure II.14 : spectres PIR des différents produits autour du pic
situé à 6140 cm-1.
Sur la figure II.15, il apparaît clairement que, quelle que soit la technique
d'analyse utilisée pour quantifier la disparition du styrène (calcul de l'aire, la
hauteur ou la hauteur déconvoluée), les résultats sont similaires jusqu'au
stade ultime de la polymérisation.
Par contre, en ce qui concerne le pic caractéristique des insaturations UP,
les résultats montrent que les calculs effectués avec les hauteurs
déconvoluées ou non sont en très bon accord. On peut supposer que le
calcul sur l'aire est faussé par les contributions de bandes d'absorption
adjacentes en cours de réaction. La ligne de base restant stable tout le long
de la réaction, nous avons donc décidé d'analyser les spectres en travaillant
sur la hauteur de ces deux pics caractéristiques.
Nous avons donc pu réaliser différentes isothermes comprises dans la
gamme de température souhaitée (la température est relevée par un
thermocouple au contact de la résine). La reproductibilité des expériences
est cette fois-ci très bonne.
Styrène
Résine
Glycol 1 Glycol 2
Anhydride 1 Anhydride 2
Résine masse
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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Figure II.15 : taux de conversions pour différents pics selon plusieurs
méthodes de calcul (aire, hauteur, hauteur déconvoluée DCV).
II.B.3.b.2. Suivi de la réticulation d'une résine UP
La figure II.16 présente les taux de conversion en insaturations UP en
fonction du temps de réaction. La formulation est constituée de 1,2 g de
peroxyde et 0,12 g de sel de cobalt pour 100 g de résine. Il faut remarquer
que les données en début de réaction ne sont pas forcément correctes car il y
a un temps de stabilisation thermique dans le moule.
Le temps d'inhibition de la réaction est plus court et le taux de conversion
final légèrement plus élevé lorsque la température augmente.
Ce taux de conversion est proche de 60% dans tous les cas. La conversion
n'est pas complète car durant la réticulation, un certain nombre de doubles
liaisons situées sur les chaînes polymères polyester se trouve emprisonné à
l'intérieur des microgels avec l'incapacité de réagir ; et surtout, après la
vitrification du système, seules les espèces styrèniques peuvent réagir par
diffusion.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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Figure II.16 : taux de conversions en insaturations UP pour différentes
températures en fonction du temps.
La cinétique globale est fortement influencée par le comportement du
styrène, celui-ci étant l'espèce chimique majoritairement présente. La figure
II.18 représente les taux de conversion globale et du styrène en fonction du
temps de réaction.
La conversion globale et la vitesse de réaction sont obtenues (si la réactivité
et l'accessibilité des différentes espèces sont identiques) grâce à la
composition de la résine (C=Cstyrène/C=CUP = 4,8) :
xglobale = 4,8/5,8.xstyrène + 1/5,8.xUP = 0,83.xstyrène + 0,17.xUP
Une nouvelle fois, le temps d'inhibition est plus court et la conversion finale
(proche de 80%) est plus élevée lorsque la température augmente. La
conversion finale en insaturations styrèniques est plus élevée que pour les
insaturations UP, car comme nous l'avons dit précédemment, les espèces
styrèniques sont beaucoup plus mobiles et peuvent diffuser dans le matériau
vitreux. Nous n'avons pas trouvé de corrélation entre le taux de conversion
final et la température de réaction.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
86
Figure II.17 : conversions globales et en insaturations styrèniques en fonction
du temps pour différentes températures.
A l'instar de Yang et Lee, on peut représenter la conversion des
insaturations UP en fonction de la conversion du styrène, pour avoir une
idée de la façon dont se déroule la polymérisation (figure II.18). La ligne
continue représente le cas extrême de la copolymérisation alternée, tandis
que la droite brisée représente le cas extrême de la copolymérisation
azéotropique (cas où la proportion des différents motifs du réseau polymère
est la même que dans le mélange initial).
On peut remarquer que la réaction de copolymérisation de notre résine n’est
ni azéotropique, ni alternée. Quelle que soit la température, le mécanisme
réactionnel semble être le même, car toutes les courbes suivent une courbe
maîtresse, à ceci près que plus la température est élevée et plus la
conversion finale en insaturations UP est élevée.
Il faut préciser, et c'est une limite importante de notre technique d'analyse,
que nous savons quelles espèces réagissent mais pas avec quelles espèces
elles réagissent.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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Figure II.18 : comparaison des mécanismes réactionnels pour différentes
isothermes.
Les réactions mettant en jeu le styrène sont favorisées tout au long de la
réticulation, car nos courbes sont loin de la copolymérisation idéale alternée,
avec une forte tendance à l'homopolymérisation pour des taux de conversion
élevés, car les liaisons UP ne sont plus accessibles (courbes horizontales à
partir de 50% de conversion en insaturations styrèniques).
Ceci s'explique par l'excès en concentration de cette espèce dans le milieu
réactionnel et sa possibilité de diffuser dans la matière proche de l'état
vitreux.
En représentant la vitesse de réaction globale en fonction du temps
(obtenue en dérivant la conversion globale en fonction du temps), on
retrouve l'allure des thermogrammes obtenus en DSC (figure II.19).
Les expériences faites en DSC détectaient deux pics exothermiques, mais ne
permettaient pas de comprendre leur signification. Grâce à la spectroscopie
proche infrarouge, nous avons pu interpréter ces pics : en représentant en
plus de la vitesse de réaction globale, les vitesses de réactions des
insaturations UP et styrèniques en fonction du temps, il apparaît clairement
qu'en isotherme, le premier pic exothermique peut être attribué à la
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
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copolymérisation UP-styrène, tandis que le second représente
l'homopolymérisation du styrène (figure II.20).
Figure II.19 : comparaison des vitesses de réaction obtenues en PIR et en DSC
pour une isotherme à 45°C.
Figure II.20 : vitesses de réaction pour une isotherme à 36°C.
Comme nous l’avons expliqué auparavant, la modélisation qui nous
intéresse est celle de la vitesse de réaction, terme source dans l'équation de
la chaleur, nécessaire dans tous les logiciels de simulation de prédiction des
échanges thermiques dans le moule. La figure II.21 représente donc la
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
89
vitesse de réaction globale en fonction de la conversion globale pour
différentes températures.
Figure II.21 : vitesses de réaction globales pour différentes températures.
Nous confirmons ainsi le fait que la vitesse de réaction augmente lorsque la
température augmente. Nous n'avons pas pu utiliser les modèles
phénoménologiques style Kamal et Sourour pour décrire les vitesses de
réaction. Ils ne sont pas en mesure de prendre en compte le deuxième pic de
réaction.
Malgré tout, nous avons trouvé différentes méthodes pour simuler la
cinétique chimique de nos formulations.
II.B.3.b.3. Modélisation de la cinétique chimique
II.B.3.b.3.a. Tentative d'application d'un modèle mécanistique
Conformément aux travaux d'Alglave (79), nous avons entrepris d'établir un
modèle mécanistique capable de simuler la cinétique chimique de nos
formulations.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
90
Les hypothèses de son modèle sont les suivantes :
- Il n'y a pas de polymérisation tant qu'il reste de l'inhibiteur (hypothèse
de l'inhibiteur parfait).
- La copolymérisation est décrite par une seule constante moyenne kp
dont la valeur varie avec le degré de conversion α suivant une expression du
type :
kp(x) = Ap(x).exp (-Ep/RT)
ainsi, on considère que l'évolution de la valeur de la constante de
polymérisation moyenne kp au cours de la réaction est due principalement à
la diminution globale de l'accessibilité des espèces réactives entre elles.
- l'augmentation de viscosité après le gel s'accompagne d'une forte
diminution de la vitesse de terminaison mais la vitesse de propagation ne
change pas. Cette hypothèse est la plus restrictive car elle suppose que l'effet
de gel affecte de manière suffisamment importante les réactions de
terminaison comparativement à la réaction de propagation, pour que celles-
ci deviennent négligeables dans les calculs de x et dx/dt.
Décomposition des amorceurs :
kd
R2 → 2 R• avec kd = Ad exp (-Ed/RT)
d'où d[R•(t)]/dt = - 2 d[R2(t)]/dt = 2 f kd [R2(t)]
Inhibition :
kz
R• + Z → RZ•
L'inhibiteur est supposé parfait, pour des temps inférieurs au temps
d'inhibition tz, la vitesse de réaction est nulle.
Au temps d'inhibition, le nombre de moles de radicaux libres formés est égal
au nombre de moles d'inhibiteur initial [Z]0 (affecté d'un coefficient
d'efficacité q). tz est donc solution de l'équation suivante :
q[Z]0 = R•(tz) = 2 [R2(t=0)] . [1 – exp (- tz0 f.kd.dt)]
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
91
avec [R2(t=0)] la concentration en peroxyde restant après la période
d'inhibition et qui servira effectivement à la polymérisation.
Détermination de kd :
En mode isotherme, cette dernière équation devient :
q[Z]0 = 2 [R2(t=0)] . (1 – exp (-f kd tz))
d'où f kd = - (1/tz) . Ln [ 1 - q[Z]0/2 [R2(t=0)]]
Dans tous les cas d'utilisation, [Z]0 << [R2(t=0)]
Donc kd ≈ q[Z]0/(2 f [R2(t=0)] tz)
Ainsi pour chaque isotherme, la mesure expérimentale de tz (abscisse de la
tangente au début de la courbe de conversion) permet de déterminer la
valeur de kd (T), en supposant que q/f ≈ 1 (figure II.22).
Figure II.22 : évolution de kd en fonction de 1/T.
On voit que kd obéit à une loi de thermodépendance de type Arrhénius. On
peut donc accéder aux valeurs de Ad et Ed.
On trouve ainsi :
Ed = 44,5 kJ/mol
et Ad = 119
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
92
Détermination de kp :
On détermine kp en traçant pour chacune des isothermes et pour un degré
de conversion x fixé, la valeur de ln[(dx/dt)/((1-x)(t-tz)[R2(t)])] en fonction de
1/T. La figure II.23 représente les résultats obtenus en utilisant cette
méthode. Une régression linéaire sur les points obtenus pour chaque degré
de conversion permet alors d'accéder aux valeurs des paramètres (Ed+Ep)/R
et 2.f.Ad.Ap(x).
Expérimentalement, les droites obtenus pour les différents degrés ont une
pente sensiblement identique jusqu'à 40% de conversion, mais après 40% de
conversion, celle ci diminue de façon importante.
Il devient clair ici que l'hypothèse d'une énergie de polymérisation Ep
constante au cours de la réaction n'est pas vérifiée.
Figure II.23 : variations de ln [(dx/dt)/(1-x)(t-tz)[Pi](t)] en fonction de 1/T pour
différentes conversions.
Le tableau II.1 donne les valeurs des différents paramètres et les énergies
d'activation apparentes calculées grâce à ces pentes :
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
93
conversion 10 % 20 % 30 % 40 %
a
13615
12676
11764
10828
b
34,81
31,56
28,40
25,21
Ep (kJ/mol)
68,7
60,9
53,3
45,5
tableau II.1 : ln = - a.1/T + b
L'impossibilité d'utiliser ce modèle et la complexité des autres modèles
mécanistiques nous ont poussés à chercher un modèle empirique plus
simple d'utilisation.
II.B.3.b.3.b. Modèle basé sur la séparation température /
conversion
Le maximum des pics est situé approximativement sur une ligne verticale. A
la manière de Bailleul et al., on suppose que la température de l'essai et le
degré de conversion sont des variables séparées :
dx/dt = K(T) . G(x)
et en considérant que G est égale à 1 pour x = x"max", on peut déterminer la
fonction K(T) qui est supposée suivre une loi d'Arrhénius de la forme :
K(T) = Kref . exp (-A . (Tref/T – 1))
Où Tref est arbitrairement choisie dans le domaine de température étudié.
Notre maximum de vitesse est atteint pour 14% de conversion globale, et en
traçant ln(K(T)), c'est à dire ln(dx/dt) pour x = x"max", en fonction de ((Tref/T)-
1), une droite est obtenue, dont la pente est –A et l'ordonnée à l'origine
ln(Kref).
Les résultats obtenus sont présentés figure II.24.
avec Tref = 32 °C = 305 K
Kref = 0,003655 et A = 21,445
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
94
Figure II.24 : ln K(T) en fonction de ((Tref/T)-1).
Si on compare ces résultats avec ceux de la figure II.23 :
A.Tref = Ep/R
d'où Ep = 54,4 kJ.mol-1
Nous trouvions une énergie d'activation apparente comprise entre 60 et 70
kJ/mol pour des taux d'avancement entre 10 et 20 %.
Connaissant la dépendance de la cinétique en température, on peut alors
déterminer sa dépendance au degré de conversion. Pour cela, connaissant la
fonction K(T), on peut calculer la fonction G(x) (figure II.25). Une fonction
polynomiale d'ordre 5 donne une bonne approximation de cette fonction
jusqu'à 20% de conversion, et ensuite s'en éloigne un peu.
Mais en comparant les expériences avec la modélisation, nous avons observé
que cette dernière est toujours en avance sur l'expérience. C'est pourquoi
nous avons utilisé une loi d'inhibition de la forme :
1)).dt - /t(-B.(T exp t refti0ref =
avec ti : temps d'inhibition.
Ainsi pour déterminer les paramètres B et tref, nous avons utilisé un critère
J à minimiser : [ ]2 ti0 refrefref t - 1)).dt - /t(-B.(T exp B) ,J(t =
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
95
G
(x)
G
(x)
Figure II.25 : G(x) et courbe moyenne en fonction de la conversion globale.
Figure II.26 : logarithme du temps d'inhibition en fonction de Tref/T - 1.
La figure II.26 permet d'accéder aux valeurs suivantes :
tref = 17,85 min
et B = 17,564
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
96
Si on compare ces résultats avec ceux de la figure II.21 :
B.Tref = Ed/R
d'où Ed = 44,5 kJ.mol-1
Nous avons donc un très bon accord entre ces deux résultats.
Sur les figures II.27 et II.28 sont représentées les courbes expérimentales
obtenues par spectroscopie proche infrarouge, et la modélisation de celles-ci
grâce à notre modèle cinétique (conversion en fonction du temps et vitesse de
réaction en fonction du temps pour différentes températures).
On remarque que ce modèle est assez efficace, même si à partir de 40 % de
conversion globale, on peut voir que celui-ci s'éloigne des expériences
(surestimation de la conversion en fonction du temps de réaction). Cela
provient du fait que les vitesses de réaction ne sont pas des fonctions
homothétiques les unes par rapport aux autres (les tailles relatives des deux
pics varient avec la température).
Figure II.27 : expériences et simulation du taux de conversion en fonction du
temps pour différentes températures.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
97
Figure II.28 : expériences et simulation de la vitesse de réaction en fonction du
temps pour différentes températures.
II.B.3.b.3.c. Modèle empirique : loi polynomiale
Les modèles phénoménologiques style Kamal et Sourour sont inopérants
pour décrire les cinétiques de réaction de notre résine. Nous avons alors
choisi de représenter les vitesses de réactions par des équations
polynomiales d'ordre 5 sans signification physique :
dx/dt = a1.x5 + a2.x4 + a3.x3 + a4.x2 + a5.x + a6
On considère que les six paramètres dépendent de la température. Nous
avons intégré l'équation à chaque température par la méthode de Runge-
Kutta. L'identification des 6 paramètres s'est faite en minimisant Σ(x - xcalc)2.
La figure II.29 représente ln ai en fonction de 1/T.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
98
ln a
iln
ai
Figure II.29 : dépendance en température des ai.
Tous les coefficients suivent une loi d'Arrhénius : ai = Ai exp (-Ei/RT)).
Les paramètres du modèle sont donné dans le tableau II.2.
coefficients a1 a2 a3 a4 a5 a6
Ai (x 10-3)
0,124
13,3
432,9
5297,6
10229
14351
Ei (x 10-3)
13,2
22,9
32,2
41,2
47,7
64
Tableau II.2 : paramètres du modèle empirique de type polynomial.
La figure II.30 représente cette modélisation sur le degré de conversion en
fonction du temps ; et la figure II.31 représente cette modélisation sur les
vitesses de réactions en fonction du temps, et on peut voir que cette méthode
donne de bons résultats dans le domaine de température considéré.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
99
Figure II.30 : taux de conversions expérimentaux et simulations en fonction du
temps pour différentes expériences isothermes.
Figure II.31 : vitesses de réactions expérimentales et simulations en fonction
du temps pour différentes expériences isothermes.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
100
Cette loi, sans signification physique, rend parfaitement compte de la
conversion finale pour chaque température. Mais pour qu'un modèle soit
validé, il faut que celui-ci soit également prédictif.
Ainsi, en intégrant l'équation cinétique avec l'histoire thermique de la résine,
on est capable de modéliser une expérience en dérive de température.
La figure II.32 montre le résultat de la simulation d'une expérience
anisotherme de 38°C à 29°C.
Figure II.32 : conversion et vitesse de réaction expérimentales et simulations
en fonction du temps pour une expérience en dérive de
température de 38°C à 29°C.
Cette loi décrit parfaitement les évolutions des vitesses de réaction et du
taux de conversion avec le temps.
Nous avons donc montré que nous avons à notre disposition toute une
palette de modèles empiriques qui modélisent avec succès nos réactions
chimiques.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
101
II.B.4. Etudes rhéologiques
Nous avons utilisé la rhéomètrie en régime permanent pour analyser
rapidement les temps de gel. Les mesures rhéologiques dynamiques
permettent de décrire le système de l'état liquide à l'état solide et d'avoir une
meilleure précision sur le temps de gel (indépendant de la fréquence) pour
différentes températures de réaction. Toutes ces mesures ont été menées en
régime isotherme dans la gamme de température de notre étude. Elles ont
été menées sur un appareil Rheometrics Dynamic Analyser (RDA700 ou
RDAII) muni d'un dispositif à plateaux parallèles. Le diamètre de ces
plateaux est de 40mm et l'épaisseur de l'échantillon est de l'ordre du
millimètre. Les spectres ont été enregistrés en balayage de fréquence avec
une déformation de 5%.
La plage de fréquence de l'étude est comprise entre 10 et 100 rad.s-1. En
effet, la faible viscosité du mélange initial et l'étroitesse de la zone de gel
obligent à adopter une plage de fréquence faible (1 décade), et pour des
fréquences inférieures à 10 rad.s-1, les temps de mesure deviennent trop
longs.
Un étalonnage en température des appareils de mesures rhéologiques a été
réalisé au préalable en plaçant directement un thermocouple en contact avec
l'échantillon dans tous les cas.
II.B.4.a. Détermination des temps de gel
Divers critères de détermination des temps de gel figurent dans la
littérature. Nous tenterons d'extraire les principaux pour analyser nos
résultats expérimentaux.
II.B.4.a.1. Facteur de perte tan δ
Le critère le plus utilisé est le croisement des courbes du facteur de
perte tan δ à différentes fréquences en fonction du temps de réaction. Au
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
102
point de gel, le module élastique G' et le module de perte G'' présentent la
même dépendance en loi puissance avec la fréquence.
G' ≈ G'' ≈ ωn et G* ≈ (jω)n
d'où δ = n.π /2
A partir de la valeur (tan δ) au point de croisement des courbes tan δ en
fonction du temps, on obtient l'exposant n qui pourra être vérifié par la
valeur de la pente de la dépendance (linéaire) de G' et G'', en coordonnées
logarithmiques, avec la fréquence.
La figure II.33 représente l'évolution de tan δ en fonction du temps de
réaction à différentes fréquences pour un isotherme à 45°C. On voit qu'il
n'existe pas de point isofréquence caractéristique du temps de gélification.
Figure II.33 : tan δ à différentes fréquences en fonction du temps pour une
isotherme à 45°C.
En effet, dans le mode à balayage de fréquence, les mesures sont faites
à des temps différents et pour une fréquence donnée, la réaction progresse
pendant le temps de la mesure. Il s'ensuit que la vitesse de réticulation doit
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
103
être suffisamment lente de sorte que la variation de module pendant
l'acquisition d'un point de mesure soit négligeable. Une autre raison à la non
existence d'un point isofréquence est la nature hétérogène de la
polymérisation étudiée (microgels – macrogel). C'est pourquoi nous nous
sommes orientés vers d'autres critères pour étudier le phénomène de
gélification.
II.B.4.a.2. Critère de Tung et Dynes
Tung et Dynes (80) considèrent que le gel arrive lorsque G' est égal à G''. Ce
critère constitue un cas particulier qui correspond à n = 0,5.
La figure II.34 est la représentation de ce critère à trois fréquences pour la
même isotherme à 45°C.
Figure II.34 : critère de Tung et Dynes pour une isotherme à 45°C.
Le temps correspondant aux croisements des courbes G'(t) et G''(t) varie en
fonction de la fréquence. Ce critère est néanmoins plus satisfaisant, car il
donne un intervalle de temps assez réduit (de l'ordre de la minute) pendant
lequel la gélification a lieu.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
104
II.B.4.a.3. Divergence du module de la viscosité dynamique
Le gel représente la connexion des microgels. La dimension de la
macromolécule ainsi formée n'est pas négligeable par rapport au réacteur
entraînant une divergence de la viscosité et l’apparition d’une réponse
élastique. C'est pourquoi, certains auteurs considèrent que le gel apparaît
lorsque le rapport η*/η0* ou G*/G0* dépasse une certaine valeur (à une
fréquence, en général 10 rad.s-1). La figure II.35 représente les variations de
η*/η0* avec le temps pour différentes températures. Le temps de gel
correspond à l'intersection de la tangente et de l'axe des abscisses. La
concentration en peroxyde est fixée à 1,2 pcr et celle en sel de cobalt à 0,12
pcr.
Figure II.35 : évolution de η*/η0* en fonction du temps pour différentes
isothermes et critère de gel.
II.B.4.b. Effet de la température
Comme attendu, lorsque la température de réaction augmente, la
viscosité de la résine augmente plus rapidement, et le temps de gel diminue.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
105
L'effet de la température de réaction sur la vitesse peut être décrit par une loi
d'Arrhénius. La concentration en sel de cobalt est fixée à 0,12 pcr.
Si l'on considère que le degré de conversion au point de gel est toujours le
même, les temps de gel devraient suivre une loi d'Arrhenius de la forme :
t gel = A.exp (Ea/RT)
[Per] en pcr 1,20 1,45 1,55 1,63
a
6849,3
6988,4
5765,1
6623,2
b
18,52
15,26
15,28
14,23
Ea (kJ/mol)
56,9
58,1
47,9
55,1
Tableau II.3 : paramètres ln t gel = a/T – b et énergies d'activation apparentes.
Figure II.36 : ln (tgel) en fonction de 1/T pour différentes concentrations en
peroxyde (taux de cobalt fixé à 0,12 pcr)..
La figure II.36 représente le logarithme du temps de gel en fonction de
l'inverse de la température pour différentes quantités en peroxyde (taux de
cobalt fixé à 0,12 pcr). Vu le faible nombre de points expérimentaux, la
valeur des pentes de droites est entachée d'une certaine erreur. Il ne paraît
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
106
pas y avoir de relation directe entre la quantité de peroxyde et l'énergie
d'activation apparente. On peut voir que l'énergie d'activation moyenne est
égale à Ea = 54,5 kJ/mol-1, valeur en très bon accord avec l'énergie
d'activation de propagation calculée grâce au modèle cinétique (figure II.24).
Le tableau II.3 donne les valeurs des paramètres et les énergies d'activation
apparentes calculées.
En se servant de la loi pour 1,2 pcr de peroxyde, on peut déterminer les
temps de gel pour les isothermes faites en spectroscopie proche infra-rouge.
Le tableau II.4 donne les valeurs de conversions UP et globale au gel pour
différentes températures. Il ne semble pas y avoir de relation directe entre
conversion au gel et température de réaction. Il faut dire qu'il existe une
incertitude sur les valeurs de la conversion dans les premiers temps de la
réaction (calcul sur la disparition d'un pic chimique), qui nous oblige à
donner un intervalle de conversion pour l'apparition du gel : entre 2,5 et 5 %
de conversion globale.
T°C 44.5°C 36°C 27°C
Xgel UP
5,5 %
9,4 %
7,7 %
Xgel globale
2,5 %
5 %
4 %
tableau II.4 : conversions au gel pour différentes températures de réaction.
II.B.4.c. Effet de la concentration en amorceur
L'effet de la concentration en peroxyde est montré figure II.37 pour des
isothermes à 45°C (taux de cobalt fixé à 0,12 pcr).
- L'augmentation de la concentration en peroxyde a pour effet de
diminuer le temps de gel. On peut représenter le temps de gel en
fonction de la quantité de peroxyde (figure II.38).
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
107
Figure II.37 : η*/η0* en fonction du temps pour différentes concentrations en
peroxyde à 45°C (taux de cobalt fixé à 0,12 pcr).
Figure II.38 : tgel en fonction de la concentration en peroxyde à 45°C (taux de
cobalt fixé à 0,12 pcr).
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
108
La loi puissance décrit bien l'influence de la quantité de peroxyde sur les
temps de gel. Mais la valeur de cette puissance est proche de 1. Nous
confirmons la dépendance linéaire entre temps de gel et quantité de
peroxyde. La meilleure façon de modéliser le temps de gel est de décomposer
en deux lois linéaires selon la quantité de peroxyde (pour un taux de cobalt
fixé à 0,12 pcr) :
- en dessous de 2 pcr de peroxyde : tgel = - 9,4.[Per] + 32,0
- au dessus de 2 pcr de peroxyde : tgel = - 4,5 . [Per] + 21,9
II.B.4.d. Effet de la concentration en accélérateur
L'effet de la concentration en sel de cobalt est montré figure II.39 pour
des isothermes à 40°C pour un taux de peroxyde fixé à 1,2 pcr.
L'augmentation de la concentration en sel de cobalt a pour effet de diminuer
le temps de gel. On peut représenter le temps de gel en fonction de la
quantité de cobalt (figure II.40).
Figure II.39 : η*/η0* pour différentes concentrations en cobalt à40°C (taux de
peroxyde fixé à 1,2 pcr).
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
109
On peut relier le temps de gel à la quantité d'accélérateur par une loi
puissance ou une droite. La valeur de la puissance est égale à 0,17 ; valeur
assez éloignée de celle trouvée par rhéomètrie couette. Néanmoins, le faible
nombre et la dispersion des points expérimentaux expliquent cette
différence.
Figure II.40 : tgel en fonction de la concentration en Co à 40°C (taux de
peroxyde fixé à 1,2 pcr).
II.B.4.e. Modélisation de la viscosité
Yang et Suspène ont montré que quelles que soient les températures de
réaction, les concentrations en accélérateur ou amorceur, le logarithme de la
viscosité spécifique (ηs* = η*/η0*) en fonction d'un facteur temps modifié (t/t
gel) peut être modélisé par trois droites représentant les étapes de la
réticulation (microgels, transition, macrogel).
La figure II.41 représente le logarithme de la viscosité spécifique (η*/η0*) en
fonction de t/t gel pour des réactions à différentes températures et différentes
concentrations du système catalytique.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
110
On voit bien que dans notre cas aussi, l'évolution de ln (η*/η0*) peut être
modélisée par trois droites suivant les régions :
- région contrôlée par la concentration en microgels jusqu'à 80% de tgel :
ln (η*/η0*) = 0,1 + 2,5.(t/tgel)
- région de transition :
ln (η*/η0*) = - 6,2 + 9,7.(t/tgel)
- région contrôlée par la réticulation inter-microgel :
ln (η*/η0*) = - 21,9 + 27.(t/tgel)
Figure II.41 : ln (η*/η0*) en fonction de t / tgel.
La loi qui nous intéresse est celle qui permet de modéliser la viscosité
jusqu'à 80% du temps de gel. On peut ainsi la mettre sous la forme :
η* = η0*.exp (0,1+2,5.(t/tgel))
avec η0* = K' exp (Eη/RT) (figure II.42)
et tgel = K exp (Eg/RT)
ainsi : η0* = 3,18.10-18 exp (Eη/RT) avec Eη=103,2 kJ/mol
et tgel = 1,34.10-7 exp (Eg/RT) avec Eg=54,5 kJ/mol
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
111
La figure II.43 présente les résultats de cette modélisation sur différentes
formulations jusqu'à 80% du temps de gel.
Figure II.42 : ln η0* en fonction de 1/T
Figure II.43 : viscosité dynamique η* expérimentale et simulée en fonction
du temps pour différents systèmes réactifs.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
112
On voit que malgré les différentes approximations sur les énergies
d'activation apparentes et les facteurs pré-exponentiels, le modèle trouvé est
très proche des expériences réalisées. Les modèles développés permettent
donc de prédire le temps limite au-delà duquel l'injection n'est plus possible,
et suivre la viscosité en fonction du temps au cours du remplissage du
moule.
Après cette étude sur la gélification, nous allons nous intéresser à la
vitrification, qui est un paramètre très important durant la réticulation. En
effet, elle a un impact important sur la cinétique chimique et marque la fin
de la réaction donc, le moment du démoulage sur un moule industriel.
II.B.5. Analyses diélectriques
II.B.5.a. Suivi d'une réaction
Le suivi de réticulation par analyse diélectrique a été réalisé par un
capteur interdigité TMS (tool Mount Sensor), commercialisé par Micromet et
placé dans une presse chauffée. L'appareil utilisé pour les mesures est un
microdiélectromètre Eumetric System III de Micromet Instruments. Il génère
des signaux sinusoïdaux dans la gamme de fréquences comprises entre 10-3
et 105 Hz sous une tension constante de 1V. Ces signaux sont transmis au
capteur via une interface. Les fréquences élevées permettent d'obtenir des
informations sur le début de la réaction, et les basses fréquences
renseignent sur la fin de réaction.
Les courbes expérimentales des variations du logarithme de la
conductivité ionique σ en fonction du temps de réaction pour une
polymérisation isotherme à 46,5 °C sont représentées figure II.44.
On peut distinguer trois zones :
• Zone I : au début de la réaction, la viscosité du milieu réactionnel est
peu élevée. La mobilité des entités ioniques n'est pas entravée par les forces
de viscosité, c'est pourquoi les valeurs de conductivité sont relativement
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
113
élevées. Aucune réaction n'a lieu durant le temps défini par cette zone,
correspondant au temps d'inhibition. L'augmentation de conductivité
observée est due à la mise en température de la résine qui devient plus fluide
qu'à température ambiante.
• Zone II : au cours de la réaction de réticulation, le réseau se constitue,
il devient de plus en plus dense ce qui a pour effet d'augmenter la viscosité
de la résine, rendant de plus en plus de difficile la mobilité des ions. Les
valeurs de la conductivité ionique diminuent d'environ 3 à 4 décades. La
pente peut être reliée à la vitesse de la réaction. Plus la pente sera abrupte et
plus la réaction sera rapide.
Figure II.44 : évolution du logarithme de la conductivité ionique en fonction du
temps à différentes fréquences.
Nous observons également l'apparition de pics relaxationnels,
caractéristiques du phénomène de vitrification. Les sommets de ces pics sont
décalés vers des temps d'autant plus courts que la fréquence de mesure est
élevée. La fin de la réaction ou le ralentissement de la réaction causé par la
vitrification du système se caractérise par une stabilisation de la
conductivité ionique. Il faut noter que cette stabilisation intervient à des
temps plus longs aux basses fréquences. Cela signifie que selon la fréquence
I II III
vitrification
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
114
choisie pour suivre une réaction, on peut définir un temps qui ne sera peut-
être pas celui correspondant au taux de conversion le plus important.
• Zone III : elle correspond à la fin de réaction. La conductivité ionique
reste constante.
II.B.5.b. Conductivité initiale en fonction de la température
Nous avons pu voir sur la figure II.44 qu'aux premiers temps de la
réaction, nous assistions à une légère hausse de la conductivité ionique.
Celle-ci est due à l'augmentation de la mobilité ionique durant la mise en
température de la résine au sein du moule. Une fois la température
stabilisée, la valeur de la conductivité reste constante durant un temps
correspondant à la période d'inhibition. C'est pourquoi afin de modéliser
correctement la réaction de réticulation, nous considérons la valeur
minimale de σ pour σ0.
Les variations du logarithme népérien de la conductivité initiale σ0 ont été
tracées sur la figure II.45 en fonction de l'inverse de la température. On voit
que σ0 suit une loi d'Arrhénius.
Figure II.45 : ln σ0 en fonction de l'inverse de la température (K-1).
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
115
Ainsi on trouve Eσ = 38,0 kJ.mol-1, valeur très éloignée de celle trouvée pour
la viscosité initiale (Eη = 103,2 kJ.mol-1). La raison à cette différence est que
nous ne nous intéressons pas aux mêmes espèces lors des deux analyses
(chaînes ou espèces ioniques). Une autre explication peut être avancée : le
système de régulation thermique des deux expériences est différent (air pulsé
ou presse chauffée). Enfin, nous avons vu que la détermination des
viscosités et des conductivités ioniques initiales n'est pas évidente et
imprécise (mise en température de la formulation en compétition avec le
début de la réaction).
II.B.5.c. Détermination de la vitrification
Il est très important de savoir à quel moment intervient la vitrification
lors d'une réaction de réticulation, car la cinétique sera contrôlée par la
diffusion des espèces à partir de ce moment là. Généralement pour
déterminer le temps de vitrification, on considère le maximum du pic de
relaxation à haute fréquence. Mais la façon la plus précise est de déterminer
le temps correspondant au point d'inflexion sur les courbes de permittivité à
haute fréquence.
Il ne faut pas oublier que la vitrification est un phénomène réversible
mais surtout progressif, la limitation de la conversion commence lorsque la
vitrification débute. C'est pourquoi il peut être intéressant de comparer non
seulement les temps de vitrification mais aussi les temps de début de
vitrification avec les cinétiques chimiques obtenues par spectroscopie proche
infrarouge. Evidemment, la correspondance n'est pas justifiée théoriquement
car le temps de vitrification dépend de la fréquence de mesure. Néanmoins,
elle indique dans quelle zone de temps intervient cette transformation
structurelle.
La figure II.46 représente le logarithme népérien des temps de
vitrification et de début de vitrification en fonction de l'inverse de la
température. Ces deux temps ont une évolution de type Arrhénius sur le
domaine de température considéré.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
116
Figure II.46 : logarithme du temps de vitrification et du début de vitrification en
fonction de 1/T.
Figure II.47 : conversions globales et temps de vitrification et de début de
vitrification pour quatre isothermes en fonction du temps.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
117
La figure II.47 montre à quels moments le début de vitrification et la
vitrification mesurés par diélectrométrie interviennent lors d'une réaction de
polymérisation (suivie par spectroscopie proche infrarouge).
On peut remarquer que le point d'inflexion trouvé sur les courbes cinétiques
correspond à peu près au début de la vitrification détectée par
diélectrométrie, et que ce phénomène influence très fortement le
comportement cinétique de nos formulations. On peut remarquer que la
vitrification intervient autour de 70% de conversion. Plus la température est
élevée et plus le taux de conversion au moment de la vitrification sera élevé.
La figure II.48 représente ces temps sur les vitesses de réaction. Les
résultats sont très intéressants et permettent de mieux appréhender le
comportement cinétique de nos formulations.
On voit que le début de la vitrification (en pointillés) apparaît à la fin du
premier pic quelle que soit la température. Il marque la fin de la mobilité des
"grosses" chaînes polymères et donc la fin de la réaction des insaturations
UP. Seules les insaturations styrèniques peuvent continuer à réagir en
diffusant au sein du matériau semi-vitreux, ce qui explique le deuxième pic
de réaction exothermique.
Figure II.48 : vitesses de réaction et temps de vitrification et de début de
vitrification pour quatre isothermes.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
118
Le moment où la vitrification a lieu correspond au "milieu" de la
décroissance de ce deuxième pic. Elle correspond à une chute brutale de la
vitesse de réaction globale, car les espèces ne peuvent plus migrer aussi
facilement au sein du matériau vitreux.
II.B.5.c.1. Indice de réticulation
Comme nous l'avons dit auparavant, les mesures de conductivité permettent
de suivre directement, à partir d'un moule instrumenté, l'évolution de la
réaction. Les travaux déjà effectués sur les époxydes (90) montrent qu'il est
intéressant de relier la conductivité ionique σ à la conversion. Cette
conductivité est souvent associée à la mobilité des ions et donc à la
viscosité.
Le plus simple est de définir un indice de réticulation aD calculé à partir de
la variation de la conductivité ionique normée entre 0 et 1 :
aD = ( log σ - log σ0 ) / ( log σ∞ - log σ0 )
avec σ0 et σ∞ : conductivités initiale et finale de notre formulation.
Nos mesures isothermes sont faites à des températures inférieures à Tg∞, le
degré de conversion x = 1 n'est pas atteint car après la vitrification, le
processus de polymérisation est contrôlé par la diffusion. Mijovic et al. (81,82)
introduisent une valeur minimale de conductivité σmin correspondant au
degré de conversion xmax atteint à la vitrification.
Ce degré de conversion maximum xmax est une fonction linéaire de la
température. Ces auteurs proposent les relations suivantes :
aD / xmax = (log σ - log σ0)/(log σmin – log σ0)
aD / xmax = (log σ - log σ0)/(log σmin – log σ0).(log σmin/ log σ)p
Ces auteurs trouvent en outre que la conductivité initiale σ0 suit une loi
d'Arrhénius avec la température.
Nous avons vu sur la figure II.45 que dans notre cas, la conductivité initiale
suit une loi d'Arrhénius avec la température. Le domaine de température de
l'étude étant très réduit, on peut linéariser la dépendance de la conductivité
initiale avec la température (figure II.49) :
Log σ0 = 0,0189 . T - 9,20
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
119
Figure II.49 : log σ0 en fonction de la température (en °C).
II.B.5.c.2. corrélation conductivité / degré de conversion
Afin de connaître l'indice de réticulation de nos formulations, nous avons
utilisé la relation : aD / xmax = (log σ - log σ0)/(log σmin – log σ0),
avec xmax connu grâce à la spectroscopie proche infrarouge
log σ0 : la valeur maximale de log σ
et log σmin : la valeur finale de log σ.
La figure II.50 présente le taux de conversion et la vitesse de réaction
obtenus par spectroscopie proche infrarouge et l'indice de réticulation, ainsi
que sa dérivée en fonction du temps calculés pour une fréquence de 10 Hz.
On voit qu'il y a une différence notable entre les courbes aD/xmax (t) et x(t),
ces dernières évoluant plus rapidement que les premières, ce qui avait déjà
été observé par d'autres auteurs.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
120
Figure II.50 : comparaison PIR – diélectrique pour une isotherme à 27°C.
Le temps d'inhibition est plus long en diélectrique quelle que soit la
fréquence (figure II.51), mais l'allure des courbes est sensiblement la même.
On peut remarquer que l'indice de réticulation calculé présente un point
d'inflexion comme la courbe de conversion donnée par proche infrarouge.
Figure II.51 : ln temps d'inhibition en fonction de 1/T : comparaison PIR-
diélectrique.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
121
Ces différences proviennent sûrement du fait du couplage d'expériences non
simultanées (régulation thermique, taille d'échantillon différents…) et le
faible nombre de points expérimentaux dont nous disposons pour effectuer
nos régressions linéaires.
II.B.5.c.3. Corrélation conductivité – viscosité
Comme nous l'avons dit dans le premier chapitre, il existe une loi linéaire
reliant la conductivité à la viscosité :
log σ = - a . log η + b
Cette équation n'est valable que jusqu'au point de gel. Celui-ci intervient
assez rapidement, à environ 5% de conversion, et la réaction ne débutera
qu'après un temps d'inhibition.
La figure II.52 montrent les variations du logarithme de la conductivité
(mesurée à 10 Hz) en fonction du logarithme de la viscosité dynamique
(mesurée à 63 rad.s-1).
On peut voir que ces courbes sont des droites pratiquement jusqu'au gel.
Les valeurs de a et b sont reportées dans le tableau II.5.
température 35°C 40°C 44,5°C
a
0,019
0,026
0,033
b
8,54
8,46
8,39
Tableau II.5 : log σ = - a . log η* + b
Les valeurs de a semblent très faibles et les paramètres a et b évoluent
linéairement avec la température :
a = 0,0015 . T – 0,0326 et b = - 0,0158 . T + 9,0924
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
122
Figure II.52 : log conductivité en fonction de log η*
Encore une fois, il apparaît difficile de comparer deux expériences
rhéologique et diélectrique non simultanées, en raison des conditions
expérimentales différentes. Néanmoins, la corrélation entre viscosité et
conductivité ionique semble acquise. En effectuant des expériences
simultanées, on peut tirer des relations entre ces deux grandeurs et ainsi
lors d'un moulage industriel, avoir connaissance de l'évolution de la viscosité
en temps réel par une simple analyse diélectrique.
II.C. Conclusion
Nous avons mis en œuvre durant ce chapitre différentes techniques de
caractérisation de la réaction de réticulation d'une résine UP.
La calorimétrie différentielle à balayage et la spectroscopie moyen-infrarouge
ont montré leurs limites expérimentales pour ce type de formulations :
- hétérogénéité de concentrations lors de l'échantillonnage de petits
échantillons.
Chapitre II : Formulation de faible réactivité
123
- rapports surface/épaisseur trop élevés, avec la conséquence d'une
pollution de l'échantillon par l'oxygène de l'air ou le substrat.
La spectroscopie proche infra-rouge a permis d'accéder aux propriétés
cinétiques. La tentative d'établissement d'un modèle mécanistique a
confirmé la complexité de tels systèmes réactifs. Nous avons utilisé deux
modèles phénoménologiques aux résultats en très bon accord avec les
expériences.
L'étude approfondie du gel en rhéomètrie dynamique a permis d'établir une
loi reliant la viscosité complexe à la viscosité complexe initiale (η0*) et à un
facteur de temps modifié (t/tgel).
L'étude de la conductivité ionique a permis de comprendre l'impact de la
vitrification sur la cinétique chimique. Ce phénomène réversible et progressif
intervient au milieu de la réaction de réticulation et provoque un
ralentissement de la réaction. L'indice de réticulation calculé est en bon
accord avec l'avancement de la réaction mesuré par spectroscopie proche-
infrarouge. Toutefois, les résultats ont montré qu'il est toujours délicat de
comparer des expériences faites dans des conditions expérimentales
différentes (taille des échantillons, régulation thermique…).
Nous allons pouvoir valider ce protocole expérimental sur des formulations
représentatives de celles utilisées en industrie.
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