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Memoire Desa Ikram

Jul 18, 2015

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Ikram El
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Universit Mohammed V des sciences juridiques, conomiques et sociales Dpartement de droit public UFR : Mangement de dveloppement politique et social

Gestion locale des marchs publics et service public local : Le cas communalMmoire prpar pour lobtention du diplme dtudes suprieures approfondie en management de dveloppement social

Sous la direction de : M. Mohamed Haddy Jury:M. Abdelleh Saaf ....Prsident M. Abdelhadi Meqdad ...Suffragant M. Abdelaziz Barre.....Suffragant M. Mohamed Haddy..Suffragant

Prpar et soutenu publiquement par : El Qaouti Ikram

2009

A la mmoire de mes grands parents Feu Ahmed El QaoutiEt

Feu El Arbi FellatA mon pre M . Mohammed El Qaouti A Ma mre Mme El Qaouti Halima2

A ma sur SanaeSommaire

- Table des abrviations.5 - Introduction...7

- Premire partie : Gestion communale des marchs publics et service public communal : Rapports thoriques..............31Chapitre premier : Rgime de la gestion communale des marchs publics........34 - Section premire : Les grands traits du dispositif lgislatif et rglementaire de la contractualisation des marchs communaux.......35 - Section deuxime : Les principes fondateurs de la commande publique....................................................67 Chapitre deuxime : Droit de la gestion communale des marchs publics : Apprciation critique87 - Section premire :

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Thorie de la commande publique communale : Les repres...................89 - Section deuxime : Thorie de la commande publique communale : effets sur le fonctionnement du service public ....101

- Deuxime partie : Gestion communale des marchs publics et services publics communaux : Rapports pratiques et pistes damlioration.............................................................118Chapitre premier : Etude de cas pratiques.....121 Section premire : Expos des cas pratique....123 Section deuxime : Rsultats de ltude..........140 Chapitre deuxime : Ralit de la commande publique communale : Etat des lieux et perspectives de dveloppement....158

Section premire : Les axes de dysfonctions.......160 . Section deuxime : Propositions pour une bonne gestion communale des marchs publics....177 Conclusion..207 Bibliographie.............................. 212

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- Table des abrviations :

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B.O : Bulletin Officiel. CED : Contrle Gnral des Engagements de Dpenses. CCAG : Cahier des Clauses Administratives Gnrales. CCAG-EMO : Cahier des Clauses Administratives Gnrales applicables aux marchs dtudes et de matrise duvre.

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CCAG-T : Cahier des Clauses Administratives Gnrales applicables aux marchs de travaux.

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CGED : Contrle Gnral des Engagements de Dpenses CGEM : Confdration gnrale des entreprises marocaines CJCE : La Cour de Justice des Communauts Europennes. CPC : Cahier des Prescriptions Communes. CPS : Cahier des Prescriptions Spciales. DGCL : Direction Gnrale des Collectivits Locales. Ed : Edition ENA : Ecole Nationale dAdministration. FEC : Fonds dEquipement Communal. FSP : Fonds de Solidarit Prioritaire. INDH : Initiative Nationale de Dveloppement Humain 5

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INAU : LInstitut National de lAmnagement et de lUrbanisme LYDEC : La Lyonnaise des Eaux de Casablanca. OCDE : LOrganisation de Coopration et de Dveloppement Economique. O.N.E : Office National dElectricit. O.N.E.P : Office National dEau Potable. PAD : Programme dAccompagnement de la Dcentralisation. PNA : Programme National dAssainissement liquide et dEpuration des eaux vises. PNUD : Programme des Nations Unies pour le Dveloppement. RAK : Rgie Autonome de Distribution dEau et dElectricit de Kenitra. REMALD : Revue Marocaine dAdministration et de Dveloppement local. SEGMA : Services de lEtat Grs de Manire Autonome. TLFI : Trsor de la Langue Franaise Informatis

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Introduction :

Tant que plusieurs hommes runis se considrent comme un seul corps, ils n'ont qu'une seule volont qui se rapporte la commune conservation et au bien-tre gnral. Alors tous les ressorts de l'tat sont vigoureux et simples, ses maximes sont claires et lumineuses il n'a point d'intrts embrouills contradictoires, le bien commun se montre partout avec vidence, et ne demande que du bon sens pour tre aperu .1

Bien tre gnral, bien tre commun, besoins publics, intrt public, ou encore intrt gnral ; autant de notions rarement dfinies en doctrine2, mais sur lesquelles se fonde toute activit publique, partir desquelles se traduisent les normes, et dans lesquelles lEtat puise le fondement de sa lgitimit. Leur porte a considrablement volu dans le temps pour devenir aujourdhui des notions fonctionnelles et relatives ; susceptibles dextension en fonction des idologies, des croyances, des rgimes voire mme de circonstances. Lintrt gnral ( et les notions qui lapprochent) ne se comprend pas indpendamment de son contexte, cest un concept volutif qui se renouvelle dans le temps ; en fonction des besoins satisfaire et des enjeux auxquels sont confrontes les socits, et aussi dans lespace ; laissant merger des intrts locaux distincts des intrts nationaux compte tenu des1

J.J Rousseau, du contrat social ou Principes du droit politique. dition lectronique produite partir du texte publi en 1762. P.62 http://classiques.uqac.ca/classiques/Rousseau_jj/contrat_social/Contrat_social.pdf 2 Conf. D. Linotte et A. Mestre : service public et droit conomique . Paris, L. technique, 1982 p. 49. Cit in A. Moutawaquil, les grands services publics, REMALD n 13, collection manuels et travaux universitaires , 1999. P. 17

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considrations historiques, sociales, culturelles, voire tribales qui distinguent les composantes spcifiques chaque entit territoriale. Cette distinction entre intrt national et intrt local 3 ne se fonde que sur des critres subjectifs ; objectivement, il nexiste pas daffaires qui soient "locales" ou "nationales" par nature ; puisque lintrt gnral de la collectivit nationale dans son ensemble est le mme. Par ailleurs, ce sont les besoins satisfaire qui diffrent dune localit une autre, la recherche de lintrt local renvoie au territorial et la territorialisation de laction , au del de leurs dfinitions gographiques et politiques ; il sagit de servir des intrts particuliers dune population qui vit dans un espace local dtermin. Dj en 1862, J. Stuart Mill dans son uvre le gouvernement reprsentatif , affirme_ quand il se dclare contre le principe de la communaut des intrts locaux _ qu il ya des intrts locaux particuliers chaque ville quelle soit grande ou petite, et communs tous ses habitants lintrt local est presque toujours le mme pour les diffrents quartiers dune ville, pour tous il faut faire les mmes choses et les mmes dpenses les mmes amnagements peuvent convenir tous, le pavage, lclairage, lapprovisionnement des eaux, le drainage , ne peuvent tre diffrents pour les diffrents quartiers de la mme ville 4. Chaque espace local a sa culture, son histoire, ses valeurs, ses croyances, ses coutumes et ses traditions, cest un construit social qui se traduit dans un mode de vie socital distinct ; qui a ses propres besoins indpendamment des besoins nationaux dans leur globalit, et qui ncessitent par consquent des rponses spcifiques que seule une bonne gestion locale5 peut garantir. La recherche de lintrt local entretient avec la problmatique de la gestion locale des rapports de fins et de moyens ; cette combinaison ne peut gure tre considre comme une3

Cette distinction entre intrt local et intrt gnral de la collectivit nationale est loin de rapprocher la notion dintrt local de celle de la localisation de certaines activits dintrt national gnral. Ainsi par exemple quoique la rpartition de la production des barrages se ralise lchelle locale, elle sert lintrt de tout le pays, mais la distribution deau et dlectricit dans une commune donne ou encore le service de transport urbain dans une ville dtermine puisent leur raison dtre dans lintrt local, notamment celui de la commune ou de la ville. 4 J. Stuart Mill, le gouvernement reprsentatif, traduit en franais par D. White, paris, dition Guillaumin C. Librairies.1862. P.330. 5 Le vocable Gestion existe depuis 1482, emprunt du latin, gestio (de grer, faire , sert de nom daction grer. Le local est un vocable qui existe depuis 1314 du latin localis lexpression couleur locale date de la fin du XVII sicle comme terme de peinture, et fut applique la littrature, ds 1772, par la Harpe, puis surtout lpoque du romantisme, cf. : vers 1867, nous entendions par couleur locale, ce quau XVII sicle on appelait les murs Mrime. Les vocables localiser date de 1798, localisation de 1803, localit 1810. O. Bloch, W. Von. Wartburg, dictionnaire tymologique de la langue franaise, 9me dition, 1991. P. 293-292.

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rsultante du processus de dcoupage territorial du royaume en communes, prfectures, provinces et rgions. Lhistoire de ce pays enseigne que lorsque la gestion dun espace local est confie des agents autonomes qui ont vcu dans ce mme espace, qui uvrent dans un esprit de solidarit et qui ont un savoir faire ; ltre humain dans la pleine vrit de son existence, de son tre personnel et de son tre social peut accder aux moyens de subsistance srs, durables et suffisants pour une existence dcente. Dj, dans le Maroc antique, la socit Amazighe, et avant mme sa balkanisation au IIme millnaire avant J.C grait ses affaires locales en instituant une assemble, il sagit d une institution dont la composition, les attributions et la procdure dcoulaient dun consensus collectif rgissait la vie du groupe partir de ses coutumes locales 6 . Disposant dune autonomie daction, cet organe dlibrant se chargeait de la gestion des affaires du groupe. En matire dorganisation financire ncessaire pour subvenir aux besoins de la communaut (offrandes, ftes, guerres, rcolte) ; des prestations furent prleves en nature pour se traduire en dpenses bnfiques lintrt local. Les aboutissements de la gestion des intrts locaux par un organe dlibrant, autonome, responsable et consciencieux dans ses pratiques se montraient clairement, surtout dans les domaines de lagriculture et de llevage ; G. Camps affirme ce sujet : tout indique en effet que lagriculture sest dveloppe en Afrique du Nord en mme temps que lorganisation de la socit berbre 7. Mme durant sa balkanisation,8 les incursions nont diminu en rien le potentiel de solidarit dans la gestion des affaires locales de la socit amazighe, lassemble dlibrante continuait uvrer pour servir, dans les conditions les plus dfavorables, les intrts du groupe. Sous les dynasties arabes (du VIIme sicle au XIVme sicle), sous linvasion ibrique (du XIVme sicle au XVIme sicle), durant le protectorat et jusqu la conscration du statut6

J. Chabih, les finances des collectivits locales au Maroc : essai dapproche globale des finances locales, 1re d. Lharmattan. 2005. P.46 7 G. Camps, aux origines de la bribrie, monuments et rites funraires, Paris, 1961, p. 14, dans le mme ordre dides J. Gaudemet, les institutions de lantiquit, Sirey, 1967, p.28-31, 172, 173, 242-243, 515-517, 571-572. Ibid. P. 46. 8 Suite aux invasions trangres (phnicienne, romaine, vandale, byzantine), la gestion traditionnelle locale de la socit amazighe se voyait subir les retombes de la balkanisation ; ses ressortissant furent assujettis une diversit catgorielle dimpts : limpt foncier, la dme, la capitation, les droits sur les ventes le produit de ces impts servait au financement des dpenses du conqurant qui allaient croissantes : culte, arme, administration, travaux public, etc. A. Bouch-Leclercq, Manuel des institutions romaines, Paris, Hachette, 1886, P.221 ; J. Lvy, Cours dinstitutions politiques et sociales de lAntiquit, Paris, 1962-1963, P.357-361 ; G. Ardant, Histoire de limpt, t.1, Fayard, 1971, P.172 et s. A. Neurisse, Histoire de limpt, PUF, p. 35.Ibid. P.47

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juridique des collectivits locales ; une gestion autonome des affaires locales tait toujours prsente surtout dans les milieux ruraux ; des collectivits territoriales furent constitues sur une base tribale. Sans pour autant se baser sur la territorialit, les limites gographiques taient dtermines en fonction de la consanguinit ; la vie locale de ces entits sapparentait plutt une gestion autonome de leur vie quotidienne dcoulant dune ralit sculaire qu une entreprise de dcentralisation dicte par le centre .9Ces entits locales sautograient en instituant une sorte dassemble charge de la gestion des affaires du groupe, appele Jma , sa tte un Cheikh ou un Amghar ; elle conduisait les affaires intrieures de la localit laquelle elle se rattache selon trois principes directeurs : la gestion autonome, la reprsentation et le processus dlibratif. Cest la mise en pratique de ces trois grands principes qui a contribu ce que cette assemble locale russisse prendre en charge les intrts locaux. La priode de la conqute du Maroc par les arabes fut marque par la forte contribution de la Jma lorganisation socioconomique locale notamment en matire de gestion de leau ; que ce soit par lamnagement des sources, par puisage au moyen de lnergie animale, ou encore lirrigation par drains artificiels ; la khattara (une technique trs avance en matire de gestion de leau). Le bon placement des fonds prlevs et le savoir-faire de la population locale ont contribu garantir celle-ci le droit leau, et donc le droit la vie ; la khattara , a permis la mise en valeur dune superficie de 15.000 20.000 hectares dans le Haouz o rgnait une activit agropastorale au sein dun immense potentiel en terres cultivables et sous des conditions climatiques dfavorables Ce qui a contribu la valorisation socioconomique et financire de la rgion Et a produit des effets immdiats dordre technique, juridique et conomique en matire locale dimportance. 10. La bonne gestion des affaires locales se veut, et depuis toujours, porteuse de dveloppement, et cest la qualit de cette gestion qui dtermine la qualit de vie de la population locale. Linstitution de la Jma a considrablement marqu lhistoire de la9

J. Berque, Maghreb, histoire et socits, d. Duculot, SNED Alger, 1974, p. 34. Cit in J. Chabih, les finances des collectivits locales au Maroc : essai dapproche globale des finances locales, op-cite P. 51 10 P. Pascon, Le Haouz de Marrakech, CURS, Rabat, CNRS, Paris, t. 1. P. 104-128 ; Rapport de direction hydraulique de la rgion de Tensift sur la situation des khattara dans le Haouz, 1986, A. El Hbil, Leau et le Maghreb, un aperu sur le prsent, lhritage et le futur, Milan 1988, p. 131-143 ; A. Nahid La khattara dans le Haouz de Marrakech : un patrimoine hydraulique national en voie de disparition, Colloque international sur : gestion de leau, Gestion de la raret, 1995, p. 1- 15. Cit in Ibid. P. 53

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gestion locale au Maroc ; elle dmontre quune bonne gestion des affaires locales par un organe dlibrant et autonome, seule peut servir les intrts locaux quelles quelles soient les circonstances et les complexits des contextes territoriaux. La prise en charge des intrts locaux par une assemble autonome, permet llaboration dlibrative de la dcision la mme chelle de sa mise en pratique. Ainsi la dcision sappliquant la mme chelle de sa source, par des reprsentants qui sont en mme temps dcideurs et bnficiaires, ne peut ne pas tre adapte au contexte local ; les problmes locaux dans leur spcificit et dans leur relativit ne peuvent tre connus, et donc cerns que par ceux qui les ont vcus, qui les vivent ; et qui cherchent les rsoudre pour ne plus les vivre et les faire vivre la population locale. Outre la prise de dcision par les reprsentants locaux, celle-ci fut labore selon le mode dlibratif ; les avis diffrent, et la vision des choses aussi, et cest cette diffrence qui fait que la dcision prise selon le mode dlibratif chappe ce quelle soit influence par le vcu de son auteur, par sa manire dtre ou par ses idologies, ses croyances et ses sentiments. J. Stuart Mill confirme les vertus de la dlibration : ce quune assemble peut faire mieux quaucun individu, cest la dlibration 11, Habermas ira mme jusqu considrer la dlibration comme une manifestation de la souverainet populaire et lun des fondements dune sphre publique politiquement oriente , il soutient que la dlibration constitue la caractristique formelle de tout espace public , selon lauteur lexigence dmocratique de contrle de pouvoir par les citoyens est remplie si les procdures mme de dcision sont dlibratives, le fait mme de respecter une procdure dlibrative reproduit lthique que de la discussion , porteuse de raison publique 12. Assemble locale, la Jma, lAgadir, la Mouzaraa, la Moucharaka, la Touiza le troisime lment considrer dans la russite dans ces institutions traditionnelles 13 grer le local marocain davant la dcentralisation apparat dans leur autonomie ; celles-ci constitues par un groupe conscient de sa responsabilit, et de ses obligations vis--vis de la population11 12

J. Stuart Mill, le gouvernement reprsentatif, op-cite, p.108 J. Habermas, Droit et dmocratie, Paris, Gallimard, 1998. J. Habermas, lespace public. Archologie de la publicit comme dimension constitutive de la socit bourgeoise. Paris, Payot, 1978. Cit in A. Alcaud, L. Bouvet, dictionnaire de sciences politiques et sociales. Ed. Dalloz, 2004.P. 112. 113. 13 Ces entits autonomes ne peuvent tre considres comme tant des collectivits dcentralises au sens juridique du terme, lexistence dune collectivit dcentralise suppose dabord son existence comme personne morale et sa conscration dans lordre juridique, elle est conditionne la reconnaissance de la loi et de la constitution de la personnalit morale de droit public des collectivits locales autre que celle de lEtat.

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locale exerait indpendamment ses attributions auxquelles aucune autorit de tutelle ne portait atteinte14. Cependant, avant lre de la dcentralisation au Maroc, la gestion publique des affaires locales tait purement centralise15 ; la cration des rgions partir de 191216, avec une certaine dconcentration de pouvoirs au profit de lautorit rgionale (qui nest autre quune autorit franaise nomme par le rsident gnral quelle reprsente); ne fut conue que dans un but de contrle militaire. Cette rgionalisation ne peut nullement tre considre comme une forme attnue de la dcentralisation car non seulement lobjectif recherch par sa cration est la domination du territoire national dans son ensemble, mais aussi compte tenu de la subordination hirarchique des rgions au pouvoir central.17 Ce nest quau lendemain de lindpendance que la centralit politique et la soumission de la priphrie au centre devaient se voire carter au bnfice dune organisation administrative locale. Cette priode fut marque par une grande14

Ces institutions traditionnelles sadministraient indpendamment du pouvoir central, dailleurs une diffrenciation entre les entits territoriales du royaume exista ; il sagit des rgions qui reconnaissaient lautorit centrale en la personne du sultan, appeles Bled Makhzen et celles qui ne lacceptaient pas Bled Siba o les groupements (fractions, douars, tribus) sadministraient librement. Lautonomie de ces entits quant la gestion de leurs affaires tait pratiquement totale, le makhzen, mise part linvestissement des notables des tribus des fonctions cadales et les prlvements fiscaux, nintervenait daucune manire comme autorit ou acteur de la gestion de leurs intrts. 15 Larrive du protectorat franais et espagnole na point diminu le centralisme de lEtat makhznien ; les circonscriptions territoriales cres par les autorits coloniales dans les milieux ruraux, ne faisaient que prolonger le pouvoir central sous leur contrle. Pareillement pour les municipalits dans les villes, places sous lautorit du pacha celles-ci ne bnficiaient daucune autonomie dcisionnelle ; quoiquelles fussent dotes de budgets autonomes, leur marge dinitiative quant lemploi des deniers qui leur furent affects tait limite lentretien de la maison municipale, ou encore au paiement des charges du personnel. 16 Par la circulaire rsidentielle du 4 Aout 1912 et larrt rsidentiel du 11 Dcembre 1923. Jusqu'aux annes trente, le territoire marocain comptait quatre rgions civiles (Rabat, Chaouia, Gharb, Oujda), trois sous contrle militaire (Mazagan, Safi, Mogador), et trois rgions militaires (Mekns, Fs, Marrakech). A la fin du protectorat le Maroc comptait 7 rgions : Trois sous contrle civil (Oujda, Casablanca, Rabat), trois sous contrle militaire (Fs, Mekns, Agadir) et une rgion sous contrle mixte (Marrakech). La question rgionale au Maroc, Remald, 1996, p. 35-52 ; D. Basri, ladministration territoriale, lexprience marocaine, Paris, 1988 ; N. Zarrouk, lorganisation et le fonctionnement du conseil rgional, Remald, n 16, p.35. Cit in J. Chabih, les finances des collectivits locales au Maroc : essai dapproche globale des finances locales, op-cite p.73. 17 Durant la priode du protectorat, les centres dans les zones rurales ont connu une certaine bauche de dcentralisation . Cette bauche apparat dans la dotation des centres dune commission dintrt local et de la personnalit morale. ladministration des tribus seffectue dsormais dans le cadre des circonscriptions dlimites territorialement ; l o subsistaient, les djems sont consacres, tandis que les djems administratives sont cres comme organes de reprsentation des collectivits tribales auxquelles est reconnue le personnalit morale lapparition de petites bourgades rurales a conduit la cration dun statut diffrenci selon le degr de dveloppement conomique et social . M. Rousset et J. Garagnon, droit administratif marocain, 6me dition, La porte, 2003. P.52, 53, 54. Toutefois, pendant longtemps ces commissions taient nommes et consultatives , autrement dit, leurs membres ntaient pas lus mais tout simplement nomms par le pouvoir central ; elles navaient aucun pouvoir de dcision et ne pouvaient qumettre des avis quant la gestion des affaires locales, et les quelques fonctions quelles exeraient nchappaient daucune manire au contrle du pouvoir central. Dans les villes, lrection des agglomrations en municipalits entraina leur existence juridique comme personnes morales mais sans pour autant chercher leur autonomisation. Comme les commissions des centres ruraux les membres de la commission des conseils municipaux taient nommes par les pouvoirs centraux qui ne leur attriburent quune fonction consultative quant la gestion des affaires urbaines.

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avance dans lhistoire de lorganisation administrative territoriale du Maroc, suite la conscration constitutionnelle18 de la vie juridique des collectivits locales dans la premire constitution royaume19. Cest ainsi que furent lgifrs les premiers textes relatifs lorganisation administrative locale20 ; ce sont les Dahir n1-59-315 du 28 Hijja1379 (23 juin 1960)21 relatif lorganisation communale et le Dahir n1-63-273 du 22 Rabia II 1383 (12 septembre 1963)22 relatif lorganisation des prfectures, des provinces et de leurs assembles. Quant aux rgions, quoique le lgislateur leur ait consacr un texte en 197123 portant la cration institutionnelle de sept rgions conomiques ; il sagissait de simples circonscriptions administratives sans aucune personnalit juridique. La rgion24 tait considre comme un simple cadre daction conomique. Ce nest que vers la fin du 20me sicle, plus prcisment en 1997 que le statut juridique des rgions25, (riges en collectivits locales par la rvision constitutionnelle de 199226, statut confirm par la rvision constitutionnelle de 1996) serait fix

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Article 93 de la premire constitution du royaume (promulgue par le Dahir du 4 novembre 1962 (6 Joumada II 1382) relatif au rfrendum constitutionnel. stipule, les collectivits locales du royaume sont les prfectures, les provinces et les communes. Elles sont cres par la loi. . (B.O n2616-bis du 19 dcembre 1962. P.1777). 19 Quoique certaines initiatives existassent bien avant : 1905, 1908, 1956, 1958-1961(A. Laroui, les origines sociales et culturelles du nationalisme marocain, 1830-1912, Paris, 1979 ; A. El Kadiri, le mouvement constitutionnel sous Moulay Hafid dans le Maroc du dbut du XX s, thse, Paris, 1969 ; A. Gallab, lvolution constitutionnel et parlementaire au Maroc, Casablanca, 1978) Cit in J.Chabih, les finances des collectivits locales au Maroc : essai dapproche globale des finances locales, op-cite P. 90. 20 Le dcoupage administratif du royaume des annes soixante fut prcd par les Dahirs n1.59.161 du 27 Safar 1379 (1er septembre 1959) relatif llection des conseils communaux qui stipule dans son 1er article le territoire de notre royaume est divis en communes urbaines comprenant les municipalits et les centres autonomes et en communes rurales, les membres des conseils communaux sont lus au suffrage universel direct . (B.O n 2445 du 4 septembre 1959. P.1477), et le Dahir n1.59.351 du 1 er joumada II 1379(2 dcembre 1959) relatif la division administrative du royaume, aux termes de son article premier Notre royaume est divis en seize provinces et deux prfectures, ainsi quen communes rurales, les provinces sont divises en cercles et les cercles en cadats . (B.O n 2458 du 4 dcembre 1959. P.2040) 21 B.O n 2487 du 24 juin 1960. (P. 1230 1235). 22 B.O n 2655 du 13 septembre 1963. (P. 1469 1475) 23 Dahir n1-71-77 du 22 Rebia 1391 (16 juin 1971) B.O n3060 du 23 juin 1971. (P. 685 686) 24 Dans son article 2, ce dahir dfinit la rgion comme un ensemble de provinces qui, sur les plans tant gographique quconomique et social entretiennent ou sont susceptibles dentretenir des relations de nature stimuler leur dveloppement, et de ce fait, justifient un amnagement densemble . Ibid. P.685. Toutefois, Les rsultats attendus des rgions conomiques se sont rvls modestes aussi bien aux niveaux conomique, social et administratif et ce, en raison des insuffisances institutionnelles et les difficults de toutes sortes ayant accompagn leur existence La rgionalisation, telle quelle a t conue en 1971 sest rvle finalement trs dcevante K.Naciri, Communication prsente au 4me Forum mditerranen du Dveloppement MDF4 sur le Thme : Empowering Local Government Institutions in the MENA Rgion Amman, 8 - 10 avril 2002. P.1 http://www.cespi.it/STOCCHIERO/Ascod-Marocco/Naciri.pdf . 25 Aux termes de son article premier : les rgions institues par larticle 100 de la constitution sont des collectivits locales dotes de la personnalit morale et de lautonomie financire . B.O n 4470 du 3 Avril 1997. P. 294. 26 Article 94 du dahir n 1-92-155 du 11 Rebia II 1413 du (9 octobre 1992) portant promulgation du texte de la constitution rvise prcit stipule : les collectivits locales du royaume sont les rgions, les prfectures les provinces et les communes . B.O n 4173 du 21 octobre 1992 P. 428

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par la loi n47-96 relative l'organisation de la rgion promulgue par le Dahir n 1-97-84 du 23Kaada 1417 (2 Avril 1997)27. Dans sa conception initiale, la dcentralisation se dfinissait, en raction au centralisme extrme de ladministration marocaine ; le souci de lunit nationale encore fragile lemportant sur lintrt local, le dcoupage administratif du territoire national en prfectures, provinces et communes a privilgi les impratives du court terme sans oprer des changements radicaux. De lindpendance et jusquen 1976, cest difficile, voire mme impossible de parler dune vritable autonomie des lus locaux ; lchelon communal, le dahir de 1960 prcit relve beaucoup plus de la dconcentration que de la dcentralisation28. Certes la dconcentration constitue comme la dcentralisation un mode dorganisation administrative territoriale ; dailleurs sur le plan tymologique dans les deux mots, dconcentration et dcentralisation, on retrouve le prfixe d et le mot centre ; les deux dterminent les rapports du centre la priphrie. Nanmoins, malgr cette proximit terminologique, ces rapports ne sont pas de la mme nature ; la dconcentration consiste en un rapport de dlgation dcisionnelle des agents locaux constitue une modalit. Alors qu il ya dcentralisation lorsque des organes normalement lus, qui agissent au nom et pour le compte dune collectivit personnalise .29 La dcentralisation se dfinie comme tant un systme fondamentalement oppos la centralisation dans lequel les pouvoirs de dcision sont remis non pas des agents du pouvoir central, mais aux reprsentants des citoyens. lis au pouvoir central par une obissance hirarchique ; et se situe par consquent dans la thorie de la centralisation dont elle

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B.O n4470 du 3 avril 1997. (P. 292 306) Le rgime communal institu en 1960 tait caractris par une tutelle pesante, des contrles priori et posteriori sur les dcisions du prsident et du conseil qui disposaient dattributions trs limites, alors quun reprsentant du pouvoir excutif jouissait de larges prrogatives. Aux termes de article 22 du texte portant organisation communale de 1960 les dlibrations sont excutoires par le pacha ou le cad B.O prcit, p.1232 Et larticle 39 : les pouvoirs de police sur le territoire communal appartiennent au pacha ou cad B.O prcit, p.1233. Ces articles furent respectivement abrogs par les articles 37 et 36 du Dahir portant loi 1-76-583 du 5 Chaoual 1396 (30 septembre 1976) relatif lorganisation communale. B.O n 3335-bis du 1er octobre 1976 (P.1051 1057). Selon son article 37 le prsident (du conseil communal) excute les dlibrations du conseil Et larticle 36 les pouvoirs reconnus au pacha ou cad en matire de police administrative communale ainsi que les fonctions spciales qui leur sont attribus par la lgislation et rglementation en vigueur sont transfrs aux prsidents des conseils communaux .P. 1054 29 M. Lombard, droit administratif, 4me d. Dalloz, srie hypercus. 2001. P. 87.

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Cest partir de 1976, et suite la promulgation du Dahir portant loi n 1-76-583 du 5 Chaoual 1396 (30 Septembre 1976)30 qui abroge le texte de 1960 portant organisation communale, que des comptences ; indispensables dans un systme dcentralis, exerces avant par les reprsentants du pouvoir central, seront transfres aux conseils communaux. Mais ce nest quen 2002, suite la promulgation de la charte communale31 que fut la dtermination ; avec plus de prcisions les comptences des conseils communaux et de leurs organes. Mais sans pour autant constituer une avance qualitative en termes dautonomisation des lus locaux, surtout en matire de tutelle laquelle la charte communale napporte que des modifications mineures. Places ds le dpart sous le contrle de lEtat, les prfectures et les provinces du royaume fonctionnent selon un rgime qui tend beaucoup plus la dconcentration qu la dcentralisation. Le Dahir de1963 relatif lorganisation des prfectures et des provinces et de leurs assembles prcit tel quil a t abrog par le Dahir n1-02-269 du 25 rejeb 1423 (3 octobre 2002)32 portant promulgation de la loi 79.00 relative lorganisation des collectivits prfectorales et provinciales ; munit le reprsentant de pouvoir excutif, de larges prrogatives laissant aux assembles lues quune fonction symbolique comparer avec celle qui incombe aux conseils communaux.33. Encore plus, les dispositions du mme texte constitutionnel de 1962 (et les rvisions de 1970, 1972, 1992, 1996) qui consacre le gestion dmocratique comme la rgle de fonctionnement des collectivits locales, stipule que cest le reprsentant du pouvoir excutif, organe non lu, ne reprsentant donc pas la population qui agit comme organe excutif de ces collectivits locales34.30

B.O n3335-bis du 1er octobre 1976. (P1051 1057) Promulgue par Dahir n 1-02-297 du 25 rejeb 1423 (3 octobre 2002) portant promulgation de la loi n 78-00 portant charte communale. (B.O N 5058 du 21 novembre 2002.P.1351 1370), modifie et complte par le dahir n 1-03-82 du 20 moharrem 1424 (24 mars 2003) portant promulgation de la loi n 01-03 (B.O n 5096 du 30 avril 2003. P. 244 245) 32 B.O N 5058 du 21 novembre 2002 (P. 1370 1380) 33 Ainsi par exemple, cest le Wali ou le gouverneur, nomm par le roi sur proposition du ministre de lintrieur, qui est charg de lexcution et des dlibrations , il excute le budget de la prfecture ou de la province La situation est reste la mme aprs son abrogation par le Dahir de 2002 portant organisation prfectorale et provinciale prcit, il dispose dans son article 45 : Le wali ou le gouverneur de la prfecture ou de la province excute les dlibrations du conseil, il prend les mesures ncessaires cet effet aprs avis du prsident du conseil prfectoral ou provincial . 34 A comparer avec les stipulations du texte constitutionnel franais, celui-ci consacre clairement le rle du reprsentant du pouvoir excutif au sein des collectivits locales de manire ce quil ne porte pas atteinte au rle de llu local ; aux termes de son article 72 ; les collectivits territoriales s'administrent librement par des conseils lus et disposent d'un pouvoir rglementaire pour l'exercice de leurs comptences , le mme article dlimite la tche du reprsentant des autorits centrales : Dans les collectivits territoriales de la Rpublique, le reprsentant de l'Etat, reprsentant de chacun des membres du Gouvernement, a la charge des intrts nationaux, du contrle administratif et du respect des lois. . Titre XII - Des collectivits territoriales, la constitution franaise de 1958 telle quelle a t rvise. www.senat.fr31

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La restriction constitutionnelle des pouvoirs des prsidents des conseils prfectoraux et provinciaux aux bnfices de larges prrogatives des reprsentants du pouvoir excutif dans la gestion locale stend la rgion35. Le principe de la gestion dmocratique est galement consacr dans la loi relative lorganisation de la rgion, qui affirme dans son article premier que les affaires de la rgion sont librement gres par un conseil dmocratiquement lu., or ce mme article stipule : les gouverneurs excutent les dlibrations des assembles provinciales, prfectorales et rgionales dans les conditions dtermines par la loi. Gestion dcentralise ou dconcentre, leur mise en application mutuelle, la prminence dun mode sur lautre dans une structure tatique donne, voire mme dans une collectivit locale dtermine ; la question qui se pose nest pas de savoir comment lespace administratif est organis ; mais le pourquoi de cette organisation. La prise en charge des collectivits locales de leurs propres intrts par lintermdiaire dorganes issus delles mmes nest pas une fin en soi, il sagit dune action territoriale ; une action donc il ya certainement un objectif recherch derrire son dclenchement. A. Benjelloun explique le pourquoi de lorganisation administrative locale ; il soutient qu il est impossible pour les autorits administratives centrales de diriger tous les services publics nationaux du pays o ils se trouvent , il existe des besoins collectifs locaux auxquels doivent correspondre des services publics proprement locaux . Cest la satisfaction de ces besoins locaux qui constitue en dfinitive la raison dtre de ladministration locale36. Donc la dcentralisation de pouvoirs au bnfice des collectivits dcentralises constitue avant tout un choix stratgique qui nest pas quun style dorganisation territoriale ou de gestion administrative ; mais un outil cens satisfaire les intrts de la population locale. Laptitude de ces entits servir les intrts locaux se vrifie au niveau de la prestation du service public local, et cest la qualit de cette prestation qui dtermine la qualit de vie du citoyen local.35

Dans les provinces, les prfectures et les rgions, les gouverneurs reprsentent l'Etat et veillent l'excution des lois. Ils sont responsables de l'application des dcisions du gouvernement et, cette fin, de la gestion des services locaux des administrations centrales . (Article 102 de la constitution). Pareillement lchelle rgionale, cest le gouverneur qui agit comme organe excutif de la rgion : les gouverneurs excutent les dlibrations des assembles provinciales, prfectorales et rgionales dans les conditions dtermines par la loi Article 101de la constitution. 36 A. Benjelloun, Droit administratif, tome I, lorganisation administrative, Dar nachr al maarifa, 2me d, 1992, p. 47.

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Avec ou sans la connotation du local , les dfinitions doctrinales du service public sont vagues au point que lon parle de lintrouvable dfinition du service public 37, pour ne sen tenir quune seule, De. Laubadre propose la dfinition suivante : On appelle service public toute activit dune collectivit publique visant satisfaire un besoin dintrt gnral 38. Plusieurs consquences dcoulent de cette dfinition : Le service public est une activit et non une organisation : Cet aspect de dfinition du service public permet de mieux cerner la notion, ainsi par exemple dans le cas des organisations prives qui grent des services publics par contrat de gestion dlgue ; la notion de services public sapplique non pas ladite organisation mais lactivit dont elle a la charge, comme la fourniture deau et dlectricit qui constitue une activit dintrt gnral. Le service public est une activit de collectivit publique : Dans ce sens, un service est dit public lorsquil relve dune personne publique ; un lien suffisant doit donc exister entre lactivit et la personne publique. Cependant le rattachement la personne publique peut tre direct ou indirect ; dans le premier cas la personne publique assure elle-mme lactivit, dans le deuxime, le service public est confi un operateur priv ou public par contrat de gestion dlgue, il sagit alors dune dlgation de service public. Dans les deux cas, ces services sont rattachs organiquement lEtat ou aux collectivits territoriales, et crs par dcision publique. Lactivit du service public vise satisfaire lintrt gnral : Donc crer un service public, cest pour rpondre un besoin dintrt gnral, celui-ci constitue le but de toute action publique. Selon cette logique, lorsquune activit est dintrt gnral, les pouvoirs publics lassument sous forme de service public. Or, les institutions qui uvrent pour lintrt gnral ne sont pas toutes considres comme tant des services publics ; cest le cas des associations ou encore des besoins vitaux comme lalimentation qui constitue une question dintrt gnral mais sa fourniture ne peut pas tre rige en service public, cette fonction revient au domaine priv, sauf les cas de priodes de crises o cest lEtat qui la prend en charge.37

A. El Moutawakil, les grands services publics, REMALD n 13, collection manuels et travaux universitaires, 1999, p. 23. 38 De. Laubadre, trait de droit administratif, tome I, p.41. Cit in A. Benjelloune, droit administratif, tome II, laction administrative. Dar nachr al maarifa, 2me d, 1992. p. 207

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Aux termes de larticle 39 de la charte communale: Le conseil communal dcide de la cration et de la gestion des services publics communaux Il dcide des modes de gestion des services publics communaux, par voie de rgie directe, de rgie autonome, de concession ou de toute autre forme de gestion dlgue des services publics . Toutefois, les dlibrations sy affrant ne sont excutoires quaprs avoir t approuves par lautorit de tutelle39. Pareillement pour les conseils prfectoraux et provinciaux, ils sont dots dun pouvoir de dcision quant la cration, et au choix du mode de gestion des services prfectoraux et provinciaux, tout en tant, bien videmment soumis lapprobation de l'autorit de tutelle. Contrairement aux conseils communaux, prfectoraux et provinciaux qui disposent dun pouvoir de dcision (quoique ce pouvoir nest pas absolu vu que lautorit de tutelle peut dsapprouver et rendre nulle la dcision) en matire de cration et de gestion des services publics ; le conseil rgional ne peut que proposer 40 au pouvoir excutif la possibilit de cration de services publics ou le choix de leur mode de gestion, il na donc quune comptence consultative en la matire. Ces services publics locaux crs par les collectivits locales peuvent tre directement grs par celles-ci, ou indirectement par une personne prive ou publique par lintermdiaire dun contrat de gestion dlgue. Dans le premier cas, la collectivit locale prend elle-mme en charge la gestion du service public selon le mode le plus classique quest la rgie41directe ; les services publics locaux grs selon ce mode nont pas de personnalit juridique distincte de la collectivit locale39

En vertu de larticle 69 de la charte communale Ne sont excutoires quaprs avoir t approuves par lautorit de tutelle les dlibrations du conseil communal portant sur la cration et modes de gestion des services publics communaux ; cration ou participation aux entreprises et socits dconomie mixte . 40 Le conseil rgional peut faire des propositions et des suggestions et mettre des avis Il propose la cration et les modes d'organisation et de gestion des services publics rgionaux, notamment par voie de rgie directe, de rgie autonome ou de concession . Article 9 du Dahir portant organisation rgionale prcit. Pour ce qui est de la participation de la rgion aux entreprises d'conomie mixte, le conseil rgional dispose non du droit de proposer mais dun pouvoir de dcision (article 7 du Dahir relatif lorganisation rgionale prcit), nonobstant ce pouvoir nest pas absolu puisque cest lexcutif en la personne du ministre de lintrieur qui a le dernier mot quant la participation ou non de la rgion telle ou telle socit dconomie mixte, mme si le conseil rgional juge que la rgion peut tirer plusieurs bnfices de la conclusion de cet acte. 41 En droit marocain le terme rgie est parfois improprement utilis pour dsigner des organismes qui constituent en vrit des tablissements publics, cest le cas de ce quon appelle les rgies municipales . A. Benjelloune, droit administratif, tome II, laction administrative, op-cite, p. 214. Le terme rgie est un vocable ambigu qui peut dsigner des ralits juridiquement diffrentes, cest pourquoi il lui souvent adjoint un adjectif prcisant sa signification A. El Moutawakil, les grands services publics, op-cite p. 78.

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qui les cre, elle est entirement responsable de leur organisation, de leur fonctionnement et de leur financement. Deuxime forme de gestion directe est la rgie autonome, cest une personne morale de droit public dote de la personnalit morale et de lautonomie financire charge de la gestion dun service public particulier sous le contrle la fois de lEtat et de lorganisme local auquel elle se rattache, les reprsentants des intrts locaux sont de droit membres du conseil dadministration. Sous lappellation doffice ou sous celle de rgie et parfois dagence 42, A la question ce quun tablissement public43, la doctrine ne livre en effet que des dfinitions gnrales, cest un service public personnalis selon Michaud, cest un service public dot de la personnalit morale, une forme normale de la gestion dun service public ou dun groupe de services connexes, selon Desoto ; cest une personne morale de droit public qui bnficie dune autonomie administrative et financire grant sous un contrle de tutelle une activit qui lui est confie dans un domaine dtermin selon M. Rousset et J. Garagnon 44 Pour des considrations techniques, financires ou autres, les collectivits locales peuvent confier la gestion des services publics locaux crs par elles-mmes des personnes publiques ou prives par un contrat de gestion dlgue. La notion de gestion dlgue est introduite dans la pratique administrative marocaine par la signature de la convention de gestion dlgue entre la communaut de Casablanca et la lyonnaise des eaux de Casablanca (LYDEC) en 1997.45 Une dcision jurisprudentielle46 esquisse la 1re dfinition47 jurisprudentielle marocaine de la notion de gestion dlgue : il s'agit d'un contrat par lequel le dlgant confie au dlgataire, lintrieur dun espace territorial limit dans le primtre de la dlgation,42 43

M. Rousset et J. Garagnon, droit administratif marocain, op-cite p. 342 La dfinition de ltablissement public telle quelle a t arrte en France dans la seconde moiti du dixneuvime sicle : une personne morale de droit public charge de la gestion su service public A. Benjelloune, droit administratif, lorganisation administrative, op-cite, p.177. 44 A. El Moutawakil, les grands services publics, op-cite p.81. 45 M. Hajji, le rgime juridique du contrat de gestion dlgue des services publics dans la jurisprudence, Gazette du palais, n18, 2007 p.3 46 Tribunal administratif de Casablanca, n1286 du 8 dcembre 2004.Dossier N2004/306 Alkhatib Abdelmadjid et consorts/la socit lyonnaise des eaux de Casablanca S.A. Des contentieux, n3-4 du 2005.p.294. Ibid. P.6 47 Daprs lauteur larticle sus cit.

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lexploitation et la gestion des services publics pour une priode dtermine qui prend fin avec lexpiration du contrat . Telle quelle a t introduite dans lordonnancement juridique marocain par le dahir n 1-06-15 du 15 moharrem 1427 (14 fvrier 2006)48 portant promulgation de la loi n 54-05 relative la gestion dlgue des services publics, la notion de gestion dlgue regroupe des contrats nomms que sont la concession, laffermage, la grance et la rgie intresse, que des contrats innoms dits sui generis , elle peut seffectuer par contrat, par acte unilatral49, lgislatif ou rglementaire . La grance est dfinie comme tant un mode en vertu duquel le grant gre le service public pour le compte de la personne publique , quant laffermage cest un mode en vertu duquel le cocontractant ne contribue nullement aux investissements du service public, mais se reconnat le droit de se rmunrer sur les usagers . Le procd le plus ancien de la gestion dlgue des services publics au Maroc est la concession, celle-ci reprsente le rgime de rfrence 50de la gestion dlgue. Cest une convention par laquelle une collectivit publique confie une entreprise prive ou un organisme public ou semi-public, le soin dexploiter un service public dans des conditions prvues par un cahier de charges et moyennant une rmunration provenant le plus souvent de la perception dune redevance sur les usagers .51 La concession est un mode de gestion des services publics qui occupe une place importante non seulement dans la gestion, mais aussi dans des infrastructures ncessaires au fonctionnement des services publics nationaux mais surtout locaux ,52 il s'agit par exemple des concessions partielles des transports, la gestion des autoroutes ou encore la concession la plus

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B.O. n 5404 du 16 mars 2006. Son article 2 dfinit la gestion dlgue comme tant un contrat par lequel une personne morale de droit public, dnomme "dlgant" dlgue, pour une dure limite, la gestion d'un service public dont elle a la responsabilit une personne morale de droit public ou priv, dnomme "dlgataire" en lui reconnaissant le droit de percevoir une rmunration sur les usagers et/ou de raliser des bnfices sur ladite gestion .P. 506. 49 Cest le cas de lagrment qui est un acte unilatral, mais qui fait objet dun accord entre la collectivit publique et lentreprise, par exemple le bureau Veritas qui assure le contrle de la navigabilit des aronefs, ses obligations sont fixes par un cahier de charges annex la dcision dagrment, concernant les frais de contrle que peut percevoir lentreprise, ils sont fixs par arrt ministriel. M. Rousset, le service public au Maroc, 2me d La porte, 2002, p. 63 50 A. El Moutawakil, les grands services publics, op-cite, p. 91, 92. 51 M. Rousset, le service public au Maroc, 2me d, La porte, 2002, p. 61. 52 M. Rousset et J. Garagnon, droit administratif marocain, op-cite p.350.

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mdiatise de la distribution deau et dassainissement et dlectricit ; La lyonnaise des eaux de Casablanca (LYDEC). La rgie intresse, est une convention proche du procd de la concession, elle consiste aussi en la prise en charge de lactivit de service public par des organismes privs ou publics, elle ne diffre quen ce qui concerne le mode de rmunration de la socit prive laquelle la gestion du service public est confie 53. Cette socit prive nassume pas les risques et prils de la gestion puisquelle est rmunre par une somme fixe augmente dun pourcentage des bnfices dexploitation. Les socits en tant que mode de gestion des services publics se revtent sous deux formes ; les socits d'Etat et les socits d'conomie mixte : Les socits d'Etat sont des socits capital exclusivement public constitues sous la forme de socit anonyme 54 dans le but de promouvoir le dveloppement dun secteur dtermin de lconomie nationale . LEtat, seul dtenteur de capital et donc le seul actionnaire, le conseil dadministration ne se compose que des reprsentants de la collectivit de rattachement. Les socits d'conomie mixte, deuxime forme de gestion des services publics par des socits est une notion hybride 55, dfinie habituellement comme tant une socit anonyme dont le capital est en principe constitu de capitaux apports par les collectivits publiques et des personnes prives . La mixture dans la socit d'conomie mixte nest pas seulement financire, mais aussi entre la structure prive laquelle elle emprunte la forme et la mission publique quelle est tenue de poursuivre.56 Or cette dfinition nest pas complte ; le critre dassociation de capitaux publics et de capitaux privs dans une socit donne nest pas suffisant pour la considrer comme tant une socit d'conomie mixte pour quil en soit ainsi, il faut que la participation publique slve 53 54

M. Rousset et J. Garagnon, droit administratif marocain, op-cite, p.352. Les socits d'Etat drogent quant aux rgles rgissant les socits anonymes, en ce quelles sont soumises au contrle financier de lEtat prvu par le Dahir du 1er Avril 1960 55 A. El Moutawakil, les grands services publics, op-cite p. 88, 89. 56 Le recours la dlgation de gestion des services publics locaux aux socits d'conomie mixte prsente plusieurs avantages, la collectivit locale dlgante ne subi le risque financier quen proportion de sa participation au capital Quoique ce raisonnement reste thorique vu que la collectivit locale laquelle la socit d'conomie mixte se rattache ne peut se dsintresser de son sort. Cit in Ibid. p. 65. En cas de gestion rentable ou bnficiaire la collectivit locale en profite ce qui nest pas le cas pour la concession, tout aussi important, la collectivit locale dispose de pouvoirs tendus, notamment en sa reprsentation au conseil dadministration qui nest pas proportionnelle au capital dtenu par la collectivit locale, ce qui constitue une drogation par rapport au droit commun des socits.

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un montant suffisant, au moins 1/3 de nature permettre la maitrise effective de la socit par lEtat, ou par lorganisation publique participante 57. Quils soient nationaux ou locaux, quels quils soient leurs modes de gestion, quelles que soient les prestations quils fournissent ou les techniques quils mettent en uvre, quel quil soit le statut juridique qui leur est applicable, les services publics sont soumis des principes fondamentaux qui dcoulent de la nature mme de leur existence : il s'agit des principes dgalit, de neutralit, de continuit et dadaptabilit. Lgalit signifie non seulement une galit daccs aux services publics tous les citoyens, mais aussi lgalit de traitement de tous les usagers ; ce principe a une composante territoriale selon laquelle la prestation de services doit tre assure pour tous, surtout dans les espaces territoriaux les plus dfavoriss ou les plus reculs 58. Son corollaire, le principe de neutralit refuse toute mesure de diffrenciation en fonction des situations familiales et financires des usagers, il interdit toute discrimination ou favoritisme entre les usagers en fonction de la religion, des choix politiques ou philosophiques, etc. Il interdit toute slection ou exclusion, aucune ingalit ne doit exister selon la classe ou lorigine sociale. Le principe de continuit signifie que les services publics doivent tre assurs quoi quil en cote et quelles quelles soient les circonstances. Il impose de servir, sans faille ni rupture et de la meilleure faon qui soit, les usagers qui disposent du droit de fonctionnement rgulier et continu des services publics59. Le quatrime principe cest la mutabilit ou ladaptabilit des services publics leur contexte ; aux ncessits, aux nouveaux besoins des utilisateurs, et aux volutions techniques. Ladaptabilit des services publics se fait selon plusieurs processus dont

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M. Rousset, le service public au Maroc, op-cite p. 65. Lgalit devant le service public se traduit aussi en termes conomiques, il sagit de lgalit devant les charges, principe valeur constitutionnelle Article 17 de la constitution : Tous supportent, en proportion de leurs facults contributives, les charges publiques que seule la loi peut, dans les formes prvues par la prsente constitution, crer et rpartir. en vertu duquel la personne publique qui cause un dommage un citoyen, alors quun autre citoyen nest pas affect par ce dommage ou par un autre caus par lEtat dans son sens large, serait enrichie au dtriment de la victime de dommage qui serait appauvrie. Le principe dgalit devant les charges publiques ne saurait permettre dexclure du droit rparation un lment quelconque de prjudice indemnisable rsultant des travaux ou de louvrage public .Dcision n 85-198 DC du 13 dcembre 1985, Loi modifiant la loi n 82-652 du 29 juillet 1982 et portant diverses dispositions relatives la communication audiovisuelle. www.conseilconstitutionnel.fr Lgalit devant les charges une autre connotation, cest lgalit devant les tarifs, c'est--dire que chaque citoyen doit payer la mme somme dargent pour la prestation dun service que tout autre citoyen bnficiaire de la mme prestation. 59 Sauf en cas de force majeure ou encore en cas de grve ; dailleurs ce droit constitutionnellement garanti donne rflchir quant aux moyens de sa conciliation avec le droit laccs continu aux services publics.

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la suppression60, les dcideurs politiques peuvent aussi procder des modifications, des ajustements, la modernisation des services publics en vue de leur adaptabilit aux diffrentes mutations que connaissent les socits. Les services publics locaux sont aujourdhui confronts une demande sociale en raison de la forte croissance urbaine61. Celle-ci a engendr des dficits, voire mme des carences dans les quipements infrastructurels et socioconomiques ; ces insuffisances, ct de la pnurie en services de base correspondants des besoins vitaux induisent, un dsquilibre entre loffre du service public et la demande sociale. Ceci nest pas sans consquences sur la qualit de vie des citoyens, les chiffres en tmoignent : Ainsi par exemple, en matire dassainissement, seuls 73 % de la population ont bnfici, pendant lanne 2004, des systmes dassainissement amliors, alors quau Djibouti, 82% de la population en a bnfici ; sachant que lcart dans le classement des deux pays selon lindicateur du dveloppement humain est de lordre de 23 points (le Maroc 136me, et le Djibouti 149me). La population utilisant des sources deaux amliores, pour la mme anne 2004 est de lordre de 81% contre 75% en 1990, alors quau Pakistan qui a un cart de 10 point par rapport au Maroc dans le classement selon lindicateur prcit ; 91% de la population ont accs des sources deau amliores. Selon les chiffres de lanne 2005, et toujours selon le rapport de dveloppement humain 2007-2008, 4,5 millions de marocains vivant sans lectricit, durant la priode 2000 et 2005, le taux dlectrification national et de lordre de 85%62. Ces chiffres, ainsi que la ralit locale dmontrent que les services publics locaux sont donc appels faire face une demande sociale en constante extension afin rsorber les dficits enregistrs, et fournir au citoyen local la bonne prestation quil attend. Les questions et problmatiques lies aux dfaillances dans la rentabilit sociale et conomique des services publics locaux sont aussi diverses et varies ; cependant lobjet du prsent travail de recherche

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Une srie de services administratifs crs pendant la deuxime guerre mondiale pour faire face une situation de pnurie ont t supprims ds lors que les approvisionnements des marchs sont redevenus normaux. M. Rousset, le service public au Maroc, op-cite p.111. 61 En lespace de 10 ans, (de 1994 2004), la population urbaine a connu un accroissement de 22,6% contre seulement 6,2% pour le rural. De 1960 2004, le nombre de la population urbaine est pass de 3,4 millions 16.5 millions, soit 5 fois le chiffre de 1960 et la proportion de la population urbaine par rapport la population globale du pays a presque double (elle est passe de 29% 55). Ministre de lintrieur, direction gnrale des collectivits locales, rencontres des collectivits locales, services publics, 2006. P.4 Selon le rapport sur le dveloppement humain, le taux de la population urbaine par rapport la population nationale est pass de 37% en 1975 58,7% en 2005. Rapport sur le dveloppement humain 2007/2008, programme des nations unies pour le dveloppement (PNUD). P.253 62 Ibid. P.304

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est dapprocher les dysfonctionnements existants dans les services publics communaux par le biais de la gestion locale des marchs publics. Toutes les collectivits locales ont des besoins en travaux, en fournitures et en services ncessaires au fonctionnement de services destins satisfaire lintrt gnral, de ce fait, tout contrat de march public correspond un besoin dutilit publique, donc un besoin dintrt gnral. Dailleurs, la naissance du concept de marchs public est intimement lie celle du service public, et les deux concepts ont corrlativement volu. Le concept de march public au Maroc est relativement rcent, les prestations ralises pour le fonctionnement des structures de lEtat makhzenien se faisaient dans des conditions analogues celles des particuliers, la notion de march renvoyait ltymologie du terme : vente, achat dune marchandise, lieu o se droule la prestation, convention qui les rgit 63. Ladministration engageait des matres-massons, menuisiers, elle recrutait la mainduvre directement du lieu dembauche et leur fournissait les matriaux ncessaires qui taient transports dos de mulets (le seul moyen de transport qui existait lpoque) et il appartenait aux fonctionnaires de lEtat dassurer le contrle des chantiers et la paie des ouvriers. Quant aux commandes en fournitures, elles taient directement demandes auprs des commerants et artisans qualifis.

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H. Kissi, les marchs publics et leur financement, d maghrbines, 1983, p. 9.

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Les premiers jalons64 de la rglementation sur les marchs publics65 ont t poss en 1917, et ce, suite la promulgation du Dahir du 8 Chaabane 1335 (9 juin 1917) 66 portant rglement sur la comptabilit publique de lempire chrifien qui a consacr certains de ses articles la commande publique, et ce dans un esprit de modernisation de la gestion publique67. Ce nest quen 1965 quun texte spcial avait t consacr aux marchs publics, cest le dcret n2-65-116 du18 Moharrem 1383 (19 mai 1965)68 fixant les conditions et les formes dans lesquelles sont passs les marchs de travaux, de fournitures ou transports au compte de l'Etat. Le texte de 1965 a t abrog et modifi par le dcret n 2-76-479 du 19 Chaoual 1396 (14 octobre 1976)69, en 1998 par le dcret n 2-98-482 du 11 ramadan 1419 (30 dcembre 1998)70, et rcemment par le dcret n 2-06-388 du 16 moharrem 1428 (5 fvrier 2007)71 fixant les conditions et les formes de passation des marchs de l'Etat ainsi que certaines rgles relatives leur gestion et leur contrle. Il dfinit le march public comme tant : Tout contrat titre onreux conclu entre, d'une part, un matre d'ouvrage et, d'autre part, une64

Avant la promulgation du Dahir de 1917, la France avait sign un accord avec lAllemagne (4 novembre 1911) qui consacra ladjudication comme rgle de passation des marchs publics au Maroc, larticle 6 de laccord franco-allemand dispose le gouvernement de la rpublique franaise sengage veiller ce que les travaux et fournitures ncessits par la construction ventuelle des routes, chemins de fer, ports, tlgraphes etc. soient octroys par le gouvernement marocain suivant les rgles dadjudication. . La rgle dadjudication a t mme consacre dans le chapitre sixime de lacte dAlgsiras ratifi par le Maroc le 18 juin 1906 pour les concessions des travaux publics, lexploitation des forts de chne-lige et dautres activits dintrt gnral. 65 Outre le Dahir de 1917, dautres textes furent promulgus contenant des dispositions relatives aux marchs publics, il sagit du Dahir du 26 Janvier 1917 fixant les conditions dans lesquelles doivent tre constitus les cautionnements verss par les soumissionnaires ( il s'agit de toute personne physique ou morale qui propose une offre en vue de la conclusion d'un march (article 3 du dcret n 2-06-388 du 16 moharrem 1428 (5 fvrier 2007) fixant les conditions et les formes de passation des marchs de l'Etat ainsi que certaines rgles relatives leur gestion et leur contrle, et larrt du 26 Juin 1936 instituant la commission des marchs qui assume la fonction de vrifier lexcution des marchs de lEtat, ainsi que le Dahir du 28 Aout 1948 portant rglementation du nantissement des marchs publics et la cration de la caisse marocaine des marchs par larrt de 29 Aout 1950 devenue ncessaire lpoque pour lancer les grands projets dquipement. Nanmoins la conclusion des marchs publics dans cette priode se faisait au niveau central, les entits locales navaient pas la personnalit juridique pour conclure des marchs pour leurs comptes puisquaux termes de larticle 1 er du Dahir du 9 juin 1917 prcit : Sont seuls considrs comme appartenant lexercice et au budget correspondant, les services faits et les droits acquis lEtat ou ses cranciers . 66 Aux termes de larticle 23 dudit Dahir les marchs de travaux, fournitures ou transports au compte de lEtat sont fait avec concurrence et publicit. Les procs-verbaux de ladjudication sont approuvs par le rsident gnral ou par le fonctionnaire dlgu cet effet . B.O n 244 du 25 Juin 1917.P. 708. 67 Durant le protectorat, le nombre des marchs publics a augment sous limpulsion des nouvelles administrations (appeles directions charges sous la direction du rsident gnral des nouvelles affaires tatiques et des nouveaux tablissements publics (loffice chrifien des phosphates et 1920 le bureau de recherche et de la participation minire en 1928). En plus de lmergence de nouveaux services publics, les chantiers de la mise en valeur du pays se sont multiplis ; construction des routes, des ports, des ponts, tous ces chantiers donnrent lieu la passation de nombreux marchs publics, l'adjudication na volu et na connu de russite apparente quavec linterventionnisme tatique dans la vie conomique et sociale A. Haddad, les marchs de travaux publics et leur rle dans le dveloppement conomique et social. Ed. Okad P.17. 68 B.O n 2744 du 2 Juin 1965. (P.670 679) 69 B.O n 3339 du 27 octobre 1976. (P.1140 1150) 70 B.O n 4654 du 7 janvier 1999. (P. 4 20) 71 B.O n 5518 du 19 avril 2007. (P.529 556)

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personne physique ou morale appele entrepreneur, fournisseur ou prestataire de services ayant pour objet l'excution de travaux, la livraison de fournitures ou la ralisation de prestations de services (article 3, al 9) Conformment aux dispositions de larticle 48 du dcret n 2-76-576 du 5 Chaoual 1396 (30 septembre 1976)72 portant rglement de la comptabilit des collectivits locales et de leurs groupements, les marchs publics des collectivits locales et de leurs groupements sont passs et rgls dans les mmes formes et conditions arrtes pour les marchs de l'Etat, et sont soumis aux mmes dispositions de contrle et de gestion que celles applicables ces marchs. Toutefois, ils ne sont valables et dfinitifs quaprs approbation du ministre de lintrieur ou de son dlgu 73 La gestion locale des marchs publics prsente dautres particularits qui seront dveloppes dans le premier chapitre de la premire partie, cependant ce nest pas laspect procdural de la passation des marchs des collectivits locales qui constitue lobjet de cette tude, cest le rapport thorique et pratique quentretient la gestion locale des marchs publics avec la qualit du service public local. Les marchs publics matrialisent la qualit de la gestion publique, ils illustrent au peuple le comment des investissements des deniers publics. La conception des marchs publics a volu dans le temps, les marchs publics ne sont plus conus comme de simples transactions entre lEtat et le priv, mais aussi comme un instrument politique dcisif qui traduit matriellement le projet national de dveloppement ; et cest dans leurs rapports avec la qualit de la prestation du service public local que lampleur de leur rle social parait nettement. Afin dtudier ce rapport, il est essentiel de dlimiter le cadre de la recherche et choisir entre les collectivits locales du royaume, et cest lchelon communal qui parait tre le cadre le plus appropri. Des considrations multiples dictent ce choix : Dabord, une lecture aussi minime soit elle de crits sur les gnes ; pour ne pas dire gense, vu la raret des apports doctrinaux sur les origines de lorganisation de la population

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B.O n3335-bis du 1er octobre 1976 (P. 1051 1070) Article 49 du dcret n2-76-576 du 5 Chaoual 1391(30septembre 1976) portant rglementation de la comptabilit des collectivits locales (B.O 3335-bis prcit. P.1064) tel quil a t modifi par larticle premier du dcret n 2-99-786 du 27 septembre 1999.

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amazighe dans le Maroc antique et pr-antique, et sur lvolution de la gestion locale au Maroc, amnera tout individu faire les constats suivants : Cest lchelon le plus infrieur, le plus bas du territoire que les besoins de la population peuvent tre connus chez leurs reprsentants, analyss dans leur contexte et cerns dans leur globalit, et cest cet chelon que les rsultats peuvent tre facilement vrifiables. Cependant les dcideurs politiques nont pas tir de grands enseignements des facteurs qui ont contribu ce que les marocains dautrefois ont pu ralis, avec les moyens les plus archaques et dans les conditions les plus dfavorables ; La dimension du fait sociologique dune collectivit territoriale est mise lcart par le lgislateur qui lui prfre les dimensions politiques et administratives, et cest dans le rural que le fauss apparat clairement ; dans une commune de 30.000 hectares coexistent des douars qui constituent des units sociologiquement beaucoup plus attractives que les centres administratifs installs parfois de faon arbitraire au lieu gomtrique de la commune 74. Alors que certains parlent mme dune existence quasi-naturelle de la commune : quest ce que la commune ? se demande Royard Collard la tribune de la chambre le 13 avril 1818, il apportera sa propre rponse : la commune, comme la famille, est avant lEtat ; la loi politique la trouve ne la cre pas 75 Quoique le dcoupage territorial du royaume en communes soit bas sur des considrations administratives, ces collectivits locales constituent lchelon le plus bas du territoire, donc celles qui peuvent tre le plus maitrises quant aux besoins de leurs ressortissants et constituent par consquent lchelle la plus adquate pour une tude sur la gestion locale des marchs publics au Maroc. Le choix communal est dict aussi par les grands principes quimprgne la dcentralisation et selon lesquels la gestion des intrts locaux (et de lintrt gnral par consquence) implique que la totalit des affaires locales relve de la comptence des autorits locales et lorsque ces autorits manent exclusivement de la collectivit dcentralis 76, notamment par le procd de llection.74 75

M. Rousset et J. Garagnon, droit administratif marocain, op-cite p. 246. M. Chabin, E. Warsquiel, La restauration. Ouvrage collectif, les communes et les pouvoirs de 1789 nos jours, sous la direction de L. Fougre, J. Machelon et F. Monnier. PUF, 1re d, 2002. P. 189. 76 M. Rousset et J. Garagnon, droit administratif marocain, op-cite p 34.

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A lchelon communal, quoique les prrogatives des assembles lues sont limites par les pouvoirs des autorits de tutelle en matire de passation des marchs publics, mais cest le prsident du conseil communal, membre lu qui est comptent, en principe77, pour conclure ces contrats (article 47 (alina 4) de la charte communale). Alors que dans les rgions, prfectures et provinces, cest le reprsentant du pouvoir excutif qui peut dcider de la conclusion ou non de marchs au profit de ces collectivits locales78. De ce fait la commune constitue lespace administratif local le moins inond par les pouvoirs des reprsentants du pouvoir excutif et donc lespace le plus autonome relativement par rapport aux autres collectivits locales du royaume. Cela permettra dexaminer la problmatique de la gestion communale des marchs publics la lumire des trois matresmots de la dcentralisation, et des enseignements tirs des pratiques des gestionnaires marocains dautrefois : la gestion autonome, la reprsentation et le processus dlibratif. A cette fin, une tude gnrale du rgime qui rgit la gestion communale des marchs publics permettra de dceler ses retombes sur la qualit de fourniture du service public communal. Ensuite ce sont les rapports quentretient la pratique des marchs communaux avec laptitude des services publics communaux rpondre convenablement aux attentes des usagers qui permettra de cerner un autre volet des rapports qui les lient, et ce, afin de pouvoir rflchir sur des alternatives, si bien entendu des lacunes seront souleves : 1. La commune qui conclut un march public en vue de rpondre un besoin de fonctionnement du service public communal, se trouve-t-elle bloque par des textes qui limitent ses comptences ou bien autonomise par ces mmes textes ? En dautres termes durant le processus de passation de march public existent-elles des autorits non lues qui entravent laction communale dans la gestion des marchs communaux ?

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Sauf dans la commune urbaine de Rabat (qui fonctionne selon un rgime spcial) o cest le wali, gouverneur de la prfecture de Rabat qui est comptent pour conclure les marchs de travaux, de fournitures et de services de ladite commune sous contreseing du prsident du conseil communal (article 133 de la charte communale). Il en est de mme pour les communes des Mchouars o cest le pacha ou son adjoint qui exerce les comptences dvolues, en principe, au prsident du conseil communal, dont la conclusion des marchs publics. (Article 136 de la charte communale) 78 Il s'agit notamment du gouverneur chef-lieu de la rgion pour les rgions (article 55 du Dahir portant organisation rgionale prcit) et le gouverneur ou le wali pour les prfectures et les provinces article 46 (alina 3) du Dahir portant organisation prfectorale et provinciale prcit.

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Cette question est dlicate par nature et soulve deux interrogations : Si le rgime de gestion communale des marchs publics freine laction communale, et donc la marge dinitiative de llu, comment le service public communal peut tre affect ? Si ce mme rgime autonomise laction communale, comment le service public communal peut en tirer des bnfices ? Ces questions rpondront aux trois problmatiques : lautonomie, la reprsentation et la dlibration 2. Les questions et problmatiques lies au rle de la gestion communale des marchs publics dans la dtermination de qualit de la prestation des services publics communaux dclinent le rapport entre ressources utilises, et prestations offertes, autrement dit, cest une obligation de rsultat quassume llu communal vis--vis de la population, qui est bien entendu une un bon service public communal . - Un march public est un contrat titre onreux, en dautres termes, cest un rapport dargent qui met en cause, lintrt gnral et lintrt du cocontractant de personne publique ; entre les deux, llu communal peut : soit investir sainement largent du contribuable dans une prestation utile et efficace, soit privilgier ses intrts personnels et faire de la procdure une pice thtrale dont il connat la fin. Linvestissement des deniers publics dans marchs communaux est de 4 milliards de DH par an; prs de 7 % des marchs publics nationaux et prs de 1,5 % du PIB 79. Donc il s'agit de sommes considrables ; leur affectation doit tre profitable aux citoyens. Toutefois, si des manigances ont lieu dans la gestion des marchs communaux cela va certainement se rpercuter sur la qualit de la prestation du service public communal, et donc sur la qualit de vie de la population locale. Si cest le cas, Est-ce-que lEtat a pris des initiatives pour limiter (pour ne pas dire arrter) les pratiques anticoncurrentielles et malsaines dans les marchs publics, dans laffirmative, lesquelles ? Sont-elles suffisantes ? Y-a-t-ils dautres moyens pour viter le dtournement des marchs publics de leur but essentiel quest la servitude de lintrt gnral la servitude dintrts personnels ?79

Ministre de lintrieur, la lettre des collectivits locales, bulletin dinformation trimestriel de la direction gnrale des collectivits locales (DGCL). 1er trimestre, 2007, spcial thique et transparence dans la gestion communale, p.18.

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Cette question rpondra la problmatique du rapport de lthique du march public avec la qualit du service public communal 3. Lachat public nest pas un achat comme les autres, cest largent des contribuables investis pour leur bien, donc cest une responsabilit quassume la commune et toute personne publique acheteuse quand elle contracte un march public. La responsabilit de prserver les deniers publics et de leur bonne utilisation exige de la part de llu local, deffectuer le choix intelligible et responsable de loffre. Est-ce que llu local est assez qualifi, assez encadr et assez form pour le faire ? Cette question rpondra la problmatique de capacits techniques et managriales du gestionnaire et les consquences de lquilibre ou le dsquilibre dans les rapports quentretient sa qualification avec sa mission

4. A la lumire du modle de lespace local autonome quant la gestion de ses intrts ; dirig par des reprsentants lus par la population locale et qui fonctionne selon le mode dlibratif, tel que la dmocratie le veut, lhistoire lenseigne et la dcentralisation limpose, et vu la ncessit de prserver lthique du marchs public, et compte tenu du manque de moyens financiers et humains des communes : Y-a-t-ils des moyens passibles de rendre la gestion communale des marchs publics un levier qui favorise la qualit de fourniture du service public communal ? Lesquels ? Quels sont les mcanismes de leur mise en pratique ?...

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-Premire partie :Gestion communale des marchs publics et service public communal :

Rapports thoriques

Dans lexercice de sa comptence formelle, la commune est habilite recourir la contractualisation des commandes publiques; celle-ci est rgie par un texte rglementaire, cest le dcret n 2-06-388 du 5 fvrier 2007 prcit ; il rglemente tous les marchs de lEtat dans son large, et par dautres textes lgislatifs et rglementaires qui consacrent des dispositions spcifiques aux marchs publics communaux et aux autres collectivits locales du royaume. 31

Comprendre quelque chose un march public, et quelle quelle soit lapproche, cest saisir dabord la complexit de son dispositif. Subsquemment, la dfinition dun cadre danalyse adapt lobjet du prsent travail de recherche implique dinterroger le systme de la contractualisation des marchs publics dans son aspect normatif. Il est dabord ncessaire dapprocher, de manire globale, le march public en tant quacte juridique conclut selon des normes processuelles et procdurales qui lui sont propres(les rgles et conditions relatives sa conclusion, principes de base, cycle de passation,), engageant une personne publique, et plus prcisment une collectivit dcentralise (acteurs, attributions des intervenants, les pouvoirs des reprsentants de la nation, les pouvoirs des autres intervenants) Cette dmarche permettra donc davoir une vision densemble sur lenvironnement juridique de la passation des marchs publics communaux, ce qui amnera, par la suite, analyser les consquences de la rgle de droit sur lexercice de la comptence majeure, voire la raison dtre de la collectivit dcentralise, savoir, lorganisation et le fonctionnement harmonieux des services publics communaux. Afin dtablir ce rapport, cette premire partie traitera la problmatique de la gestion communale des marchs publics dans son aspect thorique deux niveaux : Le premier surplombe le systme de passation des marchs publics dans le processus de leur contractualisation. Il rpondra principalement aux questions suivantes : Que sont les marchs publics ? Quelle en est la procdure ? Quels en sont les acteurs? Quelles spcificits prsente le processus de leur contractualisation par la collectivit dcentralise? Etc. =) Ce niveau ne saurait tre exhaustif, mais les grandes lignes de larsenal lgislateur et rglementaire des marchs publics communaux seront exposes. (Chapitre premier). Cest partir de ce niveau, fondement du cadre de lanalyse juridique que seront repres les caractristiques de la dcision du march public communal, ce qui permettra desquisser le rapport de la lgislation et de la rglementation en vigueur avec 32

la qualit de la commande publique ; et par consquent celle du service public communal. =) Ce deuxime niveau sattachera donc localiser des repres pour spcifier, si dun point de vue thorique, les communes du royaume sont habilites conclure de bons achats publics garantissant un fonctionnement harmonieux du service public communal, ou bien larsenal normatif sy affrant contient des lacunes passibles dengendrer la contractualisation de mauvais achats . (Chapitre deuxime).

Chapitre premier : Le rgime de la gestion communale des marchs publics

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Les marchs publics cotent cher lEtat, leur importance dpasse le financier et ladministratif pour toucher le politique, le social, le culturel et donc le socital. La procdure de leur passation se doit par consquent efficace, efficiente pour que leur contractualisation tre utile et profitable. cette fin, tout un arsenal juridique est consacr aux marchs publics. Il s'agit des rgles procdurales qui sappliquent tous les marchs lancs par toutes les personnes publiques acheteuses ; elles ressortent essentiellement du dcret n 2-06-388 fixant les conditions et les formes de passation des marchs de l'Etat ainsi que certaines rgles relatives leur gestion et leur contrle 5 fvrier 2007 prcit. A ces rgles sajoutent dautres normes relatives au contrle qui seffectue sur lacte du march public, un contrle qui sexerce priori et postriori, c'est--dire avant et aprs que lacte ait la force excutoire de la dcision administrative. Cest sur cette question que les marchs conclus par les communes et les autres collectivits locales du royaume se distinguent des autres marchs publics nationaux. Ces rgles seront respectivement examines dans la premire section du prsent chapitre. Dans une section deuxime, il serait question de sinterroger sur les principes fondateurs de la commande publique qui permettront de mieux cerner la finalit de toutes les tapes procdurales par lesquelles passe un march public.

- Section premire : Les grands traits du dispositif lgislatif et rglementaire de la contractualisation des marchs communaux

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On entend par march public, un contrat particulier par lequel une personne physique ou morale sengage envers une personne publique (Etat, commune, tablissement public) raliser pour le compte et sous la surveillance de celle-ci un ouvrage public ou lui fournir des objets ou un service utile au fonctionnement du service public moyennant un prix dtermin sur les bases prvues au contrat80 .

Que la personne publique acheteuse soit une commune, une prfecture, une province, une rgion, un ministre, un tablissement publicou autre, le contrat de march public est conclu dans les mmes conditions et obit aux mmes normes de sa passation. (Sous-section premire).

Par ailleurs, ce sont les pouvoirs et les attributions des acteurs et des intervenants dans la gestion des commandes publiques communales comme celles des autres collectivits locales du royaume ; que diffrencie leur contractualisation par rapport aux autres personnes publiques acheteuses. (Sous-section deuxime).

- Sous-section premire :

Le contrat de march public

Un march public est dabord un contrat, une convention, elle nest parfaite que par laccord des parties sur les lments essentiels de lobligation 81, cest un engagement qui cre des obligations et des droits lencontre des contractants, cest un contrat titre onreux (il a un prix), nomm, rgit par un droit crit (le dcret sur les marchs publics), et synallagmatique puisque les deux parties au contrat sobligent rciproquement les uns envers les autres.

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A. Boutaqbout, marchs publics, guide pratique du gestionnaire, Remald n18, anne 2000, p 13.cit in. K. Fatih et M. El Haini, le rle de la jurisprudence administrative en matire des marchs publics, mouhakama : revue trimestrielle juridique spcialise, n1, 2006, p.20 81 Article 19, code des obligations et des contrats. Remald n112, 1re d, collection textes et documents 2004, p.19.

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Cest aussi un contrat commutatif, chacune des parties sengage donner ou faire quelque chose qui est regarde comme lquivalent de ce quon lui donne ou de ce que lon fait pour elle. Le contrat de march public est un contrat administratif, parce que ds lors quune personne publique, ou une personne prive mandataire de cette dernire, se trouve partie au contrat, celui-ci sera administratif si telle est la volont expresse de ladministration, ou si sa nature dcoule de lobjet du contrat ou des clauses quil comporte 82.

A. Les parties au contrat :Le contrat de march public engage une personne publique acheteuse et une personne physique ou morale, qui peut tre une personne prive ou publique. 1. Lacheteur public : la commune : Reconnues constitutionnellement comme des personnes morales de droit public83, les communes peuvent conclure des contrats de marchs publics pour leur compte, elles ont une autonomie financire qui leur procure le pouvoir dagir en leur propre nom et de financer leurs oprations par leur propre budget. Les communes peuvent effectuer des oprations financires, passer dautres contrats titre onreux comme lacquisition dimmeubles ou encore le droit de recourir lemprunt auprs du fond dquipement communal (FEC) 84. Pour quune personne morale soit reconnue comme telle par le droit public comme par le droit priv, elle doit avoir un patrimoine propre et un budget propre. Cependant une personne publique qui dispose de lautonomie financire sans pour autant tre reconnue par la loi comme une personne morale na pas le droit de conclure des marchs pour son compte, cest le cas des82 83

M. Rousset et J. Garagnon, droit administratif marocain, op-cite p. 416. La personnalit morale de droit public est acquise par lautorit publique, elle ne peut tre cre que par la loi, ce qui la diffrencie de la personnalit morale de droit priv, qui peut tre cre volontairement par des particuliers, cest le cas des socits commerciales, associations sportives ou encore des centres de bienfaisances 84 Article 85 de la charte communale tel quil a t modifi et complt par la loi n 01-03 promulgue par le dahir n 1-03-82 du 20 moharrem 1424 (24 mars 2003). d Le fond dquipement communal (FEC) est une banque qui apporte son concours technique et financier aux collectivits locales clientes dans les secteurs suivants : les infrastructures et services de base (eau potable, lectricit, assainissement liquide et solide, routes) ; les quipements socio collectifs ou caractre conomique (amnagements sportifs, touristiques ou rcratifs, quipements commerciaux, quipements spcialiss) ; les amnagements (zones dhabitat, rhabilitation de quartiers, voiries, zones industrielles, zones touristiques). Parmi les conditions dligibilit, les Collectivits Locales doivent avoir un taux dendettement infrieur 40 %, participer au financement du projet hauteur de 20 % et disposer des moyens humains, matriels et organisationnels pour raliser le projet. FEC Guide de Financement. Edition 2007. www.fec.ma

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arrondissements85 qui sont dpourvus de la personnalit juridique mais jouissant dune autonomie administrative86 et financire87 88. Toutefois lautonomie financire des collectivits locales au Maroc est fragilise par une tutelle pesante et assez contraignante sur la gestion des finances locales ; le budget des collectivits locales doit tre approuv par le ministre de lintrieur89, les engagements financiers des collectivits locales rsultant soit d'acquisition, travaux ou quelconque dpense d'investissement payables terme avec ou sans intrt doivent obligatoirement tre soumis lautorit de tutelle pour approbation par arrt conjoint du ministre de l'intrieur et du ministre des finances90. Mme les modalits des emprunts, elles doivent pralablement leur inscription dans le budget, tre approuves par un arrt conjoint du ministre des finances et du ministre de l'intrieur91. 2. Le cocontractant de commune : Le cocontractant de la commune est un fournisseur dans les marchs de fournitures, un entrepreneur dans les marchs de travaux, et un prestataire de services dans les marchs de services.85

Les arrondissements sont des circonscriptions administratives cres dans les communes urbaines de plus de 500.000 habitants). 86 En vertu de larticle 104 de la charte communales Le prsident du conseil darrondissement est l'autorit excutive de l'arrondissement . Il excute les dlibrations du conseil et en assure le contrle, les mesures individuelles de police administrative dans les domaines de l'hygine, de la salubrit . 87 Selon les stipulations de larticle 101 de la charte communale de 2002 Le conseil darrondissement et sous la responsabilit et le contrle du conseil communal examine et vote le compte de dpenses sur dotations et le compte administratif dcide de laffectation des crdits qui lui sont attribus par le conseil communal dans le cadre de la dotation globale de fonctionnement La dotation globale est une dpense obligatoire pour la commune destine aux arrondissements pour couvrir l'ensemble des recettes de leur fonctionnement. Le prsident de l'arrondissement est l'ordonnateur du compte de dpenses sur dotations. Il engage et ordonnance les dpenses inscrites au compte de dpenses sur dotations , selon les rgles applicables aux dpenses ordonnances par le prsident du conseil communal (Article 119). 88 Article 85 de la charte communale tel quil a t modifi et complt par la loi n 01-03 promulgue par le dahir n 1-03-82 du 20 moharrem 1424 (24 mars 2003). 89 Article 13 du Dahir du 30 septembre 1976 relatif l'organisation des finances des collectivits locales prcit tel quil a t modifi par larticle 67 du dahir du 2 Avril 1997 portant organisation de la rgion prcit : Le budget des rgions, prfectures, provinces, communes urbaines et groupements est approuv par le ministre de l'intrieur aprs visa du ministre des finances ; en cas de refus de visa du ministre des finances, le budget est soumis l'approbation du Premier ministre. Le budget des communes rurales est approuv par le gouverneur intress, aprs visa du receveur des finances agissant sur dlgation du ministre des finances. Si le visa est refus par le receveur des finances, le budget est soumis l'approbation du ministre de l'intrieur aprs visa du ministre des finances. En cas de refus de visa par le ministre des finances le budget est soumis l'approbation du Premier ministre. 90 Article 21 du Dahir du 30 septembre 1976 relatif l'organisation des finances des collectivits locales prcit. 91 Article 17 (III) du Dahir du 30 septembre 1976 relatif l'organisation des finances des collectivits locales prcit.

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Dans les trois cas, celui qui participe un appel d'offres ou un concours dans sa phase antrieure la remise des offres ou des propositions, ou une procdure ngocie avant l'attribution du march est appel candidat ou concurrent , il portera le nom de soumissionnaire quand il proposera une offre. Si son offre est retenue avant la notification de l'approbation du march il sera appel attributaire , et enfin il sera nomm titulaire aprs la notification de l'approbation du march92. Pour participer un appel doffres, le candidat doit remplir les conditions fixes par larticle 22 du dcret rgissant les marchs publics: La justification des capacits juridiques, techniques et financires requises, tre en situation fiscale rgulire et tre affili la caisse nationale de scurit sociale. La personne physique ou morale ne doit pas tre en liquidation ou en redressement judiciaires sauf autorisation spciale dlivre par l'autorit judiciaire comptente (article 22). En cas dinexactitude de la dclaration sur l'honneur (Article 24), ou lorsque des actes frauduleux, des infractions ritres aux conditions de travail ou des manquements graves aux engagements pris ont t relevs la charge du titulaire (Article 85), lautorit communale peut, aprs avis de la commission des marchs, l'exclure temporairement ou dfinitivement de la participation aux marchs de la commune.

B. Les conditions de forme et de fond de la passation des marchs publics :Un contrat de march public est soumis un ensemble de conditions de fond et de forme sans lesquelles le contrat ne peut tre valide. 1. Les conditions de forme : Le contrat de march public doit comporter des prcisions dterminant les droits et les obligations des parties, selon les dispositions de larticle 15 (alina 3 B) du dcret rgissant les marchs de l'Etat, tout contrat de march public doit contenir les mentions suivantes :

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Ces appellations sont consacres dans larticle troisime du dcret n 2-06-388 du 5 fvrier 2007 rgissant les marchs de lEtat prcit.

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Les mentions obligatoires :Des mention