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CNEP Centre des Nouvelles Etudes sur le Pacifique Séminaire doctorant Mardi 7 juin 2011
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CNEP Centre des Nouvelles Etudes sur le Pacifique Séminaire doctorant Mardi 7 juin 2011.

Apr 04, 2015

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Marin Combe
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Page 1: CNEP Centre des Nouvelles Etudes sur le Pacifique Séminaire doctorant Mardi 7 juin 2011.

CNEP

Centre des

Nouvelles Etudes sur le

Pacifique

Séminaire doctorantMardi 7 juin 2011

Page 2: CNEP Centre des Nouvelles Etudes sur le Pacifique Séminaire doctorant Mardi 7 juin 2011.

Edouard Glissant

21 septembre 1928 - 3 février 20111928 : Naissance au morne Bezaudin dans le Nord de la Martinique

1938 : Admis boursier, intégre le Lycée Shoelcher de Fort-de-France1946 : Départ pour la Sorbonne à Paris1953 : Retour au pays, contribution à la revue Les lettres nouvelles1958 : Prix Renaudot pour La Lézarde roman paru au Seuil1961 : Assigné à résidence en métropole1964 : Le quatrième siècle, prix international Charles Veillon1965 : Installation en Martinique1981 : Le Discours antillais, les éditions du Seuil Directeur du courrier international de l’Unesco1988 : Distinguished professor, Université de la Louisane1990 : Poétique de la Relation , Gallimard1997 : Le traité du Tout-monde2007 : Création de l’institut du Tout-Monde2009 : Philosophie de la Relation , Gallimard 2010 : L’imaginaire des Langues , entretiens avec Lise Gauvin

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Créolisations : La créolisation, qui est un mode de l’emmêlement – et non pas seulement une résultante linguistique – n’a d’exemplaire que ses processus et certainement pas les « contenus » à partir desquels ils fonctionnent. C’est que fait notre départ d’avec le concept de « créolité ». Si ce concept recouvre, ni plus ni moins, cela qui motive les créolisations, il propose par ailleurs deux extensions. La première ouvrirait sur un champ ethnoculturel élargi, des Antilles à l’Océan Indien. Mais ces sortes de variations ne paraissent pas déterminantes, tant est grande leur vitesse de changement dans la Relation. La seconde serait une visée à l’être. Mais c’est là un recul par rapport à la fonctionnalité des créolisations. Ce qui nous porte n’est pas la seule définition de nos identités, mais aussi leur relation à tout le possible : les mutations mutuelles que ce jeu de relations génère. Les créolisations introduisent à la Relation, mais ce n’est pas pour universaliser; la « créolité », dans son principe, régresserait vers des négritudes, des francités, des latinités, toutes généralisantes – plus ou moins innocemment.

Poétique de la relation , 1990 p. 103 : III Chemins - A haute voix pour marquer l’écart

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Opacité :

Non pas seulement consentir au droit à la différence mais, plus avant, au droit à l’opacité, qui n’est pas l’enfermement dans une autarcie impénétrable mais la subsistance dans une singularité non réductible. Des opacités peuvent coexister, confluer, tramant des tissus dont la véritable compréhension porterait sur la texture de cette trame et non pas sur la nature des composantes. (…) C’est aussi que cette même opacité anime toute communauté : ce qui nous assemblerait à jamais, nous singularisant pour toujours. Le consentement général aux opacités particulières est le plus simple équivalent de la non-barbarie. Nous réclamons pour tous le droit à l’opacité

Poétique de la relation , 1990 p. 204, 208,209: Pour l’Opacité

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Errance :

L’errance est la dérive, disons que c’est l’appétit du monde. La dérive, c’est aussi une disponibilité de l’étant pour toutes sortes de migrations possibles. (…) Et l’errance, c’est ce qui incline l’étant à abandonner les pensées de système pour les pensées, non pas d’exploration, parce que ce terme a une connotation colonialiste, mais d’investigation du réel, les pensées de déplacement, qui sont aussi des pensées d’ambiguïté et de non-certitude qui nous préservent des pensées de système, de leur intolérance et de leur sectarisme. Par conséquent, l’errance a des vertus que je dirais de totalité : c’est la volonté, le désir, la passion de connaître la totalité, de connaître le Tout-monde, mais aussi des vertus de préservation dans le sens où on ne veut pas connaître le Tout-monde pour le dominer, pour lui donner un sens unique.La pensée de l’errance nous préserve des pensées de système.

L’imaginaire des langues, 2010 p. 37

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Relation :

La différence entre Relation et totalité vient de ce que la Relation joue en elle-même, là où la totalité, dans son concept déjà, est menacée d’immobile. La Relation est totalité ouverte (…). La Relation est mouvement.

Redisons cela, chaotiquement : la Relation ne relaie ni relie des afférents, assimilables ou apparentables dans leur seul principe, pour la raison qu’elle les différencie à tout coup et les détourne du totalitaire – car son ouvrage change à chaque fois, chacun des éléments qui la font, et par conséquent le rapport qui en naît et qui les change à nouveau.

Ce qui ressort mieux de la Relation c’est ce qu’on en pressent.

La Relation ne peut pas être »prouvée », parce que sa totalité n’est pas approchable – mais imaginée concevable par déport de la pensée.

Poétique de la relation , 1990 p. 185, 186 , 187: RELIE (RELAYE) , RELATE

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Ecarts déterminants : Nous n’avons pas encore commencé d’imaginer ni de calculer les résultantes de tous les écarts déterminants, apparus de partout, porteurs de toutes les traditions et de tous leurs dépassements et dont la confluence abolit les trajets ( les itinéraires) tout en les réalisant à la fin .

Les écarts sont nécessaires à la Relation, et ils en sont tributaires – comme l’olivier de mer pour le mancenillier.

Poétique de la relation , 1990 p. 171: LES ECARTS DETERMINANTS

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Change - échange :

La pensée de l’Autre, c’est la générosité morale qui m’inclinerait à accepter le principe d’altérité, à concevoir que le monde n’est pas fait d’un bloc et qu’il n’est pas qu’une vérité, la mienne. Mais la pensée de l’Autre peut m’habiter sans qu’elle me bouge sur mon erre, sans qu’elle « m’écarte », sans qu’elle me change en moi-même. C’est un principe éthique, auquel, il me suffirait de ne pas contrevenir. L’Autre de la pensée est ce bougemment même. Là, il me faut agir. C’est le moment où je change ma pensée, sans en abdiquer l’apport. Je change et j’échange. Il s’agit d’une esthétique de la turbulence, dont l’éthique qui lui correspond n’est pas donnée d’avance.

Poétique de la relation , 1990 p. 169: LES ECARTS DETERMINANTS

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Mobilité : C’est là qu’il faut en revenir : aux sources de nos cultures, à la mobilité de leur contenu relationnel, pour mieux apprécier ce désordre et moduler sur lui toute action.

Accélération : La principale qualité devient ici l’accélération. Non pas cette précipitation oublieuse qui règne alentour, mais l’acuité extrême de la pensée, prompte à varier sur son erre. Etre capable à tout moment de changer de vitesse et de direction sans changer pour autant de nature ni d’intentions ni de volonté.

Poétique de la relation , 1990 p. 140: LA PLAGE NOIRE

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Langues : Véhiculaire ou non, une langue qui ne se hasarde pas au trouble du contact des cultures, qui ne s’engage pas à l’ardente réflexivité d’une relation paritaire aux autres langues, me paraît, peut-être à long terme condamnée à l’appauvrissement réel.

Poétique de la relation , 1990 p. 126 : TRANSPARENCE ET OPACITE

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Multilinguisme : Quand je parle de multilinguisme, quelqu’un aussitôt me dit : « Ah! Oui, combien de langues tu parles ? » Ce n’est pas une question de parler les langues, ce n’est pas le problème. On peut ne pas parler d’autres langues que la sienne. C’est plutôt la manière de parler sa propre langue, de la parler fermée ou ouverte ; de la parler dans l’ignorance de la présence des autres langues ou dans la préscience que les autres langues existent et qu’elles nous influencent même sans qu’on le sache. Ce n’est pas une question de science, de connaissance des langues, c’est une question d’imaginaire des langues. Et par conséquent, ce n’est pas une question de juxtaposition des langues, mais de leur mise en réseau.

L’Imaginaire des langues , 2010 p. 28

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Racine – rhizome : La racine est unique, c’est une souche qui prend tout sur elle et tue alentour; ils lui opposent le rhizome qui est une racine démultipliée, étendue en réseaux dans la terre ou dans l’air, sans qu’aucune souche y intervienne en prédateur irrémédiable. La notion de rhizome maintiendrait donc le fait de l’enracinement, mais récuse l’idée d’une racine totalitaire. La pensée du rhizome serait au principe de ce que j’appelle une poétique de la Relation, selon laquelle toute identité s’étend dans un rapport à l’Autre.

Poétique de la relation , 1990 p. 23 : L’ERRANCE, L’EXIL

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Rhizome :

A la différence des arbres ou de leurs racines, le rhizome connecte un point quelconque à un autre point, et chacun

de ces traits ne renvoie pas nécessairement à des traits de même nature, il met en jeu des régimes de signes très différents et même des états de non-signes.( ….)Il n’est pas fait d’unités mais de dimensions, ou plutôt de directions mouvantes. Il n’a pas de commencement ni de fin mais toujours un milieu, par lequel il pousse et déborde. (…) A l’opposé d’une structure qui se définit par un ensemble de points et de positions, de rapports binaires entre ces points et de relations biunivoques entre ces positions, le rhizome n’est fait que de lignes : lignes de segmentarité, de stratifications, comme dimensions, mais aussi ligne de fuite ou de déterritorialisation comme dimension maximale d’après laquelle, ne la suivant, la multiplicité se métamorphose en changeant de nature. On ne confondra pas de telles lignes, ou linéaments, avec les lignées de type arborescent, qui sont seulement des liaisons localisables entre points et positions.

Gilles DELEUZE, Félix GUATARI Milles Plateaux , p 31

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Identité: L’ancienne pensée de l’identité comme racine conduit imparablement, là où elle se révèle difficile à définir ou impossible à maintenir, aux refuges généralisants de l’universel comme valeur. (…) L’identité comme système de relation, comme aptitude à « donner avec » est à l’opposé une forme de violence qui conteste l’universel généralisant et requiert d’autant plus la sévère exigence des spécificités. Mais elle est difficile à équilibrer.

Poétique de la relation , 1990 p. 156 : LES ECARTS DETERMINANTS

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L’identité- racine

- est lointainement fondée dans une vision, un mythe, de la création du monde;- est sanctifiée par la violence cachée d’une filiation qui découle avec rigueur de cet épisode fondateur;- est ratifiée par la prétention à la légitimité, qui permet à une communauté de proclamer son droit à la possession d’une terre, laquelle devient un territoire;- est préservée, par la projection sur d’autres territoires qu’il devient légitime de conquérir – et par le projet d’un savoir.

-L’identité –racine a donc ensouché la pensée de soi et du territoire, mobilisé la pensée de l’autre et du voyage.

Poétique de la relation , 1990 p. 157, 158 : LES ECARTS DETERMINANTS

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L’identité- relation

- est liée, non pas à une création du monde, mais au vécu conscient et contradictoire des contacts de cultures ; - est donnée dans la trame chaotique de la Relation et non pas dans la violence cachée de la filiation;- ne conçoit aucune légitimité comme garante de son droit, mais circule dans une étendue nouvelle;-Ne se représente pas une terre comme un territoire, d’où on projette vers d’autres territoires, mais comme un lieu où on « donne avec » en place de « com-prendre ».-L’identité-relation exulte la pensée de l’errance et de la totalité.

Poétique de la relation , 1990 p. 158 : LES ECARTS DETERMINANTS

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La carte du passeur de langues

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Le Tout-Monde

J'appelle Tout-monde notre univers tel qu'il change et perdure en échangeant et, en même temps, la "vision" que nous en avons. La totalité-monde dans sa diversité physique et dans les représentations qu'elle nous inspire : que nous ne saurions plus chanter, dire ni travailler à souffrance à partir de notre seul lieu, sans plonger à l'imaginaire de cette totalité.

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Le postulat

Le passeur de langues

MULTILINGUE + RHIZOME

Il est celui qui non seulement enjambe les frontières linguistiques mais aussi celui qui permet à d’autres de le faire.

Il a en effet, la capacité de transposer les normes et codes d’une langue et d’une culture dans une autre sans que cela n’affecte sa propre hiérarchie de valeurs.

Il a donc la capacité d’engendrer un flux, une circulation dynamique qui permet au système de se (re)générer.

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Archipélique :

La réalité archipélique dans la Caraïbe ou dans le Pacifique, illustre naturellement la pensée de la Relation, sans qu’il faille en déduire quelque avantage de situation que ce soit.

Poétique de la relation , 1990 p. 46 : POETIQUES

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N’y a t-il pas en Orient, notamment en Océanie comme un modèle rhizomatique qui s’oppose à tous égards au modèle occidental de l’arbre ?

Gilles Deleuze, Felix Guattari, Milles Plateaux p.28